TROISIÈME PARTIE
UN DISPOSITIF INSUFFISANT QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉ ET DÉVELOPPÉ

I. DES MOYENS FINANCIERS ET HUMAINS LIMITÉS QUI DOIVENT ÊTRE RENFORCÉS POUR OPÉRER PLEINEMENT

A. DES CRÉDITS OUVERTS EN INADÉQUATION AVEC LES BESOINS RÉELS DES COMMUNES CONTRACTANTES

1. Des niveaux de consommation qui attestent des besoins des communes contractantes et des efforts réalisés

L'amendement voté en loi de finances initiale pour 2021 prévoyait l'ouverture, en 2021, de 30 millions d'euros d'AE et 10 millions d'euros de CP avec une ouverture de 10 millions d'euros de CP supplémentaire en 2022 et 2023.

Déduction faite de la réserve de précaution de 1,2 million en AE et 0,4 million par an pour les CP, les crédits disponibles s'élèvent à 28,8 millions d'euros en AE et 9,6 millions d'euros en CP par an entre 2021 et 2023.

Fin 2022, 27,6 millions d'euros en AE et 18,8 millions d'euros en CP ont été consommés soit respectivement 95 % et 98 % des crédits disponibles.

Ces taux de consommation démontrent les attentes concernant ce dispositif et les besoins des collectivités.

Consommation des crédits COROM en 2021 et 2022 par commune

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données transmises par la DGOM

De surcroit, les subventions effectivement versées attestent du respect des engagements de communes dans la mesure où le versement de la subvention est conditionné à la mise en oeuvre des actions permettant le retour à une trajectoire d'équilibre telle que définie dans le contrat.

Une exception doit cependant être soulignée concernant la commune de Saint-Pierre. En effet, alors que le comité de suivi local (CSL) du 27 juillet 2022 avait rendu un avis favorable au versement de la subvention COROM 2022, cet avis n'a pas été suivi par le comité de suivi national (CSN) du 20 septembre 2022. Ce dernier a estimé que les objectifs principaux n'avaient pas été atteints, notamment la réduction de la masse salariale et qu'il apparaissait incohérent de remettre en cause une trajectoire financière moins d'un an après la signature du contrat. Toutefois, afin de ne pas décourager la commune et l'inciter à continuer ses efforts (légère amélioration de la qualité de ses procédures, respect du plafond des charges à caractère général), le comité a décidé de verser une subvention de 50 000 euros contre 240 000 euros prévus par le contrat.

2. Les besoins supplémentaires au regard de la situation des communes déjà contractantes
a) Des besoins initiaux parfois sous évalués en raison de la non prise en compte de certains freins au redressement

Les crédits ouverts en loi de finances pour 2021 paraissent largement insuffisants au regard de la situation financière de certaines communes. En effet, la définition des trajectoires dans les neuf contrats signés n'a pas toujours tenu compte de données environnementales représentant des freins au redressement dans les échéances fixées. Ainsi, plusieurs facteurs doivent être intégrés dans l'analyse de la situation financière :

- la fiabilité comptable et l'existence de dettes anciennes non comptabilisés antérieurement ;

- l'absence de marges fiscales accompagnée parfois de difficultés de recensement ne permettant pas une analyse fiable des bases ;

- le climat social de certaines communes qui peut ralentir les actions mises en oeuvre pour aligner le temps de travail sur la durée légale de 1607 heures annuelles ou pour diminuer les effectifs ;

- les évolutions démographiques pesant sur le dynamisme de la fiscalité locale.

À titre d'exemple, la situation de la commune d'Iracoubo ne s'est pas redressée sur ces cinq dernières années. L'impact du COROM, signé en juin 2021, est positif mais n'est pas suffisamment dimensionné au regard de l'ampleur des déficits (3,3 millions d'euros cumulés sur les deux sections en 2022). Ce déficit structurel s'explique notamment par le poids des dépenses de personnel qui représente 1 139 euros par habitant contre 284 euros pour la moyenne de la strate.

Les difficultés de redressement, même si des améliorations ont été constatées depuis la signature du contrat, résultent de l'intégration en comptabilité de dépenses anciennes et non comptabilisées jusqu'à présent, ce qui a contribué à la dégradation de la situation financière de la commune jusqu'en 2022. De surcroit, la commune d'Iracoubo enregistre une diminution constante de sa démographie et ne bénéficie donc pas de marges au plan de ses ressources fiscales ou domaniales.

La commune de Saint-Pierre a également signé un contrat définissant une trajectoire qui s'appuyait sur des éléments financiers erronés. Dans ce contexte, la chambre régionale des comptes a procédé à des rectifications dégradant encore la situation de la commune et nécessitant la définition d'une nouvelle trajectoire plus réaliste et conforme à la réalité des difficultés financières.

Enfin, la commune de Sada est confrontée à des difficultés de recensement avec des actions importantes mises en oeuvre et à poursuivre concernant l'inventaire du bâti foncier.

Recommandation n° 1 : prévoir la possibilité, dans les contrats, de revoir le montant des aides exceptionnelles en cours d'exécution pour tenir compte des erreurs du diagnostic préalable (DGOM).

b) Des moyens insuffisants dans les cas de difficultés structurelles trop importantes, souvent héritées des gestions antérieures

Les trajectoires des communes de Pointe-à-Pitre et Fort-de-France ne souffrent pas, pour leur part, de problèmes de fiabilité. Cependant, au regard de l'ampleur des difficultés au moment de la signature des contrats et du niveau des déficits enregistrés, force est de constater que les moyens, notamment budgétaires avec le versement de subventions, ne sont pas à la hauteur des besoins.

Les objectifs cibles ont été, pour ces deux communes, atteints pour nombre d'entre eux. Pour autant, les déficits cumulés des deux sections d'investissement et de fonctionnement restent très élevés et ne permettent pas d'envisager un retour à l'équilibre en 2023.

Dans ce contexte, il apparait nécessaire d'augmenter les subventions accordées et surtout de prolonger la durée des contrats jusqu'au retour à l'équilibre.

Ces situations posent alors la question de l'objectif des COROM : un accompagnement dans les réformes structurelles permettant d'engager un redressement de la situation financière ou un réel retour à l'équilibre à même de dégager de nouvelles marges de manoeuvre tant en termes financiers qu'en termes d'amélioration des services publics offerts.

Les rapporteurs estiment que le deuxième objectif doit être privilégié ce qui nécessite, dans les situations les plus dégradées, un accompagnement plus long que la durée initiale de trois ans (cf. recommandations 4 et 5) ainsi qu'un soutien financier plus important.

S'il n'appartient pas à l'État de se substituer aux communes dans leurs obligations financières, les rapporteurs spéciaux soulignent cependant la responsabilité des services de l'État dans l'installation de dérives.

En effet, des défauts de contrôle de légalité ont, pour partie, contribuer à la dégradation de certaines situations (recrutements et paiements de contractuels sans contrat, marchés publics irréguliers, versements de primes irrégulières...).

Recommandation n° 2 : adapter le montant initial de la subvention exceptionnelle et des aides pour le remboursement des dettes fournisseurs en tenant compte des déficits cumulés et de l'encours de dettes fournisseurs (DGOM).