E. L'IMPACT DE LA CRISE INFLATIONISTE

Depuis l'automne 2021, la crise des prix de l'énergie a fortement affecté les économies européennes. Le secteur des transports est loin d'avoir été épargné. La hausse vertigineuse des prix du gaz et de l'électricité, en particulier en 2022, a conduit à pénaliser plus fortement encore les services de mobilité les plus vertueux, notamment ceux fonctionnant à l'électricité ou au biogaz. En 2021, le poste énergie représentait en moyenne 10 % du total des charges d'exploitation des réseaux de transport collectif.

Il est à noter que jusqu'en 2022, les AOM n'ont pas subi les hausses des prix dans toute leur ampleur car les opérateurs étaient souvent couverts par la maturité de leurs contrats de fourniture d'énergie. C'est en 2023 que l'effet de l'inflation des prix de l'énergie a commencé à réellement affecter l'équilibre économique des AOM et ce, malgré la baisse des prix de l'énergie plus forte et plus rapide qu'anticipée intervenue depuis la fin de l'année 2022. À titre d'exemple, en 2023, les charges relatives à l'électricité de traction des services Transilien ont augmenté de 136 %. Sur les réseaux de la régie des transports parisiens (RATP), les charges énergétiques ont doublé en 2023 après avoir déjà augmenté de 20 % en 2022.

En dépit de la forte diminution des prix de marché constatée en 2023, en particulier pour le gaz, les prix de l'électricité se maintiennent en France à des niveaux élevés et les risques de volatilité restent importants, notamment en raison des incertitudes concernant la disponibilité du parc nucléaire d'EDF lors de l'hiver 2023-2024.

La crise inflationniste affecte également fortement le secteur des mobilités du quotidien par le vecteur des revalorisations salariales. Ce vecteur est d'autant plus prononcé dans le domaine des transports en raison de problématiques d'attractivité et des difficultés à recruter sur des postes qui représentent la très grande majorité des charges de personnel des services de mobilité.

En effet, le secteur de la mobilité est actuellement confronté à des phénomènes de pénurie de conducteurs mais également d'agents de maintenance. Cette situation concerne aussi bien les services réguliers que les transports scolaires, les AOM de province comme IDFM. Pour soutenir l'attractivité des métiers de la mobilité, des revalorisations salariales significatives seront inévitables. Ces phénomènes affecteront nécessairement les coûts de production des services de transport des AOM puisque la masse salariale d'un réseau de transport urbain, qui est essentiellement composée de la rémunération des conducteurs, représente de 60 à 70 % de ses coûts totaux.

À titre d'exemple, en Île-de-France, la convention conclue entre IDFM et la RATP en 2020, dans un contexte de faible inflation, prévoit un plafonnement de l'indexation des charges salariales de l'opérateur à 1,5 %, soit un niveau très inférieur à l'inflation constatée depuis l'année dernière. Malgré ce plafonnement, la RATP n'a eu d'autre choix, pour des raisons d'attractivité et dans un contexte de pénurie de conducteurs, que d'accorder des revalorisations beaucoup plus significatives à ses personnels. Aujourd'hui la RATP a pris à sa charge les surcoûts occasionnés par ces revalorisations mais elle a demandé à IDFM de lever dès 2023 le plafonnement de l'indexation des charges de personnel prévu par la convention. Entre 2022 et 2024, la RATP évalue à 380 millions d'euros les charges supplémentaires qu'elle pourrait devoir assumer en raison du contexte d'inflation. En toute hypothèse, a minima à l'occasion de la conclusion de la nouvelle convention entre IDFM et la RATP à compter de 2025, le rebasage des charges de l'opérateur lié à l'inflation devrait entraîner un surcoût de 200 millions d'euros pour l'AOM francilienne.

S'agissant du secteur des transports en commun routiers, les augmentations des coûts salariaux, qui découlent de la situation d'inflation et du manque d'attractivité des métiers, ont été particulièrement fortes ces derniers mois. Ainsi, le Comité national routier signalait, dans une étude publiée en mars 2023, que les charges relatives au personnel de conduite avaient progressé de 16,6 % en un an suite à la négociation du dernier accord social.

Concernant les investissements des AOM, depuis les débuts de la crise inflationniste l'augmentation des index de travaux publics a souvent été supérieure à 20 %, entraînant dans son sillage le coût des chantiers d'infrastructures.

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