DEUXIEME PARTIE


LES PROPOSITIONS DU GROUPE DE TRAVAIL :

RENOVER LES CONDITIONS D'EXERCICE DE L'EXAMEN DE LA GESTION ET RENFORCER LA SECURITE JURIDIQUE DES ACTES DES COLLECTIVITES LOCALES

Les propositions que formule le groupe de travail, au terme de ses investigations et des auditions auxquelles il a procédé, sont dictées par un double souci : " normaliser " les relations entre les chambres régionales des comptes et les élus locaux ; moderniser les conditions d'exercice du contrôle financier.

Loin de contester la nécessité du contrôle exercé par les chambres, qui constitue le corollaire indispensable du renforcement de l'autonomie des collectivités locales et de l'accroissement de leurs compétences, le groupe de travail considère que l'établissement de relations confiantes entre les collectivités et les juridictions financières représente une condition préalable à l'exercice d'un contrôle serein, constructif et respectueux des droits de la défense.

Il faut en finir avec " cette ère du soupçon " et créer les conditions d'un dialogue entre les contrôleurs et les contrôlés fondé sur un respect mutuel.

A cet égard, les magistrats des chambres régionales des comptes doivent prendre conscience que les collectivités locales ne sont pas des entités mineures, mal gérées ou gérées sans rigueur : elles sont devenues, depuis la relance de la décentralisation intervenue en 1982, des acteurs économiques et sociaux majeurs, qui exercent des compétences essentielles pour la vie quotidienne de nos concitoyens.

Acteurs économiques majeurs, les collectivités locales le sont à l'évidence.

Le total de leurs dépenses annuelles s'élève aujourd'hui à plus de 850 milliards de francs : cette masse financière représente plus de la moitié du budget de l'Etat et environ 11 % du produit intérieur brut de la France.

Par ailleurs, les collectivités locales emploient actuellement 1,5 million de personnes soit près du tiers de l'ensemble de la fonction publique et plus de 7 % de la population active salariée.

En outre, et surtout, les collectivités locales sont les premiers investisseurs publics de France puisqu'elles réalisent, loin devant l'Etat et les organismes sociaux, 72 % de la formation brute de capital fixe des administrations publiques, c'est-à-dire de l' investissement public civil. Il s'agit là d'un rôle considérable qui fait des collectivités locales des moteurs de la connaissance. Certes la contribution des collectivités locales à la croissance de notre pays ne peut être chiffrée avec certitude ; mais il est possible d'affirmer, sans craindre de se tromper, que la croissance molle que connaît notre pays depuis le début des années 1990, aurait été encore plus faible, et le chômage encore plus élevé, si les collectivités locales n'avaient pas consenti un tel effort d'investissement.

Enfin, par leur action quotidienne et le maillage de solidarité qu'elles assurent, les collectivités locales ont, jusqu'à présent, évité que le tissu social ne se déchire de manière irréversible ou explosive.

Acteurs économiques et sociaux de premier plan, les collectivités locales apparaissent également, dans leur quasi totalité, comme des entités bien gérées, en dépit de la montée des dépenses incompressibles, de l'explosion des dépenses sociales, des transferts de compétences mal compensés et de la progression modérée des concours de l'Etat.

C'est ainsi que l'endettement des collectivités locales, qui s'élève à 825 milliards de francs, est resté stable : il représente, depuis plus de 20 ans, environ 10 % du PIB.

Cette dette équivaut à moins d'une année du total des budgets locaux, alors que l'Etat devrait consacrer deux ans et sept mois de son budget pour rembourser sa dette qui s'élève à 4.100 milliards de francs.

En outre, les collectivités locales ont dégagé, en 1997, grâce notamment à une gestion active et avisée de leur dette , une capacité de financement également à 0,20 % du PIB. Cet excellent résultat contraste avec les " contre-performances " de l'Etat et des organismes de sécurité sociale qui ont affiché un déficit équivalent à 3,2 % du PIB.

C'est la bonne gestion des collectivités locales qui a permis à la France de se qualifier pour l'euro.

Cette saine gestion locale oppose un démenti aux allégations selon lesquelles les collectivités territoriales constitueraient des îlots de laxisme et de gabegie dans un océan de rigueur et d' austérité.

Il est vrai que les collectivités locales sont condamnées à la vertu budgétaire puisque la loi leur interdit, fort judicieusement, certaines pratiques que l'Etat s'autorise comme l'adoption d'un budget en déficit ou le recours à l'emprunt pour financer des dépenses de fonctionnement...

Si les magistrats des chambres régionales des comptes doivent être conscients de la montée en puissance des collectivités locales, il leur appartient également de prendre en considération les difficultés auxquelles se heurtent les élus locaux dans l'exercice quotidien de leurs compétences.

A cet égard, il semble indispensable que le contrôle financier soit " mieux vécu " par les élus locaux et qu'il se déroule dans un climat plus serein et moins " suspicieux ".

A force de multiplier les contraintes, d'engager de manière quasi automatique la responsabilité des élus locaux et de les considérer comme des " délinquants potentiels ", on risque de décourager les vocations et de détourner les bonnes volontés de la tâche, pourtant exaltante, que constitue le service du public.

Un tel risque est réel comme en témoigne le fort pourcentage de maires sortants, et encore jeunes, qui ne se sont pas représentés aux dernières élections municipales.

Quant aux élus locaux, ils doivent résister à la tentation de considérer le contrôle comme une " brimade ". Le contrôle, qui constitue la contrepartie démocratique du renforcement des pouvoirs dévolus aux collectivités locales, s'avère encore plus indispensable dans un contexte de rareté de l'argent public.

Telles sont les considérations générales qui ont présidé à la conception des propositions formulées par le groupe de travail.

Elles s'articulent autour de deux idées majeures :


• rénover les conditions d'exercice de l'examen de la gestion des collectivités locales ;


et, renforcer la sécurité juridique des actes des collectivités locales.

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