conditions de recrutement en « psychiatrie polyvalente »

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, auteur de la question n° 45, adressée à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Pierre Michel. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés auxquelles sont confrontés les établissements hospitaliers, s'agissant du recrutement des médecins, notamment des psychiatres.

Afin de pallier ces difficultés, un arrêté dérogatoire, reconduit jusqu'en 2006, a permis à des médecins généralistes, non titulaires d'un diplôme ou d'un titre de spécialiste en psychiatrie, de concourir dans la spécialité « psychiatrie polyvalente », à la double condition d'exercer depuis quatre ans des fonctions dans un établissement ou un service spécialisé de psychiatrie et de justifier de diplômes validant trois ans de formation dans la spécialité.

Or cette procédure dérogatoire n'a pas été reprise dans les dispositions nouvelles régissant le concours de praticien hospitalier.

S'il est parfaitement légitime de ne pas permettre à des praticiens d'une spécialité, en l'occurrence la médecine générale, de concourir dans une autre spécialité, l'interruption brutale de cette dérogation, qui existe depuis plusieurs années, soulève de réelles difficultés.

En effet, un certain nombre de médecins généralistes se sont d'ores et déjà engagés dans ce cursus, afin d'entamer une carrière de praticien hospitalier en psychiatrie avec le soutien de leur établissement. Aujourd'hui, ce cursus est interrompu sans solution de rechange, ce qui risque de priver les hôpitaux de recrutements précieux.

L'association hospitalière de Franche-Comté, que je préside, a la responsabilité exclusive de la psychiatrie dans le département de la Haute-Saône, du territoire de Belfort et du pays de Montbéliard, cher à notre collègue Louis Souvet. Cette disposition dérogatoire lui a permis, comme à beaucoup d'établissements situés dans d'autres départements, de pourvoir des postes vacants.

C'est pourquoi je vous demande, madame la ministre, de prolonger cette dérogation jusqu'en 2010 au moins, afin de permettre aux médecins engagés dans un processus de formation long et difficile de le mener à terme et de pourvoir ainsi, pour tout ou partie, les postes vacants.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, vous attirez mon attention sur le recrutement des médecins généralistes pour assurer les fonctions de médecins psychiatres dans les hôpitaux.

Comme vous l'avez précisé, un arrêté dérogatoire a permis à des médecins généralistes, non titulaires d'un diplôme ou d'un titre de spécialiste en psychiatrie, de concourir jusqu'en 2006 dans la spécialité « psychiatrie polyvalente ».

Cette dérogation était accordée à deux conditions : exercer depuis quatre ans des fonctions dans un établissement ou un service spécialisé de psychiatrie, à la date de parution de l'arrêté, et justifier de diplômes validant trois ans de formation dans la spécialité.

Cette procédure efficace a permis non seulement de pourvoir à de nombreux postes de médecins psychiatres, mais également de renforcer les effectifs des médecins psychiatres hospitaliers, et vous savez combien nous en avons besoin.

Cependant, il faut le reconnaître, elle dérogeait aux dispositions réglementaires en vigueur puisqu'elle autorisait des médecins généralistes à accéder à l'exercice d'une spécialité autre que la leur sans qu'ils soient qualifiés par le Conseil national de l'ordre des médecins.

Cette évolution des modalités de l'autorisation d'exercice hospitalier ne devait pas pénaliser les médecins engagés dans cette formation en psychiatrie ; c'eût été une injustice. C'est pourquoi, à la demande des médecins généralistes en formation, j'ai fait prolonger, pour cette année, la procédure dérogatoire par un arrêté signé le 4 octobre 2007.

J'ai pris contact avec le Conseil national de l'ordre des médecins, qui s'est engagé à examiner l'ensemble des dossiers des candidats en 2008.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Je remercie Mme la ministre de sa réponse. En vérité, j'en connaissais la teneur, mais les règles de notre assemblée nous obligent, pour intervenir au cours de ces séances du mardi matin, à poser nos questions très longtemps à l'avance. C'est ainsi que j'ai déposé la mienne avant la publication de l'arrêté du 4 octobre, dont j'ai eu connaissance la semaine dernière.

Madame la ministre, vous avez été sensible aux difficultés que j'évoquais, ce dont je vous remercie. Je vous invite à venir en Franche-Comté afin d'y visiter non seulement les services de cancérologie chers à M. Louis Souvet, mais aussi les services de psychiatrie.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je visiterai les deux !

situation de la viticulture française en 2007

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 2, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Roland Courteau. Monsieur le président, avec mon collègue Marcel Rainaud, je souhaite alerter une fois de plus le ministre de l'agriculture sur l'une des crises viticoles les plus graves que nous ayons connues.

Nous avons eu l'occasion d'indiquer ici même à plusieurs reprises que les mesures proposées par les gouvernements précédents n'étaient pas, et de loin, à la hauteur de la gravité de la crise et de la détresse matérielle et morale des vignerons.

Aujourd'hui, force est de le constater, les dégâts sont immenses. Des exploitations sont en perdition ; des revenus sont en chute de 40 % à 50 % ; des pans entiers de l'économie sont frappés de plein fouet. En prime, si j'ose dire, une nouvelle vague d'arrachage s'annonce, succédant à la précédente, laquelle a porté sur 12 000 hectares !

Quel gâchis pour une région comme le Languedoc-Roussillon, dont nous persistons à dire qu'elle a, toujours et encore, les moyens de ses ambitions ! En effet, la diversité et la complémentarité de ses vins, son image d'authenticité et la qualité de ses produits comptent parmi ses meilleurs atouts.

Pourtant, des drames humains sont en train de se nouer.

Un vigneron des Corbières faisait remarquer à Marcel Rainaud et à moi-même qu'il vendait l'hectolitre 524 francs, soit 80  euros, en 1995, contre 54 euros douze ans plus tard ! Quelle profession supporterait une telle chute de revenus ?

Sachez que ceux qu'un grand journal du soir qualifiait de « smicards de la vigne » en sont, pour beaucoup, à solliciter aujourd'hui le RMI. Le président du conseil général de l'Aude, M. Marcel Rainaud, qui est à mes côtés, ne me démentira pas ! (M. Marcel Rainaud fait un signe d'assentiment.)

Bref, il règne une situation de précarité importante chez nombre de nos viticulteurs.

Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir fait ici même des propositions, et ce dès 2002, pour éviter que la crise n'éclate. Malheureusement, ces propositions sont restées lettre morte, et l'on connaît la suite...

Quelles sont les causes principales de la crise de la viticulture française ? La baisse de la consommation en France, la diminution de nos exportations et, enfin, l'affaiblissement des mécanismes de régulation du marché de l'actuelle Organisation commune de marché vitivinicole, appelée aussi OCM Vin.

Un jour prochain, j'aurai l'occasion de revenir sur le projet de réforme de l'OCM Vin. Je m'en tiendrai aujourd'hui sur ce point à une seule remarque, pour mieux faire constater que la stratégie proposée par la Commission européenne n'est pas la bonne.

En effet, l'économie viticole mondiale paraît être entrée dans une nouvelle phase. Alors que la production diminue sous l'effet des changements climatiques, notamment la sécheresse, et de la crise, avec l'arrachage de vignes et l'arrêt des investissements, on note dans le même temps une augmentation de la consommation dans le monde. Il semble donc que la donne ait changé.

Bref, au moment où se négocie la réforme de l'OCM, cette question est stratégique : faut-il arracher des vignes, en Europe, alors que la consommation mondiale va dépasser la production ? À mon avis, la copie présentée par la Commission doit être revue et corrigée. À moins que la nouvelle OCM, dans sa version ultralibérale, n'ait qu'un unique objectif : arracher aujourd'hui pour mieux laisser la place en 2013 à de grands groupes financiers. Mais alors ce serait un comble !

J'en terminerai, monsieur le président, en exposant ce que nous attendons de M. le ministre de l'agriculture.

Nous attendons d'abord des dispositions d'une tout autre envergure que celles qui ont été prises voilà quelques mois.

M. Marcel Rainaud. Très bien !

M. Roland Courteau. Je crois me souvenir que, sur ce point, le Président de la République avait pris des engagements durant la campagne électorale.

Dès lors, un plan de relance important s'impose, avec la mise en oeuvre en urgence de mesures de soutien social pour les viticulteurs les plus en difficulté.

Pour les plus âgés d'entre eux, il faut proposer un nouveau dispositif de préretraites. Je rappelle les propositions de l'Union européenne fixant à 18 000  euros le montant de ces dernières, avec un financement provenant pour 50 % de l'Europe et pour 50 % de l'État membre.

Par ailleurs, alors que la consommation mondiale augmente, il importe de renforcer la promotion de nos vins sur les marchés extérieurs.

Concernant la demande intérieure, il doit certainement être possible, plutôt que de diaboliser le vin, de le valoriser tout en respectant les exigences de santé publique.

Il faut aussi aider et encourager les acteurs de la filière à se regrouper et à investir, afin de mieux équilibrer l'évolution de l'offre et celle de la demande, et acquérir un poids et une visibilité réels à l'exportation.

Marcel Rainaud et moi-même ne sommes pas certains que les 29 millions d'euros annoncés pour la France dans le cadre de la nouvelle OCM seront suffisants, même si nous reconnaissons que c'est là un premier pas.

En outre, nous proposons qu'une table ronde soit organisée chaque année avec la grande distribution. À propos de cette dernière, permettez-moi une remarque : pendant que les prix baissaient à la production, on ne retrouvait pas cette baisse sur les rayons des grandes surfaces !

Enfin, pourquoi ne pas organiser également des Assises de la viticulture ? La viticulture est un secteur qui, en France, génère quelque 800 000 emplois directs et indirects, et qui constitue le premier poste de nos exportations agroalimentaires. Il mérite donc la plus grande attention.

En conclusion, madame la ministre, nous attendons des perspectives claires, susceptibles de redonner confiance aux viticulteurs et vigueur à un secteur fleuron de notre agriculture, dont l'impact économique et social est de première importance pour la France, pour notre région Languedoc-Roussillon et pour l'Aude en particulier.

M. Marcel Rainaud. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme  la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, ministre de la santé et élue de la troisième région viticole française, je suis très heureuse de répondre à une question sur la viticulture !

Vous avez appelé l'attention du ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation préoccupante de la filière viticole languedocienne et vous sollicitez notamment la mise en place de mesures d'urgence dans les meilleurs délais.

La situation du marché du vin apparaît aujourd'hui contrastée, et tant Michel Barnier que moi-même connaissons les difficultés rencontrées par certains de nos viticulteurs. Toutefois, la faible récolte de l'année 2007 et les mesures de distillation de 2006 ont permis une nette diminution des stocks, et l'on enregistre actuellement quelques signes encourageants d'une reprise des cours des vins.

Diverses mesures ont déjà été engagées pour répondre aux difficultés de certains vignerons.

S'agissant du paiement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, Michel Barnier a demandé à notre collègue ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de donner des instructions aux comptables du Trésor, afin qu'ils examinent avec la plus grande bienveillance les demandes de délais de paiement ou de remises des pénalités formulées par les contribuables connaissant de graves difficultés.

Face aux difficultés sociales rencontrées, un nouveau dispositif de préretraite sera opérationnel très prochainement. Les allocations prévues pourront être cumulées avec le dispositif d'aide d'arrachage définitif des vignobles.

Enfin, dans le cadre de la réforme de l'Organisation commune de marché vitivinicole, diverses mesures sont prévues pour redonner de la compétitivité à la filière et reconquérir des parts de marché. Ces orientations sont partagées par le Gouvernement et, si les instruments proposés nécessitent encore d'être amendés, le dispositif final devra permettre à la filière viticole de retrouver un nouveau souffle.

Enfin, monsieur le sénateur, vous connaissez la place que tient la question viticole dans la lettre de mission que le Président de la République a adressée à Michel Barnier. Ce dernier a donc ouvert la discussion sur le plan de modernisation sur cinq ans voulu par le chef de l'État, afin de définir un programme d'actions qui permette à la viticulture française de conforter sa place dans le monde. Les travaux seront organisés autour de trois thèmes : la recherche-développement et le transfert de connaissance, la compétitivité des exploitations viticoles et des entreprises d'aval, la gouvernance de la filière viticole, chacun sous le pilotage d'un responsable professionnel.

Ces travaux seront engagés très rapidement. Michel Barnier a demandé que des premières propositions lui soient adressées d'ici à la fin de l'année et qu'un plan complet, intégrant notamment les orientations de la réforme de l'OCM vin réformée, lui parvienne au plus tard à la fin mars.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Madame la ministre, permettez-moi d'indiquer tout d'abord que, comme le démontrent vingt années de recherche et de travaux scientifiques, le vin consommé modérément et régulièrement est bénéfique à la santé.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pasteur disait que « le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons. » ! (Sourires.)

M. Roland Courteau. Je vous remercie de le souligner !

Il n'est donc pas anormal que Mme  la ministre de la santé se sente concernée par les problèmes de la viticulture, ce dont je la remercie.

Cela dit, nous ne percevons pas dans la réponse du ministre de l'agriculture et de la pêche tous les engagements que nous espérions y trouver. Certes, un certain nombre de propositions y sont avancées. Mais Marcel Rainaud et moi-même ne sommes pas certains que celles-ci soient à la hauteur de la gravité de la crise et de ses effets dévastateurs. Quoi qu'il en soit, nous jugerons aux actes.

Notez simplement, madame la ministre, qu'il est extrêmement urgent de traiter ce problème gravissime sur les plans social et économique, car il y va de la vie ou de la mort d'un grand nombre d'exploitations et de l'avenir de zones entières !

réforme de la carte judiciaire

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, auteur de la question n° 14, adressée à Mme  le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Bernard Cazeau. Je souhaite attirer l'attention de Mme le garde des sceaux sur les inquiétudes exprimées par les citoyens et leurs représentants en Périgord au sujet du projet de réforme de la carte judiciaire.

Le Gouvernement projette une réduction significative du nombre de juridictions présentes sur le territoire national. On évoque ainsi la fermeture de la moitié des tribunaux d'instance, d'un tiers des tribunaux de commerce, d'une bonne partie des conseils prud'homaux.

Dans mon département, la Dordogne, une partie de ces craintes sont fondées. Mme le garde des sceaux a ainsi annoncé à Pau, vendredi dernier, la fermeture de deux tribunaux d'instance sur trois, à Nontron et à Ribérac, ainsi que celle du tribunal de commerce de Sarlat. Ces décisions risquent de favoriser la création de déserts judiciaires.

Comme souvent en matière de réduction des services publics, on nous explique que plus d'efficacité passe par moins de proximité : « une justice plus proche par des tribunaux plus lointains », voilà qui relève de la prouesse rhétorique car, en milieu rural, c'est difficile ! À mes yeux, l'organisation territoriale du service public n'est pas distincte du service public lui-même.

Songez, pour prendre l'exemple du département de la Dordogne, que la fermeture des tribunaux d'instance de Ribérac et de Nontron obligera les justiciables à parcourir des distances allant de 100 à 150 kilomètres aller et retour pour se rendre devant le juge, et ce parfois pour des petites affaires examinées en quelques minutes, comme celles que traitait autrefois le juge de paix devant ce que l'on appelait les justices de paix !

L'appareil judiciaire doit demeurer accessible à tous. Il faut éviter que les personnes les plus défavorisées, qui auront des affaires à traiter, ne paient plus que d'autres usagers domiciliés à proximité des juridictions.

Aussi, au nom de l'égalité de traitement des citoyens, je vous demande de bien vouloir revoir votre position et de revenir sur les fermetures programmées des deux tribunaux d'instance de Nontron et de Ribérac.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Monsieur le sénateur, Mme Rachida Dati, que vous avez souhaité interroger sur la réforme de la carte judiciaire, est actuellement en déplacement avec le Président de la République au Maroc, et elle m'a donc chargé de vous communiquer sa réponse.

Comme vous l'avez indiqué, Mme le garde des sceaux était, vendredi dernier, en déplacement à Pau, où elle a eu l'occasion de présenter un schéma de refonte de la carte judiciaire pour les cours d'appel de Pau et de Bordeaux.

Ce schéma consacre le maintien des tribunaux de grande instance de ces ressorts, et notamment, dans le département de la Dordogne, des tribunaux de grande instance de Périgueux et de Bergerac. Voilà qui répond donc au premier élément de votre question.

Tant les réalités territoriales que la nécessité de conserver un maillage judiciaire répondant à la demande en justice de nos concitoyens ont été prises en compte sur ce sujet.

Seuls deux tribunaux d'instance de faible activité seront regroupés. Comme vous l'avez indiqué, il s'agit, dans le département de la Dordogne, des tribunaux d'instance de Nontron et de Ribérac, qui fusionneront avec le tribunal de Périgueux. De même, le tribunal de commerce de Sarlat fusionnera avec celui de Bergerac. Enfin - c'est un point très important pour le département de la Dordogne -, le tribunal de grande instance de Périgueux sera désigné pôle d'instruction, à partir du 1er mars 2008, pour les départements de la Dordogne et de la Charente.

Mme le garde des sceaux peut ainsi vous assurer qu'elle partage votre volonté d'une justice de qualité, efficace pour le justiciable.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau.

M. Bernard Cazeau. Si la situation en restait là, je ne pourrais que déplorer la disparition des tribunaux d'instance de Ribérac et de Nontron. N'oublions pas en effet que nous sommes en milieu rural, où les distances sont importantes ! Certes, le tribunal de grande instance de Bergerac est maintenu, mais, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, la fermeture des tribunaux d'instance de Ribérac et de Nontron obligera les justiciables à parcourir des distances allant de 100 à 150 kilomètres aller et retour pour se rendre devant le juge. Il sera donc tout à fait dommageable pour le justiciable de les supprimer.

éligibilité des communes au fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, auteur de la question n° 34, adressée à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

M. Claude Domeizel. Ma question porte sur l'interprétation de l'article 1648 A du code général des impôts.

Lors de l'examen par le Sénat du projet de loi de finances pour 2007, j'avais obtenu l'engagement du ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, au cours de la séance du 11 décembre 2006, de modifier le décret n° 88-988 du 17 octobre 1988, lequel précise, de manière abusive par rapport à l'esprit de la loi, que les communes éligibles aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle doivent être situées dans les départements limitrophes du département sur lequel se trouve l'établissement.

Toutes les communes situées à proximité des établissements générateurs de taxe professionnelle, dès lors qu'elles subissent de ce fait un préjudice ou une charge quelconque ou qu'elles accueillent sur leur territoire des résidents salariés dans ces établissements, doivent logiquement bénéficier d'une partie du fonds de péréquation de la taxe professionnelle.

Dans l'esprit même de l'article 1648 A du code général des impôts, cette règle doit bien évidemment s'appliquer dans tous les cas, même si le département de résidence et celui de l'activité professionnelle ne sont pas limitrophes. Le fait générateur du préjudice et des charges n'a aucun lien avec la mitoyenneté de deux départements, pas plus qu'avec la distance qui sépare les lieux de résidence et de travail.

Selon quelle logique peut-on soutenir qu'une commune aurait moins de droits qu'une autre du seul fait d'un découpage datant de 1789 ? Des communes proches géographiquement, appartenant à un même bassin d'emploi, peuvent partager des intérêts économiques et sociaux, et ce sans subir l'arbitraire d'un tel découpage.

Cette évidence est remise en question par le décret n° 88-988 du 17 octobre 1988, qui introduit dans son article 4, sans doute par commodité rédactionnelle et contrairement à la volonté du législateur, une notion de mitoyenneté.

Je pense tout particulièrement - et le président Jean-Claude Gaudin, qui connaît parfaitement cette région, l'a bien compris - à la situation particulière de la commune d'implantation du Commissariat à l'énergie atomique et, aujourd'hui, d'ITER, sur le site de Cadarache, où viennent travailler de nombreux habitants des Alpes-de-Haute-Provence. A la suite d'un découpage hasardeux, ce dernier département n'est pas limitrophe de celui des Bouches-du-Rhône, alors qu'il ne se trouve qu'à quelques centaines de mètres !

Je souhaite donc connaître l'avancée du projet de modification du décret du 17 octobre 1988, qui m'avait été promis au mois de décembre 2006.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser Mme Christine Lagarde, qui préside actuellement la conférence sur le pouvoir d'achat qui se tient actuellement à Bercy avec les partenaires sociaux.

Votre question reprend un amendement que vous aviez déposé l'an dernier, tendant à compléter l'article 1648 A du code général des impôts, pour faire bénéficier de la répartition du fonds de péréquation de la taxe professionnelle les communes se trouvant à proximité d'un établissement exceptionnel. Cette proposition, et donc votre question, vise en particulier les communes se situant sur le territoire d'un département qui n'est pas géographiquement limitrophe de celui sur lequel se trouve l'établissement exceptionnel. Vous avez cité à ce titre le site de Cadarache.

Comme vous le savez, monsieur le sénateur, les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle ont pour objet de redistribuer une part du produit de la taxe professionnelle versée par des établissements exceptionnels -centrales nucléaires, barrages, grandes entreprises -, pour lesquels les bases d'imposition de la taxe professionnelle dépassent de deux fois la moyenne des bases par habitant constatée au niveau national.

Ainsi, une partie du produit de cette taxe professionnelle est prélevée au bénéfice du fonds pour être reversée, au sein de chaque département, aux communes et aux EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, selon différents critères, et notamment en tenant compte des charges liées aux salariés de cet établissement, qui habitent souvent sur ces communes.

Ce reversement est en règle générale effectué au niveau départemental, mais il peut être interdépartemental lorsque les communes concernées par la répartition du fonds sont situées dans deux ou plusieurs départements, s'agissant notamment d'établissements de taille exceptionnelle ; je pense en particulier, à cet égard, au projet ITER.

Le décret de 1988 que vous mentionnez précise effectivement que cette répartition n'est effectuée qu'au profit des communes des départements « limitrophes », alors que la loi ne fait pas référence à cette limitation. En effet, même si le cas est probablement très rare, des communes de départements non limitrophes peuvent être concernées du fait de l'installation sur leur territoire de personnes travaillant dans un tel établissement.

M. Claude Domeizel. C'est sûr !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. C'est le cas de communes du département que vous représentez dans cette assemblée, monsieur le sénateur.

Au cours de la séance du 11 décembre 2006, à l'occasion de la discussion de l'amendement que vous aviez déposé sur ce sujet, le ministre délégué au budget de l'époque s'était engagé à modifier le décret de 1988, ainsi qu'à supprimer le critère de « communes limitrophes », dès lors qu'il apparaissait contraire à la loi.

Par courrier du 19 septembre dernier, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales vous a indiqué que la modification de ce décret était engagée. Le Gouvernement étudie en effet l'introduction d'une règle subsidiaire, laquelle prévoit que les préfets prendront en compte un rayon de cinq kilomètres autour des limites de la commune d'implantation de l'établissement exceptionnel. Cette proposition est actuellement étudiée par la direction générale des impôts et la direction de la législation fiscale. (M. Claude Domeizel lève les bras au ciel.)

Je tiens par ailleurs à souligner qu'il s'agit là d'un cas très particulier, pour lequel je ne doute pas qu'une solution adaptée sera trouvée par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, d'avoir répondu à ma question, et surtout d'avoir reconnu qu'elle mettait en lumière une anomalie qui devait être rectifiée.

Vous me dites que la révision du décret est engagée ; elle serait en ce moment même examinée par la direction générale des impôts et la direction de la législation fiscale. Ensuite, elle devrait faire l'objet d'une consultation interministérielle, avant d'être soumise au Comité des finances locales, pour être enfin présentée au Conseil d'État... Tout cela pour supprimer le seul mot « limitrophes » ! Avouez qu'on ne trouve guère mieux en matière de lourdeur administrative !

Pour effectuer cette modification, trois solutions étaient envisageables.

Tout d'abord - et tel était l'objet de l'amendement que j'avais présenté -, il était possible de compléter la première phrase du II de l'article 1648 À du code général des impôts par les mots : « qu'ils soient limitrophes ou non ». Cela rendait de fait, dans le décret, le terme « limitrophes » inopérant.

Ensuite, le décret de 1988 pouvait être modifié. Au mois de décembre dernier, je ne pensais pas que cela demanderait autant de temps ! Aujourd'hui, 23 octobre 2007, nous n'en sommes qu'au début du processus de suppression du mot « limitrophes ». Le Gouvernement a d'ailleurs choisi non pas de le supprimer, mais d'introduire une notion de distance de cinq kilomètres. Pourquoi pas, après tout, puisqu'une telle proposition répond à ma préoccupation !

Enfin, pourquoi ne pas envisager qu'une simple circulaire, comme cela se fait très souvent, précise l'esprit de la loi, pour laquelle la notion de « mitoyenneté » n'existe pas ? Ainsi, lors de la répartition de la taxe professionnelle dévolue au département des Bouches-du-Rhône, tous les départements, limitrophes ou non, qui accueillent des salariés du site de Cadarache seraient concernés. J'imagine mal qu'un recours puisse être déposé contre une telle circulaire, d'autant que l'esprit de la loi serait maintenu.

Je me permets donc, monsieur le secrétaire d'État, d'insister sur cette troisième solution, qui aurait au moins pour effet de répondre à ma demande dès le 1er janvier 2008.