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SOUHAITS DE BIENVENUE à une délégation parlementaire du paraguay

M. le président. Mes chers collègues, j'ai le plaisir et l'honneur de saluer la présence dans notre tribune officielle du président du Sénat du Paraguay, par ailleurs président du Congrès de ce pays, M. Carlos Filizzola. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)

C'est l'occasion pour moi de saluer le représentant d'un pays avec lequel nous entretenons des relations anciennes, qui se développent de nouveau depuis la fin de la dictature, en 1989.

Le Paraguay a fait, comme la France, le choix de l'ouverture. Il s'est engagé au sein du Mercosur, qui constitue en Amérique du Sud le grand projet économique et politique, à l'instar de l'Union européenne pour l'Europe.

Notre coopération se développe, et vous pouvez compter, monsieur le président, sur notre Haute Assemblée pour veiller attentivement à la promotion de notre coopération interparlementaire.

Je forme des voeux pour que votre séjour en France soit aussi fructueux qu'instructif. Je ne doute pas qu'il annonce beaucoup d'autres échanges entre nos deux institutions.

Vive l'amitié entre la France et le Paraguay ! ¡ Viva la amistad entre el senado de Francia y el senado de Paraguay ! (Applaudissements.)

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nommination d'un membre d'un organisme extraparlementaire

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Léonce Dupont membre du conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires. (Applaudissements.)

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question de même que le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.

prix de l'eau et service public

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. Roland Muzeau. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question, qui s'adresse à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable, porte sur un problème d'une importance toute particulière pour nos concitoyens, le prix de l'eau.

L'eau est un bien collectif et doit, par conséquent, être accessible à tous.

Une association nationale de consommateurs, l'UFC-Que choisir, vient de rendre publics les résultats d'une étude portant sur le niveau des prestations facturées aux usagers en matière de distribution et d'assainissement d'eau.

Que constate-on ?

On observe des surfacturations, des insuffisances d'entretien et de renouvellement des réseaux, une qualité parfois douteuse des prestations, des majorations excessives de prix sans contrepartie. Tel est le paysage de la distribution d'eau dans notre pays, paysage dont chacun sait qu'il est dominé de longue date par deux entreprises privées qui trustent les concessions de service public en ces matières.

La démonstration est faite qu'un service public assumé essentiellement par des entreprises de droit privé n'est pas respectueux d'une véritable égalité entre les citoyens.

Ainsi, selon l'UFC-Que choisir, le principal syndicat de distribution d'eau dans notre pays surfacturerait chaque année 200 millions d'euros aux usagers.

M. Guy Fischer. C'est vrai !

M. Roland Muzeau. Et l'étude indique, entre autres choses, que, contrairement à toute logique, le prix de l'eau est d'autant plus élevé que la commune ou l'agglomération de distribution est importante.

La marge nette des distributeurs s'élève, selon les cas, de 26 % à 60 % du prix facturé aux usagers.

L'UFC-Que choisir appelle à faciliter, en matière de distribution et d'assainissement, toute mesure tendant à remplacer les concessions de service public par des régies municipales ou intercommunales.

Toutes les communes ayant opté pour cette solution l'ont d'ailleurs constaté : le prix facturé aux usagers a baissé ! (Murmures sur les travées de l'UMP.)

Ce sont les usagers et leur pouvoir d'achat qui sont les victimes de ces dérives, le poste eau et énergie figurant parmi les postes ayant connu la progression la plus sensible au cours des dernières années.

Nous ne pourrons pas ignorer cette question lors de l'examen en nouvelle lecture du projet de loi sur l'eau.

Compte tenu des éléments incontestables, précis et chiffrés fournis par cette étude, quand pensez-vous prendre les mesures adéquates pour faire cesser ce qui s'apparente purement et simplement à un racket dont sont victimes les usagers, madame la ministre ?

Quelles modalités nouvelles de contrôle de passation des marchés publics comptez-vous adopter sans tarder ?

Quelles dispositions entendez-vous mettre en oeuvre pour faire enfin valoir des critères de service public en matière de distribution d'eau, et pour permettre aux collectivités locales de sortir plus facilement des contrats dont elles sont souvent prisonnières ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, ce n'est pas dans cet hémicycle que je vais rappeler le principe de libre administration des collectivités.

Chaque maire est responsable devant ses administrés. Il convient donc de respecter avant tout son choix quant à l'organisation de la gestion des services de l'eau. Nous ne devons pas faire d'idéologie sur ce sujet, et l'étude que vous mentionnez, monsieur Muzeau, n'en fait d'ailleurs pas non plus.

Il va de soi que le gouvernement de Dominique de Villepin n'entend pas accepter d'éventuelles dérives. Notre exigence est donc double : d'une part, la transparence du service et de son coût, d'autre part, la solidarité.

La transparence doit évidemment s'appuyer sur le rapport annuel du maire relatif au prix et à la qualité des services publics d'eau potable, outil important que j'invite tous les maires à bien mettre en valeur.

Par ailleurs, je souhaite que le contenu de ce rapport soit complété, afin que plus d'informations soient données quant aux performances environnementales et à la qualité du service rendu aux usagers. Le travail est largement engagé à ce sujet, mais il faut le poursuivre.

Ces données seront diffusées au niveau national afin de renforcer l'information disponible sur le prix des services.

De plus - vous l'avez d'ailleurs souligné, monsieur Muzeau -, le projet de loi sur l'eau qui devrait revenir devant la Haute Assemblée début juin prévoit d'identifier les programmes de travaux dans les contrats de délégation de services. Cette disposition complètera les obligations de compte rendu des opérateurs privés et renforcera encore la transparence des prix et des performances des services en réponse aux demandes légitimes des consommateurs et des élus locaux.

Le Gouvernement renforce également la solidarité à l'égard de nos concitoyens les plus démunis, car, au-delà du dispositif existant pour venir en aide aux impayés de factures d'eau, le projet de loi portant engagement national pour le logement, défendu par Jean-Louis Borloo, prévoit, à la demande du Premier ministre, l'interdiction de couper l'eau aux personnes en situation de précarité, pendant la période hivernale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Souhaits de bienvenue à M. Carlos Filizzola, président du sénat dU Paraguay

M. le président. Mes chers collègues, j'ai le plaisir et l'honneur de saluer la présence dans notre tribune officielle du Président du Sénat du Paraguay, M. Carlos Filizzola.

Monsieur le président, nous formons des voeux pour que votre séjour en France soit aussi fructueux qu'instructif. Je ne doute pas qu'il annonce beaucoup d'autres échanges entre nos deux institutions.

Vive l'amitié entre la France et le Paraguay ! (Mmes et MM les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

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Questions d'actualité au Gouvernement (suite)

M. le président. Nous reprenons les réponses aux questions d'actualité au Gouvernement.

contrat première embauche

M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier.

M. Bernard Seillier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Monsieur le ministre, le chômage des jeunes de moins de vingt-six ans est un drame national.

Au-delà des carences éventuelles en matière de formation professionnelle, on doit s'interroger sur d'autres phénomènes de société : la réticence des employeurs, dans un contexte de guerre économique généralisé, à embaucher quelqu'un sans expérience préalable du travail salarié, l'angoisse ou la difficulté de certains jeunes à faire le saut dans le monde du travail réglé par une discipline à laquelle ni la famille ni l'école ne les ont assez préparés ; le scepticisme d'une société dépressive qui doute de sa capacité à créer des attitudes de confiance et d'audace.

Il faut d'urgence sortir de cette situation en stimulant et en encourageant les uns à s'engager dans le premier travail, les autres à effectuer la première embauche.

C'est cette nouvelle dynamique que vous comptez créer, monsieur le ministre, avec le contrat première embauche. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Bernard Seillier. Cet élan, beaucoup de jeunes connaissant ou craignant de connaître la spirale infernale de l'échec sont prêts à le prendre avec vous aujourd'hui.

M. René-Pierre Signé. Ils la connaîtront au bout de deux ans !

M. Bernard Seillier. Quelques-uns restent figés par la peur du risque. Comment les en délivrer ?

Le contrat première embauche peut-il être l'un des éléments déclenchants de la nouvelle confiance que vous vous employez à faire éclore au sein de la société ?

M. Jean-Pierre Sueur. C'est une question téléphonée !

M. Bernard Seillier. Comment répondre à ceux qui prennent les jeunes en otage en maniant la désinformation et la peur ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP. -Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Seillier, vous avez raison, cette question comporte deux sujets.

S'agissant tout d'abord de la désinformation, nous sommes dans une forme de société du slogan. (Ah ! sur les travées de l'UMP.)

La désinformation consiste à faire planer le doute sur la nature du contrat première embauche. Est-ce un contrat à durée déterminée ou un contrat à durée indéterminée ?

M. Raymond Courrière. Les deux, mon capitaine !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. C'est un contrat à durée indéterminée ! (Oui ! sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vraiment du slogan !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Respecte-t-il le droit du travail français ? (Oui ! sur les travées de l'UMP.) Il le respecte !

Est-il accompagné d'un préavis ? (Oui ! sur les travées de l'UMP.) Il est accompagné d'un préavis !

Est-il accompagné d'un droit à la formation depuis le premier mois ? (Oui ! sur les travées de l'UMP.) Oui, il l'est !

De plus, cas unique dans notre pays, il est accompagné du LOCA-PASS.

J'ai vu, au journal télévisé de treize heures, qu'une association demande que les contrats soient dorénavant accompagnés du LOCA-PASS ; nous allons publier une dépêche pour leur indiquer que c'est fait !

Voilà pour l'information et la désinformation. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. C'est de la faute des journalistes !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Ce qui est plus grave, monsieur Seillier, c'est que...

M. Guy Fischer. Il n'y a pas de logement !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...l'on propose des petits boulots en CDD.

M. Jean-Louis Borloo, ministre. On veut faire croire que les jeunes Français n'aspirent qu'à cela,...

M. Paul Raoult. C'est la faute des journalistes !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...alors que notre pays - vous le savez comme moi - a besoin de jeunes conquérants, qu'ils conquièrent la Creuse ou la Chine, mais qu'ils le fassent grâce à un métier et à une formation professionnelle. Tel est notre objectif ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. -Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

ARCELOR

M. le président. La parole est à M. Jean-François Humbert.

M. Jean-François Humbert. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'offre publique d'achat hostile de Mittal Steel, sur Arcelor suscite beaucoup d'émotion.

M. Roland Muzeau. C'est le capitalisme !

M. Jean-François Humbert. Notre inquiétude et celle des Français résident dans le fait que Mittal Steel, société non sujette à OPA puisque la famille fondatrice détient 80 % du capital, n'a pas apporté d'explication plausible à cette OPA.

M. Guy Fischer. C'est comme pour Alcan !

M. Jean-François Humbert. Elle n'a fourni ni concept industriel clair ni garanties pour la préservation des sites existants ; aucune concertation préalable n'a eu lieu avec les principaux intéressés.

M. Dominique Braye. Stalinisme !

M. Jean-François Humbert. Si nous sommes favorables à la compétition économique, source d'émulation et de croissance sur les plans européen et mondial, nous voulons une compétition loyale, un combat à armes égales, avec des règles claires s'imposant à tous. Il n'en est pas ainsi pour Mittal Steel, et nous avons donc de bonnes raisons d'être inquiets.

Des milliers de postes sont menacés. Arcelor emploie en effet 95 000 salariés, dont 78 000 dans l'Union européenne et 27 000 en France.

Le 1er février dernier, les gouvernements français et luxembourgeois se sont déclarés opposés à ce projet d'OPA, et nous nous en félicitons.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, j'aimerais connaître les mesures et les actions que vous comptez mener avec nos partenaires européens pour préserver nos emplois, et pour que la grande aventure de la sidérurgie française, notamment lorraine, ne s'arrête pas là.

N'est-il pas urgent, monsieur le ministre, de définir une véritable stratégie industrielle européenne ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)

M. Didier Boulaud. C'est le libéralisme !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est normal tout cela !

M. Didier Boulaud. On a droit à une leçon de libéralisme !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, nous avons appris vendredi dernier les intentions de la société Mittal Steel sur le groupe européen Arcelor. Dès que nous avons eu connaissance de cette information, M. le Premier ministre m'a demandé de recevoir sans tarder le président d'Arcelor, ce que j'ai fait samedi, ainsi que le président de Mittal Steel, que j'ai reçu lundi.

M. Didier Boulaud. Ça va tout changer !

M. Raymond Courrière. Il a eu peur !

M. Thierry Breton, ministre. L'un et l'autre m'ont indiqué qu'à ce jour le projet industriel n'est pas clairement finalisé, et vous l'avez d'ailleurs rappelé, monsieur le sénateur.

Au nom du Gouvernement, j'ai fait part de mon interrogation quant au lancement d'une OPA hostile (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste) sans qu'au préalable, comme c'est pourtant la coutume dans la quasi-totalité des grandes affaires,...

M. Didier Boulaud. Cela va vous rappeler Vilvoorde !

M. Thierry Breton, ministre. ... des échanges aient eu lieu et que l'on ait apprécié si une telle action pouvait créer, dans l'intérêt de toutes les parties prenantes - actionnaires, salariés, clients, et tous ceux qui sont concernés par cette affaire - une situation favorable.

Sont également concernés l'ensemble des pays européens - je rappelle qu'Arcelor est un groupe issu de la sidérurgie européenne -, c'est-à-dire, au-delà de la France, le Luxembourg, la Belgique, l'Espagne et l'Allemagne.

M. Didier Boulaud. Le libéralisme !

Mme Hélène Luc. Et l'argent public !

M. Thierry Breton, ministre. L'ensemble des pays européens concernés qui ont, à des degrés divers, leur mot à dire ont décidé de suivre cette affaire de la façon la plus vigilante.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On croit rêver !

M. Thierry Breton, ministre. Dans l'attente de connaître ce projet -  pour l'instant, tel n'est en effet pas le cas -, nous sommes les uns et les autres extrêmement vigilants et mobilisés, dans l'intérêt de l'emploi et de la sidérurgie européenne. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE. -Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. François Marc. Il n'a rien dit !

financement du plan de cohésion sociale (maisons de l'emploi)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel.

M. Jean-Marie Bockel. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

La réduction de la durée du chômage est à mon avis la meilleure voie - bien supérieure à l'inflation de mesures nouvelles - pour lutter contre l'exclusion, notamment des jeunes. Pour y parvenir, la seule logique qui vaille est celle d'un accompagnement humain, personnalisé et approfondi.

Les collectivités locales n'ont pas attendu la loi de programmation pour la cohésion sociale pour mener ce travail de fond au travers des missions locales et des plans locaux pour l'insertion et l'emploi, qui ont été créés sur leur initiative.

Les maisons de l'emploi et de la formation, créées par la loi précitée, veulent généraliser cette logique et y impliquer davantage tous les partenaires de la politique de l'emploi, dont l'État. C'est bien !

Cependant, sur la bonne centaine de maisons de l'emploi labellisées en 2005, seules dix-huit, à la fin du mois de décembre, étaient dotées d'une convention financière. Peut-être sont-elles plus nombreuses aujourd'hui.

Par ailleurs, en décembre dernier, le Premier ministre a annoncé la mise en place d'un accueil des jeunes en difficulté d'insertion professionnelle, avec obligation de leur proposer, sous trois mois, une solution d'accès à l'emploi. Une approche aussi exhaustive du public dans les maisons de l'emploi ne peut être mise en place au débotté, sans que les moyens adéquats aient été prévus.

Mais ici comme dans d'autres domaines, le « retard à l'allumage » du plan de cohésion sociale ne facilite pas la tenue des objectifs !

Enfin, s'agissant justement des moyens, monsieur le ministre, vous savez comme moi la part très importante que représentent les fonds européens dans la politique française d'insertion par l'emploi. Pour la France, ces fonds se sont élevés à 5 milliards d'euros sur la période 2000-2006. Or, depuis que le Parlement européen a rejeté l'accord donné au mois de décembre par le Conseil européen sur le budget européen 2007-2013, nous sommes dans l'incertitude la plus grande.

Monsieur le ministre, mes interrogations sont donc les suivantes.

En premier lieu, le Gouvernement est-il prêt à faire confiance aux élus locaux pour mener, aux côtés de leurs partenaires, une véritable stratégie territoriale pour l'emploi, et à leur accorder, à cette fin, la liberté d'organisation et les moyens qui s'imposent ?

M. Jean-Marie Bockel. Pour commencer, pouvez-vous vous engager à accélérer la mise en place des conventions d'objectifs pour l'ensemble des maisons de l'emploi ?

En second lieu, quelle est la stratégie du Gouvernement pour défendre les politiques de l'emploi au moyen des fonds européens ?

M. Didier Boulaud. Transferts de charges !

M. Jean-Marie Bockel. Saurez-vous démontrer, sur la scène européenne, une véritable pugnacité pour défendre globalement les fonds européens qui devront, dès l'année prochaine, fournir les moyens de ce que vous nommez la « bataille pour l'emploi » ?

Enfin, saurez-vous lundi prochain, lors d'un arbitrage qui, me semble-t-il, sera rendu par M. le Premier ministre, faire le choix, sur le plan national, de conserver au Fonds social européen, le FSE, une part importante - au moins 50 % - dans l'enveloppe du fonds « compétitivité et emploi » ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur, quelle est la raison d'être des maisons de l'emploi ? Il s'agit de permettre à tout demandeur d'emploi de disposer, dans un lieu unique, de l'ensemble des informations concernant non seulement les emplois immédiats, à moyen terme, voire à deux ou trois ans, mais aussi la formation ; le dossier unique serait également accessible à partir de cette structure. Par définition, la maison de l'emploi est partenariale, et les collectivités locales ont un rôle majeur à jouer à cet égard. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Raymond Courrière. Elles le jouent déjà !

M. René-Pierre Signé. Il enfonce des portes ouvertes !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Je rappelle que, depuis des années, l'ensemble des réseaux non seulement avaient du mal à dialoguer, mais encore étaient parfois en concurrence féroce. C'est la raison pour laquelle ont été prévues ces maisons de l'emploi, dont 128 sont à l'heure actuelle labellisées, labellisation qui vaut notification de la part de l'État.

Quant à la convention, elle requiert la participation de l'ensemble des partenaires locaux, qu'il s'agisse des collectivités, de l'ANPE, de l'UNEDIC, des chambres de métiers ou des chambres de commerce.

M. Raymond Courrière. Transfert de charges !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Le Gouvernement accélère donc, mais il n'est pas le seul concerné.

Je rappelle que l'État consacrera 685 millions d'euros pour l'investissement et un peu plus d'un milliard d'euros pour le fonctionnement. Il est à l'heure puisque le décret d'application concerné a été adopté voilà seulement cinq mois. En réalité, on constate une mobilisation générale de tous les acteurs en cause.

M. Didier Boulaud. Il ne se passe rien !

M. René-Pierre Signé. On ne voit rien venir !

M. Jean-Louis Borloo, ministre Monsieur Bockel, pour ce qui concerne les fonds européens, je comprends bien votre préoccupation. En réalité, la nomenclature et l'organisation de ces fonds ont été modifiées. Nous ne sommes plus sous l'ancien FEDER strict ou l'ancien FSE. (M. Jean-Marie Bockel fait un signe d'assentiment.) Par conséquent, toute comparaison sera relativement difficile à réaliser.

Cependant, les actions que le FSE permettait de soutenir continueront à l'être sans attendre le 1er avril ! Des réunions se tiendront toute cette semaine, sous l'autorité du Premier ministre.

En toute sincérité, je n'ai aucune inquiétude sur deux points.

M. Didier Boulaud. Nous, si ! Il ne se passe rien. C'est l'indifférence !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Ces deux points concernent, d'une part, nos capacités à soutenir les projets en matière de retour à l'emploi et, d'autre part, la gestion plus locale et plus territoriale de ces différents fonds. Monsieur le sénateur, vous pouvez être parfaitement rassuré. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Didier Boulaud. C'est la Belle au bois dormant !

M. Dominique Braye. Mais vous n'êtes pas le prince charmant ! (Rires.)

arcelor

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le ministre, permettez-moi de revenir sur cette OPA du groupe Mittal Steel sur Arcelor qui préoccupe nombre de personnes et suscite beaucoup d'interrogations.

M. Claude Biwer. L'inquiétude des régions est grande, surtout en Lorraine, dont je suis un des élus et où le groupe Arcelor est particulièrement implanté.

M. Raymond Courrière. C'est le libéralisme !

M. Claude Biwer. En effet, lorsque le marché mondial sera moins porteur, il est à craindre qu'un groupe issu de la fusion de Mittal Steel et d'Arcelor ne privilégie les sites industriels les plus rentables, c'est-à-dire ceux qui sont situés dans les pays où le prix de revient est très bas, au détriment des usines européennes, ce qui, à terme, pourrait conduire à la quasi-disparition de la sidérurgie européenne. Cela nous ramène à la problématique des délocalisations.

Monsieur le Premier Ministre, vous avez placé votre action voilà quelques mois sous le signe du patriotisme économique et, plus récemment, sous celui du patriotisme économique européen. Évidemment, nous vous soutenons à cet égard.

Même si nous sommes conscients du fait que la décision finale appartiendra aux actionnaires du groupe Arcelor, le patriotisme économique national ne nécessiterait-il pas que des réformes structurelles soient engagées afin de rendre notre pays plus compétitif et plus attractif et que, à l'instar de l'Irlande, par exemple, l'État et les entreprises françaises consacrent plus de moyens à la recherche-développement, afin de se tourner vers des productions haut de gamme, que peuvent difficilement concurrencer les pays à bas coûts ?

Le patriotisme économique national ne devrait-il pas conduire l'État à réduire plus rapidement les déficits publics, comme vous souhaitez d'ailleurs le faire, et à réorienter l'épargne des Français vers les entreprises ? Je rappelle qu'une part importante du capital des plus grandes entreprises françaises est détenue par des fonds de pensions anglo-saxons.

Le patriotisme économique européen, quant à lui, ne devrait-il pas conduire l'Union européenne à se doter enfin d'une véritable politique industrielle ? Ainsi, plutôt que de laisser Arcelor mener un combat sans merci avec ThyssenKrupp pour prendre le contrôle de Dofasco, combat dont on mesure aujourd'hui les conséquences, n'eût-il pas été plus judicieux de tenter de former un grand groupe européen autour de ces deux entreprises ? Ne payons-nous pas aujourd'hui le « non » français au référendum qui nous prive de moyens de pressions dans ce sens ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah ! Changeons le peuple !

M. Claude Biwer. Enfin, en cas de réussite éventuelle de l'OPA de Mittal Steel sur Arcelor, quel sera, à terme, l'avenir des usines françaises, de leurs dizaines de milliers de salariés, de leurs chercheurs et des régions concernées, notamment la Lorraine,...

M. le président. Monsieur Biwer, veuillez poser votre question !

M. Claude Biwer. ...qui a déjà tant souffert des restructurations industrielles passées et dont les habitants sont, une fois de plus, plongés dans une grande inquiétude ? Ces derniers peuvent-ils espérer que, même dans un marché moins porteur, l'emploi pourra être maintenu ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées de l'UMP et du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez indiqué, c'est un combat qui est engagé, car l'OPA a été déclarée hostile par l'une des parties prenantes. In fine, ce seront les actionnaires qui décideront,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les actionnaires ont toujours raison !

M. Didier Boulaud. Cela ne sert à rien de jouer les golden boys !

M. Thierry Breton, ministre. ...lorsqu'ils seront saisis du projet, que nous ne connaissons pas encore, ce dont je me suis d'ailleurs quelque peu étonné.

M. Didier Boulaud. Il joue aux indiens et aux golden boys !

M. Thierry Breton, ministre. Cela étant dit, s'agissant des actionnaires, le Premier ministre a insisté pour que nous puissions aujourd'hui accompagner différemment l'actionnariat des entreprises.

M. René-Pierre Signé. Il est sans pouvoir !

M. Thierry Breton, ministre. De façon à pouvoir créer un actionnariat plus stable et plus long dans les entreprises, le Premier ministre a souhaité faire en sorte que les actionnaires qui décident de détenir pendant plus de six ans des actions de l'entreprise dans laquelle ils investissent bénéficient de l'exonération sur les plus-values. Ils seront ainsi incités à accompagner sur le long terme le développement des entreprises et non à répondre aux premières sirènes venues. Cette mesure a été adoptée tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative.

Le Premier ministre a aussi insisté - et cette mesure a été adoptée par le Parlement - pour que les salariés qui investissent dans leur entreprise bénéficient d'une exonération pendant la période de leur investissement, notamment de l'impôt sur la fortune,...

M. Didier Boulaud. C'est du capitalisme !

M. Thierry Breton, ministre. ... afin de favoriser la création d'un actionnariat long, au profit également desdits salariés.

M. Didier Boulaud. C'est le monde que vous avez voulu !

M. Thierry Breton, ministre. Enfin, je rappelle que, à la demande du Premier ministre, Gérard Larcher, Jean-Louis Borloo et moi-même travaillons sur un projet de loi qui a pour vocation d'associer désormais plus étroitement les salariés, les actionnaires et l'entreprise, de façon, entre autres, à créer ce noyau d'actionnaires que nous appelons de nos voeux...

M. Didier Boulaud. C'est le monde que vous avez voulu ! Vous n'avez qu'à vivre avec !

M. Thierry Breton, ministre. ... qui permettra aux entreprises françaises et européennes de se développer plus harmonieusement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)