M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 69, présenté par M. Godefroy, Mmes Demontès et Printz, M. Desessard, Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. À la fin de la seconde phrase du quatrième alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-5 du code du travail, remplacer le mot :

quatre

par le mot :

deux

II. Procéder à la même substitution à la fin de la seconde phrase du dernier alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-8 du code du travail.

III. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - À la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-26 du code du travail et dans la première phrase du second alinéa de l'article L. 2324-3 du même code, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « deux ».

La parole est à Mme Gisèle Printz.

Mme Gisèle Printz. Cet amendement a pour objet de revenir à une périodicité de deux ans pour les élections des délégués du personnel et des représentants au comité d’entreprise, tout comme pour la mesure de l’audience dans les branches, et au niveau national et interprofessionnel.

Nous étions intervenus avec force en 2005, lorsque le gouvernement de l’époque avait décidé de porter la périodicité des élections de deux ans à quatre ans. Le motif invoqué par les représentants patronaux, et repris par le Gouvernement, était que ces élections prenaient trop de temps et qu’il convenait donc d’en réduire la fréquence.

Aujourd’hui, plusieurs partenaires sociaux ont signé une position commune sur la représentativité. Celle-ci sera fondée sur des élections au niveau des entreprises et des établissements, à l’issue desquelles seront considérées comme représentatives les organisations ayant obtenu 10 % des suffrages exprimés au premier tour.

Que se passera-t-il si des délégués syndicaux élus quittent l’entreprise ou changent d’établissement ? Que se passera-t-il si des délégués du personnel sont dans le même cas ?

Une mesure quadriennale a peu de conséquences dans les grandes entreprises, où les syndicats peuvent facilement pourvoir au remplacement des délégués partants. Dans les petites entreprises, en revanche, le nombre de délégués est moins élevé, et le turn over bien plus important.

Une mesure biennale était déjà à peine suffisante, et il arrivait que la représentation ne soit pas assurée pendant toute la période. La situation s’est aggravée avec des élections intervenant tous les quatre ans, surtout dans les entreprises de moins de cinquante salariés. La mobilité, voulue ou imposée par les conditions économiques, conduit donc à mettre en cause le résultat des élections que le projet de loi met en place.

Il y a une contradiction dans les dispositions que le Gouvernement et sa majorité adoptent : une véritable démocratie sociale implique que les conditions de la représentation des salariés soient correctement assurées. Tel ne peut pas être le cas.

Mais cette contradiction apparente est-elle réellement involontaire ?

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 131 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L’amendement n° 197 est présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans la seconde phrase du dernier alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-5 du code du travail, remplacer le mot :

quatre

par le mot :

deux

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 131.

M. Jean Desessard. La section 3 du chapitre II proposé par l’article 2 traite de la représentativité syndicale au niveau de la branche professionnelle. Il est précisé, à la fin du 3°, que la mesure de l’audience s’effectue tous les quatre ans. Nous proposons qu’elle ait lieu tous les deux ans.

Le passage de deux ans à quatre ans pour les élections professionnelles pose problème, notamment dans les petites entreprises, où la rotation du personnel est importante. Il est donc nécessaire de prévoir une mesure de l’audience dans un délai plus rapproché. En effet, dans les petites entreprises qui connaissent un fort turn over et où les salariés ne restent que peu de temps, il semble difficile de remplacer les délégués et de mesurer l’audience.  

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l’amendement n° 197.

M. Guy Fischer. Cet amendement va dans le même sens que ceux que nous avons présentés précédemment.

L’article 2 du projet de loi dispose que, au niveau de la branche, la mesure de l’audience s’effectue tous les quatre ans, à la suite des élections dans les entreprises.

Cet article s’inscrit dans la continuité du cavalier législatif adopté par le Sénat lors des débats relatifs à la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.

M. Jean Desessard. C’était incroyable ! Et c’est ici même que cela s’est passé !

M. Guy Fischer. Au cours de la nuit, comme d’habitude – mais pas à la veille des vacances, je vous l’accorde ! –, avait été adopté un amendement visant à modifier l’ancien article L. 423-16 du code du travail, afin d’allonger de deux ans à quatre ans le délai légal entre deux élections professionnelles. Ma collègue sénatrice du Rhône, Mme Élisabeth Lamure, avait défendu son amendement en indiquant qu’il allait « dans le sens de l’allégement des contraintes dans la vie sociale de l’entreprise ».

L’expérience nous a montré que, là où la majorité parlementaire voyait des éléments de simplification du droit du travail, la réalité faisait apparaître bien souvent un recul – et j’insiste sur ce terme – des garanties offertes aux salariés par la législation sociale. Selon nous, cette nuit-là, c’est un mauvais coup qui a été porté !

Nous considérons que ce délai de quatre ans est trop long et risque d’aboutir à une représentation syndicale figée, qui ne tient pas compte de la réalité. Il paraît inéquitable qu’une nouvelle section syndicale soit obligée d’attendre quatre ans avant de pouvoir présenter des candidats aux élections et d’acquérir une représentativité. Un tel délai ne permet en effet pas de tenir compte des évolutions de la représentativité. Nous vous demandons, par conséquent, de voter notre amendement, qui tend à ramener ce délai à deux ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. L’amendement n° 69 vise à réduire de quatre ans à deux ans l’intervalle entre les élections des institutions représentatives du personnel dans les entreprises.

Le choix d’un intervalle de quatre ans avait été fait en 2004, au Sénat, afin d’alléger la contrainte pesant sur les entreprises en matière d’organisation et, surtout, de permettre aux représentants du personnel d’acquérir plus d’expérience.

M. Alain Gournac, rapporteur. Normalement, en quatre ans, ils apprennent bien plus de choses !

M. Guy Fischer. Franchement, on en apprend aussi beaucoup en deux ans !

M. Alain Gournac, rapporteur. Il faut, de surcroît, garantir la stabilité de la représentativité syndicale, et donc celle des accords. Cela devrait vous intéresser, monsieur Fischer !

Il n’y a pas lieu, dans le cadre de ce projet de loi, de revenir sur ce choix. L’avis de la commission est donc défavorable sur l’amendement n° 69, comme sur les amendements identiques nos 131 et 197, qui sont très proches.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Il partage l’avis de la commission sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 69.

Mme Annie David. Monsieur le rapporteur, nous avons bien entendu vos arguments : vous nous dites qu’il n’est pas nécessaire de revenir, par cette loi, sur cette disposition. Or je vous rappelle que cette dernière a été introduite au travers d’un cavalier législatif à l’occasion de l’examen de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. Il serait un peu ennuyeux que le législateur ne puisse pas modifier une disposition qu’il a précédemment adoptée…

Cette mesure constitue un recul sévère du point de vue des représentants du personnel, et nous estimons de ce fait que nous pouvons revenir dessus à l’occasion de l’examen de ce texte.

C’est pourquoi nous voterons l’amendement n° 69 ainsi que les amendements identiques nos 131 et 197.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 69.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 131 et 197.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 112, présenté par MM. Amoudry, Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-6 du code du travail :

« Art. L. 2122-6. - Dans les branches dans lesquelles les salariés sont employés dans des entreprises où, en raison de leur taille, ne sont pas organisées des élections professionnelles permettant de mesurer l'audience des organisations syndicales, il est créé des instances de dialogue social au niveau local de branche ou interprofessionnelle. Les candidats à l'élection de ces instances locales de branche ou interprofessionnelle sont présentés par les organisations syndicales représentatives au niveau de la branche ou au niveau interprofessionnel. Les élus de ces instances locales auront le pouvoir de négocier pour toutes les entreprises qui ne disposent pas de représentation syndicale. Les résultats de ces élections seront agrégés aux résultats d'entreprises pour apprécier la représentativité au niveau des branches et au niveau interprofessionnel.

La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. Le projet de loi choisit le résultat des élections professionnelles comme critère d’audience des syndicats, ce qui prive concrètement tous les salariés travaillant dans les petites entreprises, au sein desquelles ces élections ne sont pas organisées, de la capacité de s’exprimer sur cette représentativité.

Dans son état actuel, le texte reconnaît cela puisqu’il prévoit que, dans les branches dans lesquelles plus de la moitié des salariés sont employés dans des entreprises où les élections ne sont pas organisées, un autre critère de mesure de l’audience devra être trouvé au plus tard le 30 juin 2009. Mais ce n’est pas suffisant, et les salariés des petites entreprises des autres branches doivent eux aussi pouvoir se prononcer.

Nous proposons donc qu’un mode alternatif de mesure de l’audience soit retenu pour toutes les branches dans lesquelles des salariés sont employés dans des entreprises où les élections professionnelles ne sont pas organisées, à savoir un mode de mesure de l’audience fondé sur l’élection à chacun des échelons du dialogue social.

M. le président. L'amendement n° 189 rectifié, présenté par Mme Procaccia, M. Vasselle, Mme Henneron et M. Cambon, est ainsi libellé :

I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-6 du code du travail, après les mots :

Dans les branches,

insérer les mots :

à l'exception de la branche agricole,

II. - Compléter le même texte par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les branches agricoles, sont représentatives les organisations syndicales de salariés qui satisfont aux critères déterminés par un accord national agricole, parmi lesquels figurent obligatoirement les résultats aux élections chambres d'agriculture et la participation aux réunions de négociation paritaire. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 13, présenté par M. Gournac, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-6 du code du travail, après les mots :

l'intervention d'une loi,

insérer les mots :

suivant les résultats d'une négociation nationale interprofessionnelle aboutissant

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Gournac, rapporteur. L’article 2 renvoie à une négociation nationale interprofessionnelle la détermination des moyens de renforcer l’effectivité de la représentation collective du personnel dans les petites entreprises et d’y mesurer l’audience syndicale.

Cet amendement tend à prévoir que c’est à la négociation nationale interprofessionnelle d’aboutir au plus tard le 30 juin 2009, et non à la loi d’être adoptée avant cette date, comme l’a prévu l’Assemblée nationale.

Compte tenu des incertitudes du calendrier parlementaire, il est difficile de fixer précisément une date aussi proche. Il convient, sur le sujet complexe de la représentation collective dans les entreprises de moins de onze salariés, de laisser les partenaires sociaux négocier pendant toute la durée qu’ils ont fixée. La loi n’interviendra qu’après la fin des négociations, mais cela tombe sous le sens.

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Gournac, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Au début du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-6 du code du travail, remplacer les mots :

Sont représentatives

par les mots :

Sont également considérées comme représentatives pendant cette période

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 14 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 112.

M. Alain Gournac, rapporteur. L’amendement n° 14 vise à une clarification rédactionnelle. Afin de ne pas créer d’ambiguïté sur le caractère transitoire de la représentativité des organisations syndicales visées, il paraît préférable de revenir au texte initial du projet de loi. C’est ce que nous vous proposons.

L’amendement n°112 prévoit la mise en place d’instances locales permettant la représentation des salariés dans les entreprises de moins de onze salariés.

Nous avons déjà abordé ce sujet à propos de l’amendement n° 195 de Mme David. Si le problème est réel, le dispositif proposé paraît très complexe, et il est préférable de laisser à la négociation nationale interprofessionnelle prévue par cet article le temps d’aboutir.

J’invite donc au retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 112 et un avis favorable sur les amendements nos 13 et 14.

M. le président. Monsieur About, l'amendement n° 112 est-il maintenu ?

M. Nicolas About. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 112 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 125, présenté par MM. Amoudry, Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

I. - Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-7 du code du travail, remplacer les mots :

affiliées à une confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale

par les mots :

affiliées à une organisation syndicale interprofessionnelle nationale

II. - Compléter le même texte par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont également pris en compte les résultats des élections professionnelles nationales prévues par le présent code.

La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. Cet amendement est défendu.

M. le président. L'amendement n° 66, présenté par M. Godefroy, Mmes Demontès et Printz, M. Desessard, Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-7 du code du travail, remplacer les mots :

confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale

par les mots :

organisation syndicale interprofessionnelle nationale

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Il est défendu.

M. le président. L'amendement n° 67, présenté par M. Godefroy, Mmes Demontès et Printz, M. Desessard, Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-7 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

Sont également pris en compte les résultats des élections professionnelles nationales prévues par le présent code.

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. L’amendement n° 125 prévoit la prise en compte des élections nationales professionnelles pour la détermination des syndicats catégoriels représentatifs au niveau de la branche. Ce système semble inutilement complexe et contraire à la logique du projet de loi.

La commission invite donc ses auteurs à le retirer. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

S’agissant des amendements nos 66 et 67, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. Monsieur About, l'amendement n° 125 est-il maintenu ?

M. Nicolas About. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 125 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 66.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 198, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-7-1 du code du travail.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Il s’agit d’un amendement de suppression. En effet, après son passage à l’Assemblée nationale, l’article 2 de ce projet de loi s’est « enrichi », si je puis dire, d’un article supplémentaire L. 2122-7-1 ainsi rédigé : « lorsque la représentativité des organisations syndicales est établie, celles-ci fixent, en lien avec les organisations d’employeurs, la liste des sujets qui font l’objet de la négociation collective de branche ainsi que les modalités de son organisation. »

Cette disposition aurait pu passer inaperçue si elle n’était pas si paradoxale, surtout si l’on se rappelle que l’intitulé de ce projet de loi comporte les mots : « rénovation de la démocratie sociale ».

Ainsi, les organisations considérées comme représentatives doivent fixer conjointement avec les organisations d’employeurs la liste des sujets appelés à faire l’objet d’une négociation ultérieure. En somme, c’est la négociation avant la négociation !

Mais surtout, vous prévoyez que la fixation des sujets pouvant faire l’objet d’une négociation collective doit être établie à l’issue des élections professionnelles. Cette disposition, résultant de l’adoption d’un amendement déposé par vos amis à l’Assemblée nationale, pourrait avoir deux conséquences.

Premièrement, les organisations syndicales, redoutant de ne pouvoir discuter dans l’avenir d’un sujet non mentionné dans la liste initiale, pourraient prévoir un inventaire à la Prévert, très large et nécessairement inefficace. Tel n’est pas leur volonté. Les faits nous le montrent, elles prennent leur mission très au sérieux et font preuve d’un grand sens des responsabilités.

Deuxièmement, les organisations d’employeurs pourraient refuser d’ouvrir des négociations sur un sujet n’ayant pas fait l’objet d’une inscription dans la liste initiale.

Quand on sait que les élections professionnelles n’ont lieu que tous les quatre ans, est-ce à dire que cette liste a une validité de quatre ans ? Cela paraît très flou.

Dans ces deux cas, cela pourrait avoir pour conséquence de figer la négociation sociale. Je n’ose imaginer qu’il s’agisse là de votre réelle intention. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons d’adopter cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 199, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 2122-7-1 du code du travail, supprimer les mots :

, en lien avec les organisations d'employeurs,

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Par cet amendement, nous proposons, à défaut de supprimer l’article, d’en retirer l’expression « en lien avec les organisations d'employeurs ». Comme l’a très bien dit Annie David, nous pensons que, par cette rédaction, la majorité veut minorer considérablement le poids des organisations syndicales représentatives dans la mesure où celles-ci, par l’établissement de cette liste, seront liées dans leurs négociations à l’accord préalable du patronat.

Cette nouveauté témoigne d’une conception ancienne du dialogue social puisque les organisations syndicales ne seront plus libres de mener les négociations qu’elles estiment nécessaires et pour lesquelles elles avaient reçu les suffrages des salariés.

Il y a tout de même un paradoxe à vouloir instaurer une représentativité fondée sur l’audience et à retirer immédiatement après aux organisations syndicales le poids et la légitimité ainsi obtenus.

L’amendement n° 199 vise donc à supprimer cet ajout, considérant qu’il infantilise en quelque sorte les organisations syndicales représentatives et limite considérablement leur champ d’intervention.

Imaginons un instant les conséquences de cette disposition sur les négociations entre les organisations syndicales et les organisations d’employeurs concernant la pénibilité au travail. On en connaît le résultat depuis cette nuit mais, à n’en pas douter, elles n’auraient même pas commencé !

Quand on voit le résultat, on peut tout de même s’interroger sur la conception qu’a le MEDEF du dialogue social si l’on en vient, après trois années de négociation, au constat de désaccord.

Je voudrais également attirer votre attention sur le fait que cet article prévoit que les organisations syndicales déterminent, en lien avec les organisations d’employeurs, la liste des sujets devant faire l’objet d’une négociation. Peut-être cela ne vous choque-t-il pas ? Mais cette formulation, qui situe cette phase de négociation après les élections professionnelles, laisse croire que les organisations d’employeurs pourraient contraindre à tout moment les organisations syndicales à entamer une négociation sur le ou les sujets de leur choix.

C’est l’un des points qui méritaient, à mon avis, d’être abordés. Notre amendement n’apporte peut-être pas la solution, mais il devrait tout de même y avoir une totale indépendance des organisations syndicales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. L’amendement n° 198 tend à supprimer la définition, après la détermination des organisations représentatives, d’un programme pour la négociation de branche.

La commission partage l’opinion de l’Assemblée nationale selon laquelle cette mesure est de nature à redynamiser la négociation de branche. Cette disposition lui paraît utile, car elle ne limitera en rien la capacité de revendication des organisations syndicales. L’avis de la commission est donc défavorable.

L’amendement n° 199 est un texte de repli qui tend à supprimer la participation des organisations d’employeurs à l’élaboration du programme de la négociation de branche. Il semble au contraire préférable que les sujets puissent être définis d’un commun accord pour que les négociations soient réellement engagées. De plus, face à l’organisation syndicale représentative fraîchement établie, les organisations patronales seront sans doute plus disposées à aborder de nouveaux sujets de négociation.

J’invite donc au retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 198.

Mme Annie David. Mes chers collègues, permettez-moi tout de même de vous lire les termes du texte proposé pour l’article L. 2122-7-1 du code du travail : « Lorsque la représentativité des organisations syndicales est établie, celles-ci fixent, en lien avec les organisations d’employeurs, la liste des sujets qui font l’objet de la négociation collective de branche » – nous l’avons bien compris – « ainsi que les modalités de son organisation. »

Or, si la mesure de la représentativité des organisations syndicales n’est effectuée que tous les quatre ans, est-ce à dire que la liste qui aura été prédéfinie juste après les élections permettant de mesurer une telle représentativité sera valable pour les quatre ans à venir ? Si tel est le cas, il sera impossible tout au long de cette période d’entamer une négociation dont l’objet ne figurera pas préalablement dans la liste.

Ainsi, tout nouveau thème de discussion, telle la mise en place d’une organisation du travail différente, qui apparaîtrait au niveau de l’entreprise ou de la branche, quelle qu’elle soit, ne pourrait être abordé pendant ces quatre années !

Pour le coup, et contrairement à ce que vous prônez, vous bridez plus le dialogue social que vous ne le rénovez, en rendant certaines négociations impossibles. Il ne pourra en être autrement, sauf à faire ce que je vous disais, à savoir établir un inventaire à la Prévert contenant la totalité des sujets possibles. Forcément, plus la liste sera large, plus elle sera inefficace !

Cet alinéa, ajouté par l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’un amendement déposé par l’un de vos collègues députés, n’apporte véritablement rien. Bien au contraire, il va à rebours de la rénovation du dialogue social et de la représentativité telle qu’on peut la concevoir.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce sujet a fait l’objet d’une discussion en commission, laquelle a finalement souhaité connaître l’avis du Gouvernement.

Nous avons considéré que les arguments avancés présentaient un grand d’intérêt. Nous nous sommes notamment interrogés sur l’opportunité de soumettre également les thèmes des discussions futures à une sorte d’accord préalable, même si la coutume veut que les partenaires s’entendent déjà sur les sujets à aborder et qu’ils établissent leurs programmes avant même d’engager les négociations.

Pour autant, nous n’avons pas voulu que ce problème devienne un motif d’affrontement entre nous. Nous avons donc souhaité connaître la position du Gouvernement et nous en remettre à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je rejoins complètement la position exprimée par ma collègue Annie David. En effet, il est tout à fait inenvisageable de bloquer pendant quatre ans toute possibilité de négociation sur un thème dont on n’aura pas pu soupçonner l’émergence a priori.

Monsieur le ministre, il importe que vous nous apportiez une précision : la disposition votée par l’Assemblée nationale aboutira-t-elle, oui ou non, à bloquer pendant quatre ans certaines négociations ? Dans l’affirmative, une entreprise ne pourra pas ouvrir de discussions sur les conditions de mise en place de modalités qui auront été par la suite votées par le Parlement !

Une telle disposition est très contraignante et ne tient pas compte de la réalité dans les entreprises. À mon sens, au sein de chacune d’entre elles, il convient de laisser tant aux employeurs qu’aux salariés la possibilité d’introduire, le cas échéant, tel ou tel sujet de discussion si cela s’avère nécessaire.