N° 527

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 avril 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur l'application de la loi du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
et portant diverses autres dispositions,

Par Mmes Agnès CANAYER et Marie-Pierre de LA GONTRIE,

Sénateur et Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet, président ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Philippe Bonnecarrère, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Mme Nathalie Delattre, vice-présidents ; Mmes Agnès Canayer, Muriel Jourda, M. André Reichardt, Mme Isabelle Florennes, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. Olivier Bitz, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Michel Masset, Mmes Marie Mercier, Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Olivia Richard, M. Pierre-Alain Roiron, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

L'ESSENTIEL

À moins de cent jours de la cérémonie d'ouverture des jeux Olympiques et Paralympiques de paris 2024 (JOP), la commission des lois du Sénat a souhaité faire le bilan de l'application de la dernière loi adoptée par le Parlement afin de se donner les moyens de faire face à un défi d'ampleur.

Pour ce faire, les rapporteures ont, depuis novembre 2023, auditionné près de 95 acteurs concourant à la sécurisation des Jeux, et ont effectué plusieurs déplacements en région parisienne :

- au Village olympique, au bâtiment « PULSE » hébergeant le Cojop, au Stade de France, au centre de commandement opérationnel de sécurité (CCOS) de la préfecture de police regroupant l'ensemble des acteurs de la sécurité dans les transports en commun, et au centre de vidéosurveillance de la Suge ;

- pour participer à une formation théorique et pratique aux palpations de sécurité à destination d'agents de sécurité privée ;

- pour observer le premier déploiement de l'expérimentation de la vidéoprotection intelligente par la préfecture de police de Paris pour le concert de Depeche Mode à Bercy.

Malgré la qualité de la planification stratégique et opérationnelle conduite par l'ensemble des acteurs - singulièrement le ministère de l'intérieur, la préfecture de police de Paris et le Cojop - les rapporteures identifient, dans un esprit constructif, 55 recommandations, adoptées à l'unanimité, afin de parfaire le dispositif de sécurisation des JOP. En effet, souhaitant être utiles, dans leurs prérogatives de contrôle et d'évaluation, à la préparation des Jeux, il leur est apparu nécessaire, compte tenu de l'exigence d'irréprochabilité de la sécurisation de cet évènement pour faire face à toutes les éventualités, de faire état des améliorations possibles du dispositif avant l'ouverture des Jeux.

I. LA SÉCURISATION DES JOP : UN DÉFI D'AMPLEUR RECORD 

A. LA SÉCURISATION HORS-NORME D'UN MULTI-ÉVÈNEMENT D'AMPLEUR INTERNATIONALE

La France accueillera du 26 juillet au 8 septembre 2024 les jeux Olympiques et Paralympiques, 100 ans après leur dernière organisation à Paris (en 1924, après une première expérience en 1900). Il s'agit d'un évènement d'une ampleur inégalée. Les épreuves, qui auront lieu dans 63 collectivités hôtes, mobiliseront plus de 40 000 bénévoles et verront 13,5 millions de spectateurs y assister. 20 000 journalistes sont attendus.

 
 

Jeux Olympiques

Jeux Paralympiques

1. Une organisation inédite : la nécessaire collaboration entre les pouvoirs publics français et le Cojop

Les compétences et les responsabilités en matière de sécurité sont partagées entre le Cojop - Comité d'organisation des Jeux olympiques de Paris - et les pouvoirs publics, en application du contrat de ville-hôte. Cela exige une coordination renforcée entre l'ensemble de ces acteurs, malgré son caractère inédit, et ce d'autant plus que le dispositif en matière de sécurité est confronté à d'importants enjeux capacitaires, qu'il s'agisse des forces de sécurité intérieure ou de la sécurité privée.

Ainsi, la responsabilité de la sécurité au sein des sites de la compétition, du village des athlètes, du village des médias et de leurs abords immédiats incombe au Cojop, tandis que l'État est en charge de la sécurisation des voies et espaces publics. Les collectivités territoriales sont quant à elles en charge de l'organisation de la sécurité au sein des zones de célébration et des évènements qu'elles organisent. À l'évidence, en cas de crise, les pouvoirs publics seront responsables, à eux seuls, de la sécurisation de l'ensemble du périmètre : comme le rappelle le contrat précité, « la responsabilité pour toutes les questions de sécurité liées aux Jeux (y compris les aspects financiers, opérationnels et de planification y afférents) incombe aux Autorités du Pays hôte, lesquelles prendront toutes les mesures nécessaires afin de garantir la tenue des Jeux dans la paix et la sécurité »1(*). L'État est, in fine, l'unique garant de la sécurité des JOP auprès du Comité international olympique (CIO). Dès lors, en cas de défaillance du Cojop à remplir ses obligations, l'État devra reprendre la main sur l'ensemble des dispositifs, tout en pouvant mobiliser financièrement le Cojop en pareil cas.

2. Un enchaînement sans précédent d'événements à sécuriser

Aux 37 sites olympiques et paralympiques qu'il conviendra de sécuriser pendant toute la période des JOP, s'ajoutent la Seine et ses quais, qui accueilleront la cérémonie d'ouverture comme les épreuves sur route mais aussi le parcours de la flamme olympique qui se déplacera sur plus de 65 départements du territoire national. S'ils varient en intensité et ne présentent pas tous des défis opérationnels majeurs, ces événements présentent un enchaînement sans précédent.

a) Le relais de la flamme : une bulle de sécurité mobile dans l'hexagone et les outre-mer

Comme l'a rappelé le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, devant la commission des lois, « pour les services du ministère, les Jeux commenceront le 8 mai prochain, avec l'arrivée en France de la flamme olympique, transportée à bord du Belem depuis le port du Pirée, en Grèce, jusqu'au port de Marseille »2(*). En effet, un relai de la flamme olympique est organisé du 8 mai jusqu'au 26 juillet - date de la cérémonie d'ouverture - traversant plus de 400 villes, s'arrêtant dans 65 villes étapes réparties dans 65 départements, incluant 6 territoires ultramarins. Compte tenu des enjeux symboliques importants entourant la protection de la flamme olympique, portée par plus de 10 000 relayeurs, le ministère de l'intérieur a annoncé déployer une « bulle de sécurité » mobilisant, à chaque instant, plus de 115 personnels des forces de sécurité intérieure, sans compter les unités de forces mobiles.

Dispositif de sécurisation du relais de la flamme - « bulle de sécurité »

Source : images transmises par le ministère de l'intérieur et des outre-mer

b) La cérémonie d'ouverture : un « événement dans l'événement »

C'est la première fois qu'une cérémonie d'ouverture des jeux Olympiques et Paralympiques se tiendra en dehors d'un stade. Chaque délégation nationale - soit 206 délégations - défilera sur l'une des 90 embarcations prévues, sur six kilomètres de la Seine, d'est en ouest, pour s'achever devant le Trocadéro où se dérouleront les spectacles et les cérémonies protocolaires. S'ajoute à cette parade nautique et au spectacle, une séquence protocolaire au Trocadéro en présence de plus de 160 chefs d'État et de gouvernement.

La sécurisation de la cérémonie d'ouverture en plein air constituera en outre un enjeu majeur. Il est en effet prévu que 220 000 spectateurs puissent profiter d'accès gratuits sur les quais hauts de la Seine, tandis que l'accès aux quais bas entre le pont d'Austerlitz et le pont Iéna sera conditionné à la détention d'un billet payant pour 104 000 personnes. Au total, comme annoncé par le ministre de l'intérieur et des outre-mer devant la commission des lois du Sénat, 324 000 spectateurs pourront assister à cette cérémonie, soit un volume représentant quatre fois la capacité du Stade de France. S'ajouteront les 50 000 personnes présentes dans les fan-zones parisiennes - pour atteindre 576 000 spectateurs à Paris - et plus de 1,5 milliard de téléspectateurs.

Cet événement mobilisera, selon le ministre de l'intérieur, 45 000 personnels des forces de sécurité intérieure en Île-de-France, ainsi que des moyens spécialisés en nombre conséquent (l'ensemble des 3 unités d'intervention spécialisées, 100 plongeurs-démineurs, 35 bateaux de sécurisation, etc.).

c) La sécurisation de sites olympiques et paralympiques disséminés sur l'ensemble du territoire

Le ministère de l'intérieur a annoncé le déploiement d'un dispositif de « sécurisation maximal sur l'ensemble du territoire » pour sécuriser les 37 sites de compétition répartis sur l'ensemble du territoire français.

Comme le démontre la carte ci-après, la majeure partie des sites retenus se trouve à Paris (15 sites de compétition pour les jeux Olympiques et 11 pour les jeux Paralympiques), et en Seine-Saint-Denis (13 sites et le village olympique). 12 sites sont ensuite situés dans les départements des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de Seine-et-Marne et de Seine-Saint-Denis. À cela s'ajoutent 10 sites situés hors d'Île-de-France, dont, pour la première fois, un site dans un territoire ultramarin (Teahupo'o à Tahiti, qui accueillera la compétition olympique de surf).

Carte des différents sites olympiques en région parisienne
et sur le reste du territoire hexagonal et ultramarin

Source : Le Monde, d'après les images publiées par le Cojop

Pour sécuriser les sites de compétition, outre l'engagement humain et les moyens technologiques et matériels déployés, seront institués des périmètres de sécurité de quatre types : un périmètre organisateur resserré au plus près des sites dans lesquels seules les personnes et véhicules accrédités auront accès ; trois périmètres « État » correspondant à des interdictions et de restrictions de circulation routière motorisée - sauf dérogation - ainsi qu'un périmètre de protection - au sens de la loi dite « SILT » - impliquant des fouilles de bagages et palpations systématiques de sécurité.

Carte des périmètres de sécurité autour des sites olympiques
à Paris et en petite couronne

Source : préfecture de police de Paris

3. Un engagement de haute intensité partagé par tous au service de la sécurisation des JOP

La sécurisation des JOP mobilisera des moyens quotidiens humains et matériels sans précédents, ce qui mettra en tension non seulement les forces de sécurité intérieure mais également les filières de la sécurité privée, des polices municipales et des services de sécurité des opérateurs de transport public.

Les dernières estimations transmises par le Cojop indiquent que la volumétrie des agents de sécurité privée engagés quotidiennement atteindra, théoriquement, une moyenne de 18 000 agents par jour, avec un pic estimé à plus de 24 000 agents pour la cérémonie d'ouverture.

Parallèlement, au moins 35 000 membres des forces de sécurité intérieure (FSI) et, depuis les récentes annonces du ministre des armées, Sébastien Lecornu, désormais 18 000 membres des forces armées seront mobilisés pour sécuriser les JOP au cours de la période estivale. Parmi ces forces, 90 % des unités de force mobile seront affectées à la sécurisation des JOP, avec la constitution de plusieurs réserves d'intervention pour des missions prioritaires.

Les rapporteures, au regard des éléments portés à leur connaissance lors de leurs auditions et déplacements, n'ont pu que se féliciter de l'importante mobilisation de l'ensemble des acteurs du continuum de sécurité, indispensable à la réussite de cet évènement inédit.


* 1 Article 17-1 du contrat de ville-hôte signé le 13 septembre 2027 entre le CIO, la Ville de Paris et Cojop à Lima.

* 2 Audition de Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer, le 5 mars 2024, par la commission des lois du Sénat.

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