Le plafond du régime de l'achat innovant, fixé à 100 000 euros, est trop bas pour pouvoir soutenir l'innovation industrielle, dont les produits dépassent largement ce seuil.

Plusieurs options d'aménagement du dispositif sont envisageables.

Lors de la réunion de la mission d'information et de plusieurs créateurs de start-up de l'École polytechnique, il a été suggéré de fixer le seuil du marché innovant en fonction d'un pourcentage des dépenses de fonctionnement de la collectivité . L'idée est intéressante, mais risque de se heurter à la complexité de sa conception et surtout de sa mise en oeuvre.

Le Comité Richelieu 1 a plaidé pour une implication plus forte des territoires, au travers notamment de l'action de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) qui, en renforçant la transformation des territoires, notamment leur équipement numérique, pourrait du même coup favoriser le recours à des start-up ou des PME locales.

La mission d'information préconise le triplement du plafond, afin de le porter à 300 000 euros . Bien que ce seuil soit sans doute encore trop faible pour intégrer les gros démonstrateurs industriels, il permettra néanmoins d'accroître le nombre de projets pouvant faire l'objet de cette procédure.

Pour ce qui concerne les prestations plus lourdes, telles que des démonstrateurs industriels ou des modèles à l'échelle 1 : 1, Sylvain Dorschner 2 suggérait un second plafond, beaucoup plus élevé (de l'ordre de 1 à 6 millions d'euros).

Tripler le plafond de l'achat innovant pour le porter à 300 000 euros .

d) Former les acheteurs publics à l'achat innovant afin de faire évoluer les mentalités

Au-delà des mesures juridiques ou des aménagements suggérés précédemment, il convient, pour amplifier et banaliser l'achat innovant, de sensibiliser davantage les acheteurs à la question, au travers d'une pédagogie du risque .

Il faut introduire au sein des pouvoirs adjudicateurs et des entités adjudicatrices la culture du risque, afin d'amener les acheteurs à exploiter toutes les ressources du droit de la commande publique, ainsi qu'à « oser »

1 Audition du 10 février 2022.

2 Audition du 28 mars 2022.

sélectionner les soumissionnaires les plus compétents, fussent-ils des acteurs émergents.

C'est ce changement de mentalité que s'efforce d'encourager le directeur de l'Agence de l'innovation de défense, Emmanuel Chiva 1 , auprès du service des achats de la Direction générale de l'armement. Il a rappelé que ce dernier se félicitait de n'avoir pas eu un seul recours en dix ans et a ajouté : « Albert Einstein disait que celui qui n'a jamais échoué n'a jamais essayé, donc c'est normal, mais ce n'est pas souhaitable ». Il a insisté sur la nécessité pour les acheteurs d'apprendre à prendre des risques, tout en respectant les règles de la commande publique. Toutefois, une telle évolution ne saurait reposer sur la seule initiative des fonctionnaires affectés aux achats et exige une impulsion et un soutien de la part de la hiérarchie. De manière générale, la dynamique d'achat doit être plus agile.

Comme l'a déclaré André Loesekrug-Pietri, « plus les marchés publics sont précis, caractérisés, plus on encourage l'innovation incrémentale. On sécurise pour que le résultat en 2025 soit ce que l'on voulait en 2022, mais le monde aura changé trois fois entre-temps et on risque de tomber à côté ».

Selon l'économiste Nicolas Bouzou 2 , la rigidité des procédures d'achat public en France s'expliquerait par le fait que les besoins de l'administration lors de la passation des marchés ne sont pas assez formulés en demandes concrètes . Dans les pays anglo-saxons, quand la puissance publique passe commande, elle pose une question très concrète (« voici mon problème, comment pouvez-vous le résoudre ? »). Cette façon de procéder aurait révélé tout son intérêt au moment de la recherche de vaccins. Il a estimé qu'une telle méthode permettrait de mieux cibler les entreprises émergentes et de favoriser l'innovation.

Enfin, pour éviter que le choix d'une solution se révélant a posteriori inadaptée ne bride la prise de risque des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices dans les futurs appels d'offres, certains intervenants ont proposé la mise en place d'un fonds de garantie destiné à couvrir les acheteurs publics en cas de difficultés résultant du choix d'une solution innovante.

Engager une démarche générale de formation à l'achat innovant auprès des administrations .

e) Encourager l'adoption d'un small business act plus volontariste et accepter une forme de surfacturation des entreprises innovantes émergentes européennes

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