CHAPITRE III

LA POSSIBILITÉ POUR LES ETATS-MEMBRES D'APPLIQUER UN OU DEUX TAUX RÉDUITS DE TVA

Les Etats-membres ont la possibilité, et non l'obligation, d'appliquer un ou deux taux réduits de TVA, à une liste limitative de cas. Ceux-ci figurent en principe au sein de l'annexe H de la directive TVA de 1977 qui recense les 17 catégories de biens et de prestations de services éligibles à ces taux réduits.

La France ne peut donc appliquer, en principe, des taux réduits que si le bien ou le service concerné est mentionné au sein de cette annexe H . Dans le cas contraire, la " baisse ciblée " de TVA se révèle être " euro-incompatible ".

I. LES TAUX RÉDUITS CONCERNENT 17 CATÉGORIES DE BIENS ET SERVICES FIGURANT AU SEIN DE L'ANNEXE H DE LA DIRECTIVE DE 1977

Le dernier alinéa de l'article 12.3a de la directive TVA de 1977 prévoit que " les Etats-membres peuvent également appliquer soit un, soit deux taux réduits. Ces taux sont fixés à un pourcentage qui ne peut être inférieur à 5 % et ils s'appliquent uniquement aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories visées à l'annexe H " . Les taux réduits ne peuvent être supérieurs à 15 % qui constitue le " plancher " du taux normal.

A. LA DIVERSITÉ DES SITUATIONS EN EUROPE

De même que pour le taux normal, les taux réduits varient considérablement.

S'ils ne peuvent en droit être inférieurs à 5 %, ils s'étendent, de fait, entre 5 % et 12,5 %, voire 17 % pour la Finlande. En effet, le taux de 17 % est applicable en Finlande, Etat-membre depuis le 1 er janvier 1995 et dans lequel un système complet de TVA n'a été instauré que le 1 er juin 1994, à certaines denrées alimentaires et pour une période transitoire seulement. Il n'en constitue pas moins un troisième taux réduit, ce que ne permet pas la réglementation communautaire. Aussi la commission " l'a déjà favorablement invité à s'en abstenir " et à ramener à deux le nombre des taux réduits.

La moyenne simple du taux réduit est légèrement supérieure à 8 % et a connu une notable progression par rapport à 1994 pour des raisons similaires à celles évoquées pour le taux normal. Cela résulte en effet de l'élargissement de la Communauté à des Etats-membres connaissant des taux moyen plus élevés.

Un mouvement similaire s'observe s'agissant des taux moyens pondérés.

 

1994

1995
UE à 12

1995
UE à 15

Taux réduit moyen pondéré

5,71 %

6,17 %

6,57 %

Source : Commission européenne 1997

De même, existent d'importantes disparités quant au niveau réel du taux réduit, ainsi que le montre leur évolution depuis 1994.

Etat-membre


Taux réduit

 

1994

1995

1996

Danemark

-

-

-

France

5,5

5,5

5,5

Belgique

6

6

6

Luxembourg

6

6

6

Pays-Bas

6

6

6

Espagne

6

7

7

Allemagne

7

7

7

Grèce

8

8

8

Royaume-Uni

8

8

8

Italie

9

10

10

Portugal

5

5

5/12

Suède

12/21

12/21

6/12

Irlande

12,5

12,5

12,5

Finlande

5/12

6/12/17

6/12/17

Source : Commission européenne 1997

Cette situation n'a que peu évolué depuis 1996, comme le souligne le diagramme retraçant les taux réduits de TVA (hors " taux super réduits " ou systèmes dérogatoires) en vigueur au 1 er avril 1998.

Taux réduits de TVA dans les Etats-membres au 1 er avril 1998

B. LES 17 CATÉGORIES DE BIENS ET SERVICES ÉLIGIBLES AUX TAUX RÉDUITS

Les taux réduits tels qu'ils sont prévus par la directive TVA de mai 1977 ne s'appliquent qu'à une liste de biens et services énumérés par l'annexe H. Celle-ci recense actuellement 17 catégories de biens et prestations de services pouvant faire l'objet de taux réduits de TVA. Elle n'est qu'indicative. Elle ne crée aucune obligation pour les Etats de les appliquer . Elle leur permet seulement, en droit, d'y recourir, et cela en fonction des considérations budgétaires ou sociales propres à chaque pays. La situation en Europe se traduit donc par une très grande disparité dans la possibilité ainsi offerte aux Etats-membres de recourir au taux réduit, ainsi que le montre le tableau ci-après.

ANNEXE H

Liste des livraisons de biens et des prestations de services pouvant faire l'objet
de taux réduit de TVA

1

Les denrées alimentaires (y compris les boissons à l'exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale ; les animaux vivants, les graines, les plantes et les ingrédients normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ; les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires.

2

La distribution d'eau.

3

Les produits pharmaceutiques normalement utilisés pour les soins de santé, la prévention de maladies et le traitement à des fins médicales et vétérinaires, y compris les produits utilisés à des fins de contraception et de protection hygiénique féminine.

4

Les équipements médicaux, le matériel auxiliaire et les autres appareils normalement destinés à soulager ou traiter des handicaps, à l'usage personnel et exclusif des handicapés, y compris la réparation de ces biens, ainsi que les sièges d'enfant pour voitures automobiles.

5

Le transport des personnes et des bagages qui les accompagnent.

6

La fourniture de livres, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres), les journaux et périodiques, à l'exclusion du matériel consacré entièrement ou d'une manière prédominante à la publicité.

7

Le droit d'admission aux spectacles, théâtres, cirques, foires, parcs d'attraction, concerts, musées, zoos, cinémas, expositions et manifestations et établissements culturels similaires

Réception de services de radiodiffusion et de télévision.

8

Les services fournis par les écrivains, compositeurs et interprètes et les droits d'auteur qui leur sont dus.

9

La livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale.

10

Les livraisons de biens et prestations de services d'un type normalement destiné à être utilisé dans la production agricole, à l'exclusion, toutefois, des biens d'équipement, tels que les machines ou les bâtiments.

11

L'hébergement fourni dans des hôtels et établissements similaires, y compris la fourniture d'hébergement de vacances et la location d'emplacement de camping et d'emplacements pour caravanes.

12

Le droit d'admission aux manifestations sportives.

13

Le droit d'utilisation d'installations sportives

14

La prestations de services et la livraison de biens par des organismes reconnus comme ayant un caractère social par les Etats membres et engagés dans des oeuvres d'aide et de sécurité sociales, dans la mesure où ces prestations et services ne sont pas exonérés en vertu de l'article 13.

15

Les services fournis par les entreprises de pompes funèbres et de crémation ainsi que la livraison de biens qui s'y rapportent.

16

La fourniture de soins médicaux et dentaires ainsi que les cures thermales, dans la mesure où ces prestations ne sont pas exonérées en vertu de l'article 13.

17

Les services fournis dans le cadre du nettoyage des voies publiques, de l'enlèvement des ordures ménagères et du traitement des déchets, autres que les services fournis par les organismes visés à l'article 4, paragraphe 5.

Application de taux réduits de TVA par les Etats-membres aux catégories de biens et de services énumérées à l'annexe H de la 6ème directive TVA

Catégorie

B

DK

D

EL

E

F

IRL

I

L

NL

A

P

FIN

S

UK

1

Denrées alimentaires

6

12

21

25

7

15

8

4

7

5,5

20,6

21

0

12,5

4

10

16

3

6

10

5

12

17

17

12

25

0

2

Distribution d'eau

6

25

7

8

7

5,5

ex

10

3

6

10

5

22

25

17,5 et 0

3

Produits pharmaceutiques

6

21

25

15

8

18

4

16

2,1

5,5

20,6

0

4

10

19

3

15

6

17,5

20

5

17

12

0

25

17,5

0

4

Équipements médicaux

ex

6

21

25

7

8

7

5,5

20,6

0

4

3

17,5

20

5

22

ex

25

ex

0

5

Transport de personnes

6

ex

ex

7

15

8

7

16

5,5

ex

10

16

3

ex

6

ex

10

5

6

12

0

0

6

Livres, journaux, périodiques

6

ex

25

0

7

4

4

2,1

5,5

12,5

21

0

4

19

3

6

10

5

12

0

6

25

ex

0

7

Droit d'admission aux spectacles et manifestations culturelles Services de radio-diffusion et de télévision

ex

6

21

25

7

15

ex

4

8

18

ex

7

16

ex

2,1

5,5

20,6

12,5

21

ex

4

10

19

3

15

ex

6

17,5

10

ex

5

17

ex

6

22

25

ex

6

17,5

8

Droits d'auteur dus aux écrivains, compositeurs et interprètes, et services fournis par eux

ex

6

21

ex

7

8

7

5,5

21

10

19

3

17,5

10

20

17

ex

6

17,5

9

Logements sociaux

6

12

25

15

7

8

4

5,5

20,6

12,5

4

10

3

15

17,5

20

5

22

25

ex

17,5

0

10

Biens et services destinés à la production agricole

6

12

21

25

7

8

7

5,5

12,5

4

10

3

6

10

20

5

22

17

25

17,5

11

Hébergement

6

25

15

8

7

16

5,5

12,5

10

3

6

10

5

6

12

17,5

12

Droit d'admission aux manifestations sportives

6

ex

ex

15

8

7

16

20,6

ex

10

3

ex

6

20

5

6

ex

6

17,5

13

Utilisation d'installations sportives

6

ex

ex

8

16

ex

20,6

12,5

19

3

17,5

6

ex

20

ex

5

12

ex

6

17,5

ex

14

Services sociaux

6

21

ex

25

7

8

7

20,6

ex

19

3

15

ex

17,5

10

0

17

ex

ex

ex

25

ex

15

Service fournis par les entreprises de pompes funèbres et de crémation

6

ex

15

8

7

16

20,6

21

ex

19

3

ex

20

ex

ex

25

ex

ex

16

Soins médicaux et dentaires ; cures thermales

6

21

ex

ex

7

ex

8

7

5,5

20,6

21

ex

19

3

ex

17,5

ex

10

ex

5

ex

ex

ex

ex

17

Nettoyage des voies publiques, enlèvement des ordures ménagères et traitement des déchets

21

25

ex

8

7

20,6

21

ex

4

3

17,5

ex

10

ex

22

25

17,5

0

N.B. : ex : exonération sans droit à déduction de la taxe d'amont ; o : exonération avec droit à déduction de la taxe amont.

Source : Commission européenne 1997

II. LA FRANCE APPLIQUE UN SEUL TAUX RÉDUIT DE TVA

La France ne bénéficie 22( * ) que d'un seul taux réduit fixé à 5,5 % par l'article 278 bis du code général des impôts.

Il convient en outre de relever l'importance de l'écart existant entre ce taux réduit et le taux normal : 15,1 points. En effet, l'écart moyen en Europe peut être estimé en 1998 à 11,7 points pour un taux normal moyen de 19,4 points et un taux réduit moyen de 7,7 points. L'importance de cet écart en France, souvent dénoncé ou regretté, alimente par voie de conséquence d'autant les demandes de baisse ciblée de TVA. Et cela à défaut d'une baisse générale du niveau du taux normal, dont le coût s'élèverait à environ 60 milliards de francs s'il devait s'établir à nouveau à 18,6 %.

En conséquence, le taux réduit de 5,5 % tel qu'il est fixé par le code général des impôts s'applique en France à certains produits ou biens et prestations de services limitativement désignés par la loi et recensés au sein du code général des impôts.

A. QUELQUES BIENS SOUMIS AU TAUX RÉDUIT

1. L'eau et les boissons non alcooliques

Ces biens sont mentionnés par la première catégorie de l'annexe H. Ainsi, en vertu de l'article 278 bis-1 ° du code général des impôts, l'eau et les boissons non alcooliques relèvent du taux réduit de TVA. Il s'agit non seulement de l'eau délivrée par les réseaux d'adduction mais également des eaux minérales (naturelles ou artificielles), de source, de table commercialisées après emballage comme boissons, et de toutes les autres boissons non alcooliques. A contrario, les eaux distillées et déminéralisées sont soumises au taux normal.

Sont également soumis au taux réduit le lait et les boissons non alcooliques, sauf lorsqu'ils font l'objet de ventes à consommer sur place. Ce taux concerne également les produits commercialisés sous forme solide ou liquide utilisés pour la confection de boissons et les préparations qui sont destinées à être additionnées de lait ou d'eau.

2. La plupart des produits alimentaires

Conformément à l'article 278 bis-2° du code général des impôts, les produits destinés à l'alimentation humaine à l'exception des boissons alcooliques, de la confiserie, des margarines et graisses végétales, de certains chocolats et produits composés de chocolat, du caviar et des ventes à consommer sur place, sont soumis au taux réduit de TVA.

Le taux réduit s'applique à toutes les opérations portant sur les produits alimentaires, c'est-à-dire ceux qui, par nature, constituent des aliments, simples ou composés, susceptibles d'être utilisés en l'état pour l'alimentation (pain, lait, viandes, conserves, etc...) 23( * ) . Par ailleurs, ces produits peuvent être affectés à un autre usage que l'alimentation humaine, tel que l'alimentation animale ou l'industrie, sans perdre le bénéfice du taux réduit.

3. Les ventes à emporter

Les ventes à emporter constituent un " sous-ensemble " du secteur de la restauration et doivent être distinguées de la restauration " à consommer sur place ".

Le critère de distinction utilisé est l'existence ou non d'un service apporté au client . Il permet ainsi de soumettre au taux normal de TVA la restauration à consommer sur place, en tant que prestation de services. A contrario, la vente à emporter est assimilée à la vente d'un produit alimentaire 24( * ) .

De ce fait, les ventes à emporter de produits alimentaires simples ou élaborés sont soumises au taux de TVA applicable aux produits sur lesquels elles portent, soit en règle générale le taux réduit. La principale exception concerne les boissons alcoolisées mais également certains produits de chocolaterie ou de confiserie qui sont en effet soumis au taux normal de TVA.

Ainsi, la livraison de plats à domicile (y compris par les traiteurs dès lors qu'il n'y a pas fourniture de personnel), la vente par distributeur automatique, les ventes sur la voie publique (sans mise à disposition du client d'aménagements particuliers), la part des ventes à emporter servies dans des emballages non restituables sont soumises généralement à une TVA de 5,5 %.

En outre, l'administration fiscale estime pour les établissement de restauration rapide (" fast-food ") vendant de tels produits, que la part des ventes à emporter de produits solides représente 30 % du chiffre d'affaires " solide " si la surface à la disposition de la clientèle est de moins de 200 m² et de 20 % si cette superficie est supérieure 25( * ) . Une même clé de répartition s'applique aux boissons non alcoolisées. Si ces taux moyens sont jugés insuffisants, l'exploitant peut alors justifier par tout moyen d'un écart entre l'imposition forfaitaire et la réalité. Ce système de taux moyen ne fonctionne pas pour les " divers " (viennoiseries, pizzas,...) car l'administration fiscale considère que l'essentiel des ventes est à emporter. Par ailleurs, lorsque la surface à la disposition de la clientèle est inférieure à 10 m 2 , elle estime, qu'il s'agisse des " fast-food " ou des " divers ", que toutes les ventes sont à emporter.

4. Des médicaments

Ils sont prévus par la troisième catégorie de l'annexe H. Ainsi, conformément à l'article 278 quater du code général des impôts, le taux réduit de TVA s'applique en principe à toutes les opérations portant sur les médicaments. Cependant, s'ils sont pris en charge par la sécurité sociale, ils bénéficient de façon dérogatoire du taux " super-réduit " de 2,1 % prévu par l'article 281 octies du code général des impôts 26( * ) .

Sont qualifiés de médicaments les produits suivants : préparations magistrales, produits officinaux préparés selon la " pharmacopée française ", médicaments ou produits pharmaceutiques destinés à l'usage de la médecine humaine et faisant l'objet de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) prévue par l'article L. 601 du code de la santé publique.

Les produits qualifiés de médicaments sont soumis au taux de 2,1 % s'ils sont, soit remboursables aux assurés sociaux 27( * ) , soit acquis à l'usage des collectivités publiques et de divers services publics 28( * ) .

Les produits qualifiés de médicaments qui ne bénéficient pas du taux de 2,1 % dans les conditions précisées ci-dessus relèvent donc du taux réduit de 5,5 % qui est le taux de droit commun applicable à cette catégorie particulière de biens.

5. Les appareillages et équipements pour handicapés

Ces biens sont visés par la quatrième catégorie de l'annexe H. De ce fait, conformément à l'article 278 quinquies du code général des impôts, trois domaines relèvent du taux réduit de TVA. Ils ont été introduits par des lois de finances, et cela depuis 1988 29( * ) .

Le taux réduit concerne d'une part, les appareillages visés dans certains chapitres du tarif interministériel des prestations sanitaires (TIPS) tels que les prothèses oculaires et faciales, les appareils électroniques de surdité, les chaussures orthopédiques, les objets de prothèse interne, etc... 30( * ) .

Il s'applique, d'autre part, aux équipements spéciaux, ou aides techniques, qui sont conçus pour les handicapés en vue de la compensation d'incapacités graves, tels que ceux destinés à faciliter la conduite ou l'accès des véhicules, ainsi qu'aux appareils ou objets de lecture destinés aux aveugles et aux mal voyants, etc... 31( * ) .

Enfin, les ascenseurs et matériels assimilés conçus pour les personnes handicapés qui sont conformes aux normes applicables en ce domaine 32( * ) bénéficient également du taux réduit.

Il doit donc s'agir d'équipements exclusivement destinés à des personnes handicapés. Ainsi le bénéfice du taux réduit a été refusé à un système de sous-titrage de vidéocassette dénommé " closed caption " au motif que celui-ci ne se distingue pas de ceux utilisés notamment dans l'enseignement 33( * ) . De façon plus générale, le gouvernement estime " qu'il n'est pas possible d'étendre l'application du taux réduit aux matériels qui ne seraient pas exclusivement conçus pour l'usage des sourds et malentendants " 34( * ) .

Dernièrement, l'article 30 de la loi de finances pour 1999 a étendu le champ d'application du taux réduit aux appareillages destinés aux diabétiques et à certains handicapés. Cette mesure concernait 230.000 personnes et avait un coût évalué à 200 millions de francs. Votre commission des Finances avait alors tenu à relever que le droit communautaire permettait au gouvernement d'étendre ce mouvement de baisse aux autres équipements figurant dans le TIPS. En effet l'annexe H permet de soumettre au taux réduit " les équipements médicaux, le matériel auxiliaire et les autres appareils normalement destinés à soulager ou à traiter des handicapés, à l'usage personnel et exclusif des handicapés, y compris la réparation de ces biens ".

De ce fait, le législateur dispose encore de quelques " marges de manoeuvre ". Au nombre de ces équipements pouvant encore être éligibles au taux réduit, on peut évoquer notamment l'optique médicale, les articles pour pansement, les matériels mis à disposition des assurés pour traitement à domicile, ou les appareils de contention. De même, suite aux dispositions votées lors de la dernière loi de finances, les produits pour incontinence pourraient relever du taux de 5,5 %. Il convient en outre de préciser que les appareils auditifs sont pour plus de 95 % d'entre eux déjà assujettis au taux réduit.

6. Les livres

Ceux-ci font l'objet de la sixième catégorie de l'annexe H. En vertu de l'article 278 bis -6° du code général des impôts, le taux réduit s'applique au livre qui est compris comme " un ensemble imprimé, illustré ou non, publié sous un titre ayant pour objet la reproduction d'une oeuvre de l'esprit d'un ou plusieurs auteurs en vue de l'enseignement, de la diffusion de la pensée et de la culture " .

Il est en outre précisé que : " cet ensemble peut être présenté sous la forme d'éléments imprimés, assemblés ou réunis par tout procédé, sous réserve que ces éléments aient le même objet et que leur réunion soit nécessaire à l'unité de l'oeuvre. Ils ne peuvent faire l'objet d'une vente séparée que s'ils sont destinés à former un ensemble ou s'ils en constituent la mise à jour. Cet ensemble conserve la nature de livre lorsque la surface cumulée des espaces consacrés à la publicité et des blancs intégrés au texte en vue de l'utilisation par le lecteur est au plus égale au tiers de la surface totale de l'ensemble, abstraction faite de la reliure ou de tout procédé équivalent ".

Ainsi, les dictionnaires, encyclopédies, formulaires scientifiques, guides touristiques, méthodes de musique, livrets ou partitions d'oeuvres musicales, répertoires juridiques, catalogues et répertoires bibliographiques donnant des renseignements sur les livres parus ou disponibles sont au taux réduit, alors que les albums à colorier, annuaires, barèmes, tarifs, distanciers, indicateurs, simples partitions de musique, albums philatéliques, livres muraux sont au taux normal.

Cette situation peut néanmoins être source de difficultés d'application. Ainsi un guide fournissant des informations sur les monuments historiques ou les curiosités naturelles afin de faciliter la connaissance du patrimoine historique répond en principe à la définition fiscale du livre. En revanche lorsqu'il contient des listes d'hôtels et de restaurants ou de simples renseignements d'ordre pratique, il est soumis au taux normal. L'administration fiscale a ainsi été conduite à se pencher sur le cas de la " partie dépliants d'appel des publications touristiques " afin de statuer au cas d'espèce sur le taux de TVA applicable 35( * ) .

Le taux réduit s'applique également en application de l'article 298 octies du code général des impôts aux " travaux de composition et d'impression des écrits périodiques ". Il s'agit de publications éditées à intervalles plus ou moins réguliers dès lors que ces travaux de composition sont effectués dans le cadre d'une opération d'édition. Il n'est pas nécessaire par ailleurs que ces publications soient inscrites sur les registres de la commission paritaire des publications et agences de presse 36( * ) . Cependant ainsi que le reconnaissait le gouvernement, le recours aux moyens informatiques ne permet plus toujours de distinguer les opérations de composition de celles réalisées en amont, telles que la création de la maquette 37( * ) .

7. Les logements à caractère social

La 9 ème catégorie de l'annexe H de la directive de 1977 autorise les Etats-membres à soumettre au taux réduit " la livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale " 38( * ) . A ce titre trois mesures ont été adoptées récemment dans le cadre des lois de finances.

L'article 17 de la loi de finances pour 1997 a substitué aux subventions associées aux prêts locatifs aidés ( PLA ) un régime de TVA à taux réduit sur les livraisons à soi-même d'immeubles qui portait exclusivement sur les opérations de construction neuve. L'article 14 de la loi de finances pour 1998 a poursuivi ce processus d'assujettissement des investissements des bailleurs sociaux à la TVA à taux réduit sous forme de livraison à soi-même. Il a assujetti la livraison à soi-même des travaux d'amélioration de transformation ou d'aménagement des logements locatifs sociaux à ce taux réduit. En outre, la loi du 2 juillet 1998 portant DDOEF a fait bénéficier du taux réduit les logements-foyers visés à l'article L. 351-2-5° du code de la construction. Enfin, l'article 32 de la loi de finances pour 1999 a appliqué ce taux réduit aux travaux subventionnés par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH).

En application de ces règles communautaires, le gouvernement avait réaffirmé lors de la discussion de la loi de finances pour 1998 que " seuls les logements présentant un caractère social affirmé " étaient éligibles au taux réduit. Il avait ainsi été conduit à repousser pour " euro-incompatibilité " une disposition soumettant l'ensemble des travaux de réhabilitation des logements occupés à titre de résidence principale audit taux ainsi qu'un amendement fixant à 5,5 % la TVA perçue pour les opérations d'entretien, de rénovation et de réhabilitation de logements non aidés effectuées par des entreprises artisanales du bâtiment 39( * ) . La proposition de directive n° E-1236 offrira en ce domaine de très certaines possibilités d'évolution 40( * )

B. QUELQUES SERVICES TAXÉS AU TAUX RÉDUIT

De nombreux services sont, en conformité avec les directives communautaires, également soumis au taux réduit de TVA.

Il s'agit notamment des soins dispensés par les établissements thermaux autorisés (article 279 a quinquies du code général des impôts), des fournitures de logement en hôtel ou en meublé et dans les terrains de camping classés (article  279 a du code général des impôts), des locations d'emplacements sur les terrains de camping classés (article 279 a ter du code général des impôts), des prestations relatives à la fourniture et à l'évacuation de l'eau (article 279 b du code général des impôts), de certains spectacles (article 279 b bis du code général des impôts) et de certaines attractions (article 279 b ter du code général des impôts) 41( * ) , des abonnements aux télévisions privées 42( * ) (article  279 b octies du code général des impôts) ou des cessions de droits portant sur les livres et les oeuvres cinématographiques (article 279 g du code général des impôts).

Par ailleurs, quatre prestations de services doivent faire l'objet d'un examen particulier.

1. Les prestations de collecte, de tri et de traitement de certains déchets

L'article 31 de la loi de finances pour 1999 a soumis au taux réduit de TVA, " les prestations de collecte, de tri et de traitement des déchets visés aux articles L. 2224-13 et L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales, portant sur des matériaux ayant fait l'objet d'un contrat entre une commune ou un établissement public de coopération intercommunale et un organisme ou une entreprise agréée au titre de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux " 43( * ) .

Cette mesure s'intégrait dans le cadre des réflexions visant à développer la " fiscalité écologique " et contribuait à accompagner l'effort entrepris notamment par les collectivités locales afin de traiter et d'éliminer de tels déchets 44( * ) . Elle avait un coût estimé à 425 millions de francs. Elle pourrait cependant être confortée et amplifiée ainsi que votre rapporteur en fait état dans ses développements consacrés aux mesures de baisse ciblée de TVA qui sont, en l'état actuel du droit, " eurocompatibles ".

2. Les transports de voyageurs

L'article 279 b quater du code général des impôts soumet les transports de voyageurs au taux réduit de TVA. L'article 259 A-3° bis les soumet à raison de la distance parcourue en France et l'article 262-II-8° exonère les transports aériens ou maritimes de voyageurs en provenance ou à destination de l'étranger ou des territoires et départements d'outre-mer.

Le taux réduit s'applique à tous les transports de voyageurs quel que soit le mode : rail, route, mer, eau, air, taxis ou remontées mécaniques. L'administration fiscale estime ainsi que les locations de moyens de transports avec guide, en l'espèce une location de barque avec guide, ne peuvent être assimilées à des locations de moyens de transports et sont donc soumises au taux normal de TVA 45( * ) . De même elle considère que l'opération de transport doit permettre exclusivement d'effectuer un déplacement d'un point à un autre du territoire et non d'exercer une activité sportive. Elle refuse donc d'appliquer un taux réduit de TVA à l'acheminement de plongeurs sur un site de plongée ou à une activité de transport aérien qui doit permettre, in fine, d'y exercer une activité sportive 46( * ) .

A la différence des transports de voyageurs, les transports de marchandises sont en principe soumis au taux normal.

3. Les repas fournis dans les cantines d'entreprises ou servis dans les hôpitaux et restaurants à vocation sociale

Cette situation répond à une préoccupation sociale avérée. Il importe donc d'oeuvrer pour le maintien de telles dispositions et de ne pas y porter atteinte.

S'agissant de ces repas, il convient de distinguer deux cas. En effet, les restaurants et cantines d'entreprise ainsi que la restauration collective à vocation sociale (cantines scolaires, restaurants universitaires, etc...) sont soumis à deux régimes différents selon leur mode de gestion.

Si la gestion est directe, l'exemption de TVA est totale. Si la gestion est indirecte, c'est-à-dire concédée, la taxation se fait au taux réduit de 5,5 % 47( * ) .

Ainsi, s'agissant des repas fournis dans les cantines d'entreprise, lorsqu'ils sont préparés par un fournisseur extérieur, ces repas sont soumis au taux réduit en vertu de l'article 279 a bis du code général des impôts.

Par ailleurs, en vertu de deux décisions ministérielles des 23 mars 1942 et 19 mars 1943, le système s'applique aux cantines " assimilées " aux cantines d'entreprise à savoir, celles d'établissements scolaires ou universitaires, privés ou publics, cercles militaires, cantines inter-entreprises.

Lorsque les repas sont fabriqués par la cantine elle-même, cette facturation relève en principe du taux applicable aux opérations de vente à consommer sur place, soit le taux normal. Mais les cantines d'entreprise et assimilées sont exonérées de TVA si certaines conditions sont réalisées.

De même s'agissant des repas livrés dans les hôpitaux et restaurants à vocation sociale, le taux réduit s'applique aux fournitures de repas dans les établissements non soumis à la TVA, ou partiellement, suivants : restaurants pour personnes âgées ou nécessiteuses agrées par des municipalités ou des centres d'action sociale, établissements hospitaliers, organismes sociaux ou médico-sociaux dès lors que les conditions fixées pour les cantines d'entreprises sont remplies, sous réserve de quelques dispositions spécifiques.

4. Les prestations des avocats dans le cadre de l'aide juridictionnelle

Les prestations pour lesquelles les avocats sont indemnisés totalement ou partiellement par l'Etat dans le cadre de l'aide juridictionnelle bénéficient du taux réduit et cela en raison de leur caractère de " prestations ayant un caractère social marqué " 48( * ) puisque l'octroi de l'aide juridictionnelle est soumis à des conditions tenant notamment aux ressources du bénéficiaire. La 14 eme catégorie de l'annexe H de la directive de 1977 autorise en effet les Etats membres à soumettre au taux réduit " la prestation de services et la livraison de biens par des organismes reconnus comme ayant un caractère social par les Etats membres ".

A contrario en l'état du droit communautaire applicable il n'est pas possible de soumettre au taux réduit de TVA les frais et honoraires exposés en justice comme le gouvernement l'a rappelé lors de la discussion de la loi de finances pour 1999 49( * ) . Il a par ailleurs précisé qu'" une disposition permet aux avocats et aux avoués qui réalisent un chiffre d'affaires inférieur à 245.000 francs par an et dont la clientèle est constituée essentiellement de particuliers de bénéficier d'une franchise spécifique qui a les mêmes effets qu'une exonération de TVA ". De ce fait il reconnaissait que ce dossier ne présentait pas de caractère prioritaire et il regrettait " de ne pas prendre l'engagement solennel d'écrire demain au commissaire Monti sur ce sujet ".

C. DES EXEMPLES DE BAISSES DE TVA " EUROCOMPATIBLES "

Les possibilités offertes au législateur national par la directive TVA de 1977 de baisser le taux de TVA applicable à certains biens ou services n'ont pas encore toutes été utilisées par le législateur, et cela pour des raisons tenant soit à leur coût budgétaire, soit à des considérations sociales. Ainsi, interrogé sur ce point lors de son audition par votre commission des Finances le 29 juin 1999, M. le secrétaire d'Etat au Budget a déclaré, s'agissant de telles baisses que le gouvernement n'avait pas encore arrêté ses intentions pour le projet de loi de finances pour 2000 mais qu'il n'y avait aucune raison pour que les objections formulées en 1997 et 1998 soient levées.

Il s'agit donc en ce domaine de fournir quelques exemples de baisses " eurocompatibles " sans que ceux-ci ne soient limitatifs ou n'aient un caractère exhaustif.

1. Certains produits alimentaires

La situation en France est plus restrictive que ce que le droit communautaire autorise dans la première catégorie de l'annexe H. Cette dernière permet en effet d'appliquer un taux réduit aux " denrées alimentaires (y compris les boissons à l'exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale ; les animaux vivants, les graines, les plantes et les ingrédients normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ; les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires .

a) La margarine et les graisses végétales

L'article 278 bis du code général des impôts soumet au taux normal de TVA les " margarines et graisses végétales ". Il ressort cependant de certaines informations communiquées à votre rapporteur que dans tous les Etats membres à l'exception de la France et dans une moindre mesure de la Belgique, la margarine, les matières grasses composées, le beurre et les huiles végétales sont soumis au même taux de TVA. Le coût budgétaire d'une mesure qui viserait à assujettir tous ces produits, et notamment les margarines et les graisses végétales, au taux réduit de TVA est estimé par les organisations professionnelles concernées à 457 millions de francs par an.

b) Le chocolat et les produits de confiserie50( * )

L'article 278 bis 2°b du code général des impôts dispose que la TVA est fixée au taux réduit sur " les chocolats et tous produits composés contenant du chocolat ou du cacao. Toutefois le chocolat, le chocolat de ménage, le chocolat de ménage au lait, les fèves de cacao et le beurre de cacao sont admis au taux réduit " .

Cette situation simple en apparence est cependant susceptible d'entraîner des distinctions qui deviennent rapidement " byzantines " et sont le fruit d'une véritable " casuistique fiscale " comme votre commission des Finances l'avait fort justement relevé en son temps.

Ainsi, s'agissant du taux de TVA applicable aux chocolats et aux produits de confiserie, les produits de confiserie (bonbons, dragées, pralines, caramels, nougats, chewing-gum, fruits confits, pâtes d'amande...) relèvent du taux normal, alors que les confitures, purées, gelées et marmelades sont au taux réduit.

Les chocolats et produits composés contenant du chocolat ou du cacao relèvent en principe du taux normal. Le taux réduit s'applique à certaines catégories de chocolats en tablettes ou en bâtons, aux fèves de cacao et au beurre de cacao, ainsi qu'à certains produits composés de chocolat ou de cacao.

La complexité du régime fiscal actuel s'agissant des produits de chocolaterie ressort très largement du tableau ci-joint :

Produits bénéficiant du taux réduit

Produits relevant du taux normal

Chocolat, chocolat de ménage présentés en

tablettes ou en Chocolat de ménage au lait bâtons

Fèves, beurres, pâte de cacao, poudre de cacao. Petits déjeuners chocolatés ; pâtisserie au chocolat ; desserts et entremets chocolatés (ainsi que préparations pour nappage ou glaçage contenant du chocolat ou cacao) ; crèmes dessert au chocolat ; pâtes à tartiner à base de cacao ; crèmes glacées au chocolat (et préparation pour glaces contenant du chocolat ou cacao). Biscuits ou gaufrettes additionnés de chocolat ou d'un succédané lorsque ce composant (auquel est ajoutée la confiserie contenue éventuellement dans le produit) représente en poids moins de 50 % ; barres céréalières sous la même condition.

Laits et autres boissons chocolatés

Tous les chocolats (y compris ceux désignés ci-contre) présentés autrement qu'en tablettes ou en bâtons (par exemple en flocons, palets, granules, pastilles, croquettes).

Quelle que soit leur présentation, les chocolats au lait, chocolats de couverture, chocolats aux noisettes, chocolats blanc, chocolats fourrés.

Tous produits contenant du chocolat ou du cacao autres que ceux énumérés ci-contre.

Source : Mémento pratique F. Lefebvre - 1998.

Tous les produits relevant actuellement du taux normal peuvent bénéficier du taux réduit. Seul le coût budgétaire de cette mesure en a interdit la réalisation effective. Comme le reconnaissait le gouvernement lors de la discussion des deux dernières lois de finances, " une telle mesure est totalement compatible avec le droit communautaire ". Le principal obstacle est son coût budgétaire alors fixé à 3,2 milliards de francs 51( * ) . Il serait cependant plus limité si la baisse ne s'appliquait qu'à une catégorie de produits spécifiques : le gouvernement chiffrait ainsi à 400 millions de francs la perte de recettes qui résulterait de la soumission du seul chocolat au lait, quelqu'en soit la présentation, au taux réduit.

2. Les services funéraires

La 15 ème catégorie de l'annexe H de la directive de 1977 prévoit de soumettre au taux réduit de TVA " les services fournis par les entreprises de pompes funèbres et de crémation ainsi que la livraison de biens qui s'y rapportent ". Aussi, lors de la discussion de la loi de finances pour 1998, le gouvernement a refusé que les prestations de services funéraires concédées ou gérées par une régie municipale soient éligibles audit taux en raison du coût qu'il estimait alors à 800 millions de francs 52( * ) . Un chiffre de 2 milliards de francs avait par ailleurs été évoqué qui semble correspondre à l'hypothèse où l'ensemble des " prestations habituelles fournies par les services de pompes funèbres et les crémations " auraient été visées par ladite baisse de TVA. En tout état de cause, un chiffrage précis et détaillé du coût réel de cette mesure mérite d'être effectué.

Aussi, actuellement, la seule prestation funéraire soumise au taux réduit de TVA à 5,5 % est le transport de corps effectué par les prestataires agréés (exploitants d'ambulance, services de pompes funèbres) dans des véhicules aménagés 53( * ) .

Il n'en reste pas moins que s'exprimant sur l'opportunité de baisser la TVA dans ces secteurs lors de la discussion de la loi de finances pour 1999 le gouvernement a relevé que " la préoccupation qui a été exprimée a sa justification./ Peut-être aurons-nous l'occasion d'en reparler ? " 54( * ) .

3. Le droit d'utilisation des installations sportives

La 13 eme catégorie de l'annexe H de la directive de 1977 permet d'appliquer un taux réduit de TVA au " droit d'utilisation d'installations sportives " 55( * ) ainsi que le gouvernement le soulignait lors de la discussion de la loi de finances pour 1998 56( * ) . Les raisons invoquées pour refuser de prendre une telle mesure totalement " eurocompatible " sont de plusieurs ordres.

Il s'agit tout d'abord de son coût budgétaire qui est évalué par le gouvernement à 500 millions de francs. Or une étude, réalisée à la demande du Syndicat national des exploitants d'installations et de services sportifs (SNEISS) par le Bureau d'information et de prévision économique (BIPE), filiale de la Caisse des dépôts et consignations, chiffre la perte de recettes sur la première année d'application à 380 millions de francs. Elle estime en outre que cette perte serait compensée par les gains attendus tant en terme de nouvelles recettes de TVA que par les retours au profit des régimes sociaux.

Par ailleurs le gouvernement fait remarquer que la plupart des activités sportives exercées en France le sont dans un cadre associatif et sont donc exonérées de TVA lorsque les services à caractère sportif qui sont rendus font l'objet d'une gestion désintéressée 57( * ) . Il en serait de même dans l'hypothèse d'installations sportives propriétés de collectivités locales qui peuvent être louées en effet soit à des associations gérées de façon désintéressée soit à des entreprises à but lucratif.

Dans ce contexte, le gouvernement considère que les entreprises à but lucratif qui seraient les principales bénéficiaires de cette mesure de baisse de la TVA ne sont pas prioritaires car elles ne touchent pas une catégorie ou un secteur social défavorisé: " il s'agit par exemple des golfs, des centres équestres et des centres de remise en forme ". Ce jugement est cependant contesté par le SNEISS qui considère au vu des études réalisées, que la TVA à taux réduit " aurait un large impact sur une consommation de masse essentiellement tournée vers un public jeune aux revenus moyens et modestes ".

Soucieux de faire évoluer le droit applicable en ce domaine mais également de préserver les recettes de l'Etat, le Sénat avait de façon quasi-unanime adopté à l'initiative de votre commission des Finances lors de la discussion de la loi de finances pour 1999, une mesure réservant le bénéfice du taux réduit de 5,5% au droit d'utilisation d'installations sportives " données à bail par une collectivité locale à un professionnel privé dans le cadre d'une délégation de service public " 58( * ) . Le rejet de cette disposition par l'Assemblée nationale semble moins provenir d'un désaccord sur le fond ou sur l'opportunité d'une telle baisse que d'une inquiétude quant aux modalités concrètes d'application de ladite mesure 59( * ) .

En tout état de cause on ne peut que faire état des propos de Mme la Ministre de la jeunesse et des sports qui affirme " souhaiter pour sa part que cette mesure figure dans le projet de loi de finances pour 2000 et de faire prochainement une proposition en ce sens au ministre de l'économie " 60( * ) . On peut néanmoins douter de la réussite de cette intention car ce dernier, le ministre de l'économie, considère que l'application à ce secteur du taux réduit " n'apparaît pas prioritaire " 61( * ) .

4. Les opérations réalisées dans le cadre de la fourniture de logement social

Ainsi que le gouvernement l'avait relevé notamment lors de la discussion de la loi de finances pour 1999 " seuls les logements sociaux, selon le droit communautaire, peuvent bénéficier du taux réduit de la TVA ". Il fut à ce titre conduit à refuser l'extension du taux réduit de TVA à certaines " opérations individualisées de construction, reconstruction, réhabilitation totale ou extension de casernements de gendarmerie réalisées par les collectivités locales " 62( * ) au motif que le droit interne français, en l'espèce l'article R. 331-4 du code de la construction et de l'habitation ne reconnaissait pas la qualité de logement social aux logements occupés à titre d'accessoire d'un contrat de travail ou en raison de l'exercice d'une fonction. On pourrait donc en conclure implicitement qu'une telle mesure est " eurocompatible " mais que son application effective se heurte à la réglementation actuellement en vigueur en France. Ainsi, seul le logement social peut bénéficier d'un aux réduit, mais l'appréciation du champ des logements sociaux relève de la souveraineté des Etats. C'est probablement cette raison qui conduisit le gouvernement à s'engager à étudier cette question tout en ne " promettant pas de trouver immédiatement une solution ". A tout le moins, votre rapporteur estime tout comme d'ailleurs le rapporteur général de l'Assemblée nationale 63( * ) , que " cette question méritait d'être soulevée ". Puisse donc le gouvernement y apporter les compléments d'information qu'il avait promis en son temps.

5. Les déchets ménagers

Dans son rapport précité 64( * ) sur " la fiscalité au service de l'environnement ", Mme Bricq relevait fort justement que : " La collecte et le traitement des déchets ménagers constituent le seul service public local à être encore soumis au taux normal de la TVA ( 20,6% ). Ce régime est pour le moins paradoxal au regard de l'objectif que la loi du 13 juillet 1992 a fixé aux communes et à leurs groupements, à savoir, comme on l'a vu, la suppression des décharges de déchets ménagers au 1 er juillet 2002 ( hors déchets ultimes) ".

Aussi ce secteur a longtemps et, souvent fort longuement, été évoqué lors de la discussion des lois de finances. Ainsi en 1997 saisi d'amendements visant à assujettir au taux réduit les prestations de collecte de transport et de traitement des déchets ménagers effectués dans le cadre du service public local, le gouvernement avait reconnu que : " L'application du taux réduit de TVA est possible. Je ne peux donc pas invoquer l'argument de " l'euro-incompatibilité " à l'encontre d'une mesure " euro-licite " !" 65( * ) .

Il chiffrait par ailleurs le coût d'un tel dispositif à 600 millions de francs eu égard au dispositif proposé et indiquait de ce fait : " Compte tenu des contraintes budgétaires qui s'imposent au gouvernement, il y a là une véritable difficulté. C'est si je puis dire le volet immédiatement négatif de la réponse du gouvernement ".

Lors de la discussion de l'article 31 de la loi de finances pour 1999 rendant éligibles au taux réduit de TVA les prestations de collecte, de traitement et de tri de certains déchets ménagers il avait rappelé que le droit communautaire permettait de soumettre à un tel taux réduit " les services fournis dans le cadre de l'enlèvement des ordures ménagères et du traitement des déchets ". Il fut à cette occasion à nouveau rappelé que la collecte et le traitement des déchets demeuraient le seul service public local à être alors encore soumis au taux normal de TVA.

Par ailleurs le coût de l'application du taux réduit de TVA à l'ensemble des opérations de collecte et de traitement des ordures ménagères réalisées par ou pour le compte des communes et de leurs groupements était évalué à 1,3 milliard de francs. S'agissant du coût fiscal de cette mesure on doit cependant en mesurer les effets avec précaution ainsi que le relèvent tant les travaux précités de Mme Bricq que le rapport présenté au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Ce dernier souligne en effet à propos de cette dernière baisse de la TVA qu' " il est difficile de connaître l'impact fiscal réel de cette mesure qui a été chiffré par le gouvernement successivement à 600, puis 900, puis 1.300 millions de francs " 66( * ) ! Cette imprécision est encore renforcée par une information en provenance du gouvernement selon laquelle l'application du taux réduit de TVA tel que prévu par l'annexe H de la directive de 1977 aurait " un coût budgétaire supérieur à un milliard de francs par an " 67( * ) . En comparaison, la baisse de TVA votée avec l'article 31 était estimée, selon le gouvernement, à 425 millions de francs.

En l'espèce ainsi que votre commission l'avait alors relevé, la perspective d'une telle charge pour les finances publiques, au demeurant très diversement évaluée, semblait constituer l'objection majeure présentée par le gouvernement à l'adoption de cette disposition que préconisait par ailleurs le rapport précité de Mme Bricq. En effet le gouvernement indiquait à cette occasion qu'il avait " la volonté, bien sûr dans les limites que lui imposent tant les moyens financiers disponibles que la réglementation européenne, d'abaisser le taux de la TVA, qui est un impôt sur la consommation. En même temps il souhaite renforcer les dispositions fiscales tendant à améliorer l'environnement " 68( * ) .

Votre rapporteur estime donc qu'une meilleure prise en compte des contraintes environnementales à laquelle le gouvernement semble attaché devra nécessairement le conduire à étendre significativement le champ des prestations de collecte, de tri et de traitement des déchets éligibles au taux réduit de TVA.

6. Certains appareillages pour handicapés

Ainsi que cela a été relevé le champ des appareillages pour handicapés et des équipements spéciaux qui sont soumis au taux réduit a été progressivement étendu depuis 1988.

Dans la mesure où l'annexe H de la directive de 1977 permet de soumettre au taux réduit " les équipements médicaux, le matériel auxiliaire et les autres appareils normalement destinés à soulager ou à traiter des handicapés, à l'usage personnel et exclusif des handicapés, y compris la réparation de ces biens " d'autres équipements peuvent encore être éligibles au taux réduit. Il s'agit notamment de l'optique médicale pour un coût estimé par le gouvernement à 1,5 milliard de francs, des articles pour pansement, des matériels mis à disposition des assurés pour traitement à domicile, des appareils de contention.

Aussi lors de la discussion de la loi de finances pour 1999, votre commission des Finances avait souhaité que le gouvernement l'éclaire sur ses intentions pour l'avenir et notamment selon quel ordre de priorité il entendait étendre, plus tard, le mouvement de baisse de la TVA aux autres équipements figurant dans le TIPS 69( * ) . En l'absence de réponse précise sur ce point émanant du gouvernement, cette interrogation demeure toujours d'actualité.

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