Audition de Bruno OUDET

Président du chapitre français de
l'INTERNET SOCIETY (ISOC)

Résumé : Avec la mise en réseau des ordinateurs, on voit se tisser la toile mondiale des compétences et des intelligences ; dans ce cadre, le retard français est à traiter « à la base » : il s'agit d'apprendre aux jeunes générations à utiliser un clavier, clé du problème de la faible connexion des français aujourd'hui ; c'est si fondamental que les pouvoirs publics devraient équiper les écoles, en commençant par les zones défavorisées, afin de générer un mouvement massif, tout en permettant de lutter efficacement contre l'exclusion. Une démarche pédagogique réfléchie est donc nécessaire aboutissant à immerger l'ensemble des programmes scolaires dans le monde des NTIC. La mise à disposition des informations publiques sur le réseau est une autre ardente nécessité. D'une façon générale, de nombreuses rigidités inhérentes aux institutions sont à supprimer si l'on veut faire avancer les choses ; dans cette vaste perspective, l'ISOC présente de nombreuses propositions.

1. L'ISOC est une association de droit américain à vocation internationale créée en janvier 1992 par les pionniers de l'Internet pour promouvoir et coordonner le développement des réseaux informatiques dans le monde.Elle regroupe 7.800 membres dans le monde.

2. Bien malin qui peut dire ce que sera le paysage du monde en réseau dans les années à venir, quelles sont les technologies qui vont vraiment déboucher, vues les évolutions très rapides : il faut donc faire preuve d'une certaine humilité ;

Il faut prendre le retard français dès le départ, c'est-à-dire chez les jeunes, et ce dès maintenant : c'est fondamental. La priorité est d'apprendre à utiliser un clavier : si les gens ne sont pas connectés, c'est qu'à la base ils ne savent pas l'utiliser, et donc ne possèdent pas d'ordinateur ; cette priorité du clavier est la première chose à faire intégrer aux jeunes ; il n'est pas exact de dire que le Minitel a donné une avance aux français sur ce point : les gens utilisent ce dernier avec deux doigts ; le problème n'a donc pas changé.

Les associations travaillant à l'insertion des jeunes sont les premières à dire que les nouvelles technologies de l'information sont une façon d'intéresser les jeunes, de leur donner de la valeur, de leur faire prendre conscience qu'ils peuvent faire quelque chose : ils peuvent parler de leurs quartiers, décrire les expériences qu'ils vivent ; on peut d'ailleurs imaginer des programmes pour les gamins qui ne partent pas en vacances, ouvrir des cyber-cafés l'été...

Le message à faire passer aux pouvoirs publics serait donc de dire : « mettez des ordinateurs dans les écoles » : en commençant par les zones prioritaires, là où l'on recense le plus de difficultés d'insertion, et non dans les zones privilégiées, là où les enfants ont très souvent un ordinateur chez eux. Il faudra veiller à l'insertion dans les programmes scolaires et de formation des maîtres, des NTIC : il faut qu'il y ait des cours sur l'utilisation, puis d'autres cours enseignant la recherche sur Internet, il faut faire cet effort plutôt que de simplement dire : « Vous êtes connectés ; à vous de jouer ».Tout ceci doit s'intégrer dans un processus pédagogique réfléchi.

L'ISOC est très sensible au problème de l'espace public sur Internet, à savoir la mise à disposition des informations publiques : il nous semble tout à fait anormal que les gens ne puissent pas voir le Journal Officiel et d'autres informations de ce type ; il faut donc un espace public hors publicité.

D'une façon générale, il faut décloisonner, supprimer les rigidités inhérentes aux institutions françaises : il en va ainsi de l'Université par exemple, où il n'est même pas possible d'utiliser des serveurs pour l'emploi des scientifiques, ou la recherche d'emploi des jeunes diplômés ;

Nous avons demandé la création d'un Observatoire français des usages et des technologies d'Internet : il faut en effet un endroit pour discuter, réfléchir, structurer l'ensemble des questions qui se posent ;

3. Les propositions de l'ISOC :

Créer des lieux-relais pour offrir des accès publics au réseau ;

Diffuser gratuitement l'information publique ;

Appliquer le taux de TVA de la presse aux services d'information sur Internet ;

Développer des sites d'orientation au sein de l'information publique ;

Développer un site public de formation, notamment sur la publication électronique, l'Intranet et la cryptographie ;

Créer une coopérative pour aider les jeunes maisons d'édition et les faire bénéficier de l'image de la coopérative ;

Créer une fondation pour le soutien aux jeunes maisons d'édition ;

Aider à l'hébergement des associations en les accueillant sur certains sites publics (Etat ; collectivités locales) ;

Guichet unique et transparence dans les subventions d'aide à la publication ;

Mise en place d'un service de veille et prise en compte de l'expérience des pays plus avancés dans l'utilisation de ces technologies ;

Créer un groupe de travail sur le multilinguisme dans l'Internet ;

Offrir des supports de cours à l'échelle nationale, et mise en ligne des thèses ;

Soutenir les échanges d'idées et le travail en collaboration ;

Accélérer la collaboration internationale ainsi que le processus de mise en place d'outils cryptographiques ;

Utiliser les supports médiatiques classiques pour diffuser la pratique de l'Internet (sur la 5 è chaîne de télévision par exemple) ;

Faire de l'adaptation du droit d'auteur une des priorités ;

Faire reconnaître la signature électronique par le droit français ;

Impliquer des équipes françaises dans les groupes de standardisation qui précisent l'utilisation de Mime pour les échanges de documents EDI ;

Définition par l'administration des procédures électroniques pour les appels d'offre et les relations de type commercial avec les entreprises ;

Favoriser l'avènement des terminaux bon marché et des dispositifs de lecture des cartes à puce multi-applications.

Créer un Fonds pour développer le cyberespace de la francophonie, rassemblant et faisant coopérer compétences et intelligences au milieu du fort courant poussant l'anglais comme langue internationale des échanges.

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