compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures dix.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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CANDIDATURES À UN organisme extraparlementaire

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles.

Les commissions des finances et des affaires sociales ont fait connaître leurs candidats.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

3

Questions orales

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

J'informe le Sénat que la question orale n° 617 de M. Daniel Reiner est retirée, à la demande de son auteur, de l'ordre du jour de la séance du mardi 1er février 2005.

fonctionnement des garderies périscolaires

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 616, adressée à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, en application du décret du 3 mai 2002 relatif à la protection des mineurs à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels et des loisirs, le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche a pris un arrêté en date du 21 mars 2003 fixant les titres et diplômes permettant d'exercer les fonctions d'animation et de direction des centres de vacances et de loisirs.

Cet arrêté prévoit que, jusqu'au 1er septembre 2005, dans les centres de loisirs accueillant moins de cinquante mineurs, y compris les garderies périscolaires, les fonctions de direction peuvent être encore exercées par des personnes âgées de vingt et un ans au moins, titulaires du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateurs, le BAFA, ou de l'un des diplômes admis en équivalence, et justifiant d'une expérience d'animation en centres de vacances ou en centres de loisirs.

Par conséquent, à compter du 1er septembre 2005, ces centres accueillant moins de cinquante enfants devront être dirigés au minimum par une personne titulaire du brevet d'aptitude aux fonctions de direction, le BAFD, d'un diplôme équivalent ou stagiaire au titre du BAFD. Ainsi, la direction de ces structures, y compris les garderies périscolaires, ne pourra plus, comme c'est le cas actuellement, à titre transitoire, être assurée par des titulaires du BAFA ou d'un diplôme équivalent.

Cette nouvelle réglementation obligera donc les collectivités à revoir complètement l'organisation de leurs services, notamment au sein des centres de loisirs, mais surtout des garderies périscolaires, où les fonctions d'animation sont généralement assurées par des agents titulaires du grade d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles et en possession d'un BAFA.

Or il est important d'avoir à l'esprit que les garderies périscolaires ne fonctionnent pas au même rythme que les centres de vacances ou de loisirs.

A titre d'exemple, dans une commune de mon département qui dispose de deux structures de garderies périscolaires, il sera obligatoire de recruter deux agents titulaires d'un brevet d'aptitude aux fonctions de direction, BAFD, ou d'un diplôme équivalent, pour une activité régulière mais limitée à cinq jours par semaine : une demi-heure le matin et en fin de matinée le mercredi, et une heure et demie en fin d'après-midi les lundis, mardis, jeudis et vendredis.

Or, actuellement, les garderies périscolaires sont très couramment animées par des agents titulaires du seul BAFA, dont l'expérience auprès des enfants constitue un gage de bon fonctionnement et est unanimement appréciée.

Par conséquent, beaucoup de collectivités, petites ou moyennes, risquent de se trouver dans l'impossibilité de continuer à offrir à leurs administrés les services de garderies périscolaires, sauf à accroître une nouvelle fois leurs charges de fonctionnement.

Si nous sommes tous sensibles à l'impérieuse nécessité de prendre des mesures qui garantissent la protection des mineurs dans les centres de vacances, de loisirs et dans les garderies, je me permets d'attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité d'adopter également des dispositions réglementaires proportionnées et adaptées aux réalités locales.

A ce titre, pourriez-vous nous indiquer quelles mesures d'aménagement vous envisagez de prendre pour garantir le maintien et le bon fonctionnement de ces centres sans risquer de compliquer leur gestion, au moins en ce qui concerne les garderies périscolaires ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le sénateur, effectivement, à partir du 1er septembre 2005 et conformément au décret d'application de la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, le directeur d'un centre de loisirs sera tenu d'être titulaire du brevet d'aptitude aux fonctions de directeur de centres de vacances et de loisirs, le BAFD.

Jusqu'à cette date, les titulaires du seul brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur de centres de vacances et de loisirs peuvent diriger un centre de loisirs réunissant moins de cinquante enfants.

Vous en conviendrez, il s'agit là d'une mesure destinée à permettre aux jeunes enfants de bénéficier d'un encadrement qualifié. Mais nous devons veiller à ce que ce niveau de qualification ne conduise pas à la fermeture de garderies, notamment dans les zones à faible densité de population, retenant tout particulièrement votre attention.

C'est pour cette raison que ces dispositions ne concernent pas l'ensemble des accueils de mineurs et que je souhaite préciser les exceptions.

Une instruction ministérielle permet déjà l'exclusion de certaines garderies périscolaires du champ d'application de ce texte. Il s'agit notamment des accueils limités à la surveillance des enfants sans organisation d'activité, des études surveillées se déroulant après le temps scolaire ou de la pause méridienne.

En vue de la réforme du cadre législatif et réglementaire des accueils collectifs de mineurs, entreprise à la suite de la loi de simplification du droit adoptée le 9 décembre 2004, j'étudie la possibilité de donner un statut réglementaire à ces exclusions. Dans ces cas, les garderies périscolaires seraient ainsi explicitement exonérées de l'obligation de qualification des intervenants.

En ce qui concerne les centres de loisirs proprement dits, rien ne s'oppose dans les textes à une mise en place d'un centre sur plusieurs sites ; c'est encore l'exemple que vous avez cité. Mon ministère s'est engagé à faciliter la mise en place de tels accueils en milieu rural chaque fois que ce choix sera nécessaire, dans des conditions d'encadrement et de fonctionnement déterminées.

Dès aujourd'hui, il est possible de prévoir la constitution d'une équipe unique, encadrée par un directeur titulaire au minimum du brevet d'aptitude aux fonctions de directeur de centres de vacances et de loisirs. Cette personne devra disposer d'un temps suffisant pour coordonner l'action des différentes unités et se rendre sur les différents sites.

Enfin, pour les accueils de moins de cinquante enfants organisés par les communes qui ne pourraient relever des mesures précédentes, je ferai prochainement des propositions afin de permettre l'intervention des agents titulaires compétents de la fonction publique territoriale.

Voilà, monsieur le sénateur, de quoi rassurer non seulement les parents qui ont besoin de ces centres d'accueil, mais également les collectivités, qui pourront maintenir ces centres.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Je voudrais remercier M. le ministre des précisions qu'il a bien voulu apporter et qui clarifient la situation. Elles sont de nature à rassurer les différents acteurs : les parents, bien sûr, mais aussi les maires qui, en matière de garderie périscolaire, sont confrontés à une demande croissante.

Vos propositions, monsieur le ministre, concilient à la fois les impératifs de sécurité, sur lesquels nous devons, bien sûr, être très vigilants, et les conséquences financières et humaines de ces mesures, que nous ne pouvons pas ignorer.

Je me réjouis de votre projet, qui tend à exonérer les garderies périscolaires de l'obligation de qualification du BAFD pour les intervenants. Je me félicite de votre volonté de faciliter la mise en place en milieu rural de centres sur plusieurs sites avec un seul titulaire du BAFD, qui devra, bien sûr, se déplacer.

Ces mesures vont dans le bon sens et répondent à l'attente des élus en conciliant l'éthique et la réalité.

Baisse du nombre des agents de l'ONF dans le Gard

M. le président. La parole est à M. André Rouvière, auteur de la question n° 633, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.

M. André Rouvière. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité sur la baisse importante, inquiétante du nombre d'agents de l'Office national des forêts, l'ONF, dans le Gard, et certainement dans d'autres départements, hélas !

En effet, voilà seulement trois ans, onze agents de terrain s'occupaient dans les Cévennes de la gestion de plus de 12 000 hectares de forêt. Actuellement, ce nombre est tombé à six, pour une superficie qui s'est accrue de plus de 350 hectares de forêt non aménagée. D'autres suppressions de postes semblent devoir accompagner le départ en retraite de plusieurs agents.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne peux que souligner ce qui paraît relever de l'évidence : la difficulté quasiment insurmontable que va rencontrer le personnel restant pour gérer une forêt très importante et très sensible aux feux.

De plus, les emplois supprimés affaiblissent, une nouvelle fois, les communes rurales, car les familles touchées participent à l'activité économique.

Je vous demande, au nom du monde rural et au nom des élus, comment vous envisagez le maintien de l'activité de l'ONF dans les Cévennes gardoises. Comment allez-vous organiser et maintenir l'entretien de la forêt domaniale et, plus encore, l'entretien des forêts communales soumises au régime forestier ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Monsieur le sénateur, vous vous inquiétez de l'évolution du nombre d'agents de l'ONF dans votre département et de ses conséquences sur la gestion des forêts publiques gardoises. Je veux tout de suite vous rassurer sur l'intérêt que le Gouvernement porte à ces forêts.

L'Etat et l'ONF ont signé, le 22 octobre 2001, un contrat pluriannuel d'objectifs, qui fixe les grands axes de l'établissement pour la période 2001-2006, autour de trois thèmes : premièrement, adapter la gestion des forêts publiques à la situation et aux enjeux propres à chaque territoire et à chaque forêt, en prenant en compte l'équilibre des fonctions écologiques, économiques et sociales ; deuxièmement, conforter l'exemplarité de la gestion de la forêt publique, notamment sur le plan environnemental et contribuer au dynamisme économique de la filière bois ; troisièmement, renforcer la concertation avec les élus représentant les propriétaires de forêts relevant du régime forestier et les principaux acteurs locaux.

Depuis la signature de ce contrat d'objectifs, l'ONF s'est doté d'une nouvelle organisation territoriale fondée sur une réduction des échelons hiérarchiques, une plus grande autonomie et une plus large responsabilité accordées aux agents de terrain, ainsi que sur le souci de privilégier les relations avec les clients et les partenaires.

Parallèlement, une importante réforme statutaire des personnels fonctionnaires, mise en place en 2003, a conduit à la rénovation des statuts des personnels des corps de catégorie B et C de la filière technique et de catégorie C de la filière administrative. Cette évolution permet une requalification et une revalorisation des rémunérations, en contrepartie d'une amélioration de l'efficacité générale de l'établissement, obtenue grâce à une meilleure adéquation entre les fonctions et les statuts.

En s'appuyant sur cette panoplie, l'ONF doit être en mesure d'accroître de manière sensible son dynamisme et sa compétitivité, tout en maintenant un niveau de présence satisfaisant dans les forêts domaniales et communales et en renforçant les liens de ses agents avec les communes forestières.

Dans la mise en oeuvre de cette nouvelle organisation, l'ONF a veillé à ne pas provoquer de déséquilibre au sein des territoires ruraux, notamment en pourvoyant les postes les plus cruciaux, qu'ils soient vacants ou à créer. Un certain nombre de postes de « généralistes », notamment de terrain, ont été redéployés en postes de « spécialistes », afin de gagner en efficacité et en qualité du service rendu.

Une redistribution des moyens humains disponibles a ainsi été opérée, selon une organisation valorisant mieux les compétences individuelles des agents. Le maillage dense de l'ONF a pu être préservé grâce à la répartition sur le terrain de plus de 500 unités territoriales et spécialisées et le maintien des forestiers au plus près des espaces gérés.

Je précise, monsieur le sénateur, que, dans votre région, relevant de la direction territoriale Méditerranée, l'ONF est particulièrement présent, avec dix agences, dont une à Nîmes, cinquante-quatre unités territoriales et vingt-trois unités spécialisées, notamment dans l'aménagement des forêts, la gestion durable des espaces naturels et la défense des forêts contre les incendies, sujet que vous avez évoqué tout à l'heure.

Enfin, le directeur général de l'ONF a veillé, à chaque étape du processus de réorganisation, à ce qu'une concertation soit établie avec tous les acteurs concernés, tant au sein même de l'établissement qu'avec les élus, en particulier, avec les maires des communes forestières. Si tel n'avait pas été le cas dans votre département, je vous demanderais de me le faire savoir. Toutefois, à ma connaissance, cette concertation a eu lieu et a permis de faire les propositions que j'ai rappelées.

Cette évolution des effectifs, dans une organisation plus resserrée et plus efficace, a pour objet d'optimiser le service de l'ONF. Je ne crois pas qu'elle soit de nature à diminuer la qualité du service rendu, d'autant qu'elle s'accompagne d'une plus grande souplesse et de la mobilité d'un certain nombre de forestiers spécialistes. C'est la raison pour laquelle l'effectif antérieur et l'effectif actuel ne peuvent être comparés qu'en fonction de ces éléments.

Il est important de rappeler que l'Etat a, de son côté, respecté ses engagements en fournissant le soutien financier nécessaire à l'ONF, dont la situation a été très fragilisée par les tempêtes de décembre 1999. Des subventions exceptionnelles ont été versées par mon ministère, conformément aux termes du contrat d'objectifs : 75 millions d'euros en 2002, 60 millions d'euros en 2003 et 25 millions d'euros en 2004.

Je rappelle également que le versement compensateur, qui permet d'équilibrer le coût de gestion des forêts communales, a été maintenu sur la période. Cela équivaut à une prise en charge par l'Etat de près de 90 % des coûts de gestion du régime forestier.

Pour l'exercice 2005, 145 millions d'euros toutes taxes comprises au titre du versement compensateur ont été inscrits au budget du ministère de l'agriculture, soit un niveau équivalent à celui des années antérieures.

Plus globalement, qu'il s'agisse de la gestion des forêts communales avec le versement compensateur ou de la gestion des forêts domaniales avec les subventions d'équilibre après les tempêtes de 1999, l'Etat a respecté ses engagements en consacrant près de 200 millions d'euros chaque année - en 2002, 2003 et 2004 - pour assurer l'équilibre de la gestion des forêts publiques.

Monsieur le sénateur, qu'il s'agisse des questions financières et budgétaires, du soutien apporté à l'ONF, des compétences du directeur de l'ONF et de son conseil d'administration afin d'assurer une réorganisation valorisant les personnels , il y a tout lieu que vous soyez rassuré.

Je suis moi-même très attentif à l'évolution de l'ONF. J'ai bien entendu les inquiétudes que vous avez exprimées sur la gestion des massifs des Cévennes gardoises.

Dès mon retour au ministère, je demanderai qu'on me fasse un point très précis sur ce cas particulier pour bien vérifier qu'il n'y a pas de difficulté.

Si, le cas échéant, vous aviez le sentiment que ces inquiétudes persistent, je vous demande de m'en faire part et j'examinerai personnellement cette question. Mais, après les grandes difficultés provoquées par les tempêtes de 1999, l'ONF me paraît sur les rails.

M. le président. La parole est à M. André Rouvière.

M. André Rouvière. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, que j'ai écoutée avec beaucoup d'attention.

Je voudrais vous faire trois remarques.

Premièrement, je tiens à vous dire que, loin de me rassurer, vous m'avez inquiété davantage encore !

Deuxièmement, je me demande si nous parlons le même langage. Je suis cévenol et parlementaire des Cévennes. J'ai été maire pendant plus de trente ans d'une commune cévenole et conseiller général du Gard.

Je n'ai jamais assisté à la moindre concertation sur les réductions des effectifs concernant la forêt cévenole. Si concertation il y a eu, j'avoue qu'elle a échappé à ma vigilance. Du moins, n'ai-je jamais été sollicité.

Je m'interroge également sur le point de savoir si nous avons le même dictionnaire. Le mot « concertation » a-t-il la même signification pour vous et pour nous ? En effet, l'annonce de suppressions de postes, ce n'est pas une concertation. La concertation, c'est la discussion, c'est l'échange des idées et des points de vue.

Je le redis, il n'y a pas eu de concertation à propos de la forêt cévenole gardoise. Vous nous avez affirmé que l'entretien de la forêt continuerait d'être assuré, mais j'aurais aimé que vous m'expliquiez comment le même travail pourra être accompli par six agents au lieu de onze !

Troisièmement, j'aurais souhaité que vous puissiez me rassurer quant au respect des engagements de l'Etat s'agissant de la forêt domaniale et, surtout, de la gestion des forêts communales soumises au régime forestier. L'exécution des contrats sera-t-elle poursuivie, ou ces derniers seront-ils dénoncés ? Par exemple, il existe des centaines de kilomètres de pistes forestières : l'Etat va-t-il continuer à les entretenir ? Ce que nous constatons, pour l'heure, c'est qu'il demande aux communes et aux groupements de communes de les prendre en charge.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vous demande pas de me répondre aujourd'hui, car je sais que ce n'est pas possible, mais si vous pouviez me faire parvenir une réponse écrite rassurante, je ne manquerais pas de vous en donner acte. Mais nous en sommes loin, hélas !

Financement de la Fédération nationale des foyers ruraux

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, auteur de la question n° 627, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.

M. Jean-Pierre Bel. Je voudrais attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur la situation dramatique de la FNFR, la Fédération nationale des foyers ruraux.

Créée voilà plus de cinquante ans, la Fédération nationale des foyers ruraux regroupe plus de 2 700 foyers et associations, plus de 200 000 adhérents et 1 000 animateurs. Les foyers ruraux participent à l'animation et au développement global du milieu rural. Ils sont un lieu de rencontre, d'échange, mais aussi de médiation et d'élaboration de projets entre les acteurs locaux que sont les habitants, les élus, les associations. En cela, ils contribuent au maintien de la vie culturelle et de la cohésion sociale, à la valorisation de l'environnement culturel et naturel.

Cependant, la structure nationale connaît des difficultés financières dues au désengagement du ministère de l'agriculture, qui n'a pas reconduit, en 2004, la convention pluriannuelle qui les liait depuis des années, et ce jusqu'en décembre 2003. La FNFR, restée longtemps sans nouvelles concernant le financement de son programme d'animation rurale pour 2004, voit le montant de la subvention dont elle bénéficie baisser de 50 % par rapport à 2003.

Elle se trouve ainsi confrontée depuis plusieurs mois à de graves problèmes : plus de convention pluriannuelle d'objectifs, baisse drastique du montant de la subvention, importantes difficultés financières, licenciements économiques, vente de locaux, pas d'engagement réel pour 2005. Vous l'avouerez, l'avenir est particulièrement sombre !

Aussi peut-on considérer qu'il s'agit d'une remise en cause du développement rural local, en complète contradiction avec la volonté affichée par le Gouvernement de mener une véritable politique rurale. Pourtant, nous voulons continuer à espérer : pouvez-vous me dire, monsieur le secrétaire d'Etat, quelle est la position du Gouvernement au regard d'une situation qui, je vous le dis très sincèrement, a des répercussions importantes, en termes d'aménagement du territoire et d'emploi, dans nos zones rurales ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Monsieur le sénateur, votre question porte sur les difficultés, essentiellement d'ordre financier, que rencontre la Fédération nationale des foyers ruraux, et sur les effets de cette situation s'agissant de l'avenir des activités d'animation des territoires ruraux de cette dernière.

Vous avez évoqué, de façon plus globale, les répercussions que ces difficultés pourraient entraîner en termes d'aménagement du territoire et d'emploi. Je voudrais vous rassurer sur ce point : le Gouvernement, qui vient de faire voter par le Parlement le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, s'inscrit bien évidemment dans une tout autre logique que celle que vous avez décrite. Cela étant, l'année qui vient de s'écouler a constitué une sorte de période de transition, sur laquelle je reviendrai dans un instant.

Comme vous le savez, la FNFR a été créée en 1946 pour soutenir le développement du monde rural, en favorisant les activités culturelles, d'animation et de formation dans les zones rurales fragiles.

Le soutien du ministère de l'agriculture à la FNFR a pris la forme d'un conventionnement pluriannuel à partir de 1995. Il répond à des objectifs précis et évaluables, liés à la politique agricole et au développement du territoire, mais aussi à l'action d'animation et de formation.

Dans le cadre des conventions pluriannuelles pour la période 2000-2003, le ministère a ainsi soutenu les activités fédératives dans une optique de dynamisation et d'implication des structures adhérentes, s'agissant par exemple de la mise en oeuvre de programmes d'actions animés par la tête de réseau, visant à favoriser l'expérimentation et l'innovation, qui concourent au développement rural. Nous sommes donc dans une logique d'appui à une action centrée sur les zones rurales fragiles.

Cela étant, nous sommes bien conscients des difficultés de trésorerie rencontrées par la FNFR puisque, dans le contexte budgétaire de l'année 2004, un soutien exceptionnel lui a été accordé, pour l'aider à passer le cap de la fin de l'année. Nous parvenons en effet au terme d'une période de transition faisant suite à l'expiration de la précédente convention.

Par conséquent, le Gouvernement a pris en considération les difficultés que vous avez soulignées, monsieur le sénateur. Ainsi, en tenant compte des subventions, des cinq mises à disposition et des quarante-trois postes FONJEP - le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire - dont elle a bénéficié, la FNFR a perçu, au titre de l'année 2004, 71 % du montant de la dotation pour 2003, soit 912 285 euros. Je pense donc que l'Etat a vraiment rempli sa mission de soutien !

Par ailleurs, un conventionnement renouvelé est en préparation. J'espère que nous pourrons rapidement aboutir à sa signature, l'objectif étant d'apporter aux associations un appui tenant compte des recommandations du rapport d'inspection réalisé en 2004 par les services du ministère et, surtout, des orientations définies par le Gouvernement dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

En conclusion, il y a concordance entre le vote en deuxième lecture de ce dernier texte par votre assemblée, la semaine dernière, et le nouveau conventionnement, qui, je le crois, donnera pleine satisfaction à la FNFR. Nous serons alors sortis de cette période de transition au cours de laquelle, je le répète, l'Etat a apporté tout son soutien.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel.

M. Jean-Pierre Bel. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, des précisions que vous venez de nous apporter. J'ai bien compris que, comme nous, vous considérez que les foyers ruraux, qui jouent un rôle de coordination associative, ne peuvent fonctionner seuls. Les enjeux républicains sont réels, et je crois que nous pouvons nous accorder sur ce point.

Nous étions, quant à nous, assez sensibles au fait que la structure nationale, tête de réseau comportant une quinzaine de salariés et coordonnant le fonctionnement de 3 000 cellules en milieu rural, ne pourrait pas forcément s'adapter au nouveau type d'organisation présenté par le Gouvernement, qui repose notamment sur des appels à projets.

Au-delà des éléments d'information que vous nous avez communiqués ce matin, et qui méritent à mon sens d'être pris en considération, je souhaiterais donc que vous donniez à l'échelon national du réseau des foyers ruraux les moyens de vivre.

Intercommunalité et respect de l'autonomie communale

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 622, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Michel Billout. Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur les conséquences malheureuses que pourrait avoir l'application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales au regard du respect du principe de l'autonomie communale.

Je rappellerai en préalable que le principe de libre administration des collectivités territoriales est inscrit à l'article 72 de la Constitution de 1958. Ce principe a permis l'adoption de lois de décentralisation.

Je ne pense pas que la loi du 13 août 2004 ait été conçue comme un outil de contrainte des collectivités territoriales. Ce serait un comble ! Pourtant, l'autonomie communale pourrait être remise en question, dans les faits, dans le département de Seine-et-Marne.

En effet, s'il faut considérer les dispositions de l'article 152 de ladite loi comme un élément permettant de faciliter la transformation d'un syndicat intercommunal à vocation multiple en communauté de communes, le nouvel article L. 5211-41-2 inséré dans le code général des collectivités territoriales peut devenir un moyen de contraindre des communes à intégrer un établissement public de coopération intercommunale.

Prenons l'exemple d'un SIVOM composé de quatorze communes, créé voilà une trentaine d'années pour exercer un nombre de compétences très limitées, à savoir la gestion d'un équipement sportif et la collecte des ordures ménagères exclusivement.

Au fil du temps, les projets évoluent, d'autres liens se tissent avec d'autres territoires, d'autres communes. En 2004, la majorité des communes constituant le SIVOM souhaite sa transformation en communauté de communes, quitte à procéder au transfert temporaire, pour quelques mois, des compétences obligatoires afin de satisfaire aux dispositions suivantes de l'article L. 5211-41-2 du code général des collectivités territoriales :

« Lorsqu'un syndicat de communes exerce déjà, au lieu et place des communes qui le composent, les compétences fixées par le présent code pour les communautés d'agglomération ou les communautés de communes, ce syndicat peut se transformer en l'une de ces deux catégories d'établissement, sous réserve qu'il remplisse les conditions de création exigées. »

Or cinq communes membres du SIVOM ont élaboré un projet de création d'EPCI différent, avec d'autres communes voisines, selon un périmètre cohérent, présentant un intérêt communautaire clairement défini, des actions répondant bien à l'intérêt des populations, des ressources bien étudiées. Ces cinq communes représentant le quart de la population totale couverte par le SIVOM, elles ne peuvent constituer une minorité de blocage contre le projet de transformation du SIVOM en communauté de communes, puisque la décision se prend à la majorité qualifiée.

Dans ce cas, madame la ministre, la possibilité de transformation du SIVOM en communauté de communes, telle que définie à l'article 152 de la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales, prime-t-elle sur tout autre projet ? S'il en était ainsi, des décisions prises à l'unanimité par des conseils municipaux se verraient bafouées.

De plus, comment imaginer que les politiques mises en oeuvre par une structure intercommunale puissent être pertinentes et efficaces sans l'adhésion de l'ensemble des membres de celle-ci ?

Manifestement, l'application de la loi pose un problème important à cet égard. Faut-il alors attribuer au seul préfet le rôle d'arbitre ? Ne vaudrait-il pas mieux encadrer le texte législatif, de façon à prévoir que l'exercice, par le syndicat de communes, des compétences nécessaires à sa transformation en EPCI devra obligatoirement être effectif depuis suffisamment longtemps, à savoir deux ou trois ans, afin d'éviter tout recours abusif aux dispositions de l'article 152 ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Josée Roig, ministre déléguée à l'intérieur. Monsieur le sénateur, la procédure instituée à l'article 152 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales vise à faciliter la transformation des syndicats de communes en structures de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Cette procédure permet la substitution directe d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération à un syndicat préexistant, sans qu'il soit nécessaire de procéder à la dissolution préalable de ce dernier.

Elle constitue donc une option nouvelle offerte aux élus, permettant que les communes manifestent plus simplement leur volonté de faire progresser leur coopération. Les conditions de majorité selon lesquelles cette évolution peut être décidée n'ont pas été modifiées : le principe de l'autonomie communale continue de prévaloir.

Ces conditions de majorité résultent des dispositions de la loi d'orientation du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, cette loi a d'abord posé le principe que « le progrès de la coopération intercommunale se fonde sur la libre volonté des communes d'élaborer des projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité ». Elle a ensuite mis en place des seuils de majorité qualifiée pour créer ou modifier les établissements publics de coopération intercommunale.

Ces seuils visent à la fois à respecter la volonté des communes et à empêcher les minorités de bloquer les dynamiques de territoires. Ils prévoient que les décisions doivent recueillir soit l'approbation des deux tiers des conseils municipaux représentant plus de la moitié de la population concernée, soit la majorité simple des conseils, à la condition expresse que ceux-ci représentent plus des deux tiers de la population.

Les communes représentant plus d'un quart de la population disposent par ailleurs d'un droit de veto. Ce sont ces règles qui s'appliquent dans le cas où est envisagée la transformation d'un syndicat intercommunal à vocation multiple, un SIVOM, en communauté de communes.

Le préfet conserve un pouvoir d'appréciation. Ainsi peut-il refuser la création d'une communauté s'il constate qu'il n'existe pas de véritable dynamique partagée sur le territoire, même si les conditions de majorité prescrites par la loi sont remplies.

Le Gouvernement, comme vous pouvez le constater monsieur Billout, a le souci de promouvoir le dynamisme du territoire et de préserver l'autonomie des communes.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Je souhaite remercier Mme la ministre des précisions qu'elle a apportées et de son attachement au principe d'autonomie des communes.