N° 900

SÉNAT

2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 septembre 2025

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la mission d'information (1) sur le thème :
« Pour une
intercommunalité de la confiance, au service des territoires »,

Président
M. Jean-Marie MIZZON,

Rapporteure
Mme Maryse CARRÈRE, 

Sénateur et Sénatrice

(1) Cette mission est composée de : M. Jean-Marie Mizzon, président ; Mme Maryse Carrère, rapporteure ; Mmes Cécile Cukierman, Frédérique Espagnac, MM. Jean-Pierre Grand, Stéphane Le Rudulier, Clément Pernot, Didier Rambaud, Mme Ghislaine Senée, M. Lucien Stanzione, vice-présidents ; MM. Yves Bleunven, David Margueritte, secrétaires ; M. Jean-Claude Anglars, Mmes Marie-Jeanne Bellamy, Martine Berthet, MM. Étienne Blanc, Hussein Bourgi, Mme Isabelle Briquet, MM. Jean-Marc Delia, Franck Dhersin, Daniel Gueret, Mme Évelyne Perrot, M. David Ros.

INTRODUCTION

Héritières des 44 000 paroisses d'avant 1789, les quelque 35 000 communes de France ont, de longue date, choisi de s'organiser pour conduire ensemble des projets qui répondent aux attentes des habitants. De cette organisation librement consentie par les élus des communes concernées, la coopération intercommunale a franchi une nouvelle étape, au tournant des années 2010. En quelques années, sa conception même a été bouleversée et elle est devenue imposée aux communes concernées. Au nom de la rationalisation et d'une meilleure intégration territoriale, la volonté du législateur les a placées de fait sous une toise unique. En 2015, le Sénat, chambre des collectivités territoriales, avait néanmoins pu oeuvrer à mieux tenir compte des réalités locales, en faisant passer le seuil de nombre d'habitants de 20 000 dans la version initiale du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) à 15 000 habitants, avec des adaptations (seuil de 5 000 habitants) pour les zones peu denses, les zones de montagne, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) récemment fusionnés et les zones insulaires. Le Sénat n'avait toutefois pu s'opposer au principe même du regroupement général des communes au sein d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

La mise en oeuvre de cette loi a conduit à un regroupement parfois drastique, souvent autoritaire, des communes au sein d'EPCI élargis. Elle a également contribué à faire de la période 2010-2020 une « décennie terrible pour les territoires ruraux », pour reprendre les termes d'une des personnes auditionnées par la mission d'information.

La France compte désormais 1 254 EPCI à fiscalité propre et l'émergence de communautés de communes ou d'agglomération « XXL » a constitué l'aboutissement le plus emblématique de cette nouvelle politique des territoires.

Même si elle n'est pas le critère exclusif des difficultés de fonctionnement des intercommunalités issues de la loi NOTRe, cette grande taille entraîne mécaniquement des conséquences en termes de gouvernance : Comment faire en sorte que les représentants de toutes les communes membres de ces intercommunalités puissent trouver leur place au sein de conseils communautaires eux-mêmes XXL et soient à même d'exprimer un avis éclairé sur l'ensemble des sujets d'intérêt communautaire, qui plus est compte tenu de la très grande hétérogénéité de taille des communes membres ?

En 2020, pour la première fois, les élections municipales ont été organisées sous l'architecture territoriale des EPCI mis en place en application de la loi NOTRe. On connait les conditions dans lesquelles la pandémie de Covid-19 a imposé le déroulement exceptionnel du scrutin ainsi que le démarrage en mode dégradé des travaux des conseils municipaux et communautaires. S'en sont suivies des tensions entre communes membres, notamment en zone rurale ou de faible densité de population.

Le scrutin de mars 2026 marquera une nouvelle étape de l'application de la loi NOTRe. Il doit également être une occasion à ne pas manquer pour entamer un nouveau chapitre - fondé sur des bases saines - de l'intercommunalité.

Avec cette échéance en ligne de mire, le Sénat a décidé de mener un bilan de l'intercommunalité, de sorte de pouvoir formuler des recommandations qui permettent de faciliter le fonctionnement des structures intercommunales et d'accroitre la lisibilité de l'action publique.

Créée à l'initiative du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, la mission d'information, forte de 23 membres appartenant à tous les groupes politiques, a entamé ses travaux début avril 2025. En 24 heures d'auditions, elle a entendu 34 élus, représentants d'associations et experts. Outre les représentants des grandes associations d'élus, « généralistes » comme « spécialisées », y compris d'outre-mer, elle a souhaité recueillir directement la parole des élus municipaux eux-mêmes.

C'est dans cet esprit d'être au plus près du terrain qu'elle a organisé un déplacement dans deux départements très différents : les Hautes-Pyrénées, département faiblement peuplé et touristique de montagne et la Moselle, plus peuplée, comprenant une métropole et traditionnellement doté d'une industrie forte. La mission d'information a également souhaité recueillir directement la parole de maires qui ne sont pas membres de l'exécutif de l'intercommunalité à laquelle appartient leur commune, lors d'une table ronde réunissant huit d'entre eux, librement choisis par les membres de la mission. Enfin, elle a mené une consultation en ligne des élus, à laquelle près de 2 000 d'entre eux ont bien voulu répondre.

Compte tenu du temps qui lui était imparti pour mener à bien ses travaux et pour ne pas répéter ceux engagés par ailleurs par différentes structures du Sénat, la mission d'information a fait le choix de ne pas se focaliser sur les questions financières en tant que telles, sauf lorsque cela s'est révélé indispensable à la bonne compréhension des difficultés des intercommunalités. Au nom du même principe d'efficacité, elle n'a pas étudié la situation particulière des métropoles, notamment celles à statut particulier que sont le Grand Paris, la Métropole de Lyon et la Métropole Aix-Marseille-Provence.

Au terme de ses travaux, la mission d'information souligne qu'en matière d'organisation territoriale, nul, aujourd'hui, ne demande ni même n'évoque un retour à la situation antérieure aux lois Maptam et NOTRe. Elle est consciente de la difficulté que représenterait un retour en arrière.

Elle a également acquis la conviction que les intercommunalités issues de la loi NOTRe n'ont pas encore atteint leur vitesse de croisière et sont aujourd'hui à la croisée des chemins. C'est pourquoi elle formule avec optimisme un ensemble de vingt recommandations de nature à remettre les élus au coeur de la définition du projet politique et du fonctionnement des intercommunalités. Elle espère contribuer ainsi à la bonne marche de cet outil que constitue l'intercommunalité pour porter des projets au service de toutes les Françaises et tous les Français.

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