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RÉFORME DES RETRAITES
Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites.
Dans la discussion des articles, le Sénat en est parvenu à l'article 6, qui a fait l'objet d'une demande de priorité.
- Art. additionnels après l'art. 4 (priorité) (interruption de la discussion)
- Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
- Art. additionnel après l'art. 6 (priorité)
Article 6 (priorité)
M. le président. « Art. 6. - I. - L'article L. 114-1-1 du code de la sécurité sociale devient l'article L. 114-3.
« II. - Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du même code est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Conseil d'orientation des retraites »
« Art. L. 114-2. - Le Conseil d'orientation des retraites a pour missions :
« 1° De décrire les évolutions et les perpectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques et d'élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ;
« 2° D'apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ;
« 3° De mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite et de suivre son évolution ;
« 3° bis (nouveau) D'étudier les possibilités d'évolution de l'assiette des cotisations ;
« 4° De participer à l'information sur le système de retraite et les effets des réformes conduites pour garantir son financement ;
« 5° De suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités, ainsi que de l'ensemble des indicateurs des régimes de retraite, dont les taux de remplacement.
« Le conseil formule toutes recommandations ou propositions de réforme qui lui paraissent de nature à répondre aux objectifs précédemment définis.
« Le Conseil d'orientation des retraites est composé, outre son président nommé en Conseil des ministres, notamment de représentants des assemblées parlementaires, des organisations professionnelles, syndicales, familiales et sociales les plus représentatives et des départements ministériels intéressés, ainsi que de personnalités qualifiées.
« Les administrations de l'Etat, les établissements publics de l'Etat et les organismes chargés de la gestion d'un régime de retraite légalement obligatoire ou du régime d'assurance chômage sont tenus de communiquer au Conseil d'orientation des retraites les éléments d'information et les études dont ils disposent et qui sont nécessaires au conseil pour l'exercice de ses missions. Le conseil fait connaître ses besoins afin qu'ils soient pris en compte dans les programmes de travaux statistiques et d'études de ces administrations et établissements.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. »
La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons, avec l'article 6, le Conseil d'orientation des retraites, autrement dit le COR.
Créé initialement par un décret du 10 mai 2000, le COR se trouve consacré par son inscription dans la loi.
Nous nous félicitons évidemment que les dispositions relatives au COR, qui figuraient dans le décret précité, soient élevées au rang législatif. Chacun reconnaît, en effet, la qualité des travaux du COR ainsi que la légitimité et l'efficacité de cette instance.
Toutefois, nous estimons que certaines critiques peuvent lui être adressées, de même qu'il peut encore faire l'objet d'améliorations sur lesquelles mon groupe reviendra plus en détail lors de l'examen de nos amendements.
Je regrette vivement que la composition du COR soit renvoyée à un décret.
Je rappelle qu'actuellement les groupes parlementaires du Sénat et de l'Assemblée nationale ne sont pas tous représentés dans cette instance.
Malgré le débat qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale et l'engagement pris par le Gouvernement et le rapporteur devant la représentation nationale concernant la garantie du pluralisme au sein du COR, nous estimons qu'il est indispensable d'en inscrire clairement le principe dans la loi.
Il a été indiqué, à cet égard, que le décret prévoirait quatre membres pour chaque assemblée au lieu de trois actuellement. Dont acte ! Mais pourquoi donc ne pas l'écrire noir sur blanc dans la loi ? Nous connaissons tous ici, en effet, les délais dans lesquels sont pris les décrets, quand ils sont effectivement pris...
Par ailleurs, les modifications apportées par la commission des affaires sociales du Sénat ne sont pas pour nous rassurer en ce qui concerne les missions du COR.
Si la commission admet la nécessité de légaliser, par exemple, la mission d'information du COR, en revanche, elle s'empresse aussitôt de préciser que cette mission n'épuise pas la compétence générale que détient le ministre en charge de la sécurité sociale mais qu'elle s'exerce en toute indépendance. Est-ce à dire que le ministre concerné ne serait finalement pas lié par les réflexions du COR ? C'est une autre interrogation.
D'autre part, la commission limite par amendement le champ de compétence de cette instance aux régimes de retraites légalement obligatoires.
Cet article, dans sa rédaction initiale, me faisait déjà craindre que les missions du Conseil ne soient limitées et que cet instrument essentiel ne soit par conséquent privé de son rôle fondamental pour imaginer des alternatives concernant la retraite.
Nous sommes au contraire plutôt favorables à l'élargissement du nombre et du contenu de ses missions. En effet, si le COR a su jouer un tel rôle, c'est à n'en pas douter parce qu'il s'agit d'une instance vraiment pluraliste, associant des parlementaires, des représentants des associations familiales, des retraités et des personnes âgées, des experts et des représentants de l'Etat.
Mais, pour que le COR fonctionne mieux, plus, il convient de lui affecter des moyens matériels, humains et financiers en conséquence. Or, apparemment, les moyens sont quasiment constants.
Par ailleurs, nous nous interrogeons sur un autre point : le COR ne fera-t-il pas double emploi avec la Commission de garantie des pensions ? Je ne le pense pas, mais il peut y avoir un débat sur ce point.
En effet, dans le rapport de la commission des affaires sociales, il est précisé que le rôle de la Commission de garantie « est d'intervenir dans la procédure d'allongement de la durée de cotisation sous la forme d'un avis public, parallèle à celui qui est formulé par le COR ».
Je souhaite, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que des précisions nous soient apportées sur les questions que je viens brièvement de soulever.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, sur l'article.
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai indiqué dans la discussion générale que vous disposiez au départ d'atouts importants pour mener à bien une réforme des retraites. Le Conseil d'orientation des retraites, créé par le gouvernement précédent, faisait partie des atouts. Nous nous réjouissons de voir que son rôle est reconnu, inscrit dans la loi.
Je rappelle que le COR a effectué un remarquable travail préparatoire. Au départ, pourtant, le climat était particulièrement tendu. Nous nous souvenons du traumatisme causé par le plan Jupé de 1995 qui avait mis des millions de personnes dans la rue. Vous aviez eu le temps de tirer les leçons de cet échec cinglant. Il convenait, après 1995, de rasséréner le climat. Il a fallu quelques années pour y parvenir. Le COR a parfaitement tenu sa place, il a déminé le dossier et établi un diagnostic partagé par la plupart des acteurs concernés. Seul le MEDEF n'a pas participé à ses travaux.
L'opinion, en partie grâce aux travaux du COR, a bien compris qu'une réforme des retraites était inéluctable. Elle s'y préparait et les sept principales organisations syndicales, dans leur déclaration commune du 6 janvier 2003, affirmaient la nécessité d'une réforme et définissaient les priorités devant y figurer.
Vous aviez une opportunité exceptionnelle de mettre en pratique le dialogue social, la négociation collective ; vous aviez aussi une responsabilité particulière, si l'on se réfère, comme le fait volontiers M. le Premier ministre, à l'esprit de mai.
Nous savons ce qu'il en est résulté, à travers la réforme que vous présentez. A cet égard, je m'élève avec force contre votre tentative de récupération des travaux du COR en laissant croire qu'il cautionne le choix politique de l'allongement de la durée de cotisation ; ce n'est pas convenable.
Le COR n'a pas fait de choix politique. Il a fait un diagnostic, il a examiné plusieurs hypothèses. Le choix politique, c'est celui du Gouvernement et, pour ma part, je ne comprends pas que l'on puisse présenter votre réforme comme étant celle du COR.
Le Premier ministre, dans sa propagande aux Français, en a abusé. Il a caricaturé à des fins purement politiciennes et démagogiques les conclusions du COR, dans une démarche qui n'a pas été très respectueuse des principes élémentaires de la démocratie. Vous aurez dépensé 20 millions d'euros pour cette incroyable campagne de propagande sur un simple projet que nous n'avions pas encore voté. Nous n'avions jamais vu cela dans notre pays !
En outre, il est regrettable, je le répète, que le MEDEF ait toujours refusé de siéger au COR. Qu'avait-il à craindre ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il a accepté de venir !
M. Gilbert Chabroux. C'est un scoop ! Nous sommes très heureux d'entendre cette information.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cela figurait dans la presse hier !
Mme Michelle Demessine. Le MEDEF peut venir, il a eu satisfaction !
M. Gilbert Chabroux. Le COR va peut-être pouvoir poursuivre ses travaux dans le cadre de la loi, avec la participation du MEDEF. C'est bien, mais sans doute le MEDEF n'a-t-il plus rien à craindre. Il redoutait que les cotisations patronales puissent faire l'objet d'une révision, d'une augmentation...
M. François Fillon, ministre. Cela va pourtant être le cas !
M. Gilbert Chabroux. ... au lieu de demeurer au taux de 8,2 %, identique depuis vingt-cinq ans. Maintenant que vous lui promettez de ne pas toucher à la cotisation patronale (M. le ministre fait un signe de dénégation) peut-être participera-t-il effectivement aux travaux du COR.
M. François Fillon, ministre. On ne peut pas débattre avec ces gens-là !
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, sur l'article.
M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, mon collègue et ami Gilbert Chabroux a exprimé l'essentiel de ma position sur ce sujet. Je voulais néanmoins vous faire part de ma satisfaction de constater que le Conseil d'orientation des retraites va être reconnu par tout le monde.
En effet, je me souviens que, dans cette enceinte, alors que je défendais la création de cette instance, vous étiez nombreux, et M. Leclerc n'était pas le dernier, à qualifier le Conseil d'orientation des retraites de « gadget » destiné à botter en touche ! J'éprouve donc une grande satisfaction à ce qu'il soit reconnu. (Mme Nelly Olin s'exclame.)
Je suis également satisfait que le MEDEF accepte de siéger dans ce conseil. En effet, il a toujours boudé cette instance et n'y a pas siégé une seule fois ! Il manquait donc une partie. Il est vrai que, maintenant qu'il vous a fixé la feuille de route, le MEDEF peut venir !
Mme Nicole Borvo. Le dialogue social, ce n'est pas le fort du MEDEF !
M. Claude Domeizel. Je tiens à signaler que le COR est aujourd'hui reconnu pour le travail sérieux qu'il accomplit, sous l'autorité d'une présidence efficace. Son premier rapport - mais il y en aura d'autres, puisque le conseil est pérenne - a alimenté non seulement la réflexion du Gouvernement, du Parlement, mais aussi celle de nos partenaires, qui participent à cette instance avec beaucoup d'assiduité, afin que nous trouvions tous ensemble une solution satisfaisante pour réformer notre système de retraite.
Il est dommage, je le souligne de nouveau, que vous fassiez preuve d'une telle précipitation et que vous ne repreniez pas la concertation pour aboutir à une véritable réforme qui tiendrait compte de l'avis du Conseil d'orientation des retraites et de tous les partenaires sociaux présents à la table des négociations. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Vous me permettrez de répondre sur cette question, car je représente effectivement le Sénat, avec mon collègue Claude Domeizel, au Conseil d'orientation des retraites. A cet égard, j'aimerais que l'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai jamais dit, à savoir que le COR serait un « gadget ». Sachez que je ne me serais jamais permis d'utiliser ce qualificatif péjoratif !
Par ailleurs, vous prétendez que nous sommes en train de débattre de la réforme des retraites proposée par le COR.
M. Claude Domeizel. Mais non !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je suis abasourdi, mais je laisse à M. le ministre le soin de vous dire que nous discutons aujourd'hui d'un projet présenté par le Gouvernement de M. Raffarin...
Mme Nicole Borvo. Tout à fait !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... lequel, dès sa prise de fonctions, a affirmé qu'il s'agissait d'une priorité essentielle et qu'il se donnait le temps de l'information, de la concertation et de la négociation avant que le Parlement ne statue.
Mes chers collègues, les réflexions que je me suis permis de faire au sujet du COR sont les suivantes. Il faut revenir, j'en suis désolé, au Livre blanc de 1991, auquel ont succédé les rapports Charpin et Briet, dont l'un contenait la proposition de porter le nombre de trimestres de cotisation à 170 ; ils ont beaucoup contribué à la réflexion. Je ne me réfère pas au rapport Teulade, élaboré au nom du CES, qui prenait tellement le contre-pied des autres rapports qu'il s'est en quelque sorte discrédité et que vous-mêmes n'osez l'évoquer !
Je voudrais ajouter, et on le voit très bien à travers les mesures de solidarité que le Gouvernement propose, que l'on ne peut réformer que dans la générosité ! Or, il est des moments où il est plus facile d'être généreux qu'à d'autres : quand la croissance était porteuse, que les problèmes étaient connus par une multiplicité de rapports, c'était plus facile ! C'est cette démarche que j'ai dénoncée et, sur ce point, je ne change pas d'avis. Je n'ai pas fait de reproches directs au COR. Le COR est resté à sa place, et j'aurai l'occasion de revenir tout à l'heure sur l'importance de ce conseil.
Aujourd'hui, malgré le retournement de la conjoncture - qui ne touche malheureusement pas notre seul pays -, le Gouvernement a continué à faire preuve de certaines générosités envers des populations qui souffrent, des populations défavorisées.
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas de la générosité, c'est de la justice sociale !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est pour cette raison que nous défendons son projet, mais reconnaissez que c'est beaucoup plus difficile aujourd'hui !
Mme Nicole Borvo. Les salariés ne font pas la mendicité !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Par ailleurs, la multiplicité des rapports a montré qu'il était impérieux - et l'unanimité se fait sur ce point - de réformer les retraites. Le gouvernement Jospin a laissé passer l'occasion.
Mme Nicole Borvo. C'est une chose, mais nous en sommes maintenant à votre projet !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La démographie est un élément essentiel de la solidarité entre les générations. Aujourd'hui, 500 000 de nos concitoyens partent chaque année à la retraite, ils seront 800 000 demain !
A l'époque du gouvernement Jospin, les classes creuses de la guerre arrivaient à la retraite. Vous aviez donc tous les éléments pour engager une réforme ! Alors, je suis désolé de vous le dire, mais je le pense profondément, et je ne changerai jamais d'avis,...
Mme Nicole Borvo. Il ne change jamais d'avis !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... en politique, il faut être courageux ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Aujourd'hui, le Gouvernement dont notre ministre fait partie a pris ses responsabilités et c'est pour cela que nous le soutenons ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Nous le soutenons non pas seulement parce qu'il est l'émanation de notre majorité, mais parce qu'enfin le politique se réconcilie avec sa mission, c'est-à-dire assumer !
M. le président de la commission des affaires sociales l'a évoqué, nous avons adopté quatre articles, certes essentiels, mais chaque fois vous refaites le débat de la France sociale ! Pourquoi n'avez-vous pas parlé du logement, du déplacement, de l'urbanisme ? (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Jean Chérioux. Ils le feraient !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Au point où nous en étions, mes chers collègues, nous pouvions le faire !
Mme Nicole Borvo. Nous ne sommes pas dans un meeting politique !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je vais vous donner un dernier argument : nous sommes, les uns et les autres, pénétrés de notre mission.
Mme Gisèle Printz. Non !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je veux, pour ma part, être en phase avec les personnes qui m'ont fait confiance, qui m'ont porté ici.
J'ai découvert en consultant mon site internet, que la séance de ce matin était télévisée. Les habitants de mon département n'ont absolument rien compris à nos travaux tant nos propos étaient éloignés de la réalité des articles ! (Protestations sur les travées socialistes.)
Mme Nelly Olin. C'est normal !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Depuis quelques jours, je passe mon temps à essayer de vous convaincre de revenir à l'essentiel de la loi. J'expliquais, ce matin, qu'il y a des points de divergence entre nous. C'est normal.
Vous contestez l'allongement de la durée de cotisation. Parlons-en ! Vous contestez la décote et la surcote. Parlons-en aussi ! Mais cessons de discuter, alors que nous sommes tous responsables de certains errements de notre société, des intermittents du spectacle, du salaire des grands patrons, etc. Revenons à l'essentiel !
En ce qui concerne le COR, j'ai dit dans mon propos liminaire, qu'il avait été un moyen de botter en touche, et je le maintiens. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Là réside la différence entre vous et nous. Le COR a en effet été pour vous l'occasion de repousser l'échéance après les élections législatives.
Le COR remplit son rôle, c'est-à-dire qu'il a fait un constat, qui est d'ailleurs partagé ; nous le disons tous, il faut absolument réformer le système des retraites, sinon il faudra soit augmenter la durée de cotisation, soit accepter une diminution drastique du montant des pensions ou une augmentation, elle aussi insupportable, du taux des cotisations. (Mme Nicole Borvo fait des signes de dénégation.)
Face à trois scénarios aussi impossibles les uns que les autres, le rôle du COR n'était pas de proposer une solution. Ce rôle incombe aux hommes politiques.
M. Claude Domeizel. Vous n'en proposez qu'une !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Aujourd'hui, des hommes politiques courageux vous proposent une réforme !
Mais le COR a eu un avantage : il a permis qu'une réflexion soit menée. Alors, monsieur Domeizel, mettons les points sur les i , et je suis très à l'aise pour le faire. Le COR a permis à chacun des partenaires sociaux...
M. Claude Domeizel. Au MEDEF !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... d'entendre l'autre. Cette phase a été très importante. Mais où s'est déroulée la phase principale ? Dans l'opinion publique !
M. Claude Domeizel. Dans la rue !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Mais non, pas dans la rue ; c'est trop facile ! Je suis désolé de vous le dire, monsieur Domeizel, je vais à la rencontre de nos concitoyens,...
M. Claude Domeizel. Oh non !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... et, depuis que le Gouvernement s'est installé, il a réaffirmé haut et fort qu'il fallait réformer les retraites. C'est devenu une évidence.
M. Claude Domeizel. Voyez ce qu'en disent les médias !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Parlons-en des médias ! Il n'y a pas eu une semaine sans qu'un hebdomadaire, un quotidien ou la télévision ne consacrent une émission à la question des retraites. Puis le Premier ministre a envoyé une lettre à tous les Français, qui ont alors commencé à comprendre qu'un problème se posait.
M. Marcel Debarge. Ils sont partis en vacances !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Pour rester honnête, je l'ai dit ce matin, certains Français partant à la retraite ne connaissent pas les tenants et les aboutissants du problème. Ils découvrent, pour la plupart, leur situation. Ils ne savent pas qu'il y a une décote. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Aujourd'hui, nous avons des obligations : celle de la transparence - elle figurera dans le texte - et celle de la responsabilité.
M. Claude Domeizel. Les Français sont maintenant en vacances, et vous en profitez !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est pourquoi nous sommes derrière le gouvernement de M. Raffarin et nous le soutenons ; c'est notre démarche d'élus responsables !
Mme Paulette Brisepierre. Très bien !
Mme Michelle Demessine. Tout le monde est responsable !
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, sur l'article.
M. Jean Chérioux. Après avoir entendu notre collègue Domeizel, je suis obligé de faire part de mon étonnement et de ma consternation.
M. Claude Domeizel. Comme d'habitude ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Chérioux. M. Domeizel nous a dit que nous venions de découvrir le COR. Les bras m'en tombent ! Ou M. Domeizel a une mémoire sélective ; ou il n'a pas du tout fait attention au long débat que nous avons eu en commission. Nous y avons entendu, notamment, tous les représentants des syndicats. J'ai constaté - ce que j'ai trouvé remarquable - que même ceux qui combattaient notre projet étaient d'accord sur le diagnostic établi par le COR.
Nous avons souvent eu l'occasion de reconnaître les qualités et l'utilité du COR. Nous ne nous réveillons pas aujourd'hui pour le constater, et vous n'avez pas à insinuer de tels propos, monsieur Domeizel !
Par ailleurs, je suis consterné lorsque M. Domeizel, sénateur de la République, fait référence à ce qui se passe dans la rue.
Mme Nicole Borvo. C'est bien normal !
M. Jean Chérioux. Pour moi, la rue ne compte pas ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Ce qui compte, c'est ce qui se décide ici ! C'est ça le système représentatif et c'est cela l'honneur de ce système ! (Exclamations prolongées sur les mêmes travées.)
Ce qui est encore plus consternant, c'est que M. Domeizel se permette d'affirmer - je le prends pour une insulte - que nous avons reçu notre feuille de route du MEDEF.
M. Claude Domeizel. Mais si !
M. Jean Chérioux. Moi, je ne reçois ma feuille de route de personne ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC). Je ne dépends que de ma conscience et du sentiment que j'ai de l'intérêt général. Qu'un sénateur de la République puisse tenir de tels propos est tout à fait scandaleux ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, nous avons bien débattu de cet article 6 ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
J'ai donc l'honneur de vous demander la clôture de la discussion, et je souhaite que le Sénat se prononce sur ce point par scrutin public.
M. Jean-Pierre Masseret. Vérifions aussi le quorum !
M. Marcel Debarge. Ils sont minoritaires !
M. le président. En application de l'article 38 du règlement, je suis saisi d'une demande de clôture de la discussion de l'article 6.
Je vous rappelle qu'en application de l'alinéa 1 de l'article 38 la clôture peut être proposée par le président ou tout membre du Sénat lorsque au moins deux orateurs d'avis contraire sont intervenus sur l'ensemble d'un article.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Je vais consulter le Sénat à main levée.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, monsieur le président, j'ai demandé un scrutin public !
M. le président. Je regrette, monsieur About, mais la consultation du Sénat a lieu à main levée pour une demande de clôture.
Conformément à l'article 38, alinéa 4, je consulte donc le Sénat à main levée sur la demande de clôture de l'article 6.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC. Il y a égalité !
M. le président. La clôture n'est pas prononcée. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On peut s'amuser à utiliser ce genre de procédure. (Protestations sur les mêmes travées.)
M. Marcel Debarge. Qui l'a demandée ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le sujet est important, mais ce qui est important aussi, c'est que nous fassions avancer le débat et que nos travaux ne soient pas bloqués. J'annonce dès à présent que nous travaillerons donc demain, dans la journée, mais aussi dans la soirée.
M. Marcel Debarge. Soyez présents !
M. Jean-Pierre Masseret. Ce sont des menaces ?
Un sénateur du groupe socialiste. Cela ne vous ressemble pas !
M. le président. En tant que président de séance, je ne fais qu'appliquer le règlement en cas d'égalité des votants.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas dit le contraire !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Depuis le début de la discussion, vous nous expliquez que nous faisons durer le débat. Mais j'observe que deux membres de votre majorité se sont livrés à un véritable meeting politique, en comité restreint bien évidemment.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous êtes nombreux depuis le premier jour !
Mme Nicole Borvo. Permettez que nous ne l'acceptions pas ! Si vous voulez faire un rappel à l'ordre, faites-le, mais pas à l'encontre des sénateurs de l'opposition !
M. Gilbert Chabroux. D'autant qu'on n'avait rien dit !
Mme Nicole Borvo. M. le rapporteur nous a d'abord dit qu'il ne changerait jamais d'avis. En matière de dogmatisme, on ne fait pas mieux !
Il nous a dit ensuite que les Français ne comprenaient rien à nos débats. Vous avez consacré beaucoup de temps et beaucoup d'argent à leur expliquer qu'il fallait réformer, pour le sauver, le système de retraite par répartition, et que la seule réforme possible était celle de votre projet. Mais il se trouve que d'autres - dont nous d'ailleurs, mais pas seulement - leur ont expliqué que votre réforme avait quand même pour corollaire l'obligation de cotiser davantage pour une pension inférieure et de souscrire des fonds de pension, ce qui ne leur avait pas été bien précisé !
M. François Fillon, ministre. Parce que c'est faux !
Mme Nicole Borvo. Pourtant, cela ressort du texte !
M. François Fillon, ministre. C'est un mensonge éhonté !
Mme Nicole Borvo. Non ! Ce n'est pas du tout un mensonge éhonté. On vous a expliqué...
M. François Fillon, ministre. Vous n'expliquez rien du tout, vous affirmez sans rien démontrer !
Mme Nicole Borvo. ... que, la part de la retraite légale fondant comme neige au soleil, bien évidemment seuls ceux qui ont de l'argent peuvent compléter leur retraite légale par de l'épargne personnelle.
M. François Fillon, ministre. Ce n'est même plus de la caricature, c'est n'importe quoi !
Mme Nicole Borvo. Appelez cela comme vous voulez, mais ce sont bien des fonds de pension !
M. François Fillon, ministre. C'est honteux !
Mme Nicole Borvo. Ce n'est quand même pas ce qui ressortait des analyses du COR ou des différents rapports. Je suis bien d'accord avec vous, monsieur le rapporteur, il s'agit d'une décision politique.
Vous nous avez dit encore que la période n'était pas propice à la générosité. Mais en matière de retraite, comme en matière de protection sociale, nous n'en sommes pas à faire l'aumône ! Nous établissons un projet pour les retraites,...
M. Jean Chérioux. Vous n'établissez rien du tout ! C'est nous qui l'établissons !
Mme Nicole Borvo. ... c'est-à-dire un élément important de la protection sociale. Il n'est nullement question de générosité ou d'aumône ! Ce que nous défendons, nous, c'est la justice sociale et une juste répartition des richesses. Voilà ce que demandent nos concitoyens !
M. le président. La parole est à Mme Nelly Olin.
M. Jean-Pierre Maseret. Elle demande la clôture ?
Mme Michelle Demessine. Ou la vérification du quorum !
Mme Nelly Olin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à cause de la fatigue qui commence à se faire sentir et de l'embarras que certains éprouvent, nous entendons des propos qui dépassent l'entendement !
M. Claude Estier. Ceux de M. About, par exemple !
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai pour nous !
Mme Nelly Olin. Chaque gouvernement doit assumer ses responsabilités, de même que chacun des membres du Sénat, quelle que soit son appartenance politique.
Voilà deux jours, nous avons examiné vingt amendements en cinq heures ! On ne pourra donc pas dire que l'opposition ne s'est pas exprimée ! Mais, aujourd'hui, nous sommes en train de montrer aux Français un visage absolument négatif.
M. Claude Estier. Ils ne nous regardent pas !
M. Jean Chéroux. C'est pour cela que vous vous conduisez comme vous le faites !
Mme Nelly Olin. Je ne vous ai pas interrompu, monsieur Estier, alors vous pourriez être plus correct, vous qui faites l'apologie des femmes ! Que vous soyez d'accord ou non avec lui, ce gouvernement assume ses responsabilités. Certes, nous pouvons comprendre que vous ne le souteniez pas, mais vous pourriez tout de même vous exprimer d'une manière courtoise, ce qui n'a pas toujours été le cas puisque vos propos ont quelquefois été quelque peu insolents, voire insultants. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
En outre, puisque vous avez décidé de faire durer le débat, ayez au moins la décence de reconnaître que des avancées significatives sont réalisées. On peut comprendre que vous ne partagiez pas cet avis puisque vous n'avez rien fait, mais, aujourd'hui, le Gouvernement a un devoir, celui de sauver les retraites pour l'avenir de notre pays,...
M. Jean-Pierre Masseret. Nous aussi !
Mme Nelly Olin. ... pour l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants.
Si chacun, dans cette assemblée, pouvait au moins avoir la correction de s'exprimer posément, cela n'enlèverait rien au débat, et nous pourrions le poursuivre d'une façon sereine à défaut d'être constructive. Une telle agressivité n'ajoute rien au débat ! Voilà ce que je tenais à dire, monsieur le président. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo. Vous n'avez pas entendu M. Leclerc, madame Olin !
M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi de trente et un amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 296, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Les travaux du Conseil d'orientation des retraites ont mis en avant plusieurs analyses essentielles pour aborder sérieusement notre débat relatif à la réforme des retraites. Nous avons dit par ailleurs, et en diverses occasions, tout le bien que nous pensons du COR et, une fois de plus, nous soulignons la qualité de ses travaux.
Le COR a su en effet apporter un éclairage précieux sur les différents enjeux d'une réforme nécessaire de notre système de retraite, afin de garantir les fondements de ses principes fondamentaux. Il a su mettre à disposition, sous forme largement accessible, les principales données, analyses et propositions des partenaires sociaux et de la société civile.
C'est la première fois qu'est trouvé un vrai lieu d'échange pluridisciplinaire et pluraliste. Le Conseil dispose de moyens importants, travaille en parfaite collaboration avec les différents services de l'Etat, qui ont mis à sa disposition toutes les données qui n'avaient jamais été rassemblées jusqu'à ce jour. Elles ont été exploitées et ont permis d'opérer une grande clarification, qui a été bien utile pour notre débat, s'agissant notamment des conséquences de la réforme Balladur.
Le Conseil d'orientation des retraites a été conduit à travailler la question des retraites sous différents angles : la situation actuelle du régime d'assurance vieillesse en France, les projections relatives à son équilibre futur, les éléments principaux du débat sur son avenir, mais aussi un aperçu des évolutions en cours à l'étranger. Aussi, nous nous félicitons de voir que ce Conseil est reconnu par le législateur et consacré dans cet article 6.
Toutefois, nous regrettons que les missions qui lui ont été confiées ne soient pas toutes retranscrites.
Certes, vous maintenez, à juste titre, certaines de ses prérogatives : premièrement, la mission de décrire les évolutions et les perspectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques, et d'élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ; deuxièmement, la mission d'apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; troisièmement, la mission de mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite et de suivre son évolution ; quatrièmement, la mission de participer à l'information sur le système de retraite et les effets des réformes conduites pour garantir son financement ; enfin, cinquièmement, la mission de suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités, ainsi que de l'ensemble des indicateurs de régimes de retraite, dont les taux de remplacement.
Malheureusement, vous omettez une prérogative, à nos yeux capitale, celle qui consiste à veiller sur la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations.
Par ailleurs, l'ampleur du travail d'analyse et de prospective effectué par le Conseil a montré que, si les inégalités devant la retraite demeurent, celle-ci est devenue une promesse d'un nombre significatif d'années « libérées » pour le plus grand nombre.
L'espérance de vie à 60 ans, d'une quinzaine d'années en moyenne en 1932, est passée aujourd'hui à une vingtaine d'années pour les hommes et à près de vingt-cinq ans pour les femmes. Les régimes de retraite garantissent désormais l'indépendance financière des personnes âgées, leur assurant un niveau de vie moyen comparable à celui des actifs. Cela témoigne de la réussite du système de retraite par répartition mis en place après 1945 et qui est peu à peu monté en charge au cours des trente glorieuses. Il doit, lui aussi, être garanti.
Les travaux du COR ont permis de mettre en lumière également le besoin de financement. Il a fourni des données, proposé des orientations, présenté des choix possibles, ce qui relevait clairement de sa mission d'étude et de concertation.
C'est pourquoi nous sommes attachés à la poursuite de ses travaux et souhaitons que lui soit donné le moyen de jouer tout son rôle pour nous éclairer encore sur les améliorations à apporter.
C'est également la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article, qui ampute le Conseil d'orientation des retraites de ses fonctions et de ses moyens...
M. François Fillon, ministre. Quoi !
Mme Michelle Demessine. ... tels qu'ils sont définis par le décret fondateur qui l'a vu naître.
M. François Fillon, ministre. C'est n'importe quoi ! La disposition a été votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale !
Mme Michelle Demessine. Par conséquent, en l'état, cet article ne nous convient pas et nous ferons des propositions au cours du débat pour élargir le champ des missions du COR.
M. François Fillon, ministre. On amputerait le Conseil d'orientation des retraites de ses missions ! C'est du délire !
M. le président. L'amendement n° 205, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au I de cet article, remplacer la référence : "L. 114-3" par la référence : "L. 114-5". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. L'amendement n° 306, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa (1°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après le verbe : "décrire", insérer les mots : "et d'analyser". »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Créé par un décret du 10 mai 2000, le Conseil d'orientation des retraites est une structure pluraliste et permanente de concertation associant des parlementaires, des représentants des partenaires sociaux, du secteur public comme du secteur privé, des représentants des associations familiales, des retraités et des personnes âgées, des experts et des représentants de l'Etat. Il a pour mission essentielle de suivre régulièrement la situation de notre système d'assurance vieillesse, d'établir des diagnostics et de faire des recommandations ou des propositions de réforme de nature à répondre aux objectifs de solidité financière et de solidarité.
A ce titre, il est un instrument de réflexion et de débat au service de la préparation des évolutions des régimes de retraite. Par conséquent, nous nous félicitons qu'il soit consacré par la loi.
Toutefois, les dispositions contenues dans l'article 6 semblent justement partiellement ignorer l'importance de cette réflexion. En effet, parmi les missions que vous souhaitez confier au COR, il n'est prévu, au 1° du II de cet article, qu'une mission de description concernant « les évolutions et les perspectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques, et d'élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ».
Or l'essentiel de la description doit pouvoir permettre d'élaborer une analyse justifiée et pertinente de cette évolution, afin d'apporter les éléments de propositions de mutation et de réforme efficiente de notre système de retraite par répartition. En effet, si, comme vous l'avez répété jusqu'à plus soif, le temps des rapports est révolu et qu'il est temps de faire place à l'action, cette action ne doit pas conduire la France et nos concitoyens dans le mur. Afin d'éviter ce risque inutile, sauf à considérer que l'objectif est déjà défini avant même la description de la situation et son analyse, le législateur et le pouvoir exécutif, ainsi que l'ensemble des partenaires sociaux, doivent pouvoir se reposer sur l'ensemble des analyses de la situation.
Ce travail d'analyse, compte tenu de l'excellence des travaux fournis par le COR, nous proposons de le faire réaliser par les services de ce Conseil. A ce titre, nous suggérons d'ajouter, après le mot « décrire » du 1° du II de l'article 6, les mots « et d'analyser ».
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est pas mal ! C'est un bon amendement !
M. Roland Muzeau. Cet amendement de précision des prérogatives du COR est, nous semble-t-il, fort utile pour ne pas faire de ce conseil un simple organe d'information, comme il en existe déjà d'autres, dont les activités ont été instructives quant à la réforme des retraites que vous portez ici devant nous. C'est pourquoi je vous demande d'émettre un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 206, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "différents régimes de retraites, compte tenu" par les mots : "régimes de retraites légalement obligatoires, au regard". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
Le Conseil doit avoir un champ de compétences clairement défini. La commission a estimé que le COR devait, en effet, concentrer son attention sur les régimes de retraite obligatoires, qu'ils soient de base ou complémentaires.
D'ailleurs, la fin du texte proposé par cet article suggère de retenir ce domaine de compétences, puisqu'il prévoit des échanges institutionnels d'information entre le Conseil et les régimes de base et les régimes complémentaires.
D'un point de vue pratique, la mission relative à la description de la situation et à l'analyse des perspectives des régimes ne peut être remplie que si elle ne concerne qu'un nombre limite d'entre eux, et non une myriade d'intervenants du secteur supplémentaire.
Toutefois soyez rassurés, rien n'interdira au Conseil de dresser un tableau général de la situation des régimes facultatifs. A ce titre, la commission a maintenu en tant que mission du Conseil une compétence générale d'information sur le système d'assurance vieillesse.
M. le président. L'amendement n° 297, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 2° bis De veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement tend à élargir les missions du COR et à lui redonner une mission qui a été supprimée par le projet de loi. En effet, il reprend les termes du décret fondateur du Conseil d'orientation des retraites dans son article 2, troisième alinéa.
Le texte proposé par le Gouvernement nous semble restrictif par rapport aux missions qui sont actuellement dévolues au Conseil d'orientation des retraites.
Le Conseil d'orientation des retraites doit porter un regard sur la viabilité financière, certes, mais il n'aura plus comme mission de veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, au respect de l'équité entre les différentes générations. Pourtant, les Français ont montré, ces derniers temps, à quel point ils étaient attachés à ce système fondé sur la solidarité.
Si le Gouvernement, comme il l'affirme, souhaite sauver le système par répartition, il n'y a aucune raison qu'il ne continue pas à demander au COR de travailler autour de cette question essentielle. C'est pourquoi, nous proposons de réintégrer cet alinéa dans le projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 207, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au quatrième alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "et de suivre son évolution" par les mots : "susmentionnés et de suivre l'évolution de ce financement". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionel.
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° - De mener une réflexion sur la situation comparée des hommes et des femmes ayant à charge ou ayant eu à charge un enfant ou un adulte handicapé ou invalide au regard de la constitution de leur droit à la retraite. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Notre amendement tend à inviter le COR à mener une réflexion sur la situation comparée des hommes et des femmes ayant à charge ou ayant eu à charge un enfant ou un adulte handicapé ou invalide au regard de la constitution de leur droit à la retraite.
Savez-vous qu'aujourd'hui, d'après une enquête menée par l'INSEE à la fin de l'année 1999, environ 2,3 millions de personnes, vivant à leur domicile, perçoivent une allocation, une pension ou un autre revenu en raison d'un handicap ou d'un problème de santé ? Mais ce n'est pas tout : plus de 5 millions de personnes bénéficient d'une aide régulière pour accomplir certaines tâches de la vie quotidienne, pour les mêmes raisons. Ce qui devrait interpeller le législateur, c'est que, pour toutes ces personnes, près de deux fois sur trois, l'aide est apportée par l'entourage proche.
Les incapacités dues au handicap se traduisent par des limitations d'activité. Dans le domaine de la mobilité, elles vont du besoin d'aide pour sortir du domicile au confinement au lit ou au fauteuil, en passant par l'incapacité à se laver ou à s'habiller seul.
L'aide de l'entourage proche est primordiale et moins d'une personne aidée sur cinq ne l'est que par des professionnels.
Tous ces chiffres sont éloquents et montrent combien, pour les proches d'enfants et d'adultes handicapés, l'investissement en temps et en énergie ne peut qu'interférer avec l'exercice de sa propre activité professionnelle.
Combien doit-on recenser de temps partiels, d'interruptions temporaires ou définitives d'activité professionnelle, de freins au déroulement de sa carrière, parce que l'on se doit d'aider, tout simplement, ces personnes handicapées à vivre ?
Il est de notre devoir, aujourd'hui, de rendre hommage à la disponibilité et au dévouement de ces hommes et de ces femmes. Un outil d'observation pour rendre compte de la constitution de leur droit à la retraite est un pas nécessaire pour pouvoir évaluer les inégalités, donc les ajustements de demain. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 299, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° - De mener une réflexion sur la réforme des cotisations sociales prenant en compte la valeur ajoutée globale. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 208, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le cinquième alinéa (3° bis ) du texte proposé par cet article pour l'article L. 144-2 du Code de la sécurité sociale :
« 3° bis - De formuler les avis prévus aux III et IV de l'article 5 de la loi du portant réforme des retraites ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'article 5 : il prévoit que le COR a pour mission de formuler les avis qui sont prévus à l'article 5. Ce faisant, il tend à supprimer la précision apportée par l'Assemblée nationale selon laquelle le COR mène une réflexion sur le financement des régimes de retraite.
Il est utile de préciser qu'une réflexion sur l'évolution du financement de l'assurance vieillesse ne saurait écarter a priori une réflexion sur l'évolution de l'assiette de cotisation, laquelle est d'ailleurs largement entamée par les rapports Chadelat et Malinvaud, le précédent gouvernement n'ayant pas tranché entre leurs analyses opposées.
Ce rappel ayant été fait, l'inscription de cette précision dans la loi devient superfétatoire. A l'évidence, le COR a toute latitude pour étudier des modalités de financement des régimes des retraites.
M. le président. L'amendement n° 1096, présenté par Mme Olin, MM. Trucy, Plasait, Murat, Courtois, Hérisson, Nachbar, Cantegrit, Hyest, Braye et Schosteck, est ainsi libellé :
« Dans le 6e alinéa (4°), du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "de participer", insérer les mots : ", en toute indépendance,". »
La parole est à Mme Nelly Olin.
Mme Nelly Olin. Cet amendement a pour objet de réaffirmer l'indépendance du Conseil d'orientation des retraités.
M. le président. L'amendement n° 305, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le II de cet article pour le sixième alinéa (4°) de l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "pour garantir", insérer les mots : "et assurer". »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. L'article 6 reprend certaines des prérogatives du COR qui sont édictées dans son décret fondateur.
Notre amendement a pour objet de préciser encore les missions qu'assure le COR et qui sont intéressantes. Toujours est-il que le COR doit également participer à l'information sur le système de retraite et sur les effets des réformes conduites pour garantir son financement, question centrale.
Rester frileux sur ce sujet reviendrait à enterrer la retraite par répartition. Et renvoyer à l'incertitude du lendemain n'est pas raisonnable.
C'est pourquoi il convient non seulement de garantir le financement, mais également de l'assurer. La simple garantie ne suffit pas : affirmer le principe du financement ne veut pas dire l'assurer. C'est pourquoi je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 300, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 5° bis De présenter un rapport au Parlement avant 2008 notamment sur l'égalité devant les retraites en fonction de la pénibilité du travail. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous avons déjà, à plusieurs reprises, soulevé la question de la pénibilité du travail dans le cadre de ce débat sur les retraites.
Il est évident qu'au-delà de la solidarité intergénérationnelle se pose, en matière de retraite, la question de la solidarité interprofessionnelle.
Nous ne serions pas choqués que quelques efforts soient accomplis pour que la pénibilité des conditions de travail soit prise en compte en termes de droits acquis à pension.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement qui prévoit d'ajouter au contenu des missions du COR la faculté d'informer le Parlement des effets de la pénibilité du travail sur la durée de perception des retraites.
M. le président. L'amendement n° 307, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur le retour pour tous les assurés à 37,5 années de cotisation. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Nous avons une position de principe sur la durée de cotisation : nous défendons le retour pour tous les assurés à 37,5 années de cotisation. Bien sûr, les points de vue sont très différents à cet égard.
Cet amendement tend à compléter les missions de réflexion du COR.
La réforme des retraites dont nous débattons repose sur un équilibre très précis. Cet équilibre est celui de l'harmonisation des régimes par répartition, qu'il s'agisse du régime général, du régime de la fonction publique, du régime agricole, du régime des commerçants et artisans ou du régime des professions libérales.
Il nous paraît donc nécessaire que le COR vérifie la faisabilité de tout cela. C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions que, parmi les missions de réflexion qui sont confiées au COR, figure l'étude de l'impact de la réduction de la durée de cotisation des salariés du secteur privé, comme des non-salariés.
M. le président. L'amendement n° 308, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'indexation des pensions de retraites sur les salaires. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement concerne le périmètre des missions accomplies par le COR en matière d'information. Quand on y réfléchit, on peut penser que le COR a la possibilité, dans le cadre de ses travaux, de fournir une information de qualité au travers de ses différents rapports annuels à venir. Il peut devenir un outil d'aide à la réflexion, sans avoir pour autant le rôle de caution scientifique du recul social que l'on semble vouloir lui faire jouer.
Le COR doit donc se poser les bonnes questions, en particulier celle du pouvoir d'achat des retraites, qui est au coeur du devenir de nos retraites par répartition.
Par conséquent, sans nous départir de notre position de principe, nous estimons que l'on doit réfléchir aux incidences d'un relèvement du niveau des pensions et à l'adoption d'un mode d'indexation plus en rapport avec les exigences de notre temps.
Vous me direz que nous connaissons déjà une partie de la réponse à la question posée. La réforme Balladur a indexé les retraites du secteur privé sur l'évolution des prix hors tabac, ce qui eu a des conséquences remarquables sur la situation de nombreux retraités. Ce sont en effet quelque 16 milliards d'euros de pouvoir d'achat dont les retraités du secteur privé ont été privés. A première vue, cela fait peur, bien évidemment, quand bien même on ne peut oublier quelques vérités d'évidence.
Une vérité d'évidence, c'est que ces sommes qui ont été ainsi prises dans la poche des retraités ne sont rien d'autre que du pouvoir d'achat qui leur a été confisqué. Et, lorsque l'article 2 du projet de loi prévoit que tous les assurés sont en droit d'obtenir une pension en rapport avec les revenus qu'ils ont tirés de leur activité, nous nous permettons de considérer que la non-indexation sur les salaires est le plus sûr moyen de ne pas respecter ce principe.
Seconde observation, ne pas permettre aux retraités de percevoir 16 milliards d'euros de revenus est une décision qui ne manque pas d'avoir certaines conséquences pour l'Etat. Cela coûte environ 600 millions d'euros à la protection sociale au titre de la CSG ; cela coûte, au bas mot, 1 milliard d'euros au titre de l'impôt sur le revenu. Et il n'est pas interdit de penser que ce sont 1,5 à 2 milliards d'euros qui ne reviennent pas sous forme de produits de TVA, produits qui sont attachés à la consommation populaire.
On peut donc se demander si la désindexation des retraites sur les salaires n'a pas eu comme conséquence de créer les conditions d'une dynamique récessive fondée sur l'absence de revenus. Ce sont précisément ces problèmes qu'il faut confier à l'expertise du COR. N'oublions jamais, mes chers collègues, que les retaites ne sont pas qu'un coût, qu'elles ont aussi le caractère d'un revenu.
C'est donc sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter cet amendement n° 308 étendant le champ d'expertise systémique du Conseil d'orientation des retraites au nom de l'aide que cette expertise peut apporter à la réflexion de la représentation nationale.
M. le président. L'amendement n° 309, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur la validation gracieuse des périodes de formation. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement s'inscrit dans la lignée des précédents, qui visent à élargir les missions assignées au COR. Nous proposons donc de mener une réflexion - elle a d'ailleurs été, au cours de ces premières journées, au coeur de nos débats -, sur la validation gracieuse des périodes de formation.
L'allongement de la durée des études et l'âge de plus en plus tardif d'entrée dans un emploi salarié stable nécessitent la prise en compte pour la retraite de ces années de formation et d'études.
Ces bénéfices d'études devraient être accordés quelle que soit la situation professionnelle ultérieure - un certain nombre d'amendements tendent à le préciser -, qu'elle se déroule dans le secteur public ou dans le secteur privé. Cela suppose de réfléchir aux interconnextions entre les différents régimes de retraite, afin de garantir l'égalité des droits pour des parcours professionnels équivalents, quels que soient les secteurs d'activité.
Voilà une mission supplémentaire pour le COR.
M. le président. L'amendement n° 310, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur la suppression de la contribution sociale généralisée sur les pensions de retraite. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Toujours pour élargir les missions du COR, nous proposons de poser quelques questions sur les effets de certaines cotisations sociales prélevées sur tous les revenus.
Depuis dix ans, les retraités ont été victimes de l'accroissement des prélèvements sociaux et fiscaux. Ce mouvement a été engagé avec l'instauration autoritaire de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, et amplifié par le plafonnement de la déduction fiscale de 10 % et plus. Cette année, il s'est trouvé, dans cette assemblée et dans ce gouvernement, des gens pour concevoir et pour voter une remise en cause de l'allocation spécifique dépendance, plaçant ainsi, de fait, des centaines de milliers de retraités dans des situations particulièrement difficiles.
C'est dans ce contexte que nous proposons que le Conseil d'orientation des retraites se penche sur la question de la suppression de la contribution sociale généralisée.
Nombre de retraités dont les ressources sont plus que modestes sont aujourd'hui exonérés de cette contribution.
Cette situation ne nous dérange pas l'espace de cinq minutes.
Pour les autres, comme, de manière générale, ils sont loin de rouler sur l'or, il s'agira de leur rendre un peu de pouvoir d'achat.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 311, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur les moyens permettant d'assurer la possibilité de départ immédiat anticipé avant 60 ans et dès 40 annuités pour les assurés qui justifient de ces conditions. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement concerne la mission confiée au COR d'engager une réflexion sur les moyens permettant d'assurer la possibilité du départ immédiat anticipé avant l'âge de 60 ans et dès 40 annuités.
Cela concerne essentiellement les personnes ayant intégré jeunes le monde du travail, notamment celles qui ont travaillé dans des conditions pénibles ou de pénibilité accrue.
Si l'on se réfère aux dernières enquêtes portant sur les conditions de travail, la pénibilité physique n'est nullement en régression, alors que les facteurs de pénibilité mentale et psychologique connaissent une augmentation générale.
Cela pose d'ailleurs le problème de l'amélioration des conditions de travail, que les membres du groupe CRC évoquent d'ailleurs souvent ici.
Dans le monde du bien-être, de la recherche d'une vie saine et équilibrée, devant les principes de vie assénés jour et nuit à la télévision et dans les magazines, on pourrait aisément croire que ces préceptes ont valeur de modèle et d'absolu pour tout un chacun. Pourtant, une deuxième vie existe, notamment pour les 800 000 salariés qui subissent actuellement des contraintes de pénibilité ou d'astreinte dans les entreprises.
A croire qu'il existerait des modes de vie différents selon qu'il s'agisse du lieu de travail ou du domicile. A croire que l'être humain serait capable d'accepter la dureté de son emploi, de ses conditions salariales et n'aurait comme exutoire que les moments passés dans sa sphère privée, le soir, le week-end et lors des vacances.
Cette conception du passage de l'homme sur terre est cependant fausse. Vivre est un tout, et chacun est en droit de vouloir mener une existence sereine sans se voir infliger des contraintes supplémentaires dans son environnement de travail, contraintes qui, d'ailleurs, pourraient être diminuées. Un certain nombre d'inégalités pourraient de même être évitées.
Le temps où la dureté du travail était associée au travail manuel et physique est révolu.
J'en veux pour preuve et pour exemple le développement du secteur des services, qui a vu l'émergence de difficultés nouvelles dans les entreprises.
Aux personnes qui ont commencé très jeune - entre 14 ans et 16 ans - dans la vie active et qui souffrent bien souvent de la pénibilité dans leur emploi, vous accordez, certes, la possibilité d'un départ en retraite anticipé. Mais, pour ce faire, vous posez comme base de départ les 42 annuités de cotisation. Or, sous couvert d'une mesure prétendument favorable, vous appliquez insidieusement à cette catégorie de salariés votre réforme injuste et allongez de deux ans leur durée de cotisation. Voilà l'exemple même d'un cadeau empoisonné ! Dans ce domaine aussi, les inégalités se creusent, ce qui illustre, s'il en était besoin, le caractère déséquilibré de votre plan.
Je le réaffirme ici, monsieur le ministre, vous ne prenez pas en compte la globalité du problème posé, laissant le champ libre à d'éventuelles négociations collectives au sein des entreprises.
Cet amendement vise donc à éviter que ne se creusent les inégalités. Il présente l'intérêt de placer le COR au coeur du débat sur les départs anticipés à la retraite.
M. le président. L'amendement n° 312, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution des profits et bénéfices des grandes entreprises et la part consacrée à l'investissement, l'emploi et la formation. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Après avoir mis l'évolution démographique et donc le financement de nos pensions de retraite en relation avec le niveau, si vous me le permettez, du « gâteau produit », il faut achever l'analyse et lier ce niveau avec le partage. Car la question essentielle est bien celle-ci : quelle répartition de la valeur ajoutée créée par le travail doit-on mettre en oeuvre pour une véritable réforme de notre système ?
Le MEDEF et votre gouvernement veulent faire oublier que les conditions de ce partage se sont considérablement dégradées au cours des vingt dernières années : 150 milliards d'euros perdus chaque année soit presque autant que le montant total des retraites versées, qui s'élève à 180 milliards d'euros.
L'importance de ce transfert des revenus des salariés vers le profit, qui sera amplifié par votre réforme, est à mettre en parallèle avec le coût pour le moins réduit - 0,3 point de PIB - que coûterait, à l'horizon 2040, le retour de tous les salariés à 37,5 annuités calculé par le COR.
Si l'on ne veut pas voir cette tendance s'accentuer au fur et à mesure que le PIB augmentera, il faut impérativement inverser la tendance à la régression de la part des salaires, quelle que soit la forme que peut prendre cette part, depuis les salaires jusqu'à la réduction du temps de travail en passant par le temps et la pension des retraites.
Il y a là un gisement de ressources actuellement accaparé par les détenteurs de capitaux et dont il faudrait organiser une autre affectation pour l'avenir. Le rééquilibrage de la masse salariale dans la valeur ajoutée donnerait ainsi une latitude plus grande pour financer les retraites.
Quelle forme cependant donner à l'inversion de la tendance ? Plusieurs méthodes existent et ont été proposées, non seulement par notre groupe mais aussi par d'autres organisations syndicales et associations nationales. Parfois complémentaires, parfois contradictoires, nous aurons certainement l'occasion d'y revenir ; toutes ces méthodes ont pour trait commun de se résumer à une modification de la répartition de la valeur ajoutée.
Rappelons clairement les chiffres. En l'espace de vingt ans seulement, la part des salaires dans la valeur ajoutée a diminué de dix points, passant de 70 % au début des années quatre-vingt à 63 % aujourd'hui. Dans le même temps, la part du capital a, quant à elle, augmenté dans la même proportion, passant de 30 % environ à près de 40 % de la valeur ajoutée.
Cette dégradation de la répartition au détriment des salaires prend plusieurs formes dont les plus apparentes sont la généralisation de la flexibilité de l'emploi et de la précarité du travail et des revenus.
Dans ces conditions, on peut expliquer facilement les difficultés que rencontre notre système de retraite par répartition, confronté à la perspective d'une raréfaction de ses ressources afin de financer les pensions des retraités.
C'est pourquoi nous voulons, à travers cet amendement, souligner l'importance d'une réflexion sur l'évolution des profits et bénéfices des entreprises et la part consacrée à l'investissement, l'emploi et la formation.
M. le président. L'amendement n° 313, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution de l'emploi à temps partiel, de l'emploi des jeunes et des emplois en contrat à durée déterminée et des modes de recours à ces emplois. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Toujours dans le même esprit, nous souhaitons confier une mission de réflexion supplémentaire au COR.
Le dernier rapport du Conseil d'analyse économique, qui vient d'être rendu public, montre que, du point de vue de la compétitivité et de l'attractivité de ses territoires, la France est bien placée sur le plan international ; pour les investissements internationaux, elle viendrait au deuxième rang, tout de suite après la Grande-Bretagne.
Le Gouvernement continue sur sa voie et tire l'ensemble des coûts salariaux vers le bas. Il y a là des différences de philosophie qui nous opposent au Gouvernement, mais cela ne date pas d'aujourd'hui. Nous constatons que cela nous mène tout droit vers la déflation, à travers une politique sans répit de baisse des charges sociales.
S'agissant de l'emploi, la hausse du chômage de ces derniers mois, qui vient de se confirmer une nouvelle fois, la multiplication des plans sociaux et des licenciements, sont pourtant révélatrices, somme toute, de l'inefficacité d'une telle politique.
Il est donc légitime de se demander au bénéfice de qui est menée une telle politique de diminution des contributions qui permettaient d'alimenter financièrement notre système de protection sociale.
Le phénomène le plus nouveau ces derniers temps est, non sans contradiction, d'ailleurs, l'explosion des inégalités, l'explosion de la précarité, l'émergence chaque jour confortée de la grande pauvreté et une exclusion contre laquelle il est de plus en plus difficile de lutter. Ainsi la France aura plusieurs visages...
Il est donc urgent de mener une réflexion sur l'évolution de l'emploi à temps partiel, de l'emploi des jeunes et des emplois en contrat à durée déterminée ainsi que sur les modes de recours à ces formes d'emplois.
Et il faut parler aussi des salaires. En effet, nous nous sommes fixé comme objectif en matière de retraite de garantir une sorte de minimum déterminé par référence au SMIC ; nous avons ainsi pu parler de 85 % du SMIC. Or nous constatons que de plus en plus de Françaises et de Français ont des rémunérations inférieures au SMIC.
Donc, il nous semble qu'une étude détaillée de l'impact de la flexibilité du travail sur notre système de protection sociale s'imposerait.
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution des durées d'assurance ou de services, des durées moyennes de bénéfices des pensions de retraites selon les branches d'activités et les niveaux socio-professionnels. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous devons disposer, grâce au COR, et si nous nous y prenons bien, de toutes les informations possibles pour savoir exactement comment la situation évoluera pour les retraités.
La réforme dont nous débattons depuis quelques jours affiche, en effet, un certain nombre d'objectifs, mais elle en a également d'autres inavoués, un peu moins honorables, qui sont bel et bien là malgré tout.
Il est évident que les durées d'assurance sont en moyenne relativement différentes d'un secteur professionnel à l'autre, comme les durées pendant lesquelles les assurés percevront effectivement une pension ou une retraite.
On sait, par exemple, qu'il y a cinq à dix ans d'écart dans la durée de perception d'une pension selon que l'on est agriculteur, ouvrier sidérurgiste ou que l'on a passé sa vie comme patron de l'industrie et du commerce ou cadre supérieur.
Dans ce contexte, nous devons nous demander comment les choses évolueront sur la durée.
Nous ne croyons pas en réalité que l'allongement de la durée de cotisation constitue la solution aux problèmes qui se posent à nous en matière de retraites.
Nous pensons, en revanche, que la hausse tendancielle de l'âge de départ à la retraite conduira non pas à figer, mais à réduire la période durant laquelle les assurés pourront bénéficier du versement de leur pension ou de leur retraite.
Nous ne pouvons donc nous priver d'une analyse critique des effets des différentes mesures contenues dans le présent projet de loi, quant aux durées effectives d'assurance et aux durées de perception des retraites.
M. le président. L'amendement n° 315, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution du nombre d'assurés en activité au moment de la liquidation de leur pension de retraite. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. A l'heure actuelle, moins de la moitié des salariés du secteur privé sont encore en activité au moment de la liquidation de leur retraite.
A titre d'exemple, le premier pic de cessation d'emploi pour les hommes se situe à l'âge de 58 ans, soit deux ans avant l'âge pivot de 60 ans.
Cet amendement vise donc à donner au COR le pouvoir de mener une réflexion approfondie sur l'évolution du nombre d'assurés en activité au moment de la liquidation de leur pension de retraite.
Bien entendu, il aurait été plus logique, et opportun, monsieur le ministre, qu'une telle réflexion s'engage au sein du COR avant même la présentation de votre projet de loi. Il ne fait aucun doute que cela nous aurait permis d'avoir à notre disposition, et de mettre à la disposition des Françaises et des Français, un document élaboré au sein d'un établissement pluraliste à vocation impartiale.
Cela aurait également permis d'éviter que ne figurent dans le projet de loi des dispositions injustes et pénalisantes pour les salariés, notamment au regard de la situation de l'emploi et des aménagements qu'il convient de lui apporter.
Vous parlez, monsieur le rapporteur, d'un « scénario volontariste de baisse du chômage ». Or à aucun moment, le II de l'article 6 ne fait référence à l'emploi des femmes - nous aurons l'occasion d'y revenir -, bien que je m'interroge fortement sur le volontarisme que vous semblez vouloir afficher.
Vous nous parlez de l'évolution démographique et de l'apparition d'une pénurie de main-d'oeuvre. Sans doute oubliez-vous que cet état de fait n'est pas nouveau et que rien n'est fait pour y remédier au fond. Regardez ce qui se passe dans les hôpitaux ou encore dans l'hôtellerie-restauration, pour ne prendre que ces deux exemples !
S'agissant du taux de l'emploi des seniors, les mesures que vous proposez n'ont d'autre objet que de liquider le principe du départ à la retraite à 60 ans. En contrepartie, vous vous contentez de lancer un appel aux patrons pour qu'ils fassent preuve de bonne volonté - et l'on sait s'ils en ont ! - et embauchent des salariés âgés de plus de 50 ans.
L'étude qui pourrait être menée par le COR, si cet amendement était adopté, permettrait précisément d'établir un comparatif et une analyse de l'évolution de l'emploi pour les personnes qui approchent de la retraite. C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 316, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension de retraite. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. L'amendement que je présente maintenant, et qui est au coeur de la discussion des questions soulevées par le présent projet de loi, porte sur la nécessité de mener une réflexion sur l'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension de retraite.
En effet, deux problèmes se posent : d'une part, l'entrée des jeunes sur le marché de l'emploi et, d'autre part, la cessation prématurée d'activité des salariés entre 50 ans et 60 ans.
L'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension est une question importante qu'il conviendra que traitent les rapports fournis par le Conseil d'orientation des retraites, qui a déjà apporté des éléments très sérieux.
Si l'on en croit certains des objectifs affichés dans le projet de réforme, il s'agit notamment de faire en sorte que les seniors puissent exercer plus longtemps une activité professionnelle. M. le ministre a rappelé que, si l'on pouvait, par le biais de ce projet de loi, obtenir que l'âge moyen du départ à la retraite passe de 57 ans et demi à 59 ans, ce serait un premier pas, et le texte que nous discutons vise à encourager la remontée du taux d'activité des personnes âgées de 55 ans à 60 ans.
Nous avons déjà eu un débat contradictoire sur ce point. Mais, en ce qui concerne les préretraites, les entreprises ne sont pas prêtes à modifier leur attitude. L'actualité est plus que jamais faite des plans de restructuration, c'est-à-dire des licenciements massifs de personnes qui ont un savoir-faire. Cet état de fait aura des conséquences graves sur le fonctionnement des entreprises, qui, de toute évidence, seront en difficulté lorsque, pour honorer des commandes éventuelles, elles devront former des salariés plus jeunes. De plus, si les plans de restructuration se font plus vigoureux que jamais, les départs pour cause de pénibilité seront massifs.
L'âge moyen de 59 ans pour la fin d'activité apparaît donc comme un objectif qui, de toute évidence, mérite que l'on s'y attarde, et nous souhaitons vivement que la question soit approfondie pour que l'on puisse, notamment, avoir une vision exacte des modifications.
Ce problème sera certainement très difficile à traiter tout au moins ne pourrons-nous en attendre de résultats qu'à moyen terme, car il faudra préalablement mettre en place une politique de formation initiale, certes, mais aussi une politique de formation continue qui porte sur l'ensemble du cursus professionnel et ne soit pas la traduction d'un engagement du bout des lèvres de la part de nombreuses entreprises. On sait notamment que, dans les PME, il est très difficile d'assurer cette formation professionnelle.
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il donne son avis sur tout projet du Gouvernement concernant notre système de retraites. Cet avis donne lieu à un débat au Parlement. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Comme mes collègues, je continue à faire des propositions concernant les missions du COR.
L'amendement n° 301 vise, dans un souci de démocratie, à favoriser l'information, la concertation et le débat en matière de réforme des retraites en donnant au COR une dimension supplémentaire.
En effet, le Conseil d'orientation des retraites trouve sa raison d'être dans un rôle essentiel, celui d'éclairer le législateur dans son travail de réforme de notre système de retraite pour assurer la consolidation du système par répartition.
C'est pourquoi le texte portant création du COR assigne trois missions principales à cette institution : décrire la situation financière actuelle et les perspectives des différents régimes en tenant compte du dernier état des évolutions économiques, sociales et démographiques ; apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme des régimes ; veiller à la cohésion du système de retraite par répartition en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité tant entre les retraités qu'entre les différentes générations.
Le Conseil est là pour veiller à ce que les évolutions se déroulent dans une cohérence d'ensemble et dans la continuité. Il est attentif à ce qu'elles soient conformes à ce que les conditions générales autorisent, je pense en particulier à la situation de l'emploi. On a vu en effet que l'intégration de l'hypothèse d'un retour au plein emploi, si elle ne résolvait pas véritablement les difficultés dans le long terme, pouvait à court et moyen terme apporter des éléments de jugement différents.
Le COR veille donc à ce que chacun contribue aux efforts et en bénéficie équitablement. Son rôle est également d'assurer la transparence des évolutions engagées, et ce non seulement à l'égard des acteurs immédiatement concernés, les partenaires sociaux ou les responsables publics amenés à prendre des décisions, mais surtout à l'égard de nos concitoyens, qui doivent pouvoir disposer d'une information librement et largement débattue.
Dans l'accomplissement de cette mission, la composition et la place institutionnelle du Conseil d'orientation des retraites sont ses premiers atouts : de par les mandats et l'expérience professionnelle de ses membres, il est habilité à parler au nom tant du secteur privé que du secteur public, ce qui le met en mesure de veiller à préserver la cohérence d'ensemble du système par répartition.
En effet, sa composition permet au Conseil d'orientation des retraites de représenter l'ensemble des acteurs dont les discussions, les négociations ou les décisions contribueront à garantir l'avenir de notre système de retraite.
Le COR doit donc assurer un rôle de vigie et aura à cette fin une vue d'ensemble sur les perspectives attendues, vision globale qui favorisera la cohérence de la démarche engagée. C'est pourquoi il est important que le COR émette un avis sur les projets de réforme du Gouvernement et que cet avis soit transmis au Parlement.
M. le président. L'amendement n° 317, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les missions du Conseil donnent lieu à des rapports transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise, dans un souci d'information, à prévoir que les travaux du COR seront portés à la connaissance du plus grand nombre, notamment des parlementaires. Cela doit être particulièrement vrai des travaux portant : sur les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; sur la réflexion sur le financement des régimes de retraite et sur le suivi de son évolution ; sur l'information sur le système de retraite et sur les effets des réformes conduites pour garantir son financement ; enfin, sur le suivi de la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et sur l'évolution tant du niveau de vie des actifs et des retraités que de l'ensemble des indicateurs des régimes de retraite, parmi lesquels les taux de remplacement.
La rédaction de l'amendement me paraît suffisament explicite pour que je ne m'attarde pas. (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Guy Fischer. Comme vous l'avez noté, j'ai synthétisé mes développements !
M. Jean-Pierre Fourcade. C'était parfaitement clair !
M. Guy Fischer. Vous l'avez remarqué, monsieur Fourcade et je vous en remercie. J'ai pris exemple sur vous ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 318, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ses recommandations ou propositions sont transmises aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Je vais essayer d'imiter mon ami et camarade Guy Fischer ! (Approbation sur les travées de l'UMP.)
Monsieur le ministre, vous qui parlez de dialogue social, de transparence, de souci de la concertation et de l'échange, vous devriez accepter notre amendement.
Plusieurs axes d'étude et d'analyse doivent être suivis par le COR. Ainsi celui-ci doit notamment décrire les évolutions et les perspectives à moyen et à long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques ; apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite et suivre son évolution ; participer à l'information sur le système de retraite et les effets des réformes conduites pour garantir son financement ; suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution du niveau de vie des actifs et des retraités.
Nous proposons donc que ces études donnent lieu à des rapports et à des comptes rendus qui soient transmis « aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale », comme « aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat ».
Enfin, pour être complets, nous proposons que les parlementaires soient récipiendaires de ces rapports par le biais des présidents de groupe.
Je ne comprendrais pas, monsieur le ministre, que vous opposiez un refus à cet amendement, qui vise à prendre en compte le statut législatif du Conseil d'orientation des retraites tout en précisant, bien sûr, ses missions.
M. le président. L'amendement n° 209, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans le huitième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "répondre aux objectifs précédemment définis" par les mots : "faciliter la mise en oeuvre des objectifs et principes énoncés aux articles 1 à 5 de la loi n° ... du ... portant réforme des retraites ainsi qu'aux trois premiers alinéas de l'article L. 161-17". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Le texte actuel de l'article 6 prévoit que le Conseil peut formuler toute proposition permettant de répondre « aux objectifs précédemment définis », rédaction qui fait référence aux missions du Conseil.
La commission, afin de respecter l'esprit de la compétence générale du COR, a tenu à préciser que celui-ci peut formuler toute proposition de nature à faciliter la mise en oeuvre des principes et objectifs essentiels prévus dans la réforme et qui figurent dans le présent projet de loi.
Ce sont, à l'article 1er, la sauvegarde de la retraite par répartition ; à l'article 2, le principe de contributivité et de solidarité ; à l'article 3, l'équité entre les assurés ; à l'article 4, la garantie d'une pension minimale ; à l'article 5, la préservation du temps de travail et des temps de retraite ; enfin, inscrit à l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, le droit à l'information des assurés.
M. le président. L'amendement n° 319 rectifié, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le troisième alinéa du 5° du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Il s'agit d'un amendement de coordination. L'amendement n° 302, présenté par M. Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le neuvième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après le mot : "parlementaires", ajouter les mots : "dont un ou plusieurs élus de l'outre-mer". »
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. M. Paul Vergès étant malheureusement absent, je défendrai cet amendement, qui porte sur l'outre-mer.
M. Vergès est intervenu dans la discussion générale et a déjà présenté un amendement pour attirer l'attention sur les craintes que suscite outre-mer le projet de réforme, en particulier dans l'île de la Réunion.
En effet, comme il l'a expliqué, au contraire du déséquilibre prévisible en France métropolitaine, d'ici à 2030, entre le nombre des actifs cotisants et celui des retraités, de nombreuses régions d'outre-mer, l'île de la Réunion en particulier, connaîtront une augmentation très importante de leur population active.
Si la population active devait s'accroître dans les mêmes proportions en France métropolitaine et à la Réunion, comment feriez-vous, monsieur le ministre pour justifier votre réforme ? Il faut se mettre à la place des Réunionnais, à qui l'on va expliquer que le vieillissement de la population et la baisse du nombre des actifs imposent la modification des régimes de retraite alors qu'ils connaissent une situation démographique exactement inverse !
Monsieur le ministre, je ne suis pas fédéraliste, et je pense comme vous que la solidarité s'exerce à l'échelle de l'ensembre de la communauté nationale. Néanmoins, il me paraît intéressant, voire indispensable que la spécificité de la situation démographique d'outre-mer soit prise en compte par le Conseil d'orientation des retraites.
L'amendement de M. Vergès, qui vise à élargir la composition du Conseil d'orientation des retraites aux élus d'outre-mer, a un objet très modeste, et je ne pense pas que vous puissiez vous y opposer.
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'antépénultième alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil d'orientation des retraites est assisté par un secrétaire général nommé par le Premier ministre. Le secrétaire général assure, sous l'autorité du président, l'organisation des travaux du Conseil ainsi que l'établissement de ses rapports. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Les missions essentielles du COR consistent dans le suivi régulier de notre système d'assurance vieillesse, dans l'établissement, par exemple, de diagnostics, dans la formulation de recommandations et, bien sûr, de propositions de réforme.
L'excellence du travail qu'il a accompli depuis sa création est reconnue de tous. Dans son premier rapport, remis en décembre 2001, il a su démontrer qu'une réflexion sur les retraites ne pouvait pas ne pas être étroitement associée à une autre réflexion portant sur le travail et sur l'emploi.
Le COR est donc un socle qui, loin d'avoir une existence précaire, peut servir de base à notre réflexion et la nourrir dans le long terme, à la condition bien sûr qu'il soit doté de moyens, son efficacité reposant certes sur sa pérennité, mais aussi sur le renforcement de son rôle de laboratoire d'idées.
Il semble donc cohérent, il semble même souhaitable de lui donner les moyens d'assurer ses missions, et tel est l'objet de l'amendement n° 303.
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'antépénultième alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les crédits nécessaires au fonctionnement du Conseil d'orientation des retraites sont inscrits au budget des services du Premier ministre. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Nous nous félicitons de la méthode de fonctionnement du Conseil d'orientation des retraites, que ses membres eux-mêmes ont déterminée dès leur première réunion plénière, le 3 juillet 2000.
Rendue possible par un important travail en réseau, la mobilisation des administrations et autres organismes, par exemple des caisses de retraite ou de la Caisse des dépôts et consignations, est essentielle, car elle contribue largement à alimenter la réflexion du Conseil et à l'identification des thématiques principales autour desquelles ses travaux se sont organisés.
Après la publication de son premier rapport, les travaux du Conseil ont été préparés, tout au long de l'année 2002, par deux groupes de travail, portant l'un sur le thème « Age et travail », l'autre sur le thème « Prospectives et inégalités ».
L'excellence du travail fourni par cette institution, que vous légitimez par la loi, monsieur le ministre - ce que nous approuvons -, suppose malgré tout que les financements soient à la hauteur des investissements matériels et humains et de l'énergie qu'elle consacre à la réalisation des missions qui lui sont confiées.
Nous proposons donc que la logique de financement qui a prévalu à sa naissance soit maintenue : créé par le Premier ministre de la dernière législature, le Conseil d'orientation des retraites a été financé sur les budgets des services du Premier ministre. Inscrivons ce point dans la loi !
M. le président. L'amendement n° 210, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du dixième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "de ces administrations", insérer le mot : ", organismes". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 210 et donner l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements.
M. Dominique Leclerc. L'amendement n° 210 est un amendement de précision.
Il est prévu à l'article 6 du projet de loi d'officialiser les relations de travail entre le Conseil et les différents régimes de retraite, tant il est vrai que, si ces relations existent déjà de service à service, la communication institutionnelle d'informations n'était pas inscrite dans la loi.
L'article 6 a donc pour objet d'introduire pour les régimes de retraite et pour l'UNEDIC l'obligation légale de fournir au COR les informations, essentiellement d'ordre statistique, pour lesquelles celui-ci leur adresse une demande. En revanche, il limite aux seules administrations de l'Etat et aux services des pensions le champ des organismes auxquels le COR peut faire connaître préalablement ses besoins en matière statistique.
Il serait bien évidemment dommage que le COR ne puisse communiquer aux caisses des régimes concernés un état prévisionnel des données statistiques dont il pourrait avoir besoin. Le présent amendement vise donc à donner compétence au COR pour faire connaître à l'avance ses besoins aux organismes mentionnés, afin que ceux-ci puissent les intégrer dans leurs études statistiques.
J'en viens à l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle.
Après vous être félicités des bienfaits du COR, dès le premier amendement, vous en demandez la suppression,...
Mme Nicole Borvo. Nous demandons la suppression de l'article, pas celle du COR !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... vous l'enterrez !
Vous comprendrez donc que la commission émette un avis défavorable sur l'amendement n° 296.
Malgré tout, après avoir enterré le COR, vous le réanimez à l'amendement n° 306, qui apporte des précisions quant à ses missions.
La commission est favorable à votre suggestion.
Elle est en revanche défavorable à l'amendement n° 297.
Le COR est un organisme d'études ou de propositions. Il n'a pas pour fonction de garantir ou de veiller sur le système de retraite.
L'amendement n° 298 introduit des dispositions trop précises qui font perdre son caractère général à la loi. La commission y est donc défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 299, la commission est défavorable à la prise en compte de la valeur ajoutée dans les cotisations sociales. Elle a estimé en outre que l'objectif de l'amendement était satisfait par le texte, puisque le COR a une compétence globale de réflexion sur l'ensemble des possibilités de financement des régimes de retraite. Elle s'oppose donc à ce que le conseil devienne un organisme de réflexion sur la réforme des cotisations sociales en général, c'est-à-dire les cotisations familiales, maladie, etc.
L'amendement n° 1096 a été accepté par la commission, car la précision qu'il introduit est intéressante.
L'information générale en matière d'assurance vieillesse est une compétence du ministère des affaires sociales aux termes de l'article R. 112-2 du code de sécurité sociale, qui prévoit que ce ministère prend toutes mesures utiles afin d'assurer l'information générale des assurés sociaux avec le concours des organismes de sécurité sociale. Bien évidemment, la mission du COR s'exerce parallèlement à l'action du ministre. Le COR ne reçoit à ce titre aucune instruction. Cet organisme créé, je le répète, afin de servir d'alibi au gouvernement Jospin, gagne ainsi son indépendance.
La commission est défavorable à l'amendement n° 305, car elle estime qu'il s'agit d'une redondance.
S'agissant de l'amendement n° 300, la commission a estimé qu'il pouvait être intéressant de prévoir dans la loi que le COR rédige un rapport périodique, ce à quoi tend l'amendement n° 317. En revanche, elle ne souhaite pas que le conseil rédige un rapport spécifiquement dédié à l'égalité en fonction de la pénibilité au travail.
Elle a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 300.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 307, car le COR s'est déjà prononcé.
Quant à l'amendement n° 308, il est satisfait par le 5° de l'article 6, qui prévoit le suivi de l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 308, comme sur l'amendement n° 309, qui, lui, est satisfait par le 3° de l'article 6.
Sur l'amendement n° 310, la commission émet également un avis défavorable, car le texte prévoit la faculté pour le COR, s'il le souhaite, d'étudier cette piste, à laquelle la commission est par ailleurs fondamentalement hostile.
S'agissant de l'amendement n° 311, rien n'empêche, là encore, le COR de réfléchir sur ce thème. La commission y est donc défavorable.
Les amendements n°s 312 et 313 sont totalement étrangers aux missions du conseil : avis défavorable.
De même, la commission est défavorable à l'amendement n° 314, car rien n'empêche le COR de réfléchir sur ce sujet.
La rédaction de l'amendement n° 315 n'étant, de même que son objet, pas claire, la commission a émis un avis défavorable.
L'amendement n° 316 est satisfait par le 1° de l'article 6 ; la commission a émis un avis défavorable.
Elle a également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 301 en raison de son caractère très lourd. Tout projet de loi touchant au système de retraite devrait en effet être préalablement examiné par le COR. Ainsi, il faudrait soumettre les projets de loi de financement de la sécurité sociale à l'avis du COR puisqu'ils comportent un volet sur l'assurance vieillesse.
En revanche, la commission serait prête à accepter l'amendement n° 317, sous réserve d'une rectification : au lieu de la transmission aux présidents des commissions et des groupes des deux assemblées ne serait plus prévue que la transmission au « Parlement », terme plus général.
La commission n'a pas retenu l'amendement n° 318, qu'elle estime superfétatoire. En effet, le COR établit des rapports qui sont transmis au Parlement. En outre, ses avis sont rendus publics.
La commission n'a pas non plus retenu l'amendement n° 302 de notre collègue Paul Vergès, d'une part, parce que, par principe, les parlementaires représentent l'intégralité de la collectivité nationale, qui inclut évidemment l'outre-mer, d'autre part, parce que le distinguo introduit est dangereux, puisqu'il justifierait à l'avenir une représentation à part, dans tous les organismes extraparlementaires, des départements et territoires d'outre-mer.
L'amendement n° 303 relève du décret : l'avis de la commission est défavorable.
Quant à la nomenclature budgétaire, elle ne relève pas du présent projet de loi. La commission est donc défavorable à l'amendement n° 304.
Enfin, elle est défavorable à l'amendement n° 319 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le COR a fait un très bon travail...
M. Claude Domeizel. Ah !
M. François Fillon, ministre. ... en permettant notamment l'établissement de ce constat partagé qui n'existait pas il y a quelques années et qui a certainement facilité l'acceptabilité de la réforme.
Le Gouvernement l'admet d'ailleurs depuis le début, et je crois que cela démontre que nous ne sommes pas dogmatiques : nous sommes prêts, nous, à reconnaître ce que nos prédécesseurs ont fait de positif et à l'intégrer dans notre projet.
M. Claude Domeizel. Très bien !
M. François Fillon, ministre. J'ai en revanche souvent le sentiment que l'opposition dénigre l'ensemble de nos propositions alors même qu'elle aurait présenté dans les mêmes termes nombre d'entre elles si elle avait été au pouvoir.
Je crois d'ailleurs que c'est aussi ce qui explique que nous réussissions aujourd'hui à présenter cette réforme sans provoquer, contrairement à ce qui se dit en permanence sur les travées de la gauche, un rejet global de la part de l'opposition.
Mme Nicole Borvo. C'est absolument faux !
M. François Fillon, ministre. Le mouvement social auquel nous avons assisté était certes important, et le Gouvernement le respecte, mais il était strictement limité au secteur public, ce qui est naturel puisque davantage d'efforts lui étaient demandés du fait qu'il n'avait pas connu de réforme depuis très longtemps. Or on sait très bien que si le mouvement s'était généralisé à l'ensemble du secteur privé le Gouvernement n'aurait pas pu conduire la réforme !
Je dis depuis le début que, si nous avons pu obtenir ce résultat, c'est aussi parce que, depuis le Livre blanc de Michel Rocard, en passant par la réforme d'Edouard Balladur, par la tentative ratée de 1995 et par les initiatives prises par le gouvernement de Lionel Jospin, chacun à sa façon a permis - même si certains l'on fait de manière plus significative que d'autres - que ce dossier avance.
La réforme n'est pas celle du COR, et jamais le Gouvernement n'a prétendu que le COR avait proposé un projet clés en main, car ce n'est pas son rôle. En revanche, la réforme s'inspire très largement des orientations du COR. Ce n'est d'ailleurs pas moi qui le dis, c'est la présidente du COR elle-même, Mme Yannick Moreau, qui déclarait à l'AFP, le 2 juin 2003, que « les orientations qui ont été décidées à l'unanimité par le Conseil d'orientation des retraites se retrouvent très largement dans le projet gouvernemental de réforme des retraites », et Mme Moreau citait notamment l'emploi des salariés âgés.
L'article 6 ne revient en rien sur les compétences du COR, bien au contraire, puisque celui-ci continuera non seulement à accomplir les missions pour lesquelles il a été créé, mais aussi à bénéficier de crédits de fonctionnement, et c'est toujours un secrétaire général qui, sous l'autorité de la présidente, assurera l'établissement des rapports.
Toutes les craintes qui viennent d'être évoquées sur l'amputation des compétences du COR n'ont donc strictement aucun sens, mais je voudrais surtout faire remarquer au Sénat que cet article 6 a été voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale.
M. Claude Domeizel. C'est vrai !
M. François Fillon, ministre. Or, ici, depuis deux heures, on répète inlassablement sur certaines travées que l'article 6 vise à amputer les compétences du COR : c'est à n'y rien comprendre !
Je souhaite que le COR poursuive sa mission. Je souhaite qu'il soit renforcé par l'arrivée du MEDEF, arrivée que le MEDEF vient d'ailleurs d'annoncer, et je m'en réjouis, car elle permettra à l'ensemble des partenaires sociaux de participer désormais à cette mission.
En conséquence, mesdames, messieurs les sénateurs, dans la mesure où, compte tenu du fait que cet article a été adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale et compte tenu des éléments que je viens d'évoquer, je ne comprends pas qu'autant d'amendements, notamment de suppressions, aient été déposés, je vais vous demander, en vertu de l'article 42, alinéa 7, du règlement du Sénat, de vous prononcer par un seul vote sur l'article 6, en ne retenant que les amendements de la commission, à savoir les amendements n°s 205, 206, 207, 208, 209 et 210.
Mme Nicole Borvo. C'est incroyable !
M. Guy Fischer. Et les nôtres, vous ne les retenez pas ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, compte tenu de ce que vient de dire M. le ministre, non pas sur l'adoption à l'unanimité de l'article 6 à l'Assemblée nationale, mais sur nos amendements, je vous demande une suspension de séance de cinq minutes.
M. le président. Si cela peut assurer ensuite la sérénité des débats, je vous l'accorde avec plaisir, madame Borvo.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, pour explication de vote sur l'article 6, modifié par les amendements n°s 205, 206, 207, 208, 209 et 210.
M. Jean-Pierre Schosteck. Je voudrais dire, au nom de mon groupe, que la demande de vote bloqué formulée par M. le ministre nous paraît tout à fait bienvenue. Voilà plus de deux heures que nous débattons d'un article qui, je le rappelle, a fait l'objet d'un vote unanime à l'Assemblée nationale. Il serait dommage que le Sénat ne suive pas ce bel exemple, alors que, souvent, nous sommes des précurseurs.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. La parole est M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Je me suis exprimé tout à l'heure sur la création et le fonctionnement du Conseil d'orientation des retraites. J'ai même, à cette occasion, interpellé M. Leclerc, provoquant son ire, ainsi que celle, mémorable, de M. Chérioux !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas l'interpellation qui m'a mis en colère, c'est ce que vous vous êtes permis de dire !
M. Claude Domeizel. Le 13 novembre 2001, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Leclerc avait tenu les propos suivants :
« Après avoir annoncé, à l'automne 1999, des "décisions" du Premier ministre et parce que ces "décisions" se sont transformées en "orientations", il a fallu se résoudre à créer une commission, le Conseil d'orientation des retraites, le COR. Dès lors, le discours tourne en boucle, la concertation des années 2000-2001 succède à la concertation des années 1998-1999. »
Voilà comment M. Leclerc percevait le COR, à l'époque ! (M. le rapporteur s'esclaffe.) Il poursuivait en ces termes :
« Du reste, le rôle que doit jouer cet organisme reste flou : s'agit-il de poser un diagnostic, d'engager un dialogue ou d'élaborer des décisions ? Le rapport annexé au projet de loi utilise l'expression "diagnostic partagé". »
Quand il s'exprimait ainsi à la tribune, M. Leclerc connaissait la teneur du décret créant le Conseil d'orientation des retraites. Or l'article 6 ne fait que reprendre celui-ci ! Je me réjouis qu'il ait changé d'avis depuis 1999, et que la majorité sénatoriale encense aujourd'hui ce qu'elle dénigrait hier !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous avons été convaincus par le rapport !
M. Claude Domeizel. J'ai déjà indiqué, au nom du groupe socialiste, quelle était notre position s'agissant du COR. Cette instance nous semble devoir jouer un rôle indispensable au regard de l'évolution future de notre système de retraites, et nous voterons donc sans hésitation l'article 6. (M. Jean-Pierre Schosteck rit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je ne voudrais pas allonger le débat, mais nous devons nous mettre d'accord. M. Domeizel a rappelé des propos que j'ai tenus voilà quelques années.
M. Claude Domeizel. Vous étiez dans l'opposition, à l'époque !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Monsieur Domeizel, j'ai eu la courtoisie de vous écouter sans vous interrompre. Il me serait agréable que vous adoptiez la même attitude !
Quoi qu'on en dise, la création du COR a tout de même servi d'alibi au gouvernement d'alors et à sa majorité. J'ai expliqué pourquoi.
Cela étant, on ne peut nous accuser d'immobilisme. Mme Borvo, tout à l'heure, m'a reproché de façon très cinglante de faire preuve d'un dogmatisme effrayant et d'être incapable de changer d'avis.
Mme Nicole Borvo. C'est vous qui avez dit que vous ne changiez jamais d'avis ! Ce n'est pas moi !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Le mot « dogmatisme », de sa part, m'a paru succulent !
Les choses ont évolué, mes chers collègues. Les rapports, les avis sur le COR ont été suivis d'une réforme, et je vous invite, à cet égard, à vous référer à la page 34 de mon rapport :
« A bien des égards, le COR a pu être considéré à l'origine comme une nouvelle commission destinée à justifier une absence de décision. Mais, à l'évidence, il a acquis au fil du temps une véritable crédibilité. » (M. Claude Domeizel approuve.)
Nous avons entendu exprimer des opinions différentes, parfois opposées, et ces confrontations, dans le bon sens du terme, ont permis une certaine maturation. Aujourd'hui, le courage et le sens des responsabilités du Gouvernement permettent à celui-ci de présenter un projet de réforme qui, somme toute, satisfait l'ensemble des membres de la majorité de cette assemblée. Nous avons tout de même le droit de le dire et de voter en conséquence ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. le président de la commission des affaires sociales applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le rapporteur, vous vous contredisez, mais je m'en félicite. Alors que vous aviez affirmé tout à l'heure que vous ne changiez jamais d'avis, vous venez précisément de le faire sur cette question. Dont acte !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Les circonstances ont changé !
Mme Nicole Borvo. Je déplore vraiment que le Gouvernement ait demandé un vote bloqué sur l'article 6.
Pour notre part, nous considérons que la rédaction de cet article restait en deçà de la teneur du décret portant création du COR. Nous pensions d'ailleurs qu'il serait souhaitable d'étendre les compétences de cet organisme, et avons donc formulé des propositions en ce sens, ce qui est bien légitime.
A cet égard, j'observe que M. le rapporteur a émis un avis favorable sur les amendements n°s 306 et 317, qui visent précisément à élargir les compétences du COR. Je regrette toutefois qu'il n'ait pas retenu notre proposition de faire siéger un élu d'outre-mer au sein de ce dernier. En tout état de cause, M. Leclerc nous a quelque peu rassurés en nous affirmant que, en définitive, le COR serait doté des compétences que nous souhaitions lui voir attribuer.
Cela étant, je regrette que M. le ministre, afin sans doute d'accélérer le débat, ait demandé un vote bloqué, sans même retenir les amendements n°s 306 et 317, que M. le rapporteur avait pourtant approuvés. Cela ne correspond pas à ma conception du débat.
Par conséquent, quel qu'ait pu être le vote à l'Assemblée nationale, nous nous abstiendrons, pour notre part, sur l'article 6.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix, par un seul vote, l'article 6, modifié par les amendements n°s 205, 206, 207, 208, 209 et 210.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
197
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 295 |
Pour | 295 |
Le Sénat a adopté à l'unanimité.