B. CONTRÔLER LES USAGES DE L'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ET LA METTRE AU SERVICE DES CITOYENS
Les avancées permises par l'intelligence artificielle sont désormais perceptibles dans presque tous les domaines de l'activité humaine. Les services publics n'y font pas exception, avec les possibilités ouvertes notamment en matière de rédaction de courriers ou courriels, ou encore de traitement de l'information.
La mission d'information a pris connaissance de chantiers ouverts dans ce domaine par plusieurs administrations comme l'Acoss, la Caisse nationale d'assurance vieillesse ou l'Assurance maladie, notamment pour affiner leur connaissance du public et ainsi devancer les besoins de l'usager et les questions qu'il est susceptible de se poser.
La génération de réponses automatiques à l'usager fait également partie de ces chantiers. Citons à titre d'exemple les trois fonctions de l'outil Albert, en cours d'expérimentation dans les maisons France Services :
· Accélérer la recherche d'informations administratives fiables pour les conseillers ;
· Offrir des réponses à jour et contextualisées, dans un environnement réglementaire complexe et mouvant (plus de 160 démarches couvertes, 12 opérateurs partenaires) ;
· Faciliter l'intégration des nouveaux conseillers, en leur fournissant un appui numérique quotidien, autonome et rapide d'accès.
L'enjeu consiste donc à trouver un équilibre entre le gain de temps et les économies que permettrait de dégager l'intelligence artificielle ; il s'agit aussi de répondre aux attentes d'usagers qui ressentent le besoin d'une humanisation des contacts avec l'administration, et aux exigences d'agents en quête de sens.
Si ces initiatives prises par les administrations sont à saluer, la mission d'information est d'avis :
· De les mettre en cohérence au niveau national, avec un chef de file clairement identifié ;
· De formuler une doctrine claire sur l'utilisation de l'IA au service de l'usager - en matière de transparence, de sécurité des données, de périmètre des tâches automatisées ;
· De diffuser cette doctrine à tous les niveaux de l'administration.
La mission d'information partage pleinement le point de vue de la délégation sénatoriale à la prospective, qui soulignait dans un rapport d'information présenté par Didier Rambaud et Sylvie Vermeillet en 2024 : « l'utilisation [de l'IA] au service de l'intérêt général ne [pourrait] se faire qu'à condition que les agents, les usagers et les citoyens aient pleinement confiance ».
IA et information officielle : garder le contrôle
Au-delà des applications métier de l'IA, la mission d'information s'est également intéressée au problème spécifique du traitement par les opérateurs du secteur de l'information officielle délivrée par des sites comme service-public.fr. En effet, selon les équipes de la Direction de l'information légale et administrative (Dila) rencontrées par le président et la rapporteure, les outils tels que ChatGPT ou Gemini ne font pas toujours apparaître la source des réponses qu'ils apportent à l'usager. Or à terme, avec l'évolution des usages d'internet, ces outils pourraient se substituer aux moteurs de recherche traditionnels. Comme il est essentiel que l'information officielle soit clairement identifiée comme telle dans l'espace numérique, la mission d'information estime indispensable d'engager des discussions au plus haut niveau avec les principaux opérateurs afin de faire valoir cette exigence.
Plus généralement, il apparaît indispensable que la fonction publique recrute des profils qui maîtrisent tout aussi bien les aspects techniques de l'intelligence artificielle que sa dimension juridique et politique : en matière d'IA, le donneur d'ordre doit conserver le contrôle sur l'action du technicien et un regard éclairé sur la conception de l'outil.