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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question et le ministre qui lui répond disposent, chacun, de deux minutes trente.

CPE

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le Premier ministre, les débats sur l'égalité des chances ont clairement montré que ce texte, mal préparé, est loin d'être à la hauteur des enjeux mis en lumière par la crise qu'ont connue les banlieues françaises au mois de novembre dernier. Il est même un contresens qui pourrait être encore plus lourd de conséquences, tant les réponses que vous proposez ne font qu'aggraver la ségrégation sociale et la précarisation.

M. Jacques Blanc. Moins vite !

M. Henri de Richemont. On ne comprend rien !

M. Jean-Pierre Godefroy. Ségrégation avec l'apprentissage junior, qui remet en cause l'âge de la scolarité obligatoire, ...

M. Charles Revet. C'est totalement faux !

M. Jean-Pierre Godefroy. ... et qui est destiné à sortir le plus tôt possible du système scolaire les élèves en difficulté, pour en faire une main-d'oeuvre disponible rapidement et à bon marché.

En un an, vous avez abaissé l'âge d'autorisation du travail tous les dimanches et tous les jours fériés de dix-huit à quinze ans dans de nombreuses professions et vous nous avez fait revenir, pour partie, à la situation d'avant 1874 concernant le travail de nuit. (M. Jean-Luc Mélenchon applaudit.)

Précarisation avec le CPE qui, s'il est techniquement un CDI, est surtout un contrat amputé de toutes les protections et de toutes les garanties normalement offertes aux salariés, compte tenu, notamment, de la période d'essai portée à deux ans, au cours desquels les entreprises pourront licencier sans motivation. C'est manifestement contraire aux engagements internationaux de la France - convention 158 de l'Organisation internationale du travail et article 24 de la Charte sociale européenne - comme à la jurisprudence constante des plus hautes juridictions françaises - Conseil constitutionnel et Cour de cassation.

Le CPE, c'est une agression contre la jeunesse. En effet, comment construire son avenir avec cette insécurité quotidienne ? (Protestations sur les travées de l'UMP.)

C'est aussi une déréglementation du travail qui conduit à instaurer, entre les différentes catégories de salariés, une compétition exacerbée pour trouver un emploi. Même en étant dans leur bon droit, nombre d'entre eux hésiteront à saisir les juridictions pour ne pas obérer leur chance dans d'autres entreprises. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

Vous inversez la charge de la preuve ; c'est la judiciarisation des rapports sociaux que vous instituez. (Le brouhaha s'amplifie.)

M. le président. Un peu de silence, je vous prie !

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le Premier ministre, face aux protestations qui montent et qui s'expriment massivement dans la rue, vous annoncez maintenant l'ouverture d'une concertation à partir de la semaine prochaine, apparemment sans rapport direct avec le CPE. Pourriez-vous clarifier devant la Haute Assemblée ce que vous entendez par « enrichissement du CPE » ? C'était avant de présenter votre texte qu'il aurait fallu mener cette concertation, en respectant les engagements de la loi Fillon de 2004.

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le Premier ministre, c'est par centaines de milliers que nos jeunes vous interpellent.

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous leur proposez un marché de dupes, un simulacre de concertation a posteriori. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Monsieur le Premier ministre, allez-vous retirer le CPE ? (Non ! sur les travées de l'UMP.) Même dans votre majorité, des voix s'élèvent pour réclamer ce retrait ! Retirez-le dans l'intérêt du pacte de confiance démocratique qui doit exister entre le Gouvernement et les citoyens. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Didier Boulaud. C'est à de Charette qu'il faut donner la parole ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Yannick Bodin. Vous aviez disparu, monsieur le ministre !

M. le président. Silence !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Godefroy, puisque vous avez commencé en évoquant le travail des jeunes, permettez-moi de vous dire que la loi pour l'égalité des chances a, au contraire, rectifié l'ordonnance Guigou sur le travail de nuit,...

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... puisqu'elle rend obligatoire la présence du maître d'apprentissage ou du tuteur pendant l'activité des apprentis. (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Plusieurs sénateurs socialistes. Quel culot !

M. Jean-Luc Mélenchon. Pas à quatorze ans !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. A quinze ans ! Vous le savez bien, monsieur Mélenchon, vous êtes un expert !

S'agissant du deuxième volet de votre question, vous m'interrogez le jour où le Premier ministre vient de présider un comité interministériel des villes qui a permis de prendre des dispositions extrêmement importantes !

Plusieurs sénateurs socialistes. C'est un peu tard !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Ce n'est pas un peu tard, c'est dans la continuité de l'action qui a été engagée par le plan de cohésion sociale et le plan de rénovation urbaine. Il n'y a pas un sénateur-maire qui, sur le terrain, ne se félicite et de l'un et de l'autre ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

J'en viens au troisième volet de votre question. Monsieur Godefroy, après quatre-vingt-quinze heures de débat, vous savez pertinemment que le problème principal que nous avons à résoudre est celui d'une première expérience professionnelle qui soit la plus durable possible. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.) Ça, c'est un sujet !

M. René-Pierre Signé. C'est là qu'on vous « vire » !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Le problème de la jeunesse de notre pays, c'est d'avoir accès à cet engagement dans une entreprise, avec des équipes qui l'accueillent pour avoir cette première expérience.

M. René-Pierre Signé. Et après, on vous met à la porte !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Dans vos permanences, vous avez tous rencontré des jeunes qui expliquent que, malgré leurs diplômes et leur qualification, ils ne trouvent pas à se faire embaucher, faute d'expérience professionnelle.

Le texte sur l'égalité des chances est équilibré, car il permet à la fois d'offrir la première expérience professionnelle et, en cas de rupture de la part de l'entreprise, de sécuriser le parcours professionnel.

M. Claude Domeizel. Il ne répond pas !

M. Jean-Luc Mélenchon. On lui pose une question, il n'y répond pas !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. C'est sur ce sujet de la sécurisation que le Premier ministre nous a demandé, à Gérard Larcher et moi-même, d'avancer des propositions extrêmement audacieuses, ce que nous ferons avec les partenaires sociaux dans les tout prochains jours. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Didier Boulaud. Vous avez raison, entêtez-vous et continuez comme ça !

M. René-Pierre Signé. Il n'a rien dit !

M. Didier Boulaud. Il faut sonner l'hallali !

M. René-Pierre Signé. Et même la curée !

Stratégie nationale industrielle de développement des biocarburants

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'industrie et porte sur notre stratégie nationale de développement des biocarburants à la suite de l'annonce, par M. le Premier ministre, du résultat du deuxième appel d'offres « éthanol ».

En mai 2005, la filière éthanol a bénéficié d'une première attribution de 200 000 tonnes, réparties entre trois projets d'unités nouvelles : AB Bioénergie à Lacq, Cristanol à Bazancourt et BENP à Lillebonne. Pour autant, cette répartition n'a pas permis de lancer immédiatement les investissements, en raison de l'écart trop important entre les capacités des projets, proches de 200 000 tonnes, et le volume des agréments reçus, au plus égal à 80 000 tonnes.

Un nouvel appel d'offres avait donc pour finalité de conférer à ces trois projets une taille critique, cela afin d'affronter au plus vite la concurrence intracommunautaire. En effet, les unités allemandes et espagnoles, récemment construites ou en cours de réalisation, ont des capacités de l'ordre de 200 000 tonnes et bénéficient d'aides publiques importantes.

Après quelque temps d'hésitation, cette deuxième adjudication permettait donc à la France de se positionner de nouveau comme leader européen.

Or, monsieur le Premier ministre, vous avez indiqué que trois nouveaux projets s'ajoutaient à ceux qui ont été initialement retenus en mai 2005. De ce fait, aucun n'est en mesure de parvenir à la masse critique tant recherchée.

Certains opérateurs ayant annoncé leur intention d'engager de nouveaux investissements pour éviter d'accumuler du retard face à leurs concurrents communautaires, je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir me préciser les mesures que le Gouvernement envisage de prendre lors de l'attribution des 150 000 tonnes d'éthanol concernées par le troisième appel d'offres pour favoriser l'émergence de pôles de production concurrentiels à l'échelle européenne. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et sur quelques travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur les conditions dans lesquelles ont été attribués les agréments pour les productions de bioéthanol.

Ces agréments ont été délivrés à la suite d'une procédure d'appel à candidatures à l'échelon européen. Le choix des unités industrielles retenues a été fait en fonction de nombreux paramètres, notamment le délai de construction des usines programmées par les entreprises ainsi que l'implantation de ces usines au regard des enjeux d'aménagement du territoire et d'équilibre par rapport à la ressource agricole.

M. Raymond Courrière. Ce sont les pétroliers qui commandent !

M. François Loos, ministre délégué. Les dossiers ont également été examinés sous l'angle des possibilités d'exportation d'une partie de la production. Il a été particulièrement difficile de départager les candidatures, qui étaient cinq fois plus importantes que le niveau des agréments fiscaux que nous avions décidé d'accorder !

Les trois usines que vous avez citées avaient des agréments fiscaux pour une quantité donnée. Mais elles considéraient que la capacité nominale nécessaire pour engager l'investissement était de l'ordre de 200 000 tonnes. Nous leur avons donc octroyé, pour cet agrément-là, jusqu'à 150 000 tonnes de capacité, étant entendu que nous sommes confiants dans leur capacité d'utiliser de l'éthanol par le biais soit d'une filière, en France, de transformation en ETBE, ce qui est une autre façon de valoriser la ressource, soit d'exportations de ces produits, exportations qui sont non seulement possibles aujourd'hui, mais inscrites dans les dossiers qui nous ont été remis.

Ces trois projets examinés de près se présentent très bien, tout particulièrement celui de Bazancourt, et nous sommes persuadés qu'ils se révéleront excellents. En attendant la réalisation des usines en 2008, ils font actuellement l'objet d'une instruction au titre des installations classées.

Enfin, s'agissant du nouvel appel à projets qui aura lieu l'année prochaine, nous tiendrons compte, bien sûr, des meilleures conditions économiques, afin que la filière réussisse à produire le maximum d'éthanol destiné à être mélangé à l'essence de nos voitures en France. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Politique sociale du Gouvernement et CPE

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, le mardi 7 mars, les jeunes, les lycéens et les étudiants ont, par centaines de milliers, demandé le retrait du projet de contrat première embauche soumis au Parlement par votre gouvernement. (Encore ! sur les travées de l'UMP.)

Ils ont appelé à la résistance contre un projet de société fondé sur la précarité, l'individualisme et l'injustice.

Ils ont exigé des droits simples, mais forts : avoir un métier, une vie digne, un avenir.

L'intervention de la jeunesse a souvent été déterminante dans l'histoire de notre pays. Sa mobilisation massive contre Le Pen, au lendemain du 21 avril 2002, a porté dans un même élan la République et l'espoir de progrès ; vous ne pouvez l'ignorer.

M. Hugues Portelli. Ça n'a rien à voir !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dès l'origine, le projet de loi pour l'égalité des chances était rétrograde. La suppression de l'obligation scolaire jusqu'à seize ans avec l'apprentissage à quatorze ans, le travail de nuit possible à quinze ans, la sanction des familles au moyen de la suppression des allocations familiales : autant d'éléments qui suffisaient à justifier qu'on le repousse.

Mais votre gouvernement a introduit, par voie d'amendement, le contrat première embauche, que non seulement la jeunesse, mais en fait l'ensemble de notre peuple rejette massivement.

Ce texte a été préparé sans dialogue aucun avec les partenaires sociaux et les organisations de jeunesse. Il a été adopté à la hussarde par l'Assemblée nationale, par le biais de l'article 49-3 de la Constitution, puis examiné en urgence par le Sénat où tout a été fait pour élaguer le débat. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Cointat. Quatre-vingt-quinze heures de séance, ce n'est pas rien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Or, le CPE, c'est la fin des garanties prévues dans le code du travail pour les jeunes...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... qui, durant deux ans, pourront être remerciés par leur employeur du jour au lendemain, sans motif, ce qui est, en outre, contraire aux engagements internationaux de la France.

MM. Jean-Luc Mélenchon et Roland Courteau. Tout à fait !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est indigne de notre pays !

Depuis des années, au prix de milliards d'euros offerts au patronat, on a multiplié les emplois précaires et les bas salaires, sans réduire pour autant le chômage. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

M. Christian Cointat. Allez en Angleterre !

M. Jean-Luc Mélenchon. Justement, on n'a pas envie d'y aller !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le CPE, c'est le retour au XIXe siècle...

Plusieurs sénateurs de l'UMP. Pourquoi pas au Moyen Âge ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... dans les rapports entre patron et salarié, avec les jeunes pour cobayes !

M. René-Pierre Signé. Vous ne pouvez pas dire le contraire !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le Premier ministre, ...

M. le président. Veuillez poser votre question, madame Borvo !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... pour que la jeunesse puisse garder confiance, le groupe CRC demande au Président de la République de ne pas promulguer la loi pour l'égalité des chances, ...

M. Jean-Luc Mélenchon. C'est une bonne idée !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...ce qui permettrait d'annuler le CPE.

Monsieur le Premier Ministre, je vais vous donner la lettre que nous adressons ce jour au Président de la République. (Mme la sénatrice brandit ladite lettre.) Ma question est simple : allez-vous écouter notre peuple et remettre notre lettre au Président de la République avec un avis favorable ? (Non ! sur les travées du groupe de l'UMP. - Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Jacques Valade. Certainement pas !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Madame la sénatrice, je vous remercie tout d'abord de me donner l'occasion de rappeler que la loi pour l'égalité des chances a été adoptée aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'UC-UDF.)

Je tiens à remercier la majorité de son soutien sans faille tout au long des discussions parlementaires.

M. René-Pierre Signé. Il n'y a pas de quoi être fier !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Je veux aussi saluer la qualité des débats qui se sont tenus ici même.

M. Charles Revet. C'est vrai !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Sur 135 heures de débat au total, la Haute Assemblée a siégé plus de 95 heures,...

M. Claude Domeizel. Mais dans quelles conditions !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... ce qui a permis d'améliorer le texte du Gouvernement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle ne pouvait pas faire autrement !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Toutes les dispositions de cette loi s'appliqueront dans les prochaines semaines. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas sûr !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Je pense naturellement au contrat première embauche, qui offre à tous les jeunes, et en particulier à ceux qui connaissent le plus de difficultés, une nouvelle voie d'accès à l'emploi, ...

M. Didier Boulaud. Vous n'écoutez pas la rue !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... à la limitation à six mois de la durée des stages et à la rémunération obligatoire de ces stages au bout de trois mois. C'est un progrès considérable qui est ainsi accompli et qui va répondre aux problèmes que rencontrent les jeunes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.- Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Je pense également à la création de nouveaux postes en alternance. Dans les grandes entreprises, l'alternance a montré qu'elle était la voie adaptée parce qu'elle permettait de mieux connaître la vie professionnelle et de s'y préparer de façon qualifiée.

Mais le premier enjeu de cette loi est, bien entendu, la baisse du chômage des jeunes. Sur ce sujet difficile, votre intervention m'a fait penser, madame la sénatrice, qu'il importait de ne pas confondre le mal et le remède.

Le mal, il faut le rappeler - et j'aimerais que votre indignation se porte sur ce point parce que nous serions alors tous d'accord -, c'est la précarité actuelle des jeunes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'UC-UDF.) Et cela dure depuis plus de trente ans !

M. Jean-Luc Mélenchon. Ils se flattent de leurs turpitudes !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. La difficulté des jeunes à trouver un emploi, leur manque d'expérience professionnelle, leur marginalisation sur le marché du travail, quand ils enchaînent des CDD de moins d'un mois, des périodes d'intérim de moins de cinq jours et des périodes d'inactivité : voilà ce qui justifie l'indignation !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est le résultat des politiques que vous menez !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Le remède que nous apportons - et force est de constater que nous avons longtemps attendu vos propositions -, ...

M. Josselin de Rohan. Il n'y en a jamais eu !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... c'est le parcours d'embauche.

M. Didier Boulaud. Merci les patrons !

M. David Assouline. Ça fait quatre ans que vous êtes là !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Nous mettons en place ce parcours d'embauche pour permettre aux jeunes d'entrer dans la vie active, en proposant, afin de répondre à la diversité des situations, une meilleure orientation, plus d'emplois en alternance, des stages encadrés par une charte des stages et un contrat de travail qui complète les contrats existants.

M. René-Pierre Signé. Avec tout cela, vous allez créer des emplois ?

M. Didier Boulaud. N'allez pas prendre vos conseils auprès du MEDEF !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Et c'est pour cette raison que nous devons avancer !

En effet, si nous voulons sauver notre modèle social, il est impératif de le moderniser. À cette fin, pour avancer, ...

M. René-Pierre Signé. Vous allez reculer !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... nous proposons non seulement plus de souplesse, mais également, dans un souci d'équilibre, plus de protection. (Exclamations sur les travées socialistes.)

M. Jean-Pierre Sueur. Alors pourquoi le licenciement sans motif ?

M. Jean-Luc Mélenchon. Il n'y a pas de dialogue depuis des années !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Faut-il le rappeler, c'est la voie dans laquelle se sont engagés tous nos voisins européens :...

Mme Nicole Bricq. En faisant l'inverse !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... garantie de formation, allocation chômage, accompagnement personnalisé, autant d'éléments qui n'existent pas aujourd'hui au service de jeunes.

M. Jean-Pierre Sueur. Le licenciement sans motif n'existe nulle part !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Et nous devons surtout avancer pour répondre à la précarité des jeunes.

J'admire l'allant avec lequel vous voudriez maintenir la situation actuelle,...

Mme Raymonde Le Texier. Certainement pas !

M. David Assouline. Pas du tout !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... qui place les jeunes au comble de la précarité ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Alors oui, j'entends bien les inquiétudes et les préoccupations qu'expriment les jeunes, ...

Mme Hélène Luc. Mais non, vous ne les entendez pas !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... tout comme certains de leurs parents. Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher, ainsi que Gilles de Robien et François Goulard, poursuivent leurs consultations.

M. David Assouline. La loi est votée !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Avec eux, je compléterai le dispositif législatif en formulant, dans les tout prochains jours, des propositions susceptibles d'enrichir le parcours d'embauche.

M. Christian Cointat. Très bien !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. C'est cela notre responsabilité ! C'est cela, la défense de l'intérêt général dans notre pays !

M. René-Pierre Signé. Rien ! C'est le brouillard !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Car, au bout du compte, la question qui est au coeur de l'emploi des jeunes est bien celle-ci : dans quelle société voulons-nous vivre ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Bernard Piras. Bonne question !

M. René-Pierre Signé. Vous voulez une société libérale !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Nous voulons une société rassemblée, qui offre à chacun la possibilité d'avoir une chance et de ne pas rester au bord du chemin,...

M. Didier Boulaud. C'est mal parti !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... une société dans laquelle on n'a pas peur de l'avenir et où l'on est capable d'élaborer et de défendre un véritable projet collectif.

M. René-Pierre Signé. Deux ans maximum !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Tout mon gouvernement, toute la majorité veulent construire, avec les Français, cette société de l'égalité des chances.

M. Roland Courteau. Les jeunes ne vous croiront pas !

M. Didier Boulaud. Mais votre majorité n'est pas assez large pour y faire entrer « deux charrettes » ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Faisons ensemble le choix de l'innovation et de la liberté ! (Applaudissements prolongés et scandés sur les travées de l'UMP. - Applaudissements sur certaines travées de l'UC-UDF et du RDSE.)

M. Roland Courteau. Ce sont des mots !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les jeunes vont apprécier !

Mme Hélène Luc. Quelle responsabilité que de maintenir le CPE !

Marchés publics et PME

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Elle a trait à la place des PME dans les marchés publics et donc, de manière au moins indirecte, à l'emploi que celles-ci peuvent offrir.

La réglementation actuelle sur les marchés publics à l'intérieur du territoire national prive les collectivités territoriales de la possibilité de faire appel aux PME, en vertu du principe de libre concurrence, et ce contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays, aux Etats-Unis notamment, où, de par la loi, une part des marchés publics est réservée aux PME.

À une question écrite que j'ai récemment posée à ce sujet, il m'a été répondu ceci : « Les engagements internationaux de l'Union européenne ne permettent pas actuellement aux États membres de procéder à l'identique. Toutefois, la France a d'ores et déjà demandé à la Commission européenne que ce point soit évoqué à l'occasion de la renégociation en cours de l'accord sur les marchés publics conclu dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce afin qu'en application, à tout le moins, du principe de réciprocité l'Europe puisse mettre en place au bénéfice de ses PME une politique équivalente. »

En résumé, on invoque l'Europe.

J'ai bien noté, monsieur le Premier ministre, que, dans la perspective d'une réorganisation des marchés publics, vous aviez annoncé l'examen prochain d'un projet de loi visant à favoriser l'accès des PME à la commande publique, à l'image de ce qui se pratique aux Etats-Unis. « Chaque commande comportera un nombre minimal de PME parmi les candidats admis à présenter une offre. », avez-vous indiqué.

La place importante des PME dans l'économie n'est plus à démontrer. Ces entreprises, en faveur desquelles le Gouvernement a déjà pris des mesures favorables, et auxquelles le ministre chargé des PME a demandé ces derniers jours d'entrer résolument dans l'économie numérique, peuvent-elles espérer ne pas avoir à attendre le feu vert de l'Europe ? Car chacun sait ici qu'il tarde souvent à venir. (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'UC-UDF, ainsi que sur quelques travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, le Président de la République et le Premier ministre ont effectivement demandé que soient examinées les conditions dans lesquelles nous pourrions, comme vous le souhaitez, mettre en place dans notre droit un dispositif susceptible de réserver une part de la commande publique aux petites et moyennes entreprises, afin de favoriser les conditions de la croissance.

M. Raymond Courrière. Il est temps !

M. Thierry Breton, ministre. En France, le tissu de nos PME est certes dense, mais, nous le savons, ...

M. Raymond Courrière. Elles souffrent !

M. Thierry Breton, ministre. ... elles souffrent d'une taille trop faible. Toute l'action du Gouvernement, son action économique notamment, tend à leur donner les moyens d'augmenter leur taille, afin de pouvoir répondre aux besoins de notre marché intérieur et de suivre les grands groupes sur les marchés extérieurs.

En l'état actuel des choses, comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, une telle évolution se heurte à des obstacles juridiques liés à nos accords internationaux, notamment ceux qui ont été conclus dans le cadre de l'OMC.

M. Raymond Courrière. Il faut les lever !

M. Thierry Breton, ministre. Dans le cadre de la renégociation de ces accords, nous avons d'ores et déjà demandé à Bruxelles d'engager des pourparlers de façon à pouvoir adapter la réglementation, comme les Etats-Unis l'ont fait dans le cadre du SBA, le Small Business Act.

M. David Assouline. Parlez français !

M. Thierry Breton, ministre. Pour pouvoir mettre en oeuvre l'équivalent de ce dispositif, nous devons obtenir l'autorisation de faire évoluer le cadre législatif et réglementaire, ce qui va vraisemblablement prendre un certain nombre de mois.

Sans attendre, j'ai donc décidé de demander aux services de mon ministère de mettre immédiatement en oeuvre un certain nombre de dispositions.

Il s'agit précisément de voir comment, dans le cadre de la loi actuelle, il serait possible, à partir du seuil de 150 000 euros pour les achats courants et de 6 millions d'euros pour les équipements, de réserver une part de la commande publique aux petites et moyennes entreprises ; nous avons de bonnes chances d'y parvenir.

Par ailleurs, vous le savez, j'ai demandé que l'ensemble des ministères veillent à faire en sorte que 25 % des commandes au moins soient passées auprès des petites et moyennes entreprises ; je vérifie moi-même tous les six mois qu'ils suivent cette recommandation. C'est une manière d'aller, sans attendre, dans le sens que vous souhaitez, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Fusion Gaz de France-Suez

M. le président. La parole est à M. Henri Revol.

M. Henri Revol. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Au moment où la Commission européenne publie son Livre vert sur l'énergie et tandis que les marchés financiers bruissent de rapprochements entre les entreprises de ce secteur, je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur les perspectives de fusion entre Gaz de France et Suez.

M. Raymond Courrière. Il y a de l'eau dans le gaz ! (Sourires.)

M. Henri Revol. Vous connaissez, monsieur le ministre, l'attachement de notre assemblée à donner à nos entreprises énergétiques tous les moyens de leur développement. Vous connaissez également notre attachement à une politique énergétique de long terme pour notre pays, garantissant nos emplois et notre indépendance.

Nous en avons d'ailleurs longuement débattu au cours des deux dernières années, notamment lors de la discussion de ce qui est devenu la loi du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique de notre pays.

Aujourd'hui, nous devons tirer toutes les conséquences de notre engagement sur la voie de l'ouverture des marchés électriques et gaziers, en accord avec nos partenaires européens, notamment par la constitution de groupes industriels cohérents de dimension européenne. C'est en effet le seul moyen de garantir nos emplois, notre compétitivité et notre sécurité, et c'est résolument dans ce cadre que devra s'inscrire le rapprochement entre GDF et Suez.

C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, comment vous appréciez ce rapprochement, tant au niveau national, à l'égard notamment de la sécurité des approvisionnements, des missions de service public de ces entreprises et de l'avenir de leurs personnels, qu'au niveau européen, où la coordination sur les dossiers énergétiques s'avère indispensable ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Pierre Sueur. Pour répondre à une question téléguidée !

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Revol, vous abordez cette question sous le bon angle. Mais je n'oublie pas que vous avez été le rapporteur de la loi du 13 juillet 2005.

Effectivement, depuis plusieurs mois, nous assistons à une accélération de la concentration des grandes entreprises du secteur de l'énergie. Elle était prévisible.

Je reviens d'un voyage en Arabie Saoudite où j'accompagnais le Président de la République.

M. Didier Boulaud. Vous y avez vu des mirages en rafale ! (Sourires sur les travées socialistes.)

M. Thierry Breton, ministre. Je me suis entretenu avec le ministre du pétrole de ce pays qui se classe au premier rang mondial tant pour la production que pour les réserves de pétrole. Il m'a confirmé que l'année 2006 serait l'année de la concentration des grands acteurs du monde de l'énergie.

Telle est la réalité à laquelle nous sommes confrontés, comme l'ensemble des pays européens et l'ensemble des entreprises qui opèrent sur nos territoires.

C'est dans ce contexte que Gaz de France, d'une part, Suez, d'autre part, ont travaillé depuis des mois à un projet de rapprochement pour faire face à cette éventualité qui devient aujourd'hui une réalité. Ces deux entreprises nous ont présenté leur projet, projet industriel qui vise à faire d'elles le numéro deux ou le numéro trois mondial de l'énergie et le numéro un mondial du gaz naturel liquéfié, dont on sait qu'il est une ressource indispensable, du reste plus abondante que le pétrole lui-même.

Après que le premier actionnaire du groupe Suez eut indiqué publiquement qu'il soutenait cette position, l'État, en tant que premier actionnaire de GDF, a décidé dès le lendemain d'apporter, lui aussi, son soutien à ce projet industriel.

C'est un fait, nous entrons maintenant dans une phase de concertation qui va être longue et que j'ai commencé d'instruire, à la demande du Premier ministre. Ainsi, depuis deux semaines, j'ai réuni à dix reprises les organisations syndicales.

M. Didier Boulaud. Ça, c'est de la concertation ! Vous n'en avez pas fait autant pour le CPE !

M. Thierry Breton, ministre. À côté du projet industriel, nous construisons le projet social. Nous avons désormais recensé environ soixante questions qui concernent l'ensemble des intérêts des salariés, l'ensemble des intérêts des actionnaires, l'ensemble des intérêts de l'État, et même l'ensemble des intérêts des États, car il s'agit, je le rappelle, d'un projet européen puisque la Belgique, en particulier, est très impliquée. Nous bâtirons ensemble ce projet social.

À l'issue de ces concertations, nous présenterons le projet devant le Parlement, et nous en débattrons en ayant à l'esprit l'intérêt des entreprises, l'intérêt de la France, mais aussi l'intérêt de l'Europe énergétique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Conséquences de la grippe aviaire sur la filière avicole

M. le président. La parole est à Mme Yolande Boyer.

Mme Yolande Boyer. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, Elle concerne les conséquences de la grippe aviaire sur la filière avicole.

Certes, des aides pour les exploitants sont annoncées : à l'heure actuelle, elles seraient en moyenne de 1 000 euros par exploitation, ce qui est bien en deçà des pertes déjà subies du fait de périodes de vide sanitaire allongées depuis plusieurs semaines.

Des aides, destinées notamment à la destruction des stocks, sont prévues pour les industriels, mais il me paraît choquant et même inacceptable que des aides soient versées pour détruire le travail des salariés. Ne pourrait-on pas, grâce à des aides nationales et européennes utilisées de façon plus rationnelle et, si j'ose dire, plus « morale », redistribuer ces produits voués à la destruction, mais néanmoins parfaitement consommables, à celles et à ceux qui en ont besoin, ici, en Europe et ailleurs dans le monde ?

Un sénateur de l'UMP. On n'ose imaginer les réactions que cela provoquerait !

Mme Yolande Boyer. Concernant les salariés, des mesures de chômage partiel sont prises. Compte tenu de leur ampleur, ces périodes entraîneront des pertes de salaire mensuelles pouvant atteindre 350 euros, qui ne seront pas entièrement compensées. Cette situation est profondément injuste pour les salariés.

Les femmes et les hommes qui travaillent dans ces entreprises, assez souvent en couple, perçoivent un salaire égal au SMIC ou légèrement supérieur. Une allocation complémentaire serait donc plus adéquate. L'État s'engagera-t-il à compenser ces pertes et comment ?

En outre, cette crise survient dans un contexte déjà difficile pour la filière avicole, fragilisée par des problèmes structurels, liés notamment à la fin annoncée des aides aux exportations.

Il faut donc dès à présent favoriser la formation des salariés qui sont demandeurs. Des dispositifs peuvent être activés en ce domaine. Le Gouvernement peut-il nous faire part de ses propositions en la matière ?

Mme Nicole Bricq. Très bonne question !

Mme Yolande Boyer. Enfin, il paraît essentiel d'associer les salariés à toutes les instances de suivi de cette crise, dans un souci de transparence. Pouvez-vous nous donner l'assurance que cela sera fait ?

Monsieur le ministre, je suis maire de la commune où se trouvent le siège social et le premier site industriel du groupe Doux-Père Dodu, leader européen pour l'exportation de volailles. Mes préoccupations sont celles de la population de tout un bassin de vie, car, au-delà des salariés de la production, c'est l'ensemble de la filière, de l'accouveur au transporteur, qui est touché.

Face à cette grave crise, la solidarité nationale s'impose de manière forte et doit être clairement affirmée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Roland Courteau. La droite aurait pu applaudir aussi, par solidarité !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Madame la sénatrice, pour aider la filière avicole, confrontée aux difficultés économiques liées à la grippe aviaire, le Gouvernement a décidé dès le mois de novembre un plan de soutien de 11 millions d'euros. Le 23 février dernier, le Premier ministre a annoncé une enveloppe complémentaire de 52 millions d'euros pour le plan d'aide à la filière avicole. Élaboré avec l'ensemble de la profession, ce plan se décline en trois parties.

Une enveloppe de 25 millions d'euros a été déléguée aux préfets, qui assurent la gestion de cette aide. Cette première mesure consiste à aider les éleveurs à compenser leur manque à gagner.

M. René-Pierre Signé. C'est insuffisant ! Ils vont y laisser des plumes ! (Sourires.)

M. François Loos, ministre délégué. Ce dispositif, applicable depuis le 3 mars, s'adresse à tous les éleveurs de volaille dits spécialisés dont le chiffre d'affaires en volailles est supérieur ou égal à 25 % de leur activité. Établi en concertation avec la profession, il prévoit une indemnisation des pertes des éleveurs, calculée sur la baisse de production constatée entre le 1er novembre dernier et le 30 avril. Dès le 7 mars, des avances de 1 000 à 2 000 euros ont été versées aux éleveurs.

Une mesure de soutien spécifique aux éleveurs de volailles en plein air engagés dans les filières de qualité, particulièrement affectées par l'obligation de confinement des volailles, sera notifiée à la Commission européenne.

Ces mesures sont complétées par un fonds d'allégement des charges d'emprunt pour les éleveurs récents investisseurs et les jeunes agriculteurs destiné à prendre en charge les cotisations à la Mutualité sociale agricole des producteurs en difficulté. C'est le premier volet des actions qui sont engagées.

Une enveloppe de 30 millions d'euros est mobilisée immédiatement pour les entreprises. Les premières mesures fiscales et de soutien aux entreprises de la filière les plus en difficulté seront prises. Des mesures complémentaires sont en cours de finalisation en lien avec les organisations professionnelles et la Commission européenne.

Ensuite, 10 millions d'euros sont réservés aux entreprises exportatrices, particulièrement présentes dans le Finistère - vous avez cité le nom d'une très grande de ces entreprises.

En outre, le Gouvernement met tout en oeuvre pour obtenir la levée partielle ou globale des embargos et nous avons aussi obtenu de la Commission européenne l'augmentation de 30 à 40 euros par centaine de kilogrammes pour les restitutions.

Par ailleurs, dès le 1er janvier 2006 ont été accordés aux entreprises de la filière qui l'ont demandé au Trésor public des reports de charges sociales et fiscales, pour près de 3,5 millions d'euros.

De surcroît, en accord avec les représentants de l'industrie avicole, les règles d'indemnisation du chômage partiel ont été assouplies et une nouvelle instruction permettra dès la semaine prochaine son indemnisation totale. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

Enfin, une enveloppe de 2 millions d'euros est consacrée à une campagne télévisée de communication et d'information du consommateur sur la consommation de viande de volaille qui sera lancée dès la troisième semaine du mois de mars.

Ces dispositions ne constituent que la première étape du plan de soutien à la filière avicole annoncée par le Premier ministre, lequel recevra demain à l'hôtel Matignon l'ensemble des professionnels de la filière. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Mme Anne-Marie Payet applaudit également. )

Gestion des fonds structurels européens dans le cadre des pôles de compétitivité

M. le président. La parole est à M. Benoît Huré.

M. Benoît Huré. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

Lundi dernier, le comité interministériel d'aménagement et de compétitivité du territoire, le CIACT, présidé par vous, monsieur le Premier ministre, a pris plusieurs mesures de première ampleur pour améliorer l'efficacité et la convergence des grandes politiques d'investissement.

Il est en effet très important d'éviter l'éparpillement et l'étalement dans le temps des grands programmes d'aménagement du territoire. Il n'y a rien de pis en cette matière que le saupoudrage. La réforme des contrats de plan État-régions semble répondre à cet impératif, en concentrant objectifs et moyens sur un nombre limité de grands projets d'envergure interrégionale ou nationale.

M. René-Pierre Signé. Il n'y en a plus !

M. Benoît Huré. Dans ce cadre, pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que la concertation qui s'engage sera bien élargie à l'ensemble des collectivités territoriales à raison de leurs compétences ? Le département, voire l'agglomération pourront-ils constituer l'échelon de contractualisation ?

M. Raymond Courrière. On peut toujours rêver !

M. Benoît Huré. Par ailleurs, le Gouvernement a fait le choix de conserver le rôle d'autorité de gestion des programmes européens 2007-2013, marquant ainsi la volonté de l'État d'affirmer son autorité et son souhait de donner une nouvelle orientation à l'aménagement du territoire. C'est aussi une garantie de neutralité et de cohésion à laquelle nous sommes très attachés.

Cependant, la répartition des fonds étant largement déconcentrée, et compte tenu de la fin de la politique de zonage, ne peut-on pas imaginer que les préfets de région mettent en oeuvre une concertation avec l'ensemble des exécutifs locaux ?

M. René-Pierre Signé. Et non pas seulement avec des exécutifs soigneusement choisis !

M. Benoît Huré. Enfin, pourriez-vous, monsieur le ministre, nous retracer les grandes lignes des décisions prises par le CIACT du 6 mars ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Pierre Sueur. Question téléphonée !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, Christian Estrosi aurait souhaité pouvoir vous répondre personnellement, mais il est aujourd'hui avec le Président de la République dans le département des Alpes-Maritimes.

Mme Hélène Luc. Et Nicolas Sarkozy ? On ne le voit plus !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Votre question résume et synthétise de manière très claire un certain nombre de remarques formulées sur les contrats de plan et sur les programmes d'aménagement du territoire.

Oui, il y a trop d'éparpillement, trop de saupoudrage et trop d'étalement dans le temps. Il était donc urgent et indispensable de réagir, et de réagir efficacement. C'est ce qui a été effectivement fait sous l'autorité du Premier ministre, lundi dernier.

À cette occasion, un certain nombre d'initiatives ont été prises.

D'abord, les contrats de plan État-régions ont été transformés en contrats de projets État-régions.

M. Jean-Pierre Sueur. Qu'est-ce que cela change ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ce n'est pas une question de vocabulaire : cela révèle un vrai changement de méthode, et je vais vous en faire la démonstration.

Pour la première fois depuis vingt ans, les contrats de plan ne seront pas reportés et seront achevés non seulement à la date prévue, mais surtout à la hauteur habituellement prévue, à savoir 80 % ; nous atteindrons même certainement 81 %.

M. René-Pierre Signé. Il n'y a plus d'argent !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Deuxième modification : le saupoudrage, c'est fini !

M. Raymond Courrière. On garde tout !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Nous bâtirons des contrats qui seront réalistes, avec des thèmes limités- compétitivité, développement durable, cohésion sociale et territoriale - et concentrés sur des projets d'intérêt général.

M. Bernard Piras. Rien pour les pauvres !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Troisième modification importante : ces contrats de projets seront l'occasion d'un dialogue privilégié avec les régions. C'était déjà le cas, mais, cette fois-ci - et je réponds là précisément à l'une de vos interrogations, monsieur le sénateur -, la négociation aura également lieu entre les préfectures de région et les autres collectivités, c'est-à-dire...

M. Raymond Courrière. Les départements !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...les départements et les agglomérations. (Très bien ! sur les travées de l'UMP. - Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

Il sera donc possible de passer des contrats avec d'autres collectivités que la région...

M. Jean-Pierre Sueur. C'est lié aux résultats des régionales !

M. René-Pierre Signé. Et les pays ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...si cela s'avère nécessaire, utile et efficace.

Enfin, les programmes européens doivent être bâtis en étroite concertation avec les collectivités concernées,...

M. le président. Monsieur le ministre, veuillez conclure !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...l'État y apportant une garantie de neutralité, mais aussi de cohérence.

M. Didier Boulaud. C'est ce qui s'appelle contourner le suffrage universel !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ces programmes seront donc plus efficaces parce qu'ils seront plus simples, plus clairs, plus lisibles ; et je suis sûr que vous partagez ce souci d'efficacité ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Didier Boulaud. Il n'y a rien dans les caisses !

Réglementation relative à la détention de véhicules militaires de collection

M. le président. La parole est à Mme Françoise Henneron.

Mme Françoise Henneron. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Sueur. Il n'est pas là !

M. Didier Boulaud. Il n'aime pas le Sénat !

M. Didier Boulaud. Il est parti avec M. de Charrette faire campagne contre le CPE ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Mes chers collègues, un peu de silence, s'il vous plaît !

Mme Françoise Henneron. Le 23 novembre dernier paraissait un décret pris en application de la loi pour la sécurité intérieure.

Ce texte, relatif au régime des matériels de guerre, armes et munitions, a été élaboré dans la plus large concertation afin de prendre en considération, notamment, les intérêts des collectionneurs.

Il offre désormais un cadre juridique clair pour les collectionneurs d'armes et de matériels militaires, afin de leur permettre d'acquérir et de détenir ces armes et matériels de manière pérenne.

La nouvelle réglementation garantit par exemple, sous la responsabilité du préfet, un suivi plus attentif du parc départemental des matériels de collection.

Pourtant, il a fait couler beaucoup d'encre, particulièrement chez les propriétaires d'anciens véhicules militaires.

En effet, à la lecture de plusieurs articles de ce texte, dont l'article 8 du décret, certains collectionneurs ont pu craindre que la notion de matériel de guerre ne soit étendue à celle de matériel militaire,...

MM. Didier Boulaud. C'est une question sur le Clemenceau ! (Rires sur les travées socialistes.)

Mme Françoise Henneron. ...ainsi qu'à celle de véhicules de collection d'origine militaire, ce qui les contraindrait à obtenir une autorisation de la préfecture, à défaut de laquelle les véhicules concernés seraient confisqués, puis détruits. (Nombreuses exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vraiment une question d'actualité !

M. le président. Allons, mes chers collègues !

Mme Françoise Henneron. On imagine les conséquences de ce dispositif pour nos concitoyens propriétaires de ces véhicules - dans leur majorité, bien inoffensifs -, et les inquiétudes que ces mesures soulèvent dans le milieu des collectionneurs de véhicules militaires.

M. le président. Madame Henneron, veuillez conclure !

Mme Françoise Henneron. Monsieur le ministre, les particuliers amoureux de ces véhicules (Rires et nouvelles exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC),...

M. le président. Mes chers collègues, un peu de silence, s'il vous plaît !

M. Jean-Pierre Sueur. Tout le monde est préoccupé par cette question !

Mme Françoise Henneron. ... les professionnels de la restauration et de la vente de ces matériels, ainsi que les associations qui sont régulièrement sollicitées pour les cérémonies commémoratives, ont besoin d'être rassurés.

M. Jean-Pierre Sueur. Oh, là, là !

Mme Françoise Henneron. Ils contribuent en effet à entretenir et à préserver un patrimoine historique, militaire et culturel auquel nombre de Français sont attachés.

M. le président. Madame Henneron, concluez !

Mme Françoise Henneron. Monsieur le ministre, ma question est simple. (Brouhaha ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Pouvez-vous nous éclairer sur la nature exacte des dispositions de ce décret et garantir à ces collectionneurs inquiets qu'ils pourront continuer à exercer leur passion de manière pérenne ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Bernard Piras. Bon courage !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Madame la sénatrice, vous évoquez...

M. Yannick Bodin. Le Clemenceau !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...l'un des aspects de la loi de mars 2003 pour la sécurité intérieure. La loi dispose que les matériels de guerre des deuxième et troisième catégories sont interdits par principe,...

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...mais qu'il existe des exceptions, principalement au bénéfice des collectionneurs.

M. Didier Boulaud. De chassepots ! (Sourires.)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je vous indique donc que le décret du 23 novembre 2005, préparé à la fois par le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et le ministère de la défense, n'a aucunement modifié le classement des engins militaires.

Concrètement, la grande majorité des véhicules militaires de collection, c'est-à-dire essentiellement les jeeps, les Dodge, les ambulances et autres,...

MM. Jean-Pierre Sueur et Didier Boulaud Et le Clemenceau ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...ne sont pas concernés par la nouvelle procédure.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et les sous-marins, monsieur le ministre ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Leur acquisition et leur détention sont donc libres, contrairement aux matériels de deuxième catégorie. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Je n'entrerai pas dans le détail de cette question parce que je sens qu'elle suscite un vrai débat au sein de cette assemblée. (Sourires.) Je dirai simplement que les préfets ont jusqu'à novembre 2006 pour enregistrer un certain nombre de dossiers.

M. Paul Raoult. On a trouvé un collectionneur pour le Clemenceau !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ensuite, ceux-ci seront examinés au cas par cas.

Afin de lever les derniers malentendus (Ah ! sur les travées du groupe socialiste), je vous confirme que M. le ministre d'État compte, avec Mme la ministre de la défense, adresser aux préfets une circulaire précisant le régime juridique des collectionneurs de matériels de guerre.

Madame Henneron, je terminerai mon propos par deux remarques.

Premièrement, vous pouvez rassurer votre cycliste amateur de vélos militaires : il sera en mesure de continuer à sillonner paisiblement votre beau département du Pas-de-Calais ! (Sourires.)

Deuxièmement, j'ai le plaisir de vous souhaiter, au nom du Gouvernement, une bonne fête. (Mme Françoise Henneron fait un signe de remerciement. - Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Monsieur le ministre, le Sénat s'associe à vos voeux à l'égard de Mme Henneron !

M. Jean-Pierre Sueur. On est vraiment dans l'actualité !

Indemnisation exceptionnelle des dommages aux bâtiments causés par la sécheresse en 2003

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille.

M. Laurent Béteille. Ma question s'adresse à M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. René-Pierre Signé. Quel succès !

M. Didier Boulaud. Ce sont les Victoires de la musique !

M. Laurent Béteille. Monsieur le ministre, je me mobilise dans mon département depuis plus de trois ans sur le dossier relatif à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à la suite de la sécheresse de l'été 2003.

Plusieurs arrêtés ont été publiés, dont celui du 20 décembre dernier, qui a fixé la liste des communes non reconnues.

M. Jean-Pierre Sueur. Liste incomplète et arbitraire !

M. Laurent Béteille. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, mes collègues et moi-même avons voté un amendement visant à instaurer, dans le cadre de la solidarité nationale, une procédure exceptionnelle d'aide de 180 millions d'euros pour les dommages causés aux bâtiments par la sécheresse, entre juillet et septembre 2003, et la réhydratation des sols qui lui a été consécutive, lorsque ces dommages compromettent la solidité des bâtiments ou les rendent impropres à leur destination.

Cette procédure est réservée aux propriétaires de résidences principales situées dans les communes qui n'ont pas été reconnues en état de catastrophe naturelle.

Toutefois, il apparaît aujourd'hui que les sinistrés susceptibles de bénéficier de cette mesure exceptionnelle ont de graves difficultés à obtenir des devis de la part des entreprises du bâtiment. En effet, celles-ci ne souhaitent pas les proposer sans qu'une étude de sol ait été réalisée au préalable.

Outre les difficultés qu'elle rencontrerait pour réparer un bâtiment sans mesurer exactement les origines du désordre, une entreprise pourrait être tenue pour responsable et inquiétée si elle venait à réaliser des travaux sans étude de sol et qu'un nouveau sinistre de même nature se produisait. Or ces études coûtent cher et ne sont pas mentionnées dans le cadre de ces mesures.

Par conséquent, monsieur le ministre, j'aimerais savoir quelles mesures vous comptez prendre pour répondre à ces situations. Il y a une extrême urgence puisque les dossiers complets doivent être remis à la préfecture avant le 6 avril. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Didier Boulaud applaudit également.)

M. Didier Boulaud. Excellente question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous évoquez à juste titre une question qui concerne de très nombreux élus dans cette assemblée (Oui !  sur les travées du groupe socialiste), ainsi que plusieurs membres du Gouvernement.

Il est vrai qu'un certain nombre de sinistrés ne sont pas satisfaits de la procédure qui est actuellement en cours.

M. Didier Boulaud. Exactement !

M. Charles Revet. Elle est beaucoup trop lourde !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. C'est la raison pour laquelle le Sénat a adopté, je le rappelle, une mesure de 180 millions d'euros, afin d'aider les sinistrés pour les bâtiments à usage d'habitation principale.

Je voudrais aussi rappeler que le régime classique a permis d'indemniser à ce jour près de 4 000 communes.

M. Bernard Piras. Et les autres ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Si des aménagements n'avaient pas été envisagés à l'époque, seulement 200 communes auraient pu bénéficier de ces mesures. À ce moment-là, je n'étais pas membre du Gouvernement. Je rends donc hommage à l'action de mes prédécesseurs !

Mais il faut être extrêmement vigilant concernant ces 180 millions d'euros. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes adressés à un panel de douze préfectures représentatives - notamment celle de l'Essonne, monsieur Béteille - afin de recueillir le maximum de renseignements et de coller au plus près des réalités.

Il y a une difficulté que je ne cherche pas du tout à masquer et qu'il faut impérativement corriger. Il s'agit de la procédure selon laquelle, lors de la constitution de leur dossier, les particuliers doivent produire deux devis. Il est vrai que les entrepreneurs et artisans se refusent la plupart du temps à produire ces deux devis sans avoir, au préalable, réalisé une étude de sol.

J'ai donc alerté M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, qui est tout à fait favorable à l'examen de cette question.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Jean-Pierre Sueur. Il est ici !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Même s'il ne le manifeste pas physiquement, je sais qu'intellectuellement il y est favorable ! (Rires.)

La modification de cette procédure permettra de débloquer un grand nombre de situations locales.

Enfin, nous avons demandé aux préfets - c'est plus qu'un souhait, c'est une indication impérative -, de faciliter au maximum l'instruction de ces dossiers.

M. Didier Boulaud. Allongez les délais !

M. le président. Monsieur le ministre, veuillez conclure !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je précise pour conclure que, avant le 6 avril, nous disposerons d'une première évaluation du dispositif. Nous proposerons à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, ainsi qu'à M. le Premier ministre de nouvelles mesures, si elles s'avèrent nécessaires, pour adapter la réponse de l'État à la gravité de la situation.

Ainsi, nous entendons les remarques et nous sommes mobilisés. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UC-UDF.)

M. Didier Boulaud. Allongez les délais !

Fusion Gaz de France-Suez

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor.

M. Jean-Marc Pastor. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Lors de la présentation du projet de loi relatif au service public de l'électricité, le 15 juin 2004, M. Sarkozy prenait l'engagement, au nom du Gouvernement, qu'EDF et GDF ne seraient pas privatisés.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les promesses n'engagent que ceux qui y croient !

M. Jean-Marc Pastor. Le Président de la République lui-même l'avait solennellement rappelé.

Vous avez décidé, monsieur le ministre, de revenir sur ces engagements et de privatiser GDF. C'est votre choix, que nous contestons évidemment, mais qui est logique quand on appartient à un gouvernement qui ne sait pas résister aux sirènes du libéralisme à tout va. (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.)

Encore faudrait-il, lorsque l'on veut que le marché domine tout, y compris les services publics, en respecter les règles de base !

Or, selon le vice-président de la Commission européenne lui-même, cette privatisation « porte un coup à l'esprit du marché commun européen ».

Même pour la Commission, très libérale au demeurant, cette privatisation est loin d'être claire. Elle vient de demander à la France de fournir, d'ici au 17 mars, des explications.

Elle souhaite en effet que la France s'explique sur la « chronologie des événements », après l'échec des pourparlers entre le groupe italien Enel et le groupe français Veolia, principal concurrent de Suez dans le traitement des eaux et des déchets. En effet, des négociations sont menées depuis longtemps entre la compagnie Veolia et la compagnie italienne Enel pour lancer une OPA sur le groupe franco-belge Suez.

La Commission « veut s'assurer en particulier que toute information qui puisse influencer le marché a été gérée de manière adéquate et dans le plein respect des principes du marché intérieur, des principes qui visent à garantir l'intégrité et la transparence des marchés en Europe ».

M. le président. Je vous prie de conclure.

M. Jean-Marc Pastor. Un doute plane aujourd'hui sur l'attitude du gouvernement français et donc sur la France.

M. Didier Boulaud. Ce qui plane, ce n'est pas un doute !

M. Jean-Marc Pastor. Ma question est donc simple : monsieur le ministre, dans quel but précis avez-vous utilisé les informations que vous aviez sur les intentions du groupe Enel ? Comment avez-vous persuadé Veolia de rompre les négociations avec ce groupe italien afin de favoriser le rapprochement GDF-Suez ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, je suis heureux de vous voir devenu un grand défenseur du marché intérieur et de la libre circulation des capitaux ! Il n'est jamais trop tard pour bien faire !

En ce qui concerne le projet de fusion entre Suez et GDF, vous avez parlé d'improvisation, de précipitation.

M. Roland Courteau. De privatisation, surtout !

M. Thierry Breton, ministre. Nous répondons anticipation, concertation, expression du Parlement.

M. Bernard Piras. Vous ne tenez pas votre parole !

M. Thierry Breton, ministre. Monsieur Pastor, figurez-vous que les deux entreprises Suez et Gaz de France discutaient ensemble depuis de nombreux mois pour voir ce qu'elles pourraient faire compte tenu de l'accélération que j'évoquais tout à l'heure.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elles savaient que vous mentiez !

Mme Hélène Luc. Qui l'a dit au Parlement ?

M. Thierry Breton, ministre. En effet, le 9 décembre dernier, le président de Suez lui-même est venu me voir pour m'informer des rumeurs concernant une éventuelle OPA d'Enel sur son groupe. Je l'ai un peu rassuré en lui indiquant que nous étions en passe de finaliser une discussion avec le groupe Enel, visant à le faire rentrer progressivement sur le marché de l'énergie. Cette rumeur n'était donc pas crédible.

M. Bernard Piras. On verra ce que dira Rome !

M. Thierry Breton, ministre. Le 15 janvier, le président du groupe Veolia m'a fait part des mêmes rumeurs concernant son groupe.

J'ai joué mon rôle de ministre des finances : je les ai rappelés à la raison, leur disant de ne pas s'affoler, et je leur ai suggéré de travailler ensemble si c'était nécessaire.

Ce qui s'est passé depuis, c'est que les entreprises Suez et Gaz de France ont travaillé à leur projet industriel, parce qu'elles ont anticipé. C'est cela l'anticipation !

Ensuite, le premier actionnaire de Suez, puis le premier actionnaire de Gaz de France ont dit qu'ils croyaient à ce projet industriel.

M. Didier Boulaud. Ce sont des histoires pour endormir les enfants !

M. Thierry Breton, ministre. Nous sommes désormais entrés dans une phase de concertation longue avec les organisations syndicales. Ce n'est pas de l'accélération, c'est de la concertation.

Mesdames, messieurs, dans plusieurs semaines, après que le programme industriel aura été expliqué à tous et que le projet social aura été construit avec les organisations syndicales, nous viendrons devant le Parlement, c'est-à-dire devant vous, pour que vous puissiez décider si, oui ou non, ce projet est bon pour la France.

Si vous décidez qu'il n'est pas bon, vous ne le voterez pas !

M. Paul Raoult. Vous allez à l'échec !

M. Thierry Breton, ministre. Si vous décidez qu'il est bon, vous le voterez. Quand vous m'opposez le mot « privatisation », je vous réponds : « expression du Parlement », qui est souverain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.