TITRE V

DISPOSITIONS FINALES

Art. 37 bis
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique
Art. additionnel après l'art. 38

Article 38

M. le président. « Art. 38. - I. - Les dispositions des articles 1er à 3, 6 à 10, 14 et 17 à 37 sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

« Les dispositions de l'article 3 ainsi que des articles 6 à 9, 14 et 17 à 37 sont applicables dans les Terres australes et antarctiques françaises.

« Outre les dispositions du I de l'article 12, des articles 23 à 27 et 30 à 37, qui s'appliquent de plein droit dans cette collectivité, les articles 1er à 3, 6 à 10, 14, 17 à 22, 28 et 29 sont applicables à Mayotte.

« II. - Les références au tribunal de grande instance qui figurent dans les articles rendus applicables par les alinéas précédents sont remplacées par des références au tribunal de première instance. De même, les références à des codes ou à des lois qui ne sont pas applicables localement sont remplacées par des références aux dispositions correspondantes applicables localement. »

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 46 rectifié est présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques.

L'amendement n° 147 rectifié est présenté par MM. Barraux, Lorrain et Le Grand et Mme Luypaert.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Au deuxième alinéa du I de cet article, remplacer les mots : "de l'article 3 ainsi que des articles", par les mots : "des articles 3,". »

La parole est à M. Pierre Hérisson, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 46 rectifié.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. L'amendement n° 147 rectifié n'est pas soutenu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 46 rectifié ?

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 38, modifié.

(L'article 38 est adopté.)

Art. 38
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article additionnel après l'article 38

M. le président. L'amendement n° 215, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Après l'article 38, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

« Après la première phrase du premier alinéa du 1 de l'article 29-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, il est inséré deux phrases ainsi rédigées : "Ainsi, il fixe notamment les indemnités annexes aux traitements de base des personnels fonctionnaires à l'exclusion de celles énumérées par le décret n° 92-1183 du 30 octobre 1992 relatif au régime indemnitaire des agents de France Télécom. Le montant des indemnités annexes peut être modulé pour tenir compte de l'impact des évolutions de carrière et de la valeur des traitements de la fonction publique sur le niveau des autres éléments constitutifs de la rémunération des personnels fonctionnaires." »

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet de mettre fin à une difficulté juridique rencontrée par France Télécom dans la gestion de ses cadres fonctionnaires.

France Télécom a en effet développé pour les cadres fonctionnaires un système de « rémunération globale » qui a été choisi par 93 % des salariés concernés. Ce système permet de prendre en compte dans l'évolution du salaire les garanties accordées aux fonctionnaires, mais également les objectifs et les performances de chaque cadre.

Le mécanisme consiste à fixer chaque année la rémunération globale du cadre fonctionnaire de la même manière que pour un cadre sous convention collective, puis à calculer ses indemnités annexes en déduisant de cette rémunération globale le traitement indiciaire de base qu'il reçoit en fonction de son indice et de la valeur du point de la fonction publique.

Cependant, deux arrêts du Conseil d'Etat du 16 juin 2000 et du 3 mai 2002 ont estimé que cette politique de rémunération globale se heurtait à un obstacle juridique : la détermination des indemnités annexes au traitement de base par le président de France Télécom ne peut pas légalement tenir compte de l'évolution de la valeur du point de la fonction publique ou des augmentations de traitements indiciaires résultant d'avancements automatiques d'échelon.

Le présent amendement vise donc à résoudre cette difficulté juridique en autorisant le président de France Télécom à fixer les indemnités annexes des personnels cadres fonctionnaires en tenant compte des autres éléments constitutifs de leurs salaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit de permettre la poursuite de la politique conduite par France Télécom à l'adresse de ses cadres et sur la base du volontariat.

La commission ne peut donc qu'être favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 215.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 38.

Vote sur l'ensemble

Art. additionnel après l'art. 38
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au terme de ce débat très dense, je souhaite formuler deux remarques de fond.

Premièrement, en choisissant de morceler le débat sur le numérique pour des raisons pragmatiques, on ôte toute logique au projet gouvernemental. De surcroît, on aboutit à des incohérences. En effet, tout au long du débat, on a pu voir que la limite entre les textes était bien aléatoire et que le Gouvernement a d'ailleurs été le premier à ne pas respecter cette « frontière », comme l'ont démontré, par exemple, l'insertion de dispositions sur les collectivités locales opératrices de télécoms, qui trouveraient normalement leur place dans le « Paquet télécom », ou l'anticipation sur la directive « droits d'auteurs » ou celle sur la vie privée et la téléphonie.

Deuxièmement, nous regrettons particulièrement que les propositions tendant à démocratiser Internet et à lui donner une dimension autre que commerciale n'aient pas été prises en compte. Au-delà même de nos propres propositions, le rejet de la suggestion de notre collègue M. Trégoüet tendant à instituer un comité national d'éthique de l'Internet et certaines autres de ses propositions auraient mérité, selon nous, d'être examinées pendant la navette plutôt que d'être balayées d'un revers de main.

Notre déception est d'autant plus grande que nous avions cru percevoir, notamment dans certains amendements des commissions, le souhait de faire évoluer dans un sens plus citoyen le formidable outil que constitue Internet. Je crains fort que, au terme de ces deux jours de débat, il continue de manquer à ce projet de loi ce « supplément d'âme » dont parlait mon collègue et ami Jack Ralite.

Le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique reste, dès lors, ce qu'il était à l'origine, à savoir un outil d'encadrement et de contrôle par l'Etat et par les multinationales, dans le cadre d'une politique de marchandisation des biens et des idées, loin du formidable outil de communication, d'expression et de création accessible à tous qu'il devrait promouvoir.

C'est pourquoi les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendront sur ce texte en espérant que la suite des travaux parlementaires permettra de le rendre plus conforme aux attentes des millions d'internautes.

M. le président. La parole est à M. Hilaire Flandre.

M. Hilaire Flandre. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique était particulièrement attendu.

En effet, pour permettre à l'économie numérique de tenir toutes ses promesses, il est apparu indispensable d'adapter le cadre législatif dans une double perspective : d'une part, favoriser le développement de la diffusion des nouvelles technologies de l'information et de la communication, génératrices de richesses et de croissance ; d'autre part, garantir un espace de droit aux usagers et aux acteurs de cette nouvelle économie.

Partant du principe que le commerce électronique ne pourra se développer massivement que si les consommateurs éprouvent une entière confiance dans les procédures de transaction, le projet de loi du Gouvernement vise à instaurer en la matière des bases juridiques clarifiées afin de rassurer les utilisateurs.

La législation actuelle ne permet pas de répondre aux problèmes nouveaux qu'elle a contribué à faire surgir, et l'absence de règles précises encadrant les transactions commerciales affecte la confiance des consommateurs.

Aussi le projet de loi traduit-il la volonté du Gouvernement de créer les conditions de la confiance par le biais de l'instauration de règles du jeu claires pour les prestataires de services de l'internet et par la mise en oeuvre de moyens destinés à lutter contre ce que l'on appelle la cybercriminalité.

Il était donc urgent de légiférer pour répondre à la problématique générale de l'économie numérique. Il fallait aussi déterminer la responsabilité civile et pénale des hébergeurs et des différents prestataires, ainsi que les conditions de leur mise en cause.

Madame la ministre, les dispositions que vous nous proposez d'adopter et qui concernent principalement la sécurisation des échanges liés au commerce électronique, la liberté de la communication en ligne et la lutte contre la cybercriminalité ne peuvent que recueillir l'assentiment du groupe UMP.

Nous tenons enfin à rendre hommage à l'important travail réalisé par le Gouvernement ainsi qu'à celui qui a été effectué par nos rapporteurs pour que ce texte soit conforme aux exigences de l'intérêt général.

L'ensemble du groupe UMP votera donc le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique qui nous a été présenté par Mme la ministre déléguée à l'industrie. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.

M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de l'examen du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique. Je souhaite, au nom du groupe socialiste, formuler quelques observations sur la manière dont le débat s'est déroulé.

Ce texte était attendu. Nous avons dit qu'il souffrait de quelques défauts originels ; je les rappellerai brièvement. Tout d'abord, en renvoyant à des textes ultérieurs, ce projet de loi introduit des risques d'incohérence, que nous avons soulignés pendant la discussion. Ensuite, centré sur la seule économie numérique, il fait l'impasse sur les aspects non marchands de l'Internet, sur lesquels le Sénat et le Gouvernement n'ont pas voulu revoir leur position. Enfin, il ne prend pas en compte l'évolution du cadre réglementaire européen.

De nombreuses incertitudes demeurent sur la définition de la communication publique en ligne - il s'agit de l'article 1er - et, surtout, sur la façon dont sa régulation s'effectuera.

Certes, nous avons un peu progressé au sujet des services audiovisuels en ligne, pour lesquels la compétence du CSA a été entérinée et clarifiée. Mais nous regrettons, à ce propos, que le Sénat n'ait pas suivi notre groupe dans sa volonté d'appréhender également les contenus interactifs des services audiovisuels et de les soumettre ainsi aux obligations réglementaires qui s'appliquent déjà à certains distributeurs ou diffuseurs.

La définition du courrier électronique est maintenant satisfaisante et elle sera intégrée au code des postes et télécommunications. Elle résulte d'un amendement que notre groupe avait déposé à l'Assemblée nationale, reprenant la définition de la directive du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques.

En ce qui concerne le rôle des collectivités locales dans le domaine des télécommunications - ce sont les fameux articles 1er A et 1er B -, le débat a été long, parfois passionné - nous avons assisté à des échanges tout à fait intéressants - à l'image de la complexité du sujet. Sur cette question, notre position est la suivante : oui à plus de compétences pour les collectivités locales, car il s'agit d'un enjeu d'aménagement du territoire dont elles ne peuvent se dessaisir ou être dessaisies, non à des compétences qui feraient d'elles des opérateurs à part entière et qui accentueraient ce que l'on appelle désormais la fracture numérique ou les entraîneraient dans des dépensees démesurées.

Sur cette question, notre position, je le rappelle, est la suivante : oui à plus de compétences pour les collectivités locales, car il s'agit d'un enjeu d'aménagement du territoire dont elles ne peuvent se dessaisir ou être dessaisies ; non à des compétences qui feraient d'elles des opérateurs à part entière et qui accentueraient ce que l'on appelle désormais la « fracture numérique » ou les entraîneraient dans des dépenses démesurées.

Oui à plus de liberté, mais dans la solidarité.

Nous considérons, en effet, qu'une liberté sans moyens est vaine, comme nous pensons que l'Etat, garant de la solidarité et responsable des choix stratégiques de la politique d'aménagement du territoire, ne peut se décharger sur les collectivités de ses responsabilités financières.

Nous avons proposé plusieurs amendements allant dans le sens d'une plus grande solidarité : l'un visait à créer un fonds de soutien à l'aménagement numérique du territoire, l'autre prévoyait que le financement de la couverture en téléphonie mobile devait en premier lieu être assuré par l'Etat et les opérateurs, les collectivités locales n'intervenant que de manière subsidiaire. Ces amendements ont été rejetés ; le Gouvernement n'a pas hésité à brandir l'article 40, relatif à l'irrecevabilité financière, comme il l'a fait également pour l'amendement de nos rapporteurs, que nous soutenions, rendant éligibles au fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, les dépenses engagées par les collectivités pour améliorer la couverture en téléphonie mobile.

Nous regrettons que le Gouvernement ait refusé de mobiliser un centime de plus en faveur de l'aménagement numérique du territoire. Nous sommes donc devant le constat suivant : pour le Gouvernement, la règle du jeu, c'est à chacun selon ses moyens !

Nous avons aussi voulu faciliter et sécuriser l'intervention des collectivités locales. Nous avons proposé la création d'un cadastre des réseaux de télécommunications, seul moyen, à nos yeux, pour les collectivités de planifier de manière cohérente et à moindre coût l'aménagement numérique de leur territoire. Mme la ministre nous a indiqué que le Gouvernement envisageait de le faire, ce dont nous sommes heureux, tout en restant vigilants.

Nous sommes par ailleurs satisfaits que le Sénat ait adopté notre amendement prévoyant qu'un décret déterminera les conditions dans lesquelles les collectivités locales peuvent subventionner un opérateur de télécommunications. La question des aides aux entreprises est un sujet complexe. Les collectivités doivent donc disposer d'un cadre juridique clair.

Nous avons voulu aborder la question de l'enfouissement des lignes téléphoniques, sujet cher à toutes nos communes rurales, mais nous n'avons malheureusement pas été entendus. Nous attendons la deuxième lecture.

De nombreux points méritent encore d'être approfondis au-delà de la question financière, à laquelle nous attachons cependant une grande importance : je pense aux notions de « carence » ou « d'insuffisance », d'« exploitant de télécommunications » ; je pense aux modalités de couverture en téléphonie mobile, la mutualisation des sites ne devant pas devenir la règle.

Sur la publicité et, surtout la prospection directe en ligne, des garanties ont été apportées pour qu'elles soient moins agressives qu'actuellement et respectent les droits élémentaires des consommateurs. Sur ce point, les amendements adoptés au Sénat ont dans l'ensemble, plutôt amélioré la lisibilité et l'efficacité du dispositif.

Sur la responsabilité des hébergeurs, notre assemblée a eu un long échange, très instructif, mais nous ne sommes pas totalement convaincus par les précisions adoptées. Le fournisseur d'hébergement aura toujours une faculté d'appréciation du caractère licite du contenu stocké, ce qui, à nos yeux, n'est pas admissible. Nous aurions vraiment souhaité restreindre considérablement cette marge d'appréciation.

Sur la définition du commerce électronique, nous sommes en accord avec les propositions adoptées. En revanche, on ne peut que regretter que les dispositions favorables à la protection des consommateurs, fort judicieusement introduites par l'Assemblée nationale, n'aient pas été retenues, alors qu'elles s'inscrivent totalement dans la logique des objectifs du projet de loi.

Au total, ce texte comprend des dispositions nécessaires, dont beaucoup étaient attendues. Sur ce texte, certes amélioré mais qui reste encore incomplet, le groupe socialiste s'abstiendra.

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Madame la ministre, mes chers collègues, j'avais l'intention d'intervenir sur les articles 1er A et 1er B, mais des circonstances totalement étrangères à ma volonté m'en ont empêché. J'interviens donc en explication de vote sur l'ensemble.

Je le dis d'emblée, ma position sur le texte est exactement conforme à celle de mon collègue et ami M. Hilaire Flandre - personne n'en aurait douté, d'ailleurs.

J'exprime d'abord ma satisfaction, parce qu'ici, au Sénat, comme à l'Assemblée nationale avant nous, on voit se concrétiser un engagement du Gouvernement pris lors du CIADT du 13 décembre 2002, qui relayait déjà en quelque sorte l'engagement pris par le Président de la République lui-même. Les promesses sont donc tenues. Nous nous donnons des objectifs - éviter la fracture numérique, éviter le déséquilibre du territoire - et nous nous donnons les moyens législatifs de les atteindre. C'est donc une grande satisfaction.

Permettez-moi de revenir quelques instants sur les articles 1er A et 1er B. J'étais de ceux qui éprouvaient quelques craintes. On voit bien qu'en permettant aux collectivités d'investir et d'être opérateurs, on pourrait, si l'on ne prenait pas de précautions, faire courir aux collectivités, mais au marché aussi, quelques risques ; M. Gérard Larcher, que j'ai écouté hier avec beaucoup d'intérêt, les a très clairement décrits. Je les reprends brièvement.

Le premier risque serait à l'évidence financier : c'est celui que l'on ferait courir aux collectivités si des précautions n'étaient pas prises.

Le deuxième risque serait le déséquilibre du marché. En effet, il ne faut pas mettre en péril des opérateurs dont la situation, on le sait, est, dans un certain nombre de cas, fragile.

Le troisième risque viendrait de ce que les mesures pourraient se retourner en quelque sorte contre l'objectif de leurs promoteurs. Il ne faudrait pas que les investisseurs privés se détournent de certains territoires de crainte d'avoir en face d'eux des opérateurs publics dont l'intervention serait en quelque sorte dissuasive.

C'est parce que j'avais en tête ces risques et les précautions à prendre que j'envisageais d'intervenir sur les articles 1er A et 1er B. Pour vous dire la vérité, madame la ministre, j'ai cherché un certain temps le moyen d'aller un peu plus loin que la commission. Je ne vous cache pas que je me suis demandé s'il ne convenait pas de limiter les interventions des collectivités territoriales aux zones défavorisées, où l'on est certain que les investisseurs privés n'iront pas. J'ai donc cherché une formule. Une m'est venue d'emblée à l'esprit : il se serait agi d'une sorte de zonage. Mais le dispositif était horriblement compliqué, et les effets pervers potentiels considérables. J'y ai donc renoncé. J'approuve la position sage prise par nos commissions, en particulier par la commission des affaires économiques et par la commission des lois, qui consiste à soumettre l'intervention des collectivités au constat de carence de l'initiative privée.

Il reste à voir comment les choses se passeront. Il nous faudra rester vigilants, et telle est bien notre intention.

Ce soir, en adoptant ce texte, le Sénat fera accomplir à nos collectivités un pas considérable sur la voie de la modernité. Je pense particulièrement aux collectivités les plus faibles, à celles qui ont besoin d'être soutenues,...

M. Pierre-Yvon Trémel. Des sous !

M. Adrien Gouteyron. ... qui ont besoin qu'on leur épargne certaines initiatives aventureuses.

Je suis heureux de pouvoir confirmer ce soir, madame la ministre, mon soutien à votre texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin.

M. Christian Gaudin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, s'il revient aux collectivités locales de donner l'impulsion en matière d'aménagement du territoire - on l'a vu en examinant ce texte - une nouvelle fonction se confirme pour elles, qui pourront désormais être opérateurs en communications. Il s'agit d'une charge particulière qui demande bien sûr à être encadrée. Sur ce point, le travail n'est pas abouti. Les collectivités pourront donc intervenir dans le financement du système actif, mais le risque d'exploitation doit être assumé par les fournisseurs d'accès et de services.

L'examen des nombreux amendements a montré que nous étions entrés dans cette nouvelle culture du Net et combien il est important d'y définir des règles ; celles-ci sont encore loin d'être complètement élaborées. La deuxième lecture apportera sans doute quelques améliorations, mais il nous faut admettre d'ores et déjà que la loi, à l'image des nouvelles technologies qu'elle régit, s'engage dans un processus évolutif. Le groupe de l'Union centriste se réjouit de cette avancée et votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, rapporteur.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de plus de douze heures de débat. Ce texte, certes, n'a pas la prétention de régler tous les problèmes, mais il n'en est pas moins important. Nous attendons pour l'automne le débat sur le « paquet télécom » et, d'une manière plus large, la transposition des directives européennes nécessaire s'agissant de nouvelles technologies qui concernent des supports nouveaux, des infrastructures nouvelles et qui sont très porteuses pour toute notre économie.

Je voudrais en quelques mots remercier MM. Bruno Sido, Alex Türk et Louis de Broissia ainsi que le président Gérard Larcher du travail d'équipe que nous avons pu mener ensemble ici, de cette complémentarité, de cette solidarité entre nous qui nous ont permis d'atteindre l'objectif premier, à savoir l'amélioration du texte. Il s'agit du même coup d'améliorer, au-delà de la situation juridique, le confort de nos concitoyens au quotidien.

Il a été fait allusion tout à l'heure à nos débats passionnés et animés. La première lecture est, en effet, le moment où chacun peut s'exprimer sur des questions extrêmement complexes. Les commissions - je m'adresse ici au président Gérard Larcher - auront l'occasion de rapprocher leurs points de vue pour permettre une harmonisation en deuxième lecture sur des points essentiels qui ont mobilisé tout à la fois l'Association des maires de France, l'Association des départements de France et l'Association des régions de France. Il s'agit d'ajuster au mieux à la fois les possibilités offertes aux collectivités territoriales, mais aussi, comme dans le passé, de rappeler ici, au Sénat, les limites du raisonnable pour éviter les aventures économiques et prévenir tout déséquilibre du marché, comme vient de le dire notre excellent collègue M. Adrien Gouteyron.

Mais je me tourne vers mes collègues MM. Jean-François Le Grand, René Trégouët et Paul Blanc. Même si nos débats ont été un peu animés, ils n'engagent pas l'avenir, puisque nous aurons tout loisir de discuter de nouveau avec eux des propositions concernant, entre autres, l'article 1er.

Je voudrais dire à M. Trémel et à Mme Terrade que, bien sûr, ce texte peut paraître incomplet par rapport à ceux que nous allons examiner, notamment le « paquet télécom », qui, dans sa globalisation, n'est pas toujours facile à comprendre pour l'ensemble de nos concitoyens.

La nuance, et je m'adresse ici à l'ensemble de nos collègues sénateurs de l'opposition, c'est que, dans ce secteur d'activité, chaque jour apporte des nouveautés, de nouvelles expériences, de nouvelles possibilités, et que nous serons peut-être amenés assez fréquemment à reprendre les textes pour les modifier, ne serait-ce que pour les adapter aux progrès de la technologie, qui avance à pas de géant en ces matières. En toute amitié, permettez-moi de rappeler, chers collègues, que nous avons dû, pendant cinq ans d'opposition, maîtriser souvent nos impatiences, nous qui aurions souhaité que les choses aillent plus vite. Mais c'est le lot de la démocratie, et nous avons choisi une autre méthode, qui consiste à venir souvent, plus souvent, devant le Parlement que cela n'a été possible au cours des cinq dernières années, pendant lesquelles nous étions dans l'opposition.

Nous avons donc rendez-vous à l'automne pour un nouveau débat. Dès à présent, cependant, je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui ont travaillé à ce texte, car nous avons fait oeuvre utile. Je suis persuadé que, demain, on nous rendra justice et que l'on saura reconnaître, entre autres, notre volonté d'essayer de toujours garder raison sur un chemin semé de tentations d'expériences qui pourraient se révéler autant d'aventures économiques très coûteuses. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur.

M. Bruno Sido, rapporteur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme d'un débat qui a été riche, qui a été passionné et qui a permis de nombreuses avancées.

Ce texte était attendu. Curieusement, d'ailleurs, les débats se sont cristallisés sur les articles 1er A et 1er B, qui, avec l'article 1er, auront pris autant de notre temps que le reste du projet de loi. Ce texte sera suivi prochainement par le « paquet télécom ». On l'a attendu longtemps, mais un dispositif prochain « mettra en musique », finalement, les directives européennes.

Notre débat a permis de mettre en lumière, de mettre en exergue un certain nombre de différences : c'est la vocation, et le mérite, d'une première lecture. Notre organisation institutionnelle nous permet, en première lecture, de déblayer un peu le terrain, ce qui laisse à la deuxième lecture le soin d'affiner les dispositifs.

Nos appréciations varient donc en particulier sur la terminologie. Il est vrai que le domaine est complexe et extrêmement évolutif. Mais on ne saurait se mettre d'accord qu'à condition de s'entendre aussi sur le sens des mots. C'est sur ce point qu'il faudra travailler entre les deux navettes.

Comme M. Gouteyron, je m'arrête un instant sur les articles 1er A et 1er B. La situation n'est pas bloquée, et il faut le répéter, en particulier à M. Paul Blanc ainsi qu'à MM. Le Grand et Trégouët. Il faut retravailler ensemble et clarifier les points de trie pour finir par les rapprocher, j'en suis certain.

S'agissant de l'article 1er B, je tiens à vous remercier du fond du coeur, madame la ministre, car vous avez tenu l'engagement que vous aviez pris. Je rappelle, en effet, que ce texte est revenu au Sénat, après avoir été voté sous forme d'une proposition de loi. Encore merci pour tous ceux, et ils sont nombreux, qui attendent la couverture en téléphonie mobile.

Maintenant, le dispositif est « calé » et la navette ne posera pas de problème de ce point de vue-là.

Enfin, permettez-moi de remercier nos collaborateurs pour la qualité de leur travail.

Je vous donne donc rendez-vous en deuxième lecture. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les quatres rapporteurs et les trois commissions ont bien travaillé, dans la recherche de positions communes et de l'harmonie. Je remercie MM. Alex Turk, Louis de Broissia et, naturellement, Pierre Hérisson et Bruno Sido pour le travail qu'ils ont accompli au sein de chaque commission tout au long de nos débats, qui ont été fructueux.

Comme nous avons eu l'occasion de le souligner lors d'un précédent débat, les services publics, à la fin du xixe siècle et pendant le xxe siècle, furent marqués par la proximité et s'incarnèrent dans la pierre. Il fallait que l'on ait à côté de chez soi le bureau de poste ou l'hôtel des impôts.

Le siècle qui commence verra sans doute la pierre céder devant le signal numérique, lequel ne pourra qu'évoluer. Lorsque nous réfléchirons, demain, à l'accessibilité des services publics, il nous faudra faire preuve d'imagination et avoir à l'esprit l'ensemble de ces techniques. Là est l'enjeu, celui de l'équilibre et de l'aménagement du territoire et de l'égalité entre les citoyens. Le débat sur l'économie numérique rejoint les préoccupations du service public, qui sont majeures, et que nous devons, ici, avoir à coeur.

Ce droit, que nous faisons naître, doit se conjuguer avec la liberté, parce que l'économie numérique naît dans la liberté, et avec le respect de nos valeurs collectives. C'est tout le sens du débat qui s'est instauré entre Alex Türk et René Trégouët, notamment.

L'équilibre entre liberté et valeurs collectives, nous le trouverons dans la jurisprudence. Nous comprenons les arguments des tenants de ces deux positions, mais viendra le moment ou seul le juge pourra recentrer le débat, et sans doute nous faudra-t-il alors légiférer de nouveau.

Je me souviens qu'en 1996, alors que le Sénat débattait de la loi de réglementation des télécommunications, j'ai tenté d'introduire une forme de régulation des contenus, qui fut censurée par le Conseil constitutionnel faute d'avoir su trouver ces beaux équilibres-là.

Deuxième sujet majeur : quel rôle sera dévolu aux collectivités locales ? Elles seront certes des acteurs qui contribueront à réduire la fracture numérique. Il faudra donc trouver un équilibre entre liberté et solidarité, et ce fut l'objet du débat que nous avons eu avec Pierre-Yvon Trémel, Paul Blanc et Jean-François Le Grand.

Ce débat utile, nous allons le poursuivre. Mais comme l'a souligné M. Gouteyron voilà un instant, soyons prudents face à des techniques qui sont en constante évolution.

Pour une collectivité locale, devenir opérateur - et il faudra nous mettre d'accord sur la définition de ce mot -, c'est aussi devenir opérateur de services. Nous devrons, une fois encore, trouver le bon équilibre. C'est l'intérêt de la navette sur un sujet aussi difficile.

Comment ne pas évoquer la répartition des rôles entre l'ART et le CSA ?

Comment, bien sûr, ne pas rendre hommage à Bruno Sido ? Il a été au bout d'une volonté que nous partagions.

Madame la ministre, vous l'avez écouté : l'hommage qu'il vous a rendu n'est que mérité. Je souhaite, madame la ministre, vous remercier à mon tour. Vous avez souvent évoqué la sagesse du Sénat, en l'invoquant en quelque sorte : c'est dire le rapport de confiance qui s'est établi entre nous, même si, sur quelques points - mais c'est la logique du débat - , nos points de vue étaient divergents. Vous présentiez un sujet interministériel et, si quelques réalités ont pu nous opposer temporairement, je crois que nous les avons éclairées.

Je veux, à mon tour, féliciter l'ensemble des collaborateurs du Sénat.

Monsieur le président, je vous remercie également d'avoir guidé nos débats avec talent, avec courtoisie, et, en même temps, avec une attention très soutenue.

Nous avons avancé aujourd'hui, mais nous aurons à revenir sur un droit qui est dans l'adolescence et auquel il nous faudra sans doute apporter encore notre pierre. L'éclairage de la commission supérieure du service public des postes et des télécommunications nous sera également précieux en ce qui concerne les éléments de service public et les aspects juridiques de l'économie numérique.

Madame la ministre, nous tenons vraiment à la couverture en téléphonie mobile du territoire, car, en ce domaine, l'inégalité est grande. Je le dis d'autant plus sincèrement que, représentant un territoire totalement couvert, je mesure ce que l'absence de couverture peut représenter dans d'autres territoires. La vraie fracture numérique est aussi une fracture territoriale profonde, et il est de notre devoir, quand nous parlons d'aménagement et d'équilibre du territoire, de trouver les moyens de réduire ces réels déséquilibres. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

M. Michel Teston. Le groupe socialiste s'abstient.

Mme Odette Terrade. Le groupe CRC également.

(Le projet de loi est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Sans vouloir prolonger les débats, je souhaite néanmoins vous faire part du très grand plaisir et du très grand intérêt que j'ai eu à passer ces deux après-midi et ces deux nuits avec vous. Je crois vraiment que nous avons fait ensemble un excellent travail.

Je remercie M. le président de la commission des affaires économiques, les quatre rapporteurs, ainsi que MM. les sénateurs et Mmes les sénatrices.

En effet, chaque intervention, que ce soit au cours de la discussion générale ou à l'occasion de l'examen des articles, a fait très sensiblement progresser le débat, même si certains amendements n'ont pu être retenus.

Messieurs les rapporteurs, sans doute vous souvenez-vous que, lorsque j'ai été auditionnée par vos commissions, j'avais dit que je serais très ouverte aux amendements que me présenterait votre assemblée. J'ai tenu parole dans une large mesure - peut-être pas suffisamment à votre goût ! - , et je crois très sincèrement que les amendements que j'ai acceptés au nom du Gouvernement et qui ont été adoptés ont considérablement enrichi ce texte, sans parler du débat, qui a été d'une grande tenue et qui a véritablement honoré la Haute Assemblée.

Je vous donne rendez-vous pour l'examen du prochain « paquet télécoms » ; nous aurons donc l'occasion de nous retrouver à l'automne.

Je ne regrette pas l'approche pragmatique et progressive que nous avons retenue. Bien sûr, on ne pouvait pas régler tous les problèmes d'un seul coup. Nous avons tout de même pu rattraper l'année et demie de retard que nous avions dans la transposition des textes européens. Vous ne serez évidemment pas étonnés que j'en sois particulièrement heureuse.

Au-delà de nos divergences, au-delà de la très grande technicité des débats, je me félicite également que chacun et chacune d'entre vous ait eu, à chaque instant, conscience de l'importance des enjeux, de la nécessité de rechercher les bons équilibres, comme l'a dit très justement le président Gérard Larcher.

Nous savions qu'il nous fallait être à la hauteur de cet immense défi qui nous était lancé, à savoir faire progresser notre pays dans cette fabuleuse économie numérique en ayant à coeur à la fois de réduire la fracture numérique et d'accroître la confiance des citoyens dans les progrès de la technologie.

Merci encore une fois à toutes et à tous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique