B. DEUXIÈME PARTIE : SUIVI DÉTAILLÉ DE L'APPLICATION DE LOIS DE L'ANNÉE PARLEMENTAIRE 2021-2022 RELEVANT DE LA COMPÉTENCE DE LA COMMISSION DES LOIS

(1) Loi n° 2021-1317 du 11 octobre 2021 permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce

Issue d'une initiative de Nathalie Goulet, sénateur de l'Orne, la loi n° 2021-1317 du 11 octobre 2021 vise, à titre principal, à corriger une malfaçon héritée de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, en ce qu'elle a privé d'éligibilité les membres en exercice et anciens membres du tribunal de commerce concerné ou des tribunaux limitrophes.

L'article 1er rétablit l'éligibilité aux fonctions de juge du tribunal de commerce les juges en exercice, et anciens juges, dans le tribunal de commerce et les tribunaux limitrophes d'une part et, d'autre part, restaure l'inéligibilité des personnes condamnées pénalement pour agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs, frappées d'une peine complémentaire d'interdiction professionnelle ou sanctionnées civilement au titre de législations étrangères relatives à l'insolvabilité des entreprises, équivalentes à la législation française.

L'article 2 limite à cinq le nombre de mandats, successifs ou non, qu'une même personne peut exercer en tant que juge consulaire dans un même tribunal.

L'article 3 impose, notamment, aux anciens juges, pour être électeurs, d'avoir exercé leurs fonctions pendant au moins six années, de n'avoir pas été déclarés démissionnaires et de ne pas être frappés d'inéligibilité.

L'article 4 proroge le mandat des délégués consulaires élus au cours de l'année 2016 jusqu'au 31 décembre 2021.

La loi n° 2021-1317 du 11 octobre 2021 permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce est d'application directe.

(2) Loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire

Composée de quatorze articles, la loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire poursuivait trois objectifs principaux :

- proroger l'ensemble des outils existants de lutte contre la crise sanitaire jusqu'au 31 juillet 2022, qu'il s'agisse de l'application du régime de gestion de la crise sanitaire comprenant la possibilité de conditionner l'accès à certains lieux à la présentation d'un passe sanitaire, des systèmes d'information créés pour lutter contre l'épidémie, ou de la faculté pour le Gouvernement d'activer le régime de l'état d'urgence sanitaire ;

- faciliter le contrôle du respect de l'obligation vaccinale contre la covid-19 ;

- proroger plusieurs mesures d'accompagnement face aux conséquences de la crise sanitaire.

1. Proroger et adapter les dispositifs de lutte contre la crise sanitaire jusqu'au 31 juillet 2021

a. Proroger l'application du régime de gestion de la crise sanitaire, du passe sanitaire et de l'état d'urgence sanitaire (articles 1er et 2)

En raison, à la date de l'examen du projet de loi, du contexte sanitaire encore incertain, du risque de voir émerger un nouveau variant et de l'approche des élections présidentielles rendant plus difficile la réunion du Parlement pendant le deuxième trimestre de l'année 2022, la loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, a maintenu la possibilité pour le Gouvernement d'activer les outils existants de gestion de l'épidémie afin de pouvoir réagir à toute nouvelle dégradation de la situation sanitaire jusqu'au 31 juillet 2022.

Les outils concernés étaient au nombre de trois.

Le régime de gestion de la crise sanitaire, tout d'abord. En vigueur depuis le 1er juin 2021, ce régime permettait au Premier ministre, par décret pris sur le rapport du ministre de la Santé, de prendre des mesures relatives aux déplacements, à l'ouverture et à l'accès aux établissements recevant du public et aux rassemblements de personnes. Alors que sans intervention du législateur ce régime aurait dû s'éteindre le 15 novembre 2021, son application a été prolongée jusqu'au 31 juillet 2022.

Le passe sanitaire ensuite. Initialement institué pour les grands rassemblements de personnes par la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire puis élargi par la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, cet outil permettait au Gouvernement de conditionner l'accès à certains lieux, établissements ou événements à la présentation d'une preuve de vaccination, d'un examen ne concluant pas à une contamination par la covid-19 ou d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par le virus. De la même manière, cet outil n'aurait plus pu être utilisé à compter du 15 novembre 2021 sans intervention du législateur. Il a également été prolongé jusqu'au 31 juillet 2022.

Le régime de l'état d'urgence sanitaire, enfin. Issu de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, ce régime, activé par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre de la Santé, attribuait au Gouvernement des prérogatives exceptionnelles pour faire face à une catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population. Au moment de la discussion du projet de loi, ce régime était en vigueur sur les seuls territoires de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de la Polynésie Française, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de la Nouvelle-Calédonie jusqu'au 15 novembre 2021, et ne pouvait être appliqué que jusqu'au 31 décembre 2021.

La loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire a ainsi repoussé la date de caducité de ce régime au 31 juillet 2022, et en a prolongé l'application concrète en Guyane et en Martinique au 31 décembre 2021 - les autres territoires où il était en application ont donc été à nouveau régis par le régime de gestion de la crise sanitaire à compter du 15 novembre 2021.

b. Mieux lutter contre la fraude au passe sanitaire (article 2)

Par ailleurs, le législateur a décidé de renforcer les sanctions contre la fraude au passe sanitaire.

Les lois n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire et n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire avaient créé un ensemble de sanctions pour encadrer la mise en oeuvre du passe sanitaire, tant à l'égard des exploitants ne contrôlant pas la présentation d'un passe sanitaire qu'aux personnes refusant de présenter le document ou présentant un document frauduleux.

Dans la loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, le législateur a souhaité clarifier la gradation entre la présentation d'un passe appartenant à autrui et l'établissement, l'utilisation, la transmission et la proposition d'un passe frauduleux, en prévoyant un double niveau d'incrimination :

- la transmission d'un passe sanitaire authentique à un tiers est restée sanctionnée, tout comme le fait d'entrer dans un lieu sans passe sanitaire ou avec un passe sanitaire appartenant à autrui, d'une contravention de la quatrième classe, de la cinquième classe en cas de récidive, et de six mois d'emprisonnement et 3 750 € d'amende si la violation était verbalisée à plus de trois reprises dans un délai de 30 jours ;

- le fait d'utiliser, d'établir, de transmettre ou de proposer un faux passe sanitaire est devenu sanctionné d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende.

c. Renforcer l'information du Parlement (article 3)

Le législateur, afin de préserver l'information du Parlement pour qu'il puisse exercer sa mission constitutionnelle de contrôle du Gouvernement dans cette période particulière, a prolongé jusqu'au 31 juillet 2022 l'obligation pour le Gouvernement de remettre au Parlement une évaluation de l'impact économique de l'application du passe sanitaire, tout en modifiant sa fréquence : d'hebdomadaire, le rapport est devenu mensuel.

Ces rapports ont été dûment rendus.

2. La stratégie suivie par le Gouvernement dans l'application des mesures de police sanitaire

a. Les principales mesures de police sanitaire prises sur le fondement des régimes de lutte contre la crise sanitaire entre le 10 novembre 2021 et le 22 janvier 2022

Le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire est venu rénover, à la suite de l'adoption de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, les mesures édictées par le Gouvernement pour lutter contre l'épidémie de covid-19. Modifié à de nombreuses reprises, il a servi de base juridique aux évolutions de la politique de lutte contre la covid-19. Entre le 10 novembre 2021, date de promulgation de la loi n° 2021-1465 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, et le 22 janvier 2022, date de promulgation de la loi n° 2022-46 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, ce décret a été modifié à seize reprises. L'arrivée de l'automne puis de l'hiver a en effet donné lieu à une forte reprise épidémique due au variant Delta, avant que n'apparaisse un nouveau variant dénommé Omicron.

Sans entrer dans le détail des très nombreuses mesures réglementaires prises par le Premier ministre, le ministre des solidarités et de la santé et les représentants de l'État au niveau local, l'on peut distinguer deux étapes principales.

Le pouvoir réglementaire a d'abord tenté d'endiguer l'arrivée du variant Omicron sur le territoire national par la limitation des déplacements internationaux. C'est ainsi que le décret n° 2021-1527 a en premier lieu interdit tout déplacement en provenance d'Afrique du Sud, du Botswana, d'Eswatini, du Lesotho, du Mozambique, de Namibie ou du Zimbabwe, pays où le variant Omicron est apparu et s'est diffusé, à compter de son entrée en vigueur le 26 novembre 2021 jusqu'au 29 novembre, avant que cette date ne soit portée au 1er décembre par le décret n° 2021-1533 puis au 4 décembre par le décret n° 2021-1546. Cette interdiction a ensuite été remplacée, à compter du 4 décembre 2021 (décret n° 2021-1568) par la nécessité de présenter :

- un test négatif et de justifier d'un motif impérieux pour les déplacements en provenance de ces pays et d'Île Maurice, du Malawi et de Zambie ;

- un passe sanitaire pour tous les déplacements en provenance d'un pays de l'Union européenne, d'Andorre, d'Islande, du Liechtenstein, de Monaco, de la Norvège, de Saint-Marin, du Saint-Siège ou de la Suisse ;

- un test négatif pour les déplacements en provenance du Royaume-Uni ;

- et un test négatif pour tous les autres déplacements internationaux à destination du territoire national.

Les déplacements en provenance du Royaume-Uni n'ont ensuite été possibles que s'ils se fondaient sur un motif impérieux414(*).

Une fois le variant Omicron installé sur le territoire français, le Gouvernement a dû modifier sa stratégie. Le Gouvernement a ainsi rapidement annoncé, dès le 17 décembre 2021, un nouveau projet de loi pour transformer le passe sanitaire en un passe vaccinal. Dans l'attente, et afin de mettre l'accent sur la campagne vaccinale et de limiter les interactions avant le vote de ce nouveau projet de loi, les salles de danse ont été à nouveau fermées par le décret n° 2021-1585 du 7 décembre 2021 puis le décret n° 2021-1957 du 31 décembre 2021 a réduit le délai pour effectuer la dose de rappel de 5 à 4 mois, interdit de manger et de boire dans les théâtres, les cinémas et les transports, et rétabli les jauges pour les événements accueillant du public à 2 000 personnes accueillies en intérieur et 5 000 en extérieur.

b. Le maintien de l'état d'urgence sanitaire dans certains territoires ultramarins

Parallèlement, la situation particulière dans les territoires ultramarins a conduit le Gouvernement à y maintenir en vigueur le régime de l'état d'urgence sanitaire.

Comme exposé précédemment, la loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire a prolongé l'application de ce régime en Guyane et en Martinique jusqu'au 31 décembre 2021 - les autres territoires où il était en application ont donc été à nouveau régis par le régime de gestion de la crise sanitaire à compter du 15 novembre 2021.

L'état d'urgence sanitaire a ensuite été déclaré par le décret n° 2021-1828 du 27 décembre 2021 déclarant l'état d'urgence sanitaire dans certains territoires de la République sur le territoire de La Réunion, à compter du 28 décembre 2021, et de la Martinique, à compter du 1er janvier 2022. La déclaration de l'activation de ce régime sur ce second territoire constitue en fait une prolongation, le Parlement étant simultanément saisi d'un projet de loi visant à proroger cet état d'urgence jusqu'au 31 mars 2022.

Le décret n° 2022-9 du 5 janvier 2022 déclarant l'état d'urgence sanitaire dans certains territoires de la République déclarait ensuite ce régime, à compter du 6 janvier 2022, sur les territoires de la Guadeloupe, de la Guyane, de Mayotte, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

La loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique a par la suite, d'une part, prorogé l'état d'urgence sanitaire déclaré sur les territoires de la Martinique, de La Réunion, de la Guadeloupe, de la Guyane, de Mayotte, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin jusqu'au 31 mars 2022 inclus et, d'autre part, prévu que si l'état d'urgence sanitaire était déclaré sur le territoire d'une autre collectivité ultramarine avant le 1er mars 2022, il serait applicable jusqu'au 31 mars 2022 inclus.

Le décret n° 2022-107 du 2 février 2022 a ensuite déclaré l'état d'urgence sanitaire en Nouvelle Calédonie à compter du 3 février 2022, celui-ci étant, en application de la loi n° 2022-46 précitée, applicable jusqu'au 31 mars 2022.

Un mois plus tard, le 2 mars 2022, il était mis fin en Guyane et à Mayotte à l'état d'urgence par le décret n° 2022-303 du 2 mars 2022 mettant fin à l'état d'urgence sanitaire en Guyane et à Mayotte - après près de trois ans d'application de ce régime sur le territoire guyanais415(*). Le 31 mars 2022, enfin, l'état d'urgence sanitaire était levé sur l'ensemble du territoire français.

3. Proroger plusieurs mesures d'accompagnement et d'adaptation pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire

a. Proroger les systèmes d'information créés pour lutter contre la covid-19 et permettre leur extension en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie

En cohérence avec la prolongation des outils de lutte contre la covid-19, le législateur a également prolongé jusqu'au 31 juillet 2022 la durée du système d'information national de dépistage (SI-DEP) et du traitement Contact Covid, qui sont les deux systèmes d'information créés à titre temporaire pour lutter contre l'épidémie de covid-19 (article 6).

Le législateur a également, par l'adoption de l'article 7 de la loi, permis à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie de se doter de systèmes d'information comparables en les autorisant à déroger au secret médical pour ce faire.

L'article 8 de la loi a quant à lui prévu que les dispositifs utilisés par les pharmaciens pour faciliter la saisie des résultats de dépistage dans le système d'information SI-DEP devrait répondre à des spécifications fixées par arrêté du ministre de la Santé. La fourniture et l'utilisation de dispositifs qui ne respectant pas ces spécifications seraient punies de cinq ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende.

Le législateur a enfin, contre l'avis du Sénat, tenté de créer un traitement de données spécifique pour les établissements d'enseignement scolaire permettant aux directeurs de ces établissements de connaître le statut virologique et vaccinal de leurs élèves, ainsi que leur statut de cas-contact. Ils auraient également eu la possibilité de procéder à des traitements locaux pour faciliter l'accès aux campagnes de vaccination et prévenir les risques de propagation du virus (article 9). Ce dispositif a cependant été censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2021-828 DC du 9 novembre 2021, le Conseil considérant qu'il portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée.

b. Permettre un meilleur contrôle de l'obligation vaccinale des soignants

Par l'article 4 de la loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, le législateur a choisi d'alléger les dispositions légales relatives aux modalités de contrôle du respect de l'obligation vaccinale contre la covid-19 afin de ménager au Gouvernement une plus grande souplesse dans la définition de la mise en oeuvre pratique de ce contrôle, en prévoyant dans la loi uniquement la répartition des responsabilités entre employeurs, responsables d'établissements de formation et ARS dans la mise en oeuvre du contrôle des différentes catégories de personnes soumises à l'obligation vaccinale.

Le décret n° 2021-1670 du 16 décembre 2021 modifiant le décret n° 2020-551 du 12 mai 2020 relatif aux systèmes d'information mentionnés à l'article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions et le décret n° 2020-1690 du 25 décembre 2020 autorisant la création d'un traitement de données à caractère personnel relatif aux vaccinations contre la covid-19 a en conséquence prévu les modalités nécessaires pour permettre aux employeurs des personnes exerçant leur activité dans le secteur de la santé et médico-social et soumises à l'obligation vaccinale d'accéder au statut vaccinal de ces personnes.

L'article 4 a également procédé à un alignement du quantum des peines applicables en cas d'usage de faux justificatifs de vaccination sur celui prévu en cas d'établissement de faux passes sanitaires, relevé à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.

c. Proroger plusieurs mesures d'accompagnement et d'adaptation pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire

La loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire comportait plusieurs mesures d'accompagnement et d'assouplissement pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire. Peuvent ainsi être cités :

- l'article 10, qui a prolongé les dispositifs liés à l'activité partielle, les règles d'utilisation des sommes collectées par les organismes de gestion collective au profit des titulaires de droits d'auteur et de droits voisins, ainsi que les modalités dérogatoires de fonctionnement des organes délibérants des collectivités territoriales ;

- l'article 11, qui a permis de conserver jusqu'au 31 octobre 2022 la possibilité, offerte par l'ordonnance n° 2020-1694 du 24 décembre 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19, d'apporter des adaptations aux modalités d'accès aux formations de l'enseignement supérieur et de délivrance des diplômes ;

- l'article 12, qui a prévu que pour la tenue de la prochaine élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, le mandataire devrait jouir de ses droits électoraux et être inscrit dans la même circonscription électorale pour l'élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger que le mandant - et non pas sur la même liste électorale ;

- l'article 13, qui a permis que les conditions de versement de l'indemnité versée par l'employeur au salarié en complément des indemnités journalières de l'assurance maladie en cas d'arrêt de travail justifié par un certificat médical, fixées de manière exceptionnelle par décret, soient prorogées jusqu'au 31 juillet 2022 ;

- et l'article 14, qui a prévu la prorogation de la validité des titres de formation professionnelle maritime en Nouvelle-Calédonie et Polynésie française. Le décret n° 2021-1799 du 23 décembre 2021 portant modification du décret n° 2020-480 du 27 avril 2020 portant mesures d'urgence en matière d'encadrement des activités et professions maritimes et du décret n° 2015-723 du 24 juin 2015 relatif à la délivrance des titres de formation professionnelle maritime et aux conditions d'exercice de fonctions à bord des navires armés au commerce, à la plaisance, à la pêche et aux cultures marines a permis l'entrée en vigueur effective de cet article.

La loi prévoyait également, contre l'avis du Sénat, d'habiliter le Gouvernement à adapter ou compléter par ordonnance, si nécessaire, le dispositif issu de la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2021 permettant de déroger par décret aux conditions de versement de l'indemnité complémentaire, d'adapter le régime de l'activité partielle de longue durée (APLD), ou de prendre des mesures relatives au fonctionnement des assemblées générales de copropriétaires. Ces habilitations à légiférer par ordonnances, supprimées par le Sénat, avait été rétablies par l'Assemblée nationale par des amendements d'origine parlementaire. Cette procédure d'adoption a été jugée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2021-828 DC du 9 novembre 2021, seul le Gouvernement pouvant demander au Parlement l'autorisation de prendre de telles ordonnances.

La loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire est entièrement applicable.

(3) Loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels

La loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021, dite « loi Matras », composée de 58 articles substantiellement modifiés lors de la navette parlementaire, constitue la dernière grande loi de sécurité civile, se plaçant dans la lignée de la loi de 1996 relative aux services d'incendie et de secours ou la loi de 2004 de modernisation de la sécurité civile.

Ses objectifs principaux étaient de renforcer l'attractivité et la reconnaissance du métier de sapeur-pompier professionnel et du volontariat, de procéder à une clarification des fonctions et des compétences des acteurs de la sécurité civile, notamment vis-à-vis des autres professions du domaine du secours médical, et d'améliorer la prise en charge des appels d'urgence.

Sur les 58 articles que compte la loi, 33 sont d'application directe et 25 prévoient au moins une mesure d'application réglementaire.

Au 31 mars 2023, deux des cinq rapports demandés par le Parlement lui ont été transmis par le Gouvernement et 23 mesures d'application ont été publiées, sur les 33 prévues. La majorité des dispositions de cette loi sont ainsi applicables.

I. Les principales dispositions de la loi

La loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 est articulée autour de cinq titres.

Ø Le titre Ier comporte les articles 1er à 20 et vise à « consolider notre modèle de sécurité civile ».

Les articles 1er, 2 et 6 procèdent à une redéfinition des opérations de secours et des compétences des services d'incendie et de secours, sur la base desquelles est déterminée la carence ambulancière. Est ainsi prévue, au niveau législatif, une prise en charge financière des interventions réalisées par les services d'incendie et de secours ne relevant pas de leurs compétences.

L'article 11 rend plus systématique l'élaboration de plans intercommunaux et communaux de sauvegarde, ayant vocation à « préparer la réponse aux situations de crise ». Dans le même esprit, l'article 15 consacre au niveau législatif les contrats territoriaux de réponse aux risques et aux effets potentiels de menaces (CoTTRiM), qui s'appliquent aux niveaux zonal et départemental.

L'article 12 renforce le rôle du préfet de département en cas de crise « susceptible de dépasser la réponse courante des acteurs assurant ou concourant à la protection générale des populations ou à la satisfaction de ses besoins prioritaires » en lui confiant explicitement la direction des opérations.

Les articles 13 et 14 instaurent une fonction de « correspondant incendie et secours » au sein des conseils municipaux et modifient la composition du conseil d'administration des services départementaux d'incendie et de secours pour permettre à ces correspondants d'y siéger au nom de leur commune.

Ø Le titre II comporte les articles 21 à 28 et vise à « moderniser le fonctionnement des services d'incendie et de secours ».

Outre des mesures techniques d'organisation des services d'incendie et de secours et la codification des dispositions relatives à la Conférence nationale des services d'incendie et de secours (CNSIS), ce titre impose, en son article 25, la parité au sein du conseil d'administration des services d'incendie et de secours.

Ø Le titre III comporte les articles 29 à 45 et vise à « conforter l'engagement et le volontariat ».

L'article 29 autorise les promotions à titre exceptionnel et posthume des sapeurs-pompiers auteurs d'actes particulièrement remarquables, décédés dans l'exercice de leurs fonctions.

L'article 30 donne la faculté au Premier ministre d'inscrire une mention « Mort pour le service de la République » sur l'acte de décès des agents, notamment les sapeurs-pompiers, auteurs d'actes particulièrement remarquables, décédés dans l'exercice de leurs fonctions. Les enfants de ces personnes peuvent se voir attribuer, toujours par le Premier ministre, la qualité de pupille de la République.

L'article 31 impose la devise de la République sur le fronton de tous les centres d'incendie et de secours.

L'article 32 abaisse de cinq ans la durée de service effectif ouvrant droit à la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance pour les sapeurs-pompiers volontaires.

L'article 36 autorise le don de jour de repos non pris au bénéfice d'un salarié ou d'un agent public engagé en qualité de sapeur-pompier volontaire.

L'article 37 intègre la qualité de sapeur-pompier volontaire dans les critères de notation des demandes de logement social.

L'article 45 instaure un label « employeur partenaire des sapeurs-pompiers » attribuable aux employeurs public ou privés ayant conclu une convention de disponibilité.

Ø Le titre IV comporte les articles 45 à 52 et vise à « renforcer la coproduction de sécurité civile ».

L'article 46 met en place une expérimentation de deux ans de plateformes communes de réception des appels d'urgence, dans l'objectif d'instituer un numéro unique d'appel d'urgence.

L'article 47 crée une réserve citoyenne des services d'incendie et de secours dans le cadre de la réserve civique mise en place en 2017.

Ø Le titre V comporte les articles 53 à 58 et vise à « mieux protéger les acteurs de la sécurité civile ».

L'article 53 élargit les cas dans lesquels les services d'incendie et de secours peuvent se constituer partie civile en cas d'incendie volontaire, afin de recevoir réparation pour les frais engendrés pour lutter contre l'incendie.

L'article 55 aggrave les peines d'outrage envers les sapeurs-pompiers, en les alignant sur celles encourues en cas d'outrage à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique.

Enfin, l'article 57 généralise la faculté, pour les sapeurs-pompiers, de faire usage de de caméra mobiles lors de leurs interventions.

II. Une loi majoritairement applicable

La plupart des dispositions de la loi n° 2021-1520 du 21 novembre 2021 sont d'application directe ou ont fait l'objet de la publication d'une mesure réglementaire. Par ailleurs, deux mesures réglementaires prévues par la loi n° 2021-1520 sont satisfaites par des décrets antérieurs à la promulgation de la loi, les articles s'y rattachant sont donc considérés comme directement applicables416(*).

1. Les mesures d'application publiées

Au 31 mars 2023, 23 des 33 mesures réglementaires prévues par la loi n° 2021-1520 ont été prises, à travers la publication de 16 décrets et de 3 arrêtés, certains de ces textes s'appliquant à plusieurs mesures réglementaires. En outre, deux arrêtés417(*) non prévus par la loi ont été publiés.

- Pris en application de l'article 2 de la loi, le décret n° 2022-621 du 22 avril 2022 et l'arrêté du 19 août 2022 ont précisé le domaine de compétence des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires lors de leurs interventions de secours à la personne. C'est sur la base de ces compétences que peut être déterminée la carence ambulancière. À ce titre, l'arrêté du 22 avril 2022, pris en application de l'article 6 de la loi, fixe à 200 € le tarif national d'indemnisation des Services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) par le service d'aide médicale urgente du département. L'arrêté du 13 juillet 2022 relatif à l'engagement de moyens par les Services d'incendie et de secours (SIS) sur le réseau routier et autoroutier concédé, pris en application du même article 6, détermine quant à lui les modalités de prise en charge financière des interventions des SIS sur le réseau concédé. Ces interventions sont prises en charge par la société concessionnaire sur la base d'un coût unitaire forfaitaire fixé pour 2022 à 441,44 € pour les secours et soins d'urgence aux personnes ou secours d'un animal, à 556,43 € pour les secours pour accident de circulation entre véhicules et à 454,42 € pour les autres opérations. Un tarif horaire par véhicule mobilisé par les SIS complète cette base forfaitaire.

- Le décret n° 2022-1532 du 8 décembre 2022, pris en application de l'article 11 de la loi, détermine les modalités d'organisation des exercices des plans communaux et intercommunaux de sauvegarde. À ce titre, il impose des exercices « réguliers », l'association de la population de la commune et l'élaboration d'un retour d'expérience après chaque exercice. Le décret n° 2022-907 du 20 juin 2022, également pris en application du même article 11, précise quant à lui le contenu de ces plans communaux et intercommunaux de sauvegarde ainsi que les modalités de leur élaboration. Il confie notamment au maire et au président de l'EPCI la responsabilité de leur élaboration ainsi que la préparation aux situations de crise.

- Le décret n° 2022-1091 du 29 juillet 2022, pris en application de l'article 13 de la loi, précise que le correspondant « incendie et secours » que doit comprendre chaque conseil municipal est nommé directement par le maire. Le décret liste les actions que peut, à ce titre et sous l'autorité du maire, mener le correspondant incendie et secours, notamment la participation à l'élaboration des arrêtés relatifs au service local d'incendie et de secours. Ces actions doivent faire l'objet d'une information « périodique » au conseil municipal.

- Le décret n° 2022-1316 du 13 octobre 2022 détermine, conformément à l'article 15 de la loi, le contenu des contrats territoriaux de réponse aux risques et aux effets potentiels des menaces (CoTRRiM) qui constituent « un outil interministériel d'études, d'évaluation et de préparation de la gestion des crises ».

- Pris en application de l'article 27 de la loi, le décret n° 2022-557 du 14 avril 2022 porte diverses mesures relatives aux sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, dont la principale est la déconcentration de la gestion des officiers supérieurs. À cette fin, le décret établit les conditions dans lesquelles les officiers ou les sous-officiers peuvent être nommés dans leurs grades, emplois ou fonctions conjointement par le préfet et, selon les cas, le président du conseil d'administration du SIS, le maire ou le président de l'EPCI.

- Les décrets n° 2022-425 du 25 mars 2022, n° 2022-618 du 22 avril 2022 et n° 2023-124 du 22 février 2023 portent application des articles 29 et 30 de la loi, relatifs aux promotions à titre exceptionnel des sapeurs-pompiers auteurs d'actes particulièrement remarquables, à l'attribution de la mention « Mort pour le service de la République » pour les professionnels de santé et à l'octroi de la qualité de « pupille de la République » aux enfants des professionnels concernés. Ces décrets prévoient notamment la création d'une « commission des promotions à titre exceptionnel » placée auprès du ministre chargé de la sécurité civile, la création d'une commission chargée d'émettre un avis à destination du Premier ministre sur chaque demande d'attribution de la mention « Mort pour le service de la République » ou encore l'alignement du régime des bourses des pupilles de la République sur celui des pupilles de la Nation.

- Les modalités d'application de l'article 34 de la loi ont été précisées par le décret n° 2022-620 du 22 avril 2022, redéfinissant les seuils de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance allouée aux sapeurs-pompiers volontaires (pouvant atteindre 1 992,11 euros par an pour au moins 35 années de service), et le décret n° 2022-1403 du 3 mars 2022, qui fixe les modalités de collecte des informations nécessaires à la mise en oeuvre du compte d'engagement citoyen des sapeurs-pompiers volontaires et des réservistes citoyens des services d'incendie et de secours. Cette mission de collecte est confiée à l'association nationale pour la prestation de fidélisation et de reconnaissance (APFR), à laquelle doivent obligatoirement adhérer tous les SDIS.

- Le décret n° 2023-220 du 28 mars 2023, pris en application de l'article 37 de la loi, permet aux établissements publics de coopération intercommunale tenus de se doter d'un programme local de l'habitat ou ayant la compétence en matière d'habitat de retenir un objectif d'attribution territorialisé de logements sociaux destinés aux sapeurs-pompiers volontaires et situés à proximité des centres d'incendie et de secours.

- Le décret n° 2021-1569 du 3 décembre 2021, pris en application de l'article 43 de la loi, habilite, sous conditions, les unions départementales des sapeurs-pompiers et les associations départementales des jeunes sapeurs-pompiers à assurer la formation et le brevet national de jeune sapeur-pompier et de jeune marin-pompier, dont la condition d'âge est fixée de onze à dix-huit ans.

- Le décret n° 2022-1116 du 4 août 2022 précise, en application de l'article 45 de la loi, les modalités d'obtention des labels « employeur partenaire national des sapeurs-pompiers » et « employeur partenaire des sapeurs-pompiers ». Peuvent y prétendre les employeurs ayant signé une convention, nationale ou départementale, favorisant le volontariat des sapeurs-pompiers et prévoyant un nombre annuel minimal de huit jours ouvrés d'autorisation d'absence sur le temps de travail du salarié.

- Le décret n° 2023-101 du 15 février 2023, pris en application de l'article 52 de la loi, précise que les contrôles, programmés ou inopinés, que le préfet peut effectuer sur les organismes ou les associations habilités en matière de sécurité civile peuvent s'exercer sur pièce ou sur place.

- Enfin, le décret n° 2022-1522 du 7 décembre 2022 porte application de l'article 56 de la loi en précisant que le référent mixité et lutte contre les discriminations et le référent sûreté et sécurité des services départementaux et territoriaux d'incendie et de secours sont nommés conjointement par le préfet et le président du conseil d'administration du SIS, pour une durée fixée par ces derniers. Ce décret détermine en outre les missions respectives de ces référents.

2. Les mesures d'application manquantes

a) Les mesures réglementaires

Au 31 mars 2023, dix mesures réglementaires n'avaient toujours pas été adoptées :

- le décret fixant les conditions et les modalités de recours amiable en cas de désaccord relatif aux carences ambulancières entre le service d'incendie et de secours et le service d'aide médicale d'urgence, prévu à l'article 6 de la loi ;

- le décret définissant les modalités de communication, par le maire, à la population sur les risques majeurs auxquels est exposée la commune et sur les mesures de prévention, d'alerte, d'organisation des secours et de sauvegarde pour y faire face, prévu à l'article 10 de la loi ;

- le décret fixant les conditions dans lesquelles les opérateurs téléphoniques doivent assurer une remontée d'alerte en cas d'appel d'urgence, prévu à l'article 17 de la loi ;

- le décret ou l'arrêté fixant les conditions dans lesquelles les officiers de sapeurs-pompiers professionnels de Saint-Barthélemy peuvent être nommés dans leurs grades, emplois ou fonctions par le préfet et le président du conseil territorial, prévu à l'article 27 de la loi ;

- le décret ou l'arrêté fixant les conditions dans lesquelles les officiers et les sous-officiers de sapeurs-pompiers volontaires de Saint-Barthélemy peuvent être nommés dans leurs grades, emplois ou fonctions par le préfet et le président du conseil territorial, prévu à l'article 27 de la loi ;

- le décret fixant les conditions dans lesquelles les agents publics civils et militaires peuvent bénéficier de la faculté, ouverte aux salariés, de renoncer à des jours de repos non pris en faveur d'un sapeur-pompier volontaire, prévu à l'article 36 de la loi ;

- l'arrêté désignant les membres du comité d'évaluation de l'expérimentation d'un numéro unique d'appel d'urgence, prévu à l'article 46 de la loi ;

- le décret ou l'arrêté déterminant les conditions et les modalités dans lesquelles les étudiants en soins infirmiers peuvent réaliser un stage au sein d'un service d'incendie et de secours, prévu à l'article 48 de la loi ;

- le décret ou l'arrêté déterminant les conditions et les modalités dans lesquelles les étudiants en médecine, odontologie, maïeutique et pharmacie peuvent réaliser un stage au sein d'un service d'incendie et de secours, prévu à l'article 48 de la loi ;

- enfin, le décret en Conseil d'État précisant les modalités d'utilisation des données collectées par les sapeurs-pompiers et les marins-pompiers lorsque leurs interventions donnent lieu à un enregistrement audiovisuel à l'aide d'une caméra individuelle, prévu à l'article 57 de la loi.

b) Les demandes de rapport

En outre, seules deux des cinq demandes de rapport au Gouvernement formulées par le législateur ont été satisfaites. Les trois rapports suivants n'ont ainsi pas été transmis au Parlement :

- le rapport dressant le bilan de la formation des officiers de sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, prévu à l'article 28 de la loi ;

- le bilan des activités des plateformes communes déjà existantes de traitement des appels d'urgence à destination des services d'incendie et de secours et des services d'aide médicale urgente, prévu à l'article 46 de la loi ;

- et le rapport dressant le bilan de l'expérimentation d'un numéro unique d'appel d'urgence et proposant un référentiel fixant les modalités de fonctionnement des plateformes communes de traitement de ces appels, prévu à l'article 46 de la loi.

La loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 demeure donc partiellement applicable.

(4) Loi n° 2021-1576 du 7 décembre 2021 visant à nommer les enfants nés sans vie

La loi n° 2021-1576 du 6 décembre 2021 visant à nommer les enfants nés sans vie a été adoptée à l'initiative d'Anne-Catherine Loisier, sénatrice de la Côte-d'Or, pour mieux accompagner le deuil des parents.

Son article unique, d'application directe, permet l'inscription d'un nom et d'un prénom dans l'acte d'enfant sans vie418(*) inscrit dans le registre des décès, en plus des mentions déjà prévues419(*). Compte tenu de l'absence de personnalité juridique des enfants sans vie, le texte précise que cette inscription de prénoms et nom n'emporte aucun effet juridique.

Adoptée à l'identique par l'Assemblée nationale dès la première lecture, cette loi est applicable depuis le 8 décembre 2021, y compris aux actes d'enfant sans vie déjà établis, comme l'a précisé la circulaire du garde des sceaux du 12 juillet 2022420(*).

Le décret n° 74-449 du 15 mai 1974 modifié relatif au livret de famille et à l'information des futurs époux sur le droit de la famille a été adapté pour prévoir également la possibilité d'inscrire sur le livret de famille les prénoms et nom de l'enfant sans vie421(*).

La loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation est d'application directe.

(5) Loi organique n° 2021-1728 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire

La loi organique n° 2021-1728 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire est, suite à la censure de son article 4 par le Conseil constitutionnel (décision n° 2021-829 DC du 17 décembre 2022), composée de quatre articles.

L'article 1er précise le régime selon lequel les magistrats à titre temporaire (MTT) pourront être appelés à siéger au sein des cours criminelles départementales et des cours d'assises. Il procède à une extension de la possibilité de recrutement de ces magistrats en ouvrant la possibilité pour des fonctionnaires de devenir en parallèle MTT. Enfin, il étend le rôle des magistrats honoraires qui pourront exercer l'ensemble des compétences des magistrats exerçant à titre temporaire.

L'article 2 tire les conséquences de la généralisation des cours criminelles départementales en abrogeant les dispositions qui avaient été prises pour la durée de leur expérimentation.

L'article 3 fixe le statut de l'avocat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

L'article 4 qui visait à permettre « de droit » l'enregistrement et la diffusion des audiences devant la Cour de justice de la République a été censuré par le Conseil constitutionnel, le législateur n'ayant pas épuisé sa compétence.

L'article 5 fixait au 1er janvier 2023 l'entrée en vigueur de l'article 2.

Le décret en Conseil d'État n°2022-792 du 6 mai 2022 a déterminé les conditions dans lesquelles les avocats honoraires souhaitant exercer les fonctions d'assesseur des cours criminelles départementales peuvent faire acte de candidature ; les modalités de formation à ces fonctions et l'indemnisation de leur exercice. Cette mesure réglementaire était la seule obligatoirement prévue par la loi organique.

La loi organique n° 2021-1728 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire est entièrement applicable.

(6) Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire

La loi n° 2021-1729 organique du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire rassemble des dispositions assez hétéroclites et de portée inégale.

Certaines mesures concernent le déroulement de l'enquête préliminaire ou les droits de la défense. D'autres prolongent des évolutions récentes, tendant à spécialiser des juridictions ou à faire appel à des magistrats non professionnels pour pallier le manque d'effectifs dans les tribunaux. Les mesures relatives aux professionnels du droit sont le fruit de réflexions plus techniques conduites par plusieurs commissions ou inspections au cours des dernières années. Le garde des sceaux, Éric Dupond-Moretti, a également porté le projet de donner une meilleure visibilité à la justice en autorisant l'enregistrement et la diffusion de certaines audiences.

Plusieurs mesures ont été adoptées en réaction à l'actualité et motivées par la volonté de donner des gages à l'opinion publique. La suppression du rappel à la loi à l'Assemblée nationale avant son remplacement, au Sénat, par l'avertissement pénal probatoire s'est opérée dans une certaine improvisation. De même, l'extension du secret professionnel de l'avocat à l'activité de conseil en matière pénale (article 3 de la loi) a nécessité d'importantes discussions, conduisant à l'adoption au stade de la lecture en séance publique des conclusions de la commission mixte paritaire à des amendements de fond, avant de pouvoir aboutir à un dispositif finalement validé par le Conseil constitutionnel (décision n° 2022-1030 QPC du 19 janvier 2023).

Signe de la difficulté à mettre en oeuvre certaines dispositions de la loi, l'encadrement à deux ans de l'enquête préliminaire (article 2 de la loi), présenté comme une garantie des droits de la défense mais difficile à mettre en oeuvre dans un contexte de faiblesse des moyens d'enquête, semble devoir être assoupli à l'occasion d'un prochain texte.

I. Une loi largement mise en application

21 des 22 mesures réglementaires prévues par la loi ont été prises, permettant l'application du texte à 95 %.

De façon générale :

- le décret n° 2022-462 du 31 mars 2022 pris pour l'application de l'article 1er de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire fixe les conditions d'autorisation d'enregistrement d'une audience et de sa diffusion ;

- le décret n° 2022-67 du 20 janvier 2022 relatif à la procédure applicable aux crimes sériels ou non élucidés, pris pour l'application de l'article 8 désigne ainsi le tribunal judiciaire de Nanterre comme pôle spécialisé pour connaître de ces procédures et précise comment se dérouleront les procédures tendant à retracer l'éventuel parcours criminel d'une personne soupçonnée de crimes sériels. Il a été complété par le décret n° 2022-236 du 24 février 2022 fixant les compétences de procureur de la République de Nanterre et des officiers de police judiciaire pour retracer l'éventuel parcours criminel d'une personne soupçonnée de crimes sériels ;

- le décret n° 2022-16 du 7 janvier 2022 relatif au comité d'évaluation et de suivi de la cour criminelle départementale, pris sur le fondement de l'article 9 généralisant ces cours, a fixé la composition de ce comité, qui comprend deux sénateurs. Le comité a rendu son rapport en octobre 2022 ;

- l'arrêté du 22 septembre 2022 relatif à l'expérimentation permettant la désignation dans les cours criminelles départementales d'avocats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles en qualité d'assesseurs a été pris pour l'application de l'article 10 ;

- le décret n° 2022-1261 du 28 septembre 2022 relatif à la libération sous contrainte de plein droit et aux réductions de peine précise les modalités de mise en oeuvre de la libération sous contrainte prévue au II de l'article 720 du code de procédure pénale ainsi que celles de l'article 721 du même code qui prévoit qu'une réduction de peine peut être accordée par le juge de l'application des peines, après avis de la commission de l'application des peines, aux personnes condamnées exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté qui ont donné des preuves suffisantes de bonne conduite et qui ont manifesté des efforts sérieux de réinsertion. Il détermine notamment les modalités d'octroi ou de retrait de ces réductions (article 11) ;

- le décret n° 2022-1710 du 29 décembre 2022 modifiant la partie réglementaire du code pénitentiaire a complété sa partie réglementaire par diverses dispositions concernant l'implantation des maisons d'arrêt, les annexes du code pénitentiaire, l'affectation de la part disponible du compte nominatif des personnes détenues évadées (au profit des victimes et du Trésor), la remise à l'administration chargée des domaines des objets appartenant à ces personnes, et a abrogé des dispositions obsolètes (article 13) ;

- le décret n° 2022-889 du 14 juin 2022 pris pour l'application de l'article 523 du code de procédure pénale exclut les contraventions de presse de la cinquième classe de la compétence du tribunal de police lorsque celui-ci sera, en application des dispositions modifiées de cet article, composé par un magistrat à titre temporaire ou un magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles (article 14).

Trois textes mettent en oeuvre la réforme du travail en détention :

- le décret n° 2022-655 du 25 avril 2022 relatif au travail des personnes détenues et modifiant le code pénitentiaire, pris sur le fondement de l'article 20, encadre l'accès au travail en détention et la relation de travail entre la personne détenue, le service, l'entreprise ou la structure chargée de l'activité de travail en détention et l'administration pénitentiaire.

Il a été complété par le décret n° 2022-917 du 21 juin 2022 portant diverses dispositions relatives au contrat d'emploi pénitentiaire ;

- sur le fondement de l'article 22, l'ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022 relative aux droits sociaux des personnes détenues permet notamment l'ouverture, au titre des cotisations versées par les personnes détenues et leurs employeurs, d'un ensemble de droits (assurances vieillesse, chômage, maternité) et leur ouvre des droits à la formation ;

- l'ordonnance n° 2022-478 du 30 mars 2022 portant partie législative du code pénitentiaire rassemble, à droit constant, les dispositions relatives au service public pénitentiaire, au contrôle et à la prise en charge des personnes qui lui sont confiées ainsi qu'aux droits et obligations de ces dernières (article 24) ;

- le décret n° 2022-433 du 25 mars 2022 fixe la procédure de médiation préalable obligatoire applicable à certains litiges de la fonction publique et à certains litiges sociaux prévue par l'article 27 de la loi.

Deux textes mettent en oeuvre les codes de déontologie des officiers ministériels :

- le décret en Conseil d'État n° 2022-900 du 17 juin 2022 relatif à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels décret en Conseil d'État n° 2022-545 du 13 avril 2022 relatif aux collèges de déontologie des officiers ministériels ;

- l'ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels ;

- le décret n° 2022-1353 du 25 octobre 2022 relatif à la composition et aux modalités de fonctionnement du Conseil national de la médiation (article 45) ;

- l'ordonnance n° 2022-1524 du 7 décembre 2022 relative au casier judiciaire national automatisé prise pour l'application du règlement (UE) 2019/816 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 et de la directive (UE) 2019/884 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 découle de l'article 53 de la loi ;

- le décret n° 2022-79 du 27 janvier 2022 portant application de l'article L. 111-12-1 du code de l'organisation judiciaire fixe les conditions permettant de faire droit à la demande expresse d'être entendue par un moyen de communication audiovisuelle devant une juridiction civile.

II. Une mesure non prise

La possibilité ouverte par l'article 14 de recourir à la voie électronique pour la signification par voie d'huissier de justice à destination du ministère public, des parties civiles, des experts et des témoins ainsi que, lorsque ces personnes ne sont pas détenues, des prévenus ou des condamnés n'a toujours pas fait l'oeuvre d'une mesure d'application, notamment en raison du problème de fiabilisation de ces transmissions.

Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire est partiellement applicable.

(7) Loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique

Composée de dix-sept articles, la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique poursuivait cinq objectifs principaux :

- transformer le passe sanitaire en passe vaccinal, actant ainsi le retour à une logique de protection individuelle en lieu et place d'une logique de protection collective, et procéder à une extension limitée des cas dans lesquels sa présentation peut être exigée ;

- instituer un régime de sanction administrative pour les employeurs qui ne respecteraient pas les principes de prévention des risques d'exposition de leurs salariés à la covid-19 pour les situations constatées jusqu'à une date déterminée par décret et au plus tard le 31 juillet 2022 ;

- permettre l'utilisation de SI-DEP pour contrôler le respect d'une obligation de dépistage par les personnes placées en quarantaine ou en isolement ;

- proroger certaines dispositions législatives d'exception ;

- rénover le cadre juridique des mesures d'isolement ou de contention sur de longues durées.

Le projet de loi initialement déposé ne contenait que 3 articles ; au terme de la navette, il en comportait 17. Le coefficient multiplicateur est donc particulièrement élevé pour ce texte, égal à 5,6.

1. Le retour à une logique de protection individuelle : la transformation du passe sanitaire en passe vaccinal (article 1er)

a. La transformation du passe sanitaire en passe vaccinal

L'arrivée de l'automne puis de l'hiver 2022 avait donné lieu à une sixième vague épidémique, caractérisée à la fois par une forte reprise due au variant Delta et à la diffusion rapide du variant Omicron.

Face à la multiplication des cas de contamination, le législateur a décidé de transformer le passe sanitaire en passe vaccinal, permettant de subordonner à la présentation d'un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19, l'accès des personnes âgées d'au moins seize ans, aux activités de loisirs, aux activités de restauration commerciale ou de débits de boisson, aux foires, séminaires et salons professionnels, aux grands magasins et centres commerciaux ainsi qu'aux déplacements de longue distance par transport public interrégional au sein du territoire hexagonal, et ce jusqu'au 31 juillet 2022.

Le législateur a également rendu possible l'exigence par le Premier ministre d'un cumul d'un justificatif de statut vaccinal avec un test négatif lorsque les activités accueillies, par leur nature même, ne permettaient pas de garantir la mise en oeuvre des gestes barrières.

Par dérogation, un certificat de rétablissement ou un certificat de contre-indication à la vaccination pouvait se substituer au justificatif de statut vaccinal pour permettre aux personnes d'accéder aux lieux, établissements, services ou événements concernés. À l'initiative du Sénat, il a également été prévu que les personnes ayant engagé une démarche vaccinale pouvaient accéder aux lieux concernés par la présentation d'un passe vaccinal en présentant un résultat de test négatif, pour la durée nécessaire à l'achèvement de leur vaccination.

S'agissant des mineurs ayant entre 12 et 16 ans, le législateur a prévu qu'ils restaient soumis à l'obligation de présenter un passe sanitaire, c'est-à-dire qu'ils ont pu comme précédemment participer aux activités si le résultat négatif d'un test de dépistage était produit ou s'ils avaient été vaccinés.

Enfin, le législateur a permis aux organisateurs d'une réunion politique d'en subordonner l'accès à la présentation d'un passe sanitaire.

b. Ajuster les modalités de vérification éventuelle de l'identité et le régime des sanctions pour fraude

Le législateur a permis aux personnes et services autorisés à contrôler les différents types de passes de vérifier également l'identité de la personne présentant son passe, afin de s'assurer qu'elle en est bien son légitime propriétaire.

Enfin, et contre l'avis du Sénat, la loi a prévu que les personnes s'étant vu sanctionner pour détention d'un faux passe sanitaire ou vaccinal pouvaient échapper à toute poursuite si elles entraient dans une démarche de vaccination.

c. Faire face à la situation particulière des territoires ultramarins, dans une période de suspension parlementaire du fait des élections présidentielles

Afin de faire face à la situation particulière des territoires ultramarins, l'article 1er a prolongé l'état d'urgence sanitaire Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, en Martinique, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin jusqu'au 31 mars 2022. Le législateur a également prévu que si l'état d'urgence sanitaire devait être déclaré dans les autres territoires ultramarins, il pourrait être mis en oeuvre jusqu'à cette même date sans qu'une intervention du Parlement soit nécessaire après un délai d'un mois.

2. Les principales mesures de police sanitaire prises sur le fondement des régimes de lutte contre la crise sanitaire entre le 22 janvier 2021 et le 30 juillet 2022

Le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire est venu rénover a servi de base juridique, à compter du 1er juin 2021, aux évolutions de la politique de lutte contre la covid-19. Entre le 22 janvier 2022, date de promulgation de la loi n° 2022-46 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, et le 30 juillet 2022, date de promulgation de la loi n° 2022-1089 mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19, ce décret a été modifié à treize reprises.

Alors que la loi n° 2022-46 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique était en cours d'examen par le Conseil constitutionnel, le Gouvernement a présenté le 20 janvier 2022 le calendrier de la levée progressive des restrictions sanitaires et des nouvelles mesures mises en place.

Le passe vaccinal est entré en vigueur le 24 janvier 2022422(*). Le 15 février, le délai limite d'injection du rappel vaccinal a été réduit de sept à quatre mois (décret n° 2022-176 du 14 février 2022). L'application du passe vaccinal a finalement été levée le 14 mars 2022 (décret n° 2022-352 du 12 mars 2022).

S'agissant des autres mesures de police sanitaire :

- à compter du 2 février 2022, les jauges d'accueil ont été levées dans les établissements accueillant du public (décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022). Le télétravail en entreprise est devenu recommandé mais non plus obligatoire. L'obligation du port du masque dans l'espace public en extérieur a par ailleurs été levée ;

- à compter du 16 février 2022, les discothèques ont été autorisées à rouvrir et les concerts debout à reprendre tandis que la consommation de nourriture et de boissons était à nouveau possible dans les stades, les cinémas et les transports, de même que dans les bars (décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022) ;

- le 28 février 2022, le port du masque est devenu facultatif dans les lieux clos soumis au passe vaccinal, tandis qu'il était maintenu dans les lieux clos non soumis au passe vaccinal et dans les transports (décret n° 2022-247 du 25 février 2022) ;

- enfin, le 14 mars 2022, le port du masque n'était plus obligatoire dans les lieux fermés, à l'exception des transports et des établissements de santé. De même, avec la levée du passe vaccinal, seul le passe sanitaire pour accéder aux établissements de santé, aux maisons de retraites, et aux établissements accueillant des personnes en situation de handicap est demeuré en vigueur ;

- l'obligation du port du masque dans les transports a finalement été levée le 16 mai 2022, par le décret n° 2022-807 du 13 mai 2022.

3. L'institution d'un régime de sanction administrative pour les employeurs ne respectant pas les principes de prévention des risques d'exposition de leurs salariés à la covid-19

La loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique a prévu, dans son article 2 et en complément de la responsabilité pénale de l'employeur en matière de santé et de sécurité au travail, un régime de sanction administrative pour les employeurs qui ne respecteraient pas les principes de prévention des risques d'exposition de leurs salariés à la covid-19 pour les situations constatées jusqu'à une date déterminée par décret et au plus tard le 31 juillet 2022. Jusqu'à cette date, si l'inspection du travail considérait que les mesures de prévention prises par les entreprises sont insuffisantes, et après l'expiration du délai de mise en demeure, une amende de 1 000 euros par salarié pouvait être infligée à l'entreprise, dans la limite de 50 000 euros.

4. Permettre l'utilisation de SI-DEP pour contrôler le respect d'une obligation de dépistage par les personnes placées en quarantaine ou en isolement

L'article 16 de la loi a étendu les finalités pour lesquelles les systèmes d'information créés pour lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 pouvaient être utilisés, en y ajoutant le contrôle du respect d'une obligation de dépistage qui serait prononcée dans le cadre d'une mesure de mise en quarantaine ou de placement et de maintien en isolement.

En conséquence, les agents spécialement habilités des services préfectoraux ont été rendus destinataires des données « strictement nécessaires » à la poursuite de cette nouvelle finalité.

Le décret n° 2022-50 du 22 janvier 2022 modifiant le décret n° 2020-551 du 12 mai 2020 relatif aux systèmes d'information mentionnés à l'article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions a complété les finalités et la liste des destinataires pour permettre le contrôle, par les services préfectoraux, du respect de l'obligation de dépistage par les personnes faisant l'objet de mesures de mise en quarantaine ou de placement et de maintien en isolement.

5. Proroger certaines dispositions législatives d'exception

Par de nombreux amendements du Gouvernement au cours de la navette, la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique a prolongé un certain nombre de dispositifs d'exception. C'est ainsi le cas :

- de la prise en charge intégrale des consultations (article 3) ;

- de l'adaptation de la composition et du fonctionnement des cours d'assises (article 4) ;

- de l'application de l'aide aux médecins conventionnés affectés par les déprogrammations de soins (article 5) ;

- de la dérogation aux règles de cumul emploi-retraite pour les soignants (article 6) ;

- des mesures d'adaptation en matière d'examens et concours de la fonction publique (article 7) ;

- de la base légale de la garantie de financement des établissements de santé (article 8) ;

- de l'adaptation du fonctionnement des assemblées générales de copropriété (article 9) ;

- des possibilités de report des visites médicales prévues dans le cadre du suivi individuel de l'état de santé des travailleurs (article 10) ;

- des dispositifs d'exonération et d'aide au paiement des cotisations et contributions sociales au bénéfice des employeurs et travailleurs indépendants les plus touchés par la crise économique et sanitaire (article 11) ;

- de la possibilité de participer en visioconférence ou en audioconférence à l'assemblée générale d'une coopérative agricole (article 12) ;

- du dispositif de soutien aux entrepreneurs de spectacles vivants et aux organisateurs de manifestations sportives (article 14) ;

- et de la possibilité de prestation de serment devant une juridiction par écrit (article 15).

6. Rénover le cadre juridique des mesures d'isolement ou de contention sur de longues durées

À la suite de la censure par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2021-912/913/914 QPC du 4 juin 2021 d'une partie de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique encadrant l'usage de l'isolement, qui consiste à placer une personne hospitalisée dans une chambre fermée, et de la contention, qui vise à l'immobiliser, avec effet au 31 décembre 2021, l'article 3 de la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique a rénové le cadre juridique des mesures d'isolement ou de contention sur de longues durées.

L'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique pouvait en effet aboutir à ce que des mesures d'isolement ou de contention soient mises en oeuvre sur de longues durées en l'absence de tout contrôle judiciaire, ce qui était contraire aux exigences de l'article 66 de la Constitution.

Le législateur a en conséquence profondément remanié l'article L. 3222-5-1 dans la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique en prévoyant un cycle de contrôle organisé en trois temps : l'information, la saisine et la décision du juge.

Le décret n° 2022-419 du 23 mars 2022 modifiant la procédure applicable devant le juge des libertés et de la détention en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement a modifié en conséquence la partie réglementaire du code de la santé publique pour rendre applicable cette nouvelle procédure.

La loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique est entièrement applicable.

(8) Loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure

La loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure tire les conséquences de plusieurs censures du Conseil constitutionnel et entendait notamment fixer un régime de prise en compte du fait fautif de l'auteur d'un crime ayant entraîné l'abolition de son discernement.

Plusieurs des mesures les plus discutées du texte, notamment les mesures relatives à la responsabilité pénale ou celle permettant les relevés signalétiques sous contrainte ne nécessitaient pas de mesure réglementaires.

Par ailleurs quatre textes réglementaires non prévus par la loi ont été adoptés, dont le plus important est le décret en Conseil d'État n° 2022-1040 du 22 juillet 2022 d'application des mesures en matière de sécurité routière prévues par cette loi n.

La loi n'est cependant que partiellement applicable du fait de l'absence d'adoption de plusieurs mesures.

I. Les mesures d'application prises

Les décrets en Conseil d'État nos 2022-1112 et 2022-1113 du 3 août 2022 ont permis l'application de l'article 12 de la loi créant la réserve opérationnelle de la police nationale.

Le décret en Conseil d'État n° 2022-517 du 8 avril 2022 précise les modalités de mise en oeuvre de la procédure simplifiée en cas de poursuite engagée par le président de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

II. Des mesures manquantes pour plusieurs sujets liés à la vidéosurveillance

N'ont pas encore été prises :

- les mesures permettant de garantir la sécurité et d'assurer la traçabilité des accès aux images de vidéosurveillance prises dans les lieux de privation de liberté ;

- les modalités d'application du chapitre du code de la sécurité intérieure relatif aux « caméras embarquées ».

Certaines mesures ont été prises tout récemment. Auditionné par la commission des lois le 5 avril 2023, le ministre de l'intérieur avait indiqué que « le décret relatif aux drones est en cours d'examen au Conseil d'État, après avoir reçu un avis favorable de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». Il s'agit du décret n° 2023-283 du 19 avril 2023 relatif à la mise en oeuvre de traitements d'images au moyen de dispositifs de captation installés sur des aéronefs pour des missions de police administrative accompagné de l'arrêté du 19 avril 2023 relatif au nombre maximal de caméras installées sur des aéronefs pouvant être simultanément utilisées dans chaque département et collectivité d'outre-mer, qui fixent les conditions du recours au drones tel que prévu par l'article 15 de la loi.

Par ailleurs, la liste des formations aux métiers de l'armurerie et de l'armement n'a pas encore été prise.

Enfin, la date d'entrée en vigueur des mesures encadrant l'acquisition d'armes à feu par des associations n'a pas été fixée par voie réglementaire, la disposition de la loi mettant cet article en oeuvre à compter du 1er janvier 2022 trouvant à s'appliquer immédiatement.

La loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure est partiellement applicable.

(9) Loi n° 2022-92 du 31 janvier 2022 interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne

Issue d'une initiative de la députée Laurence Vanceunebrock, la loi n° 2022-92 du 31 janvier 2022 visait, à titre principal, à sanctionner les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre (dites « thérapies de conversion »).

L'article 1er prévoit, en son I, la création de l'infraction précitée (article 225-4-13 nouveau du code pénal), constituée en cas de pratiques, de comportements ou de propos répétés visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre (vraie ou supposée) d'une personne et altérant sa santé physique ou mentale, cette infraction étant sanctionnée par une peine de deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende, pouvant être portée à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende en cas de circonstances aggravantes (faits commis sur un mineur, sur une personne vulnérable, par une personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait, etc.).

Le II de ce même article permet aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans et dont les statuts portent sur les discriminations liées à l'orientation sexuelle ou à l'identité de genre d'exercer, avec l'accord de la victime, les droits reconnus à la partie civile en cas de commission d'une telle infraction.

Le III oblige les fournisseurs de services de communication au public en ligne à concourir à la lutte contre la diffusion de la même infraction.

L'article 2 exclut l'application à l'infraction ainsi créée des dispositions relatives à l'aggravation des peines prévue par l'article 132-77 du code pénal423(*).

L'article 3 vise à sanctionner au sein du code de la santé publique (article L. 4163-11 nouveau), par des peines identiques à celles prévues au code pénal et par une interdiction d'exercer la profession de médecin pour une durée maximale de 10 ans, les « thérapies de conversion » pratiquées par les professionnels de la médecine.

L'article 4 précise les conditions d'application de la loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

La loi n° 2022-92 du 31 janvier 2022 interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne, ne nécessitait aucune mesure d'application. Elle est d'application directe.

(10) Loi n° 2022-171 du 14 février 2022 tendant à abroger des lois obsolètes pour une meilleure lisibilité du droit

Issue d'une initiative de Vincent Delahaye et Valérie Létard, la loi n° 2022-171 du 14 février 2022, dite « Balai II », vise à améliorer la lisibilité du droit par l'abrogation de dispositions législatives obsolètes. Elle résulte des travaux de la mission de simplification législative intitulée « Bureau d'abrogation des lois anciennes inutiles (Balai) » qui a été créée par le Sénat en janvier 2018 avec un objectif de clarification du droit par la réduction du stock de normes en vigueur.

L'adoption de la loi n° 2022-171 du 14 février 2022 est intervenue deux ans après celle de la loi n° 2019-1332 du 11 décembre 2019, dite « Balai I », qui, poursuivant un objectif similaire, avait permis l'abrogation de 49 lois adoptées entre 1918 et 1940 et ne produisant plus d'effets juridiques. Le renouvellement de cette initiative sénatoriale s'est traduit par l'abrogation de 11 lois adoptées cette fois entre 1941 et 1980.

Ce texte a été définitivement adopté le 3 février 2022 après une lecture dans chaque chambre. Il s'inscrit dans la démarche continue du Sénat pour la simplification du droit. Ce sont ainsi 164 lois obsolètes qui ont été abrogées en l'espace de trois ans, soit l'équivalent de près de trois années de travaux parlementaires424(*).

La loi n° 2022-171 du 14 février 2022 tendant à abroger des lois obsolètes pour une meilleure lisibilité du droit est d'application directe.

(11) Loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante

La loi n° 2022-172 du 14 février 2022 est la traduction législative des « 20 nouvelles mesures de soutien aux indépendants » annoncées par le Président de la République le 16 septembre 2021. Son objectif principal est de prémunir davantage les travailleurs indépendants contre les aléas de la vie économique. Pour ce faire, elle consacre un nouveau statut « d'entrepreneur individuel » et met fin au principe séculaire d'unicité du patrimoine. Dans ce nouveau régime, l'entrepreneur individuel bénéficie en effet de plein droit d'une séparation entre son patrimoine professionnel et personnel. Il répond de ses dettes professionnelles sur le premier, tandis que le second est, sauf exceptions, protégé contre l'exercice par les créanciers professionnels de leur droit de gage. Le projet de loi a été enrichi au Sénat afin de tirer toutes les conséquences de cette révolution juridique, par exemple en procédant aux nécessaires adaptations des procédures d'insolvabilité des entreprises et des particuliers.

Sur les 21 articles que compte la loi n° 2022-172 du 14 février 2022, 16 relevaient de la compétence de la commission des lois425(*). Parmi ceux-ci, 12 sont d'application directe. La quasi-totalité des dispositions nécessitant des mesures réglementaires d'application concernent la mise en place du statut d'entrepreneur individuel et ses conséquences sur les procédures existantes dans les codes de commerce et de la consommation.

Au 31 mars 2023, l'ensemble des mesures réglementaires d'application des dispositions examinées par la commission des lois ont été publiées et ce pan de la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 est donc intégralement applicable.

I. Les principales dispositions de la loi examinées par la commission des lois

L'article 1er procède à la création du nouveau statut d'entrepreneur individuel précité et met fin, au bénéfice de ses titulaires, au principe d'unicité du patrimoine.

L'article 2 étend au cas de transfert universel du patrimoine professionnel la règle de droit commun selon laquelle les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail commercial à l'acquéreur de son entreprise sont réputées non écrites.

Afin d'adapter les règles d'exécution forcée des obligations civiles et commerciales au nouveau statut d'entrepreneur individuel, l'article 3 prévoit que les procédures correspondantes ne s'appliquent qu'aux biens sur lesquels le créancier dispose d'un droit de gage général. De la même manière, les articles 4, 5 et 10 procèdent aux ajustements nécessaires s'agissant des procédures de recouvrement des créances fiscales et sociales ainsi que des procédures d'insolvabilité des entreprises et des particuliers.

L'article 6 opère la mise en extinction du régime de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, au profit du statut d'entrepreneur individuel.

L'article 7 habilite le Gouvernement à harmoniser par voie d'ordonnances le régime législatif des professions libérales réglementées ainsi qu'à faciliter le développement et le financement de structures d'exercice desdites professions.

L'article 13 met principalement en conformité le régime disciplinaire applicable aux experts-comptables avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel. D'une part, il procède à une séparation claire des fonctions d'instruction et de jugement et, d'autre part, il revient sur le principe de révocation automatique du sursis en cas de nouvelle condamnation. Sur le même sujet, l'article 14 modifie à la marge la composition des instances disciplinaires de l'Ordre des experts-comptables tandis que l'article 15 substitue à l'appellation « Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables » celle de « Conseil national ».

L'article 18 procède aux coordinations nécessaires pour l'application de ce texte dans les outre-mer tandis que l'article 19 précise ses modalités d'entrée en vigueur.

Les articles 20 et 21 prévoient la remise de deux rapports au Parlement relatifs respectivement à l'application du statut de l'entrepreneur individuel (avant le 1er mars 2024) et aux dispositifs de formation professionnelle destinés aux travailleurs indépendants (avant le 1er mars 2023426(*)).

II. Un pan de la loi intégralement applicable

Pris en application de l'article 1er, trois décrets ont permis d'assurer l'entrée en vigueur du nouveau statut d'entrepreneur individuel ainsi que de son corollaire, la séparation des patrimoines. Il s'agit :

- du décret n° 2022-725 du 28 avril 2022 qui, à titre principal, définit le patrimoine professionnel de l'entrepreneur individuel selon ces termes : « les biens, droits, obligations et sûretés dont l'entrepreneur individuel est titulaire, utiles à l'activité professionnelle, [et] qui, par nature, par destination ou en fonction de leur objet, servent à cette activité »427(*). À titre subsidiaire, ledit décret précise les mentions devant apparaître sur les documents à usage professionnel de l'intéressé428(*) ainsi que les règles de détermination de la date à compter de laquelle la protection du patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel prend effet429(*) ;

- du décret n° 2022-1618 du 22 décembre 2022 qui fixe les conditions d'exercice du droit de gage des organismes de sécurité sociale430(*). Pour ce faire, il crée un nouvel article R. 133-9-4-1 au code de la sécurité sociale définissant les « manoeuvres frauduleuses ou inobservations graves et répétées » à la législation de la sécurité sociale autorisant les organismes compétents à exercer leur droit de gage sur les deux patrimoines des entrepreneurs individuels ;

- du décret n° 2022-799 du 12 mai 2022 qui, premièrement, liste les informations devant apparaître sur l'acte de renonciation à la séparation des patrimoines431(*) de l'entrepreneur individuel et fixe les termes qu'il doit y apposer de manière manuscrite lorsqu'il entend réduire de sept à trois jours francs le délai de réflexion correspondant. Deuxièmement, il précise les conditions de publicité à respecter afin que le transfert universel du patrimoine professionnel de l'entrepreneur individuel soit rendu opposable aux tiers, ainsi que le délai de recours pour les créanciers dont la créance est née avant ladite publicité432(*).

Pris en application de l'article 5, le décret n° 2022-890 du 14 juin 2022 fixe ensuite les modalités de publicité préalable des cessions d'entreprise et des réalisations d'actifs en cas de liquidation judiciaire impliquant un entrepreneur individuel433(*). D'autre part, il crée un nouveau titre VIII bis au livre VI de la partie réglementaire du code de commerce précisant les modalités d'application des nouvelles dispositions législatives relatives aux entreprises individuel en difficulté introduites par le Sénat (règles d'ouverture de la procédure et de jugement).

Conformément à l'habilitation accordée à l'article 7 de la loi, l'ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 a enfin procédé à l'harmonisation ainsi qu'à la mise en cohérence des dispositions législatives communément applicables à l'exercice sociétaire des professions libérales réglementées. Pour ce faire, ladite ordonnance rassemble en un texte unique les dispositions transversales régissant ces modalités particulières d'exercice, notamment celles figurant dans la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 et dans la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990. Afin de promouvoir le développement et le financement des structures d'exercice de ces professions, l'ordonnance a également entendu faciliter le recours aux formes pluri-professionnelles d'exercice. Ainsi, elle a notamment étendu le dispositif de société de participations financières de professions libérales, lesquelles couvrent désormais « l'ensemble des régimes d'exercice parallèles ou historiques, au-delà de la loi de 1990 »434(*).

Les 16 articles examinés par la commission des lois de la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante sont donc entièrement applicables.

(12) Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale

Le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale constituait le dernier volet d'un ensemble de trois projets de loi - constitutionnelle, organique et ordinaire - conçu par le Gouvernement comme devant favoriser l'application du principe de « différenciation » territoriale.

Initialement composé de 84 articles, le projet de loi a été considérablement enrichi lors de son examen au Sénat - 128 articles additionnels ajoutés, 5 supprimées -, puis à l'Assemblée nationale - 107 articles additionnels étant encore ajoutés. Modifié par la commission mixte paritaire, le projet de loi a été adopté le 31 janvier 2022 par celle-ci, puis promulgué le 21 février 2022.

Les 271 articles que compte la loi, dont la plupart ont été examinés par la commission des lois, prévoient 90 mesures d'application. Parmi elles, au 19 avril 2023, 48 mesures ont été prises et 42 demeurent encore manquantes. Le taux d'application de la loi qui en résulte est donc de 52 %. Une part significative des dispositions de la loi dont la commission des lois a eu à connaître ne sont donc pas applicables.

L'application des articles examinés au fond par d'autres commissions fait l'objet, pour chacune des commissions concernées, d'une fiche distincte dans le présent rapport.

I. Les principales dispositions de la loi

Parmi les articles examinés par la commission des lois, les dispositions du projet de loi sont divisées en quatre titres :

- les articles 1er à 24 sont relatifs à la différenciation ;

- les articles 25 à 151 ont trait à la décentralisation ;

- les articles 152 à 161 tendent à favoriser l'application du principe de déconcentration ;

- les articles 162 à 271 visent généralement à l'application de mesures de simplification, notamment en outre-mer.

1. Différenciation

Outre l'inscription du principe de différenciation (article 1er) et du pouvoir réglementaire des collectivités territoriales (article 5) dans la loi, le titre Ier vise à faciliter l'application du principe de différenciation :

- l'article 2 tend à permettre aux collectivités territoriales qui le souhaitent de formuler des propositions de différenciation des normes leur étant applicables ;

- l'article 6 vise à favoriser l'application du pouvoir réglementaire local dans divers domaines de compétences des collectivités territoriales ;

- l'article 8 ouvre aux élus locaux la possibilité de définir eux-mêmes la composition des conférences territoriales de l'action publique (CTAP) et ouvre les facultés de délégation de compétences, notamment des EPCI à fiscalité propre aux départements et régions s'agissant de ses compétences facultatives ;

- l'article 17 octroie à une ou plusieurs communes membres d'un EPCI à fiscalité propre la possibilité de transferts « à la carte » de leurs compétences vers ce dernier ;

- l'article 18 prévoit la possibilité, dans les communautés urbaines et les métropoles de soumettre l'exercice de la compétence « voirie » à la reconnaissance d'un intérêt communautaire ou métropolitain.

2. Décentralisation

Le volet relatif à la décentralisation comprend trois titres : le titre II, consacré à la transition écologique ; le titre III, consacré à l'urbanisme et au logement ; le titre IV, consacré à la santé, la cohésion sociale, l'éducation et la culture.

La commission des lois a essentiellement eu à connaître du premier de ces titres, qui comporte les dispositions suivantes :

- l'article 30 modifie certaines conditions d'exercice des compétences « eau » et « assainissement ;

- l'article 35 prévoit la possibilité pour les communes de procéder, dans le cadre d'un zonage réalisé dans le plan local d'urbanisme, éventuellement intercommunal, à une restriction de l'implantation des éoliennes sur leur territoire ;

- les articles 38 et 40 prévoient respectivement le transfert aux départements et métropoles volontaires ainsi que la mise à disposition expérimentale aux régions volontaires de routes non concédées de l'État ;

- l'article 53 permet aux collectivités territoriales d'installer des radars routiers ;

- l'article 57 prévoit la possibilité pour l'ADEME de déléguer aux régions une part de l'attribution de subventions et de concours financiers en matière de transition énergétique et d'économie circulaire ;

- l'article 60 modifie la composition des commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), afin de renforcer la place des élus locaux - en particulier ruraux - en son sein.

Le titre V a pour objet de tirer les conséquences, notamment financières, des dispositions de l'ensemble de la loi, en particulier s'agissant des transferts de compétences.

3. Déconcentration

Le titre VI de la loi est relatif à diverses mesures de déconcentration :

- l'article 152 fait du préfet de région le délégué territorial de l'ADEME et du préfet de département le délégué territorial de l'office français de la biodiversité (OFB) ;

- l'article 153 renforce la place du préfet de département dans la gouvernance des agences de l'eau ;

- l'article 155 octroie au préfet de région la possibilité de déléguer au préfet de département l'attribution des subventions relatives à la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ;

- l'article 156 étend les obligations d'information des maires et présidents d'EPCI à fiscalité propre lorsque des services de l'État en quittent le territoire ;

- l'article 159 modifie la gouvernance et le régime juridique du CEREMA.

4. Simplification

Les titres VII à IX comportent des dispositions relativement disparates, ayant pour principal point commun de viser à la simplification de l'action publique locale.

Sans prétendre à l'exhaustivité, ils comportent les dispositions suivantes :

- l'article 162 vise à étendre l'application du principe « dites-le nous une fois » ;

- l'article 168 prévoit les conditions du partage de données entre acteurs de l'insertion ;

- l'article 170 pérennise sous conditions la possibilité pour les assemblées délibérantes des départements, régions et EPCI à fiscalité propre, de procéder à leurs réunions en visioconférence ;

- l'article 180 facilite la mutualisation d'agents communs à une commune et à son EPCI à fiscalité propre ;

- l'article 181 modifie la gouvernance de la métropole Aix-Marseille-Provence ;

- l'article 186 vise à favoriser le développement de l'apprentissage transfrontalier ;

- les articles 210 à 228 apportent diverses modifications au régime des entreprises publiques locales ;

- l'article 229 ouvre plus largement les missions d'évaluation des politiques publiques territoriales des chambres régionales des comptes ;

- les articles 237 et 238 prévoient diverses dispositions en matière de droit funéraire et à la police municipale afférente ;

- les articles 239 et 240 sont relatifs à la déclaration de l'état de calamité naturelle exceptionnelle outre-mer ;

- l'article 241 est relatif à la prévention des risques naturels majeurs outre-mer ;

- l'article 255 octroie aux communes de Nouvelle-Calédonie la compétence relative aux infrastructures de charge nécessaires à l'usage de véhicules électriques ;

- l'article 263 révise le statut de Clipperton.

II. Une loi très partiellement applicable

1. Certaines mesures d'application ont été prises

Une part non négligeable des mesures d'application prévues par la loi ont été prises.

Tel est le cas, notamment, des mesures relatives aux articles 38 et 40, qui prévoient le transfert de routes non concédées de l'État aux départements et métropoles volontaires ainsi qu'à la mise à disposition, à titre expérimental, aux régions volontaires, ont fait l'objet d'une application rigoureuse. À l'exception d'une (cf. infra), les mesures réglementaires d'application ont ainsi été prises, y compris s'agissant de leurs conséquences financières : le décret n° 2022-1527 du 7 décembre 2022 relatif au transfert aux collectivités territoriales de la maîtrise d'ouvrage des opérations routières, inscrites au volet routier des contrats de plan État-région, se rapportant aux voies non concédées relevant du domaine routier national transféré, pris pour l'application de l'article 150 de la loi, tire ainsi certaines conséquences financières des articles 38 et 40.

L'article 159 de la loi a modifié le statut du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) en faire une quasi-régie conjointe, renforçant ainsi son rôle auprès des collectivités territoriales. Le décret n° 2022-897 du 16 juin 2022 a achevé, sur le plan réglementaire l'évolution législative ainsi engagée, permettant au CEREMA de s'approprier rapidement ce statut rénové.

S'agissant du volet « simplification », de nombreuses mesures d'application ont opportunément été prises : il en va ainsi des mesures relatives au comité social d'administration de l'ANCT (article 206 de la loi), du référent déontologue pour les collectivités territoriales (article 218), ou encore des articles relatifs au droit funéraire (articles 237 et 238), qui ont été rendus pleinement applicables.

Par ailleurs l'habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance certaines mesures relatives à l'apprentissage transfrontalier prévue à l'article 188 de la loi a bien été employée par le Gouvernement, l'ordonnance n° 2022-1607 ayant été publiée le 22 décembre 2022. Il en va de même pour celle prévue à l'article 205 de la loi, relative au régime budgétaire et comptable de l'établissement public local Paris La Défense. Enfin, l'ordonnance n° 2022-1521 du 7 décembre 2022 étend aux collectivités régies par l'article 74 de la Constitution ainsi qu'à la Nouvelle-Calédonie les dispositions de la loi, conformément à l'habilitation prévue à son article 254435(*).

2. Des mesures non prévues ont utilement contribué à l'application de la loi

Plusieurs mesures non prévues par la loi sont venues faciliter son application. Parmi elles, trois sont relatives à la composition d'organes territoriaux :

- l'article 8 de la loi ouvre la possibilité aux élus locaux de déterminer eux-mêmes la composition de la conférence territoriale d'action publique (CTAP), dans les conditions définies par la loi. Afin de prévenir toute difficulté d'application dans le cadre spécifique de l'organisation territoriale francilienne, le décret n° 2022-1581 du 16 décembre 2022 précisant les modalités d'élection et de désignation des membres de la conférence territoriale de l'action publique, pris en concertation avec les rapporteurs de la loi, a utilement précisé le cadre applicable en Île-de-France, en particulier s'agissant du rôle des présidents d'établissement public territorial ;

- de façon analogue, le décret n° 2022-1663 du 26 décembre 2022 relatif aux modalités de désignation des membres de la chambre des territoires de Corse précise utilement les conditions d'application de l'article 9 de la loi - bien que non prévu par celui-ci -, qui modifie la composition de la chambre des territoires de Corse ;

- le décret n° 2022-986 du 4 juillet 2022 relatif à la composition du comité des finances locales et du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), qui n'était pas prévu par l'article 21, dont l'objet était notamment de rééquilibrer la composition du CNEN.

Une dernière mesure non prévue peut être rattachée à l'application de l'article 157, qui prévoit la médiation par le préfet de département, lorsque l'installation d'un cirque itinérant sur le territoire d'une commune pose difficulté, entre l'exploitant du cirque et la commune concernée. Le décret n° 2022-376 du 17 mars 2022 tend à en faciliter l'application.

3. Des dispositions applicables dont l'application concrète demeure incertaine

Parmi les mesures d'application directe ne nécessitant donc la prise d'aucune disposition réglementaire, certaines ne semblent avoir fait l'objet d'une réelle application.

C'est notamment le cas d'une mesure ayant fait l'objet de discussions nourries, y compris lors de la commission mixte paritaire (CMP), prévue à l'article 35 de la loi : la capacité pour les communes ou établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de procéder, dans le cadre du plan local d'urbanisme (PLU), le cas échéant intercommunal, à un zonage en fonction de certaines caractéristiques, de l'implantation d'éoliennes à l'échelle du territoire communal ou intercommunal. Lors de l'examen du projet de loi d'accélération des énergies renouvelables, l'articulation de cette disposition avec les autres dispositions du projet de loi relatives à l'implantation d'éoliennes ne semble pas avoir été clairement prévue, ce qui avait conduit les rapporteurs à s'interroger sur son application réelle. En tout état de cause, ces derniers appellent l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'assurer la publicité des dispositions d'application directe, y compris lorsqu'elles résultent d'initiatives parlementaires, afin d'en garantir l'applicabilité.

4. Les mesures d'application manquantes

a) Les mesures réglementaires d'application

Au 19 avril 2023, n'avaient toujours pas été adoptées de nombreuses mesures réglementaires d'application. Si l'ensemble de ces mesures devraient en toute logique, plus d'un an après la promulgation de la loi, être prises, l'absence de certaines paraît particulièrement dommageable.

Prévu à l'article 6, le décret en Conseil d'État prévoyant les conditions et le plafond dans le respect duquel le régime des redevances dues aux communes, aux établissements publics de coopération intercommunale ou aux syndicats mixtes pour l'occupation provisoire de leur domaine public par les chantiers de travaux peuvent être fixés respectivement par le conseil municipal, l'organe délibérant ou le comité syndical, n'a pas été pris. L'échéancier fourni par le secrétariat général du Gouvernement prévoyait la prise de cette mesure avant fin juillet 2022. L'absence de mesure d'application prive d'effet, pour l'heure, une telle disposition. L'inapplicabilité de celle-ci est d'autant plus regrettable que le renforcement du pouvoir réglementaire local a constitué l'un des principaux points d'attention lors de la discussion parlementaire, la commission des lois étant particulièrement vigilante au renforcement des marges de manoeuvre des collectivités territoriales et de leurs groupements en la matière.

L'article 11 renvoie à un décret en Conseil d'État pour l'application de l'article L. 5224-1 du code général des collectivités territoriales, relatif à un accord portant sur l'encadrement des jours - notamment les dimanches - et horaires d'ouverture au public de certains établissements commerciaux en cas de déséquilibre du tissu commercial de proximité à l'intérieur du périmètre d'un schéma de cohérence territoriale (Scot). Très attendues par les élus locaux dans la poursuite de l'objectif de revitalisation des centres-bourgs, ces dispositions d'application devaient initialement être prises à la fin du mois de juillet 2022 selon le secrétariat général du Gouvernement.

L'article 40, relatif à la mise à disposition des régions, à titre expérimental, de routes non concédées de l'État, est applicable, à une regrettable exception près. Un arrêté du ministre de la justice et des ministres chargés de la voirie routière nationale et des collectivités territoriales doit déterminer les conditions d'assermentation d'agents de la région pour la réalisation de certains contrôles. Faute d'avoir été pris, cet arrêté prive d'applicabilité une disposition pourtant favorable à une décentralisation plus approfondie.

De façon analogue, le décret prévu à l'article 53 pour la détermination des modalités de dépôt et d'instruction des demandes, formulées par les collectivités territoriales, d'avis du préfet de département concernant l'installation de radars routiers sur les routes dont elles ont la charge, n'a toujours pas été pris. Il prive ainsi d'effet une disposition pourtant souhaitée par certaines collectivités territoriales et de nature à renforcer la sécurité routière.

L'article 151 prévoit la prise par décret d'une convention type constatant la liste des services ou parties de service chargés de la mise en oeuvre de compétences de l'État transférées aux collectivités territoriales et mis à disposition de ces dernières dans ce cadre. L'absence de décret en la matière est problématique, de telles conventions type étant de nature à faciliter des transferts de compétences et à en mieux garantir la sécurité juridique.

De la même manière, l'article 160 de la loi prévoit l'approbation par arrêté du référentiel que doivent respecter les conventions France Services. Cet arrêté n'a pas été pris alors qu'il serait susceptible de fluidifier les relations entre l'État et les collectivités territoriales.

L'article 173, qui prévoit la possibilité pour les collectivités territoriales de fixer un seuil en-dessous duquel elles peuvent prononcer l'admission en non-valeur de certains titres de recettes attachés à des créances irrécouvrables, n'est pas applicable, le plafond de ce seuil et les modalités suivant lesquelles le président du conseil département ou régional ou le maire rendent compte à l'assemblée délibérante ou au conseil municipal de l'usage de cette faculté n'ayant pas été fixés par décret.

Plusieurs articles relatifs à des mesures dites de simplification de l'action publique ne sont pas applicables :

- l'article 162 de la loi tend à simplifier les relations entre le public et l'administration, en prévoyant que les administrations peuvent conserver des informations et collecter certaines données dans le but d'informer les personnes sur leur droit au bénéfice éventuel d'une prestation ou d'un avantage, éventuellement dans le but de leur attribuer les avantages ou prestations visés. Le décret en Conseil d'État prévus pour son application n'ayant été pris, cette mesure de simplification bienvenue n'est pas applicable ;

- l'article 169, relatif à la dénomination des voies et lieux-dits par le conseil municipal des communes, qui vise notamment à améliorer l'adressage, est toujours inapplicable ;

- le décret prévu pour l'application de l'article 201, qui tend à permettre à des établissements publics de l'État qui exercent les mêmes missions sur des périmètres géographiques différents de mutualiser la gestion de fonctions et moyens nécessaires à celles-ci, n'a pas été pris.

Enfin, plusieurs articles relatifs aux outre-mer demeurent inapplicables, faute de mesures réglementaires :

- relatif à la prévention des risques naturels outre-mer, l'article 241 prévoit de nombreuses mesures d'application, dont aucune n'est prise. Les rapporteurs appellent l'attention du Gouvernement sur ce sujet, qui fait l'objet d'une particulière vigilance au Sénat ;

- l'article 263 crée un statut ad hoc pour Clipperton, incluant la création d'un conseil consultatif assistant le ministre des outre-mer dans l'administration de ce territoire. Cet article est pour l'heure inapplicable, les décrets nécessaires n'ayant pas été pris.

b) Les ordonnances

L'article 198 de la loi habilitait le Gouvernement à réviser par ordonnance, dans un délai de 18 mois, le régime de la publicité foncière. Cette ordonnance n'a pas été prise et une nouvelle habilitation figure dans l'avant-projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice que le Gouvernement a soumis à consultation436(*). Si le Gouvernement n'est pas tenu constitutionnellement d'utiliser l'habilitation que lui a accordée le Parlement, une telle situation met néanmoins clairement en lumière l'impréparation du Gouvernement et le fait qu'il est parfois uniquement animé par le souci de se doter d'une « habilitation de confort » pour lui permettre de légiférer, en cas de besoin, à la place du Parlement. Tel n'est, en tout état de cause, pas l'esprit de la Constitution.

De même, l'article 256 de la loi habilitait le Gouvernement à prendre sous dix mois par voie d'ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour créer un statut de grand port maritime pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette ordonnance n'a pas été prise.

c) Les rapports

Certains articles de la loi prévoient la remise de rapports au Parlement, dont le délai est parfois échu.

Il en va ainsi de l'article 4 prévoyait la remise au Parlement sous six mois d'un rapport sur les phénomènes de spéculation immobilière et foncière en Corse et les moyens de différenciation disponibles pour y faire face. Malgré l'acuité des questions immobilière et foncière en Corse, il n'a pas été rendu.

L'article 32 prévoyait la remise au Parlement d'un rapport « évaluant la mise en oeuvre des règles départementales relatives à la défense extérieure contre l'incendie, notamment leurs conséquences en matière financière, d'urbanisme et de développement pour les collectivités territoriales et leurs groupements chargés de ce service public ». Ce rapport n'a pas été remis formellement au Parlement. Une telle omission est d'autant plus dommageable que le rapport a été communiqué à certains parlementaires, y compris des sénateurs dans le cadre de l'examen de la proposition de loi d'Hervé Maurey visant à adapter la défense extérieure contre l'incendie à la réalité des territoires ruraux. Les conclusions de ces travaux étant partiellement publiques, le Gouvernement gagnerait à en garantir la publicité sans tarder en les transmettant aux assemblées.

L'article 144 prévoit également la remise au Parlement sous six mois d'un rapport « retraçant les perspectives du transfert de la médecine scolaire aux départements, son coût, les modalités envisagées de recrutement et de gestion du personnel et les améliorations attendues sur le fonctionnement des différentes actions menées dans le cadre de la médecine scolaire ». Ce rapport, qui n'a toujours pas été remis, aurait utilement éclairé la représentation nationale sur les raisons ayant conduit le Gouvernement, après l'avoir initialement évoqué lors de l'élaboration du projet de loi, a finalement écarter le transfert aux conseils départementaux de la compétence « médecine scolaire ». Alors qu'un rapport de la Cour des comptes de 2020437(*) soulignait déjà les difficultés rencontrées par les services de médecine scolaire, le transfert aux conseils départementaux de cette compétence, sous des modalités restant à définir, paraît une voie d'amélioration possible de l'action publique en la matière et il est dommageable qu'il n'ait pas été procédé par le Gouvernement à une objectivation des enjeux en la matière.

De façon analogue, il est problématique que le rapport évaluant les conditions d'une délégation aux régions de la gestion opérationnelle du programme européen à destination des écoles pour la distribution de fruits et légumes et de lait à l'école, prévu à l'article 146 de la loi, n'ait pas été remis au Parlement.

Deux rapports relatifs à des problématiques spécifiques à certains territoires outre-mer n'ont pas été publiés :

- l'article 253 prévoit la remise sous six mois au Parlement d'un rapport « sur l'organisation du système de santé et de la sécurité sociale pour la plupart des outre-mer, en particulier Saint-Barthélemy », à laquelle il n'a pas été procédé, alors même que ce rapport a de nouveau été demandé lors de l'examen de la proposition de loi organique visant à permettre à Saint-Barthélemy de participer à l'exercice de compétences de l'État, en mars dernier ;

- l'article 271 prévoit également la remise d'un rapport sous le même délai d'un rapport sur la création d'un observatoire du prix du foncier à Mayotte. Ce rapport n'a pas été rendu.

Enfin, le rapport « évaluant l'intérêt de l'extension du coefficient « coût de la vie » pour les personnels soignants des régions frontalières de la Suisse », qui devait être remis dans un délai d'un an, ne l'a pas été.

5. Les mesures d'application publiées mais problématiques

L'article 229 de la loi prévoit les conditions dans lesquelles les chambres régionales des comptes (CRC) participent à l'évaluation des politiques publiques territoriales. Ce faisant, il ajoute notamment un article L. 211-15 au code des juridictions financières prévoyant que « la chambre régionale des comptes contribue, dans son ressort, à l'évaluation des politiques publiques ». Le décret n° 2022-1549 du 8 décembre 2022 relatif à l'évaluation des politiques publiques territoriales par les chambres régionales des comptes, pris pour l'application de cet article prévoit que « la chambre régionale des comptes peut, de sa propre initiative, procéder à l'évaluation d'une politique publique relevant des collectivités territoriales et organismes soumis à sa compétence de contrôle des comptes et de la gestion » (article R. 245-1-1 du code des juridictions financières). Dans une réponse à une question écrite, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires souligne que cet article est modelé sur l'article L. 111-13 du code des juridictions financières, qui octroie à la Cour des comptes une faculté identique d'auto-saisine438(*). L'analyse des travaux parlementaires montre pourtant que l'intention du législateur n'était pas de créer une faculté d'auto-saisine aux chambres régionales des comptes, mais de créer une compétence nouvelle d'évaluation des politiques publiques territoriales à la saisine exclusive des collectivités territoriales : ni l'étude d'impact, ni les travaux au Sénat et à l'Assemblée nationale ne font mention de la création d'une telle capacité, la discussion parlementaire ayant porté exclusivement sur la possibilité de saisine par les collectivités territoriales des CRC pour des évaluations de politiques publiques territoriales. En la matière, le pouvoir réglementaire a donc outrepassé l'intention du législateur et une évolution législative n'est pas à exclure.

Par ailleurs, l'article 161 de la loi habilitait le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai d'un an, toute mesure relevant du domaine de la loi afin d'améliorer la prise en charge des conséquences exceptionnellement graves sur le bâti et sur les conditions matérielles d'existence des assurés des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols, phénomène plus connu sous le nom de « retrait-gonflement des argiles ». Néanmoins, l'ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 ne semble pas apporter pleine satisfaction439(*) et le régime juridique qu'elle prévoit pourrait être modifié440(*).

La loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale est donc partiellement applicable.

(13) Loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption

La loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption est issue d'une proposition de loi déposée le 30 juin 2020 par les députés Monique Limon, Gilles Le Gendre et des membres du groupe La République en Marche à la suite du rapport intitulé « Vers une éthique de l'adoption, donner une famille à un enfant » remis par la députée Monique Limon et la sénatrice Corinne Imbert au Premier ministre et au secrétaire d'État chargé de la protection de l'enfance en octobre 2019. Ce rapport proposait trois axes de recommandations : mieux préparer les familles à l'adoption, notamment au regard des profils des enfants adoptables ; faciliter l'adoption des enfants qui peuvent l'être, au besoin sous une forme simple ; former les parties prenantes de l'adoption.

Elle a été adoptée en lecture définitive par l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement et échec de la commission mixte paritaire.

Sur les 26 articles que compte la loi, 22 articles sont d'application directe, 3 articles prévoient au moins une mesure d'application réglementaire et une disposition comprend une habilitation à légiférer par ordonnance.

Au 31 mars 2023, aucune mesure d'application n'a été publiée, sur les 4 prévues. Seule l'ordonnance prévue par l'article 18 a été publiée.

I. Les principales dispositions de la loi

1. Les dispositions relatives à l'adoption

L'article 1er explicite les effets de la filiation adoptive en la forme simple qui se caractérisent par l'adjonction d'un nouveau lien de filiation sans rompre le lien de filiation originel.

L'article 2, qui est la mesure-phare de la loi, ouvre l'adoption aux personnes liées par un pacte civil de solidarité et aux concubins, tout en assouplissant les conditions d'âge (26 ans au lieu de 28) ou de durée de la communauté de vie (un an au lieu de deux) en vigueur.

L'article 3 élargit les dérogations à l'interdiction du prononcé d'une adoption plénière d'un enfant âgé de plus de quinze ans à toutes les hypothèses dans lesquelles l'enfant ne remplissait pas, avant ses quinze ans, les conditions légales pour être adopté. L'article 4 clarifie le régime du placement d'un enfant en vue de son adoption et l'article 6 les conditions du consentement à l'adoption.

L'article 7 ouvre la possibilité pour le tribunal de prononcer l'adoption de mineurs de plus de treize ans ou de majeurs protégés lorsqu'ils sont hors d'état d'y consentir, après avis d'un administrateur ad hoc pour le mineur ou de la personne chargée de la protection juridique avec représentation relative à la personne pour le majeur.

L'article 8 introduit le consentement de l'enfant à son changement de prénom lors de son adoption et à son changement de nom lors de son adoption simple.

L'article 9 - qui a causé l'échec de la commission mixte paritaire, le Sénat y étant opposé - permet, à titre transitoire, jusqu'au 21 février 2026, d'établir la filiation de l'enfant issu d'une assistance médicale à la procréation (AMP) à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique vis-à-vis de la mère d'intention par la voie de l'adoption, sans l'accord de la femme qui a accouché, si son refus de reconnaissance conjointe est contraire à l'intérêt de l'enfant.

L'article 10 modifie les dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à l'agrément en vue d'adoption en y inscrivant : l'obligation de suivre une préparation préalablement à la délivrance de l'agrément en vue d'adoption, pour que les candidats soient mieux informés de la réalité du parcours de l'adoption et sensibilisés au profil des enfants effectivement proposés à l'adoption ; l'obligation pour le président du conseil départemental de suivre l'avis de la commission d'agrément dont l'avis deviendrait « conforme » ; la reconnaissance législative des réunions d'information proposées aux personnes agréées par les conseils départementaux.

L'article 11 inscrit dans le code civil la définition de l'adoption internationale telle qu'elle ressort de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, faite à La Haye le 29 mai 1993 et signée par la France le 5 avril 1995.

L'article 13 inscrit dans la loi le rôle que peuvent jouer les organismes autorisés pour l'adoption (OAA) auprès des conseils départementaux pour identifier parmi les personnes qu'ils accompagnent des candidats susceptibles d'accueillir des enfants à besoins spécifiques.

L'article 14 réforme la procédure permettant aux OAA d'exercer leur activité tout en conservant une procédure en deux temps - autorisation puis habilitation - et restreint leur rôle d'intermédiaire aux seules adoptions internationales, ce qui supprime toute alternative aux services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) pour confier un enfant à l'adoption en France. Il incrimine le fait de recueillir des mineurs en vue de l'adoption sur le territoire français.

L'article 15 oblige les candidats à une adoption internationale à passer par l'intermédiaire d'un OAA ou par l'Agence française de l'adoption (AFA) et interdit ainsi toute adoption internationale par démarche individuelle.

L'article 16 rend obligatoire un accompagnement post-adoption par l'AFA ou un OAA, ou à défaut l'ASE, en cas d'adoption internationale non intrafamiliale, pendant l'année qui suit l'arrivée de l'enfant au foyer de l'adoptant.

2. Les dispositions relatives au statut de pupille de l'État et au conseil de famille des pupilles de l'État

L'article 19 inscrit dans la loi la pratique existante du « bilan d'adoptabilité » - bilan médical, psychologique et social qui fait état de l'éventuelle adhésion de l'enfant à un projet d'adoption - tout en l'étendant à tout enfant devenant pupille, et pas uniquement à ceux qui sont susceptibles de faire l'objet d'un projet d'adoption. Il permet également qu'un nouveau bilan soit réalisé à tout moment à la demande du tuteur ou du pupille.

L'article 20 clarifie le rôle du consentement des parents en cas de remise de l'enfant au service de l'ASE en vue d'une admission en qualité de pupille de l'État.

L'article 21 modifie les règles de composition et de fonctionnement des conseils de famille des pupilles de l'État, tout en créant une nouvelle procédure de recours contre ses décisions et délibérations Il institue une obligation de formation préalable pour ses membres.

L'article 22 prévoit une information systématique du pupille de l'État par le tuteur et permet la création de plusieurs associations d'entraide entre les pupilles ou anciens pupilles de l'État dans chaque département, renommées associations départementales des personnes accueillies en protection de l'enfance

3. Les dispositions diverses

L'article 23 augmente la durée du suivi renforcé des enfants confiés à l'ASE jusqu'à leurs trois ans.

L'article 24 donne un caractère supplétif à la tutelle assurée par le président du conseil départemental afin que celle-ci soit résiduelle, en cas d'impossibilité de mettre en place une tutelle familiale ou d'admettre le mineur comme pupille de l'État.

L'article 25 assouplit les modalités du recours au congé d'adoption et du congé pour l'arrivée d'un enfant placé en vue de son adoption, en permettant un début différé et un fractionnement pour le premier.

II. Une restructuration des dispositions du code civil relatives à l'adoption achevée

L'article 18 a autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier les dispositions du code civil et du code de l'action sociale et des familles en matière d'adoption, de déclaration judiciaire de délaissement parental, et de tutelle des pupilles de l'État et de tutelle des mineurs dans le but de tirer les conséquences, sur l'organisation formelle du titre VIII du livre Ier du code civil, de la revalorisation de l'adoption simple et de la spécificité de l'adoption de l'enfant de l'autre membre du couple, ainsi que d'harmoniser ces dispositions sur un plan sémantique ainsi que d'assurer une meilleure coordination entre elles.

Cette ordonnance a été publiée le 6 octobre 2022441(*) et le projet de loi de ratification déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 22 mars 2023442(*), respectant ainsi les délais prévus par l'article 18.

Comme le précise le rapport au Président de la République, cette ordonnance procède à « une refonte, purement formelle et à droit constant » du titre VIII du livre Ier du code civil relatif à la filiation adoptive, en faisant formellement disparaître la hiérarchie entre adoption plénière et adoption simple au profit de cinq nouveaux chapitres.

Complétée par un décret n° 2022-1630 du 23 décembre 2022 portant diverses dispositions d'application de la réforme de l'adoption, qui a notamment coordonné les dispositions de renvoi au code civil compris dans le code de procédure civile avec la nouvelle présentation, l'ordonnance est entrée en vigueur le 1er janvier 2023.

III. L'application de dispositions du code de l'action sociale et des familles et du code du travail en attente

Trois articles de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption prévoient une ou plusieurs mesures d'application réglementaire qui ne relèvent pas du ministère de la justice.

Aucune n'a encore été publiée bien que l'échéancier du Gouvernement annonce des publications en octobre ou décembre 2022.

Il s'agit :

- à l'article 14, du décret fixant la durée de l'autorisation et de l'habilitation des organismes autorisés à servir d'intermédiaire pour l'adoption de mineurs résidant habituellement à l'étranger (art. L. 225-12-1 du code de l'action sociale et des familles).

Les organismes bénéficiant d'une autorisation et d'une habilitation données sans limite de durée avant la publication de loi n° 2022-219 du 21 février 2022, sont autorisés à poursuivre leur activité pendant une durée de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, soit jusqu'au 21 février 2024.

Le projet de décret doit notamment être soumis au Conseil national de l'adoption créé par la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants qui n'a pas encore été installé443(*).

- à l'article 21, du décret définissant les conditions de la formation préalable des membres des conseils de famille des pupilles de l'État (art. L. 224-2 du code de l'action sociale et des familles) ; ce décret doit également être soumis pour avis au Conseil national de l'adoption ;

- à l'article 25, des mesures réglementaires fixant les modalités de délai et de fractionnement du congé d'adoption (art. L. 1225-37 du code du travail) et celles du congé pour l'arrivée d'un enfant placé en vue de son adoption (art. L. 3142-1), étant précisé que ces dispositions avaient été ajoutées par le Gouvernement en première lecture à l'Assemblée nationale444(*). Le retard est expliqué par la nécessité pour les caisses primaire d'assurance maladie de mettre en oeuvre un nouveau processus de déclaration et de traitement permettant de contrôler que le cumul des périodes de congé entre parents ne dépasse pas le plafond de jours autorisé. Une publication devrait avoir lieu au cours du deuxième trimestre 2023, après la consultation des organismes de sécurité sociale et de la commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle.

La loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption est partiellement applicable.

(14) Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art

Au-delà de son intitulé, la loi n° 2022-267 du 28 février 2022 vise plus précisément à réformer le régime légal des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et des modalités de régulation de ce secteur économique. Ce texte est issu d'une proposition de loi sénatoriale, déposée par Catherine Morin-Desailly, adoptée en première lecture le 23 octobre 2019 puis par la commission des lois de l'Assemblée nationale le 26 février 2020. En raison de la crise sanitaire due à l'épidémie de covid-19, l'examen du texte en séance publique n'a finalement eu lieu que le 9 février 2022.

Initialement composé d'un article unique, la proposition de loi a été principalement enrichie par le Sénat : sept articles additionnels ont ainsi été introduits lors de son examen au Sénat et un article lors de son examen à l'Assemblée nationale. La proposition de loi ainsi modifiée a fait l'objet d'un vote conforme par le Sénat.

Sur les 11 articles que compte la loi, neuf sont d'application directe et deux prévoient six mesures d'application réglementaire.

Au 31 mars 2023, cinq mesures d'application ont été publiées, sur les six prévues, et la majorité des dispositions de cette loi sont applicables.

I. Les principales dispositions de la loi

L'article 1er astreint les personnes physiques qui dirigent des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques à une obligation de formation professionnelle continue.

L'article 2 réforme le Conseil des ventes volontaires, autorité de régulation de ce secteur d'activité, en le renommant « Conseil des maisons de vente » et en modifiant ses missions, sa composition, les conditions d'exercice de son pouvoir disciplinaire ainsi que ses modalités de financement.

L'article 3 autorise les opérateurs de ventes volontaires à réaliser les inventaires dits « fiscaux » à la suite d'un décès.

L'article 5 étend le régime des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques défini par le code de commerce à la vente de meubles incorporels, sous réserve de dispositions particulières.

L'article 6 prévoit que la vente de biens appartenant à une personne mineure ou majeure sous tutelle peut, si l'autorisation prévoit qu'elle a lieu aux enchères publiques, être organisée et réalisée par un opérateur de ventes volontaires.

L'article 7 fixe les conditions nécessaires pour jouir de la qualification de commissaires de justice.

L'article 8 allège le formalisme des ventes de gré à gré en exigeant uniquement l'établissement d'un mandat écrit.

L'article 9 permet le regroupement du registre d'objets mobiliers (historiquement qualifié de « livre de police ») et du répertoire des procès-verbaux des ventes aux enchères et de leurs adjudications.

L'article 10 inscrit dans la loi la jurisprudence de la Cour de cassation qui retient que l'adjudicataire défaillant ne peut pas se prévaloir de la résolution de la vente pour se soustraire à ses obligations.

L'article 11 autorise l'accès partiel de ressortissants des États membres de l'Union européenne et des États parties à l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) aux activités de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

II. Une loi majoritairement applicable

À l'exception d'un article, pour lequel une mesure réglementaire d'application était encore attendue au 31 mars 2023, la plupart des dispositions de la loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art sont applicables.

1. Les mesures d'application publiées

Le décret n° 2023-119 du 20 février 2023 relatif aux opérateurs de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et au Conseil des maisons de vente met en application les articles 1er (cf. article 11 du décret) et 2 (cf. articles 17, 19 et 26) de la loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art.

L'article 11 du décret précité précise les modalités de la formation professionnelle continue en prévoyant une durée minimale annuelle de 20 heures ou de 40 heures au cours de deux années consécutive. Cet article liste également les différents enseignements ou activités pouvant satisfaire l'obligation de formation professionnelle continue.

L'article 17 du décret organise les modalités d'élection des membres du collège du Conseil des maisons de vente. Il détaille notamment les qualités nécessaires pour être électeur et éligible au sein du Conseil des maisons de vente et prévoit un découpage en deux circonscriptions pour la tenue des élections (région Île-de-France d'une part et autres régions d'autre part). Le décret instaure une élection au scrutin plurinominal majoritaire à candidatures isolées, chaque électeur devant élire trois binômes constitués chacun d'un représentant et d'un titulaire. Le vote a lieu par voie électronique. Le Conseil des maisons de vente est chargé de l'organisation des opérations électorales.

Les articles 19 et 26 du décret prévoient, respectivement, en cas d'empêchement ou de démission, les modalités de remplacement d'un membre (titulaire ou suppléant) du Conseil des maisons de vente et des membres de la commission des sanctions.

2. Les mesures d'application manquantes

Au 31 mars 2023, n'avait toujours pas été adopté l'arrêté du ministre de la justice fixant le montant des cotisations professionnelles permettant d'assurer le financement du Conseil des maisons de vente. Le Sénat estime de manière constante qu'un arrêté constitue une mesure d'application de la loi. Ce texte réglementaire n'ayant pas été pris par le ministre concerné, l'application de l'article L. 321-19 du code de commerce, modifié par la loi n° 2022-267 du 28 février 2022, n'est à ce jour pas possible.

La loi n° 2022-267 du 28 février 2022 reste donc partiellement applicable.

(15) Loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation

Adoptée à l'initiative du député Patrick Vignal et des membres du groupe La République en Marche et apparentés, la loi du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation a modifié les règles relatives au nom d'usage et simplifié la procédure de changement de nom dans l'hypothèse où la demande est présentée par une personne majeure qui souhaite porter le nom du parent qui ne lui a pas transmis le sien, par adjonction ou substitution.

L'article 1er a intégré dans le code civil une disposition préexistante qui permet de porter à titre d'usage le nom de ses deux parents445(*) et en a prévu deux évolutions principales : la possibilité de substituer le nom d'un parent à celui de l'autre, et non pas simplement de l'adjoindre, et la faculté unilatérale pour un parent d'adjoindre son nom à titre d'usage à celui de son enfant mineur446(*), à charge pour lui d'en informer à l'avance l'autre parent qui pourrait, s'il s'y oppose, saisir le juge aux affaires familiales.

L'article 2, qui est la mesure-phare de ce texte, a créé une procédure simplifiée de changement de nom de famille par simple déclaration devant l'officier de l'état civil dans le cas où la personne majeure souhaite porter le nom du parent qui ne lui a pas transmis le sien447(*). Ce changement de nom n'est consigné qu'après un délai de réflexion d'un mois et confirmation par l'intéressé de sa demande devant l'officier de l'état civil à son issue.

Cette faculté de changer de nom sans justifier d'un quelconque motif est offerte à chacun une fois dans sa vie, tout changement ultérieur relevant de la procédure de changement de nom prévue par l'article 61 du code civil qui nécessite la démonstration d'un intérêt légitime et une autorisation par décret.

L'article 2 bis, adopté en séance par les députés, donne compétence à la juridiction pénale qui prononce un retrait de l'autorité parentale pour se prononcer sur le changement de nom de l'enfant et lui permettre ainsi de se reconstruire sous une nouvelle identité. L'article 3 permet à un majeur protégé sous tutelle de présenter lui-même une demande de changement de prénom à l'officier de l'état civil, sans passer par son représentant légal, ce qui est conforme au renforcement de l'autonomie des majeurs protégés engagé depuis 2007.

Cette loi, en vigueur depuis le 1er juillet 2022, est d'application directe.

La circulaire de présentation, comprenant des modèles de formulaire et des fiches pratiques, a été publiée dès le 3 juin 2022448(*).

Selon les données collectées par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), entre le 1er août 2022 et le 31 mars 2023, près de 77 000 personnes ont changé de nom contre 21 000 sur la même période un an avant, soit 56 000 de plus. La majorité de ces demandes auraient été enregistrées dès l'été 2022449(*), soit bien plus qu'annoncé en séance par le garde des sceaux, qui avait déclaré : « en définitive, il y aura probablement très peu de demandes »450(*), après s'être référé aux 2 000 dossiers en cours qui demandaient l'adjonction ou la substitution du nom de l'un des parents.

Un changement de nom suppose de faire refaire l'ensemble des titres d'identité, permis de conduire ou carte vitale, ce qui ne semble pas avoir été bien perçu par certains demandeurs. Interrogé à ce sujet par le sénateur de l'Oise Jérôme Bascher, le ministère de la justice a répondu avoir modifié le formulaire CERFA relatif à la demande de changement de nom pour intégrer une nouvelle rubrique intitulée « Conséquences sur vos titres d'identité (carte nationale d'identité, passeport) »451(*).

La loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation est d'application directe.

(16) Loi organique n° 2022-400 du 21 mars 2022 visant à renforcer le rôle du Défenseur des droits en matière de signalement d'alerte

Issue d'une initiative du député Sylvain Waserman, la loi organique n° 2022-400 du 21 mars 2022 étend le champ de compétence du Défenseur des droits en matière de recueil et de traitement des alertes ainsi que d'accompagnement de leurs auteurs.

I. Les principales dispositions de la loi organique

Dans le détail, l'article 1er consacre explicitement la compétence du Défenseur des droits pour « conseiller et informer »452(*) les lanceurs d'alerte mais également pour « défendre » leurs droits et libertés453(*). Par ailleurs, le périmètre d'intervention du Défenseur des droits est également étendu aux « facilitateurs ».

Introduit à l'initiative du rapporteur, Catherine Di Folco, lors de l'examen en commission au Sénat454(*), l'article 2 autorise la création d'un adjoint au Défenseur des droits spécialement en charge de l'exercice de ses nouvelles compétences en matière de lanceurs d'alerte.

L'article 3 consacre le Défenseur des droits comme autorité externe de recueil et de traitement des alertes. Surtout, il lui attribue deux nouvelles compétences clés du nouveau régime d'alerte. Il s'agit, d'une part, de la possibilité de recueillir tout signalement aux fins de traitement ou, le cas échéant, de réorientation du lanceur d'alerte vers l'autorité de signalement externe la mieux à même d'en connaître et, d'autre part, de la nouvelle faculté accordée au Défenseur des droits de rendre un avis sur la qualité de lanceur d'alerte de tout demandeur.

L'article 4 confie au Défenseur des droits une mission générale d'évaluation du système de protection des lanceurs d'alerte en France. Dans ce cadre, celui-ci doit notamment produire tous les deux ans un rapport sur le fonctionnement global de ce système, « à partir des informations transmises par les autorités compétentes pour traiter et recueillir les signalements. »

II. Une loi organique entièrement applicable

Un seul des quatre articles composant la loi organique devait faire l'objet de mesures réglementaires d'application. Il s'agit de l'article 3 pour lequel un décret en Conseil d'État devait préciser les « délais et garanties de confidentialité » applicables à la procédure de recueil et de traitement des signalements par le Défenseur des droits.

Pris en application dudit article 3, le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 détaille ces éléments. La procédure de recueil et de traitement des signalements par le Défenseur des droits est la même que celle qui s'applique aux autorités externes mentionnées en annexe de ce décret455(*).

S'agissant des garanties de confidentialité, la procédure doit notamment protéger l'identité des auteurs de signalement ainsi que des autres personnes impliquées. Par ailleurs, seules les personnes disposant « par leur positionnement ou leur statut, de la compétence, de l'autorité et des moyens suffisants à l'exercice de leurs missions » peuvent être chargées de l'instruction des signalements. Elles reçoivent pour ce faire une formation spécifique.

S'agissant des délais, le Défenseur des droits doit informer l'auteur du signalement des suites données à sa démarche dans un délai de trois mois à compter de la réception de l'alerte (un accusé de réception devant également être produit sous sept jours). Ce délai peut néanmoins être porté à six mois lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient et sous réserve que l'auteur du signalement en soit dûment informé avant l'expiration du délai de droit commun de trois mois.

La loi organique n° 2022-400 du 21 mars 2022 visant à renforcer le rôle du Défenseur des droits en matière de signalement d'alerte est donc entièrement applicable.

(17) Loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte

Issue d'une initiative du député Sylvain Waserman, la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 vise à renforcer le régime français de protection des lanceurs d'alerte456(*). Défini par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique - ou « Sapin II » -, le cadre précédent n'était en effet que partiellement conforme au droit européen, et en particulier aux dispositions de la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l'Union. Le délai de transposition de cette directive était par ailleurs fixé au 17 décembre 2021.

Initialement composée de 13 articles, la proposition de loi a été enrichie au Sénat afin, d'une part, de préciser les modalités d'application du dispositif, en particulier le champ de l'alerte, les modalités de signalement des faits allégués, et le périmètre des mesures de protection contre les représailles. D'autre part, le Sénat a souhaité garantir l'équilibre entre l'indispensable protection des lanceurs d'alerte et la préservation des autres intérêts concernés, parmi lesquels la sauvegarde des secrets protégés par la loi et de la réputation des personnes physiques ou morale qui pourraient être mises en cause à tort457(*). Dans la suite de la navette, le texte a fait l'objet d'une commission mixte paritaire conclusive avant une adoption définitive par l'Assemblée nationale le 8 février puis par le Sénat le 16 février 2022.

Sur les 17 articles que compte la loi, 15 sont d'application directe. Relatif aux règles procédurales d'alerte, l'article 3 concentre 6 des 7 mesures réglementaires d'application prévues par le texte. La dernière mesure d'application est prévue par l'article 8, qui autorise le conseil de prud'hommes à enjoindre l'employeur, à titre de sanction, à abonder le compte personnel de formation (CPF) d'un salarié lanceur d'alerte.

Au 31 mars 2023, 85 % des mesures d'application ont été publiées, et la majorité des dispositions de cette loi sont donc applicables. Le principal manque concerne les mesures d'application des dispositions de l'article 3 introduites par la commission des lois du Sénat en première lecture458(*) et visant à autoriser la mutualisation des procédures de signalement interne dans les sociétés appartenant à un même groupe.

I. Les principales dispositions de la loi

L'article 1er met en conformité la définition du lanceur d'alerte fixée par la loi « Sapin II » et les conditions de fond pour bénéficier des protections correspondantes avec les exigences fixées par le droit européen.

L'article 2 étend le bénéfice du régime de protection des lanceurs d'alerte aux personnes physiques ou morales ayant joué le rôle de « facilitateur ».

L'article 3 réforme les règles procédurales à suivre pour pouvoir se placer sous la protection du statut de lanceur d'alerte et clarifie l'articulation entre leurs différentes étapes (signalement interne, signalement externe, divulgation publique).

L'article 4 oblige les entreprises à mentionner explicitement l'existence d'un dispositif de protection des lanceurs d'alerte dans leur règlement intérieur.

L'article 5 renforce le régime de protection de la confidentialité de l'identité des lanceurs d'alerte ainsi que des autres personnes impliquées dans le signalement.

L'article 6 ajuste le régime de protection contre les représailles dont jouissent les lanceurs d'alerte en fonction des prescriptions du droit européen. Ces derniers se voient ainsi exonérés de toute responsabilité civile lorsque l'alerte a causé un dommage et le champ de leur irresponsabilité pénale est étendu.

Les articles 7, 15 et 16 précisent l'articulation entre le régime général d'alerte et les régimes sectoriels propres à certaines catégories d'individus, de faits ou de domaine d'activité.

L'article 8 prévoit, d'une part, la possibilité pour le conseil de prud'hommes d'obliger l'employeur d'un lanceur d'alerte auteur de représailles à abonder son CPF et, d'autre part, l'impossibilité que le recours d'un lanceur d'alerte fasse l'objet d'une renonciation ou d'une limitation d'aucune sorte.

L'article 9 renforce les sanctions civiles et pénales auxquelles s'exposent les auteurs de mesures de rétorsion ou de procédures dites « bâillons » à l'encontre d'un lanceur d'alerte.

L'article 10 étend aux lanceurs d'alerte le bénéfice des protections contre les discriminations au travail.

L'article 12459(*) prévoit la possibilité pour les autorités externes saisies par un lanceur d'alerte d'assurer des actions de soutien psychologique et financier à leur égard.

L'article 13 autorise le juge administratif à enjoindre l'administration à réintégrer un lanceur d'alerte ayant perdu son emploi en conséquence de son signalement.

L'article 14 affirme que l'opposabilité du secret des affaires n'est levée qu'à la condition que le lanceur d'alerte ait respecté les procédures de signalement.

L'article 17 procède aux coordinations nécessaires pour l'application de ce texte en Polynésie Française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna.

L'article 18 précise les modalités d'entrée en vigueur de la loi.

II. Une loi majoritairement applicable

À l'exception de deux éléments pour lesquels des mesures réglementaires d'application étaient encore attendues au 31 mars 2023, la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte est applicable.

1. Les mesures d'application publiées

· Pris en application de l'article 3 de la loi, le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 détaille, premièrement, le contenu des procédures internes et externes de recueil et de traitement des alertes.

À cette fin, il détermine, pour la procédure de signalement interne :

- les modalités de calcul du seuil de 50 salariés à partir duquel la mise en place d'une telle procédure est obligatoire ainsi que les conditions de son établissement ;

- les modalités de dépôt du signalement, en particulier les vecteurs de transmission (écrits ou oraux) et la nature des documents admis pour l'étayer (« tout élément, quel que soit sa forme et son support ») ;

- les différentes étapes du traitement du signalement, comprenant :

o une vérification préalable du respect par l'auteur du signalement des règles procédurales d'alerte, avec la possibilité de lui demander des informations complémentaires et, le cas échéant de le réorienter vers l'autorité de traitement la plus compétente ;

o la conduite d'une phase d'instruction visant à apprécier l'exactitude des allégations et, le cas échéant, à remédier aux faits soulevés;

o un retour d'information régulier à l'auteur du signalement, avec un accusé de réception produit sous sept jours et une information sur les suites qui y ont été données sous trois mois ;

o le cas échéant, la clôture de la procédure, lorsque les allégations sont inexactes ou infondées ou que le signalement est devenu sans objet.

- les garanties d'indépendance et d'impartialité de la procédure, en précisant notamment les modalités de désignation des personnes ou services compétents pour le traitement du signalement ainsi que de recueil et de conservation des données correspondantes (enregistrement intégral ou procès-verbal précis) ;

- les conditions dans lesquelles le recueil des signalements peut être confié à un tiers ainsi que les conditions de mutualisation de la procédure par les entreprises de moins de 250 salariés ;

- les modalités de publicité de la procédure par l'entité concernée.

S'agissant de la procédure de signalement externe, il détermine :

- la liste des autorités externes compétentes pour recueillir et traiter des signalements, avec une répartition entre 23 catégories d'activité ;

- en « miroir » des dispositions relatives à la procédure interne, les modalités de dépôt et de traitement du signalement, les garanties d'indépendance et d'impartialité de la procédure ainsi que les conditions dans lesquelles les informations recueillies peuvent être communiquées à des tiers. Sur le fond, les dispositions sont pour l'essentiel analogues. La principale différence réside dans l'extension à 6 mois du délai dont l'autorité externe dispose pour informer l'auteur d'un signalement des suites qui lui ont été données lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient. Celle-ci est par ailleurs autorisée à traiter en priorité les signalements les plus graves en cas d'afflux importants de signalements. Enfin, il est prévu un dispositif spécifique de formation des personnes habilitées à traiter les signalements ;

- les conditions d'évaluation des procédures externes, lesquelles doivent faire l'objet d'un réexamen triennal ;

- les modalités de publicité de la procédure par l'ensemble des autorités externes désignées, ainsi que le périmètre des informations transmises annuellement au Défenseur des droits aux fins d'établissement de son rapport sur l'exercice du droit d'alerte.

Deuxièmement, le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 précise le délai à l'issue duquel les protections liées au statut de lanceur d'alerte s'appliquent aux personnes qui, après avoir effectué un signalement externe et en l'absence de retour de l'autorité compétente, ont procédé à la divulgation publique d'informations. Ledit délai est de six mois à compter de l'accusé de réception du signalement par le Défenseur des droits, l'autorité judiciaire ou d'une institution européenne. En parallèle du délai de retour d'information, il est de trois mois lorsque le signalement a été adressé à l'une autre des autorités listées en annexe du décret460(*).

· Pris en application de l'article 8 de la loi, le décret n° 2022-1686 du 28 décembre 2022 précise les conditions dans lesquelles le conseil de prud'hommes peut ordonner, à titre de sanction, l'abondement du compte personnel de formation d'un salarié lanceur d'alerte. Il détermine en particulier la procédure de fixation du montant et de son versement par l'employeur à la Caisse des dépôts, ainsi que les modalités pratiques d'alimentation du CPF du salarié.

2. Les mesures d'application manquantes

Au 31 mars 2023, deux mesures réglementaires d'application de l'article 3 étaient encore attendues.

Doivent premièrement encore être précisées les conditions selon lesquelles la procédure de signalement interne peut être mutualisée entre des sociétés appartenant à un même groupe, de manière à assouplir les obligations formelles imposées à chacune des filiales et à réduire les coûts correspondants. Si cette adaptation du dispositif d'alerte interne aux groupes de société est à l'origine d'un débat juridique, la Commission européenne avait, dans un courrier en date du 2 juin 2021 procédé à une interprétation constructive du texte et ouvert la porte à de telles dérogations461(*).

Il est à cet égard regrettable que, dans l'attente d'une clarification des exigences de la directive par le Cour de justice de l'Union européenne, ces modalités d'adaptation aux groupes de société des procédures de signalement n'aient pas été explicitement intégrées dans le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 précité. Pour rappel, cette possibilité avait été introduite lors de l'examen en commission au Sénat de la proposition de loi, à l'initiative de le rapporteur Catherine Di Folco462(*).

S'il est possible de considérer que les conditions de mutualisation des moyens prévues au II de son article 7 pour l'ensemble des entreprises comptant entre 50 et 249 salariés couvrent, dans une certaine mesure, le cas des groupes de société, cela ne répond que partiellement à l'intention du législateur. En prévoyant la possibilité d'une procédure commune au sein d'un groupe, celui-ci a, d'une part, entendu aller au-delà d'une seule mutualisation des moyens. D'autre part, ne figurent pas non plus dans le décret les « conditions dans lesquelles des informations relatives à un signalement effectué au sein de l'une des sociétés d'un groupe peuvent être transmises à une autre de ses sociétés, en vue d'assurer ou de compléter leur traitement ».

Deuxièmement, le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 précité ne détaille pas les modalités selon lesquelles plusieurs autorités externes peuvent échanger des informations en vue de traiter un signalement. Le II de l'article 3 de la loi renvoie en effet au niveau réglementaire la définition de ces modalités dans les cas où un signalement adressé à une autorité externe « ne relève pas de sa compétence » ou relève « également de la compétence d'autres autorités ». Si le II de l'article 10 du décret définit bien, dans le premier cas, les conditions de transmission du dossier vers l'autorité compétente, il ne prend en revanche pas en compte l'hypothèse d'une compétence conjointe. Celle-ci est pourtant explicitement prévue par la loi qui dispose que « le décret précise également les conditions dans lesquelles les autorités externes peuvent échanger des informations en vue de traiter le signalement ».

La loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte reste donc partiellement applicable.

(18) Loi n° 2022-1089 du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19

Composée de cinq articles, la loi n° 2022-1089 du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19 poursuivait trois objectifs principaux :

- abroger l'ensemble des dispositifs d'exception créés depuis mars 2020 afin de lutter contre l'épidémie liée à la covid-19 ;

- maintenir un dispositif de veille sanitaire permettant le suivi des cas de contaminations et la lutte contre la diffusion de potentiels nouveaux variants émergents ;

- prévoir la suspension de l'obligation vaccinale des personnels au contact des personnes fragiles dès que la situation sanitaire ne l'exigerait plus

1. L'abrogation formelle des régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19

Alors que pendant plus de deux ans, chaque projet de loi présenté au Parlement proposait la prolongation des régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19 - régime de l'état d'urgence sanitaire et régime de gestion de la crise sanitaire -, ce n'était pas le cas du projet de loi présenté par le Gouvernement en juillet 2022. Ces deux régimes ont donc cessé d'être applicables à compter du 1er août 2022. En conséquence, le conseil scientifique covid-19 a cessé ses travaux à cette même date.

Afin de donner toute sa lisibilité au droit et de consacrer le retour au droit commun, sous réserve des deux dispositions prévues aux articles 2 et 3 de la loi, le législateur a choisi, à l'initiative du Sénat, d'abroger formellement la partie du code de la santé publique relative à l'état d'urgence sanitaire et les dispositions législatives prévoyant le régime de gestion de la crise sanitaire (article 1er de la loi).

Le décret n° 2022-1097 du 30 juillet 2022 relatif aux mesures de veille et de sécurité sanitaire maintenues en matière de lutte contre la covid-19 a en conséquence abrogé, dans son article 10, le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire qui servait de base aux mesures édictées par le Gouvernement pour lutter contre l'épidémie de la covid-19 sur le fondement des deux régimes d'exception précités.

À l'initiative de l'Assemblée nationale, le législateur avait également demandé « une évaluation du cadre juridique en vigueur, y compris en matière de traitements de données à caractère personnel, afin de faire le bilan des moyens à la disposition des autorités publiques pour lutter contre les pandémies et, le cas échéant, de les redéfinir sans avoir recours à un régime d'exception » (article 5 de la loi). Ce rapport n'a cependant jamais été rendu.

2. Le maintien d'un dispositif de veille sanitaire permettant le suivi des cas de contamination et la lutte contre la diffusion de potentiels nouveaux variants émergents

a. Permettre le suivi du virus et la délivrance des certificats de test et de rétablissement requis au niveau européen

Afin de permettre le suivi de l'évolution du virus, l'article 2 de la loi a prévu de prolonger jusqu'au 31 janvier 2023 les systèmes d'information liés à la covid-19. Il s'agissait, d'une part, du traitement SI-DEP, qui centralise les résultats de tests de dépistage de la covid-19, les met à disposition des organismes chargés de réaliser des enquêtes sanitaires pour rompre les chaînes de contamination, ainsi que de « Santé publique France » sous une forme pseudonymisée aux fins de surveillance épidémiologique et de recherche sur le virus. Il s'agissait d'autre part du traitement « Contact Covid », qui permet d'identifier les personnes infectées et celles présentant des risques d'infection (« cas contact »), et d'orienter ces personnes vers des prescriptions médicales d'isolement prophylactique.

Le législateur a également prévu, compte tenu des évolutions du droit européen qui impose aux États membres jusqu'au 30 juin 2023 de délivrer des certificats de test et de rétablissement, dans le cas où de tels documents seraient exigés par un autre État membre, de prolonger jusqu'au 30 juin 2023 la base juridique permettant la continuité du système d'information SI-DEP, avec le consentement des personnes concernées, pour les seules finalités suivantes : la centralisation des données des tests et la délivrance de justificatifs d'absence de contamination par la covid-19 et de certificats de rétablissement. La surveillance épidémiologique et la recherche sur le virus seraient également prolongées jusqu'au 30 juin 2023 (date à laquelle le traitement lui-même cesserait d'exister), uniquement sous une forme pseudonymisée.

Le décret n° 2023-99 du 15 février 2023 modifiant le décret n° 2020-551 du 12 mai 2020 relatif aux systèmes d'information mentionnés à l'article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, et le décret n° 2020-1690 du 25 décembre 2020 autorisant la création d'un traitement de données à caractère personnel relatif aux vaccinations contre la covid-19 a donc mis fin, une fois la date du 31 janvier 2023 passée, au traitement de données à caractère personnel « Contact Covid » et modifié les caractéristiques du traitement « SI-DEP » et des traitements mis en oeuvre par les agences régionales de santé pour lutter contre l'épidémie de covid-19.

b. Le maintien d'un certificat sanitaire de voyage pour limiter la diffusion d'éventuels nouveaux variants et protéger les plus vulnérables

Afin de maintenir des possibilités de limiter la diffusion d'éventuels nouveaux variants et de protéger les territoires les plus vulnérables, le législateur a, dans l'article 3 de la loi, prévu que le Gouvernement pourrait conditionner, entre le 1er août 2022 et le 31 janvier 2023, les déplacements à destination des territoires ultramarins à la présentation d'un résultat de test négatif, mais uniquement en cas de risque de saturation imminente du système de santé de ces territoires.

S'agissant des déplacements vers le territoire national en provenance de pays étrangers, le législateur a prévu la possibilité pour le Gouvernement, à compter du 1er août 2022 et jusqu'au 31 janvier 2023, d'imposer la présentation d'un résultat de test négatif, mais seulement en cas d'apparition et de circulation d'un nouveau variant de la covid-19 susceptible de constituer une menace sanitaire grave. L'application de ce dispositif au-delà de deux mois devait cependant être autorisée par la loi.

Ces deux mesures ne pouvaient être décidées qu'après avis d'une autorité scientifique compétente désignée par voie réglementaire. Le décret n° 2022-1099 du 30 juillet 2022 instituant un comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires a chargé le nouveau comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires, créé en remplacement du conseil scientifique covid-19, de cette mission.

Ces deux dispositifs n'ont jamais été utilisés. Le décret n° 2022-1771 du 30 décembre 2022 instaurant des contrôles sanitaires pour les vols en provenance de Chine, qui imposait, jusqu'au 15 février 2023463(*), la présentation d'un test négatif à la covid-19 à l'embarquement pour les voyageurs en provenance de Chine ne se basait pas sur l'article 3 de la loi - qui n'étaient en effet pas applicable en raison de l'absence d'émergence d'un nouveau variant en Chine - mais sur les circonstances exceptionnelles.

3. La suspension de l'obligation vaccinale des personnels au contact des personnes fragiles dès que la situation sanitaire ne l'exige plus

L'article 4 de la loi a prévu que l'obligation vaccinale des personnels de santé devra être suspendue dès que la situation sanitaire ou les connaissances médicales et scientifiques ne la justifieront plus, alors qu'il s'agissait jusqu'alors d'une simple possibilité laissée à l'appréciation du Gouvernement.

Le constat selon lequel la situation sanitaire ou les connaissances médicales et scientifiques ne justifient plus l'obligation vaccinale doit être réalisé par la Haute Autorité de santé, qui peut s'autosaisir à cet effet ou être saisie par le ministre chargé de la santé, par le Comité de contrôle et de liaison covid-19, chargé d'associer la société civile et le Parlement aux opérations de lutte contre la propagation de l'épidémie, ou encore par l'une des commissions chargées des affaires sociales de l'Assemblée nationale ou du Sénat.

Dans une décision du 29 mars 2023 la Haute Autorité de santé s'est prononcé en faveur de la levée de cette obligation464(*). Le ministre de la santé en a pris acte, et a indiqué qu'il prendrait prochainement un décret en ce sens après un temps de concertation avec les fédérations et les ordres professionnels afin de permettre la réintégration des personnels concernés dans de bonnes conditions.

La loi n° 2022-1089 du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19 est entièrement applicable.

(19) Loi n° 2022-1137 du 10 août 2022 ratifiant l'ordonnance n° 2021-1605 du 8 décembre 2021 étendant et adaptant à la fonction publique des communes de Polynésie française certaines dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale

La loi n° 2022-1137 du 10 août 2022 a été adoptée en lecture définitive par l'Assemblée nationale le 3 août 2022, après qu'un accord a été trouvé en commission mixte paritaire le 28 juillet 2022.

Cette loi permet d'actualiser le statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française au regard des évolutions législatives intervenues dans le droit de la fonction publique territoriale depuis 2011.

Sur les 20 articles que compte la loi n° 2022-1137 du 10 août 2022, 15 sont d'application directe, et 5 nécessitent une mesure d'application (pour trois de ces articles, il s'agit de la même mesure d'application).

Au titre des articles d'application directe, est compté un article prévoyant la remise d'un rapport.

Les articles 7, 8 et 9 de la loi n° 2022-1137 du 10 août 2022 restaurent le dispositif de lutte contre les conflits d'intérêts centré sur la commission de déontologie qui préexistait à l'ordonnance n° 2021-1605 du 8 décembre 2021.

Ils prévoient que la composition et les modalités de la commission de déontologie, qui relève du Conseil supérieur de la fonction publique des communes de la Polynésie française, sont prévues par un arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Cet arrêté n'a pas encore été pris.

L'article 13 de la loi n° 2022-1137 du 10 août 2022 aligne les modalités de recrutement des personnes handicapées sur le droit de la fonction publique territoriale. À cette fin, il supprime la procédure des emplois réservés aux personnes reconnues travailleurs handicapés, et donne une base législative aux aménagements touchant les modalités de déroulement des concours, de recrutement et des examens à l'attention des candidats reconnus travailleurs handicapés.

Il prévoit que les conditions d'application des dérogations ainsi prévues aux règles de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont fixées par un arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Cet arrêté n'a pas encore été pris.

L'article 19 inscrit dans l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs le droit pour les agents publics d'exercer ses fonctions dans le cadre du télétravail.

Il prévoit qu'un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'organisation du télétravail, les conditions dans lesquelles la commission administrative paritaire compétente peut être saisie par le fonctionnaire intéressé en cas de refus opposé à sa demande de télétravail ainsi que les possibilités de recours ponctuel au télétravail.

Ce décret en Conseil d'État n'a pas encore été pris. D'après l'échéancier publié le 28 mars dernier, sa publication est prévue pour le mois d'octobre 2023.

Enfin, l'article 20 prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai de 6 mois à compter de la promulgation de la loi, d'un rapport au Parlement présentant : les contraintes budgétaires pesant sur les communes de la Polynésie française ; les possibilités pour les communes de mener à bien certaines politiques, notamment dans le domaine de l'action sociale, du handicap ou du financement des congés avec traitement pour les activités en lien avec l'armée ; différentes pistes pour lever les obstacles budgétaires auxquels les communes de la Polynésie française font actuellement face ; ainsi que l'opportunité de permettre aux communes, aux groupements de communes et aux établissements publics de la Polynésie française de verser une indemnité de départ volontaire aux agents publics qui quittent définitivement la fonction publique des communes de la Polynésie française.

Ce rapport, qui devait être remis au plus tard le 10 février 2023, n'a toujours pas été rendu.

La loi n° 2022-1137 du 10 août 2022 ratifiant l'ordonnance n° 2021-1605 du 8 décembre 2021 étendant et adaptant à la fonction publique des communes de Polynésie française certaines dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est entièrement inapplicable au 31 mars 2023.

De plus, le rapport qui était à rendre au Parlement par le Gouvernement avant le 10 février 2023 n'a toujours pas été remis.

(20) Loi n° 2022-1159 du 16 août 2022 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne

La loi n° 2022-1159 du 16 août 2022 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne est une loi d'adaptation de la législation française aux dispositions du règlement (UE) 2021/784 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2021 relatif à la lutte contre la diffusion des contenus à caractère terroriste en ligne (règlement dit « TCO »). Ce règlement européen a pour principal objet d'imposer aux fournisseurs de services d'hébergement qui proposent des services dans l'Union européenne le retrait de contenus terroristes diffusés en ligne dans l'heure qui suit une injonction délivrée, selon un modèle établi, par une autorité compétente désignée par chaque État membre. Il est en vigueur depuis le 7 juin 2022.

Bien que s'agissant d'une mise en conformité du droit français avec la législation européenne en matière de lutte contre le terrorisme, l'initiative de la loi n° 2022-1159 du 16 août 2022 a été d'origine parlementaire465(*), sans doute pour des raisons de célérité, l'échéance du 7 juin 2022 n'ayant pas été suffisamment anticipée.

L'article unique insère cinq articles au sein de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (dite « LCEN »), afin principalement de déterminer l'autorité compétente pour enjoindre aux fournisseurs de services d'hébergement de retirer des contenus à caractère terroriste, les peines applicables en cas de manquement à l'obligation d'y déférer et les voies de recours contre ces injonctions.

Par décision n° 2022-841 DC du 13 août 2022, le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions du texte adopté ne méconnaissaient pas la liberté d'expression et de communication, tout en rappelant le caractère restreint de son contrôle lorsque des dispositions législatives se bornent à tirer les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises des dispositions d'un règlement de l'Union européenne.

Cependant, faute de décret d'application, cette loi n'est pas applicable.

Le décret définissant les modalités d'application de son article unique et, en particulier, les modalités d'échange d'informations entre les différentes autorités nationales466(*) ou étrangères impliquées dans les procédures d'injonction de retrait, n'est toujours pas publié. S'agissant de modalités qui concernent directement le fonctionnement de l'Arcom et des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, l'Autorité et le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en sont actuellement saisis pour avis. La publication du décret est envisagée en juin ou juillet 2023.

Dans l'attente de ce décret, aucune injonction de retrait nationale n'a pu être émise sur le fondement du nouvel article 6-1-1 de la LCEN par l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), tandis qu'aucune injonction de retrait transfrontalière venue d'une autorité européenne ne peut être traitée467(*).

Seule la nomination d'un suppléant de la personnalité qualifiée nommée au sein de l'Arcom qui examine les injonctions de retrait est intervenue468(*).

La conformité du droit français au règlement TCO n'est donc qu'apparente.

La loi n° 2022-1159 du 16 août 2022 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne n'est pas applicable.


* 414 Décret n° 2021-1671 du 16 décembre 2021 modifiant le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire.

* 415 L'état d'urgence sanitaire y avait été déclaré par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, prorogé par l'article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, prorogé jusqu'au 30 octobre 2020 sur ce territoire spécifiquement par l'article 2 de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, puis déclaré à nouveau par le décret le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 et prorogé sans interruption depuis.

* 416 Il s'agit :

- du décret fixant les missions et l'organisation de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, prévu à l'article 4 de la loi et satisfait par le décret n° 2008-1219 du 25 novembre 2008, qui a créé les articles R. 3222-16 à R. 3222-17 du code de la défense ;

- et du décret fixant les modalités de nomination et la durée du mandat des membres de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, prévu à l'article 24 de la loi et satisfait le décret n° 2018-1269 du 26 décembre 2018, qui a créé l'article R. 1424-59 du code général des collectivités territoriales.

* 417 Il s'agit de l'arrêté du 30 décembre 2021 fixant le montant de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaire et de l'arrêté du 3 décembre 2021 relatif à la formation et au brevet national de jeune sapeur-pompier et de jeune marin-pompier.

* 418 À distinguer des enfants nés vivants et viables.

* 419 Jour, heure et lieu de l'accouchement, les prénoms et noms, dates et lieux de naissance, professions et domiciles des père et mère et, s'il y a lieu, ceux du déclarant.

* 420 Circulaire de présentation des dispositions issues de la loi n°2021-1576 du 6 décembre 2021 visant à nommer les enfants nés sans vie du 12 juillet 2022 (JUSC2220409C).

* 421 Décret n° 2022-290 du 1er mars 2022 portant application de certaines dispositions de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique et modifiant diverses dispositions relatives à l'état civil.

* 422 Décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022 modifiant le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire.

* 423 Ces dispositions, dont l'application serait redondante en l'espèce, prévoient un relèvement des peines encourues dans le cas où le crime ou le délit est « précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe, son orientation sexuelle ou identité de genre vraie ou supposée, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons ».

* 424 Hors conventions internationales, 61 textes ont été adoptés définitivement sur l'année parlementaire 2021-2022, 54 sur l'année parlementaire 2020-2021 et 42 sur l'année parlementaire 2019-2020.

* 425 Les articles 8, 9 et 16 ont fait l'objet d'une délégation au fond à la commission des affaires économiques tandis que les articles 11, 12 et 17 ont fait l'objet d'une délégation au fond à la commission des affaires sociales.

* 426 La remise du rapport n'ayant toutefois pas été effectuée à cette date.

* 427 Une liste non exhaustive de ces biens, droits, obligations et sûretés figure par ailleurs aux 1° à 5° du nouvel article R. 526-26 du code de commerce.

* 428 À savoir, le nom ou nom d'usage précédé ou suivi immédiatement des mots : « entrepreneur individuel » ou des initiales : « EI ».

* 429 Seules les créances nées postérieurement à l'inscription de l'entrepreneur individuel au registre d'activité dont il relève sont concernées et, lorsque la date d'immatriculation est soit postérieure à la date déclarée du début d'activité ou à défaut d'immatriculation, « la première utilisation de la dénomination [d'entrepreneur individuel] vaut date déclarée de début d'activité pour identifier le premier acte exercé en qualité d'entrepreneur individuel ».

* 430 Le décret n° 2022-1618 du 22 décembre 2022 a été pris à la fois en application de l'article 1 et du III de l'article 4 de la loi. En effet, il précise les conditions d'application de l'article L. 133-4-7 du code de la sécurité sociale modifié par l'article 4 et auquel le nouvel article L. 526-24 du code de commerce créé par l'article 1 fait référence.

* 431 Articles D. 526-28 et D. 526-29 du code de commerce.

* 432 L'article D. 526-30 du code de commerce prévoie la publication d'un avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, tandis que son article D. 526-31 prévoie une saisine du tribunal compétent selon les règles de droit commun et dans un délai d'un mois à compter de la parution dudit avis.

* 433 Il modifie pour ce faire l'article R. 642-40 du code de commerce qui prévoit que la publicité soit faite par le mandataire de justice au moyen d'un service informatique accessible par internet et, dans le cas d'une cession d'entreprise, par voie de presse.

* 434 Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 relative à l'exercice en société des professions libérales réglementées. Est citée la nouvelle possibilité pour les SPFPL d'investir dans des sociétés d'experts-comptables créées sous l'ordonnance de 1945.

* 435 L'habilitation s'étendait d'ailleurs aux collectivités régies par l'article 73 de la Constitution.

* 436 Article 21 de cet avant-projet.

* 437 Rapport de la Cour des Comptes, Les médecins et les personnels de santé scolaire, mai 2020, consultable à l'adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-05/20200527-rapport-58-2-medecins-personnels-sante-scolaire.pdf.

* 438 Réponse à la question écrite n° 05317 de Françoise Gatel, consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/questions/base/2023/qSEQ230205317.html.

* 439 Voir le rapport d'information n° 1003 (XVIème législature) sur l'évaluation de la prise en compte du retrait-gonflement des argiles fait par Sandra Marsaud et Sandrine Rousseau, consultable à l'adresse suivante : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/cec/l16b1003_rapport-information#.

* 440 Une proposition de loi visant à mieux indemniser les dégâts sur les biens immobiliers causés par le retrait-gonflement de l'argile a été adoptée le 6 avril 2023 à l'Assemblée nationale.

* 441 Ordonnance n° 2022-1292 du 5 octobre 2022 prise en application de l'article 18 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption.

* 442 Projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2022-1292 du 5 octobre 2022 prise en application de l'article 18 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption, n° 1007.

* 443 En application de l'article L.147-12 du code de l'action sociale et des familles.

* 444 Amendement n°507 déposé le samedi 28 novembre 2020.

* 445 Article 43 de la loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 relative à l'égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs.

* 446 Avec son consentement si le mineur a plus de 13 ans.

* 447 Adjonction ou substitution du nom de l'un des parents, ou encore interversion de nom double.

* 448 Circulaire de présentation des dispositions issues de la loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation du 3 juin 2022 (JUSC2215808C).

* 449 Consultable à l'adresse : https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2023/01/14/changer-de-nom-la-conquete-de-soi_6157836_4497916.html.

* 450 Consultable à l'adresse : https://www.senat.fr/seances/s202202/s20220215/s20220215015.html.

* 451 Réponse du ministère de la justice publiée le 2 mars 2023 à la question écrite n°03905 (16e législature) de M. BASCHER Jérôme (Oise - Les Républicains) publiée le 24 novembre 2022.

* 452 Cette nouvelle prérogative s'ajoute aux prérogatives antérieures d'information des lanceurs d'alerte.

* 453 Plutôt que de « veiller » auxdits droits et libertés.

* 454 Amendement COM-2.

* 455 Voir le commentaire de la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 pour le détail de la procédure (modalités de dépôt et de traitement du signalement, condition de communication des informations à des tiers, évaluation et publicité de la procédure, etc.).

* 456 Dans sa rédaction issue de la présente loi, l'article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique définit le lanceur d'alerte en ces termes : « une personne physique qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l'intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d'une violation d'un engagement international ».

* 457 La proposition de loi a été modifiée par l'adoption de 38 amendements lors de son examen par la commission des lois et de 31 amendements lors de son examen en séance publique.

* 458 Amendement COM-26 du rapporteur.

* 459 L'article 11 a été déclaré contraire à la Constitution (Décision du Conseil constitutionnel n° 2022-839 DC du 17 mars 2022).

* 460 Lequel délai peut être étendu à six mois lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient et sous réserve que l'auteur du signalement en soit informé avant l'expiration du délai de droit commun de trois mois.

* 461 Voir le rapport n° 299 (2021-2022) de Catherine Di Folco sur le projet de loi, au nom de la commission des lois du Sénat (commentaire de l'article 1er).

* 462 Amendement COM-26.

* 463 Initialement prévus jusqu'au 31 janvier 2023, ces contrôles ont été prolongé jusqu'au 15 février par le décret n° 2023-36 du 27 janvier 2023 modifiant le décret n° 2022-1771 du 30 décembre 2022 instaurant des contrôles sanitaires pour les vols en provenance de Chine.

* 464 Décision n° 2023.0142/DC/SESPEV du 29 mars 2023 du collège de la Haute Autorité de santé adoptant le volet 1 de la recommandation vaccinale relative aux obligations et recommandations vaccinales des étudiants et professionnels des secteurs sanitaire, médicosocial et en contacts étroits avec de jeunes enfants (diphtérie, tétanos, poliomyélite, hépatite B, covid 19).

* 465 Proposition de loi n° 4883 d'Aude Bono-Vandorme, déposée à l'Assemblée nationale le 11 janvier 2022.

* 466 L'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), qui gère la plateforme de signalement PHAROS, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) et la personnalité qualifiée en son sein.

* 467 Au 13 avril 2023, aucune injonction de retrait transfrontalière n'avait heureusement été transmise à la personnalité qualifiée désignée au sein de l'Arcom.

* 468 L'Arcom a désigné Denis Rapone, membre du collège, en qualité de suppléant depuis le 6 mars 2023 (décision n° 2023-141 du 22 février 2023).

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