CONCLUSION GÉNÉRALE

Les travaux de prospective menés lors des auditions et lors de la table ronde du 23 septembre 2020 montrent que la transformation des mobilités est à la fois possible et souhaitable dans les espaces peu denses , d'autant qu'elle apparaît comme une nécessité sociale et écologique. Cette transformation s'appuiera sur les changements sociologiques et technologiques qui sont déjà en cours, et qui dessinent un nouvel avenir pour ces espaces.

Si les « grands espaces » sont très prisés des Français, le renouveau rural n'est pas un phénomène uniforme dans l'ensemble de l'hexagone.

L'expérience du confinement avec la crise de la Covid-19 a fait prendre conscience que d'autres modes de vie sont possibles et que certains déplacements peuvent être évités par une meilleure accessibilité aux services, à l'emploi, à l'habitat et aux lieux de vie. Se déplacer est une contrainte pour le travail ou les études mais reste une attente pour les activités de loisir ou la vie sociale. Il convient toutefois de rester attentif aux mouvements de population qui pourraient être facilités par le développement du télétravail. Si une telle dynamique se révélait massive, de grands changements interviendraient dans les campagnes, notamment sur le marché immobilier au risque de remettre en question les objectifs de non-artificialisation supplémentaire des sols.

La loi d'orientation des mobilités, prenant acte des fortes évolutions dans les espaces denses, a affirmé un droit à la mobilité pour tous et a couvert le territoire d'AOM. Or, dans les espaces peu denses, on constate une réticence pour des collectivités peu dotées en ingénierie et en moyens financiers à se lancer dans des plans ambitieux de mobilité. Il est inenvisageable de transformer en profondeur les mobilités du quotidien sur ces territoires sans y mener une politique publique structurée à la bonne échelle , c'est-à-dire au plus proche des bassins de mobilité. Or, ces périmètres dépassent pour l'essentiel les cadres administratifs des intercommunalités. Ainsi, dans une logique de meilleure accessibilité, il faut associer des outils de planification de l'espace et des temps (SCoT, PLUI-HD, bureaux des temps) pour créer des synergies entre les politiques d'aménagements au coeur desquelles sont les politiques de transports et de mobilités. C'est à travers ces outils et du volontarisme politique local que pourront être produites les solutions intermodales adaptées à la typologie des espaces peu denses : rural isolé, rural polarisé ou périurbain. Quant au très peu dense, il demande un doigté particulier. Les flux y étant tellement faibles, il ne conviendrait pas d'y systématiser des politiques publiques complexes et plus coûteuses que le recours au taxi.

Plutôt que de combattre les modes individuels ou collectifs, le constat est clair : la voiture est utilisée dans plus de 80 % des transports du quotidien, c'est pourquoi il convient de socialiser pour partie sa pratique en partageant sous différents modes son usage, qu'il s'agisse de transports à la demande, d'auto partage ou de la promesse des nouvelles pratiques du covoiturage courte distance dynamisées par le numérique. Enfin, les modes doux ne sont pas exclus à la campagne car près de la moitié des trajets du quotidien font moins de 3 kilomètres.

En promouvant ces solutions, il s'agit de mieux organiser dans une logique intermodale le rabattement vers les modes lourds que sont le ferroviaire et les services de cars réguliers. Il convient de renforcer les services et d'améliorer l'offre, notamment par un meilleur cadencement.

Tout cela ne peut se faire sans financement et nécessite de trouver à ces espaces une ingénierie adaptée et des moyens financiers pour investir et gérer ces nouvelles politiques de mobilité. C'est grâce à elles que la transformation des pratiques et des comportements sera enclenchée, et à travers ce nouvel écosystème et le développement d'un bouquet de mobilités sur mesure, que la transition écologique des mobilités pourra être réussie. C'est dans ce schéma que les ruptures technologiques doivent se produire et que les industriels, qui inventent les véhicules moins émetteurs, doivent s'inscrire.

Ainsi, comme le remarquait Gilles Dansart dans l'éditorial de la Mobilettre du 31 décembre 2020, « il ne s'agit pas non plus d'opposer la mobilité individuelle au transport collectif qui empoisonne le débat et ralentit les mutations ». En effet, une mobilité moderne et décarbonée est possible, y compris pour les espaces peu denses, en s'appuyant sur le triptyque « proximité, intermodalité, accessibilité » pour lutter contre les « mobilités à deux vitesses » entre territoires urbains bien pourvus et espaces peu denses déséquipés et sans autre alternative que la voiture . Il s'agit donc bien de lutter contre les fractures territoriales actuelles .

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