3. Les personnels des bibliothèques bénéficient d'une formation de meilleure qualité

L'amélioration de la formation des personnels des bibliothèques concerne d'abord sans conteste les conservateurs.

Le décret n° 92-25 du 9 janvier 1992 crée l'Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques (ENSSIB), qui se substitue à l'Ecole nationale supérieure des bibliothécaires (ENSB) créée par le décret du 12 juillet 1963.

L'ENSSIB, dont le siège est à Villeurbanne, est, aux termes de l'article 1 er du décret du 9 janvier 1992, un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel. Son budget initial pour 1998 s'élève à 17,43 millions de francs. Elle compte, au 1 er mai 1998, 73 agents, toutes catégories confondues ; lors de la rentrée universitaire, un poste de bibliothécaire adjoint a été créé.

L'article 3 du décret dispose que "l'école prépare, par une formation scientifique et culturelle, des élèves se destinant à des fonctions d'encadrement des bibliothèques et des services de documentations et d'information scientifique et technique. Elle assure notamment la formation initiale des conservateurs stagiaires..."

L'ENSSIB est une école professionnelle : elle est chargée de former les conservateurs stagiaires ayant réussi l'un des concours prévus par le décret n° 92-26 du 9 janvier 1992, cette formation étant, aux termes de l'article 4 du décret n°92-25, "sanctionnée par le diplôme de conservateur des bibliothèques...". Ce diplôme - le DCB - succède au diplôme supérieur de bibliothécaire.

Le DCB a lui-même fait l'objet d'une réforme à la rentrée 1996. La formation dure 18 mois, soit de janvier 1998 à juillet 1999 pour les élèves que j'ai rencontrés à Villeurbanne, cette promotion comprenant 20 élèves conservateurs contre 42 pour la promotion précédente. Elle est structurée autour d'enseignements (cours magistraux et travaux pratiques) et de stages. Trois stages doivent être effectués au cours de la scolarité : un stage de découverte d'une semaine en janvier, un stage de deux semaines qui donne l'occasion à un groupe de quatre élèves de réaliser un projet demandé par l'établissement d'accueil, puis un stage de trois mois à l'automne au cours duquel l'élève doit rédiger un mémoire d'études sur un thème défini avec un enseignant en accord avec l'établissement d'accueil.

L'alternance du théorique et du pratique est ainsi privilégiée . Les nouvelles technologies tiennent une place considérable puisque le tiers des enseignements délivrés à l'Ecole leur est consacré.

Mais, l'ENSSIB est également un établissement universitaire qui "mène des recherches en sciences de l'information et en assure la valorisation" (article 3 du décret n° 92-25) et qui " délivre des diplômes propres " (article 4).

Les recherches menées à l'ENSSIB concernent la bibliothéconomie et les sciences de l'information. Ce rôle s'est considérablement développé : ainsi, l'ENSB n'assurait pas de missions de recherche. L'activité de recherche de l'ENSSIB est conduite par le Centre d'études et de recherche en sciences de l'information (CERSI) qui comprend une vingtaine d'enseignants-chercheurs et autant de doctorants. Ses travaux sont organisés autour de trois axes : histoire et conservation de l'écrit ; systèmes d'information et interface : conception, organisation et représentations ; économie, management et sociologie des services d'information.

Outre le DCB, l'ENSSIB prépare trois autres diplômes qui lui sont propres :

- le DESS d'informatique documentaire, préparé conjointement avec l'université de Lyon I (13 étudiants), dont l'orientation vers l'informatique est nettement marquée et dont l'enseignement est axé sur la méthodologie d'analyse d'un système d'information dans l'entreprise ; il comprend une partie théorique et un stage d'application de quatre mois donnant lieu à la rédaction d'un mémoire ;

- le DEA en sciences de l'information et de la communication, mis en oeuvre avec les universités Lyon II et III (30 étudiants) ;

- le diplôme professionnel supérieur en sciences de l'information et des bibliothèque est davantage destiné à des étudiants étrangers titulaires d'une maîtrise (11 inscrits) ; il comprend une partie théorique et un stage de quatre mois donnant lieu à la rédaction d'un mémoire.

L'ENSSIB a récemment développé des actions de formation continue , à destination des professionnels en poste mais également des demandeurs d'emploi. Le programme de formation continue comporte une formation longue et diplômante (le DESS) et des sessions de courte durée abordant surtout les aspects techniques, informatiques ou de gestion. Par exemple, en 1998, l'ENSSIB propose les stages suivants : mettre en place et faire évoluer un réseau de CD-Roms, numériser une collection, droit de l'information, former les étudiants à la maîtrise de l'information documentaire... Ces stages de courte durée sont gratuits pour les personnels de l'enseignement supérieur et de la culture. En 1997, l'Ecole a accueilli 116 stagiaires en formation continue : 7 conservateurs et 109 autres personnels de bibliothèques ou spécialistes de l'information.

L'ENSSIB entend ainsi assurer une meilleur coordination entre formation initiale et formation continue, la dichotomie entre ces deux notions étant souvent artificielle et préjudiciable à la bonne perception des métiers des bibliothèques .

Il semble que l'ENSSIB connaisse quelques difficultés de fonctionnement liées à la faiblesse de ses moyens . En effet, outre un manque de personnels -la création récente de deux postes de conservateurs constitue une régularisation et non un apport de moyens supplémentaires -, l'Ecole souffre de l'exiguïté de ses locaux. Cependant, ce problème, déjà soulevé par le rapport du Comité national d'évaluation (CNE) d'octobre 1996, semblerait trouver une solution prochaine, soit grâce à la réalisation de travaux d'extension du bâtiment, soit au moyen d'une délocalisation de l'Ecole sur le pôle scientifique de Gerland (où s'installera l'Ecole normale supérieure).

En outre, les membres du conseil d'administration semblent parfois éloignés des préoccupations de l'Ecole. Du reste, le décret de 1992 gagnerait sans doute à être modifié sur le point de la composition du conseil d'administration afin de prendre en compte les changements intervenus dans les structures du ministère.

La formation des personnels des bibliothèques autres que les conservateurs est assurée par une multitude d'organismes, ce qui lui confère un caractère bien trop disparate et, par là même, nuit à la cohérence de l'ensemble .

L'Institut de formation des bibliothécaires (IFB), créé en 1992 et dont le siège se trouve également à Villeurbanne, forme les bibliothécaires, nouveau corps de catégorie A créé en 1992.

Il conduit également des actions de formation continue pour les personnels des bibliothèques qui prennent la forme de stages de courte durée portant sur des sujets très souvent techniques, par exemple : gérer une collection de périodiques en sciences humaines ; bibliothèques associées et SCD : comment travailler ensemble ; du bâtiment au mobilier : comment intégrer les nouvelles technologies... La politique de formation continue de l'IFB est menée de manière beaucoup plus intensive que celle de l'ENSSIB, le premier accueillant chaque année environ 600 stagiaires, la seconde moins de 120.

Dans un souci de rationalisation, les stages proposés par l'IFB sont conçus dans un esprit de complémentarité avec ceux de l'ENSSIB.

Un effort très appréciable de rationalisation de l'offre de formation a été entrepris et aboutira, au 1 er janvier 1999 , à l'intégration de l'IFB à l'ENSSIB ce qui permettra une mise en commun des moyens de chacun des deux établissements. La "nouvelle ENSSIB" disposera de deux départements de formation initiale (formation des conservateurs et formation des autres personnels) et d'un seul département de formation continue.

Cependant, et malgré cet effort, l'offre de formation reste trop disparate .

Les universités forment les (futurs) personnels des bibliothèques. Ainsi, 7 d'entre elles préparent au DEUST Documentation-Information-Métiers du livre et 12 comportent un IUT préparant le DUT Information-Communication options Documentation d'entreprise ou Métiers du livre.

En outre, 13 centres régionaux de formation aux carrières des bibliothèques, du livre et de la documentation sont rattachés à une université. Ils assurent le plus souvent une préparation aux concours des bibliothèques et organisent également de stages de formation continue.

Je ferai quelques observations d'ordre général relatives à la formation des personnels des bibliothèques.

D'abord - je l'ai déjà noté - l'offre de formation est considérable, voire souvent disparate. Une rationalisation et une coordination des formations sont aujourd'hui indispensables . Des efforts en ce sens ont déjà été entrepris : ils doivent être poursuivis. Il s'agit en effet de supprimer les formations faisant doublon et, dans le même temps, de mettre en place des stages abordant des thèmes jusqu'alors absents des programmes. Une telle coopération a déjà vu le jour, notamment au plan régional.

Il s'agit maintenant de promouvoir une véritable coordination. Certains ont proposé la création d'un observatoire des formations aux métiers du livre et des bibliothèques . Je suis favorable à cette idée si elle permet de mettre en place une instance d'évaluation et de proposition en matière de formation, et non si elle engendre une structure administrative supplémentaire.

Ensuite, je trouve paradoxale la situation qui consiste à n'assurer aucune ou quasiment aucune formation initiale à nombre de fonctionnaires des bibliothèques, notamment en catégories B et C, dans un contexte d'abondance de l'offre de formations. Je crois que cela tient à une mauvaise appréhension , non pas tant des métiers des bibliothèques en tant que tels, mais de l'adéquation de la formation à ces métiers . Il est vrai que les nouvelles technologies introduisent dans les bibliothèques le ferment d'une profonde évolution des métiers : un bibliothécaire, au sens générique du terme, n'est pas (et n'a d'ailleurs jamais été) un simple "catalogueur". Les nouvelles technologies doivent ainsi donner l'occasion de penser une réforme des formations . Une telle réforme a été engagée, mais quasi-exclusivement au niveau des personnels de catégorie A : la réforme du DCB a introduit une dimension universitaire dans la formation professionnelle et technique que reçoivent les conservateurs.

Enfin, la distinction traditionnelle, et parfois rigide, entre formation initiale et formation continue, a perdu une grande part de sa pertinence . En effet, ce sont là deux moments de l'acquisition des compétences professionnelles. La formation continue ne peut être appréciée que si une formation initiale a été suivie, et, inversement, une formation initiale sans remises à niveau régulières constituerait une conception fixiste du métier, plus irréaliste que jamais dans le contexte actuel.

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