M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Madame Bricq, je vais être très prudent, car il s'agit de spécificités de l'Île-de-France que je ne connais pas très bien. M. Jean-François Copé, le précédent ministre du budget, qui entretenait avec vous des relations très fidèles (Sourires.), aurait été mieux à même d'apprécier la portée du dispositif que vous soumettez au Sénat.

L'adoption de l'amendement no II-222 reviendrait à assujettir à un prélèvement au bénéfice du Fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France des intercommunalités qui jusqu'à présent n'y étaient pas soumises.

Faute de simulations, ce dispositif s'apparente à un lapin sorti d'un chapeau et il est difficile d'en mesurer les conséquences.

Quelle que soit la pureté des intentions des auteurs de l'amendement, dont nous ne doutons pas, les effets de ce dispositif pourraient se révéler excessifs, voire pervers.

Pour toutes ces raisons, la commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Pourquoi modifier aujourd'hui, sans concertation, le régime applicable aux établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique ? D'autant que nous sommes au mois de décembre et que ces établissements commencent à préparer leur budget.

La réflexion mérite encore d'être approfondie sur ce sujet, en concertation avec la région d'Île-de-France, et l'on ne saurait aujourd'hui modifier le régime en vigueur.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur, je ne suis pas persuadée que l'on puisse parler de spécificités locales s'agissant d'un espace régional qui regroupe 12 millions d'habitants, soit près du cinquième de la population française, même si, il est vrai, les inégalités y sont les plus criantes.

Monsieur le ministre, je veux bien que l'on procède à toutes les concertations possibles, mais le problème est pendant depuis 2003, et il ne pourra pas être réglé par les communes d'Île-de-France : le FSRIF a été institué par une loi et il a toujours été modifié par des lois. Les dispositions que nous proposons relèvent donc de la loi !

Il faut en finir avec les inégalités actuelles et remettre à plat le mécanisme de financement du FSRIF. Sinon, à quoi bon tenir des discours sur le rattrapage des inégalités dans les banlieues d'Île-de-France, à quoi bon vouloir lancer un nouveau plan Marshall ? Le lissage des inégalités passe aussi par la fiscalité.

Le problème se pose depuis de nombreuses années et il n'est toujours pas résolu. Votre prédécesseur, monsieur le ministre, n'a pas tenu la parole qu'il avait donnée au nom du Gouvernement, donc au nom de l'État.

Je maintiens donc l'amendement no II-222. Le rattrapage que nous proposons relève du bon sens. Nous demandons simplement que les établissements publics de coopération intercommunale ayant opté pour la taxe professionnelle unique soient soumis au second prélèvement du FSRIF.

Vous avez très clairement manifesté votre opposition à cette disposition, monsieur le ministre. Si vous voulez que je vous livre le détail des communes qui ont cherché à se soustraire au mécanisme de la solidarité en Île-de-France, il me suffira de vous inviter à regarder du côté des Hauts-de-Seine, et vous comprendrez !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-222.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune ; les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° II-173 est présenté par M. Marini, au nom de la commission.

L'amendement n° II-215 est présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 40 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 541-10-1 du code de l'environnement est ainsi rédigé :

« Art. L. 541-10-1. - I. - À compter du 1er janvier 2008, tout donneur d'ordre qui émet ou fait émettre des imprimés papiers, y compris à titre gratuit, à destination des utilisateurs finaux, contribue à la collecte, à la valorisation et à l'élimination des déchets d'imprimés papiers ménagers et assimilés ainsi produits.

« La contribution peut prendre la forme de prestations en nature, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du IV.

« II. - Sont exclus de l'assiette de la contribution visée au I :

« 1° Les imprimés papiers dont la mise sur le marché par une personne publique ou une personne privée, dans le cadre d'une mission de service public, résulte exclusivement d'une obligation découlant d'une loi ou d'un règlement ;

« 2° Les livres, entendus comme un ensemble imprimé, illustré ou non, publié sous un titre, ayant pour objet la reproduction d'une oeuvre de l'esprit d'un ou plusieurs auteurs en vue de l'enseignement, de la diffusion de la pensée et de la culture ;

« 3° Les publications de presse, au sens de l'article 1er de la loi nº 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, conformes aux dispositions du premier alinéa et des 1°, 2°, 3° et 5° de l'article 72 de l'annexe III au code général des impôts, sous réserve de ne pas constituer une des publications désignées aux a, c, d et e du 6° du même article 72. L'encartage publicitaire accompagnant une publication de presse n'est exclu que s'il est annoncé au sommaire de cette publication.

« III. - Jusqu'au 31 décembre 2009, sont également exclus de la contribution visée au I les envois de correspondances au sens de l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques, à l'exception du publipostage.

« À compter du 1er janvier 2010, dans des conditions fixées par décret, tout metteur sur le marché de papiers à usage graphique, transformés, manufacturés, conditionnés et destinés à être imprimés par ou pour le compte d'utilisateurs finaux contribue à la collecte, à la valorisation et à l'élimination des déchets papiers, ménagers et assimilés ainsi produits.

« IV. - Sous sa forme financière, la contribution visée au I est versée à un organisme agréé par les ministères chargés de l'environnement, des collectivités territoriales, de l'économie et de l'industrie, qui verse aux collectivités territoriales une participation financière aux coûts de collecte, de valorisation et d'élimination qu'elles supportent.

« La contribution en nature repose sur le principe du volontariat des établissements publics de coopération intercommunale assurant l'élimination des déchets. Elle consiste en la mise à disposition d'espaces de communication au profit des établissements de coopération intercommunale assurant l'élimination des déchets ménagers qui le souhaitent. Ces espaces de communication sont utilisés pour promouvoir la collecte, la valorisation et l'élimination des déchets.

« Les contributions financières et en nature sont déterminées suivant un barème fixé par décret.

« V. - Le donneur d'ordre ou le metteur sur le marché qui ne s'acquitte pas volontairement de la contribution visée au I est soumis à la taxe prévue au 9 du I de l'article 266 sexies du code des douanes.

« VI. - Pour l'application du présent article, on entend par :

« 1° Imprimés papiers, tout support papier imprimé, à l'exception des papiers d'hygiène, d'emballages, de décoration, des affiches, des papiers à usage fiduciaire et des notices d'utilisation ou modes d'emploi ;

« 2° Papiers à usage graphique destinés à être imprimés, les papiers à copier, les papiers graphiques, les enveloppes et les pochettes postales, à l'exception des papiers carbone, autocopiant et stencils ;

« 3° Metteur sur le marché, toute personne donneuse d'ordre, qui émet ou fait émettre des papiers à usage graphique transformés, manufacturés, conditionnés et destinés à être imprimés, dont la collecte et le traitement relèvent de la compétence des collectivités territoriales et de leurs groupements ;

« 4° Donneur d'ordre, la personne à l'origine de la politique générale promotionnelle, d'annonce, d'information ou commerciale, ou au nom ou sous l'appellation de laquelle cette politique a été menée ;

« 5° Utilisateur final, la personne, physique ou morale, qui consomme un produit manufacturé mis sur le marché.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret. »

La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement no II-173.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de modifier, pour le simplifier et l'élargir, le régime de la contribution sur les imprimés non sollicités, prévue à l'article L 541-10-1 du code de l'environnement.

La commission souhaite affirmer plus clairement le principe de responsabilité élargie du producteur.

Le mécanisme actuel, qui a le mérite d'exister, peut se voir opposer deux critiques principales.

En premier lieu, du point de vue juridique, il repose sur une définition complexe des imprimés assujettis, car procédant par accumulations de critères positifs : émission d'un support papier, absence d'adressage, caractère informatif ou publicitaire, distribution ou mise à disposition dans les boîtes aux lettres, parties communes des habitations collectives, locaux commerciaux, lieux publics ou voie publique, gratuité, et à destination du consommateur !

Une telle définition, outre le fait qu'elle est peu intelligible pour le contribuable, est susceptible d'encourager l'évasion de certains opérateurs économiques qui éviteront de remplir l'un des critères.

En second lieu, du point de vue environnemental, et c'est en réalité l'essentiel, la définition actuellement retenue aboutit à ne couvrir que 25 % des 4,5 millions de tonnes d'imprimés traités par les collectivités.

Le dispositif proposé par la commission a été élaboré après de longs travaux, je tiens à le souligner, au sein de l'Association des maires de France et avec les filières concernées. Il prévoit une extension de l'assiette de la contribution en deux temps : dès le 1er janvier 2008 pour le publipostage, les catalogues de vente par correspondance, les magazines de marques, soit un gisement de 650 000 tonnes ; ensuite, à compter du 1er janvier 2010, pour le papier « bureautique », soit 950 000 tonnes, dont les deux tiers sont traités par les collectivités territoriales.

Monsieur le ministre, il en résulterait un soutien supplémentaire pour le traitement des déchets ménagers par les collectivités territoriales que l'on peut estimer à 23 millions d'euros à la fin de 2009, auxquels s'ajouteraient 22 millions d'euros à la fin de 2011.

Monsieur le ministre, permettez-moi d'insister sur l'opportunité que représente cet amendement. Il permettrait une montée en puissance du dispositif d'ÉcoFolio, faciliterait la tâche de nombreuses collectivités et intercommunalités, en particulier de celles qui se sont les plus investies dans les différents processus de valorisation des différentes catégories de déchets.

Ce serait un facteur important de progrès, une réalisation concrète à porter au crédit des réflexions récentes, notamment du Grenelle de l'environnement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° II-215.

M. Gérard Miquel. Il est temps de prendre en compte le traitement de ces déchets et d'apporter aux collectivités les moyens de les traiter dans de bonnes conditions. Je me réjouis de constater à cet égard une évolution convergente, et ces amendements identiques en sont la preuve.

Le système actuel est trop limitatif. En l'élargissant progressivement - je ne reprendrai pas l'argumentaire de M. le rapporteur général - nous allons dans le bon sens. Les collectivités apprécieront notre décision !

M. le président. L'amendement n° II-150 rectifié, présenté par M. Détraigne, Mme Payet, MM. A. Giraud et Deneux, Mme Gourault et MM. Biwer, Vanlerenberghe, Amoudry et Zocchetto, est ainsi libellé :

Après l'article 40 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement est ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2008, toute personne physique ou morale qui met pour son propre compte des imprimés à disposition des particuliers, leur distribue ou leur fait distribuer des imprimés dans les boîtes aux lettres, dans les parties communes des habitations collectives, dans des locaux commerciaux, dans des lieux publics ou sur la voie publique, est tenue de contribuer à la collecte, la valorisation et l'élimination des déchets ainsi produits. Toutefois, sont exclus de cette contribution les organes de presse payante et la mise à disposition du public d'informations par un service public, lorsqu'elle résulte exclusivement d'une obligation découlant d'une loi ou d'un règlement, ou par une publication de presse, au sens de l'article 1er de la loi nº 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse ainsi que  la distribution d'envois de correspondance au sens de l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques. »

La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.

M. Jean-Paul Amoudry. Cet amendement vise à élargir aux publicités adressées et supports d'impression vierges la contribution environnementale votée en 2003 s'agissant des imprimés non sollicités.

En effet, le dispositif actuel ne concerne que 1 million de tonnes d'imprimés, alors que 3,6 millions de tonnes sont à la charge des collectivités locales.

Le présent amendement vise donc à porter la cible soumise à contribution à environ 1,6 million de tonnes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no II-150 rectifié ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement relève du même esprit que celui de la commission.

Il en diffère toutefois par des considérations techniques et nous semble par ailleurs moins complet. C'est pourquoi, bien que partageant sans réserve les objectifs du groupe UC-UDF, je demande aux auteurs de l'amendement n° II-150 rectifié de se rallier à l'amendement n° II-173 de la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements en discussion commune ?

M. Éric Woerth, ministre. Les amendements identiques nos II-173 et II-215 étendent de manière considérable la contribution sur les imprimés. Ils vont très loin puisqu'ils en réécrivent totalement le champ d'application.

Le Gouvernement considère que cet amendement n'a pas donné lieu à une concertation suffisante avec les éditeurs de catalogues et avec les éditeurs de papiers graphiques.

Je pressens l'unanimité que recueilleront ces amendements identiques, mais j'avais l'intention de vous proposer, mesdames, messieurs les sénateurs, que, d'ici à la discussion du projet de loi de finances rectificative, nous réfléchissions à des mesures anti-abus afin de lutter contre les dispositifs de contournement de la loi.

Il pourrait s'agir de supprimer le caractère gratuit des imprimés - afin d'éviter que des imprimés remis gratuitement à des particuliers mais affichant un prix fictif ne donnent lieu à facturation -, de redéfinir le contenu rédactionnel minimal à partir duquel une publication est considérée comme une publication de presse, d'inclure le publipostage dans le champ de la taxe, bref, toute sorte de clauses anti-abus susceptibles d'éviter les contournements actuels. Puis, dans un second temps, je voulais vous proposer une réflexion afin de compléter la législation, après une concertation plus approfondie que celle qui a eu lieu jusqu'à présent.

Pour ne prendre que deux exemples, si nous adoptions les amendements en l'état, les ramettes de papier graphique ou les catalogues que font parvenir de grandes sociétés françaises à leurs clients seraient soumis à la contribution, alors qu'il s'agit de produits de vente qui n'ont rien à voir avec les imprimés visés à l'origine.

Tel est le calendrier que vous propose le Gouvernement : d'abord adopter des mesures évitant les abus lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative, puis entamer une véritable concertation.

Cet argumentaire vaut également pour l'amendement no II-150 rectifié.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis surpris de cette réponse, monsieur le ministre.

J'ai participé à de nombreuses réunions organisées en particulier sous l'égide du président de l'Association des maires de France. Un grand nombre de professionnels ont été associés à la démarche qui a abouti au dépôt de notre amendement. On ne peut donc pas soutenir que la concertation n'a pas été insuffisante.

Certes, un groupe, qui n'est pas misérable, se plaint et voudrait bien que le bourreau retienne un peu sa main : ce serait toujours un an de gagné...

Non, monsieur le ministre, mes chers collègues, les parlementaires que nous sommes doivent se préoccuper du recyclage de ces déchets qui nous envahissent et que les responsables locaux ont du mal à traiter.

Monsieur le ministre, différer la mesure d'une année ou organiser des réunions supplémentaires n'apportera rien. Il ne faut pas céder à des intérêts bien constitués qui ne défendent qu'une vision à court terme, d'autant, je le répète, qu'ils ne sont en rien misérables. On ne m'entend pas souvent parler ainsi des entreprises, mais je considère que mes convictions libérales me le permettent.

Le dispositif que nous préconisons est simple, large, neutre ; il faut donc l'adopter.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-173 et II-215.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 40 nonies, et l'amendement n° II-150 rectifié n'a plus d'objet.

L'amendement n° II-248, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 40 nonies, insérer un article ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement, est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... . - À compter du 1er janvier 2009, toute personne privée physique ou morale qui fabrique, importe ou introduit sur le marché des éléments d'ameublement (mobiliers de cuisine, de salle de bain, de salon, de chambre...) assure le financement de la collecte, du tri, de la revalorisation et de l'élimination desdits produits en fin de vie, sous la forme d'un soutien aux collectivités territoriales compétentes.

« À partir du 1er janvier 2009, tout émetteur sur le marché ne respectant pas cette obligation est soumis à la taxe générale sur les activités polluantes visée à l'article 266 sexies du code des douanes. »

La parole est à M. Michel Moreigne.

M. Michel Moreigne. Cet amendement tend à appliquer le principe de la responsabilité élargie du producteur aux déchets d'ameublement dont la gestion, assurée par les collectivités territoriales, représente un coût particulièrement élevé.

Chaque Français produit près de cent kilogrammes de déchets encombrants par an, dont une grande partie de déchets d'ameublement, qui sont aujourd'hui totalement à la charge des collectivités locales et rarement valorisés. Le gisement des encombrants est d'ailleurs en pleine explosion, si j'ose dire, dans les déchetteries françaises.

Le mécanisme que nous proposons prévoit que « toute personne privée, physique ou morale, qui fabrique, importe ou introduit sur le marché des éléments d'ameublement » devra assurer « le financement de la collecte, du tri, de la revalorisation et de l'élimination desdits produits en fin de vie, sous la forme d'un soutien aux collectivités territoriales compétentes ». En cas de non-respect de cette obligation, le producteur serait alors soumis à la taxe générale sur les activités polluantes.

Les fonds récoltés permettraient le développement d'une filière de recyclage des déchets d'ameublement et contribueraient ainsi fortement à prévenir la production de ces déchets.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette démarche est intéressante, mais un travail important doit encore être réalisé afin de traduire concrètement ce principe de responsabilité élargie du producteur. Le dispositif que vous souhaitez instaurer, mon cher collègue, s'inspire de mécanismes existants, en particulier celui que nous venons de voter à l'instant, mais la rédaction que vous avez retenue est encore un peu laconique...

M. Michel Moreigne. Un peu rustique, sans doute !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous imaginons qu'il s'agit d'un amendement d'appel, que cet appel aura un écho auprès du Gouvernement (Sourires.) et que vous pourrez envisager, après avoir entendu M. le ministre, de retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. L'idée qui sous-tend cet amendement peut être étendue à de nombreux secteurs d'activité. Dans le cas présent, elle est peut-être un peu rustique, comme les meubles qu'elle vise (Nouveaux sourires.)...

Je pense que cet amendement mérite d'être encore travaillé. Dans le cas présent, les concertations nécessaires doivent être menées. Si vous estimez qu'elles ont été menées en ce qui concerne ÉcoFolio, ce n'est pas le cas pour cette filière particulière.

Nous abordons une série d'amendements concernant diverses filières d'élimination des déchets et nécessitant un travail en profondeur : ils peuvent être considérés comme des amendements d'appel et ne soulèvent pas de critiques particulières sur le fond, mais les conséquences qu'ils emportent pour les filières économiques méritent d'être étudiées sérieusement. Bref, il faut encore y travailler !

M. le président. Monsieur Moreigne, l'amendement est-il maintenu ?

M. Michel Moreigne. Je comprends que M. le rapporteur général et vous-même, monsieur le ministre, ayez l'habitude de meubles de style, Louis XV ou Louis XVI, ...et d'un style littéraire plus élevé ! (Sourires.)

Je vous remercie néanmoins de la réponse que vous m'avez apportée, prouvant que vous prenez en compte nos préoccupations. Compte tenu du sort qui attendrait cet amendement si je m'obstinais, je préfère le retirer ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. L'amendement n° II-248 est retiré.

L'amendement n° II-270 rectifié bis, présenté par M. Miquel et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :

Après l'article 40 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - À compter du 1er janvier 2009, toute personne privée physique ou morale qui fabrique, importe ou introduit sur le marché des peintures, vernis, solvants, détergents, huiles de vidanges, pesticides, herbicides, fongicides et autres produits chimiques pouvant représenter un risque significatif pour la santé et l'environnement est tenue de prendre en charge techniquement et financièrement la collecte et l'élimination desdits produits en fin de vie ou de verser à cette fin une éco contribution à un organisme agréé.

« La personne visée au premier alinéa qui ne s'acquitte pas de cette prise en charge ou éco-contribution est soumise à la taxe prévue à l'article 266 sexies du code des douanes.

« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret. »

La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. La prise de conscience de nos concitoyens et leur engagement en faveur du tri des déchets nous a conduits à mettre en place des dispositifs de collecte spécifiques.

Cet amendement concerne les déchets dangereux. Les collectivités territoriales ont travaillé : dans les déchetteries, des dispositifs permettent de recueillir les déchets dangereux apportés par nos concitoyens. Il s'agit de vieux pots de peinture, de vernis, de solvants, de détergents, de fonds de bidons de produits de traitement, d'herbicides, de fongicides, des pesticides, de produits chimiques... Ces déchets sont collectés et envoyés dans des unités de traitement spécialisées. Le coût de ce traitement est très élevé : il varie de 3 000 euros à 4 000 euros par tonne !

Les collectivités territoriales doivent donc payer les installations de collecte et le coût de traitement de ces produits. Il serait relativement facile, et tel est l'objet de cet amendement, de faire payer aux producteurs une contribution qui permettrait aux collectivités territoriales d'éliminer ces produits en fin de vie ou de demander à ces producteurs de verser une éco-contribution à un organisme agréé qui reverserait aux collectivités tout ou partie des sommes nécessaires au traitement de ces déchets.

Cet amendement répond à l'esprit du Grenelle de l'environnement, où nous avons décliné un certain nombre d'objectifs : il nous permettrait d'avancer dans cette voie. Il va dans le même sens que l'amendement présenté par M. le rapporteur général et que nous venons de voter dans un bel ensemble. J'espère que M. le rapporteur général entendra mes arguments et approuvera cet amendement, de la même façon que nous avons approuvé le sien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne peux pas raisonner autrement sur cette filière que sur la précédente ni que sur la suivante.

M. Jean-Jacques Hyest. C'est pareil, c'est trop imprécis !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous retrouvons le même principe de responsabilité élargie du producteur, donc l'orientation est bonne. Il est souhaitable qu'une concertation soit engagée afin d'aboutir à une formule inspirée de ce qui se fait dans d'autres domaines. Mais, à ce stade, comme je le disais tout à l'heure à notre collègue Michel Moreigne, nous ne pouvons pas adopter le dispositif que vous proposez, monsieur Miquel. Mieux vaudrait donc retirer votre amendement après avoir entendu le point de vue du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. L'avis du Gouvernement est le même que sur l'amendement relatif aux meubles : je n'ai pas d'observation supplémentaire à formuler. Même avis défavorable !

M. le président. Monsieur Miquel, l'amendement n° II-270 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Gérard Miquel. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, les problèmes sont différents.

Je préside un syndicat départemental d'élimination des déchets et je suis donc amené à m'occuper au quotidien des problèmes que nous évoquons en cet instant.

Les déchets dangereux sont aujourd'hui collectés et traités dans de bonnes conditions par les collectivités territoriales. Nous attendons un dispositif de financement et nous y travaillons depuis des années dans les diverses commissions ou groupes de travail organisés par le ministère de l'environnement et l'Association des maires de France.

Pour les meubles, le problème se pose mais, pour les déchets dangereux, les coûts sont d'un tout autre ordre de grandeur. Si ces produits sont mélangés aux ordures ménagères classiques que nous traitons en incinérateur ou en centre d'enfouissement technique, ils peuvent provoquer des pollutions. Leur traitement doit donc être effectué de manière séparée. Le nécessaire a été fait et nous attendons la mise en place d'un dispositif de financement.

Cet amendement nous permettrait d'avancer plus rapidement, je ne le retirerai donc pas. Je comprends que nous ayons dû retirer le précédent, mais les produits dangereux nécessitent une action rapide pour que les collectivités territoriales disposent des moyens de les traiter dans de bonnes conditions. Au reste, la participation des producteurs serait infime par rapport aux quantités de produits dangereux mises sur le marché et permettrait de répondre à un besoin des collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je comprends bien l'inspiration de ces amendements.

Pour la peinture, le raisonnement n'est pas simple : quand quelqu'un achète un pot de peinture, il ne l'utilise pas complètement et le résidu constitue un déchet dangereux. Autrement dit, ceux qui achètent un pot de peinture qu'ils utilisent dans son intégralité ne créent pas de risque ; en revanche, ceux qui ont les yeux plus gros que le ventre créent des nuisances. Il faudrait probablement prévoir des pots plus petits ! (Sourires.)

Au-delà de ces considérations, une harmonisation ne serait-elle pas nécessaire sur le plan européen ? En effet, si la France se dote d'une législation particulière mais que les autres pays de l'Union européenne n'appliquent pas les mêmes dispositions, je crains que notre réglementation ne soit assez inopérante. Il suffira d'aller faire ses courses dans un pays voisin dont la réglementation est différente ou qui ne prélève pas les mêmes taxes. Aux frontières, nous risquerions de connaître la situation que Gérard Longuet décrivait pour les stations-service de Lorraine : elles ont disparu parce que le plein d'essence coûte moins cher au Luxembourg !

Tout en reconnaissant donc le bien-fondé de ces propositions, je me demande, monsieur le ministre, s'il ne faudrait pas s'orienter vers des directives européennes, comme cela a été fait pour les déchets d'équipements électriques ou électroniques, les D3E.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Hyest. Je comprends très bien la préoccupation des présidents de syndicat d'élimination de déchets.

Mais qui peut croire qu'une disposition formulée de manière aussi imprécise soit applicable ? Qu'on en juge : tout producteur serait « tenu de prendre en charge techniquement et financièrement la collecte et l'élimination desdits produits en fin de vie » !

Certes, celui qui ne respecte pas l'obligation - si mal définie soit-elle - est soumis à une éco-contribution. Mais comment vérifiera-t-on que l'obligation est remplie ? Cet amendement est inapplicable.

Nous connaissons le précédent des huiles de vidange : le ramassage a été expérimenté dans un certain nombre de départements, une taxe avait même été créée. Nous savons très bien comment cela a fonctionné !

L'idée est bonne, mais ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. Je n'aime pas voter des dispositions inapplicables, même si elles sont sympathiques !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-270 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-271 rectifié, présenté par M. Miquel et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :

Après l'article 40 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé:

Après l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - À compter du 1er janvier 2009, toute personne privée physique ou morale qui fabrique, importe ou introduit sur le marché des produits à usage thérapeutique destinés aux activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire générant des déchets d'activités de soins professionnels ou d'usagers en automédication, est tenue de prendre en charge techniquement et financièrement la collecte sélective auprès des professionnels de santé et l'élimination desdits déchets d'activité de soin.

« La personne visée au premier alinéa qui ne s'acquitte pas de cette prise en charge est soumise à la taxe prévue à l'article 266 sexies du code des douanes.

« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret. »

La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. Cet amendement va subir le même sort que le précédent, mais il n'empêche que les déchets de soins - en particulier les seringues vendues en grand nombre par les pharmacies et utilisées au quotidien par certains patients - se retrouvent parmi les déchets ménagers et même sur les tapis de tri si des collectes spécifiques n'ont pas été organisées au préalable.

De nombreuses collectivités territoriales se sont dotées de telles collectes spécifiques et les objets tranchants, coupants, perforants ...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et piquants !

M. Gérard Miquel. ... sont alors récupérés dans des boîtes spéciales, pour être traités. Or tout cela représente un coût pour les collectivités, et il n'est pas compensé.

Cet amendement tend donc à mette en place un mécanisme de financement mettant à contribution les producteurs afin d'organiser un traitement spécifique. Nous devons faire en sorte que toutes les collectivités de notre pays assurent un traitement correct des déchets de soins qui se retrouvent actuellement, pour partie, dans les collectes d'ordures ménagères.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je serais tenté d'émettre le même avis que sur les deux amendements précédents. Je vais d'ailleurs le faire, mais j'y ajouterai une considération supplémentaire.

Il existe, dans certains cas et sur certains territoires, des moyens de ramassage et de recyclage. Il est des collectivités, en particulier des syndicats intercommunaux ou des syndicats mixtes, qui offrent ce service, dans le respect de l'anonymat et de toutes les règles auxquelles il faut s'astreindre dans un domaine qui peut apparaître très délicat à certains égards.

En outre, il existe aussi des professionnels qui s'organisent, par exemple des réseaux de pharmaciens, pour mettre en place la collecte et le recyclage avec le concours de prestataires.

Par conséquent, si l'on peut toujours souscrire, dans ce domaine, au principe de responsabilité élargie du producteur, on ne peut pas considérer que nos territoires ne connaissent aucun début de solution, voire aucun élément sérieux de réponse, au problème que vous avez évoqué à juste titre, monsieur Miquel.