situation des commununautés de communes des hauts du lyonnais et de chamousset en lyonnais

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, auteur de la question n° 1090, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. François-Noël Buffet. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la situation des communautés de communes des Hauts du Lyonnais et de Chamousset en Lyonnais.

À la suite de la révision du zonage de la prime à l'aménagement du territoire de 2000, ces deux communautés de communes se sont retrouvées exclues de la prime, car elles sont comprises dans la zone d'emploi de la ville de Lyon.

Elles sont classées « territoire rural de développement prioritaire », zonage qui offre des exonérations fiscales intéressantes pour les entreprises nouvelles.

Or, en application de la loi relative au développement des territoires ruraux du 23 février 2005, ce zonage et les dispositions y afférentes ne seront plus en vigueur au 31 décembre 2006. À la même date, les communautés de communes ne seront plus comprises dans les zones d'intervention de l'Europe, puisque le zonage « objectif 2 transitoire » doit disparaître.

Les deux communautés de communes sont les seules en France à être entièrement classées en zone « montagne » et entièrement exclues du zonage de la prime d'aménagement du territoire. Pour un territoire rural classé en totalité en zone « montagne », relativement enclavé géographiquement, se retrouver exclu de tout dispositif d'aide économique ne me paraît pas convenable.

La forte pression foncière engendrée par le développement des agglomérations lyonnaise, mais aussi stéphanoise, ajoutée à l'impossibilité d'aider les entreprises à s'installer, à se développer, donc à fournir des emplois sur leur propre territoire, entraîne inévitablement ces deux communautés de communes vers le douloureux destin de « territoire dortoir ».

Face à cette situation, qui ne me paraît pas très acceptable, pour ne pas dire inacceptable, je souhaiterais connaître les mesures que vous entendez prendre pour que, dans la prochaine définition des zonages PAT, les critères statistiques retenus ne masquent pas sous le poids de l'agglomération lyonnaise la spécificité de territoire rural de montagne dont les critères socio-économiques sont totalement différents de ceux des territoires des deuxième et troisième couronnes de l'agglomération lyonnaise.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, le Gouvernement, vous l'imaginez, est particulièrement vigilant à ce que tous les territoires disposent des outils nécessaires à leur développement économique. C'est un enjeu essentiel en termes d'aménagement du territoire, et M. Christian Estrosi aurait pu répondre à votre question.

Plusieurs dispositifs d'aide publique permettent d'encourager cette politique.

Pour ce qui concerne la prime à l'aménagement du territoire, la PAT, vous savez que son attribution n'est possible que dans un zonage validé par la Commission européenne ; le zonage actuel porte sur la période 2000-2006. Initialement, le projet de la Commission excluait totalement la France métropolitaine du bénéfice de ces aides, qui pourtant, de toute évidence, sont particulièrement utiles pour attirer de grands projets industriels sur nos territoires. Grâce à la volonté extrêmement forte du Gouvernement et au soutien des élus, nationaux et locaux, nous avons finalement pu obtenir leur maintien en ciblant les territoires en difficulté disposant des plus grands potentiels d'accueil. Un nouveau zonage entrera donc en vigueur au début de l'année 2007. Il a été élaboré au niveau local par les préfets, généralement au terme de larges consensus locaux, et notifié à Bruxelles le 1er juin dernier.

Comme d'autres, les communautés de communes des Hauts du Lyonnais et de Chamousset en Lyonnais n'avaient pas été retenues dans le zonage 2000-2006 et n'ont pu être ajoutées dans le nouveau zonage. Pour autant, ces territoires - et, honnêtement, j'en connais bien d'autres, notamment dans ma région - pourront continuer d'accorder aux entreprises d'autres types d'aides adaptées à la réalité des projets locaux. En particulier, la France a soutenu le doublement des aides de faible montant, dites aides « de minimis », qui devrait être décidé par Bruxelles d'ici à la fin de l'année. Ainsi, dès 2007, toute entreprise pourra bénéficier d'une aide publique de 200 000 euros sur trois ans, au lieu de 100 000 euros actuellement : c'est un doublement net de l'aide publique.

L'État soutient fortement les actions des territoires, et il a été décidé de passer d'une logique de guichet à une logique de projet. C'est dans cette logique de mise en valeur et de soutien aux projets des territoires que le Gouvernement a lancé des appels à projets pour la mise en place de 66 pôles de compétitivité et de plus de 300 pôles d'excellence rurale.

La communauté de communes de Chamousset en Lyonnais, notamment, s'est saisie de la possibilité ainsi ouverte en présentant un projet de pôle d'excellence rurale tout à fait remarquable, labellisé dès juin dernier, qui permettra la réalisation de plusieurs équipements essentiels pour l'accueil de nouvelles populations et pour la création d'emplois, tels la maison des services et l'espace d'exposition de la Halle aux veaux à Saint-Laurent-de-Chamousset, la résidence d'entreprises de Saint-Clément-les-Places, ou encore le pôle de biotechnologies de Saint-Genis-l'Argentière, pour ne citer que les principaux. Son objectif est de permettre la création de 18 entreprises et de 470 emplois directs, dont 100 dans la filière d'excellence que sont les biotechnologies dans le domaine de la santé et du médical ; doivent s'y ajouter 20 emplois de télétravailleurs, 80 emplois dans les services à la personne et 270 emplois dans d'autres activités industrielles. Les Alpes-Maritimes, monsieur Balarello, ont également été bien servies.

Ce projet montre tout le dynamisme et l'excellence dont ce territoire est capable de faire preuve. Il confirme que cela vaut la peine de faire confiance aux territoires pour créer de l'activité économique et des emplois.

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet.

M. François-Noël Buffet. Monsieur le ministre, je suis particulièrement convaincu que le Gouvernement, soutenu bien sûr par les parlementaires, conduit une action forte et que son engagement est total dans le cadre des projets qu'il mène, en particulier ceux que vous venez d'évoquer.

Les territoires concernés ont effectivement été labellisés en pôle d'excellence rurale au mois de juin dernier ; nous y avions bien sûr travaillé. Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, vous me rassurez en annonçant le doublement des primes dont les entreprises pourront également bénéficier.

Je souhaite que nous poursuivions ce travail, qui va dans le bon sens et permettra à ce territoire assez exceptionnel de continuer d'offrir de l'emploi sur les lieux mêmes de résidence de ses habitants, de plus en plus nombreux.

conditions de remplacement des personnels tos partant à la retraite

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, auteur de la question n° 1088, transmise à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Bernard Cazeau. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les carences de remplacement des TOS, les personnels techniciens et ouvriers de service titulaires partant à la retraite dans les collèges, en particulier dans le département de la Dordogne.

En application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, les conseils généraux assurent la gestion des remplacements des techniciens et ouvriers de service des collèges. Depuis le 1er janvier 2006, les agents non titulaires de l'État affectés depuis le mois de septembre 2005 sur des postes vacants sont, par substitution d'employeur, rémunérés et gérés par les départements. Les conseils généraux assument également le remplacement des personnels titulaires momentanément absents.

Un problème spécifique se pose toutefois dans le département de la Dordogne, où l'éducation nationale ne remplace pas les agents titulaires de l'État partant à la retraite et où les établissements demandent au conseil général de se substituer à l'État.

Cette pratique pose un problème. Elle équivaudrait en premier lieu à transférer une dépense salariale nette supplémentaire au conseil général ; elle revient en second lieu à réduire le périmètre de référence des transferts de personnels, qui seront comptabilisés sur la base des effectifs de l'État.

Cette difficulté, monsieur le ministre, va à l'encontre des déclarations du Gouvernement affirmant que le transfert de compétences aux collectivités doit être compensé à l'euro près. Je vous demande donc de bien vouloir nous indiquer comment les remplacements définitifs d'agents permanents partant à la retraite seront pris en charge par l'État.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, tout transfert de compétences prévu dans la loi et entraînant un transfert de charge doit faire l'objet d'une compensation intégrale, concomitante et contrôlée. C'est la règle, et le Gouvernement s'attache à ce qu'elle soit respectée ; vous comprendrez que je commence par la rappeler.

S'agissant des personnels techniciens, ouvriers et de service de l'éducation nationale - comme pour tous les personnels de l'État transférés aux collectivités locales -, en application de la loi de 2004, la référence qui détermine le nombre total d'emplois transférés est la « photographie » des emplois pourvus au 31 décembre de l'année précédant le transfert de compétence, sous réserve que leur nombre ne soit pas inférieur à celui qui a été constaté le 31 décembre 2002.

Le champ de cette compensation est donc clair : seront concernés, premièrement, les emplois effectivement pourvus ; deuxièmement, s'il y a lieu, les emplois disparus entre le 31 décembre 2002 et le 31 décembre 2004, ce qui signifie concrètement que l'État fait un geste important puisqu'il consent une compensation financière là même où il avait su réaliser des gains de productivité ; troisièmement, tous les emplois non pourvus, c'est-à-dire les emplois devenus vacants entre la mise à disposition des agents et leur transfert définitif, notamment, c'est le cas que vous évoquiez, monsieur le sénateur, à la suite de départs à la retraite. Les modalités de cette compensation ont été évoquées par l'instance la plus appropriée pour ce faire, la Commission consultative sur l'évaluation des charges, en particulier dans ses séances des 4 mai 2005, 6 avril et 18 mai 2006.

Pour ce qui est des postes devenus vacants - probablement au nombre d'un millier pour toute la France, peut-être un peu plus -, l'État les compensera sur la base du coût d'un « pied de corps », ce qui permettra à la collectivité, si elle le souhaite, de recruter un nouvel agent.

Quant à la date d'effet du droit à compensation de ces postes vacants, enfin, elle interviendra à mesure que ceux-ci seront constatés.

Pendant toute la durée du droit d'option, soit pendant deux ans, l'État compensera les postes devenus vacants constatés au 1er septembre dès la loi de finances rectificative de la même année : ce sera donc le cas, monsieur Cazeau, pour les postes vacants constatés en Dordogne. Le montant de cette compensation sera ensuite inscrit, en base, dans le droit à compensation des collectivités concernées, par la loi de finances de l'année suivante.

Je profiterai de l'occasion que vous m'offrez, monsieur le sénateur, pour attirer votre attention sur une question importante : celle des personnels en situation interruptive d'activité - congés de longue maladie (M. le ministre de l'agriculture et de la pêche approuve.), et je constate que M. Bussereau connaît cette situation, il doit la vivre dans son département ; ou, pour une grande partie, congés parentaux - qui n'étaient pas affectés, au moment de la photographie des services mis à disposition, alors même qu'ils ont naturellement vocation à exercer des compétences qui désormais ne relèvent plus de l'État.

Des discussions ont été engagées sur ces points précis avec l'Association des régions de France, l'ARF, et l'Assemblée des départements de France, l'ADF. Je souhaite en effet que les collectivités territoriales s'engagent à reprendre ces personnels sur des postes vacants. Elles se verraient alors évidemment compenser - j'imagine certaines de vos préoccupations ! - non plus un poste vacant, mais la rémunération exacte de l'agent transféré. Cela nécessitera cependant une disposition législative, à laquelle nous travaillons actuellement.

Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, il ne s'agit pas d'un « vice caché » de la décentralisation : ensemble, nous découvrons les unes après les autres des questions auxquelles le Gouvernement, j'espère que vous lui en donnerez acte, a, chaque fois, très méthodiquement, très scrupuleusement, apporté des réponses précises.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau.

M. Bernard Cazeau. Monsieur le ministre, je suis en partie rassuré, mais en partie seulement, car deux problèmes n'ont pas été réglés.

D'abord, il y a le problème du niveau de rémunération pris en compte pour la compensation. Vous évoquez le « pied de corps » alors que, vous le savez, les élus locaux, en particulier l'ADF, réclame qu'elle intervienne au niveau du corps médian, c'est-à-dire entre le pied de corps et le haut de corps. Tout cela est certes très technique, mais vous connaissez la question.

Ensuite, vous n'avez pas indiqué la date exacte à laquelle aura lieu la compensation. Selon le recteur d'académie de mon secteur, ce serait en 2009 : les conseils généraux devront donc consentir au moins l'avance de trésorerie pour la période 2006-2008. Je souhaite que, dans la mesure du possible, les modalités de la prise en charge de ces personnels évoluent et que celle-ci soit effective dans une période plus rapide que ce qui est actuellement envisagé.

réforme de l'ocm vitivinicole

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 1098, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, j'ai eu ici même l'occasion d'attirer votre attention à plusieurs reprises sur l'extrême gravité de la crise qui frappe la viticulture en Languedoc-Roussillon.

En liaison avec mes collègues MM. Marcel Rainaud, Robert Tropeano et les autres sénateurs du Languedoc-Roussillon, en particulier MM. Gérard Delfau, André Vézinhet et Simon Sutour, je souhaite une fois encore vous faire observer combien le constat est accablant et l'ampleur des dégâts sans précédent. La saignée économique est si énorme que l'on s'interroge très gravement sur l'avenir de cette région. Au train où vont les choses, a-t-elle seulement un avenir ?

Vous comprendrez que, dans un tel contexte, le projet de réforme de l'OCM vitivinicole ait pu accabler encore davantage le monde viticole. Je ne reviens pas sur le détail des points les plus négatifs, que j'ai largement développés dans le texte de la question que je vous ai fait parvenir.

Nous demandons donc au Gouvernement, monsieur le ministre, de se battre contre les propositions de réforme. Nous réaffirmons par ailleurs que le secteur des vins doit impérativement bénéficier d'une politique vitivinicole européenne et française autrement plus positive et autrement plus ambitieuse qu'elle ne l'est actuellement.

Il est tout aussi impératif que soit renforcée la compétitivité, mais aussi réaffirmée l'authenticité de nos vins, comparés à certains vins à caractère industriel à l'origine incertaine, et que soient donnés à la viticulture des moyens à l'exportation plus importants.

Mais permettez-nous également de revenir au préoccupant problème franco-français, donc à la crise viticole.

Devons-nous vous dire, une fois encore, que la situation est explosive et qu'il est de la plus extrême des urgences que le Gouvernement en prenne conscience, d'abord, et réagisse en conséquence, ensuite.

Je le répète, les précédentes mesures que vous avez annoncées ne sont pas à la mesure de la crise. Depuis septembre, par exemple, la fédération départementale des caves coopératives de l'Aude a réuni un conseil d'administration exceptionnel compte tenu de la gravité de la situation et des difficultés « à se faire entendre et accompagner par les pouvoirs publics ».

Nous allons vous transmettre les propositions formulées, mais nous souhaitons d'ores et déjà vous faire part des points principaux des trois volets de revendications que nous soutenons avec nos collègues.

Tout d'abord, un plan social immédiat doit être établi, avec notamment l'exonération de l'impôt foncier sur le non bâti, la réduction des cotisations sociales des exploitations et des exploitants, la mise en place d'un nombre suffisant de préretraites viticoles à 15 000 euros par an, sans oublier l'augmentation de la prime d'abandon définitif.

Ensuite, des mesures structurelles sont nécessaires, qu'il s'agisse du maintien des aides à la reconversion du vignoble au niveau établi en 2005 ou d'un plan de développement de la viticulture languedocienne autour des organisations de producteurs, ou encore des adaptations réglementaires immédiates pour gagner en compétitivité et s'adapter à la segmentation des marchés.

Enfin, des mesures de gestion de la récolte 2006 sont réclamées, notamment avec le versement intégral et sans condition du complément français de la distillation - article 30 de juillet 2006 - ou le basculement des volumes retenus de l'article 30 vers l'article 29 ouvert au 1er octobre, avec le même niveau d'accompagnement.

Voilà, monsieur le ministre, quelques-unes des propositions concrètes et précises qui vous sont adressées. Saurez-vous, cette fois-ci, compte tenu de la gravité de la situation, en tenir le plus grand compte ? Là est toute la question !

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, cette question aurait pu être posée par M. Delfau et un certain nombre de vos collègues. Nous avons d'ailleurs travaillé longuement, hier matin, avec un grand nombre de dirigeants agricoles de votre région. Leur diagnostic est moins pessimiste que le vôtre et, pourtant, il s'agit de grands professionnels, notamment MM. Despey, Bourdon, de Volontat et Paly. Mais peut-être est-ce l'atmosphère du Sénat qui vous conduit à noircir la réalité.

M. Roland Courteau. C'est l'atmosphère du terrain, monsieur le ministre !

M. Dominique Bussereau, ministre. Les viticulteurs connaissent également le terrain !

M. Roland Courteau. Peut-être pas autant que nous !

M. Dominique Bussereau, ministre. Vous en parlerez avec eux !

S'agissant de la réforme de l'OCM vitivinicole, pour l'instant, il s'agit non pas de projet de règlement, mais de proposition de la Commission. Des discussions ont déjà eu lieu en septembre dernier, lors des conseils des ministres européens, et un débat est prévu en octobre.

D'après la présidence finlandaise, la proposition législative, donc le projet de règlement, n'est attendue qu'au cours du premier semestre de l'an prochain - vraisemblablement au mois d'avril, selon la Commission -, c'est-à-dire sous la présidence allemande.

J'ai rencontré la rapporteure, qui est une élue grecque et qui siège au sein du groupe socialiste européen. Elle est dans le même état d'esprit et elle a établi un rapport qui reprend nombre des thèses que vous avez défendues ou que défend le gouvernement français.

La Commission a fait preuve de beaucoup de maladresse dans la présentation de cette affaire, en particulier en commençant par mettre en avant l'arrachage massif de 400 000 hectares. Comme de nombreux autres collègues européens, notamment allemands, espagnols, portugais et italiens, nous avons réagi fermement à cette proposition.

La réforme de fond dont la viticulture européenne a besoin ne saurait s'inscrire dans une logique de déclin. Nous ne sommes pas en train de gérer la fin de la sidérurgie dans les années soixante-dix : nous essayons de voir comment ce secteur peut exporter plus, se développer, conquérir de nouveaux marchés et donner du travail aux viticulteurs.

Je crois que la commissaire européenne Mme Fischer-Boel a compris le message - en tout cas, je l'espère - qu'avec vos collègues parlementaires alsaciens nous lui avons rappelé récemment, lorsqu'elle est venue rencontrer les viticulteurs de cette région : nous sommes prêts à travailler avec elle de manière constructive, mais à condition que nos demandes soient prises en compte.

L'arrachage ne saurait être la mesure centrale de la réforme. Cependant, il peut répondre à un certain nombre de situations individuelles. Vous avez raison, monsieur Courteau, il faut le compléter par un dispositif communautaire de préretraites adaptées : celles-ci doivent être d'un niveau suffisant pour être attractives.

Par conséquent, je souhaite que ce dispositif de préretraite figure dans le projet de règlement européen. Il est d'ailleurs mentionné dans les propositions de la Commission.

Il est également nécessaire de conserver des droits de plantation. Nous sommes tout à fait hostiles à la libéralisation complète des droits de plantation. On ne peut pas vouloir limiter la production pour l'adapter au marché et, dans le même temps, libéraliser complètement les droits de plantation. C'est absurde ! Nous voulons conserver cet outil pour pouvoir gérer les zones de production.

De plus, l'arrachage, s'il doit avoir lieu, ne doit pas concerner que la France. Le vignoble français, en particulier le vignoble languedocien, ne doit pas être la variable d'ajustement du vignoble communautaire et mondial.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Dominique Bussereau, ministre. D'autres pays doivent participer à cet effort. Il faut donc que le niveau des primes d'arrachage soit incitatif.

Il n'est sans doute pas nécessaire de faire un choix aussi définitif : l'arrachage peut être temporaire et volontaire ; en tout cas, c'est ce que nous demandons. Dans ma région, en Charente-Maritime, des arrachages volontaires ont eu lieu au moment où les choses allaient mal. L'arrachage temporaire et volontaire peut, dans certains cas, être un instrument de gestion.

La restructuration du vignoble doit effectivement être accompagnée de préretraites. C'est tout à fait utile compte tenu de la pyramide des âges, en particulier dans votre région, monsieur le sénateur.

Quelle que soit la décision européenne, j'ai d'ores et déjà demandé à mes services d'étudier avec les professionnels la façon de réévaluer le montant de la préretraite et de bâtir un partenariat avec les collectivités dans ce domaine.

Pour les viticulteurs qui demeurent en activité, j'ai bien noté votre demande de mesures d'exonération de la taxe sur le foncier non bâti. De telles mesures ont déjà été mises en oeuvre en 2006 et elles ont été appréciées ; nous en avons parlé à Nîmes.

Conformément à l'engagement du Président de la République, un abattement de 20 % de cette taxe est déjà effectif. Vous retrouverez ce même abattement dans le projet de loi de finances qui sera soumis à votre Haute Assemblée prochainement. D'ores et déjà, dans le Languedoc-Roussillon, un moratoire prévoit des reports de délais de paiement après le 1er janvier 2007.

Nous avons déjà accompli beaucoup d'efforts en 2006 : préretraites, aides en trésorerie, utilisation du fonds d'allègement des charges. Nous les poursuivrons chaque fois que ce sera utile.

Je terminerai par les outils de gestion du marché.

L'Organisation commune de marché devra offrir des moyens d'intervention ouverts et diversifiés au sein des enveloppes nationales. Il s'agit de faire jouer la subsidiarité.

La distillation de crise permet d'apporter une réponse à des situations d'urgence. Mais il faut la réformer, car certains pays européens l'utilisent de manière systématique comme un outil économique. Pour notre part, lorsque nous l'employons, c'est vraiment parce que nous sommes en difficulté : cette année où tout le monde a joué le jeu, y compris pour la première fois le vignoble bordelais. Il faut cependant engager une réforme au niveau européen afin que la distillation de crise puisse être rendue obligatoire par un État membre.

De même, l'obligation communautaire de distillation des sous-produits de vinification, qui est indispensable pour préserver la qualité des produits communautaires et l'environnement, doit être maintenue et adaptée afin d'être moins coûteuse.

Sur le plan des pratiques oenologiques et de l'étiquetage, il faut donner de la souplesse pour permettre à la filière de regagner toute sa compétitivité ; l'Europe l'a fait et nous allons également nous y employer.

Enfin, nous devons avoir des instruments offensifs pour exporter vers les pays tiers. Cette année, un soutien exceptionnel est accordé à la promotion de l'offre française dans le budget de mon ministère. Ce qui me fait plaisir, c'est qu'au cours du premier semestre nos exportations de vin ont repris en volume et en valeur, et ce pour la première fois depuis cinq ans.

Lors de mes vacances au Québec, je suis allé dans les vineries, qui font l'objet d'un monopole de vente de l'État, et j'ai vu en particulier que les vins du Languedoc-Roussillon étaient présentés en bonne place dans les rayonnages, à des prix très intéressants pour les consommateurs de ce pays. Par conséquent, il faut accentuer notre effort dans ce domaine.

Monsieur le sénateur, je suis favorable à une réforme de l'Organisation commune de marché vitivinicole, mais pas à celle que l'on nous a présentée ex abrupto.

Je suis également favorable à la poursuite des mesures de solidarité pour aider le vignoble du Languedoc-Roussillon. Peut-être faut-il arrêter de parler en permanence de crise et tenir un discours positif pour essayer de montrer à l'opinion publique et à l'ensemble des Français que le vignoble du Languedoc-Roussillon, qui a des problèmes, est capable de regagner ses parts de marché. Les vins produits sont des vins de grande qualité, qui sont bien meilleurs que certains vins chiliens, australiens ou du nouveau monde.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, vous avez apporté quelques réponses à nos interrogations concernant la réforme de l'OCM vitivinicole et nous en avons pris bonne note. Toutefois, en ce qui concerne la situation actuelle de la viticulture, il n'est nul besoin de la dramatiser dans cet hémicycle, car elle est particulièrement grave.

Nous restons donc sur notre faim s'agissant des mesures prévues pour faire face à cette crise qui frappe de plus en plus de viticulteurs. J'y insiste, le péril est réel et, si je puis dire, « le feu est dans la maison ».

Beaucoup trop de viticulteurs en difficulté ne s'en sortiront pas, monsieur le ministre. Si vous ne réagissez pas, de très nombreuses exploitations vont disparaître, laissant la place à des chômeurs ou à des RMIstes. Des zones viticoles entières vont être rayées de la carte, entraînant la détresse de nos populations.

Monsieur le ministre, il faut aider ces viticulteurs en difficulté à passer le cap et, pour ce faire, il importe de répondre favorablement aux demandes qui ont été exprimées. Permettez-moi de vous remettre ces demandes afin que vous puissiez y réfléchir. (M. Roland Courteau remet le document à M. le ministre.) Faites en sorte qu'elles soient traitées le plus rapidement possible.

Enfin, je vous proposerai de recevoir une délégation de parlementaires du Languedoc-Roussillon, accompagnée de responsables de la viticulture. (M. le ministre fait un signe d'assentiment.) Nous verrons ainsi quelle est l'ampleur de la crise qui frappe notre région ! Je vous remercie de nous proposer une date pour ce rendez-vous.