M. Jean-Pierre Godefroy. Avec cet amendement, nous abordons ce qui est sans doute, à nos yeux, la disposition la plus contestable du texte, au point que nous nous interrogeons sur sa constitutionnalité.

La suppression du repos compensateur obligatoire, qui était prévu et défini dans la loi, et son remplacement par le concept nouveau de « contrepartie en repos », qui relèvera, comme le volume d’heures supplémentaires, de la négociation, au surplus au niveau de l’entreprise, est une novation majeure dans notre droit social et n’a strictement rien à voir avec le débat sur les 35 heures.

En effet, ce que vous nous proposez de modifier, c’est la loi du 16 juillet 1976 portant institution d’un repos compensateur en matière d’heures supplémentaires de travail, qui avait été votée sur l’initiative de Lionel Stoléru.

À ce sujet, le repos compensateur est non pas une modalité d’organisation du temps de travail, mais une protection de la santé des travailleurs. Il revient donc à l’autorité publique de garantir que les exigences de l’entreprise ne remettent pas en cause la santé des salariés.

Je le rappelle, en France, plus d’un million de salariés sont victimes d’accidents du travail. Depuis 2006, ce chiffre repart à la hausse, alors qu’il était précédemment sur une pente descendante.

Il s’agit donc d’une question de santé publique qui, comme mon collègue Jean-Luc Mélenchon l’a si bien démontré ce matin, justifie l’intervention de l’autorité publique, tout comme celle du droit de fumer dans les bars et les restaurants.

La santé publique n’est pas un espace de liberté individuelle ; elle relève de l’autorité publique, qui doit protéger la santé des salariés. Je sais que l’ancien ministre de la santé que vous êtes, monsieur le ministre, y sera très sensible.

Alors, pourquoi faire passer tout à coup dans le champ de la négociation ce qui relevait jusqu’à présent, bien avant les 35 heures, de la santé publique, si ce n’est pour fragiliser encore un peu plus la position des salariés dans leur rapport avec l’entreprise ?

M. Jean-Pierre Godefroy. En faisant disparaître le droit à un repos compensateur à partir de la quarante et unième heure dans la semaine, vous éliminez purement et simplement une mesure de protection dont les salariés bénéficiaient depuis longtemps, pour renvoyer le tout, y compris les effets du dépassement du contingent d’heures supplémentaires, à la négociation.

Cela a deux conséquences. Vous faites d’abord de la santé – j’insiste beaucoup sur ce point – un objet de négociation, ce qui est une première. S’il peut y avoir une différence d’approche politique sur la question du contingent d’heures supplémentaires, il me semblait que les questions de santé publique faisaient l’objet d’un consensus. Force est de constater avec ce texte que ce n’est pas le cas.

Cela signifie que, dès demain, on pourra dans une entreprise revenir sur ce droit. Il s’agit en effet de permettre de négocier ce droit à la baisse : si vous aviez considéré qu’il s’agissait d’un minimum, le respect de la hiérarchie des normes permettait de l’améliorer au niveau de l’entreprise. Si telle avait été votre conception de la négociation sociale, vous nous auriez trouvés à vos côtés. Mais, votre texte supprimant ce droit et renvoyant à la négociation, on négociera forcément à la baisse.

Autre conséquence, cette suppression du repos compensateur entraînera une diminution de la rémunération à activité constante. On est loin du « travailler plus pour gagner plus » ! Quand cette régression aura été acceptée dans une entreprise, les autres entreprises de la même branche seront contraintes de remettre en cause ce droit ; ce n’est pas de la compétitivité, c’est bien du dumping social.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, nous voulons le maintien des dispositions en vigueur concernant le repos compensateur.

Considérant qu’il s’agit d’un point essentiel, nous demandons un scrutin public.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. S'agissant de l’amendement n° 243, les conditions de dépassement du contingent d’heures supplémentaires seront négociées avec les syndicats. Il est donc inutile de prévoir en plus une forme de veto du comité d’entreprise. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

L’amendement n° 80 vise à réintroduire l’intervention de l’inspection du travail – vous êtes décidément très attachés aux inspecteurs du travail ! –, que le projet de loi entend justement écarter. La commission y est défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 81, après en avoir débattu, la commission a choisi de s’en remettre à la sagesse du Sénat, considérant qu’il pourrait être justifié de prévoir un régime différent pour les heures accomplies au-delà du contingent par rapport à celles qui sont effectuées à l’intérieur du contingent. Le Gouvernement donnera certainement son avis sur ce point.

Enfin, pour ce qui est de l’amendement n° 82, nous sommes pour la négociation collective plutôt que pour un système trop encadré, fermé. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 243.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 80.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 81.

Mme Annie David. Cet amendement vise à préciser que le refus du salarié d’effectuer des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement.

Monsieur le ministre, après une discussion très intéressante, dont MM. Gournac et About peuvent témoigner, la commission avait décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat, après avis du Gouvernement. Nous aurions d'ailleurs préféré qu’elle adopte l’amendement.

Compte tenu de l’importance du sujet et de la position de la commission, il me semble que le Gouvernement aurait pu expliciter sa position davantage que par un simple « avis défavorable ».

En effet, il s’agit des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel qui, s’il était jusqu’à présent de 220 heures, pourrait, d’après certains partenaires sociaux, avoisiner désormais 400 heures. Le calcul est assez compliqué, puisqu’il convient notamment de décompter les heures de repos compensateur, aussi ne disposons-nous pas du chiffre exact.

Bref, monsieur le ministre, on pourra aller demain jusqu’à 400 heures supplémentaires par an. Cet amendement tend simplement à prévoir qu’un salarié qui refuserait de faire des heures supplémentaires au-delà de ce contingent de 400 heures – ce qui est déjà pas mal – ne peut pas être licencié pour faute.

Monsieur le ministre, vous ne nous donnez absolument aucune réponse, et vous nous dites parallèlement que vous êtes attentif à la santé et à la sécurité des travailleurs. Comment pourrions-nous vous croire quand vous laissez faire à un salarié 400 heures supplémentaires, et que vous lui en imposez encore au-delà ?

Finalement, le contingent d’heures supplémentaires n’a plus de limite. On pourra demain faire travailler des salariés n’importe quand, n’importe comment, de surcroît avec des rémunérations revues à la baisse.

Ne pas voter cet amendement, chers collègues, c’est ne pas se rendre compte de la réalité des salariés dans l’entreprise. Quand il aura déjà fait 1607 heures dans l’année, plus 400 heures supplémentaires, et encore au-delà, à un moment donné, le salarié sera usé ; il ne pourra plus s’occuper ni de ses enfants, ni de sa famille. Je me demande quelle société vous voulez construire, monsieur le ministre !

M. Jean Desessard. Une société à la chinoise !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.

M. Jean-Luc Mélenchon. Mon explication de vote vaut aussi bien pour l’amendement n° 81 que pour l’amendement n° 82, monsieur le président.

Nous sommes en train de traiter de l’extension, que nous considérons comme sans fin, sur les travées de la gauche, du temps de travail imposé aux travailleurs singuliers. Beaucoup d’entre vous répondent, j’en suis sûr de bonne foi, que nous exagérons parce que, au bout du compte, dans le face-à-face entre l’employeur et le salarié, le bon sens finit par l’emporter.

Nous vous disons que c’est méconnaître non seulement la pression qui s’exerce sur le travailleur lorsqu’on lui enjoint de continuer à travailler, même s’il n’a plus envie ou s’il ne peut pas le faire, mais aussi le mécanisme de la servitude volontaire, c’est-à-dire lorsque l’on s’impose à soi-même, quand la conscience professionnelle nous intime d’en faire toujours davantage.

C’est pourquoi je voudrais vous lire, avec la solennité dont vous allez comprendre la raison, quelques extraits d’une lettre qui m’a été transmise par Mme Le Neouannic, secrétaire nationale au Parti socialiste chargée de ces questions, émanant du syndicat CGT de Renault Technocentre, établissement que M. le ministre connaît bien pour s’y être rendu. (M. le ministre acquiesce.)

M. Guy Fischer. Mais Roland Muzeau n’y était pas !

M. Jean-Luc Mélenchon. Je vous en donne lecture :

« Mesdames et messieurs […], vous allez légiférer sur la durée du travail. Nous, représentants des salariés, nous adressons à vous, représentants des citoyens et garants de l’ordre public et social. Mesdames et messieurs, comme vous le savez, le Technocentre a connu une série de suicides en l’espace de deux ans. Si toutes les entreprises étaient frappées de la même manière, ce serait un fléau comparable aux morts sur les routes. Avec sans doute des proportions équivalentes entre morts et blessés.

« À partir de l’enquête du cabinet d’expertise agréé par le ministère du travail et mandaté par le CHSCT, toutes catégories professionnelles confondues, la durée moyenne du travail au Technocentre peut être estimée à 44 heures environ par semaine en moyenne sur l’année, et à 48 heures par semaine en moyenne hors jours de RTT et heures de repas. 50 % des cadres (la moitié de l’effectif) fait plus de 50 heures par semaine, sans compter le travail le soir et le week-end. Pour les techniciens, 95 % des heures supplémentaires réalisées sont non déclarées.

« Mesdames et messieurs […], le travail nous dévore la vie. La résistance humaine a des limites. Elles sont atteintes. Et la loi le permet déjà aujourd’hui. Aller plus loin serait déraisonnable.

« Comment est-ce possible ?

« D’une part, par un système de servitude volontaire, “une culture du sur-engagement” liée notamment à la combinaison de la passion pour son métier, de l’ambition professionnelle et d’un système managérial “qui s’appuie sur ces leviers pour atteindre des objectifs de plus en plus ambitieux”[…].

« Ne pas “compter ses heures” est une règle non écrite. L’enfreindre, c’est s’exposer à être considéré comme un salarié “peu performant”.

« Il n’y a pas d’heures supplémentaires : il n’y a que des gens qui n’arrivent pas à faire leur travail correctement dans les temps.

« Il n’y a pas de dépassement du nombre de jours sur l’année : il n’y a que des gens qui ne prennent pas leurs congés.

« Le sentiment de ne pas y arriver est renvoyé à la responsabilité individuelle, à un sentiment de culpabilité, et dans les cas extrêmes, à la perte de l’estime de soi jusqu’au suicide.

« D’autre part, en raison de l’excès de liberté que donne déjà la loi aux employeurs, et qu’ils utilisent pleinement.

« En théorie, le dépassement de la durée légale du travail est majoré et donc pénalisé financièrement d’autant plus qu’on s’en écarte, à l’image du dépassement des limites de vitesse autorisées par le code de la route.

« Dans la réalité, au Technocentre, pour une moitié de la population, 95 % des heures supplémentaires sont non déclarées, en toute impunité. La loi, qui ne prévoit pas de mesure statistique indépendante de la durée du travail, est inopérante. Pour l’autre moitié de la population, le travail est décompté en jours, et la durée théorique maximum de 13 heures ne donne lieu à aucun contrôle indépendant. Tous les jours de congés sont capitalisés automatiquement au fur et à mesure de leur acquisition, sans majoration, sans limite maximum, sans limite de durée autre que le départ à la retraite. »

Voilà, je ne poursuis pas plus loin ma lecture ; je pense que vous pouvez entendre ce cri.

Mme Annie David. Je ne suis pas sûre qu’ils entendent !

M. Jean-Luc Mélenchon. Il aboutit à la situation qui est celle, par exemple, du technicien que l’on appellera Antonio de B., salarié qui s’est suicidé. Il pouvait travailler jusqu’à treize heures dans la journée en usine, rentrer à une heure du matin seul en voiture, et repartir à cinq heures du matin pour une réunion à huit heures chez un fournisseur.

Je n’accuse personne, sur ces travées, de vouloir favoriser de telles situations. Celles-ci résultent pourtant d’un ensemble de dispositions qui les rendent possibles.

Les amendements nos 81 et 82 comportent des dispositions de bon sens visant à empêcher que ces situations ne se généralisent. Le projet de loi tel qu’il est rédigé, au contraire, les généralise. Je vous demande d’y réfléchir en conscience, mes chers collègues, avant de nous refuser votre appui, si tel était votre décision au départ.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 81.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l’amendement n° 82.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je voudrais vraiment, monsieur le ministre, que vous soyez sensible au fait que le repos compensateur ne peut être une variable de discussion dans le contrat de travail.

Ce serait une erreur colossale d’inclure le repos compensateur dans la négociation et de ne plus le considérer comme une protection de santé publique. En suivant votre logique, d'ailleurs, plus vous augmentez le contingent d’heures supplémentaires, plus vous devriez sanctuariser le repos compensateur.

Bien que mes collègues de la droite ne m’écoutent pas, je vais poursuivre mon propos, non pour les convaincre, mais simplement parce que cela mérite d’être dit.

Sachez que vous allez pénaliser les plus démunis, car ce sont ceux qui gagnent le moins qui vont négocier leurs repos.

M. Jean-Luc Mélenchon. C’est exact !

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous allez aussi frapper en plein cœur la cellule familiale. (M. le ministre proteste.) Si, monsieur le ministre ! Et je pense notamment aux familles monoparentales : les salariés vont négocier leurs repos compensateurs, parce qu’ils ont besoin de gagner de l’argent et qu’il y a les échéances à venir.

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous voulez libérer le travail, comme vous dites, soit ! C’est d’ailleurs ce que vous êtes en train de faire. Mais au moins garantissez le minimum en sanctuarisant le repos compensateur par la loi pour protéger les salariés ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Puisque vous parlez de la cellule familiale, expliquez-moi comment les salariés qui n’ont pas les moyens de faire des heures supplémentaires pourront profiter de leurs journées de RTT et emmener leurs enfants en week-end ou leur offrir des loisirs ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Annie David. Il n’y a pas que les week-ends pour les RTT !

M. Xavier Bertrand, ministre. Certains ont les moyens de profiter de leurs journées de RTT, d’autres non. Cette dernière catégorie, vous ne l’avez jamais prise en compte, car le parti socialiste oublie depuis des années de parler de la valeur travail et des travailleurs. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Voilà la vérité ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Pierre Godefroy. C’est de l’idéologie ! C’est une mauvaise polémique ! Je vous parle de santé publique et vous répondez par une polémique politicienne !

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, nous n’avons jamais dit qu’il fallait limiter les salaires de ceux qui gagnent le moins.

Mme Annie David. Au contraire !

M. Jean Desessard. En revanche, nous avons toujours dit que les salaires de certains patrons étaient extravagants et qu’il fallait les diminuer et établir un plafond.

Puisque vous aimez les petits tableaux, je vous suggère d’en créer un dans lequel vous intégrerez le temps de transport. Car la société a évolué depuis cinquante ans. Aujourd’hui, pour se rendre à son travail, le temps de déplacement est beaucoup plus long, en particulier dans les grandes métropoles et pour les personnes qui touchent les plus petits salaires, qui sont obligées d’aller de plus en plus loin pour trouver un logement à loyer modéré.

En Île-de-France, le temps de transport est estimé à peu près à une heure et demie par jour, ce qui représente sept à huit heures par semaines. Si vous assimilez ce temps à des loisirs, dites-le nous ! À ce moment-là, on saura comment le salarié utilise ses RTT. Sinon, vous devez assimiler ces heures à du temps de travail.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.

M. Jean-Luc Mélenchon. J’avais indiqué que je m’exprimais aussi sur l’amendement n° 82 en expliquant mon vote sur l’amendement n° 81, mais je veux vous demander, monsieur le ministre, si vous vous êtes repris depuis tout à l’heure. Car ne faites pas dire à Jean-Pierre Godefroy qu’il ne veut pas voir augmentés les revenus des salariés qui, comme vous le dites, n’ont pas les moyens de profiter de leurs RTT.

Sur cette question, c’est une affaire entendue, nous avons des points de vue différents. Vous avez gagné les élections et vous détenez la majorité, nous le reconnaissons. Vous avez décidé de faire travailler les salariés beaucoup plus d’heures, admettons. Après tout, l’électeur est souverain et il se prononcera quand viendra l’heure du bilan.

M. Godefroy a dit que le repos compensateur est une norme d’intérêt public.

Mme Annie David. Eh oui, il n’y a pas que les RTT !

M. Jean-Luc Mélenchon. Je l’ai moi-même expliqué ce matin, d’autres l’ont fait, et je crois que tout le monde a compris.

Monsieur le ministre, si le repos compensateur correspond à un besoin de santé publique, on doit le sanctuariser. Je suis sûr que vous comprenez la situation que nous décrivons, car vous devez la connaître. Lorsqu’on est vraiment pris à la gorge, on essaie par tous les moyens – des moyens honnêtes s’entend – de se procurer un revenu supplémentaire.

Si votre employeur vient vous proposer de renoncer à votre repos compensateur en échange d’une rémunération, pourrez-vous résister à une pareille pression ? Quel homme ou quelle femme ayant à sa charge une famille dira non ? Pour percevoir des revenus supplémentaires, il ou elle va se sacrifier.

M. Jean Desessard. Ou culpabiliser !

M. Jean-Luc Mélenchon. En effet.

C’est tout ce que nous avons voulu dire, monsieur le ministre. Et nous n’opposons pas cette situation à celle de la consommation de loisirs pendant les RTT, nous parlons de santé publique !

Nous aurions préféré que vous nous répondiez plutôt que de nous envoyer balader en parlant des revenus des travailleurs. Mais si les revenus des travailleurs ne vous semblent pas insuffisants, alors augmentez-les !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 82.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 146 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 298
Majorité absolue des suffrages exprimés 150
Pour l’adoption 125
Contre 173

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 83, présenté par M. Godefroy, Mmes Demontès et Printz, M. Desessard, Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le II de cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Il est défendu.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 150 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 244 est présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Compléter le II de cet article par les mots :

, à l'exception de l'article L. 3121-32

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 150.

M. Jean Desessard. Lors de la réécriture du code du travail concernant la répartition du temps de travail, l’article L. 3121-32 portant sur les activités saisonnières a disparu. Or cet article dispose : « En cas d’activités saisonnières et à défaut d’accord entre les organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national, un décret détermine les modalités d’application du repos compensateur obligatoire. Le salarié dont le contrat de travail à caractère saisonnier s’achève peut demander à son employeur la conversion de ses droits à repos compensateur en indemnité afin de ne pas faire obstacle à un autre emploi ou au suivi d’une formation. »

Monsieur le ministre, je vous pose ici deux questions qui vous ont déjà été posées à l’Assemblée nationale et auxquelles aucune réponse satisfaisante n’a été donnée : qu’adviendra-t-il du repos compensateur des salariés occupant un emploi à caractère saisonnier ? Que prévoyez-vous ?

Toujours dans un souci de protection du salarié, nous proposons de maintenir l’article actuel du code. Il convient de conserver cette mesure protectrice pour les salariés occupant un emploi à caractère saisonnier.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 244.

M. Guy Fischer. Mon argumentaire sera très proche de celui qui vient d’être développé par Jean Desessard. Nous sommes, nous aussi, inquiets pour les travailleurs saisonniers puisque l’article L. 3121-32 du code du travail a été supprimé.

La réponse, nous la connaissons : un décret à venir viendra pallier l’absence d’accord, avez-vous dit. On le voit, ce qui était du domaine de la loi – Annie David a bien montré tout à l’heure dans quelle partie du code du travail cela se trouvait – relèvera de la convention ou, à défaut, du décret.

Lorsque la rédaction est bonne et qu’elle apporte une garantie aux travailleurs, en l’occurrence les travailleurs saisonniers, pourquoi procéder à des changements ? Est-ce par pur dogme libéral ?

Ce problème, nous l’avions soulevé lors du débat sur la recodification du code du travail. Vous nous aviez alors dit – c’est la sempiternelle réponse – vouloir simplifier le droit pour le rendre accessible. Mais là, vous faites passer trente et un articles du code du travail à la trappe ! Bien entendu, nous ne sommes pas du tout satisfaits. C’est la raison pour laquelle nous présentons cet amendement, qui est dans le droit-fil de ceux que nous avons proposés précédemment.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. L’amendement n° 83 vise à supprimer une partie du texte. Par cohérence, la commission émet un avis défavorable.

S’agissant des amendements identiques nos 150 et 244, le projet de loi supprime les articles relatifs au repos compensateur obligatoire, puisque celui-ci est remplacé par la contrepartie obligatoire qui a vocation à être négociée. Il n’y a pas lieu de prévoir une exception pour l’article L. 3121-32.

M. Jean Desessard. Négociation pour les saisonniers !

M. Alain Gournac, rapporteur. Exact !

M. Jean Desessard. Voilà qui en dit long !

M. Alain Gournac, rapporteur. La commission est donc également défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Même avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 150 et 244.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 118, présenté par MM. Amoudry, Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le dernier alinéa de l'article L. 3121-22 du même code est supprimé.

La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. L’objet de cet amendement est de garantir la rémunération des heures supplémentaires afin que celle-ci reste attractive pour les salariés. Il s’agit de concrétiser la maxime selon laquelle on peut travailler plus pour gagner plus.

C’est pourquoi notre amendement vise à supprimer la possibilité, actuellement ouverte par l’article L. 3121-22 du code du travail, qu’un accord de branche ou d’entreprise puisse fixer un taux différent, c’est-à-dire inférieur, du taux de droit commun de 25 % pour les huit premières heures et de 50 % au-delà, même si ce taux ne peut être inférieur à 10 %.

Le droit du travail doit garantir un niveau acceptable de majoration minimale des heures supplémentaires.

M. le président. L'amendement n° 151, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... Dans le dernier alinéa de l'article L. 3121-22 du même code, le taux : « 10 % » est remplacé par les mots : « celui défini à l'alinéa précédent ».

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement va montrer que le Gouvernement navigue à vue.

La loi TEPA, votée il y a un an, avait rétabli le premier taux de majoration des heures supplémentaires à 25 %. Vous entendez revenir sur cette disposition en fixant le taux minimum à 10  %. Or chacun sait que la fixation de minima pousse souvent les employeurs à les utiliser.

Il convient donc de maintenir le taux à 25 %. Nous en arriverions sinon à la conclusion que tous les discours que vous tenez depuis un an et ceux que vous avez tenus en défendant ce texte – il faut pousser les salariés à effectuer des heures supplémentaires, et pour ce faire les récompenser en leur accordant une majoration de 25 % – n’ont plus lieu d’être, non plus que les exonérations votées.

Mais peut-être que le Gouvernement a fini par se rendre compte qu’elles coûtaient un peu cher – nous l’avions prévenu !

Peut-être a-t-il fini par se dire qu’il fallait, plutôt que de remettre en cause la loi TEPA, tenter discrètement d’alléger le poids du dispositif en réduisant le taux minimum de rémunération des heures supplémentaires.

Vous aviez annoncé médiatiquement aux Français qu’ils gagneraient plus s’ils travaillaient plus. Or vous passez d’un taux de 25 % à un taux de 10 % !

Mon amendement vise à prévoir que le taux de rémunération fasse l’objet d’une négociation, mais à partir d’un taux ne pouvant être inférieur à 25%.