VI. LA LUTTE CONTRE LE NARCOTRAFIC

Le taux de criminalité de la Guyane est le plus élevé de France , avec notamment 144 vols à main armée par an. La situation est bien connue depuis le rapport 4 ( * ) d'Olivier Cigolotti et Antoine Karam sur les « mules » qui ramènent la cocaïne de Guyane vers la métropole par la voie aérienne. Les chiffres fournis à Cayenne à la mission par le Procureur de la République sont saisissants : la production mondiale de cocaïne a triplé en 10 ans. Les trafiquants ont mis en place une stratégie d'inondation des marchés et de saturation des dispositifs de contrôle. La Guyane est la porte d'entrée vers l'Europe. Le trafic entre Cayenne et Orly est estimé à 4 tonnes par an, soit 20 % des entrées de cocaïne en France . Dans chaque vol Cayenne-Paris, il y aurait 20 à 30 passeurs, dissimulant en moyenne 2 kg de cocaïne, soit 40 à 60 kg par vol.

Sur 800 comparutions immédiates en Guyane en 2020, 600 concernaient le trafic de drogue. Outre l'enjeu qu'il représente en termes de santé publique, le trafic de cocaïne en provenance de Guyane pose des problèmes d'ordre public . Il gangrène tout le territoire métropolitain, avec une prédilection pour les villes de province, où il alimente la délinquance et l'économie parallèle. En Guyane, ce trafic est très rentable : acheté 3 500 € le kilo, la cocaïne peut être revendue dix fois plus cher dans l'Hexagone. Les actes de violence liés au trafic se développent. L'ouest du département est particulièrement touché et le Procureur de la République n'a pas caché le risque d'une dérive mafieuse.

Un détachement de l'office anti-stupéfiant (OFAST) a été créé à Cayenne et un plan interministériel a été mis en place. Il a permis une intensification des contrôles et une meilleure coordination entre les acteurs. Sur le plan judiciaire, une procédure simplifiée de plaider coupable et de déferrement a été mise en place, seuls les récidivistes paraissant en comparution immédiate. Un effectif de 12 officiers de police judiciaire de l'OFAST se concentre sur le traitement des filières logistiques ; les donneurs d'ordre sont au Suriname. Des arrêtés préfectoraux d'interdiction d'embarquer, procédure inventée à Cayenne, surnommés « arrêtés anti-mules » se sont avérés particulièrement efficace (700 arrêtés ont été pris en 2019).

Sur le plan des moyens, en juin dernier, ont été installés à l'aéroport de Cayenne deux scanners à ondes millimétriques, qui ont permis la saisie de 22 kg de drogue. Des saisies récentes - 600 kg saisis dans un véhicule en direction du port ; une saisie dans des containers sous un bâtiment ravitaillant le centre spatial - font craindre une massification et une diversification des flux logistiques. Le service des douanes a estimé que la voie postale était également utilisée. En outre, les filières de soutien logistique sont communes à tous les trafics : drogue, or, migrants, etc. Elles concentrent donc les efforts des services de lutte.


* 4 https://www.senat.fr/notice-rapport/2019/r19-707-notice.html

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