PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. Je tiens à vous faire remarquer, monsieur le ministre délégué, que vous avez utilisé la totalité du temps de parole imparti au Gouvernement. Toutefois, je donne volontiers la parole à Mme le ministre. 

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Je vous remercie, monsieur le président.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureuse d'être aujourd'hui aux côtés de Christian Estrosi pour vous parler plus particulièrement, dans le cadre du débat sur la mission « Sécurité », de la gendarmerie, qui en est un élément important, voire essentiel.

Je dirai simplement en préambule que la première responsabilité de l'État est d'assurer la sécurité de ses concitoyens, qu'il s'agisse de leur protection contre le terrorisme ou de la lutte contre la petite délinquance au quotidien ; cela fait partie d'un tout. À cet égard, M. le ministre de l'intérieur et moi-même sommes totalement d'accord à la fois sur cette mission et sur les obligations qui en découlent.

Je me félicite de constater que cet accord existe d'un bout à l'autre de la hiérarchie de nos deux ministères, avec des résultats satisfaisants.

Depuis trois ans, la gendarmerie nationale a connu un redressement remarquable. Elle obtient des résultats en constante progression au service de la sécurité des Français, comme l'ont souligné à juste titre, ce dont je les remercie, MM. de Montesquiou, Courtois, Lecerf, Demuynck et Carle.

Le mois dernier, la gendarmerie est intervenue pour contenir des violences urbaines qui ont débordé le simple cadre des grandes villes et se sont étendues aux zones de gendarmerie à partir du 3 novembre.

Les causes de cette situation, monsieur Gautier, sont sans doute multiples. L'une d'entre elles, majeure, me semble-t-il, réside dans l'instabilité de nos politiques urbaines. Voilà vingt ans en effet que nous menons des politiques en direction des banlieues. Le problème, c'est que chaque fois qu'un ministre change, il change de politique.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Faut-il supprimer l'alternance ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Or, si vous dénoncez ainsi que vos collègues de l'opposition, ce qui est logique, les actions du précédent gouvernement, je pourrais vous faire exactement la même remarque, car le gouvernement que vous souteniez avait remis en cause les politiques mises en place auparavant.

Aussi, je me réjouis que les maires réunis à Matignon aient exprimé avec force le souci de ne pas avoir à subir ces changements multiples. Ils ont formé le voeu qu'un consensus voie le jour concernant une politique qui pourrait être développée pendant des années. En effet, si je pense que chacun a de bonnes idées, ce qui compte, c'est surtout que celles-ci puissent s'appliquer dans le temps. Il en va, dans ce domaine, de notre responsabilité commune.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Durant cette période, 7 000 gendarmes en moyenne ont été engagés sur l'ensemble du territoire national ; 1 000 réservistes ont été mobilisés ; 40 escadrons de gendarmerie ont été exclusivement déployés pour cette mission. Une dizaine d'hélicoptères ont été engagés en appui des dispositifs au sol. Je précise que seule la gendarmerie nationale est aujourd'hui en mesure d'assurer ce type d'intervention.

C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement afin de récompenser les gendarmes qui sont intervenus lors de ces événements.

M. Philippe Goujon. Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Voté par l'Assemblée nationale, il vise à accorder une prime de 300 euros, pour un coût total de 3 millions d'euros inscrits au projet de loi de finances, en faveur des militaires d'active ou de réserve engagés de manière si significative.

En outre, nous sommes actuellement en discussion avec la Mairie de Paris et la préfecture pour que les pompiers militaires, eux aussi, qui ont participé à cette opération reçoivent également une récompense en la matière, monsieur Goujon.

M. Jacques Legendre. Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Si nous regardons au-delà de ces événements, en matière de sécurité générale et de police judiciaire, la baisse mensuelle de la délinquance est ininterrompue depuis février 2003. (Mme Eliane Assassi proteste.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Eh oui, madame Assassi, nous avons sensiblement amélioré la situation.

En effet, il convient de ne pas être frappé d'amnésie et de se rappeler la situation que nous avons trouvée en arrivant, qui se traduisait par une dégradation constante et générale de la sécurité. D'ailleurs, la réponse des Français, au moment des élections, a été dénuée de toute ambiguïté !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En matière de sécurité routière, plus de 12 000 militaires de la gendarmerie ont contribué à faire passer le nombre des victimes de 8 000 tués en 2000 à 5 500 en 2004. Bien sûr, c'est encore trop, car ce sont autant de drames au sein des familles. Cela dit, dans ce domaine, un effort important est fait qui porte ses fruits et doit donc être poursuivi.

Je voudrais également rappeler que la gendarmerie consacre des moyens importants contre l'immigration irrégulière, et je rejoins M. Lecerf s'agissant du rôle que doivent jouer nos consulats.

Des moyens ont également été mis en oeuvre contre le travail illégal. C'est ainsi que la coordination des unités a été renforcée par la création de l'Office central de lutte contre le travail illégal, l'OCLTI. Or la gendarmerie diligente la moitié des procédures en la matière.

Je voudrais rappeler que ce double travail contre l'immigration illégale et contre le travail illégal est essentiel car, en fin de compte, les premières victimes de cette irrégularité ou de cette illégalité sont ceux qui agissent et travaillent en toute légalité.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de finances pour 2006 nous donne les moyens de confirmer ces bons résultats en application de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI.

Le programme « Gendarmerie » s'élève à 7,3 milliards d'euros, ce qui représente 48 % du total de la mission « Sécurité ».

Les crédits qui lui sont alloués augmenteront, cette année, de 400 millions d'euros par rapport à 2005.

J'ai toujours regretté, vous vous en souvenez, qu'il n'y ait pas, comme je l'avais demandé, d'annualisation du budget de la LOPSI. Néanmoins, cette année, les discussions budgétaires se sont déroulées dans un esprit ouvert et positif avec M. le ministre des finances, ce qui nous a permis de présenter un projet de budget pour 2006 qui donne un « coup d'accélérateur » en faveur de trois domaines clés : les effectifs, les équipements, l'immobilier.

J'évoquerai, en premier lieu, les effectifs de la gendarmerie, qui vont augmenter de manière significative.

En effet, j'ai décidé de créer 2 000 emplois de gendarme en 2006, qui viendront donc s'ajouter aux 1 300 emplois de policier créés par le ministre de l'intérieur.

Au total, pour la gendarmerie, 5 100 emplois auront été créés en quatre ans. Nous sommes donc effectivement, monsieur Faure, dans une logique de réalisation des 7 000 postes de gendarme sur la période de programmation 2003-2007.

Je voudrais insister sur la situation particulière des réservistes de la gendarmerie. Ces derniers, à l'instar des réservistes des trois armées, contribuent pleinement à l'action quotidienne de la gendarmerie sur le terrain.

M. Philippe Goujon. Absolument !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Les crédits que je consacrerai en 2006 à ce domaine d'action augmentent de 13 % ; quant à l'objectif de 19 500 réservistes, au terme de 2007, il reste d'actualité.

Le projet de loi sur les réserves que j'aurai l'honneur de défendre au Sénat, d'ici à quelques semaines, permettra de renforcer encore l'apport des réservistes aux missions de la gendarmerie.

Enfin, il est un dernier élément, mais néanmoins important, pour les personnels. Je rappelle, en effet, que le projet de loi de finances comprend une enveloppe de 18,4 millions d'euros pour la mise en oeuvre, pour la seconde année consécutive, du plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées.

Cette réforme modernise et améliore l'encadrement de la gendarmerie.

En deuxième lieu, je me dois d'évoquer la progression du budget d'équipement de la gendarmerie, qui est confirmée.

L'équipement constitue une double priorité et de la LOPSI et de la loi de programmation militaire, car je souligne qu'une partie des crédits d'équipement de la gendarmerie figure dans ce dernier texte. J'ai décidé d'augmenter la dotation globale de 20 %.

Les équipements de la gendarmerie seront largement renouvelés en 2006, ce qui représente 2 000 véhicules de brigade et de police de la route, 12 000 pistolets automatiques, plus de 24 000 tenues d'intervention.

L'année 2006 répondra également à de nombreuses commandes, car il ne suffit pas de recevoir aujourd'hui, il faut se projeter dans l'avenir. Ces commandes concernent particulièrement la protection et l'armement des personnels, ainsi que la mobilité et les capacités d'intervention des unités.

En troisième lieu, enfin, si l'immobilier représente, pour la gendarmerie, tant un lieu de vie qu'un lieu de travail, c'est aussi un lieu d'accueil du public, et MM. Vallet et Carle ont eu raison de souligner l'importance de cet accueil ; les gendarmes attachent une grande importance l'adaptation des locaux, en particulier lorsqu'il s'agit d'accueillir des personnes très jeunes ou des femmes en situation difficile.

De ce point de vue, je dois dire, monsieur Rouvière, que la situation de l'immobilier de la gendarmerie était dans un état plus que préoccupant quand j'ai pris mes fonctions et si, aujourd'hui, malgré les efforts continus que nous avons accomplis depuis 2002, il reste encore beaucoup à faire, c'est aussi parce que rien n'avait été fait auparavant ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

En matière de logement, nous avons fait des efforts financiers importants tant pour les investissements que pour les loyers.

Globalement, les crédits ont augmenté de 242 millions d'euros et, dans le projet de loi de finances pour 2006, les crédits augmentent encore fortement, atteignant 200 millions d'euros pour les investissements, soit une augmentation de 73 %, et 394 millions d'euros pour les loyers, soit une augmentation de 16 %.

Ainsi que certains d'entre vous l'ont souligné, j'ai également l'intention d'utiliser dans ce domaine les dispositifs juridiques prévus par la LOPSI, notamment pour les partenariats avec les collectivités locales et l'usage du crédit-bail.

S'agissant des crédits de la mission « Sécurité », on m'a demandé tout à l'heure s'il n'aurait pas mieux valu rattacher les crédits immobiliers aux crédits concernant les autres armées. On a eu un débat à ce sujet, et je vous avoue que, au départ, je n'étais pas favorable à cette formule.

Toutefois, dans un souci de clarté pour le Parlement et pour nos concitoyens, j'ai accepté par voie d'amendement que le Gouvernement isole les crédits de la gendarmerie nationale pour une meilleure lisibilité des actions de celle-ci.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est effectivement plus lisible !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Pour autant, on n'a pas prévu une séparation totale dans la gestion.

Il y a quelques semaines, j'ai créé un service unique d'infrastructure de la défense ; celui-ci travaillera pour tous les services du ministère de la défense et pour la gendarmerie nationale, quels que soient les programmes dans lesquels sont affectés les crédits.

De plus, une convention entre la gendarmerie nationale et le secrétariat général pour l'administration précise les objectifs et les moyens de la politique immobilière.

Afin de répondre à vos préoccupations, mesdames, messieurs les sénateurs, et pour aller dans le sens de la LOPSI, j'indique que la gendarmerie se modernise en continu pour utiliser de manière optimale les crédits qui nous sont confiés.

À sa nomination, j'ai adressé une lettre de mission au général Parayre, avec des objectifs et des calendriers précis. Cette démarche s'inscrit dans une volonté de responsabilisation personnelle de mes principaux collaborateurs. La gendarmerie nationale tient toute sa place dans la modernisation du ministère de la défense.

La réforme des communautés de brigades est aujourd'hui achevée. Elle part du principe que les petites unités sont plus performantes quand elles mutualisent leurs moyens. J'ai le sentiment que la réforme a bien été comprise tant par les autorités administratives et judiciaires que par une large majorité d'élus. Monsieur Faure, les élus locaux sont systématiquement associés aux études et aux ajustements de la réforme.

Monsieur Courtois, vous m'avez interrogée sur la mise en oeuvre du réseau informatique. Sachez que le déploiement informatique débutera au mois d'avril 2006 ; il sera terminé à la fin du mois d'octobre en métropole et à la fin du mois de décembre outre-mer. Les 45 000 implantations seront accordées via Internet, ce qui correspond à 70 000 postes.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis. Je vous remercie de ces précisions.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le deuxième élément de modernisation des structures consiste en la réorganisation du commandement territorial, que j'ai décidée en 2004 et qui a pris effet au 1er juillet 2005.

Celle-ci constitue une des actions prioritaires de la stratégie ministérielle de réforme du ministère de la défense.

Cette évolution modifie en profondeur la chaîne territoriale du commandement, en la simplifiant et en l'adaptant à l'organisation des autres administrations territoriales. Les premiers échos sont très favorables.

S'agissant du bilan de cette réorganisation, monsieur Rouvière, il faut attendre au moins une année avant de pouvoir juger de la mise en oeuvre des réformes. Le premier bilan pourra donc être dressé dans le courant de l'année 2006.

J'ai également mobilisé la gendarmerie sur de nouveaux modes de gestion. Je souhaite notamment externaliser la gestion des logements domaniaux. Comme je l'ai déjà dit, il s'agit non pas d'avoir une position de principe, mais d'être pragmatique. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé des études à la fois financières et juridiques.

Monsieur Courtois, un diagnostic complet nous a permis de chiffrer les différents scénarios que plusieurs experts juridiques ont examinés. Plusieurs lots géographiques permettront de répondre au mieux au besoin de proximité des gendarmes. Monsieur Rouvière, ces opérations seront lancées en 2006 et mises en oeuvre avant la fin de l'année.

Enfin, par souci de transparence à l'égard non seulement du Parlement mais aussi de nos concitoyens, nous avons essayé d'avoir des indicateurs de performance qui soient les plus proches possibles de ceux du ministère de l'intérieur. Je ne dis pas que nous avons complètement réussi, mais nous nous en sommes beaucoup rapprochés. Il fallait faire un choix. À cet égard, nous avons entendu deux interventions contradictoires : l'une suggérait une multiplication des indicateurs,...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Point trop n'en faut !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. ...alors que l'autre plaidait pour leur diminution ; mais nous pourrons en reparler ensemble.

M. Bockel m'a interrogée sur le projet de construction d'une gendarmerie.

Un projet de construction, sur le mode de l'autorisation d'occupation temporaire, est prévu en 2007 pour la compagnie de gendarmerie de Mulhouse, avec quatre-vingts logements et vingt-deux locaux d'hébergement. Ce dossier est en cours d'étude au service du génie, et il sera conduit sur une emprise de l'ex-caserne de Barbanègre.

Je terminerai mon propos en rappelant que, au-delà des moyens financiers, l'identité militaire de la gendarmerie est un des fondements de son efficacité.

M. Jacques Legendre. Absolument !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Depuis 2002, j'ai voulu renforcer le caractère militaire de la gendarmerie. Le retour au recrutement des officiers par les écoles supérieures militaires et la présence d'un général à la tête de la direction générale de la gendarmerie nationale en témoignent.

En outre, depuis septembre 2004, une force de gendarmerie européenne a été créée. Elle intéresse de nombreux partenaires. La contribution de la gendarmerie à l'action des armées hors de nos frontières a également été renforcée.

Monsieur Faure, les OPEX de la gendarmerie nationale coûtent aujourd'hui 25 millions d'euros : 20 millions d'euros pour le traitement des personnels et 5 millions d'euros au titre des dépenses de fonctionnement. Elles sont couvertes par la provision OPEX du ministère de la défense placée dans le programme « Préparation et emploi des forces » dont le CEMA, le chef d'état-major des armées, est responsable. Les crédits ne sont donc pas pris sur ceux de la gendarmerie.

Plus que jamais, par les moyens que nous lui avons alloués, par sa faculté d'adaptation à son environnement, par son caractère militaire, la gendarmerie nationale démontre qu'elle est un pilier essentiel de la sécurité des Français, sur le territoire national comme à l'étranger.

Le projet de budget qui vous est présenté, mesdames, messieurs les sénateurs, confirme l'engagement du Gouvernement, ainsi que ma détermination personnelle, à poursuivre dans cette voie.

La gendarmerie nationale intervient dans tous les domaines, qu'il s'agisse du terrorisme ou d'actions de terrain au quotidien. Il est vrai que, face au terrorisme, la gendarmerie, avec les autres forces armées, participe à notre protection en menant des actions à l'extérieur, traite les racines mêmes du terrorisme, mais a également une capacité de réaction si, par malheur, un attentat intervenait sur notre territoire. Elle veille notamment à garantir la continuité du fonctionnement de l'État. Nous disposons aujourd'hui de forces spécialement dédiées à ce type de problèmes ; je les ai d'ailleurs rencontrées voilà quinze jours à peine au cours d'un exercice.

La gendarmerie nationale y participe, comme elle participe à toutes les actions de sécurité civile, et ce grâce à l'éventail de ses compétences et de ses capacités d'action qui vont des opérations de plus haute intensité jusqu'au quotidien. C'est ce qui fait la force de la gendarmerie nationale et, grâce à elle, nous pouvons assurer les Français de notre volonté continue de les protéger le mieux possible dans un monde qui présente constamment des risques, car nous avons tous ce devoir. (Applaudissements prolongés sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Sécurité
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2006
Art. additionnels après l'art. 85

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Sécurité » figurant à l'état B.

ÉTAT B

Autorisations d'engagement : 15 990 706 214 euros ;

Crédits de paiement : 15 286 669 945 euros.

M. le président. L'amendement n° II-143, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la

mission et des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Police nationale

Dont Titre 2

Gendarmerie nationale

Dont Titre 2

58 707 860

2 175 229

TOTAL

58 707 860

2 175 229

SOLDE

+ 58 707 860

- 2 175 229

La parole est à Mme le ministre.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Cet amendement revêt un caractère technique.

En effet, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture les amendements gouvernementaux visant à transférer 602 millions d'euros au titre des crédits de la gendarmerie nationale de la mission « Défense » à la mission « Sécurité ».

De nombreux parlementaires avaient souhaité clarifier la situation en procédant à un regroupement des moyens mis à la disposition de la gendarmerie nationale dans la mission « Sécurité ». Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, j'ai pensé que le caractère militaire de la gendarmerie nationale serait renforcé en traitant celle-ci comme l'armée de terre ou l'armée de l'air, c'est-à-dire en regroupant les différents éléments qui la concernent, qu'il s'agisse de l'entraînement, de l'équipement ou du logement, par exemple. J'ai donc accepté cette formule.

Cet amendement vise à regrouper tous les crédits de la gendarmerie nationale dans un même programme, ce qui facilite l'analyse des coûts voulue par la LOLF.

Les montants déplacés reposaient sur l'hypothèse selon laquelle le montant des autorisations d'engagement prévus en 2006 au titre des infrastructures et de l'informatique générale, dont je vous ai parlé tout à l'heure, était égal à celui des crédits de paiement. Mais nous nous sommes aperçus que tel n'était pas tout à fait le cas.

C'est la raison pour laquelle je vous demande aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs, de transférer 58,7 millions d'euros supplémentaires au titre des autorisations d'engagement vers le programme « Gendarmerie nationale », pour éviter un déséquilibre.

Ces crédits sont nécessaires pour assurer le déroulement normal de la programmation immobilière de la gendarmerie nationale, l'une de mes priorités.

Inversement, je vous demande de transférer 2,2 millions d'euros au titre des crédits de paiement vers la mission « Défense », afin de tenir compte de la fixation maintenant définitive du périmètre respectif des deux missions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial. Une meilleure distinction entre les crédits des deux missions rend l'ensemble beaucoup plus lisible. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je tiens à remercier Mme le ministre d'avoir opté pour la clarification.

Le transfert des crédits de logistique et des crédits immobiliers de la gendarmerie nationale de la mission « Défense » vers la mission « Sécurité » rend infiniment plus lisibles les crédits inscrits à la mission que nous examinons ce matin. Il s'agit de la première année d'application de la LOLF et nous comprenons que des progrès restent à faire.

Comme M. le rapporteur spécial l'a indiqué, nous n'avons aucune observation à formuler quant à cet amendement ; la commission des finances l'approuve.

Toutefois, s'agissant des 602,3 millions d'euros qui ont été votés par les députés et que nous n'avons pas pu vérifier car l'indication est arrivée tardivement, je souhaiterais que vous nous apportiez des précisions, afin de pouvoir suivre particulièrement l'évolution des partenariats public-privé. Nous savons qu'un certain nombre de gendarmeries sont en construction dans le cadre de tels partenariats.

Comme nous avons modifié la LOLF de telle sorte que nous puissions assurer un bon contrôle parlementaire sur les autorisations d'engagement, j'apprécierai que vous nous fassiez connaître, dans les jours qui viennent, madame la ministre, la liste des opérations de partenariat public-privé.

Je vous remercie une fois encore, madame le ministre, d'avoir veillé à ce que d'emblée, dès sa première version, la mission « Sécurité », conforme à la LOLF, intègre l'ensemble des crédits de la gendarmerie nationale.

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je vous apporterai une réponse dans les prochaines semaines, peut-être même dans les prochains jours, monsieur Arthuis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-143.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Sécurité », ainsi modifiés.

(Ces crédits sont adoptés.)

Art. 52 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2006
Sécurité civile

Articles additionnels après l'article 85

M. le président. J'appelle en discussion les amendements nos II-146 et II-147 tendant à insérer des articles additionnels après l'article 85 qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Sécurité ».

L'amendement n° II-146, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 85, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les contrats des adjoints de sécurité signés en application de l'article 36 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité et venant à échéance en décembre 2005 et au cours de l'année 2006 peuvent être prolongés pour une durée de six  mois non renouvelable.

L'amendement n° II-147, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 85, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le I de l'article 36 de la loi n°95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« I. bis - Pour l'exercice des mêmes missions, l'État peut conclure avec les personnes mentionnées au premier alinéa du I des contrats d'accompagnement dans l'emploi dans les conditions fixées à l'article L. 322-4-7 du code du travail. La durée de la convention et du contrat est limitée à 24 mois. Par dérogation au quatrième alinéa de cet article, les bénéficiaires sont recrutés en qualité de contractuels de droit public.

« Au terme du contrat d'accompagnement dans l'emploi de vingt-quatre mois, les agents ainsi recrutés poursuivent leur mission d'adjoint de sécurité pour une durée maximale de trois ans non renouvelable. La durée cumulée d'exercice des missions d'adjoints de sécurité par une même personne ne peut excéder 5 ans ».

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. À la suite des événements survenus dans un certain nombre d'agglomérations de notre pays, le Premier ministre a annoncé le recrutement en contrat d'accompagnement dans l'emploi de 2 000 adjoints de sécurité, les ADS, au cours de l'année 2006.

Des crédits ont été votés à cet effet au cours d'une seconde délibération à l'Assemblée nationale. En outre, un dispositif juridique autorisant de tels recrutements est soumis aujourd'hui à votre approbation.

Pour que cette disposition puisse prendre effet de façon aussi large que souhaité, une autre disposition est nécessaire : c'est l'objet du présent amendement. En effet, ces nouvelles recrues, comme tous les adjoints de sécurité, seront formées pendant trois mois en école de police. Or les capacités d'accueil de ces écoles sont, comme vous le savez, limitées en raison des nombreux recrutements actuels.

Aussi, il vous est donc proposé de prolonger à titre exceptionnel et de manière limitée dans le temps les contrats des ADS arrivant à échéance au cours de l'année 2006 et courant normalement sur cinq ans.

Cette mesure permettra en outre de bénéficier de l'action d'agents déjà formés, qui connaissent la police nationale et les quartiers dans lesquels ils sont appelés à exercer leurs missions. Elle pourrait concerner au maximum 1 426 personnes dont les contrats viennent à échéance en décembre 2005 et au cours de l'année 2006.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial. La commission a émis un avis favorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Peyronnet. Nous nous félicitons de cette disposition, qui consiste, d'une part, à permettre le recrutement de nouveaux ADS et, d'autre part, à prolonger, quoique sous une forme légèrement différente, des contrats d'emploi des ADS arrivant à échéance.

Nous voulons y voir une réorientation de la politique du Gouvernement. À bien lire l'objet de ces amendements, je suis convaincu que cette réorientation fait suite aux violences urbaines. Le recrutement de nouveaux emplois-jeunes n'était pas prévu avant que surviennent ces événements. Que n'avons-nous entendu lorsque nous les avons créés, qu'il s'agisse des emplois de la police ou, davantage encore, des autres ! On nous disait que ces emplois seraient dangereux non seulement pour eux, mais aussi pour les personnes qu'ils allaient rencontrer. Or il s'est avéré que la mixité sociale, la mixité des origines et la mixité des sexes ont facilité la proximité de ces jeunes avec la population. C'est un atout important pour la proximité de la police, à condition que ces jeunes soient bien encadrés, ce qui sera le cas, à n'en point douter.

Pas de caricature : M. Goujon me ferait presque dire que j'étais favorable aux émeutes. C'est excessif. Il vaudrait mieux que nous nous parlions de façon plus sereine. De même, nous sommes conscients, monsieur le ministre, que la police de proximité remplit deux missions auprès de la population : d'une part, elle mène des investigations et éventuellement, des actions répressives - nous sommes bien d'accord - ; d'autre part, et de façon indispensable, elle a vocation à se rapprocher des gens, ce que vous dites en des termes auxquels nous ne sommes pas fondamentalement opposés. Néanmoins, vous ajoutez, monsieur le ministre, qu'elle ira beaucoup plus tardivement dans les quartiers, à un moment où ils seront accessibles. Or nous pensons que la police de proximité, telle que nous l'avons définie, doit y aller dès maintenant, peut-être de manière différente, pour assurer cette proximité. Les ADS sont les atouts essentiels d'un retour à la proximité.

Je vous rappelle les propos que tient ce matin un boulanger dans Le Parisien : il regrette le temps où les agents pratiquaient le dialogue avec les jeunes. Pour notre part, nous voulons rétablir ce dialogue, car c'est un élément important.

La répression, quant à elle, se pratique dans l'immédiateté. Elle est nécessaire et nous ne nous y sommes jamais opposés. Mais elle doit avoir pour corollaire une politique économique de long terme, plus lourde, plus coûteuse, visant à l'implantation d'activités sociales, culturelles, éducatives, etc.

La décision de proroger les postes d'ADS existants et celle de créer de nouveaux emplois d'ADS marque une inflexion dans la politique purement répressive telle qu'elle était menée jusqu'à présent. Nous en acceptons l'augure et nous voterons par conséquent ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Je suis tout aussi soucieuse de la bonne formation des agents afin d'assurer la sécurité des quartiers. Je peux comprendre que l'on prolonge les contrats en cours des ADS. Au-delà, je suis plutôt partisane de la pérennisation de ce type d'emplois, lesquels pourraient cependant, me semble-t-il, relever d'un service public de la police de proximité. Pour cette raison, nous nous abstiendrons.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur Peyronnet, je vous remercie de souscrire à notre démarche. Même si nous nous rejoignons globalement pour considérer qu'il faudra donner à chacun la possibilité de s'épanouir en toute liberté dans ces quartiers et permettre qu'on puisse y intervenir au nom de la République sans subir la moindre menace -  un certain nombre de gouvernements n'ont guère fait preuve d'obstination en ce sens -, je vous précise néanmoins que ces recrutements n'auront aucunement pour conséquence de modifier en quoi que ce soit la doctrine d'utilisation de la police non plus que les orientations données par le Gouvernement. Nous avons fait le choix de la fermeté, de l'autorité et de la justice et nous poursuivrons dans cette direction, parce que c'est ce que veulent les Français.

Pour autant, je vous rappelle que le ministre de l'intérieur a souhaité en 2002 réorienter l'action de la police de proximité afin de renforcer sa capacité judiciaire. Cela n'aurait pas été possible avec les ADS, qui ne peuvent être officier de police judiciaire, ne peuvent que dresser des contraventions en tant qu'adjoint de police judiciaire et ne peuvent se trouver sur la voie publique la nuit.

Le dispositif des ADS a connu des évolutions majeures depuis trois ans. C'est ce qui fait toute la différence. Ils sont mieux rémunérés - un régime indemnitaire a été créé -, ils sont mieux formés - leur scolarité a été allongée à trois mois -, ils sont mieux encadrés - à la suite de la réforme des corps et carrières - et mieux intégrés au monde du travail.

Les ADS ont été réorientés vers des missions de voie publique et d'accueil du public, grâce à l'arrivée en plus grand nombre, dans les services, de personnels administratifs, techniques et scientifiques.

Aujourd'hui, nous proposons de permettre à un certain nombre de jeunes très éloignés d'une qualification de s'intégrer dans le dispositif policier et de bénéficier en même temps, grâce au Gouvernement, d'une véritable politique d'intégration, sans pour autant modifier notre doctrine d'utilisation de la police. Nous voulons que la police assure une sécurité de proximité, et non une simple présence de proximité qui, il fut un temps, l'apparentait en réalité à une police d'agents d'ambiance (Exclamations sur les travées du groupe socialiste) ne répondant pas à l'attente de nos concitoyens.

M. Charles Gautier. Caricature !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Telle est la vocation de la police et c'est cette vocation que nous avons l'ambition de continuer à défendre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-146.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 85.

Je mets aux voix l'amendement n° II-147.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 85.

Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Sécurité ».