C. UNE NÉCESSAIRE COORDINATION DES EXPRESSIONS DE BESOIN DES MINISTÈRES ET UN BESOIN DE SIMPLIFICATION DE LA PROCÉDURE DE PROGRAMMATION DU CEREMA

1. Un besoin impératif de coordonner les commandes étatiques

La réforme des modalités de programmation des activités que le Cerema délivre à la demande des directions d'administrations centrales a donné à l'établissement les moyens de définir ses orientations stratégiques et d'opérer le virage vers les collectivités qui était attendu de lui depuis sa création. Cependant elle n'a pas résolu le problème de l'absence de coordination des expressions de besoins exprimées au Cerema par les différents services de l'État.

Problématique en termes de cohérence, de lisibilité et d'efficience de l'action publique de l'État, cette situation pose également des difficultés à l'établissement : « actuellement, les interventions du Cerema résultent d'une multitude de sollicitations émanant des différentes directions d'administration centrale et des services déconcentrés, ce qui peut entraîner un manque de lisibilité et d'efficacité dans la programmation des activités »24(*).

En 2021, dans leur rapport, le CGEDD et l'IGA avaient également mis en exergue le défaut de coordination des commandes passées par les services de l'État au Cerema, ajoutant que leur articulation avec l'action des collectivités locales devait également être améliorée : « les commandes de l'État apparaissent aujourd'hui cumuler deux défauts. Il n'existe pas de coordination de ces demandes, qui permettrait pourtant de les mettre en adéquation avec des orientations prioritaires du Gouvernement, d'une part, et, d'autre part, elles prennent en compte de façon insuffisante le fait que la plupart des politiques mises en oeuvre par le ministère de la transition écologique nécessitent un travail conjoint entre l'État et les collectivités locales. La tutelle doit désormais remédier à ces insuffisances ».

Auditionnés par le rapporteur, les services de la direction du budget considèrent également que l'absence de coordination des commandes étatiques formulées au Cerema constitue un défaut substantiel du système actuel, y compris en termes de visibilité pour l'établissement, qu'il conviendrait de corriger : « les services de l'État passent commande de manière décentralisée, avec une hétérogénéité des besoins et des modalités contractuelles. Cette dispersion peut compliquer la lisibilité des engagements financiers pour le Cerema. Les commandes sont souvent annuelles et dépendent des arbitrages budgétaires des ministères, ce qui empêche le Cerema d'anticiper ses ressources et de planifier ses effectifs de manière optimale. Les commandes peuvent parfois se recouper ou être redondantes, faute d'une approche centralisée et stratégique des besoins en ingénierie publique »25(*).

En réponse au questionnaire du rapporteur, le commissariat général au développement durable (CGDD), tutelle métier du Cerema, reconnaît que son rôle de coordination des commandes étatiques est à ce jour limité, tout ou presque étant décidé dans une relation bilatérale entre les administrations et la direction du Cerema : « la programmation des activités de l'établissement est établie en lien étroit avec les directions générales métier sur les domaines qui les concernent. La tutelle CGDD a un rôle de coordination, mais les orientations métier sont établies par les directions générales dans les protocoles pluriannuelles, les conventions annuelles ou les contrats des grands programmes confiés à l'établissement ».

Aujourd'hui, les administrations établissent chacune de leur côté leurs demandes à l'égard du Cerema, transmettent de façon isolées leurs expressions de besoin puis négocient seules avec l'établissement la programmation qui relève de leurs domaines de compétences. Ce fonctionnement en silo, sans coordination ni supervision, n'est ni satisfaisant, ni pas optimal. Il ne permet pas de garantir la lisibilité et la cohérence de l'action publique au sein même de la sphère étatique. Le rapporteur estime que ce système doit être révisé et qu'il appartient à une tutelle métier renforcée (voir infra), d'opérer ce travail de coordination en amont des expressions de besoins formulées par les directions d'administrations centrales à l'endroit du Cerema.

Le Cerema a pris l'initiative de réaliser cette année un bilan consolidé de sa programmation 2024 dans le but de donner aux différentes directions d'administration centrale une vision transversale de l'activité de l'établissement. Cette démarche, en rendant plus lisible l'action globale de l'établissement a notamment pour finalité de contribuer à améliorer l'articulation et la cohérence entre les demandes formulées par les administrations de l'État. Le Cerema souhaite que ce travail constitue un moyen « d'identifier les axes d'amélioration potentiels du dispositif actuel et d'évaluer la pertinence d'éventuelles évolutions dans les modalités de programmation, notamment pour optimiser la coordination avec les services de l'État et assurer une meilleure visibilité budgétaire ».

Le rapporteur considère que ce travail et les enseignements qui en seront tirés pourraient constituer des supports utiles pour éclairer la conception du dispositif de coordination et de pilotage des expressions de besoins étatiques qui doit impérativement être mis en oeuvre sans délai par la tutelle du Cerema.

Recommandation n° 1 : pour le recueil des expressions de besoin des administrations de l'État à l'endroit du Cerema, développer/organiser une coordination approfondie par la tutelle de l'établissement.

2. Une procédure de programmation annuelle de l'activité du Cerema trop complexe et trop coûteuse

Préparée par les services du Cerema sous la responsabilité de son directeur général, dans le cadre d'une procédure inclusive intégrant l'ensemble des acteurs bénéficiaires des activités de l'établissement ainsi que ses principaux partenaires, le programme d'activités annuel est, in fine, arrêtée par son conseil d'administration.

Le processus de programmation annuelle de l'établissement s'appuie sur le conseil stratégique du Cerema et les travaux réalisés au sein de six comités d'orientations thématiques et des comités d'orientations territoriaux organisés dans chaque région.

La programmation des activités du Cerema s'opère en deux étapes. Une première étape stratégique aboutit au programme annuel d'activités de l'établissement arrêté par le conseil d'administration qui est composé « d'opérations ». Les opérations constituent un ensemble de projets concourant à un objectif de politique publique concernant différents types de bénéficiaires.

Dans un deuxième temps, cette programmation est déclinée de manière beaucoup plus fine à travers la définition de projets précis et l'élaboration d'une planification d'activités.

Aujourd'hui, au dire de plusieurs de ses protagonistes, cette procédure apparaît comme excessivement lourde. Dans un contexte de très forte contrainte budgétaire, elle consomme notamment énormément de temps du travail des personnels du Cerema qui y participent. Certaines directions d'administration centrale reconnaissent également le caractère « complexe et chronophage » de la comitologie mise en oeuvre aujourd'hui pour construire la programmation annuelle de l'établissement.

Dans la situation actuelle, alors que le Cerema est confronté à des difficultés financières certaines et que l'État lui-même se trouve soumis à une très forte contrainte budgétaire, les gains de productivité qui peuvent être générés par une simplification du processus de programmation annuelle des activités de l'établissement ne peuvent être ignorés. Aussi, le rapporteur recommande-t-il au Cerema et à sa tutelle, en concertation avec les partenaires de l'établissement, d'engager sans délai une réflexion permettant d'aboutir à une réforme des modalités de préparation de la programmation annuelle de l'opérateur.

Recommandation n° 2 : simplifier la procédure de programmation annuelle des activités du Cerema pour qu'elle consomme moins de temps à ses personnels, permettant ainsi de dégager des gains de productivité.


* 24 Réponses du Cerema au questionnaire du rapporteur.

* 25 Réponses de la direction du budget au questionnaire du rapporteur.

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