Rappel au règlement
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2006
Art. additionnel avant l'art. 51

Article additionnel après l'article 50

M. le président. L'amendement n° 200, présenté par MM. Fischer,  Muzeau et  Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 50, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :

« Une fraction égale au moins à 10 % du produit des cotisations dues au titre des accidents du travail et maladies professionnelles est affectée chaque année au Fonds de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles ».

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Au cours de la discussion et des auditions de la mission d'information sur l'amiante, nous avons vu qu'une conjonction de situations n'incitait pas les entreprises à investir davantage dans la prévention des risques professionnels.

La mise en déficit de la branche, l'attitude complaisante du Gouvernement à l'égard du phénomène persistant de sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles - en témoigne encore l'article 50 de ce PLFSS et le montant dérisoire du reversement de la branche AT-MP à la branche maladie - est un encouragement à la persistance de détournements dommageables à l'équilibre de la sécurité sociale et à la santé des travailleurs.

Le diagnostic dressé par l'IGAS sur le dispositif de tarification AT-MP pointe la faiblesse de la contribution de ce dispositif à la réduction des risques. Ce rapport considère même que « l'entreprise qui privilégie la prévention est aujourd'hui défavorisée au plan économique par rapport à celle qui la néglige ».

Nous souhaitons que les partenaires sociaux s'accordent pour donner à la tarification un rôle dynamique en matière de prévention, pour sortir d'un dispositif favorable aux gros pourvoyeurs de risques dont la cotisation est actuellement quasi garantie, mais nous savons que le MEDEF s'y refuse.

Les pistes qui privilégient une plus grande individualisation des taux de cotisation par entreprise, la prise en compte des relations entre les entreprises sous-traitantes donneuses d'ordre et la réduction de la durée de répercussion des événements doivent nécessairement être retenues.

D'autres pistes méritent, elles aussi, de ne pas être négligées. Je pense en particulier aux outils que sont les majorations, ristournes et contrats de prévention, qui permettent de valoriser les actions positives des entreprises ou de sanctionner les entreprises qui négligent la réduction des risques.

Pour donner du corps, de l'ampleur aux actuels contrats de prévention, le montant des aides pouvant être allouées aux entreprises qui s'engagent à améliorer la santé et la sécurité de leurs salariés doit être sensiblement augmenté.

C'est pourquoi l'amendement n° 200 tend à doter la branche AT-MP d'un vrai budget prévention. Actuellement, la structure du budget de la branche traduit les priorités de cette dernière : 80 % des crédits sont consacrés à la réparation et moins de 2 % à la prévention. Nous proposons de réserver et d'affecter 10 % des recettes de la branche AT-MP au fonds de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles.

M. François Autain. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Dériot, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 200.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel après l'art. 50
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Art. 51

Article additionnel avant l'article 51

M. le président. L'amendement n° 202, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, MM. Fischer et  Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident » sont remplacés par les mots : « la date de la première constatation médicale de la maladie est assimilée à la date de l'accident, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 461-2 ».

II. - En conséquence, après le cinquième alinéa (4°) de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° - De la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle ».

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Afin d'améliorer les conditions dans lesquelles intervient la prescription des droits de la victime aux prestations et indemnités prévues par le livre IV du code de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a prévu que le délai ne court qu'à compter du moment où la victime est informée du caractère professionnel de sa maladie, et non, comme c'était le cas auparavant, dès que la maladie est constatée.

La FNATH nous a fait remarquer que l'introduction du certificat médical établissant le lien possible entre la maladie et l'activité professionnelle avait eu pour conséquence de renvoyer la prise en charge de certaines maladies professionnelles, notamment les troubles musculo-squelettiques et les asthmes, au moment où la victime effectue la déclaration avec le certificat ad hoc.

Si la volonté du législateur n'était pas de réduire la réparation envers les victimes de maladies professionnelles, en déplaçant le point de départ de l'indemnisation à compter du dépôt de la déclaration de la maladie professionnelle auprès des services de la CPAM, c'est pourtant ce qui s'est implicitement passé.

C'est pourquoi nous proposons de bien distinguer, d'une part, la date de la première constatation médicale assimilée à celle de la survenue du dommage et qui correspond à la date de début de prise en charge des soins et indemnités, en modifiant l'article L. 461-l du code de la sécurité sociale, et, d'autre part, la date du certificat établissant le lien possible entre la pathologie et l'activité professionnelle qui fixe le point de départ de la prescription, d'où l'ajout d'un alinéa à l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale.

Monsieur le ministre, il s'agit de faciliter la reconnaissance des droits des victimes, mais aussi d'éviter les transferts de charge vers l'assurance maladie qui supporte, au minimum, la totalité du coût du diagnostic des maladies professionnelles.

Dans la mesure où, avec cet amendement, nous abordons la question de la réparation, permettez-moi, monsieur le ministre, de regretter l'absence de débat à ce sujet.

Le rapport élaboré par Michel Yahiel en 2002 a été complété par celui de Michel Laroque en 2004 présentant trois scénarios de réforme de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Toutefois, le Gouvernement garde le silence, la refonte nécessaire du dispositif d'indemnisation des victimes du travail pour leur assurer une réparation intégrale de l'ensemble de leurs préjudices - comme à toutes les victimes d'ailleurs - a été oubliée.

Pis encore, pour des raisons financières, cette évolution vers la réparation intégrale a été purement abandonnée. J'en veux pour preuve les conclusions, sur ce sujet, du rapport de la mission d'information sur l'amiante, conclusions que nous ne partageons pas, selon lesquelles « compte tenu du déficit de la branche et de l'état dégradé de nos finances publiques de manière générale, il paraît difficile de financer, dans un avenir proche, ce surcroît de dépenses - 3 milliards d'euros pour le régime général -, sauf à augmenter dans des proportions importantes le niveau des cotisations sociales, ce qui serait peu cohérent avec la politique d'allégement des cotisations sociales poursuivie depuis une dizaine d'années dans notre pays ».

Le Gouvernement est-il convaincu par ces arguments ? Si tel est le cas, comment sortira-t-il de la situation actuelle, particulièrement injuste, qui conduit à traiter différemment des victimes de cancers si l'origine de la maladie est professionnelle, à réparer moins bien une victime de dommages d'origine chimique qu'une victime de l'amiante, sinon par le bas, comme le suggèrent les organisations patronales en mettant un terme au « traitement dérogatoire au droit commun » dont bénéficient, sous-entendu injustement, les malades de l'amiante ?

Monsieur le ministre, je souhaite vraiment avoir une réponse sur mon amendement n° 202, mais aussi et surtout sur la question que je viens de soulever.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Dériot, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 202.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel avant l'art. 51
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Art. additionnel après l'art. 51

Article 51

Pour l'année 2006, les objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles sont fixés :

1° Pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 11,1 milliards d'euros ;

2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 9,9 milliards d'euros.  - (Adopté.)

Art. 51
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Art. additionnels avant l'art. 52

Article additionnel après l'article 51

M. le président. L'amendement n° 131, présenté par M. Domeizel, est ainsi libellé :

Après l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé un Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles dont relèvent les fonctionnaires mentionnés à l'article 2 de la Loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

Le fonds a pour mission :

- d'établir, au plan national, les statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles constatées au sein de des administrations centrales, des services déconcentrés en dépendant ou des établissements publics de l'Etat, en tenant compte de leurs causes et des circonstances dans lesquelles ils sont survenus, de leur fréquence et de leurs effets ;

- de participer au financement, sous la forme d'avances ou de subventions, des mesures de prévention arrêtées par les administrations et établissements susvisés et qui sont conformes au programme d'actions qu'il a préalablement défini dans le cadre de la politique fixée par les autorités compétentes de l'Etat, après avis et propositions du Conseil supérieur de la fonction publique ;

- d'élaborer, à l'attention des employeurs précités, des recommandations d'actions en matière de prévention.

Pour l'accomplissement de ces missions, le fonds peut conclure convention avec tout service ou organisme oeuvrant dans le domaine de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État.

La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Les fonctionnaires de l'État ne sont pas immunisés contre les maladies professionnelles ou les accidents du travail.

À l'instar de ce qui existe dans la fonction publique territoriale et dans la fonction publique hospitalière, cet amendement vise à créer un fonds de prévention des risques contre les maladies professionnelles et les accidents du travail pour les fonctionnaires mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

L'objet, long de deux pages, étant assez explicite, je m'en tiendrai là.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Dériot, rapporteur. La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable, car la mesure proposée relève non pas de la loi de financement de la sécurité sociale mais de la loi de finances. Nous ne pouvons pas préempter par un amendement à la loi de financement de la sécurité sociale une disposition qui, induisant une dépense, relève de la loi de finances. De surcroît, cet amendement est irrecevable au titre de l'article 40.

Monsieur le président, j'invoque donc l'article 40 de la Constitution.

M. le président. L'article 40 est-il applicable ?

M. Jean-Jacques Jégou, au nom de la commission des finances. Il l'est, monsieur le président.

M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 131 n'est pas recevable.

Section 4

Dispositions relatives aux dépenses de la branche famille

Art. additionnel après l'art. 51
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Art. 52

Articles additionnels avant l'article 52

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Ibrahim et  A. Giraud, est ainsi libellé :

Avant l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 7 de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte est ainsi rédigé :

« Art. 7 - Les allocations familiales sont attribuées dans les conditions définies aux articles L. 755-11 et L. 755-12 du code de la sécurité sociale et sous condition de résidence régulière sur le territoire. »

La parole est à M. Soibahaddine Ibrahim.

M. Soibahaddine Ibrahim. Comme vous le savez sans doute, en matière d'allocations familiales la situation de Mayotte est singulière, voire unique, dans la République.

L'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et à la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte a mis en place dans cette collectivité un nouveau régime de prestations familiales.

Or, contrairement à ce qui se passe dans l'Hexagone et dans les autres collectivités d'outre-mer, l'article 7 de cette ordonnance limite le bénéfice des prestations à trois enfants par allocataire. Ainsi, toute naissance supplémentaire ne donne lieu au versement d'aucune prestation.

C'est une situation injuste et discriminatoire, qui, de mon point de vue, est difficilement acceptable dans notre République.

C'est la raison pour laquelle le présent amendement a pour objet de supprimer ce plafonnement et d'aligner Mayotte sur les autres collectivités d'outre-mer, permettant ainsi d'établir l'égalité entre tous les citoyens de la République.

M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Lardeux, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Avant  l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 7 de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte est ainsi rédigé :

« Art. 7. - Les allocations familiales sont attribuées en fonction du nombre d'enfants à charge, à partir du premier enfant, dans des conditions fixées par décret. »

La parole est à M. André Lardeux, rapporteur.

M. André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour la famille. L'amendement de la commission a le même objet que celui qui vient d'être présenté par M. Ibrahim ; seule la rédaction diffère.

Il est nécessaire d'harmoniser ces prestations et d'étendre les allocations familiales, sous certaines conditions dont nous reparlerons dans quelques instants, à l'île de Mayotte.

M. le président. L'amendement n° 277, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Avant l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- L'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte est ainsi modifiée :

1° Dans l'article 7, les mots : «, dans la limite de trois enfants par allocataire » sont supprimés ;

2° Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 8 les mots : « dans la limite de trois enfants par allocataire » sont supprimés ;

3° Dans le troisième alinéa de l'article 10, les mots : « le nombre d'enfants pris en compte est limité à trois par allocataire » sont supprimés.

II.- Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier 2006.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement, ainsi d'ailleurs que les plus hautes autorités de l'État, ayant été saisi de ce problème par M. Mansour Kamardine, député de Mayotte, en lien certainement avec l'ensemble des élus mahorais, s'est engagé à régler ce problème du plafonnement des allocations familiales actuellement réservées aux familles ayant trois enfants ou moins.

Au cours du débat à l'Assemblée nationale, j'ai pris l'engagement de résoudre ce problème dès la présente loi de financement de la sécurité sociale.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement vous présente l'amendement n° 277.

Cet amendement est plus large que les amendements nos 53 et 1 rectifié, puisqu'il couvre non seulement les allocations familiales stricto sensu, mais aussi l'allocation de rentrée scolaire et les allocations pour le logement.

Compte tenu du fait que ce que propose le Gouvernement est plus généreux que ce qui est présenté dans les deux autres amendements, qui sont toutefois inspirés par la même motivation, je demande au rapporteur M. Lardeux et à M. Ibrahim de bien vouloir retirer leurs amendements au profit de celui du Gouvernement.

M. le président. Le sous-amendement n° 291, présenté par M. Lardeux, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 1° du I de l'amendement n° 277 :

1° L'article 7 est ainsi rédigé :

« Les allocations familiales sont attribuées en fonction du nombre d'enfants à charge, à partir du premier enfant, dans des conditions fixées par décret. »

La parole est à M. André Lardeux, rapporteur.

M. André Lardeux, rapporteur. Je me propose de donner l'avis de la commission sur l'amendement de M. Ibrahim ainsi que sur celui du Gouvernement et de présenter ce sous-amendement n° 291.

La commission est d'accord avec l'esprit de ces deux amendements. Elle considère que la rédaction proposée par le Gouvernement est plus complète, car son amendement procède à un nettoyage de l'ensemble de l'ordonnance visée en référence.

Cependant, la commission souhaite sous-amender l'amendement du Gouvernement, afin de permettre une adaptation du montant des allocations versées par rapport au niveau métropolitain et donc un alignement plus progressif de la situation de Mayotte, le basculement brutal pouvant provoquer un effet d'aubaine ayant des conséquences non négligeables, notamment en termes d'immigration.

M. Guy Fischer. Et voilà ! Scandaleux !

M. André Lardeux, rapporteur. Nous avons constitué une commission sénatoriale pour étudier cette question.

Je suis très favorable à l'amendement du Gouvernement sous réserve de l'adoption du sous-amendement de la commission. Dans ces conditions, je demande à M. Ibrahim de retirer son amendement, qui est satisfait. Bien entendu, la commission retirerait son propre amendement.

M. Guy Fischer. Peut-on disposer de ce sous-amendement ?

M. le président. Il est distribué sous le numéro  291, monsieur Fischer !

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 1 rectifié et 53, ainsi que sur le sous-amendement n° 291 ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Bien que l'amendement du Gouvernement soit plus complet que les deux autres amendements, il avait néanmoins besoin d'être complété. Aussi, j'émets un avis favorable sur le sous-amendement de la commission.

Par ailleurs, monsieur le président, je demande le vote par priorité de l'amendement n° 277.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette demande de priorité formulée par le Gouvernement ?

M. André Lardeux, rapporteur. Favorable.

M. le président. Il n'y a pas d'opposition ?...

La priorité est ordonnée.

La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 291.

M. Guy Fischer. En vérité, je me demandais où la commission allait introduire une discrimination ! Eh bien, maintenant, je le vois !

Je faisais partie, de même que Claire-Lise Campion, de la mission d'information sur la réalité sociale réunionnaise, qui s'est rendue à Mayotte au mois de septembre.

À cette occasion, nous nous sommes longuement entretenus avec tous les élus mahorais que nous avons rencontrés, notamment M. Adrien Giraud et M. Mansour Kamardine. Je me réjouissais à l'avance des propositions qui allaient être formulées, celles que nous retrouvons dans l'amendement présenté par M. Ibrahim. Il s'agissait de doter Mayotte de modalités normales d'application de la législation en matière d'allocations familiales.

Je rappelle que le choix de Mayotte de rester dans la France a été clairement formulé par la population mahoraise.

Devant la misère, les difficultés vécues par la majeure partie de la population mahoraise, il était tout à fait naturel de rechercher un droit commun, au moins en termes de prestations familiales. C'était à la fois trop simple et trop beau !

Le rapporteur de la commission des affaires sociales a agi en deux temps. Il a commencé par défendre, au nom de la commission des affaires sociales, l'amendement n° 53, qui nous paraissait acceptable. Et voilà que, maintenant, il présente le sous-amendement n° 291, qui recueille l'accord du Gouvernement et qui empêchera les Mahorais de bénéficier immédiatement de la totalité des prestations familiales auxquelles ils ont droit.

Mon intervention est donc un « coup de gueule » devant le procédé auquel M. Lardeux a eu recours, ce qui n'est d'ailleurs pas pour m'étonner.

Est-ce que certaines populations doivent vivre dans des conditions dérogatoires au droit pour éviter ce que M. le rapporteur appelle, comme toujours, un « effet d'aubaine » ? Il s'agirait d'éviter que des habitants des Comores ou de l'île d'Anjouan viennent en masse à Mayotte pour profiter de la situation.

Certes, aujourd'hui, 30 % de la population mahoraise se trouvent en situation illégale. Nous ne méconnaissons pas ce problème, mais nous devons assumer notre passé colonial ! C'est pourquoi le sous-amendement de la commission me paraît inadmissible.

Je voterai l'amendement du Gouvernement, d'autant qu'il inclut le versement de l'allocation de rentrée scolaire et de l'allocation pour le logement, mais, si le sous-amendement est adopté, mon vote aura un goût amer.

De surcroît, ce sous-amendement n'a pas été discuté en commission. Faut-il penser que M. le rapporteur a agi en accord avec le Gouvernement ? Ce serait alors vraiment un coup fourré !

Nous voterons donc l'amendement du Gouvernement, car nous sommes favorables à son principe, mais je considère qu'il est mesquin de reculer la date à laquelle les Mahorais auront pleinement droit aux prestations familiales.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué. Monsieur Fischer, je vous remercie de me donner l'occasion d'être précis. La loi prévoira que ces allocations sont dues aux familles qui y ont droit à compter du 1er janvier.

Il se peut que le décret d'application, qui est en tout état de cause nécessaire, ne soit pas publié au 1er janvier, car il doit être postérieur à la promulgation de la loi. Les dispositions seront néanmoins applicables de manière rétroactive à compter du 1er janvier. Il ne s'agit pas de différer quelque mesure que ce soit.

M. le président. La parole est à M. André Lardeux, rapporteur.

M. André Lardeux, rapporteur. M. Fischer a peut-être la mémoire sélective. En tout cas, il semble avoir oublié le cheminement de ce sous-amendement. Il a été déposé en commission par une de nos collègues et la commission l'a repris pour lui donner davantage de force.

Je ne vous ai donc rien caché. La commission a bien délibéré.

M. Fischer m'a en outre mis en cause en disant que j'étais coutumier de tel ou tel procédé. Or je ne suis pas très souvent rapporteur ; il doit s'en féliciter ! Je m'efforce en tout cas, comme chacun de nous dans cette enceinte, d'agir en respectant à la fois l'esprit de justice et la rigueur.

M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote.

Mme Claire-Lise Campion. Permettez-moi tout d'abord de dire que je souscris aux propos de M. Fischer.

Grâce à la mission d'information constituée par la commission des affaires sociales, nous avons pu mesurer les difficultés que connaît l'île de Mayotte. Aussi regrettons-nous que le sous-amendement de la commission vienne entacher une décision qui recueillait notre totale adhésion.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 291.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 277.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 52, et les amendements nos 1 rectifié et 53 n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 120, présenté par MM. A. Giraud et  Ibrahim, est ainsi libellé :

Avant l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Au début du premier alinéa de l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : « Toute personne isolée résidant en France » sont insérés les mots : « et à Mayotte »

II - Les charges résultant éventuellement de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Adrien Giraud.

M. Adrien Giraud. Une mission d'information de la commission des affaires sociales du Sénat, à laquelle participaient effectivement Mme Campion et M. Fischer, s'est rendue à Mayotte pour examiner la question des minima sociaux. J'attends avec impatience son rapport qui, j'en suis persuadé, reflétera la situation sociale réelle de notre collectivité.

Monsieur le ministre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 peut nous permettre de corriger une erreur qui remonte à plusieurs dizaines d'années.

Mayotte, membre à part entière de la République, est à ce jour la seule collectivité départementale à ne pas disposer des mêmes droits que les départements métropolitains. Il est inacceptable qu'il y ait encore, au XXIe siècle, des Français à part.

Monsieur le ministre, je souhaite que l'on profite du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour établir l'égalité entre tous les Français en matière d'allocations familiales.

À l'Assemblée nationale, vous vous êtes engagé à déplafonner les allocations familiales, et je vous en remercie. Mais cela ne suffit pas pour que les Mahorais baissent la garde. Je souhaite que vous confirmiez aujourd'hui au Sénat les engagements que vous avez pris devant l'Assemblée nationale.

L'amendement n° 120 vise à pallier, autant que faire se peut, les conséquences injustes d'une loi juste et à aider les femmes de Mayotte, françaises à part entière, qui ont été abandonnées ou répudiées du fait de la loi.

Conforme à un idéal républicain de justice sociale, l'extension aux Mahoraises du bénéfice de l'allocation de parent isolé, l'API, est aussi un impératif de respect de l'égalité de tous les citoyens devant la loi.

Plus concrètement, l'API permettra à quelques milliers de femmes d'acquérir une pleine autonomie sociale et financière en leur offrant la possibilité d'élever seules et dignement leurs enfants. Ce n'est que par ce biais que l'évolution de la condition féminine à Mayotte pourra éviter l'échec.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. André Lardeux, rapporteur. J'ai bien entendu la demande de M. Adrien Giraud. Toutefois, pour le développement des prestations sociales à Mayotte, nous nous heurtons à un certain nombre de problèmes, je pense notamment au problème spécifique de la défaillance de l'état civil.

S'agissant particulièrement de l'attribution de l'allocation de parent isolé, nous rencontrons une difficulté supplémentaire importante en raison de la polygamie : celle du contrôle de la situation de parent isolé. C'est d'ailleurs pour éviter un tel contrôle que, dès l'origine, le choix a été fait de limiter les prestations familiales à Mayotte, ce que nous venons de modifier par l'amendement précédent, et de les verser à la mère, puisque ce sont elles qui se retrouvent presque systématiquement abandonnées avec des enfants.

Par conséquent, dans l'état actuel, la commission est plutôt réservée sur cet amendement visant à permettre le versement de l'allocation de parent isolé à Mayotte. Toutefois, il sera éventuellement possible d'ouvrir de nouveau le débat lorsque la question de l'état civil aura été réglée.

Pour ces raisons, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement. Si vous souhaitiez le maintenir, je serais obligé, au nom de la commission, d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Monsieur Adrien Giraud, le Gouvernement vous remercie d'avoir posé ce problème qui est réel, qu'il faut, comme vous l'avez justement dit, examiner et auquel il convient de s'attaquer.

M. Roland Muzeau. Ça commence mal !

M. Philippe Bas, ministre délégué. Toutefois...

M. François Autain. In cauda venenum !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ...si la Haute Assemblée confirme tout à l'heure son vote sur l'ensemble du texte, nous allons prendre pour les Mahoraises et les Mahorais une décision qui permettra d'améliorer la situation des familles nombreuses - familles qui, à Mayotte, sont, si j'ose dire, vraiment nombreuses ! (Sourires.) - et qui concerne non seulement les allocations familiales, comme je le précisais tout à l'heure, mais aussi les allocations pour le logement et l'allocation de rentrée scolaire.

Nous ne pouvons pas tout faire en une seule fois, il faut en avoir conscience. C'est la raison pour laquelle, comme le rapporteur de la commission des affaires sociales, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement, tout en sachant que le problème que vous avez posé sera examiné.

M. le président. Monsieur Adrien Giraud, l'amendement est-il maintenu ?

M. Adrien Giraud. Le problème, qui perdure depuis plusieurs dizaines d'années déjà à Mayotte, n'est vraiment pas pris au sérieux en métropole, notamment par le Gouvernement !

Monsieur le rapporteur, vous me répondez qu'il n'est pas possible de nous accorder l'allocation de parent isolé pour une question d'état civil. Est-ce la faute des Mahorais si, aujourd'hui, l'état civil n'est pas fiable ?

Mayotte est devenue française avant Nice et la Savoie ! Comment se fait-il qu'en 2006 on nous oppose encore le fait que notre état civil n'est pas fiable ?

M. Guy Fischer. C'est le passé colonial !

M. Adrien Giraud. Est-ce notre faute, à nous Mahorais ? Je demande à la Haute Assemblée de me répondre !

Je préférerais qu'on utilise un autre argument pour justifier le fait que nous ne sommes pas encore prêts à recevoir ces prestations !

Monsieur le ministre, je vous remercie néanmoins de votre réponse. Pour vous être agréable et afin de vous montrer notre bonne volonté, je retire mon amendement. (M. François Autain applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 120 est retiré.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 52.