Sommaire

Présidence de Mme Catherine Tasca

Secrétaires :

MM. Alain Dufaut, Jean-Paul Virapoullé.

1. Procès-verbal

2. Modification du calendrier budgétaire

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Mme la présidente, M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

3. Dépôt d'un rapport du Gouvernement

4. Candidatures à des organismes extraparlementaires

5. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d'un projet de loi.

Immigration, asile et intégration

MM. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial de la commission des finances ; André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères ; François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois.

MM. Richard Yung, Mme Éliane Assassi, M. Philippe Dominati, Mmes Anne-Marie Escoffier, Alima Boumediene-Thiery, M. Soibahadine Ibrahim Ramadani.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

État B

Amendement no II-190 de M. Adrien Gouteyron et sous-amendement no II-9 rectifié bis de la commission. – MM. Adrien Gouteyron, le rapporteur spécial, le ministre, Richard Yung, Jean Arthuis, président de la commission des finances. – Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.

Adoption des crédits modifiés.

Article 62

Amendements nos II-186 de Mme Éliane Assassi, II-17 rectifié, II-28 rectifié et II-32 de la commission. – Mme Éliane Assassi, MM. le rapporteur spécial, le ministre. – Rejet de l’amendement no II-186 ; adoption des amendements nos II-17 rectifié, II-28 rectifié et II-32.

Adoption de l'article modifié.

Article 63. – Adoption

6. Nomination de membres d'organismes extraparlementaires

7. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d'un projet de loi.

Politique des territoires

MM. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances ; Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

MM. Thierry Repentin, Jean Boyer, Mme Odette Terrade, MM. Alain Fouché, Jean-Pierre Chevènement, Jean-Jacques Lozach, Claude Biwer.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.

État B

Adoption des crédits.

Ville et logement

MM. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Bernard Frimat

8. Rappel au règlement

Mme Odette Terrade, M. le président.

9. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d’un projet de loi.

Ville et logement (suite)

Mme Odette Terrade, MM. Alain Vasselle, Mmes Dominique Voynet, Raymonde Le Texier, Samia Ghali.

Mmes Christine Boutin, ministre du logement et de la ville ; Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.

État B

Amendement no II-202 de M. Thierry Repentin. – Mme Raymonde Le Texier, M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme la ministre. – Rejet.

Adoption des crédits.

Article 82

Mmes Odette Terrade, Raymonde Le Texier.

Amendements identiques nos II-39 de la commission, II-105 de M. Pierre André, rapporteur pour avis, II-153 rectifié bis de M. Jean-Claude Gaudin, II-179 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis, et II-201 de M. Thierry Repentin ; amendement no II-247 du Gouvernement. – MM. le rapporteur spécial, Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Dominique Braye, Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Mmes Raymonde Le Texier, la ministre, MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Thierry Repentin. – Adoption, par scrutin public, des amendements nos II-39, II-105, II-153 rectifié bis, II-179 et II-201 supprimant l'article, l’amendement no II-247 devenant sans objet.

Articles additionnels après l'article 82

Amendement no II-40 de la commission et sous-amendement no II-104 de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. – MM. le rapporteur spécial, Thierry Repentin, rapporteur pour avis ; Mme la ministre. – Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement no II-41 de la commission. – M. le rapporteur spécial. – Retrait.

Article 83

Mme Odette Terrade.

Amendement no II-42 de la commission. – M. le rapporteur spécial. – Retrait.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 83

Amendement no II-180 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. – MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.

Amendement no II-181 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. – MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre, M. le président de la commission. – Retrait.

10. Transmission d'un projet de loi

11. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

12. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de Mme Catherine Tasca

vice-présidente

Secrétaires :

M. Alain Dufaut,

M. Jean-Paul Virapoullé.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Modification du calendrier budgétaire

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à ce stade de la discussion budgétaire, il convient de faire le point sur l’état d’avancement de nos travaux.

Les débats de la journée d’hier ont duré plus longtemps que prévu et la séance a été suspendue cette nuit, à trois heures trente-cinq. Nous n’avons donc pas pu siéger ce matin et la discussion des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » a donc été repoussée à cet après-midi. À cet égard, monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir accepté de suppléer M. Hortefeux, qui m’a informé qu’il ne pourrait pas être parmi nous avant quinze heures trente.

Dans ces conditions, nous ne pourrons pas commencer avant minuit la discussion de la mission « Économie » et a fortiori de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Or, la journée de demain est très chargée. En tout état de cause, même en commençant à neuf heures trente demain matin, nous ne pourrons pas terminer nos travaux avant une heure avancée dans la nuit de vendredi à samedi.

Pour toutes ces raisons, et après m’en être entretenu avec les présidents des deux commissions concernées, je propose au Gouvernement et au Sénat de reporter à samedi après-midi la discussion des crédits des missions « Sport, jeunesse et vie associative » et « Économie ».

Je n’ignore pas les inconvénients qui en résulteront pour tous ceux qui ont pris des engagements samedi, mais nous ne pouvons pas faire autrement.

Toutefois, afin de libérer chacun le plus tôt possible dans la soirée de samedi, je propose que, à titre exceptionnel, nous commencions nos travaux à quatorze heures.

Je souhaite donc que notre ordre du jour soit modifié en conséquence, madame la présidente.

Mme la présidente. Excellente initiative, monsieur le président.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Je souscris sans réserve à cette heureuse proposition, madame la présidente.

Mme la présidente. Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

En conséquence, l’ordre du jour de la séance d’aujourd'hui, jeudi 4 décembre, et de la séance du samedi 6 décembre est ainsi modifié.

3

Dépôt d'un rapport du Gouvernement

Mme la présidente. Monsieur le Premier ministre a transmis au Sénat en application de l’article 67 de la loi n° 2004 1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il sera transmis à la commission des affaires sociales et sera disponible au bureau de la distribution

4

Candidatures à des organismes extraparlementaires

Mme la présidente. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires.

Les commissions des affaires culturelles, des affaires économiques, des affaires étrangères et des affaires sociales ont fait connaître leurs candidats :

- MM. Jean-Léonce Dupont et Philippe Adnot, pour être respectivement membre titulaire et membre suppléant du Comité de suivi de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités ;

- MM. Robert Laufoaulu et Michel Magras, pour être membres du Comité national de l’initiative française pour les récifs coralliens ;

- M. Claude Domeizel, pour être membre de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ;

- M. Jean-François Humbert, pour être membre de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques ;

- M. Michel Thiollière, pour être membre du Conseil d’administration de la société France Télévisions ;

- M. David Assouline, pour être membre du Conseil d’administration de la société France 2 ;

- M. Jean-Pierre Plancade, pour être membre du Conseil d’administration de la société France 5 ;

- M. Serge Lagauche, pour être membre du Conseil d’administration de la société Radio-France ;

- M. Jacques Legendre, pour être membre du Conseil d’administration de l’Établissement public du musée du quai Branly ;

- Mme Catherine Dumas, pour être membre du Conseil d’administration du Centre national d’art et de culture Georges Pompidou ;

- M. Jean-Léonce Dupont, pour être membre du Conseil d’administration du Centre national des œuvres universitaires et scolaires ;

- MM. Ambroise Dupont et Jean-Pierre Chauveau, pour être respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil d’administration du conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ;

- M. Yves Dauge, pour être membre du Conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs ;

- Mme Brigitte Gonthier-Maurionet M. Jean-Luc Fichet, pour être respectivement membre titulaire et membre suppléant de l’Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires et d’enseignement supérieur ;

- M. Marc Daunis, pour être membre du Comité consultatif des liaisons aériennes d’aménagement du territoire et membre du Comité consultatif des subventions aux exploitants d’aérodromes ;

- M. Marcel Deneux, pour être membre du Comité de contrôle du Fonds de soutien aux hydrocarbures ou assimilés d’origine nationale ;

- M. Thierry Repentin, pour être membre du Comité de liaison pour l’accessibilité des transports et du cadre bâti ;

- M. Michel Bécot, pour être membre de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages ;

- Mme Odette Herviaux, pour être membre de la Commission supérieure du Crédit maritime mutuel et du Conseil d’administration de l’Agence des aires marines protégées ;

- M. Alain Fouché, pour être membre du Conseil d’administration de l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux ;

- M. Francis Grignon, pour être membre du Conseil d’administration du Fonds pour le développement de l’intermodalité dans les transports ;

- M. Gérard César, pour être membre du Conseil d’administration d’Ubifrance, Agence française pour le développement international des entreprises ;

- M. Marcel Deneux et Mme Évelyne Didier, pour être respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil d’orientation de l’observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d’outre-mer ;

- Mme Élisabeth Lamure, MM. Philippe Darniche et Paul Raoult, pour être membres du Conseil national de l’aménagement et du développement du territoire ;

- M. Dominique Braye, pour être membre du Conseil national de l’habitat ;

- Mme Odette Terrade, pour être membre du Conseil national de l’information statistique ;

- M. Philippe Dominati, pour être membre du Conseil supérieur de la coopération ;

- MM. Rémy Pointereau et Jean-Jacques Mirassou, pour être respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil supérieur de l’aviation marchande ;

- MM. Bruno Sido et Roland Courteau, pour être membres du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité en matière nucléaire ;

- Mme Élisabeth Lamure, pour être membre de l’Observatoire des territoires ;

- M. Daniel Dubois, pour être membre de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles ;

- Mme Mireille Schurch, pour être membre suppléant de l’Observatoire national du service public de l’électricité et du gaz ;

- M. Christian Cambon, pour être membre du Conseil d’orientation stratégique du fonds de solidarité prioritaire ;

- M. André Lardeux, pour être membre de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ;

- Mmes Gisèle Printz et Bernadette Dupont, pour être respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil d’administration de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances ;

- M. René Teulade, pour être membre suppléant du Conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites ;

- MM. André Lardeux, Dominique Leclerc et René Teulade, pour être membres du Conseil d’orientation des retraites ;

- Mme Patricia Schillinger, pour être membre du Conseil national du bruit ;

- MM. Bernard Cazeau et Alain Vasselle pour être membres du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

5

Article additionnel après l'article 59 quater (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Deuxième partie

Loi de finances pour 2009

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Immigration, asile et intégration

Mme  la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (nos 98 et 99).

Immigration, asile et intégration

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 35 et état B

Mme  la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » (et articles 62 et 63).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, la France a désormais une politique claire en matière d’immigration, d’asile et d’intégration.

Cette politique est beaucoup plus équilibrée que ne le laisserait croire la chronique médiatique. Elle est partagée par nos partenaires européens. Elle est réaliste et généreuse, ferme et ouverte.

Notre politique est réaliste parce qu’aucun pays soucieux de bien accueillir ne peut recevoir indistinctement tout le monde.

Notre politique est ferme parce qu’un pays démocratique qui demande à ses ressortissants de respecter les lois ne peut s’exonérer de l’obligation de les faire respecter aussi par ceux qui s’introduisent illégalement sur son territoire.

Notre politique est généreuse parce que notre pays est attaché à ses traditions d’accueil : une carte de réfugié sur 3,5 délivrées dans les pays de l’Union européenne est accordée par la France.

Notre politique est ouverte par sa volonté d’aider à la meilleure intégration possible de ceux que nous accueillons, ouverte également par le dialogue entretenu et les accords passés avec les pays d’origine.

Bref, nous voulons être en mesure d’offrir un accueil de qualité à ceux que nous pouvons accueillir.

En très peu de temps – son administration a été créée voilà moins d’un an –, le ministre a accompli une tâche importante.

À titre personnel, je retiens la réussite de la présidence française de l’Union européenne dans ce domaine.

Une fraction de notre opinion publique a été prompte à considérer que la politique du Gouvernement en la matière constituait une exception française critiquable. Force lui est aujourd’hui de constater que cette politique est à présent partagée par les vingt-six autres États de l’Union.

Le pacte européen sur l’immigration, préparé à Cannes et conclu à Bruxelles, la politique d’intégration, entérinée à Vichy, l’établissement des bases d’une politique contractualisée avec les pays d’origine, réalisé à Paris et d’ores et déjà concrétisé par la signature de sept accords, constituent désormais les fondements de la politique européenne d’immigration, d’intégration et de coopération pour la prochaine décennie.

Un deuxième élément de satisfaction tient à la mise en place rapide et efficace du nouveau ministère.

Il s’agit d’une administration d’état-major qui ne compte que 613 agents, dont la moitié sont en province et qui proviennent d’administrations différentes, dotées chacune de cultures administratives particulières. De ce point de vue, le regroupement à coûts maîtrisés, qui mettra fin à la répartition des fonctionnaires en six sites parisiens différents, contribuera à une meilleure intégration.

Ce ministère travaille par délégation avec deux agences partenaires : l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations, l’ANAEM, et l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, dont la première, jusqu’ici, s’autofinance et dont la seconde est subventionnée.

Par ailleurs, ce ministère est en relation étroite avec neuf autres ministères du fait de la nature des problèmes qu’il doit gérer, qui ont souvent une dimension nationale et internationale, administrative et judiciaire. Cela ajoute encore à la complexité et à la difficulté.

Bien que les résultats chiffrés ne représentent qu’une partie d’un bilan, ceux qui ont été obtenus après quelques mois d’action sont significatifs.

L’augmentation de 20,6 % du nombre de visas de long séjour accordés pour motif professionnel est un premier pas positif dans le sens du développement de cette immigration de travail auquel notre commission des finances a consacré un récent rapport.

Un tiers des 21 236 étrangers reconduits à la frontière depuis le début de l’année l’ont été volontairement.

On constate une augmentation de 400 % en un an des diplômes initiaux de langue française.

Par ailleurs, sept accords ont été signés avec des pays d’émigration. Ils devraient être prochainement ratifiés par le Parlement.

Voilà autant de signes tangibles du résultat de l’action du ministre.

J’y ajouterai l’intégration de la Cour nationale du droit d’asile au Conseil d’État ; elle réjouira tous ceux qui sont attachés à la séparation des pouvoirs.

Cette réforme doit évidemment conduire à une amélioration des délais de jugement. Une bonne justice en matière d’asile ne saurait être une justice lente.

M. Hortefeux n’est donc pas uniquement le ministre des centres de rétention, comme on serait tenté de le croire en feuilletant la revue de presse qui concerne ce ministère.

Plus la gestion de ces centres sera irréprochable, plus ceux qui critiquent leur fonctionnement, souvent pour dissimuler leur hostilité de fond au principe même du retour, seront obligés de se dévoiler et d’argumenter.

Je ne peux donc qu’encourager le ministre à améliorer encore la gestion de ces centres, en quantité et en qualité.

J’en viens maintenant aux aspects proprement budgétaires du débat. Je formulerai quatre observations.

Premièrement, les crédits que la France consacre à sa politique de l’intégration et de l’immigration représenteront 2,6 milliards d’euros en 2009, dont 20 % seront directement gérés par ce ministère ; son rôle de coordination sera donc très important.

Lorsque le budget du ministère de l’immigration consacre 513 millions d’euros à sa politique, on recense 490 millions d’euros prévus au titre de l’aide médicale d’État, gérés par le ministère de la santé.

Deuxièmement, au sein du ministère, le premier budget est celui de l’asile, qui représente 53 % des crédits contre, par exemple, 16 % pour la lutte contre l’immigration irrégulière.

L’importance de l’asile explique que le budget de l’immigration soit très sensible à la variation du nombre de demandeurs du statut de réfugié. Or celle-ci devrait progresser en 2008 de l’ordre de 15 %.

Par ailleurs, les délais devant la Cour nationale du droit d’asile augmentent : ils sont passés de 357 jours à 415 jours en 2008.

Ces deux évolutions ont des conséquences majeures sur la dépense destinée à l’hébergement des demandeurs d’asile.

Si la demande d’asile se stabilisait en 2009 à son niveau de 2008, le besoin complémentaire serait de l’ordre de 45 millions d’euros par rapport au présent projet de loi de finances. Si cette demande progressait encore de 10 % en 2009, le besoin complémentaire serait de l’ordre de 56 millions d’euros.

Il y a donc, pour l’exercice 2009, un besoin de crédits complémentaires qui aurait pu donner lieu à un amendement au projet de loi de finances, conformément au principe de sincérité posé par la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF.

Troisièmement, toute politique a un coût, et c’est le rôle de la comptabilité analytique de l’évaluer.

Or la connaissance des coûts est encore imparfaite, par exemple en ce qui concerne les reconduites à la frontière. Notre commission des finances a tenté une première estimation, qui nous donne un ordre de grandeur et qui sera complétée par une analyse de la Cour des comptes, précédemment demandée par la commission des finances.

Cette première estimation présente deux vertus.

Elle permet d’abord de justifier tout l’effort consacré par le ministère de l’immigration aux retours volontaires. Les significatives aides financières au retour accordées aux migrants en situation irrégulière sont de l’intérêt bien compris de l’État comme des personnes concernées.

Cette évaluation invite par ailleurs à réformer les conditions de la rétention administrative, en transférant la gestion des centres de rétention à une entité unique, la police aux frontières.

Enfin, une large part de l’action menée en matière d’intégration est mise en œuvre par un opérateur de l’État, l’ANAEM. Les exigences de notre commission des finances en ce qui concerne les opérateurs sont simples : les documents budgétaires qui nous sont présentés doivent permettre au Parlement de constater la nécessité de verser à ces opérateurs une subvention pour charge de service public ou de relever les taxes qui leur sont affectées. La transformation de l’Agence, qui est prévue, devrait permettre d’améliorer la qualité de la prévision budgétaire en cette matière.

En conclusion, poursuivre l’organisation et l’intégration du ministère, réussir la fusion de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations et de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’ACSé, passer un contrat d’objectifs avec le nouvel organisme, l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, accorder une plus large place à l’immigration professionnelle, développer encore notre politique d’intégration, encourager les retours volontaires en nous donnant, dans ce domaine également, des objectifs chiffrés, améliorer le fonctionnement des centres de rétention, rester fidèles à nos traditions d’accueil des réfugiés et des immigrés – je salue à ce titre le prix Goncourt du réfugié afghan Atiq Rahimi (Mme Éliane Assassi proteste.) comme je salue la nomination du préfet Pierre N’Gahane dans le département des Alpes-de-Haute-Provence, voisin du mien –, réduire les délais d’examen des demandes d’asile, poursuivre notre action d’impulsion au niveau européen au-delà de la présidence française, élargir le nombre de pays d’origine avec lesquels nous souhaitons conclure des accords : voilà, me semble-t-il, des perspectives susceptibles de doter notre pays, dans la ligne de ce qui a déjà été réalisé, d’une politique d’immigration, d’asile, d’intégration et de coopération conforme aux traditions d’accueil de la France, respectueuse du droit international, des droits de l’homme et de la dignité humaine.

En conclusion, et sous le bénéfice des amendements que je vous présenterai, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.

M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis la création de la mission « Immigration, asile et intégration », notre commission s’en saisit pour avis afin de continuer à examiner le fonctionnement de l’Office pour les réfugiés et apatrides, l’OFPRA, et de la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA.

Il faut rappeler que l’OFPRA, dont l’activité s’est considérablement améliorée ces dernières années, grâce à un renforcement notable de ses moyens en personnel, a toujours constitué un service à part au sein du ministère des affaires étrangères. Ses personnels sont effectivement à la fois des spécialistes des pays d’origine des réfugiés, dont ils doivent examiner les demandes d’asile, et des diplomates. Sur les 370 équivalents temps plein travaillé affectés à l’OFPRA, 137 ont été transférés et proviennent de la direction des Français de l’étranger et des étrangers en France.

Conjuguée à une baisse du nombre des demandes d’asile formulées en France, de 58 000 en 2004 à 26 000 en 2006 pour les personnes majeures, l’augmentation des moyens avait permis de réduire la durée d’instruction des dossiers. Celle-ci était passée, en moyenne, de 130 jours en 2004 à 110 jours en 2007. Le stock des dossiers en instance avait également été significativement réduit, pour s’établir à environ deux mois d’activité en 2006.

Cependant, les délais d’examen se sont de nouveau allongés en 2008, d’environ deux mois s’agissant de l’OFPRA et davantage encore s’agissant de la CNDA. Il est d’ailleurs prévu que les magistrats temporaires présidant les formations de jugement bénéficient du renfort de magistrats à plein temps venant, comme eux, du Conseil d’État ou de la Cour des comptes.

Les demandes d’asile ont crû de 7,5 % de janvier à août 2008, tant en métropole qu’outre-mer. Cette hausse pourrait s’amplifier en 2009.

Je vous précise que le Conseil de modernisation des politiques publiques, réuni le 4 avril 2008, a décidé que la mise en œuvre opérationnelle de la politique des visas relèverait à l’avenir de la responsabilité du ministère de l’immigration. À compter de 2009, les crédits de fonctionnement et les crédits d’investissement consacrés aux applications informatiques seront donc transférés du ministère des affaires étrangères et européennes au ministère de l’intégration. Cela représente un montant global de 2,6 millions d’euros.

L’ensemble des personnels chargés de l’instruction des demandes de visas continue cependant à relever du ministère des affaires étrangères et européennes. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se félicite de ce maintien. Il semble indispensable à la bonne intégration de ces personnels au sein de nos consulats, ainsi qu’à la pérennité de l’autorité de nos consuls, bons connaisseurs des pays où ils exercent, sur ces personnels.

La commission souhaite en effet que le ministère des affaires étrangères et européennes demeure un acteur majeur dans la définition et la mise en œuvre de la politique de délivrance des visas. Celle-ci relève des priorités de notre action internationale.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères est favorable à l’adoption des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » pour 2009. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je rappellerai tout d’abord, au nom de la commission des lois, que la politique menée depuis plusieurs années doit nous permettre de demeurer fidèles à notre tradition d’accueil, élément essentiel de notre identité nationale.

Force est de constater que le ministère de l’immigration et de l’intégration a su s’imposer, en à peine un an, comme l’organisateur et le coordonnateur de la politique française de l’intégration et de l’immigration. Personne, à mon avis, ne peut aujourd’hui contester la manière dont il s’est installé. Tout en constituant un ministère régalien à part entière, il a su conserver sa spécificité d’administration d’état-major.

Enfin, nous ne pouvons que saluer son bilan européen, qu’illustre le grand succès politique de l’adoption du Pacte européen sur l'immigration et l'asile. Un tel succès aurait-il été possible si ce ministère n’avait pas existé ou s’il n’avait pas été organisé tel qu’il l’est aujourd’hui ?

À la suite des différentes conférences qui se sont tenues au cours de la présidence française, nous pouvons l’affirmer : ce ministère a remporté, dans tous les domaines qu’il a abordés, un véritable succès, que prouvent non seulement la qualité du travail accompli lors de ces conférences, mais aussi les conclusions approuvées et les orientations fixées. Le ministre – faut-il le rappeler ? – les a d’emblée portées avec force.

Je n’insisterai pas sur la question des prévisions budgétaires en matière d’asile et des moyens du futur OFII. L’examen des amendements de la commission des finances nous donnera l’occasion d’en discuter.

Voilà ce que je tenais à rappeler à titre de propos liminaire.

Je ferai maintenant observer que ce budget 2009 est resserré, stable, et qu’il s’inscrit dans une perspective pluriannuelle dont l’horizon est 2011. Cela mérite d’être souligné.

Faut-il également relever que son périmètre a été modifié ? Avec la commission des lois, je suis satisfait du transfert de la dotation de la CNDA. Elle apparaît désormais comme une véritable juridiction. Nous souhaitions effectivement sortir d’une sorte de confusion, voulue ou non, entretenue ou non, qui prévalait sur ce point. En procédant à une clarification à l’occasion de cet exercice budgétaire, le ministre tient l’engagement qu’il avait pris l’an dernier à la même époque.

S’agissant toujours du périmètre, observons également que la responsabilité opérationnelle des visas a été l’objet d’arbitrages. Le Réseau mondial Visa a effectivement été placé, lui aussi, sous la responsabilité du ministre. Il relèvera donc désormais de son action. Cet autre point positif conforte la cohérence du dispositif.

La hausse du nombre de demandes d’asile en 2008 fragilise quelque peu les prévisions budgétaires. Je mentionnerai deux faits : d’une part, l’augmentation du coût de l’hébergement d’urgence ; d’autre part, le coût de l’allocation temporaire d’attente. La commission des lois partage l’inquiétude exprimée par le rapporteur de la commission des finances à ce propos. Nous avons effectivement les mêmes préoccupations.

Nous relevons avec intérêt la création d’un document de politique transversale relatif à la politique de l’immigration, qui nous offre enfin une vision si j’ose dire « consolidée » de l’ensemble des politiques menées sur le sujet et permet de constater les moyens mis en œuvre par l’État à ce sujet.

Tout en m’efforçant d’être bref pour respecter le temps imparti, j’évoquerai trois questions.

La première concerne l’aide juridique dans les lieux de rétention. L’appel d’offres lancé, ouvrant aux associations la possibilité d’être présentes au sein de ces centres, nous paraît un élément positif, même si une organisation détenant jusqu’à présent le monopole a manifesté quelque inquiétude. Un nouvel appel d’offres sera peut-être lancé. Il conviendra que les associations – elles seront vraisemblablement plusieurs à prendre cette responsabilité – veillent à une bonne coordination de leur travail, pour donner le maximum de chances aux personnes qui sont reçues dans ces centres de rétention et pour que la qualité de l’intervention soit toujours assurée et vérifiée.

Deuxième question, les retours volontaires sont désormais plus nombreux, ce qui est également une bonne chose. Cela montre que nous avions eu raison, en 2007, de demander aux préfets d’insister sur les retours volontaires à l’occasion de l’analyse des dossiers. Nous savons que les retours volontaires à caractère humanitaire ont pris de l’importance, mais qu’en est-il aujourd’hui de l’autre volet du retour volontaire ? Continuerez-vous de travailler à la dynamisation de cet autre dispositif ?

Enfin, troisième question, la répartition des effectifs des services des visas entre les différents consulats fera désormais l’objet, chaque année, d’une décision conjointe des ministères chargés de l’immigration et des affaires étrangères. Je souhaiterais savoir comment se déroulent les discussions dans la perspective de cette codécision a priori délicate.

En conclusion, madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, la commission des lois a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme la présidente. Je vous rappelle que le temps de parole attribué aux groupes pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vais faire entendre une musique un peu différente et me montrerai peut-être un peu plus critique que les orateurs précédents.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis. Chacun son travail !

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Merci de vous en excuser au préalable !

M. Richard Yung. J’espère parvenir à faire passer quelques messages…

Le moins que l’on puisse dire, monsieur le ministre, c’est que, depuis un an et demi, vous n’avez pas ménagé vos efforts pour remplir la mission, sans doute ingrate, que vous a confiée le Président de la République et dont vous pensez, probablement à raison, qu’elle est d’abord idéologique. Car c’est bien sur le terrain idéologique que vous menez la bataille et, après avoir instillé la peur dans l’esprit des Français, vous vous offrez à les rassurer.

Le présent projet de budget consacre cette politique qui donne la priorité au renvoi des étrangers – certains ont employé l’expression de « chasse aux étrangers » – et à la promotion de l’immigration économique.

En 2009, la lutte contre l’immigration irrégulière se verra allouer 80,8 millions d’euros, soit des crédits en augmentation de 2,2 %, alors que 77,8 millions d’euros seront affectés à l’intégration et à l’accès à la nationalité, ce qui représente une baisse de… 56,6 % ! Il y a donc nettement deux poids, deux mesures, et la priorité est claire : ce n’est pas l’intégration, c’est bien sûr le renvoi des immigrants dans leur pays. La politique du chiffre et ses conséquences continueront donc de prévaloir.

L’objectif pour 2009, comme pour 2008, est fixé, au nom de la préservation de l’identité nationale, à 30 000 renvois. Selon le projet annuel de performance, le coût moyen d’une reconduite à la frontière s’élèvera à 2 450 euros en 2009, contre 2 936 euros en 2007.

Nous nous réjouissons de ces gains de productivité, monsieur le ministre, et nous vous en félicitons : vous économisez les deniers de l’État ! Mais ce coût n’inclut que les frais de billetterie et les dépenses « hôtelières », pour employer un euphémisme, et ne tient pas compte des moyens humains qui sont mobilisés.

D’après la commission des finances – le rapporteur spécial y a fait allusion –, le coût total serait de l’ordre de 20 000 euros par renvoi. Vingt mille euros ! Faites le calcul, mes chers collègues : 30 000 renvois à 20 000 euros, cela fait 600 millions d’euros. Voilà la réalité du budget !

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Non !

M. Richard Yung. Vous rendez-vous compte, mes chers collègues, de tout ce que nous pourrions faire d’intelligent avec 600 millions d’euros : enseigner le français, diffuser notre culture, aider les migrants à se préparer à occuper un emploi, à être utiles à la nation française… ? Mais tel n’est pas le choix qui a été fait.

Tout comme la politique des renvois, la politique de l’immigration dite « choisie » a ses limites qu’illustre la fameuse carte de séjour « compétences et talents ».

Mme Nathalie Goulet. C’est la carte Gold !

M. Richard Yung. « Compétences et talents », voilà un beau nom, et on souhaiterait que ces cartes soient attribuées en nombre ! Or, au 30 septembre 2008, seules 160 cartes avaient été délivrées. Nous sommes donc bien loin de l’objectif de 2 000 que vous vous étiez fixé pour cette année !

La situation est très semblable en ce qui concerne les fameux accords internationaux que vous voulez conclure avec divers pays africains. Vous vous targuez, sans doute à juste titre, d’avoir signé sept accords bilatéraux. Or, à l’heure actuelle, seul l’accord avec le Gabon est entré en vigueur. On voit là la référence -  pour ne pas dire la révérence  - faite à notre ami El Hadj Omar Bongo, père de la « Françafrique » ; car tout le monde sait bien que les Gabonais n’émigrent pas vers la France ! Quant aux autres pays… Le Mali, par exemple, qui est un pays d’hommes fiers – les Mandingues, les Toucouleurs – a refusé de signer l’accord que vous le pressiez de conclure.

M. Brice Hortefeux, ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire. C’est totalement faux !

M. Richard Yung. C’est en tout cas ce que la presse a rapporté ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis. Ce n’est pas la presse qui conclut les accords !

M. Alain Gournac. La presse ne dit pas toujours la vérité !

M. Richard Yung. Vous pourrez, monsieur le ministre, nous apporter des explications. Pour ma part, je me fonde sur les informations disponibles !

J’en viens à présent à la question de la rétention administrative et de ses conditions.

Deux rapports ont été récemment rendus sur ce sujet, celui du commissaire des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, qui faisait d’ailleurs suite à un premier rapport d’un précédent commissaire aux droits de l’homme, et celui du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Tous deux rappellent les mauvaises conditions matérielles qui prévalent dans les centres de rétention ainsi que les difficultés que rencontrent les personnes qui y sont placées pour être informées des moyens dont elles pourraient disposer pour assurer leur « défense », si j’ose dire.

Le projet de budget pour 2009 augure mal des suites qui seront données à ces rapports. Les étrangers enfermés seront plus nombreux, et les crédits alloués au fonctionnement des centres de rétention augmenteront de 4 % ; au total, 2 000 places devraient être disponibles en 2009, contre 773 en 2003. Voilà de l’augmentation ! Voilà du chiffre !

Je voudrais évoquer un autre aspect de ce même sujet : l’assistance juridique accordée aux étrangers placés en rétention administrative, question qui a un peu occupé les gazettes.

Cette très difficile mission, on le sait, est remplie depuis de nombreuses années par le Service œcuménique d’entraide, plus connu sous le nom de CIMADE. En effet, lorsque, au moment de la création des centres de rétention administrative, le ministre alors en fonctions avait lancé un appel aux associations, ce fut la seule organisation qui accepta de s’en charger, sans doute parce que, depuis la fin de la guerre, elle assumait une fonction similaire et avait donc une expérience en la matière.

Le remarquable travail qu’elle effectue est aujourd’hui menacé parce que, sous prétexte de mettre fin à sa position de monopole, vous avez tenté, monsieur le ministre, de réduire sa place dans les centres de rétention. Vous avez ainsi prétendu que la CIMADE refusait de travailler avec d’autres organisations, ce qui, à ma connaissance, est faux : depuis deux ans, la CIMADE travaille en partenariat avec au moins deux associations, dont le Secours catholique – protestants d’un côté, catholiques de l’autre : on ne peut pas être plus œcuménique ! –, et souhaite étendre ce travail collectif à d’autres associations, à des syndicats, à des avocats…

Monsieur le ministre, l’appel d’offres que vous avez lancé a été annulé par le tribunal administratif de Paris, et le contrat de la CIMADE s’arrête à la fin de l’année. Vous avez affirmé, lors de votre audition par la commission des lois, que vous envisagiez de prolonger le contrat de la CIMADE. Il me semble qu’il serait souhaitable de ne plus travailler dans le cadre d’un marché public et de mettre en place une délégation de service public.

Enfin, vous projetez de créer un nouvel opérateur unique qui serait responsable de l’intégration des primo-arrivants et s’appellerait « office français de l’immigration et de l’intégration », ou OFII. Voilà bien un grand jeu français : créer des organismes au fur et à mesure que l’on avance ! Cet office serait issu de la fusion de deux établissements publics, l’ANAEM et l’ACSé. En tirera-t-il une plus grande efficacité ? Peut-être ! Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, j’aimerais obtenir des précisions sur le rôle que vous envisagez de lui confier et sur la politique qu’il sera chargé de mener.

Je me réjouis au passage de constater la suppression, à cette occasion, de la taxe de 45 euros qui était perçue en faveur de l’ANAEM lors de la demande de validation d’une attestation d’accueil.

En revanche, et contrairement au rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, je ne pense pas que ce soit une bonne idée de réduire de 1,5 million d’euros les crédits de l’ANAEM., car je considère que la formation professionnelle des Français de l’étranger fait partie des tâches de l’ANAEM. Même si cet aspect ne relève pas de votre département, monsieur le ministre, je voudrais souligner à quel point il est important de donner aux Français de l’étranger une formation professionnelle sur place ; on peut ainsi éviter qu’ils ne soient placés dans des situations difficiles qui nous obligent ensuite à les ramener en France.

Les Français expatriés ont déjà beaucoup souffert, les crédits ont déjà été réduits de plus de moitié : supprimer encore 1,5 million d’euros que l’ANAEM aurait consacré à la formation professionnelle n’est pas judicieux.

Pour conclure, monsieur le ministre, je vous ferai part de mon inquiétude et de celle de nombreux citoyens devant la suppression de la sous-direction de l’accès à la nationalité.

Le transfert aux préfectures de la charge des naturalisations entraînera un allongement des délais de traitement et une rupture d’égalité entre les demandeurs. En effet, les décisions risquent de varier, si bien que les personnes souhaitant accéder à la nationalité française feront le tour de France des préfectures, de Rodez à Charleville-Mézières, à la recherche des plus libérales. Ce n’est certainement pas une bonne chose : les décisions doivent être marquées d’une certaine homogénéité.

En outre, cette réforme ne sera pas pertinente, car la mission effectuée par les services préfectoraux ne peut pas être comparable, en qualité, au travail d’instruction qui est assuré par les agents de la sous-direction de l’accès à la nationalité. Je pense donc qu’il serait de bonne politique de maintenir cette sous-direction.

Mme la présidente. Il vous faut conclure, mon cher collègue.

M. Richard Yung. Les sénateurs du groupe socialiste veulent une autre politique de l’immigration, ferme contre les illégaux, accueillante pour ceux qui veulent travailler dans notre pays, ouverte au regroupement familial et au droit d’asile.

Au vu de ces remarques, vous comprendrez, mes chers collègues, que mon groupe ne votera pas les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans quelques jours, la présidence française de l’Union européenne s’achèvera. Elle aura été marquée par l’adoption du pacte européen sur l’immigration et l’asile, caractérisé par le fameux concept d’immigration choisie qui vous est si cher.

Ainsi, les vingt-sept pays européens se sont prononcés en faveur d’une législation sur le renvoi des migrants, le renforcement des contrôles aux frontières, la sélection de travailleurs hautement qualifiés, les régularisations en fonction des exigences du marché du travail, l’interdiction des régularisations collectives. La politique européenne de l’immigration oscille ainsi entre instrumentalisation du codéveloppement et répression.

La semaine dernière, lors de la deuxième conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement, l’Europe a confirmé sa vision des migrations, essentiellement axée sur la sélection. La conférence a abouti à l’adoption d’un programme de coopération triennal visant à encadrer la migration légale, à contrecarrer l’immigration illégale et à organiser le développement solidaire.

De la même façon, monsieur le ministre, les accords de gestion concertée des flux migratoires que vous faites signer aux pays africains d’émigration vous permettent de faire pression sur eux. Vous leur promettez des possibilités de migration légale qui restent limitées et une aide au développement, en échange de quoi vous demandez aux pays de départ et de transit de contrôler les flux migratoires et de faciliter la réadmission des personnes expulsées par la France. Bref, vous leur demandez d’être les gendarmes de l’Europe !

Sans doute espérez-vous réaliser de substantielles économies en sous-traitant de la sorte la gestion des flux migratoires ?

Des accords ont ainsi été signés avec plusieurs pays de l’Afrique subsaharienne, à l’exception du Mali. Pourtant chacun sait que, pour l’essentiel, les migrations se font davantage du Sud vers le Sud plutôt que du Sud vers l’Europe. Par exemple, 70 % des migrations au départ du Mali ont pour destination le Ghana, le Niger ou la Gambie…

Nous savons aussi que la proportion d’étrangers présents sur le sol européen reste faible : 5,1 % de la population totale. Nous sommes bien loin de l’invasion que vous semblez craindre !

Vous persistez cependant, monsieur le ministre, à vouloir interdire le mouvement des personnes, alors que vous prônez la mondialisation et la libre circulation des capitaux et des marchandises. Pourtant, les migrants envoient dans leurs pays d’origine des sommes bien supérieures à celles qui sont prévues au budget de l’aide publique au développement ! Ils participent ainsi au développement sur place des villages et à des projets locaux, et font vivre les membres de leur famille restés au pays.

L’immigration choisie passe également par le projet de « carte bleue européenne » dont l’adoption finale a été différée au 8 décembre. Ce permis de travail destiné aux immigrés hautement qualifiés va avoir – quoi que vous en disiez – de graves incidences en termes de fuite des cerveaux. Les candidats à ce permis devront en effet justifier d’un contrat de travail prévoyant un salaire minimum correspondant à au moins 1,5 fois le salaire brut moyen du pays, soit, pour la France, l’équivalent d’un salaire brut mensuel de 3 850 euros.

Ces fuites de matière grise caractérisent l’émigration du Sud vers le Nord et entraînent pour les pays d’origine un manque de personnels de santé et de techniciens ainsi qu’une perte de revenu national faute de rentrées d’impôt.

L’Europe se fait de plus en plus forteresse ; certains parlent même de « bunkérisation ». Pourtant, il ne faut pas oublier que l’Europe va, dans un avenir proche, devoir faire face au vieillissement de sa population. Ses besoins en main-d’œuvre vont aller croissant avec le départ à la retraite des enfants du baby-boom, qui va s’étaler sur la période 2015-2030 avec un pic en 2018.

Monsieur le ministre, votre budget, ce sont aussi les centres de rétention, qui coûtent très cher, en fonctionnement comme en investissement.

Plutôt que de mettre de l’argent dans la construction de nouvelles places dans les centres de rétention administrative, les CRA, je pense qu’il serait utile d’investir dans d’autres domaines, d’autant que les centres de grande capacité comme ceux de Vincennes ou les deux centres de 120 places chacun que vous envisagez de construire au Mesnil-Amelot, en plus du centre actuel de 140 places, ne peuvent qu’engendrer des tensions et poser de graves problèmes, comme cela s’est déjà produit à plusieurs reprises. Il convient, par conséquent, de limiter la capacité de ces centres, comme l’a d’ailleurs recommandé M. Delarue lui-même.

Par ailleurs, bien qu’en théorie les mineurs étrangers ne puissent faire l’objet ni d’un arrêté d’expulsion, ni d’une mesure de reconduite à la frontière, encore moins, par conséquent, d’un placement en rétention, il s’avère qu’en pratique cette règle n’est guère appliquée.

Nous n’avons aucune idée du nombre de mineurs qui sont placés chaque année en rétention en France métropolitaine, ni dans quelles conditions ils y sont maintenus. Monsieur le ministre, la transparence s’impose en la matière.

La situation dans les locaux de rétention administrative, les LRA, ne doit pas échapper à notre vigilance même si la durée de rétention y est réduite par rapport à celle qui prévaut dans les centres de détention, les CRA.

S’agissant des droits des personnes retenues et de la présence de la CIMADE, je voudrais dire que nous ne sommes pas opposés – la CIMADE non plus, d’ailleurs – à ce que d’autres associations soient présentes dans ces lieux, à condition toutefois qu’elles soient compétentes en matière juridique, car l’exercice effectif de leurs droits par les étrangers est indispensable et seules les associations disposant de personnel formé et expérimenté doivent pouvoir se porter candidates à l’appel d’offres.

M. Brice Hortefeux, ministre. Bien sûr !

Mme Éliane Assassi. C’est une matière très importante tant la législation relative aux droits des étrangers, sans cesse modifiée, est complexe. Je veux parler notamment des délais à respecter, des différents recours possibles à la suite de décisions toujours importantes prises à l’encontre des étrangers, autant de sujets qu’il ne faut pas négliger. Il ne s’agit donc pas uniquement d’apporter une aide humanitaire, certes indispensable, mais qui ne saurait à elle seule suffire.

En tout état de cause, je reste vigilante quant à la future organisation de l’aide juridique aux étrangers.

Quant aux objectifs en termes d’expulsions effectives du territoire, nous en sommes arrivés à 30 000 pour 2009.

M. Brice Hortefeux, ministre. Mais non !

Mme Éliane Assassi. Je vous l’accorde, on ne sait toujours pas d’où viennent ces chiffres ni sur quelle base ils ont été déterminés.

Il faut noter que les retours volontaires représentent un peu plus du tiers du total des éloignements du territoire. En comptabilisant ces retours volontaires, qui sont dus en grande majorité au dispositif d’aide au retour humanitaire et qui concernent des communautaires, Roumains et Bulgares en particulier, vous faussez la donne et, au passage, ces « expulsions déguisées » vous coûtent moins cher.

Le nombre des expulsions brandi comme un record vous sert à manipuler l’opinion publique pour lui laisser croire que le Gouvernement obtient ici des résultats qu’il ne peut obtenir dans les domaines économique et social.

Le rapporteur de la commission des lois du Sénat va jusqu’à émettre comme piste de réflexion la possibilité de renvoyer les parents en situation irrégulière dont les enfants sont scolarisés en leur proposant une aide au retour volontaire, qui revient moins cher et est plus commode qu’un retour forcé, lequel mobilise bien évidemment la société civile et peut échouer !

On nous dit que le coût d’une expulsion du territoire s’est élevé en 2008 à 2 800 euros. Vous envisagez de ramener ce coût moyen aux alentours de 2 450 euros dès 2009. C’est déjà beaucoup, mais cela reste très en deçà de la réalité, car d’autres ministères sont impliqués.

Il serait temps, par conséquent, que les parlementaires connaissent le coût moyen complet d’une reconduite à la frontière. Car un autre chiffre est avancé par la commission des finances – c’est écrit dans son rapport – celui de 20 970 euros par personne reconduite. On est donc bien loin des 42 millions d’euros – 39 millions pour les frais de billetterie et 3 millions pour la location d’avions – inscrits dans votre budget.

Compte tenu du caractère exorbitant de ce coût, j’estime qu’il faut la transparence en la matière. Allons-nous un jour connaître le coût exact d’une expulsion du territoire tous frais compris ?

Pour conclure d’un mot, car le temps va me manquer, j’évoquerai le droit d’asile.

Je veux souligner le fait que, malgré vos lois restrictives en matière d’accès au droit d’asile et bien que vous considériez l’asile comme un simple flux migratoire, les demandes d’asile sont tout de même en hausse sur l’année 2008. C’est dire que la situation dans le monde ne s’est guère améliorée. C’est dire aussi que nous devons être en dessous de la réalité en ce qui concerne le nombre réel de demandeurs d’asile puisque tous n’ont pas accès à l’asile. C’est dire enfin combien vos prévisions de l’an passé, qui se fondaient sur une hypothèse de diminution du nombre des demandes d’asile en raison de vos réformes restrictives, étaient erronées.

À la lumière de ces observations, les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre les crédits de la présente mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à rendre hommage aux rapporteurs, qui ont permis aux différents intervenants de soulever un certain nombre de questions, notamment d’ordre technique.

L’examen du projet de loi de finances est pour nous l’occasion de redéfinir les axes politiques. En ce qui concerne votre ministère, monsieur le ministre, c’est une première parce qu’il a douze mois d’existence et qu’il est issu d’un projet politique décidé par le Président de la République. Je reconnais que nombre d’entre nous observions sa mise en place avec un certain espoir, mais aussi une certaine angoisse.

Mme Éliane Assassi. C’est clair, il n’y a pas d’ambiguïté !

M. Philippe Dominati. Or on est aujourd’hui en mesure d’établir un premier bilan politique avant de faire un premier bilan comptable et administratif de la mission.

Au demeurant, on n’imaginait pas que le bilan politique puisse être établi aussi rapidement. En effet, il y a un an, on nous annonçait de nombreuses difficultés : la France risquait d’être montrée du doigt par le reste de l’Europe et on allait d’un seul coup altérer l’image de notre pays, qui jouit d’une aura internationale.

Or qu’en est-il exactement ?

En l’espace de neuf mois, nous avons remporté plusieurs succès.

Nous avons connu une consécration européenne, puisque le pacte qui a été signé par les vingt-sept États membres voilà deux mois apporte la confirmation que la politique qui a été choisie par notre pays, sous l’impulsion du Président de la République, mais sous votre autorité, monsieur le ministre, a été ratifiée et amplifiée à l’échelon du continent européen.

Le pacte européen, ce sont les cinq engagements majeurs qui ont été définis par la politique française voilà un an.

En ce qui concerne le droit d’asile, qui fait tellement débat, il faut tout de même rappeler qu’en 2005 la France comptait autant de demandeurs d’asile que les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Canada réunis. La France est donc loin d’être particulièrement sévère en la matière.

L’an dernier, on nous a beaucoup parlé du droit d’asile. Des mesures particulières ont été prises lors de la conférence de Vichy, avec notamment la création d’un bureau européen et la mise en place d’une politique européenne commune.

Sur le plan national, je retiendrai pour ma part deux réussites.

La première, c’est le taux de l’immigration professionnelle. Un objectif de l’ordre de 50 % a été défini sur l’ensemble de la mandature. Le point de départ se situait à 7 %, nous sommes aux alentours de 25 %. Cette progression en un an est manifestement très importante dans l’esprit même de la réforme qui a été menée, pour ce qui est tant de la compréhension par la société française et des nécessités de l’économie que de l’humanisation de la politique de l’immigration.

La seconde réussite, qui va de pair avec la première, concerne la lutte contre l’immigration clandestine. Une centaine de filières ont été démantelées et il y a eu 400 interpellations d’employeurs d’étrangers en situation irrégulière. Voilà deux succès à mettre au compte de l’action du nouveau ministère.

J’en viens maintenant au budget, à l’organisation et à la méthode qui a été employée.

Dix-sept mois se sont écoulés entre la volonté de créer ce ministère et sa mise en place, le 1er janvier dernier.

Je dois le reconnaître, le libéral que je suis pouvait craindre la création d’un nouveau ministère dans le pays où la part de la fonction publique est la plus importante de l’OCDE, après la Belgique.

Or qu’en est-il exactement ?

D’abord, s’agissant des moyens, l’installation du ministère a permis de réaliser une économie de 7 millions d’euros. Il faut tout de même le rappeler, puisque cela a fait l’objet d’une polémique.

La méthode employée est originale, puisqu’il s’agit d’une administration d’état-major, telle que définie par votre secrétaire général : 600 fonctionnaires ont autorité sur deux opérateurs de l’État.

Nous avons donc un ministère moderne dans sa structure, qui, au bout d’une année d’exercice, redéfinit très rapidement son champ d’intervention, contrairement à une tendance générale qui voit les structures tenter d’accumuler ressources et pouvoirs. Les affaires de la Cour nationale du droit d’asile, notamment, sortent de votre budget.

De même, la compétence de votre ministère dans la durée est clairement définie : cinq ans. Cela explique le transfert de crédits vers le secrétariat d’État chargé de la politique de la Ville.

J’évoquerai maintenant plus précisément cinq actions menées par votre ministère.

En ce qui concerne les centres de rétention, certains ont soutenu qu’il n’y avait pas d’effort particulier. Or je constate qu’aux 100 places créées l’an dernier s’en ajoutent 120 cette année et que 27 millions d’euros ont été consacrés à cette politique. On a donc doublé le nombre de places : c’est une réalité !

M. le rapporteur spécial et certains des intervenants qui m’ont précédé ont souligné l’effort qui doit être engagé sur l’aide au retour volontaire, qui s’élève à 2 000 euros, plutôt que sur la reconduite à la frontière, qui se situe aux alentours de 20 000 euros. Un effort de gestion a été réalisé également, puisque le fonds de roulement de l’ANAEM a été redéployé au service de l’État.

J’ai noté enfin la modernisation des moyens par la mise en place des visas biométriques, la lutte contre les « doublons » administratifs entre les consulats et les préfectures pour les visas de long séjour et la poursuite de la politique de partenariat que vous aviez déjà initiée, une conférence ayant été organisée avec les pays africains.

Pour le groupe UMP, ce budget est tout à fait conforme à la volonté affirmée en cette période difficile d’être vigilant sur la dépense publique. Nous sommes également très satisfaits, et même enthousiastes, devant les résultats politiques obtenus sur le plan tant international que national.

Pour conclure, j’ai découvert que votre ministère avait été lauréat des premières Victoires de la modernisation de l’État, monsieur le ministre ; je ne le savais pas…

M. Jean-Jacques Mirassou. Nous non plus !

M. Philippe Dominati. Il y a un an, votre secrétaire général avait défini ce ministère comme étant une administration d’état-major constituée pour relever un véritable défi. C’est chose faite, et amplement.

Je suis certain que, des défis, vous en relèverez d’autres, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la discussion, et le vote, des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » engage notre responsabilité d’hommes et de femmes appartenant à une République dont la devise « Liberté, Égalité, Fraternité » résonne dans cet hémicycle avec une particulière intensité.

Chacune et chacun d’entre nous perçoit ici combien la sécheresse mathématique des chiffres dissimule de tragédies, de folles espérances, de souffrances physiques et morales, parfois de désillusions, parfois de bonheurs indicibles, mais toujours de victoires sur soi.

Alors, monsieur le ministre, face aux enjeux qui sont ceux de votre département ministériel, je reviendrai non pas sur les chiffres en eux-mêmes, mais sur ce qu’ils révèlent du visage d’une France que je voudrais généreuse mais réaliste, accueillante mais équitable, solidement ancrée dans la tradition qui en a fait le pays des droits de l’homme, suivant en cela l’exemple que nous a toujours donné Jacques Pelletier.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme Anne-Marie Escoffier. Je m’étais interrogée, comme d’aucuns, sur le principe même de la création d’un ministère réunissant, dans la même main, des attributions jusque-là dispersées entre plusieurs administrations. Il en est résulté – il faut saluer cette performance ! – une administration de mission qui s’attache à mettre de la cohérence là où il y avait désordre et de la stratégie là où il y avait improvisation.

Le risque reste celui d’une concentration de pouvoirs annihilant l’indispensable équilibre entre des objectifs parfois contraires, nationaux ou supranationaux.

Je ne peux qu’adhérer à votre volonté de partager, avec les autres pays européens et, au-delà, avec ceux avec lesquels vous avez conclu des accords, une gestion concertée et maîtrisée des flux migratoires. La politique d’immigration s’inscrit inexorablement à l’échelon européen et international.

Je dois reconnaître votre souci de clarification des compétences, pour ce qui concerne, par exemple, les procédures des visas, et de simplification des procédures en matière, notamment, de naturalisation.

Tout cela est indispensable tant l’accumulation des dispositifs législatifs et réglementaires successifs est venue faire du droit des étrangers une jungle où ne se retrouvent plus que les initiés. En découle, d’ailleurs, la floraison de personnes qui ont fait métier de détourner la loi.

M. Brice Hortefeux, ministre. Absolument !

Mme Anne-Marie Escoffier. Mais je voudrais vous dire aussi mes inquiétudes face à ce « tragique de répétition », pour reprendre l’expression de votre collègue Martin Hirsch. Je veux parler du traitement dont font l’objet les étrangers arrivés sur le sol français et confrontés à la difficile épreuve des « papiers ». Je ne saurais m’y habituer.

Monsieur le ministre, quand imposerez-vous un accueil humanisé – simplement humanisé ! – des étrangers s’égrenant en interminables files d’attente devant les préfectures ?

Quand imposerez-vous que soit accordé un regard bienveillant – seulement bienveillant ! –, et non pas de défiance systématique, à l’étranger qui se présente au guichet pour obtenir d’abord le renseignement auquel il a droit ?

Quand refuserez-vous que l’on vienne chercher au petit matin un couple pour le conduire en centre de rétention administrative après avoir confié son bébé de quelques mois à des voisins éberlués ?

Quand refuserez-vous que les sorties d’école soient le lieu et le temps propices pour l’interpellation d’étrangers en situation irrégulière ?

Certes, ils ne devraient pas être en situation irrégulière, et les 400 000 sans-papiers – chiffre d’ailleurs bien difficile à établir – ne devraient tout simplement pas être. Mais, interrogeons-nous : ne sommes-nous pas coupables, pour partie, de leur existence ? Quelles recommandations ont été données aux services chargés d’examiner les demandes d’admission sur le territoire français ? Principalement des consignes en termes d’objectifs quantitatifs, niant par là même toute prise en compte d’éléments individualisés.

Est-il raisonnablement possible de fixer un objectif national chiffré de reconduites à la frontière et d’expulsions ? Cela revient à décider, à la place de celui qui a compétence de par la loi pour prendre une telle décision, de ce que doit être la réponse pour être « politiquement correcte ». Et comme le zèle en la matière n’a pas de limite, les fonctionnaires sont zélés.

En résulte, monsieur le ministre, une accumulation, aujourd’hui dramatique, du nombre de recours gracieux, de recours devant les tribunaux encombrés du contentieux des étrangers, au point de justifier de la création d’un tribunal supplémentaire en Île-de-France.

Je voudrais ici témoigner du désarroi de responsables, à différents postes, que j’ai côtoyés et qui s’interrogent sur leur possibilité d’appliquer tout simplement la loi, équitablement, honnêtement.

L’application informatique AGDREF de gestion du droit d’entrée des étrangers a, depuis longtemps, démontré ses limites et la nécessité de le remplacer par un outil plus performant et compatible avec les données de la police et de la gendarmerie. L’application GREGOIRE devrait la remplacer. Pourriez-vous nous indiquer quand elle sera disponible et dans quelles conditions ?

Les centres de rétention administrative ont fait l’objet de constats, d’analyses, de rapports plus alarmants les uns que les autres. Je sais qu’ils font partie de vos préoccupations, mais je voudrais insister sur l’impérieuse nécessité qu’il y a à en faire des lieux « d’accueil » provisoire pour éviter que de lieux de rétention, ils ne deviennent, de fait, lieux de détention.

S’agissant du droit d’asile, une question dont je connais la complexité, je mesure les efforts réalisés pour réduire les délais de réponse, toujours trop longs, qui maintiennent dans des situations ubuesques des étrangers ballottés de non-réponse en non-réponse pour finir, avec le temps, à rejoindre le cortège des sans-papiers.

Au nombre des mesures positives qui ont été prises – il en existe tout de même quelques-unes ! –, j’ai relevé le contrat d’accueil et d’intégration.

Sur le principe, il me paraît être une très bonne chose, car l’accueil et l’intégration valent tant pour la personne accueillie que pour l’accueillant : chacun a des devoirs à l’égard de l’autre.

Toutefois, j’aurais aimé y découvrir un engagement mutuel, à la manière du parrain et de son filleul ou du tuteur et de son protégé, qui responsabilise de fait l’un et l’autre des acteurs. À la place, j’y ai trouvé la remise d’un diplôme après un quasi-examen de passage. Est-ce cela, la relation que l’on veut établir entre la France et un étranger qui, demain peut-être, demandera à devenir français ? Réduire l’intégration à une feuille de papier n’est pas digne du pays de Voltaire !

Même si j’ai parfaitement conscience de l’immense difficulté que représente la question de l’immigration en France, même si j’entends les arguments qui sont les vôtres, je m’opposerai de toutes mes forces, de toute mon énergie, à une politique qui ne donne pas tout son prix au respect de l’Homme.

C’est pourquoi je ne voterai pas les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » et, avec moi, une grande partie du groupe du RDSE, qui ne retrouve pas, dans votre politique, monsieur le ministre, le respect des valeurs républicaines auquel il est attaché depuis longtemps. (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, vous aviez évoqué, lors de votre prise de fonction, la volonté du Gouvernement de concentrer ses efforts humains et matériels sur une meilleure intégration des familles issues de l’immigration de longue date. Or nous constatons votre volonté de renforcer tous les moyens de votre ministère dans la lutte contre l’immigration irrégulière, donc au détriment d’une politique volontariste d’accueil et d’intégration des étrangers en France.

La réalité que nous avons tous observée depuis dix-huit mois est ici concrétisée dans un budget qui accentue plus encore ce déséquilibre entre chasse aux étrangers irréguliers et délaissement total des étrangers en situation régulière.

Avec une chute globale de 14,7 %, ce budget est l’expression d’un véritable mépris à l’égard des étrangers quant à leur accès aux droits, et parallèlement, d’un abandon de toute politique volontariste d’intégration des migrants légaux.

Ainsi, nous regrettons que le budget des reconduites à la frontière soit le seul poste de dépenses en hausse, alors que les autres actions, notamment à destination des étrangers installés sur le territoire, sont simplement laissées pour compte.

Avec une dotation en baisse de 50 %, le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » est, en effet, le parent pauvre de ce budget.

Pour la seule action n° 11 « Accueil, intégration des étrangers primo-arrivants et apprentissage de la langue française », nous constatons une chute vertigineuse des crédits, qui sont passés de 43,4 millions d’euros, en 2008, à 15 millions d’euros seulement !

Contrairement à vos engagements, par ce budget, vous admettez renoncer à l’intégration des immigrés légaux.

Pourtant, lors de l’examen du projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, vous précisiez, monsieur le ministre, que « pour réussir l’intégration, il faut d’abord maîtriser l’immigration ». Je vous réponds aujourd’hui que, pour « réussir l’intégration », il faut y mettre les moyens !

La maîtrise de l’immigration par une politique axée sur la frénésie du chiffre ne sert à rien si elle n’est pas accompagnée d’une politique volontariste en matière d’accueil et d’intégration des étrangers en France.

Or vous organisez l’autofinancement généralisé des politiques d’intégration par les migrants eux-mêmes.

À la difficulté que tout étranger éprouve pour se faire une place dans notre société, ô combien discriminatoire encore dans les domaines du travail et du logement, vous ajoutez des obstacles administratifs et juridiques à l’intégration.

Vous créez, avec ce budget, les conditions d’une abdication de l’étranger devant les obstacles insurmontables que vous dressez, de manière systématique, sur son parcours d’intégration.

Que dire de la réduction du budget de l’ANAEM, qui est passé de 43,5 millions d’euros à 15 millions d’euros, alors qu’il s’agit pourtant d’un organisme pivot en matière d’aide à l’intégration des migrants légaux ?

Que dire aussi de la diminution du personnel, passant de 920 équivalents temps plein, en 2008, à 890 équivalents temps plein en 2009 ?

Alors que vous créez une nouvelle structure, l’OFII, l’Office français de l’immigration et de l’intégration, comment parvenez-vous à supprimer, dans le même temps, trente postes ?

Lors de son audition, M. Jean-Marie Delarue, Contrôleur général des lieux de privation de liberté, nous a pourtant alertés sur les besoins de l’ANAEM, notamment en matière de formation au droit des étrangers de ses intervenants. Vous n’apportez aucune réponse satisfaisante sur ce point.

Monsieur le ministre, le sort réservé aux étrangers en situation irrégulière est encore plus navrant.

À la lecture des crédits du programme 303 « Immigration et asile », force est de constater que la lutte contre l’immigration illégale vous préoccupe plus que le respect des droits des étrangers en situation irrégulière ou des demandeurs d’asile.

En effet, les crédits attribués à l’action n° 2 de ce programme traduisent votre méfiance à l’égard des associations de soutien aux actions d’accompagnement des demandeurs d’asile.

Le financement des plateformes d’accueil et des associations œuvrant dans ce domaine a diminué de 45 %, passant de 5,28 millions d’euros à 3 millions d’euros. Neuf fermetures de plateformes sont annoncées pour 2009, alors qu’il n’existe déjà plus d’interprète dans les centres de rétention administrative pour aider les demandeurs d’asile à rédiger leur demande d’asile ou leur recours à la commission des recours, documents qui doivent impérativement être libellés en français.

Monsieur le ministre, votre objectif de rationalisation des dépenses ne peut se traduire par une atteinte aux droits élémentaires des étrangers.

Nous refusons que, sous ce prétexte, vous portiez le coup de grâce à la prise en charge sociale des demandeurs d’asile et que vous limitiez leur chance de se voir accueillis et accompagnés dans le respect du droit international.

Nous refusons aussi que, sous ce même prétexte, vous démanteliez l’intervention de la CIMADE dans les centres de rétention. Cette association, dont l’expertise n’est plus à démontrer depuis 1985, exerce sa mission avec le souci permanent de l’effectivité de la protection des droits des étrangers.

Aujourd’hui, vous ouvrez à la concurrence le marché de l’assistance aux étrangers placés en centre de rétention, aux seules fins de déterminer quelle entité sera la moins chère, sans considération de la compétence, de l’expérience ou du caractère effectif de l’aide apportée. Autrement dit, vous nivelez par le bas la protection due aux étrangers.

Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner que le Conseil d’État ait annulé le décret organisant le marché public de l’aide aux étrangers placés en centre de rétention.

Il est inconcevable de mettre en péril, par souci d’économie, les garanties fondamentales dont doivent bénéficier les étrangers, fussent-ils illégaux : ils n’en demeurent pas moins sujets de droits et, à ce titre, vous avez l’obligation de leur en garantir la protection effective. En effet, lorsque les droits fondamentaux d’un être humain sont niés, c’est la dignité même de la personne qui est niée !

Récemment, le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a invité la France à « revoir de façon critique l’ensemble des conditions prévalant dans les centres de rétention administratifs et à les humaniser en concertation avec le nouveau Contrôleur général des lieux de privation de liberté ».

Ce dernier a lui aussi pointé du doigt les dysfonctionnements dans le local de rétention pour étrangers de Choisy-le-Roi, dans le Val-de-Marne, allant jusqu’à parler d’« atteinte à la dignité humaine ».

Pendant ce temps, monsieur le ministre, vous nous proposez un budget qui sacrifie l’assistance sanitaire et sociale en centre de rétention administrative, en faisant passer la dotation de 8,09 millions d’euros en 2008 à 5 millions d’euros pour 2009, soit une diminution des crédits de 50 %, dans un domaine qui touche au cœur même de la protection des étrangers : celui du respect de la dignité humaine.

Monsieur le ministre, respecter les droits fondamentaux, c’est respecter la dignité humaine.

Pendant ce temps, vous continuez de construire de nouveaux centres ou vous agrandissez ceux qui existent pour répondre au problème de la surpopulation, plutôt que de changer de politique. Ainsi, trois nouveaux bâtiments sont en train de voir le jour au Mesnil-Amelot, dont l’un sera consacré aux familles avec enfants mineurs. Pensez-vous sérieusement que la place des enfants soit dans les centres de rétention, à attendre que l’on décide de leur sort ? Ce ne sont pas de dangereux criminels, une assignation à résidence de la famille pourrait suffire !

Pendant ce temps, monsieur le ministre, vous redéfinissez les conditions d’intervention des associations dans les centres de rétention, en leur interdisant d’aider à la constitution de dossiers et en les cantonnant à un simple rôle d’information, autant dire à un rôle d’observateur impuissant.

Vous allez même jusqu’à leur interdire de communiquer sur les conditions de rétention.

M. Brice Hortefeux, ministre. Où ça ?

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, la politique du chiffre déshumanise et ôte toute utilité aux actions menées en matière d’immigration : elle interdit en effet d’apporter à des hommes et des femmes en souffrance un appui, un conseil, un suivi, un peu de solidarité, bref un peu d’humanité !

Votre budget relègue l’individu au second plan : seuls les chiffres, ceux de l’éloignement, des reconduites à la frontière et des refoulés vous importent. Avec votre politique, les êtres humains disparaissent, seuls subsistent des chiffres !

Mme Christiane Kammermann. On ne peut pas entendre cela sans réagir !

M. Alain Gournac. C’est excessif, et donc nul !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Il n’y a que la vérité qui blesse !

Nous n’adhérons pas à cette conception du droit des étrangers, qui précarise et punit les plus fragiles, au lieu de les protéger !

Pour ces raisons, nous ne voterons pas le budget de cette mission.

M. Éric Doligé. Tout ce qui est excessif est dérisoire !

M. Dominique Braye. Personne ne vous applaudit, même pas sur les travées de votre propre groupe !

Mme la présidente. La parole est à M. Soibahadine Ibrahim Ramadani.

M. Soibahadine Ibrahim Ramadani. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances pour 2009, qui s’élèvent à 513,8 millions d’euros en crédits de paiement, accusent une légère baisse par rapport aux 602 millions d’euros de crédits de paiement qui étaient inscrits dans le projet de loi de finances pour 2008.

Ces crédits sont répartis en deux programmes.

Le programme 303 « Immigration et asile » bénéficie d’une dotation de 436 millions d’euros, dédiés notamment à la lutte contre l’immigration illégale et le travail illégal.

Le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » se voit attribuer le reste des crédits de la mission, soit 77,8 millions d’euros.

Monsieur le ministre, le phénomène de l’immigration, notamment irrégulière, est massif outre-mer, en particulier en Guyane, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et à Mayotte.

En ce qui concerne Mayotte, qui présente sans doute la situation la plus critique pour ce qui est des flux migratoires sur le territoire de la République, les chiffres parlent d’eux-mêmes.

Sur une population de 186 452 habitants, telle que recensée par l’INSEE en 2007, le nombre d’étrangers est estimé à 60 000 individus environ, soit le tiers de la population totale, dont 50 000 à 55 000 personnes sont des Comoriens, majoritairement en situation irrégulière.

En outre, selon le récent rapport d’une mission interministérielle, le nombre des naissances enregistrées au centre hospitalier de Mamoudzou croît régulièrement ; elles sont passées de 7 489 en 2005, à 7 779 en 2006, puis à 7 903 en 2007, dont 68 % sont attribuables à des mères non affiliées à notre régime de sécurité sociale, c’est-à-dire à des femmes étrangères en situation irrégulière.

M. Soibahadine Ibrahim Ramadani. Cela s’explique par le fait que le taux de fécondité naturelle des Comoriennes est actuellement de 5 enfants par femme, alors que, sous l’effet de la campagne de planification familiale, ce taux est en baisse pour les Mahoraises et atteint 3,5 enfants par femme.

D’après les estimations de notre excellent collègue Henri Torre, les élèves étrangers, dont 85 % seraient en situation irrégulière, représentent 22,5% du total des effectifs scolaires de l’île en 2008-2009.

Ces élèves se répartiraient à hauteur de 30% dans l’enseignement du premier degré et de 20 % dans le second degré.

Autres caractéristiques de cette population illégale citée par la mission interministérielle – Inspection générale des finances, Inspection générale des affaires sociales et Inspection générale de l’administration –, 75 % de la population carcérale sont d’origine clandestine, et 90 % des affaires traitées par les assises de Mayotte mettent en cause des clandestins.

Par ailleurs, la commission d’enquête sénatoriale sur l’immigration clandestine a évalué, en 2006, à 10 000 le nombre d’étrangers en situation irrégulière travaillant sur l’île, sur les 23 634 salariés dénombrés à l’époque. Dans le bâtiment, on compte 80 % de travailleurs clandestins dans les entreprises de moins de 10 salariés.

Enfin, le nombre de reconduites aux frontières croît aussi régulièrement : 7 714 en 2005, 13 253 en 2006, 13 300 en 2007 et près de 16 000 en 2008, dont 2 000 mineurs. Au moins 30 % des clandestins éloignés de Mayotte récidivent.

Il faut toutefois noter que l’amélioration de la couverture de l’île en moyens de détection et de surveillance a permis d’intercepter 167 embarcations clandestines en 2007, et plus de 200 à la date du 20 novembre 2008.

Parallèlement – et malheureusement ! – le nombre des naufrages se multiplient, car les passeurs, les propriétaires des kwassas, comme on dit chez nous pour désigner les embarcations clandestines, choisissent des trajectoires de plus en plus longues et périlleuses, afin d’éviter d’être repérés par les radars. C’est ainsi que, le 20 novembre dernier, Mayotte a eu à déplorer un accident faisant 14 morts et 7 disparus au large de Kani-Kély, au sud de l’île.

Les coûts induits par la lutte contre l’immigration clandestine, en sus de l’augmentation des effectifs et des moyens matériels, sont de 2,3 millions d’euros pour la police aux frontières et de 941 000 euros pour la gendarmerie nationale au titre de l’année 2007.

Entre les naufrages et les interceptions, un nombre indéterminé de kwassas, chargés d’une population faite tout à la fois de récidivistes et de primo-arrivants, continuent de passer entre les mailles du filet.

Ce tableau nous conduit à soulever les trois préoccupations majeures qui sont celles des Mahorais aujourd'hui.

Tout d’abord, les 16 000 reconduites aux frontières réalisées chaque année, bien que ce nombre soit extrêmement élevé, n’endiguent pas le nombre de clandestins présents sur le territoire, d’une part, parce que 30% au moins d’entre eux récidivent, et, d’autre part, parce que le flux de primo-arrivants, malgré les moyens considérables mis en place, ne se tarit pas, en dépit des naufrages et des interceptions.

Ensuite, le centre de rétention administrative de Pamandzi ayant une capacité d’accueil de 60 personnes se trouve vite surchargé en période d’activité intense, et accueille alors plus de 200 personnes. En période de suspension des mesures d’éloignement, comme ce fut le cas au début du mois de novembre, cette situation contraint les services de l’État soit à libérer, faute de places, les clandestins, soit à ne pas les appréhender. Rappelons qu’un rapport de la Commission nationale de déontologie de la sécurité a estimé que ce centre était indigne de la République.

Qu’en est-il, monsieur le ministre, du projet de construction d’un nouveau centre ?

Enfin, la troisième préoccupation a trait au codéveloppement et à la coopération régionale, en tant que levier permettant de réduire, à la source, la forte pression migratoire qui s’exerce sur Mayotte.

Comme vous le savez, jamais les relations entre la France et les Comores n’ont été aussi chaotiques, sous prétexte que le Président de la République Nicolas Sarkozy est déterminé à organiser à Mayotte une consultation populaire en vue de transformer l’île en département d’outre-mer, si du moins les Mahorais se prononcent en ce sens le 29 mars 2009.

En conséquence, l’atmosphère entre les deux États est telle que la quatrième rencontre du groupe de travail de haut niveau, qui devait se tenir à Moroni, la capitale des Comores, les 19 et 20 novembre 2008, a été reportée à une date ultérieure. Rappelons que ces rencontres entre les présidents Sarkozy et Sambi devraient aboutir à un accord de coopération bilatérale, signé solennellement en 2009.

Monsieur le ministre, quels sont les moyens budgétaires que votre ministère compte mobiliser en réponse aux inquiétudes des Mahorais ?

Pour ce qui concerne Mayotte, nous avons bien noté que, dans le cadre de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2009, 23,3 millions d’euros sont prévus pour la police nationale et 14 millions pour la gendarmerie nationale. En revanche, aucun crédit, excepté ceux que nous avons adoptés hier, n’est prévu pour les programmes « Aide économique et financière au développement » et « Accueil des étrangers et intégration ».

S’agissant du Fonds de coopération régionale, pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, la part qui reviendrait à Mayotte sur le milliard d’euros prévu pour les quatre départements d’outre-mer et Mayotte ?

Sous le bénéfice de ces observations, je voterai, dans ce projet de loi de finances pour 2009, les crédits affectés à la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Madame la présidente, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de répondre à votre invitation et de vous présenter, pour la deuxième année consécutive, le budget du ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire.

Je voudrais tout d’abord, et chacun dans cet hémicycle le comprendra, remercier l’ancien rapporteur spécial, André Ferrand, qui a suivi ces questions tout au long de l’année 2008. À son initiative, vous aviez, l’année dernière, demandé au Gouvernement de publier un document de politique transversale consacré à l’immigration et à l’intégration. C’est chose faite.

Par ailleurs, en juin dernier, André Ferrand a présenté à la commission des finances un rapport consacré aux difficultés et aux enjeux de la réforme de l’immigration professionnelle, dont j’ai décidé de suivre l’essentiel des recommandations dans le cadre de la création, en 2009, de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. J’aurai l’occasion d’y revenir.

Naturellement, je voudrais également saluer les travaux menés cette année par les rapporteurs des différentes commissions.

Après le renouvellement partiel du Sénat, la commission des finances a choisi de confier à Pierre Bernard-Reymond le rapport spécial sur la mission « Immigration, asile et intégration ». Ce choix a permis qu’un travail tout aussi constructif que celui réalisé l’année dernière soit accompli. J’annonce d’ailleurs dès maintenant que le Gouvernement émettra un avis favorable sur les amendements présentés par la commission des finances.

La commission des affaires étrangères a dû, elle aussi, choisir en son sein un nouveau rapporteur, M. Trillard, après la décision de Jean-Guy Branger de ne pas solliciter un nouveau mandat. Je tiens à féliciter André Trillard pour son travail de qualité, qui a permis à la commission des affaires étrangères d’adopter les crédits de cette mission le 19 novembre dernier.

Enfin, à l’invitation de Jean-Jacques Hyest, j’ai présenté mon projet de budget, le 19 novembre dernier, devant la commission des lois, qui a également donné un avis favorable à l’adoption de mes crédits. Cette approbation doit beaucoup à l’excellent travail fourni par le rapporteur pour avis, François-Noël Buffet.

Avant de répondre aux observations des rapporteurs et aux intervenants, je rappellerai rapidement les enjeux de la mission « Immigration, asile et intégration » pour 2009.

Permettez-moi, tout d’abord, de faire une remarque générale sur l’évolution de ce budget. À l’heure de la réforme de l’État et dans le contexte économique actuel, un bon budget n’est pas nécessairement un budget dont la valeur faciale augmente. On ne peut pas avoir, sans arrêt, les mots de « réforme de l’État » à la bouche, comme un slogan que l’on martèle, et ne jamais agir concrètement pour la réaliser.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il s’agit non pas de dépenser plus, mais de dépenser mieux !

M. Brice Hortefeux, ministre. À condition d’être de bonne foi et bien informé, l’argument qui consiste à affirmer que mon projet de budget pour 2009 accuserait une très légère baisse n’est pas recevable. Mais il est vrai que l’on peut être bien informé et de mauvaise foi, voire de mauvaise foi et mal informé, si l’on cumule ! (M. Charles Pasqua sourit.)

Il n’en demeure pas moins qu’un bon budget, encore une fois, c’est un budget qui se veut efficace, et non un budget qui augmente systématiquement. C’est dans ce sens que nous travaillons.

En l’occurrence, ce projet de budget me fournit les moyens de mon action, tout particulièrement en matière d’intégration. Mais, puisque cela semble nécessaire, je vais préciser les choses.

Pour la mission « Immigration, asile et intégration », les autorisations d’engagement sont en baisse de 6,9 %, et non de 53 %, comme je l’ai entendu tout à l’heure. Quant aux crédits de paiement, ils diminuent simplement de 5,1 % à périmètre constant

Le projet de budget consacré au programme « Immigration et asile » augmente, lui, de 7,3%, toujours à périmètre constant. Il faut comparer ce qui est comparable !

Ce projet de budget est en réalité marqué par trois évolutions majeures, qui clarifient le champ d’intervention du ministère par rapport aux trois autres acteurs que sont le Conseil d’État, le secrétariat d’État à la ville et l’ANAEM, sans diminuer pour autant les capacités d’action et les budgets effectivement consacrés aux politiques publiques que je pilote.

De quoi s’agit-il ?

Premièrement, un transfert de 17,5 millions d’euros est opéré au profit du programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives », pour assurer la parfaite indépendance fonctionnelle et donc budgétaire de la Cour nationale du droit d’asile, ainsi que je m’y étais engagé devant vous l’année dernière. Nous assumons clairement cette indépendance. Elle sera réalisée !

Deuxièmement, un transfert de 40 millions d’euros est opéré au profit du programme « Politique de la ville ». Sur ce point, que de mauvaise foi dans vos propos, madame Boumediene-Thiery ! Mais il est vrai que vous êtes à court d’arguments ! (Sourires.)

J’ai dit à la commission des lois, mais peut-être me suis-je mal exprimé, que je souhaitais un partage clair des responsabilités entre mon ministère et le secrétariat d’État à la ville. Ceux qui ont exercé des responsabilités gouvernementales savent qu’il n’y a rien de pire que l’empiétement des compétences entre plusieurs ministères. Nous en avons discuté franchement avec Fadela Amara, et la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville m’a dit qu’elle avait besoin de 48 millions d’euros pour mener à bien sa politique. J’ai considéré que 40 millions d’euros suffiraient, somme que j’ai donc transférée à la politique de la ville. Je n’ai rien à cacher. Je recherche simplement l’efficacité, loin des histoires de jalousie ou de préséances.

Évidemment, vous pouvez dire ensuite que le budget de mon ministère diminue. En réalité, ces sommes n’ont pas disparu ; elles sont juste différemment et mieux partagées !

Enfin, troisièmement, s’agissant du choix de recourir à des ressources extrabudgétaires pour financer le programme « Intégration et accès à la nationalité française », il est vrai que nous avons choisi de réduire fortement la subvention budgétaire versée à l’ANAEM. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous avons constaté que le fonds de roulement de cette agence était très important et que les taxes qui lui sont affectées avaient été réformées, ce qui lui procurera 20 millions d’euros de recettes supplémentaires l’année prochaine. Ce sont autant de crédits qui ne sont pas inscrits au programme « Intégration et accès à la nationalité française » du ministère, mais qui seront mobilisés pour l’intégration des étrangers légaux.

Pour conclure sur cet aspect, et pour dissiper tout malentendu, la capacité d’action en propre de mon ministère en matière d’intégration sera, en 2009, comprise entre 76 et 77 millions d’euros, c’est-à-dire globalement équivalente à ce qu’elle était en 2008.

Cela étant dit, nous allons concentrer notre action sur quatre priorités.

Notre première priorité consiste à conforter notre nouvelle politique d’immigration.

À cette fin, nous allons, tout d’abord, poursuivre notre effort de promotion de l’immigration professionnelle, en tenant compte naturellement de la situation économique et des évolutions des besoins en matière d’emploi.

M. Richard Yung. Seules 160 cartes « compétences et talents » ont été délivrées !

M. Brice Hortefeux, ministre. Si cela ne vous plaît pas, je vous suggère d’en débattre directement, au sein de l’Internationale socialiste, avec les ministres britanniques et espagnols, qui ont sur le sujet des positions bien plus catégoriques et bien plus lapidaires que les miennes ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.- M. Richard Yung s’exclame.)

Nous allons également améliorer l’efficacité de la politique de l’éloignement et financer l’acquisition de matériel biométrique. Les orateurs précédents n’ont pas abordé ce point mais c’est un élément important, la diffusion de ce type de matériel dans les consulats s’inscrivant dans le cadre du développement de l’application Réseau mondial Visa et de la formation des personnels chargés de la délivrance des visas.

Enfin, nous allons renforcer notre partenariat avec les pays d’origine et de transit. En réalité, la plupart des pays d’origine deviennent aujourd’hui des pays de transit. Il nous faut donc renforcer le partenariat avec l’ensemble.

Sept accords ont effectivement été signés. Les perspectives sont encourageantes. Nous avons dans le même esprit des projets d’accord avec l’Égypte – ce pays en ayant lui-même formulé la demande –, Haïti, le Burkina, le Cameroun, les Philippines et, effectivement, le Mali.

Vous avez pris le Mali comme référence, monsieur Yung. Quid du Sénégal ? Les deux principales communautés subsahariennes en France sont originaires du Sénégal et du Mali et nous avons signé un accord avec le Sénégal, sans aucune difficulté, alors que c’est pourtant le pays d’origine de la première communauté subsaharienne sur notre territoire. Pourquoi ne pas le dire aussi ?

M. Richard Yung. Le Mali a refusé !

M. Brice Hortefeux, ministre. C’est totalement faux, monsieur Yung ! Je ne sais où vous avez puisé vos informations.

M. Richard Yung. Dans Le Figaro !

M. Brice Hortefeux, ministre. Certaines choses vous ont visiblement échappé quant à la signature potentielle d’un accord avec le Mali. Mais je ne saurais vous le reprocher, monsieur le sénateur, car vous étiez sans doute trop préoccupé par la vie mouvementée de votre famille politique ! (Rires et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Notre deuxième priorité est la réussite du parcours d’intégration. Nous nous sommes mis d’accord avec Fadela Amara pour que les cinq premières années du séjour régulier en France relèvent de la compétence de mon ministère et les suivantes de celle du secrétariat d’État chargée de la politique de la ville.

Notre troisième priorité est de mieux remplir nos obligations en matière d’asile.

Enfin, notre quatrième et dernière priorité est de poursuivre la modernisation des structures. Mais je crois que, sur ce point, tout a été dit.

Je voudrais maintenant répondre aux différents rapporteurs.

Monsieur le rapporteur spécial, Pierre Bernard-Reymond, avant d’entrer dans le détail de vos principales remarques, je tiens à insister sur la richesse des cinquante-trois pages de votre rapport, ainsi que sur la qualité de votre travail d’analyse et de proposition.

Je vous remercie d’avoir souligné l’ambition de la politique conduite, depuis plus de dix-huit mois, à la demande du Président de la République et sous l’autorité du Premier ministre, dans les domaines de la lutte contre l’immigration clandestine, du contrôle des flux migratoires, du droit d’asile, de l’intégration des étrangers légaux et, enfin, de l’identité nationale.

Plusieurs des orateurs l’ont souligné : nous sommes une « administration d’état-major », selon l’expression employée par le secrétaire général du ministère, Patrick Stefanini.

Nous avons pu, dans des délais resserrés, relever le défi de la présidence de l’Union européenne, comme en témoignent l’adoption, à l’unanimité des Vingt-Sept, du Pacte européen sur l’immigration et l’asile et la tenue de quatre conférences ministérielles.

Il y a un an, ce ministère n’existait pas sur le plan administratif. Il a fallu tout créer, en partageant un certain nombre de compétences avec le ministère de l’intérieur, en recevant des compétences du ministère des affaires sociales. Nous devons remercier le ministère des affaires étrangères d’avoir accepté que les périmètres administratifs soient adaptés aux compétences qui ont été confiées au ministère que je dirige.

Comme vous l’avez observé dans votre rapport, nous avons su, en parallèle, mener à bien l’exercice très exigeant que constitue la révision générale des politiques publiques. Les quatorze mesures qui nous concernent et qui, pour la grande majorité, constituent des réformes structurelles importantes, sont à un stade de mise en œuvre très avancé, ainsi qu’a pu le préciser, hier, en conseil des ministres, mon collègue Éric Woerth. Je pense notamment au système automatisé de contrôle dans les aéroports, qui fera de la France un leader dans le domaine du contrôle biométrique des voyageurs relevant de l’espace Schengen. Vingt-sept sas seront ainsi installés à Roissy et à Orly dès 2009.

J’en viens maintenant à vos principales observations.

En matière d’asile tout d’abord, vous l’avez souligné à juste titre, on constate une inversion de tendance. Après trois années de baisse continue, la demande est repartie à la hausse avec, à la fin du mois d’octobre, une augmentation de 14,7 % des premières demandes.

Je signale au passage que, cette année, les Russes forment le plus gros contingent de demandeurs d’asile, ce qui ne signifie pas, au demeurant, qu’ils constitueront également le plus gros contingent de réfugiés, une fois les demandes examinées. J’ai eu l’occasion de le dire aux ministres russes de l’intérieur et de la justice, qui en ont pris acte.

Cette évolution implique naturellement une forte tension budgétaire sur les dépenses relatives à l’asile pour 2009. Dans votre rapport, vous soulignez à juste titre qu’elles représentent 53,4 % du total des crédits de mon budget. Il nous appartiendra, avec le ministre chargé du budget, de rechercher les solutions les plus adaptées pour faire face à ces dépenses supplémentaires. Mais, d’ores et déjà, je peux vous éclairer sur plusieurs points.

Notre premier objectif, et c’est une préoccupation qui a été exprimée sur plusieurs travées de cette assemblée, consiste à réduire les délais de procédure. Aujourd’hui, le délai moyen est de l’ordre de 17 mois. Nous devons atteindre, fin 2009 ou, plus vraisemblablement, début 2010, une durée globale de 9 mois, comme le préconise d’ailleurs dans son rapport le conseiller d’État Jacky Richard remis en juin dernier au Premier ministre.

Dans cette optique, je vous confirme que la réforme de la Cour nationale du droit d’asile sera mise en œuvre dès 2009, avec la création de dix formations de jugement permanentes présidées par des magistrats professionnels.

Deuxième objectif, nous sommes déterminés à gérer le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile de la manière la plus rigoureuse possible. C’est tout l’objet du contrat d’objectifs et de moyens qui sera très prochainement signé avec l’OFPRA.

D’ailleurs, j’observe que le taux d’occupation des centres d’accueil pour demandeurs d’asile, ou CADA, atteint environ 96 %. Il est donc tout à fait satisfaisant.

En matière d’éloignement, vous avez souhaité, monsieur le rapporteur spécial, que l’aide au retour volontaire soit confortée. Tel est le cas, puisque nous terminerons l’année avec un taux de retours volontaires qui dépassera, je pense, le tiers du nombre total d’éloignements. Je rappelle qu’il y a deux ans, ce taux s’élevait à 7 %. L’évolution est donc particulièrement intéressante. Il s’agit même d’une véritable rupture !

Nous poursuivrons naturellement sur cette voie en 2009 avec l’ANAEM, puis avec l’OFII.

Vous avez estimé le coût d’un éloignement à 20 970 euros. Vous avez d’ailleurs pris la peine de préciser qu’il s’agissait là d’une première estimation provisoire. On oublie toujours de le rappeler. M. Richard Yung aurait dû le faire, car le sujet est sensible, mais il n’en a sans doute pas eu le temps ! Vous n’avez donc absolument pas prétendu que ce montant était définitif, monsieur le rapporteur spécial : toutes ces données méritent d’être affinées.

En tout cas, je vous rejoins sur un point : il nous faut avancer sur ce sujet en nous fondant sur les données disponibles. Je pense particulièrement à celles qui sont présentes dans le nouveau document de politique transversale intitulé Politique française de l’immigration et de l’intégration et issu, je le rappelle, d’un amendement sénatorial adopté lors de l’adoption des crédits pour 2008.

Par conséquent, je saisirai prochainement l’Inspection générale de l’administration, l’IGA, pour que soit calculé le coût de l’éloignement en tenant compte de différentes hypothèses. Je pense, par exemple, que calculer un coût net des dépenses évitées du fait d’une diminution de l’immigration clandestine présenterait un grand intérêt.

En effet, vous savez que, pour la première fois depuis une génération, l’immigration clandestine a diminué d’environ 8 % sur notre territoire. Bien évidemment, s’agissant de l’estimation d’une population de clandestins, ce chiffre n’est pas d’une précision exemplaire, mais la baisse n’est certainement pas inférieure à 6 % et certainement pas supérieure à 10 %. Il s’agit donc d’une tendance forte qu’il nous faut prendre en compte.

En ce qui concerne les politiques d’intégration, nous évoquerons, à l’occasion de l’examen des amendements que la commission des finances a déposés à l’article 62, la situation des taxes de l’ANAEM, la question du coût de l’immigration régulière et les sanctions qui pèsent sur les employeurs d’étrangers en situation irrégulière.

Enfin, monsieur le rapporteur spécial, je vous confirme que je proposerai à l’ANAEM et au futur office, l’OFII, de signer un contrat d’objectifs et de moyens avec l’État.

Je voudrais ensuite remercier le rapporteur pour avis de la commission des lois, François-Noël Buffet, d’avoir souligné que ce nouveau ministère a su s’imposer rapidement dans le paysage ministériel.

Parlant du ministère, vous avez salué, à juste titre, une administration en ordre de marche, le regroupement des services dans des immeubles domaniaux à proximité de mon cabinet en 2009 et, enfin, la clarification de nos relations avec les autres ministères. Sans rentrer dans les détails sur ce dernier point, vous savez très bien que, quand il s’agit de partager les compétences et de déterminer un périmètre, on peut vite susciter des débats.

Vous avez également souligné les effets budgétaires de la hausse de la demande d’asile en rappelant que l’année 2008 avait été marquée par un décret d’avance de 36 millions d’euros afin de faire face aux dépenses d’hébergement d’urgence. C’est vrai : nous avons totalement autofinancé ce décret d’avance sur les crédits de la mission.

J’en viens maintenant à l’aide aux étrangers placés en centre de rétention administrative. Je vous confirme que cette réforme sera conduite à son terme. Rien ne justifie qu’une seule association intervienne, en situation de monopole, au sein des centres de rétention administrative. En tant qu’élu du Rhône, monsieur Buffet, vous savez parfaitement qu’une association importante, et qui n’est pas politiquement proche de nous, est motivée pour participer à une évolution vers plus de diversité et de pluralisme. Je le dis ici : un nouvel appel d’offres sera prochainement lancé à cette fin !

M. Dominique Braye. Si tout le monde était aussi ouvert et pragmatique…

M. Brice Hortefeux, ministre. Vous m’avez posé deux questions, monsieur Buffet.

S’agissant des agents des consulats chargés de la politique des visas, il a été convenu qu’ils continueraient à relever du Quai d’Orsay, ce qui est assez logique. Toutefois, une coordination très étroite est mise en place entre mon ministère et le Quai d’Orsay pour organiser une affectation optimale de ces agents en fonction des priorités de la politique de délivrance des visas.

D’ailleurs, j’ai trouvé très facilement un accord avec Bernard Kouchner sur la liste des postes consulaires, au nombre de 94, qui seront équipés en 2009 pour la délivrance des visas biométriques que j’évoquais précédemment.

S’agissant des aides au retour, vous m’avez interrogé sur les aides au retour autres que l’aide au retour humanitaire. Il en existe deux : l’aide au retour volontaire et l’aide à la réinstallation.

L’aide au retour volontaire, qui a été créée en 2005, puis généralisée, est de 2 000 euros par personne, de 3 500 euros pour un couple et de 1 000 euros par enfant jusqu’au troisième enfant. Ce dispositif me semble relativement bien adapté.

Pour être tout à fait clair, j’ai observé ce qui se faisait dans les autres pays qui proposent une aide au retour volontaire, notamment le Royaume-Uni. Les niveaux de dépense sont équivalents. Je n’ai pas encore les chiffres pour cette année, mais, en 2007, autour de 2 000 personnes ont bénéficié de ce dispositif. Ce n’est pas négligeable.

L’aide à la réinstallation a pour objet d’encourager les migrants à créer une entreprise dans leur pays d’origine. Son montant moyen avoisine 7 100 euros. Hier, au cours du débat sur le programme 301 « Développement solidaire et migrations », Michel Charasse a exprimé le souhait que son montant soit revalorisé et porté à 10 000, voire à 15 000 euros.

Je suis plutôt en accord avec cette proposition. Je ferai donc étudier la possibilité de la mettre en œuvre dès lors qu’il s’agira – un certain nombre d’élus, comme le président Charles Pasqua, connaissent bien le sujet et ont à gérer ce type d’aides dans le cadre de leurs mandats territoriaux – de projets sérieux et participant à la circulation des compétences.

Permettez-moi enfin de répondre aux observations du rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Vous avez signalé dans votre rapport, monsieur Trillard, que les moyens de l’OFPRA vont être confortés. Je précise à ce sujet que le plafond d’emplois du futur office restera stable sur la durée du budget triennal, avec 412 équivalents temps plein.

Par ailleurs, nous augmenterons la subvention pour charge de service public à l’OFPRA en 2009 de 1,5 million d’euros en soutenant l’amendement du rapporteur spécial, ce qui portera la subvention à 30,5 millions d’euros, soit un effort de 5 millions d’euros par rapport à 2008.

Je vous l’ai dit, les moyens d’action en matière de délivrance des visas et de circulation des étrangers vont être renforcés.

L’année 2009 verra l’achèvement des transferts entre le ministère des affaires étrangères et mon ministère. J’ai évoqué, entre autres, le transfert effectué au titre de la biométrie. De même, dix agents de la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France seront transférés du Quai d’Orsay vers mon ministère, qui est désormais en charge de la mise en œuvre opérationnelle de la politique des visas.

Monsieur Yung, il y a un aspect positif dans votre intervention. Vous avez souligné en effet que je ne ménageais pas mes efforts et, à titre personnel, je vous en suis reconnaissant. Mais il faut aller un peu plus loin… Si je ne ménage pas mes efforts, c’est pour mettre en œuvre la politique que les Français ont choisie en 2007. Ce ne sont pas des efforts dispersés : ils répondent, ne l’oublions pas, à la demande de la majorité du peuple français !

M. Alain Gournac. Eh oui ! Les Français ont voté !

M. Brice Hortefeux, ministre. Comment se fait-il que vous soyez très cordial en commission, monsieur le sénateur, mais un peu plus excessif en séance plénière ?...

M. François Marc. L’excès est au pouvoir !

M. Brice Hortefeux, ministre. Il ne faut pas encourager l’excès, c’est maladroit ; il convient au contraire d’être modéré et raisonnable.

Quelle drôle d’idée de parler de « chasse aux étrangers » ! Ce n’est pas le cas ! Quelle drôle d’idée de prétendre que le Gouvernement, en ce qui concerne les éloignements, mène une politique du chiffre ! Il n’en est rien !

M. Brice Hortefeux, ministre. Vous, vous parlez de chiffres. Moi, je veux des résultats.

M. Richard Yung. Un budget, ce sont des chiffres!

M. Brice Hortefeux, ministre. Ne confondez pas chiffres et résultats : ce n’est pas la même chose !

M. Richard Yung. C’est vous qui affichez des chiffres !

M. Brice Hortefeux, ministre. Restez donc sur vos chiffres et je me limiterai aux résultats !

En réalité, notre position est simple, claire et juste. Si vous n’êtes pas d’accord, dites-le ! Dites-le très fort ! Dites-le devant l’opinion publique !

Pour notre part, nous observons trois principes. Premièrement, la France a le droit de choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire. Vous n’êtes pas d’accord ? Dites-le !

Deuxièmement, nous considérons qu’un étranger en situation légale doit avoir, pour l’essentiel, les mêmes droits économiques et sociaux qu’un citoyen français.

Troisièmement, nous estimons qu’un étranger en situation irrégulière est une personne qui a menti sur le motif réel de son entrée sur le territoire – je pense à celle qui a sollicité un visa touristique de trois mois et qui disparaît dans la clandestinité dès qu’elle est sur notre sol - soit qui est venue en France sans demander quoi que ce soit aux autorités.

Au-delà des positions de principe, il faut savoir reconnaître la réalité. Accepteriez-vous qu’on vienne chez vous sans votre autorisation ? (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas aussi simple !

M. Brice Hortefeux, ministre. Pardonnez-moi de le dire, mais ce n’est que justice de constater ces faits et de condamner ceux qui pénètrent dans ces conditions sur notre territoire !

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre. Par ailleurs, sur les accords bilatéraux, je ne vous en fais pas grief, mais vous vous trompez ! Les ratifications ont bien été engagées. Comme vous, je regrette que, pour l’instant, un accord n’ait été entièrement finalisé qu’avec un seul pays.

Mais, les projets de loi ratifiant les accords avec le Bénin, la République du Congo, la Tunisie et le Sénégal sont, en ce moment même, sur le bureau de la Haute Assemblée. Cela doit donc répondre à votre interrogation. De plus, les projets concernant l’Île Maurice et le Cap-Vert – ce dernier accord a été signé il y a huit jours – seront très rapidement transmis au Conseil d’État. Pour ceux-là, la procédure poursuit un rythme tout à fait normal.

Quant au Mali,…

M. Brice Hortefeux, ministre. … le pays se trouve dans une situation identique à celle du Sénégal et a une taille comparable. Or je vous ai bien dit que nous avions déjà signé avec le Sénégal.

J’ai indiqué aux représentants du Mali que nous signerions au moment et selon les modalités qu’ils souhaiteraient. Ils voulaient procéder à cette signature pendant la conférence euro-africaine sur les migrations et le développement. Là encore, je ne vous en tiens pas rigueur, mais vous n’avez pas tout suivi, monsieur Yung. J’ai rencontré les autorités maliennes, notamment le ministre des affaires étrangères – j’avais vu le président Amadou Touré précédemment – et ces autorités ont annoncé très clairement et publiquement qu’il n’y avait aucun problème technique. Il ne reste qu’un dossier à traiter et j’espère qu’il évoluera assez rapidement, celui du retour des vieux travailleurs maliens.

Pour ne pas gêner les autorités maliennes, je ne veux pas rentrer dans les détails. Peut-être avez-vous également eu connaissance de problèmes concernant des retours d’immigrés maliens, non pas du continent européen, mais en provenance d’autres pays du continent africain… Je ne m’étends pas plus sur ce sujet, mais je suis prêt à vous transmettre les articles de presse qui en font état.

Donc, vraiment, nous ne rencontrons aucune difficulté particulière. N’hésitez pas à interroger le ministre des affaires étrangères du Mali sur ce point !

Concernant la CIMADE et les centres de rétention administrative, je ne vais pas redire tout ce que j’ai dit devant la commission, encore que, mon intervention n’ayant visiblement servi à rien, je serais assez disposé à recommencer. (Sourires.)

M. Henri de Raincourt. C’est cela, la pédagogie !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je vous rappelle simplement que, selon tous les experts, la seule procédure possible est, ici, celle d’un marché de prestation de services, c’est-à-dire d’un marché public. Une autre possibilité serait peut-être envisageable, mais, en réalité, cette procédure-là nous est imposée, à vous comme à moi.

Par ailleurs, un point est intéressant à relever dans notre raisonnement. J’ai décidé de mettre fin à une situation de monopole de fait. Pour autant, vous ne m’avez jamais entendu mettre en cause le sérieux et l’honnêteté de la démarche de la CIMADE. Je reçois régulièrement ses responsables. Dire qu’ils ne sont pas totalement d’accord avec la politique que je mène est un euphémisme, mais ce n’est pas pour cela que nous ne les retenons pas.

M. Richard Yung. Un peu quand même !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je vais vous en faire la démonstration.

Nous avons lancé un appel d’offres qui a effectivement été remis en cause, mais – je l’ai dit très clairement – il n’est pas question pour nous de renoncer. Nous préparons donc un nouvel appel d’offres en tenant compte des remarques qui ont été formulées, non pas par le Conseil d’État, comme cela a été indiqué, mais par un juge du tribunal administratif.

Toutefois, la CIMADE n’a pas été la seule association à répondre au premier appel d’offres qui a été annulé. Comment peut-on parler de monopole quand six associations ont participé au premier appel d’offres ?

Ces six associations sont, je vous le rappelle, le Collectif Respect, l’Association service social familial migrants, l’ASSFAM, le Forum réfugiés, France Terre d’Asile et l’Ordre de Malte.

Mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, ne nous y trompons pas : la plupart de ces associations ne partagent pas les objectifs de la politique gouvernementale. Mais cela n’a aucune importance !

M. Dominique Braye. Absolument !

M. Brice Hortefeux, ministre. Sachons promouvoir la diversité et pratiquons l’ouverture !

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, tâchez de vous inspirer de notre exemple, dans ce domaine comme dans d’autres ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Gournac. Eh oui ! Soyez ouverts, à gauche !

M. Brice Hortefeux, ministre. Ce serait bénéfique ! Nous ne sommes pas, nous, frileusement repliés sur des postures idéologiques ! Nous souhaitons simplement que les dispositifs fonctionnent, en toute transparence.

M. Dominique Braye. Soyez ouverts, chers collègues de l’opposition ! Comme Bernard Kouchner !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je préfère la diversité au monopole !

J’espère, cette fois-ci, avoir été entendu, mesdames, messieurs les sénateurs !

Madame Assassi, je vous écoute toujours avec attention avec la ferme volonté de toujours chercher à comprendre vos arguments. Dans le cas présent, je trouve que vous adoptez des postures bien idéologiques.

Oui, la présidence française de l’Union européenne a été un grand succès. Parlez-en entre vous ! Interrogez votre camarade, le ministre chypriote de l’intérieur, Neoklis Sylikiotis, permanent du parti communiste chypriote : c’est le plus enthousiaste, le plus allant, le plus élogieux de tous à l’égard du pacte européen ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Dominique Braye. Chez nous, le PC n’existe plus !

M. Brice Hortefeux, ministre. Vous avez du mal à vous mettre d’accord entre vous en France, mais vos relations avec les partis frères m’ont l’air encore plus compliquées ! (Vives protestations sur les mêmes travées.)

Mme Éliane Assassi. « Soyez ouverts », avez-vous dit …

M. Brice Hortefeux, ministre. Pourquoi votre camarade chypriote soutient-il ce pacte, adopté à l’unanimité ?

M. Dominique Braye. Parce qu’il est intelligent, lui !

M. Brice Hortefeux, ministre. Il a parfaitement compris que nous sommes parvenus à un point d’équilibre en évitant deux écueils : d’un côté, l’Europe bunker, et donc la France bunker, et, de l’autre côté, l’Europe passoire, et donc la France passoire.

Comment expliquez-vous que les sociaux-démocrates allemands, que les travaillistes britanniques, que les communistes chypriotes, que tous aient approuvé ce pacte avec un enthousiasme presque identique ?

M. Dominique Braye. Ce sont tous des gens raisonnables, tout simplement !

M. Brice Hortefeux, ministre. Comment pouvez-vous penser avoir raison seuls contre tous, y compris contre vos propres amis ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

À l’évidence, vous ne faites pas preuve d’humilité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Dominique Braye. Quelle démonstration !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je n’ai pas tout compris de vos propos sur le codéveloppement. Néanmoins, nous pourrons nous en entretenir tous les deux.

Mme Éliane Assassi. Parlez des Comores !

M. Brice Hortefeux, ministre. Il est inexact de parler d’instrumentalisation ; notre volonté est simplement d’aider les pays terres d’émigration.

S’agissant des centres de rétention administrative, je vous renvoie, cette fois-ci, non pas aux communistes chypriotes, mais au député communiste Patrick Braouezec. Tandis que vous condamnez les CRA et les considérez comme inacceptables, lui, sur France Inter, a expliqué qu’ils étaient un moindre mal par rapport à la prison. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Discutez-en entre vous !

M. Dominique Braye. Mettez-vous d’accord !

M. Brice Hortefeux, ministre. Quant à la transparence, permettez-moi de sourire : qui a créé le Contrôleur général des lieux privatifs de liberté ? Votre majorité ? Pas du tout !

Mme Éliane Assassi. C’est l’Europe qui l’a imposé !

Mme Alima Boumediene-Thiery. C’est une obligation européenne !

M. Brice Hortefeux, ministre. Nous seuls avons fait progresser la transparence !

Et mettez-vous aussi d’accord avec Harlem Désir, qui explique précisément sur son blog que la CIMADE dans les centres de rétention était dépassée par la tâche. Soyez cohérents !

M. Richard Yung. Cela n’a rien à voir ! C’est du baratin !

Mme Éliane Assassi. Arrêtez ce baratin !

M. Brice Hortefeux, ministre. Vous avez cité un chiffre concernant le nombre d’éloignements. Soyons précis, je n’ai annoncé, à ce jour, aucun objectif chiffré pour l’année 2009. Les chiffres dont il est fait mention dans les documents budgétaires n’ont qu’une portée technique, comme c’était le cas l’année dernière.

Monsieur Dominati, je vous remercie de votre soutien. Vous avez souligné à la fois la dimension européenne de l’action que je mène et la part qu’a prise l’immigration professionnelle, à laquelle le Président de la République attache une grande importance.

Je vous remercie aussi d’avoir signalé que mon ministère a été lauréat d’une des Victoires de la modernisation de l’État.

Madame Escoffier, je rends hommage, moi aussi, à la mémoire de Jacques Pelletier. L’année dernière, j’avais travaillé avec lui sur l’amélioration des outils d’aide à l’épargne des migrants. La situation en la matière n’est pas entièrement satisfaisante, mais ce n’est pas une raison pour renoncer. En cas d’échec, nous trouverons une autre solution.

Vous avez cité notre devise républicaine. Les migrants ne peuvent comprendre les valeurs de notre République qu’à la condition de les connaître. Selon moi, et peut-être en serez-vous d’accord, madame la sénatrice, on ne respecte que ce que l’on comprend. Par conséquent, si l’on explique les valeurs de la République et les valeurs de notre société, je suis certain qu’elles seront mieux comprises.

Vous m’invitez à accorder une plus grande attention aux situations humanitaires. C’est précisément ce à quoi je m’emploie.

Avant d’être élue sénatrice, en septembre dernier, ce dont je vous félicite, vous apparteniez au corps préfectoral. Sachez que, voici dix jours, j’ai adressé une circulaire à l’ensemble des préfets pour leur demander de mettre fin, dans les préfectures, aux situations que vous avez décrites. Je réponds très exactement à votre préoccupation.

Vous avez évoqué la nécessaire amélioration de l’accueil des primo-arrivants. À cette fin, j’ai décidé de fusionner le visa de long séjour et le titre de séjour, ce qui est un utile progrès.

En outre, j’ai indiqué quels étaient les critères de régularisation des clandestins. Je suis satisfait que vous demandiez qu’il soit procédé au cas par cas, puisque c’est exactement ainsi que les services procèdent. En Île-de-France, 1 000 personnes ont été régularisées après un examen individuel de leur situation. D’ailleurs, un syndicat qui n’approuve pas vraiment l’action que je mène m’en a donné clairement acte.

Madame Boumediene-Thiery, comme je vous l’ai dit, les crédits de l’action relative à l’accueil, à l’intégration des étrangers primo-arrivants et à l’apprentissage de la langue française, d’un montant de 40 millions d’euros, ont fait l’objet d’un transfert budgétaire. Ces fonds n’ont donc pas disparu.

Vous m’accusez de ne pas respecter le droit. Précisément, la Cour nationale du droit d’asile disposera désormais d’un budget autonome. Vous devriez saluer cette avancée et vous en réjouir en affichant le même sourire que celui avec lequel vous avez prononcé votre discours tout à l’heure à la tribune !

S’agissant de l’accueil des familles dans les centres de rétention administrative, certains m’ont reproché d’avoir tenu des propos quelque peu populistes. Sans doute ai-je été un peu rapide, mais vous, si l’on vous suit dans votre logique, que proposez-vous sinon de séparer les enfants de leurs parents ? (Mme Alima Boumediene-Thiery fait des signes de dénégation.) Attention, mesdames, messieurs les sénateurs, lorsque vous parlez, comme ici, des enfants : au-delà des postures idéologiques, il faut savoir considérer les conséquences concrètes de ce que l’on propose. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Madame Boumediene-Thiery, vous le savez, je vous apprécie, j’écoute ce que vous dites. Mais, lorsque vous me reprochez d’interdire aux associations de rendre des rapports publics, permettez-moi de vous dire que vous êtes complètement à côté du sujet !

J’ai écrit à toutes ces associations pour leur expliquer que, concernant leur présence dans les centres de rétention administrative, et conformément au marché public, elles ont naturellement le droit de rendre publics leurs rapports et de saisir l’opinion de situations individuelles, dès lors que les personnes concernées en sont d’accord. Je l’ai dit et écrit, mais peut-être ai-je commis l’erreur de ne pas vous l’écrire à vous…Non, madame Boumediene-Thiery, je suis trop attentif à la liberté d’expression pour que vous puissiez me faire ce reproche.

Monsieur Ibrahim Ramadani, vous évoquez la pression migratoire que subit Mayotte. Sachez que c’est une préoccupation majeure pour le ministre que je suis.

Je ne me suis pas rendu sur votre île ; en revanche, je me suis rendu en Guyane, dont la situation présente bien des analogies. Des efforts, certes insuffisants, ont été engagés, comme l’installation du troisième radar, que vous avez évoqué. Avec un léger retard, celui-ci est devenu opérationnel en juillet dernier.

Désormais, les forces de gendarmerie et les douanes coordonnent mieux leurs moyens nautiques. Nous avons obtenu des résultats, vous l’avez dit, mais il faut continuer de se battre et d’expliquer notre action.

À ce jour, depuis le 1er janvier 2008, 225 kwassas-kwassas ont été interceptés. Ce matin encore, à cinq heures, un bateau a été pris avec seize personnes à bord, dont quatre femmes et deux enfants. Personne ne peut ignorer les drames humains que révèlent ces situations.

Concernant le centre de rétention de Pamandzi, je proposerai dans les prochains jours de porter sa capacité d’accueil de 60 à 140 places. Les travaux devraient être achevés au cours du premier semestre de 2011.

Mesdames, messieurs les sénateurs, chacun évoque à son tour l’opinion publique. Sachez qu’elle comprend, approuve et soutient une politique à la fois équilibrée, cohérente et juste. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP. -M. Jean Boyer applaudit également.)

Mme Éliane Assassi. Non !

immigration, asile et intégration

Immigration, asile et intégration
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 62

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B.

État B

(En euros)

Immigration, asile et intégration

507 846 928

510 646 928

Immigration et asile

433 238 836

436 038 836

Dont titre 2

35 978 419

35 978 419

Intégration et accès à la nationalité française

74 608 092

74 608 092

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° II-190, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :

I. Créer le programme : « Garantie de l'exercice du droit d'asile »

II. Rédiger comme suit l'intitulé du programme 303 « Immigration et asile » :

Immigration

III. En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Immigration Dont Titre 2

287 600 000

287 600 000

Garantie de l'exercice du droit d'asile

287 600 000

287 600 000

Intégration et accès à la nationalité française

TOTAL

287 600 000

287 600 000

287 600 000

287 600 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Les programmes des missions sont bien sûr des unités de gestion mais aussi le support d'une politique cohérente et visible. Or le programme 303 «  Immigration et asile » regroupe les actions « Circulation des étrangers et politique des visas », « Garantie de l’exercice du droit d’asile », que M. le ministre a largement évoquée, « Lutte contre l’immigration irrégulière » et, bien entendu, l’action de « Soutien ».

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’action « Garantie de l’exercice du droit d’asile », qui représente la plus grande partie des crédits de ce programme, n’apparaît pas de façon suffisamment claire.

Aussi, je propose que lui soit consacré un programme, afin de rendre bien plus lisible l’action politique du Gouvernement. Dans ce but, cet amendement a pour objet de créer un programme spécifique et d’y transférer les crédits afférents.

Monsieur le ministre, en mettant l’accent sur la politique de votre ministère, cet amendement apporterait une importante clarification sur le plan politique.

Je remercie Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial, de m’avoir laissé présenter cet amendement, que la commission a approuvé.

M. Charles Pasqua. Très bien !

Mme la présidente. L'amendement n° II-9 rectifié, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Immigration et asile Dont Titre 2

1.500.000

1.500.000

Intégration et accès à la nationalité françaiseDont titre 2

1.500.000

1.500.000

TOTAL

1.500.000

1.500.000

1.500.000

1.500.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-190.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Effectivement, compte tenu de son propre amendement, la commission ne peut qu’approuver la proposition de notre collègue Adrien Gouteyron qui souhaite identifier clairement la politique du Gouvernement en matière d’asile, afin d’éviter que certains ne l’amalgament avec d’autres aspects de sa politique d’immigration dans le but d’occulter les efforts qu’il accomplit dans ce domaine. Ce souci de clarté et de vérité me paraît tout à fait positif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Monsieur Gouteyron, je crains fort qu’il ne soit difficile de mettre en œuvre votre proposition en 2009. Sur le fond, je suis favorable à une évolution, sous réserve que le ministère du budget partage ce sentiment. Or vous savez combien il est réservé sur l’évolution des maquettes budgétaires…

Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. Au risque de vous surprendre, je considère que la proposition de notre collègue Adrien Gouteyron de distinguer les crédits du droit d’asile pour les faire mieux ressortir est une bonne initiative.

Chers collègues de la majorité, il s’en trouve parmi vous pour insinuer que certains instrumentaliseraient le débat budgétaire. Je ne vois pas à qui ils font allusion.

M. Charles Pasqua. Ce n’est pas vous qui étiez visé, mon cher collègue !

M. Richard Yung. En tout cas, il faudrait que la proposition de notre collègue soit mise en œuvre dans le prochain projet de loi de finances.

Mme la présidente. La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Je me réjouis des propos qui viennent d’être tenus par M. le ministre et par nos collègues.

Monsieur le ministre, si vous le souhaitez, je suis prêt à prendre en compte la remarque que vous avez formulée sur la date d’entrée en vigueur du dispositif. En effet, si nous décidons de procéder à un tel transfert dès 2009, cela risque de poser des problèmes que je qualifierai de « pratiques ».

Aussi, je suggère, et je ne pense pas ce faisant trahir l’esprit de la commission des finances – M. le président de la commission des finances pourra s’exprimer –, de rectifier de manière substantielle mon amendement, afin de créer le nouveau programme dès maintenant tout en attendant l’an prochain pour transférer les crédits.

La rectification serait relativement simple, et la rédaction de l’article très facile à comprendre. Il s’agirait d’ajouter les mots : « À compter du projet de loi de finances initial pour 2010, créer le programme : “Garantie de l’exercice du droit d’asile”. »

À mon sens, avec une telle rédaction, nous tenons compte de l’intention politique, qui est importante – encore une fois, je me réjouis de la position adoptée par notre collègue Richard Yung – et des difficultés pratiques qu’il y aurait à mettre en œuvre le nouveau dispositif dès 2009.

Monsieur le ministre, j’imagine que le Gouvernement maintiendrait son avis de sagesse si cette rédaction était retenue.

M. Brice Hortefeux, ministre. Absolument !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais tout d’abord me réjouir de la convergence de vues entre M. le ministre et notre collègue Adrien Gouteyron, par ailleurs rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l’État », qui a particulièrement suivi ces questions lorsqu’elles relevaient du ministère des affaires étrangères. Il a des convictions très fortes sur le sujet, et il les exprime en proposant la création du programme : « Garantie de l’exercice du droit d’asile ».

Pour ma part, je serais plutôt tenté de demander au Sénat d’adopter l’amendement d’Adrien Gouteyron dans sa rédaction initiale. En effet, comme la commission mixte paritaire doit se réunir dans deux semaines, nous verrons à ce moment-là, en fonction des observations qui auront été formulées par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, si nous devons valider ce dispositif ou non.

Je vous fais donc une proposition. Si l’amendement n° II-190, sur lequel le Gouvernement a émis un avis de sagesse, est maintenu dans sa rédaction actuelle, la commission transformera son amendement n° II-9 rectifié en sous-amendement, afin d’ajouter 1,5 million d’euros de crédits au nouveau programme : « Garantie de l’exercice du droit d’asile ». Je me tourne donc vers notre collègue Adrien Gouteyron pour lui suggérer de ne pas rectifier son amendement. (M. Adrien Gouteyron acquiesce.)

Comme je siégerai au sein de la commission mixte paritaire – la commission des finances a désigné ses représentants ce matin –, je m’engage, en relation très étroite avec Adrien Gouteyron et Pierre Bernard-Reymond, à faire ce qu’il convient pour que le Gouvernement ne soit pas gêné dans la conduite de sa politique.

Mme la présidente. Qu’en est-il en définitive de votre amendement, monsieur Gouteyron ?

M. Adrien Gouteyron. Madame la présidente, compte tenu de la proposition que M. le président de la commission des finances vient de formuler et des engagements qu’il a pris, je maintiens l’amendement n° II-190 dans sa rédaction initiale.

Ainsi, les choses seront plus simples et les éventuels problèmes techniques ou pratiques seront pris en compte par la commission mixte paritaire.

M. Charles Pasqua. Très bien !

Mme la présidente. Je suis saisie d’un sous-amendement n° II-9 rectifié bis, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

Dans le tableau constituant le second alinéa du III de l'amendement n° II-190 :

Ajouter 1 500 000 euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au programme « Garantie de l'exercice du droit d'asile ».

Retirer 1 500 000 euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au programme « Intégration et accès à la nationalité française ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Ce sous-amendement vise à augmenter de 1,5 million d’euros les crédits affectés à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, afin de lui permettre de faire face au surcroît de demandes d’asile constaté en 2008.

En outre, ces moyens supplémentaires sont destinés à permettre à l’OFPRA de réduire les délais d’instruction des demandes d’asile, tout en maintenant la qualité de traitement des dossiers.

Ces crédits supplémentaires sont prélevés sur le fonds de roulement de l’ANAEM, ce qui paraît tout à fait possible. En effet, l’objet de cette agence n’est pas d’aider les travailleurs français à s’expatrier ou les Français établis hors de France à trouver un emploi, missions qui peuvent très bien être remplies par l’ANPE, par la Maison des Français de l’étranger ou par les consulats.

En l’occurrence, il s’agit tout de même de 29 emplois qui pourront être utilisés beaucoup plus utilement ailleurs.

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. Madame la présidente, je dois dire que je suis un peu ennuyé.

Comme je l’ai souligné voilà quelques instants, je suis favorable à l’amendement n° II-190, qui vise à la création du programme : « Garantie de l’exercice du droit d’asile ». En revanche, je suis farouchement opposé au fait de prélever 1,5 million d’euros sur les crédits affectés à l’ANAEM, ce qui revient à déshabiller Pierre pour habiller Paul, au détriment des Français établis hors de France.

Contrairement à ce qui a été affirmé – peut-être M. le rapporteur ne connaît-il pas le dossier dans sa totalité –, les crédits de formation pour les Français établis hors de France ont déjà été réduits de moitié. Par conséquent, nous ne pouvons pas soutenir une diminution supplémentaire de 1,5 million d’euros des crédits de l’ANAEM.

En d’autres termes, si les dispositifs de l’amendement n° II-190 et du sous-amendement n° II-9 rectifié bis doivent être fusionnés, je serai au regret de devoir voter contre.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-9 rectifié bis.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-190, modifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

(Ces crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les articles 62 et 63, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Immigration, asile et intégration

Article 35 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 63 (début)

Article 62

I. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Dispositions fiscales

« Art. L. 311-13 A.  La délivrance d’un premier titre de séjour figurant parmi ceux mentionnés aux 1° à 3° de l’article L. 311-2 donne lieu à la perception, au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou de l’établissement public appelé à lui succéder, d’une taxe dont le montant est fixé par décret entre 200 € et 340 €. Ces limites sont respectivement ramenées à 55 € et 70 € pour les étrangers auxquels est délivrée une carte de séjour au titre des articles L. 313-7 et L. 313-7-1, du 9° de l’article L. 313-11, du 3° de l’article L. 314-11, ainsi que la carte de séjour portant la mention “salarié” ou “salarié en mission” prévue aux 1° et 5° de l’article L. 313-10. Elles sont ramenées à 100 € et 170 € pour les étrangers entrés en France au titre du regroupement familial en tant qu’enfants mineurs.

« Ces dispositions ne sont pas applicables aux étrangers qui sollicitent un titre de séjour au titre des 10° et 11° de l’article L. 313-11, de l’article L. 313-13 et des 4°, 5°, 6°, 8° et 9° de l’article L. 314-11 ni aux travailleurs temporaires et saisonniers mentionnés aux 1° et 4° de l’article L. 313-10. La délivrance d’un visa de long séjour valant ou dispensant de titre de séjour donne lieu, outre les droits de visa prévus par la réglementation en vigueur, à la perception, au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou de l’établissement public appelé à lui succéder, de la taxe correspondant au titre de séjour que ce visa remplace.

« B. – Le renouvellement des titres de séjour ainsi que la fourniture de duplicata donnent lieu à la perception, au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou de l’établissement public appelé à lui succéder, d’une taxe dont le montant est fixé par décret entre un minimum égal à 55 € et un maximum égal à 110 €. Ces limites sont respectivement ramenées à 15 € et 30 € pour les étrangers auxquels est délivrée une carte de séjour au titre de l’article L. 313-7. La taxe de renouvellement n’est acquittée qu’une fois par période d’un an. Elle n’est pas exigée des réfugiés et des étrangers bénéficiaires de la protection subsidiaire.

« C. – La délivrance, le renouvellement et la fourniture de duplicata des documents de circulation délivrés aux étrangers mineurs au titre des articles L. 321-3 et L. 321-4 donnent lieu à la perception, au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou de l’établissement public appelé à lui succéder, d’une taxe dont le montant est de 30 €.

« D. – Les taxes prévues aux A, B et C  sont acquittées soit au moyen de timbres mobiles d’un modèle spécial à l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou à l’établissement public appelé à lui succéder, soit par la voie électronique au moyen d’un timbre dématérialisé, dans les conditions prévues au chapitre II du titre IV de la première partie du livre Ier du code général des impôts.

« E. – Les modalités d’application du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par décret.

« Art. L. 311-14. – L’article L. 311-13 est applicable à la délivrance, au renouvellement et à la fourniture de duplicata des titres de séjour et des documents de circulation pour étrangers mineurs prévus par les traités ou accords internationaux, sauf stipulations contraires prévues par ces traités ou accords.

« Art. L. 311-15. – Tout employeur qui embauche un travailleur étranger acquitte, lors de la première entrée en France de cet étranger ou lors de sa première admission au séjour en qualité de salarié, une taxe au profit de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou de l’établissement public appelé à lui succéder.

« Lorsque l’embauche intervient pour une durée supérieure ou égale à douze mois, le montant de cette taxe est de :

« –  900 € lorsque le salaire versé à ce travailleur étranger est inférieur ou égal à une fois et demie le montant mensuel à temps plein du salaire minimum de croissance ;

« –  1 600 € lorsque le salaire versé à ce travailleur étranger est supérieur à une fois et demie le montant mensuel à temps plein du salaire minimum de croissance.

« Lorsque l’embauche intervient pour un emploi temporaire d’une durée supérieure à trois mois et inférieure à douze mois, le montant de cette taxe, fixé par décret, varie selon le niveau du salaire dans des limites comprises entre 50 € et 300 €.

« Lorsque l’embauche intervient pour un emploi à caractère saisonnier, le montant de cette taxe est modulé selon la durée de l’embauche à raison de 50 € par mois d’activité salariée complet ou incomplet. Chaque embauche donne lieu à l’acquittement de la taxe.

« La taxe prévue au présent article est perçue comme en matière de recettes des établissements publics nationaux à caractère administratif.

« Les modalités d’application du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par décret. »

II. – La sixième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 311-9 du même code est ainsi rédigée :

« Toutes ces formations et prestations sont dispensées gratuitement et financées par l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations ou par l’établissement public appelé à lui succéder. »

III. – La section 4 du chapitre III du titre III de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts et l’article L. 5221-10 du code du travail sont abrogés.

IV. – Le premier alinéa de l’article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile n’est pas applicable avant le 31 décembre 2011 aux conjoints et aux enfants d’étrangers dont la demande de regroupement familial a été autorisée avant la publication de la présente loi et ayant acquitté à ce titre la redevance prévue par la réglementation en vigueur.

V. – L’article L. 311-15 du même code s’applique aux demandes d’autorisation de travail présentées par l’employeur postérieurement à la publication de la présente loi.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-186, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Sous couvert de simplifier le régime des taxes affectées à l’ANAEM, le Gouvernement a décidé de supprimer un certain nombre d’exonérations dont bénéficient les étrangers dans le cadre du regroupement familial, les étudiants, les salariés, les retraités, ainsi que les étrangers titulaires d’une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle avec plus de 20 % d’incapacité permanente.

Alors que le rendement de ces redevances perçues par l’ANAEM a atteint 90 millions d’euros en 2008, au lieu des 72 millions d’euros prévus par la loi du 24 décembre 2007 de finances pour 2008, il nous semble inacceptable de supprimer des exonérations et d’augmenter le montant des redevances pour financer l’aide au retour des étrangers en situation irrégulière.

Mme la présidente. L'amendement n° II-17 rectifié, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2010, le montant de cette taxe est égal à 60 pour cent du salaire versé à ce travailleur étranger, pris en compte dans la limite de 2,5 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance.

L'amendement n° II-28 rectifié, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

I bis. - Les montants prévus aux articles L. 311-13 et L. 311-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont revalorisés tous les trois ans dans la même proportion que l'évolution des prix à la consommation constatée sur la période et arrondis à l'unité supérieure. Il en est de même pour les montants prévus à l'article L. 311-15 au titre de l'embauche pour un emploi temporaire ou saisonnier. La revalorisation triennale prend effet au premier janvier de l'année concernée. 

L'amendement n° II-32, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

I ter.- L'article L. 8253-1 du code du travail est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « ou de l'établissement public appelé à lui succéder » ;

2° Dans la seconde phrase, le montant : « 500 fois » est remplacé par le montant : « 1 000 fois ».

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter ces trois amendements et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-186.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. L’amendement n° II-17 rectifié concerne la taxe versée par l’employeur au titre de l’embauche d’un travailleur étranger, taxe qui se compose de deux paliers de taxation et comporte un effet de seuil important, à 1,5 SMIC.

Nous avons donc voulu lisser cet effet de seuil. Je vous propose donc de substituer à ce système un taux proportionnel à hauteur de 60 % du salaire, dans la limite toutefois de 2,5 SMIC, afin de ne pas dissuader les employeurs d’embaucher des travailleurs qualifiés.

L’amendement n° 28 rectifié porte sur les droits de timbre, qui présentent généralement le défaut d’être très rarement actualisés. Dès lors, les tarifs sont tout à fait archaïques, sans rapport avec les politiques menées par les organismes qui en bénéficient. Et, lorsque l’on s’en aperçoit, la revalorisation est souvent brutale.

C'est la raison pour laquelle je propose d’indexer sur l’inflation les montants des droits de timbre applicables aux personnes étrangères. La revalorisation pourrait être périodique et je suggère qu’elle ait lieu tous les trois ans.

L’amendement n° II-32 vise à modifier le régime des sanctions applicables aux employeurs ayant embauché des travailleurs étrangers qui n’étaient pas munis du titre les autorisant à exercer une activité salariée.

Actuellement, un employeur condamné pour cette raison doit verser 1 655 euros, montant qui n’est pas très différent de celui dont doit s’acquitter un employeur ayant respecté la loi : entre 900 et 1 600 euros.

Cette situation me semble injuste pour les employeurs respectueux de la loi. Je propose donc de doubler le montant dû par l’employeur indélicat.

Par ailleurs, cette contribution a longtemps été mal recouvrée. En 2007, le législateur a donné de nouveaux moyens à l’administration des finances pour en améliorer la perception. Je serai que vous puissiez nous indiquer si cette disposition a été suivie d’effets, monsieur le ministre.

J’en viens à l’amendement n° II-186, présenté par Mme Assassi.

Ma chère collègue, le projet de loi de finances que nous examinons depuis plusieurs jours a été élaboré dans une période de crise internationale de première ampleur, et le déficit de l’État sera nécessairement creusé.

Dans ce contexte, je ne crois vraiment pas que nous soyons autorisés à renoncer à des recettes dont l’ANAEM aura besoin pour faire face à l’augmentation de ses missions.

D’ailleurs, tout au long de ce débat, je n’ai entendu que des pleurs.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Ce budget, disait-on, n’était pas suffisant. Et à présent, de manière totalement contradictoire, vous nous demandez de diminuer les recettes.

M. Alain Gournac. C’est incroyable !

Mme Éliane Assassi. C’est une présentation réductrice, monsieur le rapporteur spécial !

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Au demeurant, il me paraît légitime de faire participer celles et ceux qui vont bénéficier de l’accueil de notre pays aux charges que leur arrivée va entraîner.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° II-186.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Madame Assassi, je suis – hélas ! – obligé de vous dire que le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement n° II-186.

La réforme que nous avons mise en place est très cohérente. Elle répond à des principes d’équité, d’efficacité et de transparence. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, elle permettra de doter l’ANAEM de 20 millions d’euros de ressources propres supplémentaires.

En revanche, le Gouvernement émet un avis très favorable sur les trois amendements qui viennent d’être présentés par M. le rapporteur spécial.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-186.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-17 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-28 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-32.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 62, modifié.

(L'article 62 est adopté.)

Article 62
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 63 (interruption de la discussion)

Article 63

Le 1° de l’article L. 5423-9 du code du travail est ainsi rédigé :

« 1° Les demandeurs d’asile qui, à la suite d’une décision de rejet devenue définitive, présentent une demande de réexamen à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, à l’exception des cas humanitaires signalés par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides dans les conditions prévues par voie réglementaire ; ». – (Adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Article 63 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Discussion générale

6

Nomination de membres d'organismes extraparlementaires

Mme la présidente. Je rappelle que les commissions des affaires culturelles, des affaires économiques, des affaires étrangères et des affaires sociales ont proposé des candidatures pour plusieurs organismes extraparlementaires.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :

- MM. Jean-Léonce Dupont et Philippe Adnot, respectivement membre titulaire et membre suppléant du Comité de suivi de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités ;

- MM. Robert Laufoaulu et Michel Magras, membres du Comité national de l’initiative française pour les récifs coralliens ;

- M. Claude Domeizel, membre de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ;

- M. Jean-François Humbert, membre de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques ;

- M. Michel Thiollière, membre du Conseil d’administration de la société France Télévisions ;

- M. David Assouline, membre du Conseil d’administration de la société France 2 ;

- M. Jean-Pierre Plancade, membre du Conseil d’administration de la société France 5 ;

- M. Serge Lagauche, membre du Conseil d’administration de la société Radio-France ;

- M. Jacques Legendre, membre du Conseil d’administration de l’Établissement public du musée du quai Branly ;

- Mme Catherine Dumas, membre du Conseil d’administration du Centre national d’art et de culture Georges Pompidou ;

- M. Jean-Léonce Dupont, membre du Conseil d’administration du Centre national des œuvres universitaires et scolaires ;

- MM. Ambroise Dupont et Jean-Pierre Chauveau, respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil d’administration du conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ;

- M. Yves Dauge, membre du Conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs ;

- Mme Brigitte Gonthier-Maurin et M. Jean-Luc Fichet, respectivement membre titulaire et membre suppléant de l’Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires et d’enseignement supérieur ;

- M. Marc Daunis, membre du Comité consultatif des liaisons aériennes d’aménagement du territoire et membre du Comité consultatif des subventions aux exploitants d’aérodromes ;

- M. Marcel Deneux, membre du Comité de contrôle du Fonds de soutien aux hydrocarbures ou assimilés d’origine nationale ;

- M. Thierry Repentin, membre du Comité de liaison pour l’accessibilité des transports et du cadre bâti ;

- M. Michel Bécot, membre de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages ;

- Mme Odette Herviaux, membre de la Commission supérieure du Crédit maritime mutuel et du Conseil d’administration de l’Agence des aires marines protégées ;

- M. Alain Fouché, membre du Conseil d’administration de l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux ;

- M. Francis Grignon, membre du Conseil d’administration du Fonds pour le développement de l’intermodalité dans les transports ;

- M. Gérard César, membre du Conseil d’administration d’Ubifrance, Agence française pour le développement international des entreprises ;

- M. Marcel Deneux et Mme Évelyne Didier, respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil d’orientation de l’observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d’outre-mer ;

- Mme Élisabeth Lamure, MM. Philippe Darniche et Paul Raoult, membres du Conseil national de l’aménagement et du développement du territoire ;

- M. Dominique Braye, membre du Conseil national de l’habitat ;

- Mme Odette Terrade, membre du Conseil national de l’information statistique ;

- M. Philippe Dominati, membre du Conseil supérieur de la coopération ;

- MM. Rémy Pointereau et Jean-Jacques Mirassou, respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil supérieur de l’aviation marchande ;

- MM. Bruno Sido et Roland Courteau, membres du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité en matière nucléaire ;

- Mme Élisabeth Lamure, membre de l’Observatoire des territoires ;

- M. Daniel Dubois, membre de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles ;

- Mme Mireille Schurch, membre suppléant de l’Observatoire national du service public de l’électricité et du gaz ;

- M. Christian Cambon, membre du Conseil d’orientation stratégique du fonds de solidarité prioritaire ;

- M. André Lardeux, membre de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ;

- Mmes Gisèle Printz et Bernadette Dupont, respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil d’administration de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances ;

- M. René Teulade, membre suppléant du Conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites ;

- MM. André Lardeux, Dominique Leclerc et René Teulade, membres du Conseil d’orientation des retraites ;

- Mme Patricia Schillinger, membre du Conseil national du bruit ;

- MM. Bernard Cazeau et Alain Vasselle, membres du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie.

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Article 63 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Deuxième partie

Loi de finances pour 2009

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Politique des territoires

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2009.

Politique des territoires

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 35 et état B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Politique des territoires ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » constituera en 2009, par le volume de ses crédits, la plus petite mission du budget général qui soit dotée d’objectifs de performance, avec 386 millions d’euros en autorisations d’engagement et 375 millions d’euros en crédits de paiement.

Néanmoins, cette mission se situe au cœur de la politique d’aménagement du territoire, notamment par son programme, bien nommé, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire ».

La politique de l’aménagement du territoire dans son ensemble doit représenter au total, en 2009, 5,6 milliards d’euros de crédits. Cet effort sera porté par trente-quatre programmes relevant de seize missions différentes. La mission « Politique des territoires » ne correspond qu’au douzième de ces crédits.

Cette mission a été réduite à deux programmes en 2008.

Tout d’abord, le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » retrace les crédits affectés à la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, – l’ancienne Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale, ou DATAR –, soit, pour 2009, 346 millions d’euros en autorisations d’engagement et 339 millions d’euros en crédits de paiement. Ce sont 90 % des crédits de la mission elle-même.

Ces crédits contribuent à financer des dispositifs très divers et essentiels, tels que les contrats de projets État-région – pour près de 170 millions d’euros en autorisations d’engagement –, la prime d’aménagement du territoire, ou PAT – pour 38 millions d’euros en autorisations d’engagement –, le plan d’accompagnement du redéploiement des armées – pour 30 millions d’euros en autorisations d’engagement –, les pôles de compétitivité – pour 7,5 millions d’euros –, ou encore les pôles d’excellence rurale – pour 19 millions d’euros en autorisations d’engagement.

S’agissant de l’ensemble du programme, je rappelle que, en 2007 et en 2008, un important effort de couverture en crédits de paiement des engagements antérieurs a été entrepris. L’endettement du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT, a diminué en conséquence, passant de 740 millions d’euros à la fin de 2006 à 550 millions d’euros estimés pour la fin de 2008.

Or, en 2009, le niveau des autorisations d’engagement doit être supérieur à celui des crédits de paiement. Ce serait inquiétant si la programmation pour les années 2010 et 2011 ne rétablissait un rapport vertueux entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement, de façon à prévoir plus de crédits de paiement que d’autorisations d’engagement. Évidemment, il faudra que le Gouvernement se tienne à l’orientation ainsi tracée ; sinon, le risque serait grand de renouer avec les récentes tensions de financement.

Par ailleurs, pas moins d’une trentaine de dépenses fiscales sont rattachées au programme, pour quelque 910 millions d’euros au total, les principales au bénéfice de la Corse. Il y a lieu de s’interroger sur la tendance au saupoudrage que l’on observe en la matière.

En outre, je déplore l’absence d’une mesure de la performance relative à ces dépenses. Sur ce point, même si j’ai bien pris note des difficultés d’organisation, je souhaite que les voies d’un progrès soient dégagées, dès 2009, pour le projet de loi de finances pour 2010.

Ensuite, le second programme, « Interventions territoriales de l’État », ou PITE, est dérogatoire au droit commun du budget, notamment parce qu’il rassemble des actions de portée régionale, correspondant à des plans interministériels. Après l’expérimentation de la période 2006-2008, le PITE est reconduit pour 2009, dans un nouveau périmètre. Réduit à quatre actions, il concerne l’eau en Bretagne, les investissements en Corse, le Marais poitevin et, enfin, la présence de chlordécone en Guadeloupe et en Martinique.

Globalement, ces actions sont dotées de près de 40 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 36 millions d’euros en crédits de paiement. La majorité de ces crédits est affectée aux actions « Eau Agriculture en Bretagne » et « Programme exceptionnel d’investissements en faveur de la Corse ».

Le premier bilan du PITE se révèle pourtant mitigé. Les performances sont souvent restées en deçà des objectifs fixés.

En revanche, ce programme offre deux avantages importants.

D’une part, il permet une réelle souplesse de gestion, car les préfets peuvent mobiliser en un seul budget les contributions de plusieurs ministères.

D’autre part, le PITE confère une forte visibilité politique aux actions qu’il retrace. Cet aspect, en 2007 et en 2008, a notamment servi le « plan nitrates » destiné à restaurer la qualité de l’eau en Bretagne, sujet qui fait l’objet d’un contentieux latent avec les autorités communautaires. Sans le PITE, la France aurait sans doute été condamnée, faute d’avoir réussi à démontrer la réalité de ses efforts en ce domaine.

Le PITE a donc fait ses preuves d’utilité, mais il lui reste à atteindre ses objectifs de performance. Or la mesure même de cette performance reste insuffisante.

Non seulement l’action « Plan chlordécone en Guadeloupe et en Martinique » ne fait l’objet d’aucun objectif ni indicateur dans le fascicule bleu budgétaire, mais, surtout, la sélection d’un objectif par action, trop dense ou trop partiel, n’est pas une bonne solution : chaque action nécessiterait en réalité plusieurs objectifs et indicateurs de performances, choisis de façon pertinente. J’attends donc les aménagements qui s’imposent pour l’exercice à venir.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat l’adoption des crédits de la mission « Politique des territoires » pour 2009. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. le président de la commission des finances applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, notre assemblée, qui représente les territoires de la République, ne peut être que très sensible à la mission dont nous discutons les crédits.

La politique d’aménagement du territoire représente, au total, 5,6 milliards d’euros mobilisés sur la moitié des missions du budget général.

La mission « Politique des territoires » n’en regroupe qu’une petite partie, mais elle donne à l’ensemble de cette politique une visibilité indispensable pour les élus locaux.

Comme unité de vote budgétaire, elle donne un droit de regard au Parlement. C’est à ce titre que, au nom de la commission des affaires économiques, j’ai souhaité évoquer dans mon rapport pour avis certaines directions de cette politique. Je ferai notamment des propositions sur les pôles d’excellence rurale, qui arrivent à un moment clé de leur existence.

La mission proprement dite regroupe, pour un montant de 373 millions d’euros voté par l’Assemblée nationale, des moyens mis directement au service de l’objectif d’aménagement du territoire.

Il s’agit, d’une part, des moyens de la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, l’ancienne DATAR, soit 90 % de la mission sur le plan financier.

Il s’agit, d’autre part, du programme « Interventions territoriales de l’État », le PITE, qui regroupe quatre actions dont les crédits, totalisant environ 36 millions d’euros, sont gérés par les préfets concernés. Ces actions – je le rappelle, après M. le rapporteur spécial – sont les suivantes : « Eau Agriculture en Bretagne », « Programme exceptionnel d’investissements en faveur de la Corse », « Plan gouvernemental sur le Marais poitevin Poitou-Charentes » et, enfin, « Plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe ».

Je ne reprendrai pas l’ensemble des chiffres que vous pouvez trouver dans le fascicule bleu budgétaire ou dans les rapports parlementaires.

Dans mon rapport pour avis, je me suis attaché à certains éléments de cette politique afin d’encourager le Gouvernement à aller plus loin encore dans son action, dans un souci d’accompagnement de la crise économique et financière que nous vivons.

C’est le cas de l’aménagement numérique du territoire. Nous sommes en 2008, et il est temps d’achever la couverture de l’ensemble des communes de France en téléphonie mobile et en haut débit – un vrai haut débit de deux mégabits par seconde –, sans parler de l’accès au très haut débit, qui se développe trop lentement à mon avis : le haut débit d’aujourd'hui sera le bas débit de demain, dit-on.

Monsieur le ministre, quels moyens le Gouvernement compte-t-il mettre au service de cette ambition ? L’on s’interroge à ce sujet dans les territoires encore mal desservis ou sans aucune couverture. Comme c’était autrefois le cas pour l’électricité et l’eau courante, la généralisation de l’Internet haut débit répond à un besoin. Elle est indispensable au développement et à l’attractivité des territoires.

Autre outil du développement des territoires, les pôles de compétitivité ont fait l’objet, en juin dernier, d’une évaluation approfondie qui les a jugés « prometteurs ». On peut le confirmer sur le terrain, tout en regrettant cependant que les promesses ne se concrétisent pas toujours pour certains acteurs de ces pôles. Je pense notamment aux petites entreprises qui ne sont pas suffisamment impliquées dans les pôles, ainsi qu’à celles qui sont trop éloignées les unes des autres et ne se connaissent pas suffisamment. Il nous faut davantage communiquer sur cette action, qui représente 1,5 milliard d’euros sur trois ans, et favoriser les rencontres entre entreprises.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous dire quel est l’avenir des treize pôles de compétitivité sur les soixante et onze pôles qui entrent en phase de surveillance ?

Le développement de nos territoires, c’est notamment celui des territoires ruraux. Les membres de la commission des affaires économiques et son président, M. Jean-Paul Emorine, sont très attentifs à l’évolution des zones de revitalisation rurale, les ZRR.

Si le principe de ces ZRR est excellent, puisqu’il s’agit de soutenir des territoires cumulant les handicaps, en pratique la complexité du système et le manque de communication font parfois obstacle à sa prise en main par les acteurs locaux – les élus comme les entreprises –, qui ne savent pas toujours ce qu'ils ont exactement à y gagner. Tout le potentiel de ces ZRR n’est pas utilisé.

Par ailleurs, la lecture des services fiscaux sur le terrain n’est pas toujours positive et compréhensive au regard des exonérations possibles.

Mme Nathalie Goulet. C’est vrai !

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. C’est le cas, par exemple, des médecins qui veulent transférer leur cabinet d’une zone urbaine vers une ZRR et se voient opposer un refus d’exonération.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. C’est donc un point sur lequel nous devons avancer.

Enfin, pouvez-vous nous éclairer, monsieur le secrétaire d'État, sur la pérennité des ZRR ?

Je souhaite également évoquer plus particulièrement les pôles d’excellence rurale, les PER, qui entrent dans leur dernière année. Depuis 2006, le label PER a facilité l’attribution de financements et a joué un vrai rôle d’impulsion sur le tissu économique local. L’effort de l’État mérite d’être signalé : 175 millions d’euros au total, dont 90 millions d’euros en 2009, selon les données communiquées par la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT. Ces PER ont pleinement participé aux objectifs de l’aménagement du territoire puisque les 379 PER existant aujourd’hui sont répartis sur l’ensemble des départements français.

Pourtant, les PER souffrent de rigidités qui les gênent dans leur marche en avant. Je prendrai un exemple très concret. Une entreprise doit participer au projet PER. À ce titre, elle est mentionnée dans la convention-cadre signée avec le préfet. Cependant, elle fait finalement défaut et se retire. Dans cette situation, les modalités de gestion des fonds sont telles qu’il est bien souvent impossible d’allouer ces derniers à une autre entreprise dont l’intervention permettrait pourtant de contribuer aux objectifs du pôle.

C’est pourquoi je lance les deux idées suivantes : d’une part, qu’une certaine fongibilité soit instaurée dans la gestion des fonds par le préfet afin de permettre au financement de s’adapter à la vie du pôle dans ce qu’elle a d’imprévisible et, d’autre part, que soit mise en place une clause de revoyure à mi-parcours, ce qui permettrait plus de souplesse et un déblocage des situations difficiles pour une meilleure réactivité sur le terrain.

La commission des affaires économiques – je l’ai constaté lors de l’examen de ce rapport – s’intéresse de très près aux pôles d’excellence rurale et souhaite contribuer à l’évaluation de ces pôles l’année prochaine, ce dont je me réjouis comme vous, monsieur le secrétaire d’État.

Vous vous êtes prononcé en faveur d’un nouvel appel à projet de PER. Sachez que nous sommes prêts à travailler avec vous sur le sujet.

Par ailleurs, je me réjouis de l’intervention du Président de la République lors du congrès des maires de France, la semaine dernière. Il a appelé à définir une politique d’aménagement du territoire adaptée à la réalité de la ruralité d’aujourd'hui, chantier pour lui absolument majeur et sur lequel il compte agir d’ici au mois de mars prochain. C’est un signe fort pour les territoires ruraux. Dans cette perspective, je veux dire au Gouvernement mon soutien à une politique des territoires ambitieuse pour mieux affronter la crise.

Pour conclure, monsieur le secrétaire d'État, j’ai le plaisir d’indiquer que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ». (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Enfin, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Monsieur le secrétaire d'État, mon intervention s’inscrira dans la continuité des propos de M. Rémy Pointereau, qui a évoqué les territoires de la République. Je m’exprimerai, pour ma part, au nom des élus de la montagne.

M. Adrien Gouteyron. C’est très important ! Vive la montagne !

M. Thierry Repentin. Tout ne figure pas dans le projet de loi de finances, et nous considérons que le secrétaire d'État que vous êtes doit agir de façon interministérielle, y compris dans des domaines qui ne relèvent pas forcément de la mission « Politique des territoires » mais pour lesquels vous jouez, selon nous, un rôle essentiel.

À l’occasion de leur congrès à Saint-Flour, voilà quelques jours, les élus de la montagne se sont adressés à vous, monsieur le secrétaire d'État, en espérant que sous la présidence française de l’Union européenne puisse être adoptée une directive-cadre afin de préserver les services publics en montagne.

La révision générale des politiques publiques atteint aujourd’hui un niveau de retrait territorial devenu difficilement supportable pour les collectivités locales, retrait qui concerne de nombreux services : école, poste, hôpital, équipements, gendarmerie, perceptions...

Cette réorganisation est particulièrement alarmante en zone de montagne en raison des paramètres géomorphologiques qui rendent plus difficiles les conditions d’accès ou l’installation de technologies de consultation à distance.

Nous souhaitons que le temps de la présidence française de l’Union européenne soit mis à profit pour ouvrir le chantier d’une directive-cadre sur les services d’intérêt général.

Nous voulons que les collectivités territoriales, dans le respect du droit à libre administration qui est le leur, disposent des moyens juridiques et financiers suffisants pour leur permettre de maintenir sur leur territoire une offre de services publics de proximité répondant aux besoins réels de leur population.

Je citerai quelques exemples auxquels sont tout particulièrement attachés les élus des territoires d’altitude.

Tout d’abord, je parlerai de l’école. Pour les élus de la montagne, l’école représente un outil crucial de développement local et d’aménagement du territoire. La présence de ce type de service constitue l’un des facteurs les plus déterminants dans le choix d’une famille de s’établir et de rester dans une commune plutôt que dans une autre.

C’est pourquoi nous demandons que le nombre d’enseignants puisse être mis en rapport avec le temps de transport. Ce dernier est en effet une composante importante de la vie scolaire et tend à en amoindrir substantiellement la qualité. C’est un aspect particulièrement sensible en zone de montagne où les distances sont plus longues à parcourir en raison du relief et les trajets plus dangereux en raison des aléas climatiques et des risques naturels qui sont des réalités plus que fréquentes.

Or la décentralisation trouble le jeu de la gestion des postes, car l’actuelle répartition des compétences en matière d’éducation se solde par une gestion cloisonnée dont l’absurdité conduit à toujours plus de concentration. L’État tend à économiser ses postes en augmentant les taux d’encadrement et en accentuant les regroupements pédagogiques, alourdissant du même coup les obligations des départements finançant des circuits de transports scolaires invariablement plus longs.

Il vous est donc proposé, monsieur le secrétaire d'État, de prendre en considération les besoins réels des populations locales.

Premièrement, nous vous demandons d’appliquer à la préparation de la carte scolaire la règle valide en matière de politique des services publics, à savoir de notifier aux collectivités locales les fermetures envisagées avec deux années d’avance.

Deuxièmement, nous vous demandons l’application de seuils d’ouverture de classes adaptés aux réalités rurales et de montagne, notamment en prenant en considération les évolutions démographiques actuelles, qui traduisent un regain d’intérêt pour la ruralité.

Troisièmement, nous vous demandons de tenir compte dans les effectifs scolarisés des enfants d’âge maternel, scolarisés dans des classes uniques.

Le deuxième service public auquel les élus de la montagne sont très attachés est celui de La Poste.

Monsieur le secrétaire d'État, comme vous le savez pour vous déplacer toutes les semaines sur nos territoires, la présence de La Poste, au même titre que celle de l’école, constitue en montagne un facteur indispensable d’attractivité et d’ancrage de la population sur le territoire. C’est une constante avérée que l’évolution des métiers pratiqués par le réseau postal et l’ouverture à la concurrence ne viennent pas remettre en cause foncièrement.

Le service postal revêt en montagne deux réalités aussi concrètes que déterminantes.

Tout d’abord, l’accessibilité des guichets et des prestations est importante.

Les difficultés inhérentes au relief et au climat renforcent l’importance de la facilité d’accès aux 17 000 points de contact du réseau postal. Ce n’est pas un hasard si 9 200 d’entre eux sont situés dans des petites communes, classées notamment  « zone de montagne ».

La levée et la distribution du courrier revêtent dans les zones de montagne une dimension sociale. En effet, dans ces zones, le facteur remplit encore d’autres fonctions que la simple distribution du courrier : portage de médicaments, de repas, d’achats divers, voire opérations bancaires à domicile.

Or, nous sommes obligés de noter que la gestion par La Poste de son réseau de points de contact se révèle par trop souvent en contradiction avec la dimension sociale et la dimension d’aménagement du territoire que je viens d’évoquer. Des modifications d’horaire ou d’ouverture sont décidées de façon abrupte, parfois sans prendre sérieusement en compte les réalités locales. De nombreux élus déplorent une absence de concertation réelle. Ils constatent qu’ils sont mis devant le fait accompli et qu’on leur impose de laisser à disposition un agent en mairie, en contrepartie d’un financement partiel à la pérennité bien incertaine.

J’insisterai sur un point particulier qui relève de la compétence de l’État, à savoir le caractère inique d’un règlement aux termes duquel la délivrance du service universelle de La Poste est assurée en tout point du territoire, excepté lorsque les infrastructures de transport ou les caractéristiques géographiques de certaines zones font obstacle à l’accomplissement régulier de ce service, c'est-à-dire très clairement en zone de montage !

Enfin, le dernier service auquel sont également très attachés les élus de la montagne, zone à handicap, est l’accès aux soins de proximité. M. le rapporteur pour avis y a d’ailleurs fait référence.

L’accès aux soins est un droit pour les populations permanentes et saisonnières, une garantie de vitalité économique et sociale pour tous les territoires, ainsi qu’une exigence de solidarité nationale.

Les élus de la montagne, à l’occasion de leur congrès qui s’est tenu le 24 octobre dernier, ont donc demandé que, sur le terrain des principes, les spécificités de la montagne soient pleinement prises en compte à la faveur de la discussion du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, présenté en conseil des ministres le 22 octobre 2008.

Ils souhaitent que les zones sous-médicalisées soient déterminées dans les meilleurs délais par les autorités compétentes et que les critères présidant à leur définition ne soient pas uniformes sur l’ensemble du territoire national.

Enfin, ils demandent, s’agissant du financement des structures hospitalières, que la généralisation de la tarification à l’activité s’accompagne, pour les établissements situés en zone de montagne, de compensations financières liées aux sujétions particulières que ces derniers supportent.

Monsieur le secrétaire d'État, je ne cite pas précisément les chiffres du projet de budget que vous nous présentez aujourd'hui, car les élus de la montagne considèrent que les missions du secrétaire d'État chargé de l’aménagement du territoire vont bien au-delà de cette seule mission « Politique des territoires ».

Vous vous déplacerez au début du mois de janvier prochain dans les Alpes, notamment pour étudier l’accompagnement des fermetures et des restructurations d’implantations militaires en zones de montagne.

Monsieur le secrétaire d'État, sur ce point également, vous devez faire preuve d’initiative pour faire admettre que les contreparties de l’État doivent être substantiellement différentes en zones de montagne. Les élus de ces dernières demandent non pas un traitement privilégié, mais un traitement adapté aux handicaps auxquels leurs territoires sont confrontés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Je tiens tout d’abord à remercier mon ami Claude Biwer d’avoir accepté que nous échangions nos places dans cette discussion : il a compris que la Haute-Loire est un département de la France profonde, et qu’il faut quatre heures et demie pour s’y rendre ! (Sourires.)

Mon intervention relaiera celle de Thierry Repentin, collègue que j’ai eu l’occasion d’apprécier lors de l’examen du projet de loi relatif aux parcs nationaux et aux parcs naturels marins, dont j’étais le rapporteur.

Monsieur le secrétaire d'État, vous le savez mieux que personne, la place des collectivités doit rester prioritaire, y compris dans le budget de notre pays dont le socle repose sur des forces humaines et économiques indispensables.

Ne l’oublions pas, la France reste avant tout un pays rural où l’espace occupe plus des deux tiers du territoire national. Le Gouvernement en a conscience. C’est la raison pour laquelle il a pris différentes initiatives, dont les pôles d’excellence rurale évoqués par M. le rapporteur spécial et par M. le rapporteur pour avis, les programmes LEADER, ainsi que les zones de revitalisation rurale. Au passage, je souligne que je réside dans un département qui compte vingt-deux cantons sur trente-deux en ZRR.

En 2009, l’effort budgétaire total de l’État en faveur de l’aménagement du territoire s’élèvera à 5,6 milliards d’euros en crédits de paiement, répartis entre trente-quatre programmes et seize missions.

Dans cet ensemble, la mission « Politique des territoires » vise des objectifs clairs, indispensables à la vitalité de notre France rurale, laquelle mérite un accompagnement spécifique compte tenu de l’espace qu’elle a à administrer. Nos petites communes gèrent en effet des dizaines de kilomètres de chemins ruraux, de voiries, de réseaux,…

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Jean Boyer. … sans parler des équipements qu’elles doivent réaliser afin de répondre à la parité sociale ou simplement humaine spécifique à ce début de troisième millénaire.

Cette France rurale mérite la parité, y compris en ce qui concerne sa couverture numérique, comme le dira tout à l’heure Claude Biwer.

Ce haut débit, M. le rapporteur pour avis l’a souligné, permettra le développement local indispensable à ceux qui veulent rester au pays, sans oublier que, en termes de téléphonie mobile, des zones blanches subsistent.

J’en viens maintenant aux pôles d’excellence rurale. L’appel à projets a engendré en décembre 2005 près de quatre cents initiatives locales porteuses de projets créateurs d’emplois, innovants, ambitieux, bâtis autour de partenariats public-privé et fondés sur le développement des richesses locales.

Pour gagner, il faut travailler ensemble, bâtir ensemble, y compris au service de nos territoires. En effet, une terre sans projet est une terre en déclin. Ce déclin, les élus ruraux ne le veulent pas !

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous dire – la question vous a déjà été posée tout à l’heure – si une « deuxième vague » est envisagée ?

J’ai souhaité présenter une question orale avec débat afin de faire le point et de tirer les enseignements qui, reconnaissons-le, seront globalement positifs, malgré certaines difficultés d’application qui ont très bien été mises en lumière par M. le rapporteur pour avis.

Monsieur le secrétaire d'État, pour être efficace, il faut clarifier et simplifier. Si les financements croisés présentent des avantages, ils sont cependant souvent difficiles à intégrer dans la chronologie du montage financier. Or, ces complexités sont fréquemment décourageantes.

Parallèlement à cette politique, nous devons penser aux zones de revitalisation rurale, réalité forte d’une France souvent désarmée, car le triptyque « homme », « richesse » et « territoire » est généralement difficile à coordonner.

Toutefois, ces actions jouent quelque peu le rôle de « SAMU collectif », et nous ne voulons pas voir l’oxygène se raréfier demain !

Pour conclure, il est indispensable d’apporter un soutien équitable aux territoires dont la densité est, pour certains d’entre eux, de moins de cinq habitants au kilomètre carré. Tel est le cas du canton de Pinols, dans mon département. M. Adrien Gouteyron, élu comme moi de la Haute-Loire, connaît bien la situation. J’ajoute que notre département est celui où l’habitat moyen est le plus élevé de France. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de nous avoir écoutés, et surtout compris ! (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’Etat, mes chers collègues, la création d’un secrétariat d’État chargé de l’aménagement du territoire et les quatre actions – la qualité des eaux en Bretagne, l’investissement en Corse, la préservation du Marais poitevin et l’application du plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe – ne sauraient cacher le marasme dans lequel se trouvent aujourd’hui plongés certains de nos territoires, au regard de leur aménagement.

En effet, sauf à renoncer aux principes d’égalité et de solidarité, l’aménagement du territoire ne peut se concevoir sans la garantie d’un service public de qualité.

Vous l’avez reconnu, monsieur le secrétaire d’État, « les crédits qui sont alloués [à votre mission] sont relativement modestes ». Nous ne nous attarderons donc pas sur les chiffres.

Force est de constater que ce budget ne se donne pas les moyens financiers de répondre à la crise que traversent nos territoires, qu’il s’agisse des territoires ruraux isolés ou des quartiers urbains en difficulté, fragilisés par vos réformes successives contre les services publics.

La mise en place de la révision générale des politiques publiques, qui vise à augmenter la rentabilité financière, a donné le ton : un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne sera pas remplacé, telle est la volonté du Président de la République.

Or les suppressions d’emplois publics, qui s’inscrivent dans la logique de la RGPP, portent un coup fatal au service public, notamment dans ses dimensions d’accessibilité et de proximité, et mettent en péril l’objectif d’un aménagement équilibré du territoire.

Nous considérons, pour notre part, que c’est la politique du Gouvernement qui coûte cher à nos concitoyens, car elle porte atteinte à leur qualité de vie, à leur santé, à l’égal accès de chacun aux services de l’énergie, de la poste, de l’éducation.

Le rapporteur spécial à l’Assemblée nationale a déclaré – cela en dit long ! – que les relais-postes dans les épiceries-cafés-restaurants fonctionnaient mal dans certaines régions, pour des raisons historiques et politiques.

La raison est bien plus simple : les « points-poste » fonctionnent mal parce qu’ils n’assurent pas la confidentialité, parce que c’est au commerçant de faire l’avance sur son fonds de caisse, parce qu’il est inouï de penser que l’on peut rendre à l’usager un service public de qualité, dans un lieu commercial, sans formation des agents !

Le service public postal joue un rôle central dans l’aménagement du territoire. Pour les populations habitant dans des régions enclavées, les postiers sont souvent le dernier lien.

Pourtant, le Gouvernement ne renonce pas à la privatisation de La Poste. Pour les élus communistes, d’autres solutions existent. Moderniser le service public postal, ce n’est pas vendre les activités rentables et abandonner les autres, c’est créer les conditions de solidarité et de péréquation tarifaire, qui permettent d’assurer à tous, sur l’ensemble du territoire, un haut niveau de service public.

En ce qui concerne la réforme de la carte militaire, les moyens figurant dans la mission « Politiques des territoires » sont insuffisants pour répondre aux dégâts que vous allez provoquer. L’Association des maires de France a regretté, à juste titre, le manque de transparence de cette réforme, et la mise en cause de « la nécessité de respecter le principe de l’équilibre des territoires et de leur aménagement qui doit tenir compte des spécificités locales ».

Cette réforme touche surtout des communes qui se trouvent dans des régions enclavées, comme Barcelonnette, Briançon ou Bourg-Saint-Maurice, ou qui sont déjà en proie à des difficultés économiques et à un chômage élevé, comme les villes de garnisons situées dans le quart nord-est de la France. Les communes peu peuplées sont souvent encore plus dépendantes des retombées économiques engendrées par la présence militaire sur leur sol.

Loin d’opérer un aménagement du territoire, la politique du Gouvernement organise une désertification des territoires, qui semble concerner tous les domaines. Ainsi, même l’accès à la santé est remis en cause. Aujourd’hui, on découvre avec stupéfaction les conditions dans lesquelles les femmes doivent accoucher. Après la fermeture de la maternité de Saint-Agrève, une jeune mère a mis près de quatre heures pour rejoindre la maternité la plus proche. Soixante kilomètres sur des petites routes de montagne en plein travail d’accouchement ! Voilà quelle est votre conception de l’aménagement du territoire et de la modernisation de l’accès au service public de la santé. Et on pourrait multiplier les exemples qui montrent un recul dans la prise en charge des soins.

En ce qui concerne la carte judicaire, là encore, on aboutit à un résultat peu satisfaisant sur le plan de l’aménagement du territoire. On éloigne la justice du justiciable, et les professionnels de la justice de leur lieu de résidence.

De fait, la réforme portée par Mme le garde des sceaux se résume uniquement à la suppression de tribunaux. La grande majorité des magistrats, avocats et personnels de la justice relèvent que « ce sont les juridictions les plus proches des citoyens, qui fonctionnent le plus rapidement et le mieux, qui sont touchées en premier ».

Là encore, la politique du Gouvernement s’inscrit dans une volonté d’opposer les territoires et va à l’encontre même de la continuité du service public sur l’ensemble du territoire national.

Depuis qu’il prépare le projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, le Gouvernement ne cesse de proclamer son attachement aux transports collectifs. Mais rien n’est fait pour le transport interrégional, et le désengagement chronique de l’État met certaines régions en difficulté en ce qui concerne l’entretien et la rénovation des voies.

Nous considérons, au contraire, que les impératifs environnementaux et d’aménagement durable devraient conduire à un maillage fin de l’ensemble du territoire et au développement de l’offre ferroviaire. Dans ce cadre, le financement des infrastructures de transport devrait constituer une mission régalienne de l’État, qui doit être le garant de l’intérêt général et de la cohésion sociale et territoriale. Là encore, la politique gouvernementale est aux antipodes de ces déclarations de principes, comme en témoigne le projet de loi que nous examinerons dans quelques semaines et qui met en œuvre la privatisation du transport ferroviaire passager.

S’agissant de l’aménagement numérique du territoire, nous pouvons constater que, là aussi, l’accès aux services dématérialisés n’est pas plus satisfaisant.

Le Gouvernement multiplie les déclarations de bonnes intentions sur la nécessité de poursuivre la couverture des zones blanches de téléphonie mobile et d’assurer à nos concitoyens la perspective d’un accès rapide et de bonne qualité à internet à haut débit, fixe et mobile.

Lorsque nous avons déposé dans le cadre de la discussion de la loi de modernisation de l’économie un amendement visant à renforcer le contenu du service universel des télécommunications, et notamment à exiger le haut débit en lieu et place de la notion de « fréquence suffisante », on nous a opposé, abusivement selon nous, l’article 40.

Enfin, le Gouvernement prévoit, au nom de l’aménagement du territoire – c’est une préoccupation qu’il ressort quand cela l’arrange ! –, de délocaliser des administrations ou des établissements publics. Je pense à la délocalisation de l’INSEE à Metz, à celle du siège de l’Office national des forêts à Compiègne, et je pourrais multiplier les exemples. Ces projets pilotés par le Gouvernement mettent gravement en danger la qualité du service, mais, surtout, ne tiennent absolument pas compte de la vie des personnels.

Monsieur le secrétaire d’État, le Premier ministre déclarait que « la réforme de l’État supposera que chacun d’entre nous accepte qu’il y ait moins de services, moins de personnel, moins d’État sur son territoire ». Votre politique comme votre budget se résument à cela : réforme après réforme, modernisation après modernisation, nos territoires et nos populations se voient dépossédés des structures publiques d’intérêt général essentielles à un aménagement harmonieux de notre pays, à son attractivité économique, sociale et culturelle.

Parce que nous nous opposons à ces politiques rétrogrades et que nous considérons que la mission « Politiques des territoires » ne saurait pallier le recul massif des services publics, les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre les crédits de cette mission.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’aménagement du territoire est une préoccupation quotidienne en ce début de législature.

Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, le Gouvernement a lancé, en l’espace de peu de temps, deux grandes réformes qui ont un impact territorial : celle de la carte judiciaire tout d’abord, celle de la carte militaire ensuite. Quel qu’ait été le Gouvernement, cette dernière aurait fini par se faire au fil du temps.

Vous en conviendrez, monsieur le secrétaire d’État, la dimension de l’aménagement du territoire des politiques publiques revêt dans ces conditions une acuité particulière.

Votre nomination au mois de mars à la tête du secrétariat d’État chargé de l’aménagement du territoire est une reconnaissance de l’importance décisive que le Gouvernement accorde à ce secteur. La lettre de mission qui vous a été adressée rappelait d’ailleurs que le développement de la compétitivité et la préservation de la cohésion territoriale sont les deux principes fondamentaux de l’aménagement du territoire.

C’est pourquoi il faut rappeler que l’effort budgétaire de l’État en matière d’aménagement du territoire ne se limite pas aux crédits que nous examinons et concerne en réalité pas moins de trente-quatre programmes relevant de seize missions, pour un montant total de l’ordre de 5,6 milliards d’euros, ainsi qu’en fait état le document de politique transversale.

En matière de compétitivité et de dynamique territoriale, l’année 2009 marque la première année de la « version 2.0 » des pôles de compétitivité, qui seront poursuivis jusqu’en 2011, avec la même enveloppe budgétaire de 1,5 milliard d’euros.

Monsieur le secrétaire d’État, 2009 ne sera pas une année facile pour vous, puisqu’elle verra les premières fermetures de sites militaires : la mise en œuvre du plan national d’accompagnement des restructurations de la défense constitue un véritable défi qui mettra à contribution l’ensemble des instruments de la politique d’aménagement du territoire : contrats de projets État-région, programmes opérationnels, dispositifs fiscaux territorialisés.

À cet égard, je voudrais faire deux observations.

D’une part, s’agissant des dépenses fiscales dont trente mesures sont rattachées au seul programme 112 pour un montant total de 910 millions d’euros, il faudrait vraiment procéder à une évaluation approfondie. Je souhaiterais savoir si vous entendez vous engager dans cette voie, monsieur le secrétaire d’État.

D’autre part, je voudrais évoquer les sites de la gendarmerie qui seront fermés, plus particulièrement celui de Châtellerault, situé dans mon département. En ces temps de crise, il me semble que l’État devrait prendre en considération la situation économique et sociale propre aux territoires concernés.

Aussi est-il pour nous primordial que l’État mette en œuvre toutes les mesures d’accompagnement nécessaires et, au-delà, qu’il engage – pourquoi pas ? – des dispositions spéciales tendant à la délocalisation d’équipements publics au profit de ces territoires. C’est ce qui ressortait de l’entretien que j’ai eu avec Mme la ministre de l'intérieur.

Des dispositions de ce type existaient voilà quelques années, et elles ont globalement donné de bons résultats. Certaines délocalisations ont échoué ; d’autres ont été des réussites : je pense notamment à l’Institut national de la propriété industrielle et au Centre national d’enseignement à distance, opération que M. Jean-Pierre Chevènement avait soutenue à l’époque. Certes, cela coûte de l’argent, mais les résultats sont importants : des institutions peuvent fonctionner sur tout le territoire et apporter des solutions. Cette piste doit être explorée puisqu’elle a fait ses preuves à un moment donné.

S’agissant des territoires ruraux, la politique des pôles d’excellence rurale doit faire l’objet d’une évaluation, dont les résultats seront connus d’ici à la fin de l’année. Ces derniers détermineront les conditions de la poursuite du soutien de l’État, notamment du lancement d’un nouvel appel pour des projets concourant à la mutualisation des services publics.

Nous le savons, et les Français sont également de cet avis, l’offre de services au public est déterminante pour la vitalité des espaces ruraux. L’exemple souvent cité de La Poste et du maintien du service postal par des partenariats avec des communes ou des commerçants pour le développement des « points Poste » mérite d’être suivi.

En effet, il a été démontré que les choses se sont inversées ces dernières années : notre pays connaît une dynamique démographique de retour vers la ruralité, la population rurale augmentant même aujourd’hui trois fois plus vite que celle des zones urbaines. (M. le secrétaire d’État acquiesce.) On le constate lorsqu’on travaille pour un département : on construit aujourd'hui plus d’écoles à la campagne qu’en ville.

Dès lors, il est crucial de répondre aux trois défis auxquels nous sommes confrontés.

Il s’agit tout d’abord du défi de la fracture territoriale : elle se réduit, mais il faut encourager les projets de territoire et le télétravail, développer les énergies vertes et engager une politique ambitieuse de péréquation financière afin de remédier à l’hyper-concentration du produit fiscal, par exemple de la taxe professionnelle, dans quelques régions.

Il s’agit ensuite du défi de la fracture numérique. Compte tenu du rôle structurant joué par les nouvelles technologies en milieu rural, un objectif doit être atteint en 2012 : le haut débit, la téléphonie mobile et la télévision numérique terrestre sur l’ensemble du territoire !

Enfin, il nous faut répondre au défi de l’offre de soins en développant un certain nombre d’actions, telles les maisons de santé pluridisciplinaires.

Voilà, survolée en quelques mots, la politique des territoires.

Le Président de la République a exprimé récemment – il a d'ailleurs confié une mission à l’un de nos collègues en ce sens – sa volonté de mener une vaste et ambitieuse politique d’aménagement du territoire. Le groupe UMP, partageant cette ambition, le soutiendra dans son action et votera les crédits de la mission « Politique des territoires ». (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez du mérite, car, si la petite mission « Politique des territoires » est dotée de 386 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 375 millions d’euros en crédits de paiement, le rôle de l’État en matière d’aménagement du territoire est évalué à 5,6 milliards d’euros, et vous subissez de surcroît l’effet de toutes les politiques restrictives que le Gouvernement met en œuvre.

Il en est ainsi, par exemple, de l’administration de l’État à travers la révision générale des politiques publiques, la fameuse RGPP, en fait une régionalisation des administrations déconcentrées qui fragilisera et marginalisera les départements périphériques.

De même, la réduction des moyens accordés aux collectivités territoriales vous empêchera de vous appuyer autant qu’il le faudrait sur les élus, qui sont devenus eux-mêmes, au fil des ans, de véritables stratèges de l’aménagement des territoires. Il faut vous appuyer sur eux, monsieur le secrétaire d’État ! C’est le rôle irremplaçable des contrats de plan que de favoriser les synergies entre les différents niveaux de collectivité, à partir de quelques grandes priorités nationales.

On nous rebat les oreilles avec la nécessité de clarifier les compétences mais, franchement, en matière économique, il est tout à fait utile que les différents niveaux de collectivités soient compétents pour favoriser le développement endogène autant qu’exogène. Les contrats de plan sont le meilleur outil pour faire jouer harmonieusement les compétences dites « croisées », que l’on décrie à tort. C’est le moyen de favoriser la coopération la plus efficace entre les différents niveaux de collectivités.

Les contrats État-région, sur la période 2007-2013, représentent des engagements de 28,2 milliards d’euros. Les retards pris sur les contrats de la génération précédente n’ont pas encore été comblés. J’en parle d’expérience puisque, à Belfort, les locaux de l’université de technologie n’ont pas encore été menés à bien. Je doute fort que les crédits du FNADT, vu leur proportion modeste, permettent de combler ces retards.

Peut-être le plan de relance permettra-t-il d’y pourvoir ? Il faudra aussi tenir les engagements pris à hauteur de 12,7 milliards d'euros pour la période 2007-2013.

J’observe la baisse des crédits du Fonds européen de développement régional, le FEDER. Nous n’avons obtenu que 5,6 milliards d’euros sur sept ans, de 2006 à 2013. Cette régression est le fruit d’un élargissement mal négocié, compte tenu des délocalisations qu’induit cet élargissement, notamment dans un secteur comme celui de l’automobile, que je connais bien.

Les moyens dont vous disposez sont donc modestes, monsieur le secrétaire d’État, même si les dépenses fiscales s’y ajoutent pour un montant non négligeable.

Toutefois, l’action de la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, est, comme son nom l’indique, interministérielle. Vous avez donc une capacité d’entraînement pour réaliser les mises en synergie nécessaires et faire face au défi des mutations que nous connaissons, particulièrement dans des régions comme la mienne où l’industrie automobile et ses sous-traitants sont gravement éprouvés. Vous y êtes d’ailleurs venu récemment.

J’aimerais élever le débat puisque j’ai entendu M. Alain Fouché parler d’une grande politique d’aménagement du territoire. Comment mener une grande politique d’aménagement du territoire dans le contexte de la globalisation financière ?

Notre pays subit, depuis les années quatre-vingt-dix, la distension croissante des liens entre les entreprises et les territoires, du fait d’une ouverture sans limite aux mouvements des capitaux, résultant évidemment de l’Acte unique européen, et d’une ouverture sans limite aux mouvements de marchandises. En effet, sous l’impulsion de l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC, le niveau moyen pondéré de nos droits de douane est passé, de 1992 à aujourd’hui, de plus de 14 % à 1 %, c’est-à-dire qu’il n’y a plus de tarif extérieur commun.

Les entreprises françaises réalisent de plus en plus leurs chiffres d’affaires et leurs bénéfices à l’étranger, et un mouvement de délocalisation des activités productives vers les pays à bas salaires frappe notre pays.

Notre croissance potentielle s’est réduite, la part de l’Europe à vingt-cinq dans le commerce international est passée de 30 % du commerce mondial en 1980 à 20 % aujourd’hui, tandis que celle de la Chine est passée dans le même temps de 2,6 % à 14 %.

L’avidité des actionnaires a creusé aussi des inégalités entre les entreprises, au détriment des petites, des inégalités dans les rémunérations, et jamais les écarts n’ont été aussi grands. Les couches populaires ont été reléguées dans les zones périurbaines.

Dans ce contexte de globalisation financière qui fracture la société française, il est difficile de mener à bien une politique d’aménagement du territoire rationnelle.

L’erreur en matière d’aménagement du territoire serait – mais elle vous est antérieure, monsieur le secrétaire d’État – de substituer à une logique globale d’aménagement du territoire, à partir d’une vision d’ensemble que seul l’État peut assurer, une autre logique qui consiste à mettre en concurrence les territoires entre eux.

Malheureusement, nous le voyons bien, ce sont les évolutions du marché qui aujourd’hui commandent. La puissance publique n’intervient plus qu’à la marge.

Cette évolution se pare du masque du girondinisme pour mieux fustiger l’état jacobin, ce pelé, ce galeux d’où viendrait tout le mal !

Cette idéologie est pernicieuse. Les temps nous obligent au contraire à organiser, y compris en matière d’aménagement du territoire, le grand retour de l’État républicain. Peut-être M. Alain Fouché ne me contredira-t-il pas.

Je me bornerai à vous suggérer quelques pistes pour enrayer le déclin de l’aménagement du territoire.

J’évoquerai d’abord la DIACT, l’ancienne DATAR. Elle ne fait pas assez d’études de prospective. La qualité des hommes et des équipes n’est pas en cause. C’est un mal plus général. On le voit avec la disparition du Commissariat général du Plan, mais plus généralement de l’administration économique de l’État.

J’ai été ministre de l’industrie, et je sais donc de quoi je parle. Dans une certaine improvisation, on a juxtaposé au niveau européen des plans nationaux en ce qui concerne le sauvetage des banques et la relance économique. Les règles européennes ont été suspendues en matière de concurrence. L’erreur serait de croire que l’on peut ne les suspendre que pour un temps limité. Ce n’est pas une petite parenthèse que l’on ouvre et que l’on va fermer. Il faut vraiment penser la politique industrielle, la politique d’aménagement du territoire sur le long terme.

Le ministère de l’industrie pourrait utilement évaluer les programmes des pôles de compétitivité pour nous dire en quoi il y a des doublons, des gaspillages, comment il faut donner les impulsions nécessaires, par exemple en matière de recherche finalisée.

Il faudrait aussi guider les choix du fonds d’investissement stratégique dévoilé par le chef de l’État. Avec 6 milliards d’euros de fonds propres et 14 milliards d’euros de fonds empruntés, ce fonds d’investissement stratégique n’est pas à la hauteur du défi. Songez que les fonds souverains étrangers représentent près de 2 000 milliards de dollars. (Mme Nathalie Goulet s’exclame.)

Monsieur le secrétaire d'État, il faut aller beaucoup plus loin sur la voie de la réglementation des offres publiques d’achat, les OPA, voire de leur interdiction quand elles émanent d’entreprises non « opéables », comme c’était le cas de Mittal sur Arcelor. On voit les conséquences de la vente de Pechiney à Alcan, et celles sur Arcelor, qui supprime des emplois. Il est important de préserver la nationalité française de la plupart de nos entreprises en favorisant des pactes d’actionnaires stables.

L’État doit se donner les moyens durables d’une politique industrielle digne de ce nom. On pourrait reconstituer des équipes d’ingénieurs compétents sur les décombres du ministère de l’industrie mis à sac par M. Alain Madelin et ses successeurs. (Murmures sur plusieurs travées de lUMP.)

Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur le sénateur !

M. Jean-Pierre Chevènement. J’en termine, madame la présidente.

Ce qui vaut pour l’industrie vaut pour l’aménagement du territoire.

Vous mettez l’accent sur les réseaux numériques et sur les liaisons à grande vitesse. Mais où sont les plans, les programmes correspondants ? Il y a encore trop de zones d’ombre en matière de téléphonie mobile. C’est l’effet de l’abandon du service public au bénéfice des concessionnaires privés.

Je ne sache pas que le plan de relance vous en donne les moyens, trop ciblé qu’il est sur la trésorerie des entreprises et insuffisamment sur les programmes publics.

Vos moyens sont limités, mais vous pouvez quand même exercer une magistrature d’influence. Vous pouvez hâter la réalisation de certains tronçons de TGV, par exemple le tronçon entre Petit-Croix et Lutterbach, qui permettra de gagner vingt-cinq minutes sur la liaison Strasbourg-Lyon, ou la réouverture de la liaison ferroviaire Belfort-Delle, vers la Suisse et l’Italie.

La France n’est plus au centre de l’Europe mais le nord-est de la France est près de l’Europe centrale et des marchés. C’est un atout qu’il faut valoriser.

Enfin, permettez-moi un dernier mot sur le tarif extérieur commun, qu’il faut rétablir, monsieur le secrétaire d’État. Mais en avez-vous la volonté ? C’est en effet le seul moyen, avec des taxes anti-dumping ou des écotaxes, d’inciter les grandes entreprises à investir à nouveau dans l’Union européenne.

Je n’aurai qu’une raison de m’opposer à la mission « Politique des territoires », raison que vous partagez sans doute, monsieur le secrétaire d'État : la modestie de ses crédits !

Mais, plus généralement, une autre question se pose : il ne suffit pas d’être réactif, comme le Président de la République sait l’être à l’occasion ; il faut inscrire l’action de l’État dans la perspective longue d’un retour de la puissance publique. En avez-vous vraiment la volonté ?

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’aménagement du territoire est une grande et belle intention qui suppose une politique cohérente de long terme, des moyens importants et des outils d’intervention pluriannuels et adaptés.

Or nous parlons, aujourd’hui, d’une mission dont le périmètre se réduit chaque année. Il s’agit de l’une des plus faibles en termes de crédits. Cette mission est une addition de projets sans beaucoup de moyens, qui peine à trouver une traduction claire dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF.

Les pôles de compétitivité et les pôles d’excellence rurale, comme le programme des interventions territoriales de l’État, le PITE, ciblent des points particuliers, un peu comme les « lois particulières » sous l’Ancien Régime.

Le dispositif des pôles de compétitivité est l’illustration d’une politique qui attribue souvent des primes à la concentration de capital humain ou financier. Il est présenté comme un moyen de résoudre, à lui seul, les problèmes d’attractivité du territoire et de délocalisations.

Quant aux pôles d’excellence rurale, je m’interroge sur la capacité de territoires non organisés à concrétiser des projets pour lesquels les taux de subvention sont très imparfaits, ce qui oblige à trouver d’autres financements locaux.

Concernant la prime d’aménagement du territoire, la PAT, nous pouvons nous interroger sur le rôle que peut jouer ce dispositif doté de moins en moins de moyens pour les territoires fragilisés.

Les contrats de projet ont remplacé les contrats de plan État-région. La participation de l’État est inférieure à la contribution européenne et les routes sont exclues des contrats. Il est nécessaire que l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, soit dotée des moyens financiers nécessaires à la mise en œuvre d’une vraie ambition dans le domaine des infrastructures.

En effet, l’aménagement du territoire passe par des infrastructures performantes et réparties harmonieusement, par le maintien des services publics en milieu rural et dans les zones urbaines sensibles, afin de respecter l’égalité d’accès aux droits fondamentaux de nos concitoyens : éducation, emploi, santé, logement, transports, culture, etc.

Les réponses apportées ponctuellement masquent mal le renoncement de l'État à équilibrer, à répartir et à aménager le territoire dans une vision de long terme. L'exécutif n'a en effet dévoilé aucun « grand dessein » mobilisateur depuis 2002.

Pourtant, le concept d'aménagement du territoire est essentiel et parfaitement actuel. Les questions relatives aux transports, à la téléphonie mobile, ou encore à l’accès à l'internet à haut débit sont au cœur des préoccupations quotidiennes de nos concitoyens.

Aujourd'hui, force est de constater que tout service public essentiel considéré comme non directement rentable est simplement condamné ou menacé de disparition. Il en est ainsi de la desserte ferroviaire ou du réseau postal.

Signée en 2002 sous le parrainage du Sénat par les trois associations nationales d'élus – l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France et l’Assemblée des régions de France – la charte des services publics locaux n'a pas été mise en œuvre.

La charte sur l'organisation de l’offre des services publics et des services au public en milieu rural, signée en juin 2006 par le Premier ministre, n'est pas respectée. La tenue régulière d'une conférence de la ruralité était prévue. Or, cette dernière ne s'est jamais réunie depuis l'élection présidentielle de 2007.

La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a, quant à elle, été dénaturée et vidée de son contenu. Les exonérations dont bénéficient les territoires ruraux classés en zone de revitalisation rurale ont ainsi été remises en cause. Monsieur le secrétaire d’État je préside le seul département intégralement classé, me semble-t-il, en ZRR.

La finalité d’une politique des territoires est avant tout la répartition des services et la péréquation des moyens. Je ne conteste pas l'intérêt d'encourager l'excellence, mais, sans infrastructures de transport et de télécommunications dignes de ce nom, il est impossible de développer un territoire, d'autant plus s'il est fragilisé.

Or, sous l’appellation « cartes », les restructurations se multiplient.

En premier lieu, la réforme de la carte judiciaire a pour conséquence la disparition de centaines de juridictions de proximité, qu’il s’agisse des tribunaux d'instance ou des conseils de prud'hommes.

La RGPP agit par « paliers de compression ». Elle s'attaque désormais aux effectifs et aux implantations du ministère de la défense. En parallèle, les crédits du plan d'accompagnement des territoires touchés par les restructurations militaires paraissent bien insuffisants pour répondre à l’incidence de celles-ci.

Mais, au-delà de la « carte militaire », tous les ministères sont visés. La RGPP fonctionne comme une machine à détricoter le maillage des solidarités nationales et territoriales. Nos « services publics » sont voués à être de plus en plus lâches, voire abstraits dans le cas de l'éducation nationale. Et il nous faudra bientôt être extrêmement vigilants à l’occasion de la présentation de la réforme hospitalière, dont l’impact territorial sera fort.

L’ouverture du capital de La Poste au secteur privé annonce quant à lui la prochaine privatisation de cette dernière, au prétexte de règles européennes qui ne l'imposent pourtant nullement. C’est toujours la même litanie, accompagnée de la même logique mécanique et comptable, sans concertation avec les élus locaux, et ce alors qu’aucune grande politique nationale ne peut être conduite sans le concours des collectivités locales.

La politique actuelle bénéficie ainsi aux territoires favorisés et néglige ceux qui sont en situation de dévitalisation, voire de détresse.

« On peut aussi faire de la discrimination positive à la française pour les départements qui souffrent. Il faut aider la Creuse plutôt que les Hauts-de-Seine » affirmait Nicolas Sarkozy au cours de la campagne présidentielle.

Force est de constater que cette déclaration d'intention n’était qu’une promesse électorale non suivie d’effet. Les écarts de richesses entre collectivités se creusent tandis que les différences de développement entre les territoires s’accentuent. Consacrée par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, la péréquation est pourtant en net recul depuis 2004.

Je prendrai pour exemple la dotation de fonctionnement minimale des départements. Initialement créée pour aider les vingt-quatre départements les plus défavorisés, son rythme d'évolution annuelle était jusqu'alors de 3% à 4 %.

Département le plus âgé de France, la Creuse est également caractérisée par le plus bas revenu par habitant. Son potentiel fiscal est par conséquent le plus faible de France. Pour autant, l’augmentation de la dotation de fonctionnement minimale des départements en Creuse n’était que de 0,013 % en 2008 : du jamais vu !

L'autonomie financière des collectivités sera mise à mal en 2009. Mais il faut bien appliquer le dogme : « moins de services, moins de personnel, moins d'État sur les territoires ».

En ce qui concerne les dotations de l'État pour 2009, le manque à gagner pour l’ensemble des collectivités sera de l'ordre de 734 millions d'euros, dont plus de 250 millions pour les seuls départements. Ceux-ci ne sauraient pourtant être tenus pour seuls responsables de la dette publique de notre pays : la totalité de leur endettement s'élève à 23 milliards d'euros seulement, alors que la dette nationale atteint 1 250 milliards d’euros ! Par ailleurs, leur endettement est intégralement consacré à l’investissement, et jamais aux dépenses de fonctionnement. Lors du congrès d'Orléans organisé les 28 et 29 octobre dernier, l'Assemblée des départements de France a adopté à l'unanimité une résolution appelant solennellement à ce que toute réforme des compétences des collectivités territoriales s’accompagne d’une réforme fiscale, et ce afin d’établir une péréquation plus juste et plus forte.

À structure constante, les autorisations d'engagement de la mission « Politique des territoires » augmentent cette année de 9 %. Mais en parallèle, les crédits de paiement baissent d’autant. Il faut s'attendre à des lendemains plus difficiles, puisque la programmation des dépenses de l'État sur la période 2009-2011 laisse apparaître une baisse constante des autorisations d’engagement.

De fait, monsieur le secrétaire d’État, les engagements pris dans le cadre du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire seront-ils tenus ? Ma question intéresse tant les engagements visant la politique des pôles que ceux qui concernent l'accès aux technologies de l'information et de la communication. Les carences de la couverture numérique territoriale ont de l'avenir, n'en déplaise aux effets d'affichage de M. Éric Besson. Il est donc urgent d'intégrer le haut débit dans le service universel.

Je crois important de rappeler qu'efficacité économique et solidarité sociale et territoriale vont de pair. L'aménagement du territoire doit être le moyen d'affirmer le rôle de l'État, afin de faire valoir les principes d'égalité et de solidarité.

La politique du gouvernement auquel vous appartenez semble aller à l'encontre de ces objectifs. C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviendrai à la fois en mon nom et en celui de mon collègue Yves Détraigne, qui a été obligé de s’absenter.

Au cours des années soixante et soixante-dix, la politique volontariste de l'État dans le domaine de l'aménagement du territoire a fortement contribué à l'équipement de notre pays, à son développement économique et à l'égalité entre les citoyens français, et ce quels que soient les lieux d'habitation de ces derniers. Or, aujourd’hui, de nombreux Français ont plutôt le sentiment d'un recul des politiques territoriales de l'État.

En 2009, l’État consacrera 386 millions d'euros à l’aménagement du territoire. Il est légitime de se demander si cette somme permettra de poursuivre le double objectif de cohésion et de compétitivité des territoires. Vous me permettrez d'en douter. Malgré les efforts fournis, les inégalités sont fortes entre des régions privilégiées et d’autres qui manquent encore de l’essentiel.

Les réorganisations successives de la carte judiciaire, de la carte militaire, et celles à venir de la carte hospitalière et des services publics dans leur ensemble font craindre à un très grand nombre d'élus ruraux l’apparition de déserts territoriaux.

Il existe des pôles de compétitivité et des pôles d'excellence rurale. Les premiers, plutôt urbains, mobilisent sur la durée 1,5 milliard d'euros, dont 831 millions de crédits d'État. Quant aux seconds, ils ne bénéficient que de 235 millions d'euros. Comment comprendre un traitement aussi déséquilibré entre les secteurs urbains et ruraux ? Et je ne parle pas des conditions de délais et de présentation imposées en milieu rural lors du dépôt des dossiers.

La politique territoriale est hélas ! souvent synonyme de recul plus que de progrès. Il suffit de penser à l'évolution de la présence postale territoriale, à la fermeture des services de l'État, telles les trésoreries, ou encore aux grands projets d'aménagement annoncés et toujours différés, comme le projet autoroutier du « Y ardennais » encore en attente ou l'électrification de la ligne reliant Paris à Bâle.

Par ailleurs – c’est une situation que je dénonçais déjà voilà un an à cette tribune , comment expliquer une différence aussi importante entre le montant des crédits affectés à la dotation de solidarité urbaine – plus d’un milliard d’euros en 2009 – et ceux de la dotation de solidarité rurale–  environ 700 millions d’euros ?

La DSU bénéficie à quelques dizaines de villes alors que la DSR concerne près de 20 000 communes, certes plus petites. Peut-on dès lors parler encore de « solidarité rurale » alors que le fossé continue à se creuser ?

De la même manière, des zones franches urbaines et des zones de revitalisation rurale ont été créées. Les premières ont dans l’ensemble donné d’excellents résultats tandis que les secondes peinent à se développer, notamment parce qu'elles ne bénéficient pas des mêmes réductions de charges sociales et fiscales que les zones franches urbaines.

Monsieur le secrétaire d’État, je demande non pas un traitement privilégié en faveur des zones rurales, mais simplement des mesures égales à celles dont disposent les zones urbaines:

Plusieurs solutions sont envisageables. En premier lieu, les pôles d'excellence rurale pourraient bénéficier d'un montant de crédits identique à celui des pôles de compétitivité. De même, il serait logique que le montant de crédits attribué à la dotation de solidarité rurale soit équivalent à celui de la dotation de solidarité urbaine. En réalité, compte tenu du nombre de communes et de territoires concernés, ce montant devrait même être supérieur. Il faudrait aussi autoriser les zones de revitalisation rurale à créer des zones franches rurales à l'instar des zones franches urbaines. Pourquoi ce qui est possible ici ne le serait-il pas ailleurs ? J’avais déposé sur ce thème une proposition de loi qui n’est toujours pas venue en discussion, ce que je regrette.

L'aménagement du territoire concerne également les infrastructures de transport qui irriguent tous notre territoire, notamment les zones les plus mal desservies. Permettez-moi de vous faire part de mes craintes concernant les moyens financiers de l'AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. Tout indique que cette dernière sera en quasi-cessation de paiement en 2009. Comment dès lors mettre en œuvre un ambitieux programme d'infrastructures de transport et contribuer au désenclavement des zones rurales les plus vulnérables ? Là encore, une proposition de loi est dans les tiroirs…

Enfin, le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication constitue également un enjeu majeur pour l'aménagement du territoire au cours des prochaines années.

De ce point de vue, je crains que la fracture numérique à laquelle nous assistons déjà ne s'aggrave terriblement avec le développement du très haut débit.

En effet, dans le département de la Meuse, la téléphonie mobile n'est pas encore correctement accessible dans certaines communes. S'agissant de l'internet à haut débit, nombreux sont mes compatriotes à devoir se contenter, comme c’est le cas dans mon propre village, d'un débit inférieur à 512 kilobits. Et j'ose à peine évoquer le très haut débit, qui coûtera quinze fois plus cher dans les territoires ruraux qu'en Île-de-France, sans que la même rentabilité soit assurée ! J'avais à ce sujet proposé la mise en place d'une taxe de péréquation uniquement à la charge des fournisseurs d'accès à internet.

Certaines technologies particulières, comme le WiMax, ont été développées. Mais leur coût est trop important pour nombre de communes rurales, ce qui donne le sentiment à certains maires d'être victimes d'une double injustice : non seulement leurs communes se situent dans des zones moins attractives, mais, de plus, elles doivent payer pour avoir accès à des technologies leur permettant d'améliorer leur situation, alors que d'autres les ont obtenues gracieusement et souvent même sans avoir à les demander !

Ma question est simple, monsieur le secrétaire d’Etat : quelles initiatives pouvez-vous prendre afin que l'aménagement numérique du territoire ne laisse pas de côté des pans entiers de notre pays et les entreprises installées dans ces zones, qu'il s'agisse du haut et du très haut débit, voire de la TNT ?

Au-delà du phénomène de disparitions de services publics que je n’ai pas vraiment évoqué, telles sont les réflexions que m'inspire le budget de la mission « Politique des territoires ». Si nous voulons mettre en œuvre une véritable politique d'aménagement du territoire, il faudra à mon sens développer des moyens autrement plus importants. Sinon, nous risquons de faire de nos zones rurales un nouveau désert technologique.

La volonté du Gouvernement et les propositions que vous avez évoquées m’engagent néanmoins à la confiance en l’avenir dans ce domaine comme dans d’autres. C’est pourquoi mes amis de l’Union centriste et moi-même soutiendrons votre projet de budget. (Applaudissements au banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d’abord vous exprimer tout le plaisir que j’ai à être parmi vous pour présenter les crédits de la mission « Politique des territoires ».

Sachez que notre souhait n’est pas d’opposer les territoires ruraux et les territoires urbains. Nous vivons dans un beau pays, riche de sa diversité. Je suis moi-même acteur de ce magnifique territoire qu’est la France : avant d’être maire d’une grande ville, j’ai en effet longtemps été maire d’une commune rurale, fonction que beaucoup d’entre vous occupent. Je puis donc vous assurer que nous essayons, dans la politique que nous menons, de ne pas créer de disparités entre les villes et les campagnes.

Ensuite, je souhaite féliciter et remercier MM. les rapporteurs de la qualité de leur travail d’analyse, qui témoigne une fois encore de l’intérêt porté par le Sénat à la politique d’aménagement du territoire, et de son attachement à cette dernière. Mais je n’en doutais pas !

Dans le cadre qui nous réunit aujourd’hui, le projet de budget pour 2009 contient quatre idées clés.

Premièrement, la mission « Politique des territoires » reste bien identifiée dans le budget de l’État. Certes, comme l’ont observé MM. les rapporteurs, elle ne supporte pas toutes les actions sectorielles qui contribuent à l’aménagement du territoire, mais elle joue un rôle pivot avec 1,056 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,133 milliard d’euros en crédits de paiement sur la période 2009-2011.

Deuxièmement, au sein de cette mission, le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », qui porte les moyens de fonctionnement et d’intervention de la DIACT, que je ne désespère pas d’appeler à nouveau la DATAR, dispose des moyens d’accompagner les grandes mutations de notre territoire en 2009 et pour les années suivantes, tout en s’inscrivant dans la politique de maîtrise des dépenses publiques.

Les autorisations d’engagement s’élèvent à 346,5 millions d’euros, soit une progression de 22,5 % par rapport à 2008, et à 339 millions d’euros en crédits de paiement. Au cours d’une seconde délibération, l’Assemblée nationale a réduit ces deux montants de 2,3 millions d’euros dans le cadre d’un prélèvement général afin de financer des contrats aidés supplémentaires.

Troisièmement, la dette du FNADT, qui est l’une de vos préoccupations, mesdames, messieurs les sénateurs, est aujourd’hui maîtrisée. Sachez que les efforts de réduction de cette dette seront poursuivis.

Je l’indique à M. Chevènement, nous conservons le cercle vertueux engagé en 2007. M. le rapporteur spécial, François Marc, l’a d’ailleurs bien souligné dans son rapport.

La dette exigible était de 123 millions d’euros à la fin de 2006 ; elle a atteint 75 millions d’euros à la fin de 2007 et devrait être d’un niveau similaire à la fin de 2008. Le montant des restes à payer diminue lui aussi en parallèle.

Quatrièmement, sans préjuger les mesures que vient d’annoncer le Président de la République, le projet de budget s’inscrit pleinement dans l’objectif de relance de notre économie, notamment par une attention marquée en faveur de la cohésion territoriale et de la compétitivité. Je souhaite le montrer en répondant maintenant aux différents intervenants.

Monsieur Chevènement, je ne vais pas opposer l’ombre à la lumière. Il y a toujours eu des zones d’ombre dans ce pays, et personne n’est encore parvenu à apporter toute la lumière ! Cependant, le plan de relance permettra d’ajouter au moins 400 millions d’euros aux interventions normalement prévues en 2009 par l’État pour les contrats de plan État-région, c’est-à-dire environ 1,8 million d’euros par an.

En matière de compétitivité, monsieur le rapporteur pour avis, vous avez raison de dire que la politique des pôles de compétitivité est un réel succès. Le Président de la République a d’ailleurs annoncé, le 26 juin 2008, à Limoges, le lancement de la deuxième phase de cette politique avec un budget global affecté par l’État de 1,5 milliard d’euros, soit autant que pour la phase 1.

Pour les pôles existants, à ma demande, nous avons adopté une attitude équilibrée. Ainsi, en ce qui concerne les treize pôles nécessitant une reconfiguration, après une évaluation de la DATAR et d’un cabinet spécialisé, le dispositif est maintenu jusqu’à la fin de l’année 2009. Les pôles disposent donc d’une année supplémentaire pour faire leurs preuves.

J’ai tenu à ce que l’État les accompagne individuellement. Pour chacun d’eux, un plan de progrès et des objectifs sont établis en commun en ce moment. Ils constitueront la référence d’une évaluation qui sera conduite avant la fin de l’année 2009. La confirmation du label pour la période 2010-2011 sera bien sûr conditionnée au caractère positif de cette évaluation. Nous avons donc donné une deuxième chance aux treize pôles qui n’avaient pas atteint leurs objectifs.

Monsieur Pointereau, les points de faiblesse que vous avez soulevés dans votre rapport pour avis concernant la place insuffisante laissée aux PME, le manque d’implication parfois des établissements de recherche et de formation ainsi que le souhait d’une association plus étroite des collectivités correspondent aux axes essentiels d’amélioration retenus pas le Gouvernement.

Mais il n’y a pas que les pôles de compétitivité. Les dynamiques des réseaux d’entreprises sont multiples. Ceux qui se tournent davantage vers la recherche et le développement s’inscrivent dans la logique des pôles de compétitivité. D’autres sont orientés principalement vers la compétitivité des entreprises et ont une composante « recherche » limitée.

Je me suis engagé à ce que l’on puisse proposer un dispositif de soutien à cette seconde catégorie de réseaux innovants, qui n’ont pas la taille critique d’un pôle mais qui participent pleinement à la compétitivité des territoires. La DIACT fera des propositions à ce sujet en 2009.

Comme l’ont constaté MM. Pointereau, Fouché et Boyer, la politique des pôles d’excellence rurale est essentielle pour nos territoires ruraux. D’ailleurs, lors de mes déplacements, j’ai pu vérifier sur le terrain la pertinence des projets mis en œuvre par les PER.

Où en est-on à l’échéance des trois ans de l’appel à projets ?

À mon arrivée au mois de juin, une première estimation a été faite par la DIACT. Une centaine de pôles d’excellence rurale étaient à la traîne. Ils ont alors été invités à se reprendre et à respecter leurs objectifs.

Après une vigoureuse relance, aujourd’hui, moins d’une dizaine de PER n’ont pas démarré et à peine six n’ont pas rempli leurs objectifs. Les PER qui n’auront engagé juridiquement aucune action avant la fin de l’année perdront leur label, sauf circonstances exceptionnelles pouvant justifier une prolongation de ce délai, par exemple à cause de l’impact d’une restructuration de la défense sur le projet. Avouez que si, sur 379 pôles labellisés, seulement six sont « délabellisés » à la fin de l’année, nous pourrons dire que l’objectif aura été atteint.

En 2009, l’État engagera la dernière tranche des 235 millions d’euros prévus pour le soutien des projets.

Je vous confirme que je souhaite lancer un nouvel appel à projets en 2009. Il portera prioritairement sur les deux enjeux majeurs du monde rural aujourd’hui : la mutualisation des services publics et le développement durable des territoires.

Je suis particulièrement sensible aux observations et aux propositions que vous formulez dans votre rapport pour avis sur la gestion des fonds des PER, monsieur Pointereau. Sans renoncer aucunement au principe de l’appel à projets, gage de qualité et d’efficacité, nous devons effectivement – j’ai bien retenu ce que vous préconisez – alléger pour l’avenir certaines contraintes de gestion en renforçant encore la position du FNADT comme réceptacle unique des crédits des ministères pour les PER et en donnant une certaine marge d’appréciation au préfet lorsqu’il y a des changements dans le portage des opérations du PER, dès lors qu’ils ne remettent pas en cause les projets labellisés. Nous avons tout à gagner à simplifier les procédures. En ayant comme interlocuteur la DIACT et le FNADT, la situation sera beaucoup plus claire.

Ces éléments renforceront les résultats des évaluations, que j’attends pour la mi-décembre.

À la lumière de l’expérience des pôles d’excellence rurale, je pense, monsieur Biwer, que, au cœur de la question de l’égalité entre les villes et les campagnes, il y a la nécessité d’aider à faire émerger et prospérer les projets des territoires urbains comme des territoires ruraux, et de disposer pour cela des moyens de mener des politiques d’excellence ciblées et efficaces. C’est grâce à la complémentarité que nous avancerons. Et, croyez-moi, j’ai l’intention de m’y employer !

En matière de cohésion territoriale, j’assure la coordination de la politique de redynamisation des territoires concernés par le redéploiement des armées. Les mesures d’accompagnement sont financées par le Fonds de restructuration de la défense, le FRED, à hauteur de 126 millions d’euros sur trois ans, et par le FNADT pour 75 millions d’euros sur trois ans, dont 30 millions en 2009. La DIACT assure le pilotage interministériel de ce plan.

Madame Terrade, vous avez abordé la question des délocalisations. Il est vrai qu’elles constituent un outil d’aménagement et de solidarité entre les territoires. Mais nous agissons de manière plus cohérente et plus progressive que ce n’avait été le cas, par exemple, en 1992 !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Vous avez cité le cas de l’INSEE. Premièrement, en ce qui concerne ce cas précis, le Gouvernement a confié à une mission le soin de définir les contours et les modalités de cette délocalisation. L’opération n’est donc pas effectuée brutalement.

Deuxièmement, les délocalisations se font non pas au hasard, mais dans un souci de cohérence. Ainsi, nous voulons constituer à Metz un pôle interministériel de statistiques et d’études visant à garantir plus d’efficacité et de coopération entre les services.

En ce qui concerne la carte militaire, jamais, madame Terrade, monsieur Lozach, aucune réforme des services publics en général et de la défense en particulier n’a bénéficié d’un accompagnement aussi important. C’est ce que je souligne dans toutes les villes où je me rends pour présenter la réforme.

L’effort consenti par l’État est exceptionnel : 320 millions d’euros de crédits budgétaires et plus de 700 millions d’euros d’exonérations fiscales, des mesures de cession gratuite du foncier militaire ou encore de soutien aux finances des communes touchées. J’y insiste, les cessions sont gratuites ! Nous nous sommes battus pour cela, avec le soutien du Président de la République, de façon à offrir aux maires ces terrains libérés par l’armée.

C’est le cas notamment à Briançon où quatre hectares situés en plein centre-ville vont être cédés à la municipalité pour un euro symbolique. Et ce sera la même chose pour l’ensemble des sites fonciers touchés par les restructurations de la défense. Jamais, encore une fois, l’État n’a accompagné une réforme avec autant de moyens.

M. Jean-Jacques Lozach. Vous le ferez partout ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Bien entendu que nous le ferons partout ! Je répète que les mesures de cession de foncier pour un euro symbolique seront étendues à l’ensemble des sites fonciers qui bénéficieront d’un contrat de site. (Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste.) Comme vous le savez, les règles de la République s’appliquent sur l’ensemble du territoire. Ces mesures sont concentrées sur les territoires les plus fragiles et les plus touchés.

S’agissant du dispositif des zones de revitalisation rurale, je partage l’analyse de M. le rapporteur pour avis. Les mesures fiscales qui font des ZRR de véritables zones franches pour l’installation d’entreprises sont insuffisamment connues des entreprises et des professionnels, je vous l’accorde.

II convient par conséquent de progresser en ce qui concerne aussi bien l’information des bénéficiaires que la qualité de l’instruction des demandes par les services locaux. J’ai donc demandé aux préfets, dans une circulaire en date du 27 mai 2008, d’être particulièrement vigilants sur la publicité et la mise en œuvre effective de ces dispositions.

S’agissant du bilan du dispositif, les données dont nous disposons à l’heure actuelle ne nous permettent pas encore de quantifier la totalité des avantages fiscaux qui en résultent. Toutefois, une évaluation sera lancée en 2009 pour analyser l’efficacité du mécanisme, comme le prévoit la loi.

Plus globalement, je suis d’accord avec MM. François Marc et Alain Fouché sur le sujet, d’ailleurs récurrent, des dépenses fiscales rattachées au programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire ». Certains rattachements actuels relèvent plutôt de la commodité que de la nécessité, reconnaissons-le !

En tout cas, pour ce qui est des mesures fiscales directement liées aux politiques prioritaires d’aménagement du territoire, il est indispensable d’engager une telle démarche d’évaluation et de mesure de la performance.

M. François Marc, rapporteur spécial. Très bien !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. L’aménagement du territoire dans le domaine du numérique participe pleinement de la cohésion territoriale, et je souhaite répondre à cet égard aux préoccupations exprimées tant par M. le rapporteur pour avis que par MM. Fouché, Biwer et Boyer. La « fracture numérique » est un enjeu déterminant, parce que la téléphonie mobile ou internet sont devenus aussi importants que l’eau courante ou l’électricité.

M. François Marc, rapporteur spécial. C’est vrai !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. S’agissant de la téléphonie mobile, le plan de couverture des zones blanches est exemplaire tant par les résultats qu’il a donnés que par le partenariat qu’il a permis d’instaurer entre l’État, les collectivités et les opérateurs, ce qu’il convient de mettre en avant.

Mais, pour aller plus loin, j’ai fait en sorte depuis mon entrée en fonctions qu’une solution soit trouvée pour les 364 communes « orphelines » du plan initial. Il n’y aura plus, à la fin de l’année 2010, de zones blanches sur notre territoire.

Au sujet d’internet, je me félicite que le Premier ministre ait décidé de l’affectation de fréquences du dividende numérique pour la réalisation d’un réseau de très haut débit sans fil. Les fréquences seront disponibles à partir de la fin de l’année 2011. Elles permettront d’offrir partout le très haut débit, en attendant la généralisation de la fibre optique.

Je ferai d’ailleurs des propositions pour que l’aménagement du territoire soit l’un des aspects pris en considération lors de l’appel à candidatures pour l’attribution des fréquences.

S’agissant des services publics, en particulier dans le monde rural et en montagne – je pense plus spécialement à La Poste et aux problèmes d’accès aux soins –, je souhaite répondre à MM. Fouché, Repentin et Lozach.

Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d’État, il vous faut songer à conclure.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Oui, madame la présidente !

Le Président de la République m’a demandé la semaine dernière, lors du Congrès des maires de France, de faire en sorte, avec ma collègue Michèle Alliot-Marie, que les restructurations des services publics n’aient pas d’effets cumulatifs trop forts en termes d’emplois publics et de services publics.

Le Premier ministre, quant à lui, a souhaité que je fasse le bilan de l’application de la charte des services publics, signée en 2006. J’élabore actuellement ce rapport avec les seize signataires de la charte, que je réunirai dès le début de l’année 2009.

J’étais ce matin à l’Observatoire national de la présence postale, que je soutiens dans son action visant à faire respecter la norme de présence postale fixée dans la loi. À cet égard, neuf départements métropolitains sont encore sous-dotés. En effet, la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales impose la présence d’un point postal pour 90 % de la population de chaque département à moins de cinq kilomètres ou à vingt minutes de trajet en voiture.

À ma demande, La Poste s’est engagée à augmenter les points de présence dans les départements en question, en concertation avec les élus locaux, avant la mi-2009 ; ce sont ainsi quatre-vingts nouveaux points de contact qui pourront être créés.

J’aurais souhaité répondre plus précisément aux différents orateurs, mais mon temps de parole est limité !

Monsieur le rapporteur spécial, s’agissant du PITE, il est clair que ce qui était encore acceptable dans le contexte d’un programme expérimental, dont par ailleurs les avantages d’une gestion souple ont été soulignés, ne l’est plus dès lors que ce programme est pérennisé. Nous allons engager une mise à niveau du programme avec le ministère de l’intérieur, qui en assure la gestion, et le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, sur la base des recommandations du comité interministériel des programmes. L’évolution du périmètre de ce programme traduit par ailleurs assez fidèlement les résultats obtenus.

Monsieur Biwer, je tiens à vous rassurer quant à l’investissement en infrastructures de transports : les crédits de l’Agence pour le financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, sont garantis pour les trois ans qui viennent. L’année dernière, l’AFITF était en cessation de paiement. Aujourd’hui, son financement est intégralement assuré sur la période 2009-2011, et, en dehors du plan de relance, son budget progresse de 16 % en un an.

Monsieur Fouché, les quatre écoles de la gendarmerie, dont celle de Châtellerault, qui vont fermer ne relèvent pas du périmètre des restructurations de la défense résultant du Livre blanc, présentées en juillet dernier, et pour l’accompagnement territorial duquel j’ai été mandaté. Mais je sais que Mme la ministre de l’intérieur étudie avec les collectivités des possibilités de reconversion et d’accompagnement. Elle viendra d’ailleurs vous les présenter.

S’agissant de l’école, monsieur Repentin,…

Mme la présidente. Votre temps est écoulé depuis longtemps, monsieur le secrétaire d’État !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. … je pense qu’il faut avoir, là aussi, une approche de type « norme de transport ». Je réfléchis à ce dispositif dans le cadre de l’évaluation et de l’amélioration de la charte des services publics.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les réponses que je souhaitais vous apporter pour vous rassurer. La mission « Politique des territoires » nous est chère. Cette politique, nous essayons de la mettre en place de manière équilibrée. En effet, l’équilibre est le maître mot de notre action ; c’est de cela qu’ont besoin nos territoires. Sachez que je serai vigilant pour qu’aucun des territoires de notre magnifique pays ne soit oublié. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Politique des territoires
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Ville et logement (début)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Politique des territoires », figurant à l’état B.

État B

(En euros)

Politique des territoires

384 011 048

372 555 640

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

344 520 375

337 030 189

Dont titre 2

11 600 000

11 600 000

Interventions territoriales de l’État

39 490 673

35 525 451

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Politique des territoires ».

(Ces crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Politique des territoires ».

Ville et logement

Article 35 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Ville et logement (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Ville et logement » (et articles 82 et 83).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, compte tenu du temps trop bref qui m’est imparti dans cette discussion eu égard aux sujets traités et au montant des crédits budgétaires, ainsi qu’aux importantes questions que soulèvent tant la conjoncture défavorable du secteur de la construction que le projet de budget pour 2009, je m’attacherai à développer quatre grands thèmes qui me paraissent au cœur de la problématique actuelle. Je vous renvoie donc, mes chers collègues, à mon rapport écrit pour une présentation détaillée des objectifs et des crédits de la mission.

Je voudrais tout d’abord évoquer en quelques mots les mesures relatives au logement et à la politique de la ville qui ont été annoncées aujourd'hui même par le Président de la République, dans le cadre d’un plan de relance qui fera l’objet d’un projet de loi de finances rectificative au début de l’année prochaine.

Le financement de 70 000 logements supplémentaires, le doublement du prêt à taux zéro constituent des mesures très positives. D’autres dispositions concernant l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, et l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, l’ANAH, suscitent des interrogations sur lesquelles nous reviendrons.

Ces annonces démontrent que les doutes que nous avions formulés sur l’adéquation de ce projet de budget à l’ampleur de la crise n’étaient pas tout à fait injustifiés. Une remise à niveau salutaire du soutien de l’État au secteur de la construction est donc opérée.

Revenons-en aux quatre thèmes centraux du projet de budget pour 2009 que sont le transfert du financement du logement vers des ressources extrabudgétaires, l’avenir des projets ANRU, les conséquences du droit au logement opposable et la mise en œuvre du plan « Espoir banlieues ».

La mission « Ville et logement », du moins dans sa version « pré-collectif », est marquée avant tout par une forte diminution des crédits budgétaires par rapport aux années précédentes, la baisse étant de 14,50 % pour les autorisations d’engagement et de 6,22 % pour les crédits de paiement par rapport à l’année 2008.

Cette diminution est plus particulièrement prononcée s’agissant des crédits de la rénovation urbaine, des crédits de réhabilitation de l’habitat indigne et des crédits contribuant au financement du logement locatif social et à l’ANAH, au sein de la « ligne fongible ».

Ce net désengagement de l’État est le résultat d’un choix, a priori vertueux, qui a consisté à appliquer avec un certain volontarisme les conclusions de la révision générale des politiques publiques et les préconisations de réduction des dépenses de l’État.

Les réductions de crédits se concentrent logiquement sur les dépenses d’intervention de la mission ; elles sont confirmées par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

Elles sont heureusement compensées en grande partie par le recours aux ressources du 1 % logement. C’est pourquoi le projet de budget pour 2009 ne peut s’apprécier sans référence au projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, que le Sénat a déjà examiné en première lecture et dont l’une des principales mesures vise à orienter directement les ressources du 1 % logement, appelées à se substituer aux dotations budgétaires, sur des emplois définis par l’État.

Dans ces conditions, madame la ministre, vous devriez disposer, comme vous l’affirmez, des moyens financiers nécessaires pour atteindre l’objectif de 120 000 logements sociaux que vous vous êtes fixé pour 2009.

De même, au total, et grâce à l’apport des fonds du 1 % logement, les ressources de l’ANAH seront plus que préservées par rapport à celles de 2008. Les financements extrabudgétaires étant plus sûrs que les crédits du budget de l’État, soumis aux aléas des régulations budgétaires, l’Agence pourra effectivement disposer de l’intégralité des dotations qui lui ont été promises. (M. le président de la commission des finances sourit.)

Il faudra toutefois être en mesure d’assurer le relais entre le financement budgétaire et le financement par le 1 %. À cet égard, je m’inquiète du retard que prend l’examen du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion et de ses conséquences, notamment pour la trésorerie de l’ANAH. Il conviendra de résoudre ces éventuels problèmes de trésorerie dans les semaines qui viennent

La débudgétisation de certaines politiques du logement soulève bien des interrogations.

En premier lieu, il existe, à terme, un risque d’assèchement de la ressource du 1 % qui sera désormais consacrée en grande partie à des subventions, en lieu et place de prêts qui permettaient le renouvellement de la ressource.

Ensuite, l’une des conséquences du transfert de charge sur le 1 % est que celui-ci va devoir mettre un terme à la distribution des « Pass-travaux ». Ces prêts étaient notamment utilisés pour la rénovation de copropriétés dégradées. Par quoi seront-ils remplacés à l’avenir, sachant que le nouveau « éco-PTZ » prévu à l’article 45 du projet de loi de finances n’est pas destiné à financer ce genre de réhabilitation ?

Le Président de la République vient d’annoncer la création d’un fonds temporaire de lutte contre l’habitat indigne et les dépenses d’énergie pour 2009 et 2010, doté de 200 millions d’euros. Ce fonds sera-t-il en mesure d’assurer les mêmes fonctions que le Pass-travaux ? Comment sera-t-il financé ? Voilà des questions qui méritent une réponse.

Au-delà du recours au 1 %, le projet de budget repose aussi sur l’hypothèse selon laquelle le logement social va se tourner vers de nouvelles sources de financement qui pourraient être constituées par le produit des ventes de logements HLM, celui de la nouvelle taxe sur les organismes HLM et le produit des surloyers. À long terme, cet autofinancement sera-t-il à la hauteur des besoins en construction de logements sociaux ?

La deuxième grande interrogation que suscite le projet de budget pour 2009 porte sur l’avenir des projets ANRU.

J’affirme une nouvelle fois que la réalisation de ces projets n’est pas remise en cause en 2009. Compte tenu de la cadence annuelle de mise en œuvre des opérations conventionnées ou préconventionnées et du rythme annoncé des paiements, le plan de trésorerie du Programme national de rénovation urbaine, le PNRU, est soutenable dans les conditions actuelles, grâce aux apports de trésorerie.

Mais, en 2012, voire dès la fin de l’année 2011, la trésorerie de l’ANRU sera négative de plus de 100 millions d’euros sans l’apport de crédits de paiement de l’État à hauteur des engagements initiaux pris lors de la mise en place du PNRU.

En tout état de cause, la soutenabilité des opérations de rénovation urbaine, dans lesquelles les collectivités territoriales se sont engagées avec les bailleurs sociaux sur la base d’un engagement financier de l’État, ne peut donc raisonnablement pas être garantie au-delà des trois années à venir si les termes de l’équilibre budgétaire et extrabudgétaire actuel ne sont pas revus.

Dans ces conditions, la suppression de 1,5 milliard d’euros d’autorisations d’engagement correspondant aux conventions déjà conclues dans le cadre du PNRU, même si vous affirmez qu’elle doit être interprétée comme le résultat d’une contrainte comptable, madame la ministre, est un signal négatif, notamment pour les collectivités territoriales qui se sont engagées dans des projets lourds de restructuration de quartiers sur la foi des engagements de l’État, cosignataire des conventions.

Que penser, dans ces conditions, de l’anticipation de travaux programmés, dès 2009, pour un montant total de 600 millions d’euros, annoncée ce matin ? On voit mal à quoi correspondent ces travaux. S’agit-il d’opérations qui vont être accélérées du fait de la simplification des règles d’urbanisme ou de marchés publics ? D’où proviendront les 200 millions d’euros de crédits supplémentaires qui ont été annoncés ? S’agit-il de crédits budgétaires ou extrabudgétaires ? Autant de questions sur lesquelles nous attendons des réponses précises.

Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 1er décembre, le droit au logement opposable est entré dans la deuxième phase de sa mise en œuvre. Désormais, le recours contentieux devant le juge administratif est ouvert aux demandeurs prioritaires qui n’auront pas obtenu satisfaction après une décision favorable de la commission de médiation.

Je ne reviendrai pas sur le bilan de cette première année d’application du droit au logement, renvoyant aux conclusions du contrôle budgétaire que j’ai présentées devant la commission des finances.

En ce qui concerne votre projet de loi, madame la ministre, je souhaite que les amendements que j’ai défendus au nom de la commission des finances et qui ont été adoptés par le Sénat soient retenus par l’Assemblée nationale, afin d’apporter certaines améliorations au dispositif, s'agissant notamment de l’information des publics et du traitement des demandes dans la région d’Île-de-France.

Je dois cependant faire part de mon étonnement quant à l’absence de prise en compte des premiers mois d’application du DALO dans le projet de budget pour 2009.

Nous connaissons les faiblesses de la procédure d’instruction des dossiers de demande et les lacunes en matière d’enquête sociale dans les départements les plus concernés par la problématique. Pourtant, le montant des crédits de fonctionnement du DALO, destinés notamment au financement de l’externalisation de certaines prestations liées à l’instruction des dossiers présentés aux commissions de médiation, a été reconduit à l’identique, soit 4,12 millions d’euros, par rapport au projet de loi de finances pour 2008.

Je constate également qu’aucune dotation n’a été inscrite au titre des condamnations auxquelles l’État est exposé en 2009 du fait de l’entrée en vigueur du recours contentieux pour non-respect du droit au logement opposable. Bien que le projet annuel de performances ajoute les contentieux engendrés par la mise en œuvre du DALO à la liste des contentieux envisagés, madame la ministre, vous n’en tirez a priori aucune conséquence pour 2009 sur le montant de la dotation, qui reste fixé, comme en 2008, à 700 000 euros.

Le dernier point que je souhaite aborder est celui de la mise en place du plan « Espoir banlieues ».

Les débats nés autour du financement extrabudgétaire de la politique du logement et de la ville ont quelque peu éclipsé le travail qui a été accompli dans le cadre de la politique de la ville et les points positifs du projet de budget en ce domaine, comme d’ailleurs dans les domaines de l’hébergement d’urgence et de l’aide alimentaire, dont la commission des finances salue la remise à niveau des dotations.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Merci !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je me félicite en particulier de la démarche novatrice qui a consisté à obtenir des différents départements ministériels des programmes précis, sur trois ans, de mobilisation de leurs services sur les quartiers en difficulté. Si le suivi de ces programmes est effectivement assuré, nous arriverons peut-être à dépasser l’opposition traditionnelle entre les crédits spécifiques et les crédits de droit commun.

Je note aussi que les crédits participant au financement des associations qui interviennent dans les quartiers, gérés pour l’essentiel par l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’ACSÉ, sont maintenus à un haut niveau. Je salue également l’amélioration des procédures de délégation et d’engagement, qui a permis le déblocage rapide des crédits au début de l’année 2008. C’était la première fois que cela se produisait.

J’émettrai toutefois une réserve – cela vous semblera peut-être paradoxal – sur la création des 350 délégués des préfets. Je me félicite de cette innovation, qui reconnaît la nécessité d’établir un lien pérenne entre l’administration et les habitants des quartiers. Dans la proposition que j’avais moi-même formulée en 2006, à la suite d’un contrôle budgétaire sur ces fonctionnaires dénommés alors « délégués de l’État » dans les quartiers, je n’avais pas estimé souhaitable d’engager une professionnalisation de ces fonctions.

J’observe que le coût de la professionnalisation – 22,4 millions d’euros – aurait mérité d’être comparé à celui d’une généralisation et d’un recentrage sur les quartiers prioritaires, comme je l’avais proposé, au nom de la commission des finances. Je salue tout de même la décision.

Enfin, je sais que la délégation interministérielle à la ville a connu une période d’incertitude. Il me paraît important que cette administration retrouve rapidement sa capacité à coordonner et à animer la politique de la ville ; nous saluons la décision de recentrer ses missions sur cet objectif, particulièrement en cette année 2009 où elle devra préparer le renouvellement des contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, et prendre toute sa place dans la réforme de la géographie prioritaire de la politique de la ville que le Sénat appelle de ses vœux depuis de nombreuses années. J’espère que nous pourrons y travailler dès le début de l’année prochaine.

J’en viens maintenant aux articles rattachés, pour leur examen, aux crédits de la mission.

L’article 82 propose une profonde modification du dispositif d’exonération des charges sociales dans les zones franches urbaines, régime qui avait été confirmé par la loi pour l’égalité des chances du 31 mars 2006.

Pour l’essentiel, ces modifications ont pour but de plafonner le niveau de salaire ouvrant droit à une exonération totale de cotisations à 1,4 fois le SMIC. Au-delà de ce seuil, le montant de l’exonération serait dégressif.

Il s’agit également de supprimer le mécanisme de « sortie en sifflet » en trois ans, porté à neuf ans pour les entreprises de moins de cinq salariés. Ce mécanisme permettait de réduire progressivement le bénéfice de l’exonération à 60 %, puis à 40 % et, enfin, à 20 %.

Cette mesure a essentiellement pour objet de réaliser une économie de l’ordre de 100 millions d’euros. La commission des finances considère, et elle n’est pas la seule, que c’est un très mauvais signal envoyé à tous les chefs d’entreprise qui ont joué le jeu. (M. Dominique Braye acquiesce.)

Il est tout à fait paradoxal, alors que l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, l’ONZUS, vient de saluer les effets bénéfiques des zones franches urbaines, que nous changions brutalement les règles du jeu.

M. Dominique Braye. Et la parole de l’État ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Voilà moins de deux ans, nous avions en effet augmenté le nombre de zones franches urbaines et encouragé les industriels à venir s’y installer. Cette situation me paraît tout à fait regrettable, et j’espère que la discussion qui va s’ouvrir permettra d’y remédier.

S’agissant de l’article 83, introduit par l’Assemblée nationale, la commission des finances a déposé un amendement de suppression.

Enfin la commission vous présentera deux amendements tendant à insérer dans le projet de loi des articles additionnels après l’article 82.

Le premier, que nous avions déjà présenté lors de l’examen des crédits de la mission pour 2007, a pour objet d’indexer la valeur du terme constant de la participation minimale des bénéficiaires des aides personnelles au logement.

M. Thierry Repentin. Dès 2009 ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Nous en discuterons, mon cher collègue, mais cela paraît quelque peu difficile !

Le second amendement concerne le droit au logement opposable et vise à préciser les conditions dans lesquelles l’État fait figurer dans ses comptes la provision pour risque contentieux lié au DALO.

Sous le bénéfice de ces observations et du vote des amendements de la commission des finances, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les crédits de la mission « Ville et logement ».

Je souhaite que ces crédits et les mesures annoncées ce jour même, à midi, contribuent à atténuer les conséquences néfastes de la crise qui se profile, aussi bien pour le logement que dans les quartiers concernés par la politique de la ville. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre André, rapporteur pour avis.

M. Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette année, la politique de la ville est au cœur de nombreuses réformes : dotation de solidarité urbaine, zones franches urbaines, ou encore plan « Espoir banlieues » qui traduit les engagements du Président de la République en direction des quartiers.

Ce budget est donc l’occasion d’examiner la pertinence de mesures qui toucheront une large partie de nos concitoyens, 65 % des Français vivant aujourd’hui en zone urbaine.

Pour 2009, la gouvernance de la politique de la ville évolue : programme unique, mission de la délégation interministérielle à la ville revue et recentrée sur les fonctions de secrétariat du comité interministériel des villes, rôle réaffirmé de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances dans les quartiers. Nous nous en félicitons puisqu’il s’agit de recommandations qui avaient été présentées par le Sénat.

Je relève toutefois – je serai d’ailleurs plus sévère sur ce point que M. Philippe Dallier – que la création des « délégués du préfet » dans les quartiers ne répond qu’imparfaitement aux difficultés de gouvernance sur le plan local. Madame la ministre, j’aurais souhaité un renforcement du rôle des préfets et des sous-préfets en matière de politique de la ville et de partenariats avec les maires.

Après ces observations relatives à la gouvernance, j’évoquerai différents points.

Je suis heureux de voir que l’Agence nationale de rénovation urbaine participera au futur programme national de rénovation des quartiers anciens dégradés.

Toutefois, la commission, au cours de ses travaux, s’est inquiétée des perspectives de financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU. Le recours au paiement par le 1 % logement nous a conduits à nous interroger sur la volonté de l’État de tenir ses engagements. Les mesures qui ont été annoncées ce matin à Douai par le Président de la République nous rassurent, puisque la rénovation urbaine fera partie du plan de relance pour 600 millions d’euros, dont 200 millions d’euros de crédits supplémentaires budgétés pour l’ANRU dès l’année prochaine.

En ce qui concerne le développement économique et social, une mobilisation massive des politiques de droit commun a été annoncée par le Gouvernement le 20 juin dernier. Je ne peux qu’espérer, madame la ministre, que les 4,3 milliards d’euros mobilisés par l’ensemble des ministères en 2009 seront bien déployés en faveur des quartiers.

Je considère qu’il est indispensable de maintenir intacts les moyens spécifiques de la politique de la ville pour servir de levier à la mobilisation des crédits de droit commun.

À cet égard, les contrats urbains de cohésion sociale doivent absolument être pérennisés dans l’esprit qui a animé leur création. Ils constituent en effet un instrument efficace de partenariat entre l’État, la ville et le tissu associatif.

Par ailleurs, le plan « Espoir banlieues » a fait l’objet d’une traduction budgétaire de 22 millions d’euros, ce dont nous nous félicitons. Nous ne pouvons que souhaiter pour l’avenir, comme vous-même sans doute, madame la ministre, l’amélioration de ces financements eu égard à l’ampleur des besoins.

Je prends bonne note de l’attention particulière réservée au volet « éducation et égalité des chances », avec les internats d’excellence, les écoles de la deuxième chance ou encore l’accompagnement dans les classes préparatoires aux grandes écoles. J’insiste toutefois sur la nécessité d’inscrire la mise en œuvre de ces mesures dans le prolongement des dispositifs existants, en complémentarité avec les stratégies locales en cours afin d’éviter toute incohérence sur le terrain.

J’en viens à la politique en faveur des zones franches urbaines.

La réforme envisagée par l’article 82 du dispositif d’exonération de charges sociales sur les bas salaires pour favoriser l’emploi est malvenue. Elle pourrait avoir des répercussions négatives en termes de répartition des emplois créés dans ces quartiers. Le risque est en effet que les entreprises se livrent à une véritable segmentation de leurs activités en réservant aux quartiers difficiles les emplois à faible valeur ajoutée, …

M. Pierre André, rapporteur pour avis. … ce qui est en totale contradiction avec les objectifs d’excellence que nous poursuivons pour ces quartiers. (Mme Raymonde Le Texier applaudit.)

M. Dominique Braye. Absolument !

M. Pierre André, rapporteur pour avis. D’autre part, cette réforme risque de pénaliser les entreprises installées en zones franches urbaines, donc d’avoir des répercussions majeures sur la situation de l’emploi dans les quartiers. N’oublions pas que ces emplois créent des richesses et sortent des familles entières de la désespérance.

Cette réforme est à l’opposé des excellentes mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l’emploi.

M. Alain Vasselle. Comment est-ce possible ?

M. Pierre André, rapporteur pour avis. Le dispositif actuel fonctionne bien. Il a permis de créer 125 000 emplois. Est-ce le moment, alors que l’on veut défendre l’emploi, de décider une réforme que l’on peut vraiment qualifier d’idiote ?

C’est pourquoi, mes chers collègues je vous proposerai, au nom de la commission des affaires économiques un amendement tendant à supprimer l’article 82.

M. Dominique Braye. Absolument !

M. Thierry Repentin. Excellent !

M. Pierre André, rapporteur pour avis. Mais je vous rassure, madame la ministre, sous réserve de ces observations, c’est avec plaisir que nous défendrons les crédits de la mission « Ville et logement », sur lesquels la commission a émis un avis favorable. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Dominique Braye. Nous aussi !

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis.

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le budget du logement pour 2009 est un budget de contrastes.

Contraste d’abord entre le discours et les actes : d’un côté, on sonne la mobilisation générale en faveur du logement, en soumettant un projet de loi au Parlement ou en faisant des annonces aujourd’hui même à Douai ; de l’autre côté, on soumet les dotations budgétaires de l’État à une très forte cure d’amaigrissement.

Contraste également entre ce désengagement budgétaire et l’ampleur de la crise économique et financière que traverse notre pays, qui rendrait d’autant plus légitime une action contracyclique de l’État.

Certes, je reconnais un certain effort en matière de crédits affectés à l’hébergement, qui permettent à l’État d’honorer ses engagements au titre du plan d’action renforcé du dispositif d’hébergement et de logement des personnes sans abri, le PARSA.

S’agissant du financement des aides personnelles au logement, je m’interroge quelque peu. Madame la ministre, sans doute pourrez-vous me rassurer sur la sincérité du budget, construit sur l’hypothèse d’une baisse du nombre de chômeurs de l’ordre de 100 000 et d’un accroissement de 4 % de la masse salariale en 2009.

Au regard des derniers éléments macroéconomiques connus – croissance en berne et hausse des demandeurs d’emploi –, je me demande comment l’on peut sérieusement escompter une telle réduction du chômage et une telle croissance de la masse salariale en 2009. Il y a donc fort à parier que l’État sera amené au cours de l’année à abonder ce budget pour garantir son équilibre.

En ce qui concerne les aides à la pierre, la situation me semble encore plus délicate puisque les dotations sont en chute libre, mais pour des motifs différents selon qu’il s’agit du parc social ou du parc privé.

Pour le parc social, les autorisations d’engagement chutent de moitié et les crédits de paiement baissent de 31 % par rapport à 2008.

Pour le parc social, les objectifs de production pour 2009 sont ambitieux, avec 120 000 nouveaux logements sociaux.

Toutefois, le budget prévu pour le financement de ces réalisations n’est pas à la hauteur des ambitions affichées.

D’une part, la subvention budgétaire versée pour chaque logement social construit reste stable, à un niveau homéopathique, et, d’autre part, on assiste à une réduction très importante de la ligne consacrée à la surcharge foncière, qui permet pourtant de donner un coup de pouce aux opérations locatives sociales situées dans les zones tendues.

Enfin, il faut se souvenir que plus aucun crédit budgétaire ne sera consacré à la prime à l’amélioration des logements à usage locatif, ou PALULOS, entièrement remplacée par la création de prêts à taux bonifiés de la Caisse des dépôts et consignations pour les rénovations thermiques des logements sociaux.

On invite les organismes d’HLM à se tourner vers de nouvelles sources de financement : produits de cessions des logements HLM à leurs occupants, création d’un prélèvement sur les organismes d’HLM qui n’investissent pas suffisamment – cela laisse à penser qu’ils sont responsables de la pénurie de l’offre… – et augmentation des recettes de surloyer.

J’entends ces arguments, mais j’avoue être très sceptique quant à leur pertinence.

Tout d’abord, eu égard au contexte actuel, je doute que les prochains mois se caractérisent par un accroissement des ventes de logements HLM.

Ensuite, le principe d’un prélèvement sur la trésorerie des bailleurs sociaux, dont la date d’application a d’ailleurs été fort judicieusement repoussée par le Sénat, me semble discutable.

Enfin, il est étonnant que l’augmentation des dépenses de loyers des locataires, via le surloyer, serve d’argument au désengagement de l’État.

En ce qui concerne la rénovation thermique du parc HLM, qui est l’un des engagements phares du Grenelle de l’environnement, je tiens à mettre en exergue le décalage entre les objectifs et les moyens.

Alors que le parc privé aura à sa disposition un outil puissant, l’éco-prêt à taux zéro d’un montant de 30 000 euros par logement, le parc social se voit allouer des enveloppes de prêts, certes à taux bonifiés mais qui portent néanmoins intérêts et dont le montant n’est que de 12 000 euros par logement. Pourquoi une telle différence de traitement ?

Madame la ministre, pourriez-vous nous donner quelques éléments d’information sur la centralisation des fonds du livret A, dans la mesure où le projet de décret a fait l’objet de réserves de la part de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations ?

En ce qui concerne la réhabilitation du parc privé, sans refaire le débat que nous avons eu sur le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, je veux à mon tour dénoncer le détournement des ressources du 1 % logement vers l’ANAH, qui diminue le volume global des moyens affectés par la collectivité à la politique du logement.

Il paraît difficile de contraindre l’ANAH à s’endetter sur les marchés financiers, par l’intermédiaire de l’Agence France Trésor, pour honorer ses paiements en début d’année, dans l’attente du déblocage des fonds du 1 %. Une telle opération va occasionner des frais financiers qui seront prélevés sur les moyens d’intervention de l’Agence, laquelle a pourtant un grand besoin de ses fonds.

Enfin, il convient également de relever que l’augmentation des interventions du 1 % sous la forme de subventions, au détriment des prêts qui donnent lieu à des retours, est de nature à peser gravement, à moyen terme, sur le budget de l’Agence et à tarir l’une de ses ressources. Sans doute est-ce la raison pour laquelle aucun accord n’a été trouvé avec les partenaires sociaux.

En définitive, compte tenu de ces arguments, j’avais appelé la commission des affaires économiques à émettre un avis défavorable sur l’adoption des crédits de la mission « Ville et logement ». Cependant, madame la ministre, la commission, toujours soucieuse de vous accompagner de manière positive, voire d’améliorer vos initiatives,…

M. Dominique Braye. Mme la ministre ne le comprend pas toujours !

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. …ne m’a pas suivi. Je me dois donc de vous dire qu’elle a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Ville et logement ».

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Ville et logement » est très perturbé – c’est le moins que l’on puisse dire – par les annonces faites aujourd’hui même par le Président de la République. Les mesures proposées par ce dernier montrent que le Gouvernement est déterminé à réagir rapidement, mais elles vident un peu de son sens le projet de budget qui nous est soumis ce soir.

Nous allons donc discuter d’un document qui ne reflète plus tout à fait les choix du Gouvernement pour l’année 2009, ce qui est un peu surréaliste.

Je m’efforcerai par conséquent de commenter à la fois les crédits de la mission « Ville et logement » et les mesures présentées ce matin, leur articulation n’étant pas sans soulever quelques difficultés.

Concernant l’hébergement, les chiffres parlent d’eux-mêmes : alors que l’on dénombrait 51 000 places d’hébergement en 2004, il y en a aujourd’hui près de 70 000, et 72 000 sont budgétées pour 2009. Les 1 000 places supplémentaires annoncées aujourd’hui par le Président de la République sont-elles à ajouter à ce chiffrage ?

Mme Christine Boutin, ministre. Oui !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Celui-ci démontre en tout cas, à l’évidence, l’effort du Gouvernement et de la nation en matière d’hébergement.

Bien sûr, c’est encore insuffisant. La mort dramatique de plusieurs personnes sans domicile fixe le mois dernier nous le rappelle tragiquement. Cependant, pour que l’augmentation régulière du budget de l’hébergement ne soit pas, selon l’expression de Martin Hirsch, « un “rocher de Sisyphe” mâtiné de “tonneau des Danaïdes”, il nous faut respecter quelques principes essentiels.

Tout d’abord, l’hébergement d’urgence doit absolument être régulé. Le temps n’est plus aux atermoiements des associations qui rechignent à travailler ensemble. Gérer des places d’hébergement d’urgence, c’est participer à un service public et donc accepter les contraintes d’un service public.

Ensuite, il faut impérativement prévoir un régime spécifique pour l’Île-de-France.

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Les besoins n’y sont effectivement pas les mêmes qu’ailleurs, et il est absurde de vouloir traiter tous les territoires de la même manière. (Mme la ministre acquiesce.)

Enfin, il faut à mon avis avoir le courage – vous n’en manquez pas, madame la ministre – d’examiner plus attentivement le travail des centres d’hébergement. Pourquoi, à dotation budgétaire égale, les prestations fournies sont-elles parfois si différentes d’une structure à l’autre ? Pourquoi les personnes accueillies dans certaines d’entre elles sortent-elles plus vite et en plus grand nombre vers le logement durable que les personnes accueillies dans d’autres ? Il nous appartient de répondre à ces questions.

Je dirai à présent quelques mots du logement.

Je veux le rappeler clairement, on n’a jamais construit autant de logements sociaux dans l’histoire de notre pays qu’au cours de ces dernières années.

Mme Christine Boutin, ministre. Merci de le dire !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Ainsi, 42 000 logements HLM ont été bâtis en 2000, mais ce nombre de logements a été porté dès 2004 à 72 000, puis, en 2007, à 92 000. On en attend 108 000 cette année …

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. …  et 120 000 pour 2009.

Les logements très sociaux, les logements concernés par le prêt locatif aidé d’intégration, ou PLAI, suivent exactement le même mouvement, ce dont je me réjouis ; 4 000 de ces derniers avaient été construits en 2000, et 17 000 le seront cette année.

Une question me préoccupe cependant.

En commission, vous nous avez très sincèrement expliqué, madame la ministre, que le budget 2009 prévoyait 120 000 logements sociaux, contre 140 000 prévus pour 2008, car le secteur du bâtiment était tout simplement incapable de faire plus. Avec 120 000 logements, la machine tourne déjà à plein régime. Par conséquent, en annonçant ce matin 70 000 logements sociaux supplémentaires pour 2009 et 2010, le Président de la République n’aurait-il pas cédé à la précipitation ?

Par ailleurs – je pose la question très directement –, pourquoi vouloir absolument maintenir le prélèvement de 850 millions d’euros sur le 1 % logement et, dans le même temps, prévoir un plan conséquent de relance des aides à la pierre et un doublement du prêt à taux zéro ? Pourquoi, autrement dit, diminuer la dépense publique d’un côté et l’augmenter de l’autre, alors qu’il s’agit exactement de la même finalité dans les deux cas, comme vous avez cherché à la démontrer tout au long de ces discussions en commission, madame la ministre ? Vous avouerez que, dans le meilleur des cas, la cohérence de telles actions mérite au moins explication.

J’en terminerai avec le logement en indiquant qu’aucun crédit n’est prévu pour les PALULOS. Je sais bien que, selon le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, en cours d’examen, leur financement sera désormais assuré par une mutualisation des ressources des sociétés d’HLM. Cependant, le Sénat a décidé de reporter cette mutualisation à 2011. S’il maintient sa position et que le budget du Gouvernement n’évolue pas, comment donc les PALULOS seront-elles financées en 2009 ?

Je conclurai mon propos par quelques remarques sur le programme « Politique de la ville ».

Le succès du plan « Espoir banlieues » repose sur la mobilisation de l’ensemble des ministères concernés. Il est évident que les populations des quartiers sensibles ont besoin de plusieurs aides complémentaires : il faut à la fois renforcer les moyens en faveur de l’éducation, favoriser l’accès à ces quartiers mais aussi l’accès aux soins, assurer la sécurité et développer les services publics. Tout le monde en convient.

Cette situation, madame la ministre, vous amène à ne réguler que 17 % de la totalité des crédits dédiés à la politique de la ville, alors que cette politique, plus que toute autre, a besoin – tous les maires peuvent en témoigner – d’un pilote doté de moyens de contrôle, voire de contraintes. De quels outils disposez-vous donc, madame la ministre, pour assumer cette fonction que nous considérons comme indispensable?

De même, au niveau local, la création de 350 délégués du préfet, évoquée tout à l’heure par M. Pierre André, part d’une bonne intention et répond d’ailleurs à l’une de nos demandes passées. Mais comment ces délégués pourront-ils vraiment assurer la coordination des actions si les parties prenantes refusent elles-mêmes de travailler ensemble ? L’explosion du nombre de contrats urbains de cohésion sociale semble témoigner d’une certaine ambiguïté en la matière.

Telles sont, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les observations de la commission des affaires sociales. Ce budget pour 2009 traduit donc un effort incontestable et important, mais il n’est pas sans contradictions. Il soulève surtout des questions sensibles sur lesquelles nous attendons les réponses les plus claires possible.

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; ils seront repris à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Bernard Frimat.)

PRÉSIDENCE DE M. Bernard Frimat

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Ville et logement (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Discussion générale

8

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour un rappel au règlement.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, ce rappel au règlement se fonde sur les termes de l’article 36, alinéa 3, du règlement de notre assemblée.

En effet, nous débattons ce soir d’un projet de budget de la mission « Ville et logement » dont la teneur est quelque peu en décalage avec la réalité des besoins sociaux, mais aussi, et c’est là le plus surprenant, avec les déclarations faites aujourd’hui même par le Président de la République dans son discours de Douai.

Le Président Sarkozy a annoncé un effort budgétaire nouveau pour le logement, qui comprendra le renforcement des moyens de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, et l’accroissement du volume de la construction de logements sociaux programmés. Une telle démarche ne peut manquer de surprendre puisque, selon les termes mêmes de l’allocution présidentielle, elle passera par la discussion d’un collectif budgétaire qui, faut-il le souligner, sera le troisième que nous aurons examiné durant cette session !

Les annonces seront-elles suivies d’effets ? C’est la première question que nous pouvons nous poser !

Renforcer les moyens de l’ANRU est une nécessité évidente au regard des besoins de financement. Mais n’oublions pas que les millions que l’on nous promet aujourd’hui sont ceux qui n’ont jamais été mobilisés, alors que l’État s’y était engagé lors de la création de l’Agence ! N’oublions pas non plus que c’est en confisquant l’argent du 1 % que l’État, dans le présent projet de budget, se libère du financement de l’Agence !

Pour ce qui est de la construction de logements sociaux, autre nécessité incontournable, notons que le niveau de l’aide restera modeste. Il est en effet question de 600 millions d’euros d’aide directe pour 100 000 logements, soit 6 000 euros par logement : cela signifie plus de prêts locatifs sociaux que de logements véritablement sociaux, alors que la demande porte d’abord et avant tout sur les prêts locatifs aidés d’intégration ! Nous sommes encore bien éloignés des sommes dépensées pour aider le logement locatif privé, comme le montrent les 5 milliards d’euros prévus pour le rachat aux promoteurs engoncés dans leurs stocks de 30 000 logements en vente en l'état futur d'achèvement !

Toutes ces considérations ramènent à sa juste proportion la réalité des annonces présidentielles et montre par anticipation que nous sommes loin de répondre aux besoins en matière de logement.

M. le président. Ma chère collègue, acte vous est donné de ce rappel au règlement.

9

Ville et logement (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Deuxième partie

Loi de finances pour 2009

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Ville et logement

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.

Ville et logement (suite)

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 35 et état B

M. le président. Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Ville et logement ».

Tous les rapporteurs s’étant exprimés avant la suspension, je vais maintenant donner la parole aux orateurs des groupes.

Je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je rappelle qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de budget de la mission « Ville et logement » qui nous est soumis pour 2009 est un mauvais projet de budget. C’est ainsi que l’on peut le caractériser le plus simplement ; il concerne pourtant des aspects essentiels de la vie de nos concitoyens.

Mise en œuvre délicate du droit au logement opposable, plan Marshall des banlieues sans cesse annoncé et sans cesse reporté, discours incohérents sur le mal-logement et le traitement des difficultés des sans domicile fixe : telle est aujourd’hui la réalité à laquelle nous sommes confrontés.

Le logement connaît dans notre pays une situation dramatique : demande massive de logement locatif social, hausse des loyers dans le secteur privé, persistance d’un haut niveau de prix à l’achat, déshérence du dispositif d’accession sociale à la propriété.

De plus, nous voyons depuis plusieurs mois des phénomènes nouveaux s’amplifier : familles étranglées par l’endettement, victimes du système des prêts relais ; chute du nombre des mises en chantier de logements neufs ; effondrement du volume des transactions dans l’ancien ; liquidation massive d’emplois dans l’ensemble de la filière, depuis les agences immobilières jusqu’aux sociétés de promotion en passant par les entreprises de construction.

Tout cela ne fait qu’accroître encore le décalage entre les intentions que vous affichez, madame la ministre, et la réponse que votre politique apporte à la situation réelle du logement et des quartiers.

Votre projet de budget pour 2009 se caractérise avant tout par une série de « tours de passe-passe » dont la seule raison d’être est de faire contribuer ledit budget à l’effort de maîtrise du déficit. À vrai dire, quand on finit par admettre un déficit prévisionnel supérieur à 50 milliards d’euros, on peut subrepticement retirer 200 millions ou 300 millions d’euros des crédits d’une mission dont la portée est pourtant essentielle pour l’appréciation que les gens portent sur l’action publique : on n’en est plus à cela près !

Le projet de budget pour 2009 consacre donc la quasi-disparition des crédits de la ville, d’autant que la mission « Relations avec les collectivités territoriales » verra émerger une dotation de développement urbain, d’un montant anecdotique de 50 millions d’euros, qui ne compensera ni la dissolution des crédits de la ville inscrits dans la présente mission ni la mise en cause de la dotation de solidarité urbaine. Pourtant, cette dernière dotation bénéficie d’une forme de « délai de grâce » du fait de l’intervention des élus locaux, relayée par les parlementaires de tous les groupes !

Le projet de budget pour 2009 consacre également les orientations de cet inutile et inefficace projet de loi dit de « mobilisation pour le logement » que nous avons examiné récemment et dont les données sont connues. La captation des ressources du 1 % logement, qu’il faut bien qualifier de confiscation de l’argent des salariés au profit de la régulation budgétaire, en est la plus parfaite illustration.

Prenant quelques libertés avec la réalité, madame la ministre, vous avez tenté de vous justifier, d’une manière pour le moins audacieuse, en affirmant que l’affectation des ressources du 1 % au budget de la mission permettrait de consacrer effectivement ces sommes aux besoins de logement des salariés et des familles. Cette affirmation est fausse ! Il faudra nous prouver que les fonds du 1 % n’ont pas rendu possibles la construction de logements sociaux ni le financement de sociétés d’HLM ! Il faudra nous prouver que le pass-travaux n’a pas permis à de nombreuses familles modestes d’accéder à la propriété de leur logement ou de le remettre aux normes de confort !

À ce sujet, un point doit être rappelé. Lors de l’examen du projet de loi dit « de mobilisation pour le logement », vous avez prétendu, madame la ministre, que le pass-travaux allait disparaître – il passerait de 900 millions d’euros issus des fonds du 1 % à 200 millions d’euros aujourd’hui – parce que monterait en puissance le crédit d’impôt « gros travaux » à portée écologique. Le problème, madame la ministre, c’est qu’aux 700 millions d’euros que vous avez confisqués aux petits accédants à la propriété s’ajoutent les 550 millions d’euros que l’État économisera sur le crédit d’impôt, puisque les gros travaux sans qualité environnementale ne seront plus financés ! Au total, ce sont donc 1 250 millions d’euros qui seront retirés aux familles modestes, singulièrement aux accédants : « Tous propriétaires, mais à vos frais », pouvons-nous désormais dire aux Françaises et aux Français ! Il suffit pourtant, madame la ministre, de se pencher sur l’évaluation des voies et moyens et d’ouvrir le tome consacré aux dépenses fiscales pour voir de quoi il retourne !

Dans le projet de loi de mobilisation pour le logement, en revanche, vous avez décidé d’utiliser des sommes importantes pour venir en aide aux promoteurs immobiliers en difficulté. Comment devons-nous apprécier, alors que des milliers de personnes sont en danger parce qu’elles sont sans abri et que certaines sont déjà mortes de froid aux portes de la capitale, que le Gouvernement ait décidé de mobiliser 5 milliards d’euros pour racheter aux opérateurs immobiliers 30 000 logements invendus ? Car 5 milliards, madame la ministre, c’est pratiquement l’équivalent de l’ensemble de votre budget, et c’est deux fois et demie ce que vous consacrerez en 2009 à la construction de logements neufs, au soutien de la réhabilitation du patrimoine et à la politique de la ville réunis, bref, à tout ce qui n’est pas le financement des aides personnelles au logement ! Comment expliquer aux Françaises et aux Français que vous estimez plus nécessaire d’utiliser l’argent public pour couvrir les gâchis financiers des promoteurs que pour répondre au problème aigu du mal-logement ?

Je ne peux évidemment manquer d’évoquer ici les questions de l’urgence et de mentionner tout particulièrement le fait que les crédits de la mission « Ville et logement » sont astucieusement préservés grâce au rapatriement des crédits consacrés à l’hébergement d’urgence, qui figuraient jusqu’ici dans la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Cette opération ne doit cependant pas masquer l’essentiel : dans votre projet de budget, vous avez décidé de mobiliser plus de 1 100 millions d’euros pour payer des nuits d’hôtel aux mal logés, aux expulsés et aux victimes de la crise du logement en général, sans apporter de solution durable au problème. En réalité, comme l’ont montré la discussion du projet de loi de mobilisation pour le logement et le procès que désormais vous intentez au Sénat, coupable de ne pas vous avoir suivie, vous souhaitez contraindre les collectivités locales et les collecteurs du 1 % à prendre ce volet en charge via les crédits de l’Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l’ANAH, dont ce n’est aucunement la mission !

La moindre des choses serait pourtant que vous assumiez cette action : répondre au problème du mal-logement est une affaire de solidarité nationale qui relève de la pleine compétence de l’État et devrait donc être financée sur les crédits de votre ministère !

Ce n’est là qu’un des nombreux points qui nous conduiront à ne pas voter les crédits pour 2009 de la mission « Ville et logement » et à appeler l’ensemble des acteurs du droit au logement à continuer et à amplifier la mobilisation pour imposer d’autres choix politiques et budgétaires en la matière. Les annonces faites ce matin par le Président de la République ne changent pas fondamentalement cette politique du logement, que nous trouvons bien en dessous des besoins et des enjeux de notre époque. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’excellent rapport pour avis de M. Vanlerenberghe devant les membres de la commission des affaires sociales m’a inspiré quatre séries de questions sur lesquelles je souhaiterais bénéficier de l’éclairage du Gouvernement avant de me prononcer sur le projet de budget qui nous est présenté.

J’ai écouté avec la plus grande attention les rapporteurs. Aussi bien le rapporteur spécial, M. Philippe Dallier, que le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, M. Pierre André, relayés par M. Jean-Marie Vanlerenberghe, se sont émus de l’article 82, dont ils demandent la suppression, et ont insisté sur un aspect qui semble venir se « télescoper » avec les déclarations récentes du Président de la République en matière d’emploi et de politique économique.

Certains volets de ce projet de budget donnent le sentiment que nous allons à contresens du but visé. Sans doute n’avons-nous pas très bien compris les objectifs que vous voulez atteindre, madame la ministre, et c’est bien ce qui rend le débat intéressant : il nous permettra d’être éclairés et, peut-être, de revoir notre position en nous montrant comment concilier à la fois vos objectifs et ceux du Président de la République, que les propositions des rapporteurs tendent à conforter.

Pour ma part, je m’interroge sur les conséquences économiques et budgétaires des actions développées en faveur des sans-papiers.

Les sans-papiers n’ayant pas vocation à occuper les centres d’hébergement traditionnels, le Gouvernement, dans l’urgence, les accueille dans des hôtels. Dans votre budget, madame la ministre, avait été prévue la réservation de 10 400 places d’hôtel ; 8 700 ont été utilisées. Je souhaiterais connaître le coût budgétaire de cette opération. Le rapporteur ne disposait pas des chiffres précis, mais je ne doute pas, madame, que vous serez en mesure de nous les communiquer.

Le rapporteur a par ailleurs fait valoir qu’il était souhaitable que nous puissions mettre en place des mesures destinées à éviter cette dépense.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Absolument !

M. Alain Vasselle. À cet effet, il propose d’explorer deux voies.

La première consisterait à permettre aux sans-papiers qui ont des membres de leur famille sur le territoire national de bénéficier d’une régularisation de leur situation.

Je souhaiterais savoir quel degré de parenté serait pris en considération pour cette régularisation. S’agirait-il d’un lien direct entre les personnes ou d’un lien de parenté éloigné, auquel cas vous imaginez l’appel d’air que cela représenterait pour celles et ceux qui veulent venir sur le territoire national ?

Mme Dominique Voynet. On est hors sujet !

M. Alain Vasselle. Par conséquent, il serait souhaitable de connaître les intentions du Gouvernement dans ce domaine.

La seconde solution en faveur de laquelle plaide M. le rapporteur tend à appliquer purement et simplement la loi pour celles et ceux qui n’ont pas de membre de leur famille sur le territoire national.

L’application de la loi, c’est la reconduite à la frontière. Il serait intéressant de connaître le bilan de votre action dans ce domaine avec le concours du ministre de l’intérieur.

Mme Dominique Voynet. Ce n’est pas le sujet ! On parle du budget du logement.

M. Alain Vasselle. Quelle est l’évaluation de votre action, madame la ministre, et quelles difficultés rencontrez-vous avec vos collègues du Gouvernement pour appliquer la loi ?

Mme Dominique Voynet. L’immigration, c’était cet après-midi !

M. Alain Vasselle. Si vous pouviez m’éclairer sur ce premier point, j’en serais enchanté.

Le deuxième sujet que je souhaite évoquer est le 1 % logement.

Vous avez décidé de détourner du 1 % logement 850 millions d’euros, dont 320 millions pour financer l’APNRU et le solde pour financer l’ANAH, certainement pour des raisons tout à fait justifiées, mais avez-vous pris conscience, madame la ministre, des conséquences que cela aura sur l’équilibre financier des opérations de construction de logements sociaux ?

Le Gouvernement affiche la volonté de construire 110 000 logements sociaux par an, c’est-à-dire deux fois plus qu’il y a dix ans. C’est un effort que nous saluons, et nous ne pouvons que vous encourager et vous soutenir dans cette action.

Toutefois, je veux vous dire, prenant quelques instants la casquette du président d’un organisme HLM qui compte environ 8 000 logements, que jusqu’à ce jour – il est vrai que l’évolution du taux du livret A va évoluer dans un sens qui devrait être favorable aux organismes HLM –, nous ne pouvons équilibrer la plupart de nos opérations qu’avec le 1 % logement et avec le concours des collectivités locales. Celles-ci nous apportent souvent le terrain pour un euro symbolique, parce que le coût du foncier pèse lourdement dans l’équilibre des opérations.

Si nous détournons une partie des crédits qui étaient consacrés à l’équilibre de ces opérations, ce sont autant de logements sociaux que les organismes auront du mal à construire d’ici à la fin de l’année et vous vous étonnerez de leur manque de dynamisme.

Cela aura inévitablement un impact économique et donc des répercussions sur l’emploi, parce que moins de construction de logements, cela signifie moins de travail pour les entreprises.

Madame la ministre, je souhaiterais connaître votre sentiment sur ce point. En effet, il s’agit de concilier votre objectif d’apporter un financement au PNRU et à l’ANAH et en même temps d’atteindre l’objectif des 110 000 logements sociaux, compte tenu du fait que l’équilibre de ces opérations ne peut se faire souvent qu’avec le concours des collectivités locales ou du 1 % logement. À défaut du 1 %, ce sont les collectivités qui risquent de payer la différence si elles veulent avoir des logements sociaux sur leur territoire.

Troisième sujet qui me préoccupe, madame la ministre, je n’ai pas compris ce qui a motivé de votre part la suppression des crédits PALULOS pour un montant de 60 millions d’euros.

Considérez-vous aujourd’hui que tous les logements sociaux sont réhabilités ou sont aux normes et répondent aux objectifs du Grenelle de l’environnement pour priver les organismes HLM du concours de l’État à travers les crédits PALULOS ?

Je suis surpris de cette suppression et, comme nous ne pouvons pas déposer un amendement visant à rétablir ces 60 millions d’euros parce que la commission des finances – M. Arthuis veille – nous aurait opposé l’article 40 de la Constitution, rien ne se fera, notamment auprès des organismes HLM, pour réhabiliter les logements.

Quelle solution envisagez-vous pour permettre aux organismes de continuer à financer des travaux de réhabilitation de logements sociaux ?

Enfin, mon dernier point concerne le financement des centres sociaux.

Il est prévu une baisse des crédits du fonds d’action sociale qui diminuera d’autant le rôle primordial des centres sociaux dans le cadre de la politique de la ville.

Or nous savons bien que les centres sociaux, par leurs concours financiers, permettent aux collectivités de mener une politique dynamique en faveur notamment des jeunes adolescents, dont un certain nombre risquent de basculer, pour diverses raisons, dans la délinquance.

Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, j’aimerais que vous m’apportiez un éclairage sur ces différents points, ce qui me permettra de conforter mon vote en faveur de votre budget, comme celui du groupe UMP qui ne manquera pas de vous apporter également son soutien. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mesdames, messieurs, le tableau terrifiant, chiffre par chiffre, de la crise du logement que vit notre pays, chacun le connaît. Sur la cruauté du diagnostic, sur le scandale que constitue la situation présente et sur l’urgence d’en sortir, nous sommes d’accord. Il est donc inutile d’épiloguer plus longtemps sur le constat. Attardons-nous plutôt sur les réponses que vous prétendez y apporter, madame la ministre.

Voilà quelques semaines, dans ce même hémicycle, nous examinions le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. Nous dénoncions l’érosion de vos crédits et le tour de passe-passe qui consistait, pour masquer la misère, à prélever sur le 1 % logement les centaines de millions d’euros qui faisaient défaut pour boucler le budget de l’ANAH et de l’ANRU.

Bien sûr, nous avions émis des doutes sur l’équilibre général d’un budget élaboré au cours de l’été, bien avant la tempête financière qui a secoué le monde, un budget dont on nous disait qu’il ne serait pas revu, si ce n’est à la marge.

Que s’est-il passé depuis ?

L’examen du budget se poursuit imperturbablement, bien que les hypothèses de croissance qui le fondent soient reconnues à peu près partout comme au mieux hardiment optimistes, au pire, tout à fait fantaisistes.

Le Parlement a voté un plan d’urgence qui transforme les pertes de financiers de haut vol en dettes pour nous tous. Le tout, cela va de soi, sans aucune contrepartie.

Il y eut bien des voix dans nos hémicycles – nous en fûmes – pour insister sur l’urgence d’un plan de soutien à l’économie réelle, celle qui produit des biens utiles, celle qui prépare l’avenir, celle qui génère des emplois qualifiés, non délocalisables, dans la construction, la réhabilitation et l’isolation des logements ou dans les transports publics, permettant à la fois de limiter les émissions de carbone dans un secteur stratégique et de contenir le coût des déplacements pour les familles condamnées à l’usage exclusif de la voiture. Elles ne furent pas écoutées.

Il y eut bien des voix, les mêmes et d’autres, pour insister sur le rôle de premier plan des collectivités territoriales, sur lesquelles reposent 75 % des investissements publics, et pour demander s’il était raisonnable de les déstabiliser par une réforme de la DSU préparée sans évaluation sérieuse des impacts ou de les soumettre à un régime de rigueur au motif, avançait le ministre du budget, que chacun devait faire des efforts.

Elles ne furent pas davantage entendues, provoquant chez bien des maires incompréhension et consternation.

Dans l’examen du budget de la mission « Ville et logement » qui nous est soumis aujourd’hui, que constatons-nous ?

Pas de débauche de milliards, pas de pluie de grands gestes, et bien peu de réponses à celles et ceux qui s’émeuvent du paradoxe saisissant selon lequel, alors que tout le monde, absolument tout le monde, déplore la crise du logement, personne, dans ce gouvernement, ne paraît s’émouvoir de ce que précisément les crédits affectés à résoudre la crise soient en baisse, comme ils le seront l’année d’après et l’année suivante encore.

Mme Dominique Voynet. Madame la ministre, vous pourrez nous parler de vos valeurs, de vos convictions et de votre bonne foi, vous ne pourrez le contester, parce que vous n’êtes évidemment pas dupe des artifices de présentation de ce budget : loin d’amortir les effets les plus brutaux de la crise, il marque un désengagement de l’État d’une ampleur inédite.

Voilà trois semaines déjà, le quotidien Le Monde rendait publiques les conclusions d’un rapport du comité de suivi et d’évaluation de l’ANRU, qui pointait très sévèrement le désengagement de l’État dans les opérations de rénovation urbaine. L’information n’a pas fait l’ouverture des journaux télévisés, mais elle a incontestablement attiré l’attention de tous les acteurs concernés, élus locaux ou militants associatifs.

Le 24 novembre dernier, la condamnation de l’association Droit au logement, le DAL, a fait bien plus de bruit. Les arguments avancés par le tribunal ont fait frémir à plus d’un titre : les tentes installées par le DAL ont été considérées comme des objets laissés à l’abandon, comme des encombrants, comme s’il s’était agi de poubelles, de gravats ou d’amas d’ordures.

Ce jour-là, madame, j’ai espéré que vous vous poseriez la même question que moi : est-ce bien la France que nous aimons, ce pays où il en coûte plus cher à une association d’alerter l’opinion sur la détresse des mal-logés qu’à un maire de refuser de se soumettre aux obligations de construction de logement sociaux ?

Je le dis en toute simplicité : quelle déception de vous entendre, vous la ministre des « mal logés », des « pas logés du tout », justifier la condamnation de l’association Droit au logement !

Mme Christine Boutin, ministre. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

Mme Dominique Voynet. Mardi matin, devant l’Assemblée nationale, des militants associatifs, indignés de ce qu’on ait trouvé tant de milliards pour sauver les banques quand on compte si chichement les millions qu’on accorde au logement, ont déployé sur le sol des affiches de quelques mètres carrés, de surfaces comparables à celles que doivent se partager des familles de trois, quatre, cinq personnes ou plus...

Leur indignation, madame, je veux croire que vous la comprenez, et même que vous la partagez.

Tous ceux-là, les mal logés, les militants qui les soutiennent, les élus locaux confrontés chaque jour à des familles en demande de logement, attendent vos réponses.

Tous ceux-là auraient souhaité que votre budget soit à la hauteur.

Ils ne demandent pas tout, tout de suite. Ils savent la difficulté de faire, la longueur des procédures, les délais nécessaires à la construction. Ils savent que, de toute façon, cela prendra du temps. Mais ce qu’ils ne comprennent pas, ce que je ne comprends pas non plus– je l’avoue –, c’est pourquoi nous acceptons de perdre encore plus de temps. Ce qu’ils ne comprennent pas, c’est que nous ne soyons pas capables d’augmenter les moyens que l’État consacre au logement, pire, que nous puissions admettre de les réduire !

Il est temps de faire les comptes, madame la ministre.

Nicolas Sarkozy a été élu Président de la République il y a plus de dix-huit mois. Il avait promis de restaurer le volontarisme en politique, de réaffirmer que, lorsque la politique veut, elle peut.

Il avait pris auprès des Français l’engagement que tout deviendrait possible. Cet engagement, madame la ministre, vous oblige.

Votre majorité gouverne le pays depuis plus de six ans. Vous disposez d’une majorité écrasante à l’Assemblée nationale et d’une majorité qui reste confortable au Sénat.

Vous ne pouvez pas continuer à répéter encore et encore que tout est de la faute de ceux qui vous ont précédée. Vous ne pouvez pas continuer à faire comme si vous n’en finissiez plus, chaque heure, chaque jour, chaque semaine, de rattraper les conséquences de l’impéritie supposée des gouvernements de gauche.

Il est temps d’assumer vos propres responsabilités, d’entendre, madame la ministre, ceux qui vous disent, sur les bancs de cette assemblée, qu’il y a quelque chose de scandaleux dans les choix budgétaires du Gouvernement. Dans l’idée, martelée encore et encore, d’une France de propriétaires quand tant de familles peinent à devenir même locataires.

Il y a quelque chose de franchement scandaleux à faire mine de s’indigner le lundi de ce que plus d’un habitant sur deux craigne de devenir sans-abri un jour pour, le mardi et tous les autres jours de la semaine, détricoter méthodiquement tous les filets de sécurité et de solidarité sociales qui, s’ils étaient au contraire renforcés, permettraient peut-être que chacun se sente, même en cas de chute, même en cas de coup dur, un peu moins exposé à basculer dans le dénuement total.

Enfin, à quoi rime – contre-feu ou ballon d’essai – cette invraisemblable idée d’hébergement obligatoire des sans-abri ?

Lorsque j’ai entendu cette idée, madame la ministre, je me suis demandé si, au moins, elle avait été soumise aux associations et aux organisations humanitaires qui, sur le terrain, auraient eu à assumer les conséquences d’une telle décision.

M. Dominique Braye. C’est un peu facile de dire cela !

Mme Dominique Voynet. Leurs réactions m’ont assez vite renseignée sur ce point.

La polémique a ensuite enflé quelques jours et l’annonce du jour chassant l’annonce du jour précédent, votre étonnante proposition semble, sinon oubliée, du moins recalée.

Peut-être pourrez-vous nous expliquer tout de même quelles raisons vous ont poussée à formuler cette hypothèse ? Était-ce une idée comme ça, une idée en l’air ? Partageriez-vous cette vision détestable des pauvres et de la pauvreté, selon laquelle, à défaut de savoir garantir leurs droits fondamentaux, il faudrait au moins les protéger d’eux-mêmes ?

M. Dominique Braye. Arrêtez le violon ! Cela n’apporte rien, et ce n’est pas très noble !

Mme Dominique Voynet. S’il me reste quelques secondes, monsieur le président, je voudrais revenir sur les budgets dédiés à la politique de la ville et sur la tentative de réforme, encore une fois non concertée, de la dotation de solidarité urbaine.

Concentrer les moyens sur les villes qui en ont le plus besoin ? Pourquoi pas ? À condition que les critères d’attribution soient incontestables – prendre en compte le pourcentage de logements sociaux et, pourquoi pas, le pourcentage de bénéficiaires de l’APL, reste indispensable – et qu’un minimum de visibilité soit donné aux maires.

Je voudrais aussi souligner, madame la secrétaire d’État, à quel point le plan Marshall pour les banlieues, annoncé à grand renfort de formules choc – vous le disiez très cash, ce serait la tolérance zéro pour la glandouille ! – s’est réduit comme peau de chagrin.

Que devient le plan Espoir Banlieues ? Contestez-vous les chiffres avancés par la presse ou nous expliquerez-vous, comme votre ministre de tutelle en a pris l’habitude, que cela ne va pas fort, mais que tout ira mieux demain ? Sur ce point, j’attends votre réponse.

J’ai entendu que, face aux grands enjeux, le Gouvernement nous appelait à l’union nationale. Je me permettrai simplement de répondre au Président de la République, que s’il aspire vraiment à une plus grande cohésion et à une plus grande solidarité dans notre pays, il est possible d’y parvenir, à condition que les efforts soient partagés équitablement et que les moyens publics soient enfin consacrés à celles et à ceux qui en ont le plus grand besoin.

Le projet de budget pour 2009 n’honore pas cet engagement en ce qu’il vide les crédits de la mission « Ville et logement » de plus de 1 milliard d’euros, tout en maintenant l’ahurissant cadeau fiscal de plusieurs milliards fait aux contribuables qui en ont le moins besoin. C’est injuste, madame la ministre ! C’est même profondément indécent ! Et cela justifie que nous nous opposions à votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Dominique Braye. C’est démago tout ça ! C’est du populisme.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, un budget qui perd 1,1 milliard d’euros, passant de 8,7 milliards d’euros à 7,6 milliards d’euros, ce n’est pas seulement, comme nous l’a dit précédemment M. le ministre du budget une question « d’optique » !

Cette baisse serait due, toujours selon lui, « au courage du Gouvernement », qui, malgré cette perte de un milliard, n’aurait rien « sacrifié à ses priorités » ! Voilà une baisse de plus de 12 %, et rien ne changerait ! Nous sommes censés croire qu’il ne s’agit là que d’une « réforme du système » rendue possible grâce à la formule magique : « faire plus avec moins » !

Madame la ministre, en fait de courage, avec cette baisse catastrophique du budget consacré au logement, vous faites comprendre à nos 600 000 concitoyens en droit d’invoquer la loi instituant le droit au logement opposable, dite loi DALO, aux 6 millions de personnes en situation de suroccupation, vivant parfois à trois, quatre ou cinq dans douze mètres carrés faute de trouver un logement financièrement accessible et aux centaines de milliers d’entre eux qui attendent depuis des années une place dans le parc locatif social, que vous les abandonnez !

Bien sûr, ce n’est pas comme si nous étions au début d’une terrible crise économique où l’action de l’État en matière de logement s’avérerait non pas déterminante, mais juste vitale !...

Au regard du budget que vous nous présentez, je souhaite aborder ici plus particulièrement trois points qui concourent aux mêmes conséquences désastreuses.

Tout d’abord, j’aborderai la question des aides aux personnes, les ALS, les allocations de logement à caractère social, et les APL, les aides personnalisées au logement.

Ces aides sont en baisse de 1 % ! Cela pourrait sembler minime, mais cela ne l’est pas, et ce pour plusieurs raisons !

D’une part, cette baisse est récurrente d’année en année : les aides personnelles sont passées de 0,92 % du PIB en 2000 à 0,77 % aujourd’hui. Une baisse de un sixième en à peine huit ans n’a rien de minime !

D’autre part, on estime que la diminution de ces aides a fait perdre, depuis leur actualisation au 1er juillet 2001, 12 % à 15 % de pouvoir d’achat aux personnes qui en bénéficient. Cette dévalorisation est d’autant plus douloureuse pour les ménages que les loyers et les charges ont augmenté de 30 % dans le même temps.

Enfin, en raison de la crise que nous allons affronter, le nombre de bénéficiaires potentiels de ces aides va bien sûr augmenter. Ainsi, on diminue les aides aux personnes, alors qu’elles sont de plus en plus nécessaires pour un nombre croissant de Français. Faire le contraire de ce que dicte la raison, cela s’appelle « marcher sur la tête » !

Cette baisse des aides aux personnes pénalisera donc, une fois de plus, les plus fragiles, notamment les deux millions de travailleurs pauvres que compte notre pays. Comment vont faire tous ceux et toutes celles qui ne peuvent tout simplement pas se loger sans bénéficier d’une aide financière de l’État ? Que pensez-vous leur proposer ? Des places en centres d’hébergement déjà saturés ?

Vous le savez, ces centres d’hébergement comptent des personnes qui ont réussi leur parcours d’insertion, ont un emploi et n’aspirent qu’à une seule chose : vivre chez elles avec leur famille. Faute de pouvoir trouver un logement, elles bloquent, malgré elles, des places en centre d’hébergement ! Mais ne cédez pas pour autant à la facile tentation de durcir leur règlement intérieur pour en exclure ces bénéficiaires, car vous le savez bien, cela reviendrait à les remettre en situation d’exclusion !

J’évoquerai maintenant l’offre de logement social, qui est également en baisse, en forte baisse même.

Selon le décompte de la commission des finances du Sénat, ce budget chute de 36 % !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. On ne peut pas dire cela !

Mme Raymonde Le Texier. Automatiquement, le nombre de constructions diminue lui aussi. Vous chiffrez le nombre de logements locatifs sociaux prévus en 2009 à 78 000, contre 100 000 en 2008.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Ce n’est pas nous qui avons dit cela !

Mme Raymonde Le Texier. En outre, il faut souligner que, en trois ans, qu’il s’agisse des PLUS, les prêts locatifs à usage social, ou des PLAI, les prêts locatifs aidés d’intégration, la subvention de l’État pour chaque logement locatif social construit n’a pas varié, ne tenant compte ni de l’inflation ni de l’augmentation de 4 % du coût de la construction.

Quelle conclusion retenir de ces quelques chiffres si ce n’est celle du désengagement évident de l’État en matière de logement social ? Et ce n’est certes pas le détournement des fonds provenant du 1 % patronal qui améliorera la situation. En le rackettant ainsi, vous programmez la mort d’un outil qui a fait ses preuves en permettant à un nombre considérable de salariés de se loger.

Votre approche sur la nature de l’offre du locatif social est tout aussi préoccupante.

En effet, depuis plusieurs années, le nombre de logements construits au titre du PLUS, le prêt locatif à usage social, continue d’augmenter, alors que 70 % des demandeurs de logements sociaux n’ont pas le niveau de ressources suffisant pour y prétendre. Non seulement vous construisez un nombre tout à fait insuffisant de logements locatifs sociaux, mais, de plus, ceux que vous construisez sont inaccessibles à l’immense majorité des demandeurs ! C’est tout bonnement incompréhensible !

Mme Raymonde Le Texier. Depuis que ce gouvernement est en place, vous ne cessez de faire la promotion de l’accession à la propriété, entre autres pour assurer le turnover dans le parc locatif.

Il me semble utile de rappeler ici que, ces derniers mois, les promoteurs ont massivement annulé leurs projets d’opérations immobilières, alors que les banquiers ont multiplié par cinq le nombre de refus de prêts immobiliers aux particuliers ! Ainsi, ceux qui voient différés sine die leurs projets d’achat de logement du fait de la crise resteront dans leur logement actuel, densifiant un peu plus encore l’embouteillage immobilier !

J’en viens enfin au dernier point, les sans-abri, l’exclusion et l’hébergement.

Oui, ce poste est en augmentation, avec une hausse de ses crédits de 12,3 %, ce qui est certes important. Toutefois, cette augmentation ne fait que rattraper le retard de financement d’un secteur notoirement et structurellement en sous-dotation depuis des années. Il y a tout lieu de penser que les besoins vont redoubler dans les mois à venir à cause de la crise. Pourtant, ces mêmes crédits sont déjà annoncés à la baisse pour les années 2010 et 2011.

Mais il y a plus ! Au-delà de l’indignation que nous partageons tous face aux situations les plus difficiles que rencontrent les personnes sans domicile et de l’urgence à répondre à leur demande, on peut s’interroger, madame la ministre, en dépit de vos déclarations récurrentes ces derniers jours, sur votre réelle volonté à remplir précisément cette mission.

En effet, vous désengagez peu à peu l’État des aides aux personnes, renonçant ainsi au premier outil de prévention de l’exclusion, celui qui assure la solvabilité de centaines de milliers de locataires. Dans le même temps, vous diminuez la production de logements sociaux, en particulier de ceux qui sont destinés aux plus modestes. Mais, consciente des conséquences de votre politique, vous augmentez les moyens accordés en faveur de l’hébergement, puisque vous vous attendez à voir exploser le nombre de personnes condamnées à la rue. CQFD !

Ce gouvernement ne cesse de proclamer la cohérence de sa politique et, pour une fois, je suis d’accord : tout dans ce budget concourt à une aggravation massive de la situation du logement !

Pourtant, madame la ministre, vous avez été alertée par l’ensemble des acteurs du logement et de l’exclusion. Il y a un an à peine, une conférence de consensus avait réuni des centaines de professionnels de terrain, dont les recommandations avaient été claires : la « logique asilaire » n’est pas la solution. Il faut prendre le problème à sa source. Unanimes, les professionnels avaient conclu, notamment au regard des expériences de nos voisins européens, que l’on ne résoudrait les problèmes d’exclusion liés au mal-logement qu’en faisant plus de « prévention en amont et plus de logement social en aval ».

Or votre budget fait tout le contraire !

Sous la royauté, lorsque les récoltes avaient été mauvaises et les taxes excessives, le seul budget qui augmentait était celui de la police, afin de prévenir l’insurrection. En démocratie façon UMP, quand on s’attend à voir les rues se remplir de sans-abri, on prépare des lits pour la nuit ! C’est sûr, vu sous cet angle, c’est un progrès !

Le groupe socialiste votera résolument contre ce budget d’abandon. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.- Mmes Anne-Marie Escoffier et Nathalie Goulet applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali, dont je veux saluer la première intervention à la tribune du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’Union centriste.)

Mme Samia Ghali. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l’année économique et sociale qui nous attend sera, n’ayons pas peur de le dire, une année particulièrement difficile pour les Français.

Nous le constatons d’ores et déjà, mois après mois, indice après indice, la situation se dégrade rapidement. Le chômage est en forte hausse et le seuil de deux millions de demandeurs d’emplois vient d’être franchi, la pauvreté progresse et les sans domicile fixe sont de plus en plus nombreux. Le froid d’un hiver précoce vient de faire ses premières victimes. C’est à toutes ces femmes et à tous ces hommes auxquels je pense en prenant la parole, pour la première fois dans cet hémicycle, à ces Français prétendument égaux, mais privés d’emploi et de logement.

Oui, madame la ministre, alors que les effets négatifs de la crise financière qui découle de la crise des subprimes se font sentir sur les marchés de l’immobilier et de la construction, vous faites le choix inacceptable de procéder à un désengagement de l’État dans les quartiers sensibles et dans le domaine du logement.

Le budget du logement accuse une baisse très importante, passant de 8,7 milliards d’euros en 2008 à 7,6 milliards d’euros en 2009, puis à 7,3 milliards d’euros en 2011.

Pour endiguer la crise, vous sauvez le monde de la finance, vous prétendez relancer l’économie pour éviter la crise sociale, mais vous réduisez les engagements financiers publics concernant la politique de la ville et du logement.

« Mon premier budget véritable sera celui de 2009 », voilà ce que vous déclariez, l’année dernière, madame la ministre, cherchant à vous exonérer d’un budget 2008 en baisse.

Or le budget pour 2009 sera pire ! Ses crédits d’intervention ne cessent de baisser, et ce d’après vos propres chiffres ! Il sera pire dans la dénaturation, et donc dans l’existence même, des instruments d’intervention ; je pense à la manipulation du 1 % logement, à l’ANRU, à l’ANAH et aux bailleurs sociaux.

Nous avons émis ces critiques voilà quelques semaines, lors de l’examen du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, je n’y reviendrai donc pas.

Je dirai tout de même combien il est choquant que vous tentiez, face à ces désengagements, d’équilibrer votre budget au détriment des locataires par le biais du relèvement de deux euros de la participation forfaitaire des ménages, de la non-réactualisation des aides personnelles, de la période de carence pour le versement des aides, du maintien du seuil de non-versement de quinze euros, de l’évaluation forfaitaire pour les moins de vingt-cinq ans et de la non-réactualisation des barèmes. Voilà des mesures d’ajustement prises sur le dos des plus fragiles !

II en est d’autres, notamment dans le domaine de la politique de la ville, qui sont tout aussi incompréhensibles. Je veux parler de la mise à mal des zones franches urbaines et donc de l’article 82 du projet de loi de finances, dont les dispositions relatives au soutien des quartiers en difficulté sont à l’opposé de tous vos discours.

Depuis la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, les interventions de l’État au titre de la politique de la ville se déploient essentiellement dans trois zones géographiques prioritaires : les zones urbaines sensibles, les ZUS, les zones de redynamisation urbaine, les ZRU, et les zones franches urbaines, les ZFU.

Les zones franches urbaines ont été créées parce que, sur notre territoire, dans nos quartiers, des populations entières ont été abandonnées par la République et oubliées par nos politiques. Ce sont peut-être des zones de non-droit, mais surtout des zones de chômage et de misère ! II fallait donc, à circonstances exceptionnelles et responsabilités particulières, des politiques dérogatoires aux règles communes. Je le dis même si, comme mes collègues de gauche, je ne suis pas, par principe, favorable aux exceptions territoriales ni – encore moins !  – aux politiques d’exonération des charges sociales.

Les cotisations sociales sont nécessaires au fonctionnement de la solidarité nationale. Nous avons tous à l’esprit des exemples de chefs d’entreprises sans scrupule, spécialistes de la délocalisation, au gré de la concurrence des financements, subventions et allégements publics de toutes sortes. En l’espèce, il ne s’agit pas de cela !

La stratégie adoptée en 1997, élargie en 2003, puis en 2006, dans le cadre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, consistait en effet à créer des instruments destinés à maintenir l’emploi là où il était absent. Je rappelle que le dispositif s’accompagne de l’obligation, pour les employeurs, d’embaucher des salariés du quartier à hauteur de 33 %.

Le point sur ce dispositif a été fait. La création des zones franches a effectivement permis l’implantation et la création d’entreprises dans des secteurs tout à fait improbables. Ainsi, 12 000 emplois nouveaux ont été créés en dix ans dans les deux zones franches urbaines de Marseille.

On espérait que les trois dernières années d’application du dispositif, appelé à s’éteindre à la fin de l’année 2011, s’inscriraient dans la même dynamique, malgré la fragilité des jeunes TPE, les très petites entreprises, qui constituent l’essentiel du tissu économique de ces quartiers. Ces entreprises sont fragiles car, chacun de nous le sait, tous ces partenariats sont longs à mettre en place. Elles sont fragiles, tant la situation économique de notre pays se détériore.

Et c’est précisément à ce moment-là que le Gouvernement trahit sa parole et rompt le contrat, en retirant son soutien et en remettant en cause les stratégies développées par les maires ! Je pense en particulier aux zones qui ont été créées en 2006 et qui sont à peine opérationnelles.

L’article 82 du projet de loi de finances pour 2009 prévoit en effet de supprimer deux avantages essentiels pour les chefs d’entreprise qui ont choisi de s’implanter en zone franche urbaine.

Premièrement, cet article vise à réduire progressivement, dès 2009, les exonérations de charges patronales pour les salaires supérieurs à 2,5 SMIC et de les supprimer totalement en 2011, alors qu’il faut justement soutenir les jeunes talents qui naissent.

Deuxièmement, il est prévu de supprimer les sorties dégressives pour l’ensemble des salaires.

Vous vous affranchissez ainsi, madame la ministre, des règles que vous aviez vous-même édictées et vous mettez ainsi en danger nos entreprises, qui jouent un rôle important.

Vous espérez de ces mesures – c’est leur justification – une économie budgétaire de 90 millions d’euros en 2009, de 105 millions d’euros en 2010 et de 120 millions d’euros en 2011. Ces économies de queue de budget désespèrent les élus locaux, et je me demande d’ailleurs si le Président de la République en a bien été informé. Car enfin, non seulement de telles mesures se trouvent en contradiction totale avec tous les discours officiels sur la politique de la ville et le soutien aux quartiers dont vous vous targuez depuis dix-huit mois, …

M. Alain Vasselle. C’est vrai !

Mme Samia Ghali. … mais, qui plus est, elles interviennent au moment même où le Gouvernement déverse des dizaines de milliards d’euros dans les banques et où le Président de la République annonce un vaste plan de relance de 25 milliards d’euros en faveur de l’économie et l’emploi.

Comment peut-on, quelques heures après de telles annonces, le contredire et oser des économies dans les secteurs les plus fragiles du territoire, au détriment des populations les plus en difficulté ? Faites attention, madame la ministre, on finira par ne plus vous croire ! C’est d’ailleurs ce qui s’est dit, paraît-il, dimanche dernier, du côté d’Arcachon....

Nous avons donc, avec mes collègues Jean-Noël Guérini, Thierry Repentin, François Rebsamen et l’ensemble des membres du groupe socialiste, déposé un amendement de suppression de cet article 82.

Nous devons au contraire, mes chers collègues, exiger tous ensemble le renforcement des engagements financiers de l’État. Toutes ces zones doivent devenir grande cause nationale ! Devant l’urgence et la gravité de la situation, je vous suggère d’organiser une table ronde avec l’ensemble des acteurs, afin de trouver une solution à leurs réels problèmes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget pour 2009 de la mission « Ville et logement » que je suis venue défendre devant vous aujourd’hui, avec Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville, prévoyait une enveloppe globale de 7,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 7,64 milliards d’euros en crédits de paiement.

Le plan de relance que nous a présenté le Président de la République ce matin même me permet de vous indiquer que ces montants seront majorés, comme vous le savez, sur deux ans, de 160 millions d’euros pour l’hébergement et les structures spécialisées et de 400 millions d’euros environ de crédits budgétaires pour le logement.

En comptant les dépenses fiscales et la surcharge foncière, le plan de relance nous permet donc de disposer de 1,4 milliard d’aides supplémentaires sur les deux ans à venir.

Comme vous l’avez indiqué, à ces crédits s’ajouteront des ressources extrabudgétaires mobilisées par les opérateurs que sont l’ANRU et l’ANAH. Ces ressources s’élèveront à 1,951 milliard d’euros en autorisations d’engagement et à 1,301 milliard d’euros en crédits de paiement.

Je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, de répondre à vos interrogations programme par programme, pour plus de clarté.

Le programme « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables » est, comme vous l’avez noté, désormais rattaché à la mission « Ville et logement ».

Comme vous, je me félicite que ce programme connaisse une remise à niveau de ses crédits et soit doté de 1,117 milliard d’euros dans le projet de loi de finances pour 2009. Comme je vous l’indiquais, une part significative des 160 millions d’euros du plan de relance y seront consacrés. Ainsi, 80 millions d’euros, notamment, pour moitié dès 2009, seront consacrés à l’humanisation des centres d’hébergement, une mesure qui me tient particulièrement à cœur.

Les moyens dédiés à l’hébergement évoluent également de manière très significative : ils augmentent de plus de 15 % entre 2008 et 2009, conformément à la décision du Premier ministre, qui a déclaré l’hébergement et l’accès au logement « grand chantier prioritaire 2008-2012 ». Les engagements pris dans le cadre du PARSA, le plan d’action renforcé en faveur des sans-abri, seront donc honorés, et même majorés, grâce au plan de relance. Nous parviendrons notamment à la création de 12 000 à 15 000 places en maisons-relais d’ici à 2011. Par ailleurs, ce plan nous permettra de rendre disponibles, dès 2009, 5 000 logements en intermédiation locative.

Il ne s’agit pas, monsieur Vanlerenberghe, de chercher à créer encore plus de places d’hébergement d’urgence. En effet, le nombre de personnes sans abri est estimé, au maximum, à 100 000. Les capacités d’accueil – toutes catégories de structure confondues – dépassent déjà les 99 600 places. Par conséquent, plus de 13 000 places ont été créées depuis dix-huit mois.

Avec les 1 000 places supplémentaires annoncées par le Président de la République, madame Terrade, il y aura suffisamment de places pour satisfaire tous les besoins.

Il s’agit donc maintenant d’offrir une plus grande qualité, grâce à une meilleure coordination des différents acteurs, pour optimiser la gestion des places disponibles et améliorer les conditions d’accueil qui sont réservées aux sans-abri dans ces structures.

Je reviendrai ultérieurement sur la question de l’humanisation des structures d’hébergement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, à votre interrogation sur les capacités réelles d’accueil, je répondrai qu’il arrive souvent au « 115 » de ne pas pouvoir réserver de suite favorable aux appels qui lui sont transmis alors que des places sont encore disponibles. Ainsi, à Paris, du 30 octobre au 6 novembre 2008, le nombre de demandes non satisfaites a varié de 38 à 53, alors que celui des places disponibles fluctuait de 25 à 60. Cela soulève la question de la coordination entre les différents prestataires et de l’optimisation de leurs interventions.

Aussi, j’ai installé le 13 novembre dernier un groupe de travail qui réunit, tous les quinze jours, le « 115 », la FNARS, la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale, et des associations gestionnaires de centres d’hébergement en Île-de-France : Emmaüs, l’Armée du Salut et le Centre d’action sociale protestant. J’ai chargé ce groupe de coordination d’élaborer des propositions visant, d’une part, à permettre une adéquation optimale de l’offre d’hébergement disponible aux demandes adressées au numéro d’appel « 115 », et d’autre part, à une meilleure connaissance des publics et à une amélioration globale du dispositif d’urgence et de veille sociale. Cette instance devra me rendre ses premières propositions d’ici à la fin de l’année.

Madame Le Texier, vous avez fait allusion à la conférence de consensus. J’ai le plaisir de vous dire qu’elle a été financée par le ministère du logement et de la ville et que nous avons mis à sa disposition un inspecteur général des affaires sociales. Le travail accompli a été remarquable. J’ai reçu le rapport de la conférence hier matin à dix heures et j’ai pu vérifier, en en lisant les conclusions, que les cinq propositions qui y étaient formulées étaient toutes prises en considération par la politique que je mène.

Le programme « Politique de la ville » est nouveau. Il est né de la fusion, vous l’avez indiqué, des anciens programmes « Rénovation urbaine » et « Équité sociale et territoriale et soutien », conformément aux préconisations du Comité interministériel d’audit des programmes.

Mme Amara vous apportera plus de précisions sur ce sujet, mais je vous précise d’ores et déjà que le montant prévu dans le projet de loi de finances pour 2009, qui s’établissait à 744 millions d’euros en autorisations de programme et à 769 millions d’euros en crédits de paiement, est majoré, dans le cadre du plan de relance, de 200 millions d’euros au profit de l’ANRU, pour conforter le financement du Programme national de rénovation urbaine, le PNRU.

Au sujet de ce programme, vous avez souligné que son financement sera désormais assuré à titre principal par le 1% logement.

Je tiens à préciser que l’accord passé entre l’État et l’UESL, l’Union d’économie sociale pour le logement, permet une réorientation des emplois du 1 % logement vers les priorités de la politique du logement définies d’un commun accord par le Gouvernement et les partenaires sociaux.

À ce titre, une contribution complémentaire du 1 % logement de 320 millions d’euros portera le montant total de la participation de l’UESL au financement du PNRU à 770 millions d’euros par an sur la période 2009-2011.

Au sujet des capacités d’engagement de l’ANRU, vous avez fait mention de l’annulation d’un stock d’autorisations d’engagement non affecté en fin d’année. Cette annulation n’est envisagée que pour des raisons de technique comptable. Elle ne signifie en aucune manière une remise en cause du PNRU.

Cependant, je comprends et je partage le souci de certains élus de sécuriser le financement du PNRU.

Lors de la discussion budgétaire qui s’est déroulée à l’Assemblée nationale, M. le ministre du budget, Éric Woerth, a confirmé l’engagement du Gouvernement d’assurer le financement total des 12 milliards d’euros prévus au titre du PNRU. Cet engagement figurera dans le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, qui est actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale.

Je pense que vous avez été nombreux à vous intéresser au plan de relance qui a été présenté par le Président de la République aujourd’hui à Douai. Il s’est lui-même engagé très clairement pour ce qui concerne le financement du PNRU.

Vous nous avez fait part de vos inquiétudes, messieurs les rapporteurs spéciaux, quant aux capacités de l’ANRU à faire face à ses paiements en 2012, si l’on s’en tenait à l’accord conclu avec l’UESL que je viens de vous décrire.

Je vous l’affirme : l’ANRU aura les moyens de faire face à ses paiements. À ce titre, le président de la République a tenu – il vient de le confirmer à Douai – à ce que soit versé à l’ANRU le complément de dotation de 200 millions d’euros que j’évoquais précédemment et qui vient majorer les capacités de paiement de cet organisme.

Concernant les contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, vous dénoncez, une fois encore, monsieur Dallier, leur nombre élevé, qui engendre, selon vous, le risque d’un saupoudrage des subventions et d’une dilution de l’efficacité des actions menées.

Certes, le nombre de CUCS signés, qui s’élève à 497, est plus important que celui des contrats de ville 2000-2006, qui étaient au nombre de 247.

En effet, ont été intégrés à la géographie prioritaire des quartiers, qui, certes, ne faisaient pas l’objet d’un contrat de ville, mais, pour autant, bénéficiaient déjà de financements au titre de la politique de la ville. En effet, le label CUCS a été donné, notamment, à d’anciens contrats locaux de sécurité et à des conventions de ville moyenne, afin d’harmoniser le traitement de ces différences par la politique de la ville.

En outre, certains élus n’ont pas souhaité proroger l’approche intercommunale qui avait été privilégiée jusqu’alors : ainsi, un contrat de ville a pu donner naissance à deux, voire à trois CUCS.

Par ailleurs, ont également été intégrés à la géographie prioritaire des quartiers dégradés qui ne sont pas des zones urbaines sensibles, mais dans lesquels l’ANRU intervient. Il n’était pas cohérent d’améliorer le cadre urbain de ces quartiers sans pouvoir intervenir dans le traitement des difficultés socioéconomiques que rencontrent leurs habitants.

Enfin, ont également été pris en compte certains centres anciens. Jusqu’à présent, ces quartiers ne l’étaient pas réellement, car ils ne correspondaient pas aux critères traditionnels de la politique de la ville.

Pour autant, certains de ces quartiers accueillent des populations fragiles vivant dans de l’habitat privé dégradé. Ils méritaient donc plus d’attention de la part des pouvoirs publics.

La géographie prioritaire a été étendue, mais les risques de dilution des crédits sont limités.

D’abord, parce que cette extension a largement consisté en une labellisation unique de sites dans lesquels la politique de la ville intervenait déjà.

Ensuite, parce que les quartiers prioritaires sont classés en trois catégories selon les difficultés socioéconomiques qu’ils rencontrent. Naturellement, la masse des crédits mobilisés est modulée en fonction de l’importance des problèmes à traiter.

Enfin, la politique de la ville s’appuie plus largement que par le passé sur les crédits de droit commun des ministères. C’est le principe fondateur de la dynamique Espoir Banlieues, et cela explique, messieurs André et Repentin, que les crédits figurant à ce titre dans le projet de loi de finances vous paraissent « modestes ». Ils vont servir à fédérer les initiatives des autres départements ministériels qui en assurent également le financement. C’est un choix délibéré du Gouvernement que mon ministère ne soit pas le seul financeur du plan Espoir Banlieues, mais que tous les ministères soient impliqués dans sa mise en œuvre et contribuent à sa réalisation. Mme Amara vous précisera dans quelles conditions.

Cependant, la géographie prioritaire de la politique de la ville n’est pas figée. Elle doit être révisée avant la fin du premier semestre 2009 et, comme l’a souhaité le Parlement, elle sera actualisée tous les cinq ans.

Par ailleurs, le Conseil de modernisation des politiques publiques a décidé que « les moyens de la politique de la ville feront l’objet d’une plus grande concentration géographique et temporelle dans les quartiers les plus en difficulté où la solidarité locale est insuffisante ». Les associations d’élus seront naturellement associées à la redéfinition de la géographie prioritaire de la politique de la ville.

C’est dans ce cadre que la nouvelle génération de CUCS sera négociée pour la période 2010-2013.

Comme le nombre de CUCS est appelé à diminuer, monsieur Vanlerenberghe, certaines dépenses de fonctionnement vont pouvoir être réduites comme, notamment, le financement des directions de projet – une par CUCS. La part des crédits bénéficiant directement aux habitants des quartiers, quant à elle, ne sera pas diminuée.

Je vous propose de revenir, ultérieurement dans nos discussions, sur la réforme des zones franches urbaines, lorsque les amendements déposés sur l’article 82 seront discutés.

Le programme « Aide à l’accès au logement » est, comme vous l’avez souligné, le principal poste de dépenses de la mission, représentant plus de 65 % des crédits. Il permet à plus de six millions de ménages de percevoir une aide personnelle au logement.

Vous considérez que ce programme est sous-doté. Conformément au calendrier budgétaire, mes besoins ont été calculés, vous le savez bien, avec les services de l’administration des finances, au mois de mars dernier, c’est-à-dire avant que ne se déclenche la crise économique que nous subissons aujourd’hui.

À cette date, il était encore raisonnable de pouvoir compter sur une baisse du nombre de bénéficiaires et sur une augmentation annuelle de 4 % de la masse salariale. Le scénario retenu était donc extrêmement prudent mais il pourrait ne pas se réaliser, compte tenu de la dégradation de la conjoncture économique.

M. Thierry Repentin. Merci de nous donner raison !

Mme Christine Boutin, ministre. En tout état de cause, les APL sont des dépenses obligatoires et le Gouvernement ne pourra pas renoncer à les financer. Dès lors, une inscription en collectif budgétaire pourra s’avérer nécessaire.

J’ajoute, pour votre information, que le projet de loi de finances rectificative pour 2008, qui vous sera prochainement soumis, prévoit une dotation complémentaire pour les APL afin de régler une grande partie de la dette de l’État envers le Fonds national d’aide au logement.

Quant au programme « Développement et amélioration de l’offre de logement », il sera doté de 798 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 805 millions d’euros en crédits de paiement. En appui de ces crédits budgétaires, seront mobilisés, d’une part, une contribution du 1 % logement, à hauteur de 480 millions d’euros et, d’autre part, un puissant dispositif fiscal.

En ce qui concerne le logement social, la dotation budgétaire initialement prévue en 2009 permettait d’assurer le financement de 120 000 logements locatifs sociaux, dont 20 000 logements très sociaux.

Ce matin même, lors de l’annonce du plan de relance, le Président de la République a décidé que 15 000 PLAI et autant de PLUS donneraient lieu, en 2009, à l’inscription de crédits supplémentaires sur le programme 135. Ces crédits devraient s’élever, sur ces opérations, à environ 350 millions d’euros, auxquels seront ajoutés 50 millions sur les pass-foncier.

Monsieur Repentin, vous m’avez posé une question concernant le taux de centralisation du livret A. Vous le savez, la réforme du livret A vise, comme l’a demandé le Président de la République, à pérenniser le financement du logement social. C’est pourquoi la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 prévoit un niveau plancher de centralisation des ressources collectées à la fois sur le livret A et sur le livret de développement durable. À ma demande, ce plancher a été fixé dans la loi à 1,25 fois le montant total des prêts au logement social, permettant ainsi de couvrir l’ensemble des besoins de financement.

En outre, les parlementaires, je vous le rappelle, soucieux d’assurer une permanence de la ressource affectée au logement social, sont allés au-delà, en prenant en compte dans le calcul de ce plancher, non seulement les prêts au logement social, mais aussi les prêts consentis au bénéfice de la politique de la ville.

La loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 prévoit également – ce n’était pas le cas jusqu’à présent – que l’épargne collectée sur les livrets A soit utilisée en priorité pour le financement du logement social. Ainsi, ce n’est qu’une fois les besoins de financement du logement social intégralement satisfaits que les ressources excédentaires pourront, le cas échéant, recevoir une autre affectation. Les organismes HLM ont ainsi la certitude de disposer des ressources nécessaires permettant de couvrir largement leurs besoins.

Par ailleurs, comme la loi le prévoit, des décrets destinés à mettre en œuvre concrètement le dispositif de centralisation des sommes collectées sur le livret A et sur le livret de développement durable seront publiés d’ici à la fin de l’année. Il s’agit d’organiser le passage d’une collecte assise sur quelques réseaux, et centralisée en totalité, à un système de collecte généralisée. Compte tenu de la diversité des réseaux bancaires, il est indispensable de prévoir un dispositif transitoire en attendant la stabilisation du dispositif de collecte. C’est l’objet des décrets qui sont en préparation. En tout état de cause, mesdames, messieurs les sénateurs, la centralisation de la collecte du livret A et du livret de développement durable devraient atteindre 160 milliards d’euros au 1er janvier 2009. Ce montant représente un taux de centralisation supérieur à 70 % de la collecte réalisée à ce jour. Il n’y a donc pas d’inquiétudes à avoir en ce qui concerne le financement du logement social qui, je crois pouvoir le dire, n’a jamais été aussi garanti par la loi qu’il ne l’est aujourd’hui.

L’objectif essentiel est donc de satisfaire la demande de logements locatifs dans les zones tendues, ainsi que de mieux répartir les logements sociaux au sein des agglomérations, pour tenir compte notamment des objectifs triennaux des communes relevant de l’article 55 de la loi SRU, auquel je suis très attaché.

Il n’y a pas de contradiction, monsieur Vanlerenberghe. Simplement, la conjoncture dans laquelle a été préparé le projet de budget a profondément évolué. Dans le contexte de surchauffe du bâtiment que nous avons connu, on ne pouvait pas augmenter le programme des logements aidés. Rappelez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, les appels d’offres infructueux des organismes HLM. M. Vasselle en sait quelque chose. En revanche, la baisse générale de l’activité du bâtiment permet aujourd’hui de lancer un programme supplémentaire de logements sociaux. En période de crise, il faut relancer l’activité !

Le financement de la prime à l’amélioration des logements à usage locatif, la PALULOS, monsieur Vasselle, n’est effectivement plus inscrit dans le budget de l’État à compter de 2009 car le projet de loi de mobilisation pour le logement, en cours de discussion à l’Assemblée nationale, prévoit d’organiser, dès l’an prochain, une péréquation financière entre organismes de logement social pour que ceux qui ont une trésorerie importante puissent aider ceux qui n’en ont pas les moyens à entretenir leur parc. Les sommes devant faire l’objet de cette péréquation ont été estimées à 60 millions d’euros.

De plus, des prêts « superbonifiés » au taux de 1,9 % seront mis en place par la Caisse des dépôts et consignations, ce qui représente un équivalent de subvention de 2 300 euros par logement, pour aider les bailleurs sociaux à financer les travaux d’isolation thermique de leurs logements, ce qui était devenu la principale destination de la PALULOS.

L’accord que j’ai passé avec les partenaires sociaux a précisément permis d’augmenter les subventions du 1 % logement aux organismes HLM, monsieur Vasselle, en passant de 225 millions d’euros à 300 millions d’euros, soit une augmentation de 33 %. Vous n’avez donc pas à vous inquiéter sur l’apport indispensable du « 1 % » au financement du logement social.

J’en profite pour répondre rapidement à Mme Voynet. Sans entrer dans la polémique, je voudrais simplement lui rappeler que le plan de relance présenté par le Président de la République envisage de consacrer l’équivalent de 1,8 milliard d’euros au logement, de 160 millions d’euros à l’humanisation et à l’hébergement et de 20 millions d’euros à l’aide alimentaire. Honnêtement, il n’est pas possible de dire que, face à une situation exceptionnelle, des décisions exceptionnelles n’ont pas été prises.

Les moyens destinés à l’amélioration du parc privé, y compris la lutte contre l’habitat indigne, seront, grâce à la mobilisation du budget de l’État et des ressources du 1 % logement, sensiblement augmentés – 713 millions d’euros de moyens d’intervention en 2009, dont 100 millions de majoration au titre du plan de relance, à comparer aux 526 millions d’euros inscrits en loi de finances initiale pour 2008.

Par ailleurs, l’ANAH contribuera avec l’ANRU à un programme national de requalification des quartiers anciens dégradés – PNRQAD – mis en place par le projet de loi de mobilisation pour le logement et de lutte contre l’exclusion.

En ce qui concerne l’humanisation des structures d’hébergement, pour laquelle j’avais réservé 50 millions d’euros en 2008, l’article du projet de loi de mobilisation pour le logement et de lutte contre l’exclusion prévoyant le transfert de cette compétence à l’ANAH n’a pas été adopté par le Sénat, car il n’était pas clairement établi que cette agence aurait les ressources pour assumer cette dépense. Je vous l’assure, l’ANAH disposera des moyens suffisants pour ce transfert, d’autant plus que le plan de relance décidé par le Président de la République prévoit d’accélérer ces travaux d’humanisation en mobilisant, au cours des trois prochains exercices, 60 millions d’euros en plus des 90 millions d’euros déjà programmés. De la réalisation de ces travaux dépend l’attractivité du dispositif d’hébergement d’urgence aux yeux des personnes sans abri. Il est donc indispensable de le mener à bien.

Je terminerai en soulignant que le plan de relance fait apparaître une dotation supplémentaire à l’ANAH de 200 millions d’euros, qu’elle devra consacrer à la lutte contre l’habitat indigne.

Aux inquiétudes exprimées par M. Dallier, je répondrai que les crédits nécessaires aux 200 millions d’euros du fonds exceptionnel de l’ANAH et aux 200 millions d’euros pour l’accélération du programme national de rénovation urbaine seront ouverts par un projet de loi de finances rectificative qui, le Président de la République l’a annoncé, devrait être présenté en début d’année prochaine.

Je n’ai pas répondu à M. Vasselle, qui m’avait posé une question sur les sans-papiers. Les services d’accueil et d’hébergement constituent un dernier filet de sécurité pour ceux qui n’ont plus rien. C’est pourquoi les services sociaux et les associations sont très attachés, à juste titre, au caractère inconditionnel de l’accès aux services d’accueil et d’hébergement d’urgence. Le Président de la République, à l’occasion d’un discours qu’il a prononcé devant le Conseil économique et social le 17 octobre 2007, journée mondiale du refus de la misère, a réaffirmé ce principe d’inconditionnalité de l’accueil. La conséquence directe de cette position humaniste est que les personnes déboutées du droit d’asile et les personnes sans papiers y ont droit, dès lors qu’ils sont en situation de détresse, dans les mêmes conditions que les français ou les étrangers en situation régulière.

Sur le plan juridique, il s’agit d’ailleurs d’une position constante, l’article L. 345-1 du code de l’action sociale et des familles ne conditionnant pas le bénéfice de l’accès à l’aide sociale à l’hébergement à la régularité du séjour. Celui-ci dispose en effet que « bénéficient, sur leur demande, de l’aide sociale pour être accueillies dans des centres d’hébergement et de réinsertion sociale publics ou privés les personnes et les familles qui connaissent de graves difficultés, notamment économiques, familiales, de logement, de santé ou d’insertion, en vue de les aider à accéder ou à recouvrer leur autonomie personnelle et sociale ».

En 2009, je prévois de recourir à 9 150 nuitées d’hôtel, qui ne seront pas toutes réservées aux demandeurs d’asile, loin s’en faut. Je pense que le développement des PLAI et des maisons-relais feront diminuer ce nombre de nuits d’hôtel qui, effectivement, coûtent très cher à l’État et n’offrent pas toujours les conditions de dignité que l’on est en droit d’exiger.

En ce qui concerne les dépenses de fonctionnement, je souhaiterais revenir sur deux points.

En premier lieu, je tiens à souligner que le Gouvernement a décidé, dans un contexte budgétaire contraint, de ne pas diminuer les effectifs relevant de mon ministère, qui s’établissent à 3 155 agents en équivalents temps plein. Ces effectifs permettront de faire face à la forte augmentation de la charge de travail liée, premièrement, à la négociation des conventions d’utilité sociale avec les organismes HLM, qui doivent être conclues d’ici à la fin de 2010 et, deuxièmement, à la mise en œuvre de la loi DALO. Cela explique, monsieur Dallier, que je n’ai pas jugé utile d’augmenter les crédits me permettant d’externaliser une partie des tâches relevant des commissions de médiation.

Par ailleurs, 350 emplois de délégués du préfet dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville sont en cours de recrutement. Ces postes budgétaires figurent, messieurs André et Repentin, sur le programme 135, qui, dans un souci de simplification de la gestion, sert de support à l’ensemble des dépenses de personnel de la mission. Cette création s’opère par transfert entre ministères et n’alourdit donc pas les charges de l’État.

Il a été décidé que ces délégués du préfet assureront leurs fonctions à temps plein mais, monsieur Dallier, je tiens à vous rassurer, les personnels de l’État ainsi recrutés ne rompront pas le lien qui les unit à leur administration d’origine. C’est fondamental pour que la légitimité de ces délégués soit totale, aussi bien aux yeux des habitants qu’à ceux des acteurs locaux ou des services de l’État. (M. Philippe Dallier marque son approbation.)

En ce qui concerne le contentieux lié à la loi sur le droit au logement opposable, il était prématuré de demander une dotation spécifique. Il est en effet encore difficile de déterminer les besoins. Ainsi, le préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, avec qui j’ai eu un entretien aujourd’hui, m’a dit que dans sa région, où la situation est tendue, même si les difficultés y sont moindres qu’à Paris ou dans l’ensemble de la région Île-de-France, aucun recours n’avait encore été déposé à ce jour.

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. Il est un peu tôt pour tirer des conclusions…

Mme Christine Boutin, ministre. Cela ne veut pas dire qu’il n’y en aura pas. Simplement, il est beaucoup trop tôt pour donner une tendance. Nous sommes le 4 décembre, et cette possibilité de recours n’est ouverte que depuis le 1er décembre. De toute façon, je vous donne l’assurance que, naturellement, l’État réglera les dépenses liées à ce contentieux. L’essentiel est d’abord de donner un toit aux personnes mal logées.

Je suis consciente, mesdames et messieurs les sénateurs, qu’aujourd’hui la discussion du projet de budget qui vous est présenté peut paraître dépassée…

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. Anachronique !

Mme Christine Boutin, ministre. … par rapport au plan de relance qui a été annoncé par le Président de la République. Mais voyez-y la volonté du Gouvernement de s’adapter à une situation économique difficile. Nous savons tous que nous entrons dans une crise. Il s’agit de retrousser les manches.

Le plan de relance qui a donc été présenté aujourd’hui par le Président de la République abonde, de façon importante, les crédits qui dépendent de mon secteur ministériel. Cela devrait vous rassurer.

Aussi, je vous demande de voter le projet de budget que je vous présente pour m’aider à donner un toit aux plus démunis. D’avance, je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Avant toute chose, je tiens à remercier MM. les rapporteurs de la qualité de leur expertise sur la politique de la ville.

Je vais maintenant, mesdames, messieurs les sénateurs, essayer, dans un temps relativement court, de répondre à vos questions et à vos remarques et de lever le doute sur certaines de vos interrogations.

Comme vous le savez, les travaux sur la politique de la ville ne manquent pas. Beaucoup de rapports, et notamment ceux du Sénat, nous indiquent que la politique de la ville a souffert de l’empilement des plans et des dispositifs successifs, qui l’ont rendue peu visible et incertaine. C’est pour cela que, dès le départ, j’ai privilégié la logique de dynamique à la logique de plan. J’ai souhaité éviter de mettre en œuvre un énième catalogue de mesures.

Nos villes et nos territoires fragiles ont en effet besoin d’une dynamique « sur mesure », qui réponde aux exigences des territoires et qui colle à la réalité des besoins. Cette démarche novatrice repose à la fois sur la réactivité et l’adaptabilité, sur l’évaluation et la culture du résultat.

Cette démarche qui caractérise la nouvelle politique de la ville voulue par le Président de la République et le Premier ministre, je l’ai appelée « la dynamique Espoir Banlieues ». Elle s’articule autour des quatre axes prioritaires fixés par le Président de la République : l’éducation, l’emploi, le désenclavement et la sécurité.

Cette dynamique repose sur la mobilisation de tous les acteurs concernés, au premier rang desquels l’État, parce que la solidarité est une exigence républicaine. Les collectivités territoriales, dont les élus sont le pivot de notre démocratie, sont également concernées, de même que les associations, qui « tricotent » au quotidien le lien social.

Cette dynamique repose également sur les entreprises, parce que l’emploi est la clef de la promotion sociale, enfin sur les habitants des quartiers, parce que, comme vous, je crois à la démocratie de proximité.

Ce processus de mise en synergie continue nécessitera de réinjecter en permanence les résultats de l’évaluation des expériences et des pratiques. Il nécessitera aussi une culture du changement, allant parfois même jusqu’à la rupture, pour faire évoluer les mentalités, dans toutes les strates de la société. Nous le savons bien, en effet, dans tous les processus majeurs de transformation sociale, ce sont les barrières mentales qui sont les plus fortes.

Au bout de cette nouvelle démarche, il y a un seul et unique objectif : le retour de la République dans nos quartiers populaires.

Cela signifie pour moi, et pour beaucoup dans les quartiers, le retour de l’émancipation et du respect, comme le retour de la solidarité et de l’engagement collectif, mais aussi de la promotion sociale et d’un cadre de vie de qualité, tranquille et sûr.

Le principe fondateur de la « dynamique Espoir Banlieues », comme Mme la ministre l’a rappelé à juste titre, c’est le retour sans précédent du droit commun. Oui, madame Voynet, c’est bien le retour du droit commun, c’est-à-dire l’engagement de chaque ministre dans le cadre d’un programme triennal chiffré.

Ces programmes ont été actés lors du conseil interministériel des villes qui s’est tenu à Meaux, le 20 juin 2008.

Mais vous avez raison, monsieur le rapporteur spécial Dallier, l’évolution des contributions des différents ministères est inégale. Tout le monde n’a pas encore pris le train aujourd’hui en marche. Vous pouvez néanmoins compter sur moi pour n’accepter aucun compromis, comme je sais pouvoir compter sur vous pour interroger les ministres qui n’ont pas encore pris ce train.

Le prochain rendez-vous sera le conseil interministériel des villes. Il se tiendra le 20 janvier prochain et dressera un bilan précis de l’engagement de chaque ministère en direction de nos quartiers prioritaires. Il examinera les raisons du retard pris par certains. D’ores et déjà, on peut souligner l’engagement palpable des ministères de l’éducation nationale et de l’emploi, qui augmenteront respectivement leurs budgets en direction des quartiers populaires de 67 millions d’euros et de 51 millions d’euros.

Toutefois, mesdames et messieurs les sénateurs, vous êtes bien placés pour le savoir, la mobilisation du droit commun, c’est aussi la recherche d’une solidarité plus efficace en direction des villes.

C’est pourquoi nous avons engagé, avec Mme Michèle Alliot-Marie, une réforme de la dotation de solidarité urbaine, pour renforcer la péréquation en direction des villes pauvres, celles où habitent effectivement des pauvres.

Je me réjouis donc, madame Voynet, que les 70 millions d’euros d’augmentation de la dotation de solidarité urbaine soient affectés, principalement, aux cent cinquante communes les plus pauvres supportant les charges les plus élevées.

Je me réjouis également de la création de la dotation de développement urbain, d’un montant de 50 millions d’euros. Elle bénéficiera aux cent communes les plus défavorisées. Mon souci, et je sais que vous le partagez, est de réduire les écarts. Voilà mon critère.

En complément de cette mobilisation du droit commun, le programme 147 réformé est doté d’un budget de 769,3 millions d’euros en crédits de paiement.

Mais soyons clairs, monsieur André, une mobilisation du droit commun pérenne et dynamique a besoin d’une politique spécifique, avec un budget spécifique. Elle en a besoin, à la fois pour maintenir le rythme des réformes, mais aussi, et surtout, pour agir là où les inégalités sont les plus criantes et pour promouvoir les bonnes pratiques et les expériences innovantes. Pour cette raison, je reste vigilante quant à l’évolution de mon budget.

Vous l’aurez compris, je veux être le meilleur élève dans la réalisation des projets de la politique de la ville, mais aussi quant à la maîtrise de ces dépenses.

Mais, vous le savez, pour répondre aux enjeux d’une société aussi complexe que la nôtre, nous avons besoin de la mobilisation de tous les acteurs.

Les associations sont un acteur majeur de la politique de la ville. Elles œuvrent au quotidien, et, nous le savons tous, au plus près des besoins des habitants. On connaît leur importance, mais on ne mesure jamais assez les difficultés qu’elles rencontrent.

Les engagements que j’avais pris pour soutenir les acteurs de terrain ont été tenus. Plus de 148 millions d’euros seront consacrés en 2009 au financement des contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS.

Les délais de versement des subventions ont été améliorés, comme vous l’avez vous-même relevé, messieurs les rapporteurs.

En complément des financements territorialisés, l’appui financier aux acteurs de terrain et aux associations sera de 31,9 millions d’euros. Afin de sécuriser ces financements, j’ai tenu à ce que des conventions pluriannuelles d’objectifs avec l’État soient systématisées. Nous sommes déjà passés de 10 % à 30 % des crédits versés aux associations sous forme de conventions pluriannuelles d’objectifs. Et je souhaite rapidement atteindre l’objectif ambitieux de 80 %.

J’entends les interrogations des associations et notamment, comme vous avez pu le remarquer ce matin, des associations de l’éducation populaire. Je souhaite m’engager pour leur permettre de faire leur travail au mieux, mais, en contrepartie, j’ai une exigence à formuler. Je veux favoriser la logique de projet, pour permettre une réelle évaluation et une utilisation pertinente des deniers publics.

En ce qui concerne la rénovation urbaine, je sais que les interrogations des élus sont multiples et légitimes. Je veux vous dire que ma détermination est totale, ainsi que celle de Mme Christine Boutin, pour continuer ce vaste chantier. Comme vient de l’affirmer Christine Boutin, les 12 milliards d’euros prévus seront bien dépensés pour les quartiers. Mais je considère que nous devons laisser la porte ouverte à toutes les sources de financement possibles.

De toute façon, il nous faudra achever la mise en œuvre l’ANRU 1. Vous le savez tous, comme beaucoup d’élus, je suis attachée à la mise en œuvre d’un ANRU 2, et je milite en ce sens, afin de poursuivre les chantiers engagés dans nos quartiers.

Au-delà de cette continuité nécessaire, je considère que la rénovation urbaine constitue un moyen stratégique de relance économique. Ainsi, je me réjouis de l’accélération du programme national de rénovation urbaine, annoncée aujourd’hui par le Président de la République, pour un montant de 600 millions d’euros, avec une contribution supplémentaire de l’État à l’ANRU de 200 millions d’euros.

La rénovation urbaine a pour objectif principal l’amélioration du cadre de vie. C’est pour cela que la question de la gestion urbaine de proximité est pour moi centrale. Dans mon projet de budget, 4 millions sont consacrés à la réalisation de diagnostics, qui permettront de mettre sous tension l’ensemble des acteurs concernés.

Nous savons tous en effet que le sentiment d’abandon des habitants des quartiers populaires provient en grande partie de la lenteur que l’État met à régler les problèmes qu’ils rencontrent au quotidien. Aussi avons-nous mis en place, dans le cadre du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, actuellement en discussion devant le Parlement, un système de responsabilisation des bailleurs dans le cadre de la convention d’utilité sociale. Ce projet de loi est porté par Mme Christine Boutin.

J’ai aussi donné l’instruction à l’ANRU de regarder, dans le cadre des revues de projets, comment sont appliquées les conventions de gestion urbaine de proximité, avec, le cas échéant, des pénalités financières pour ceux qui ne respectent pas leurs engagements.

Vous me trouverez toujours à vos côtés pour soutenir les interventions des collectivités locales et les initiatives des habitants, qui ont pour objet d’améliorer la gestion et l’entretien des espaces publics.

En ce qui concerne la géographie prioritaire, je ne reviendrai pas sur ce que vient de dire Mme Christine Boutin à ce sujet.

Comme vous le savez, la loi de finances pour 2008 prévoit une révision de la liste des zones urbaines sensibles en 2009.

Je souhaite néanmoins rappeler les trois principes qui doivent nous guider dans cette démarche.

L’évaluation est le premier de ces principes. Celle des contrats urbains de cohésion sociale est lancée. Elle se déroulera jusqu’au premier trimestre 2009. Elle fournira une base pour réorienter ces instruments à mi-parcours, comme cela était prévu dès le départ, en 2006.

Vient ensuite la concertation. Je vais proposer au prochain conseil interministériel des villes, le 20 janvier, l’adoption d’un livre vert intitulé Améliorer ensemble la géographie et les instruments de la politique de la ville. Celui-ci exposera les orientations du Gouvernement en la matière. Cet outil permettra de lancer une large concertation et un débat décomplexé, ouvert à tous les acteurs de la politique de la ville, aussi bien les associations d’élus locaux que les acteurs de terrain. Les arbitrages seront rendus lors du conseil interministériel des villes de juin 2009 après, bien sûr, que le conseil national des villes aura été consulté.

Enfin, je veux tracer le chemin du retour à la normalité. Il me semble en effet essentiel que les quartiers puissent sortir des dispositifs dérogatoires, lorsqu’il y a une amélioration palpable, concrète, pour les habitants. Ce retour à la normalité est un signe d’espoir fort pour les habitants des quartiers, et c’est l’objectif même de la politique de la ville.

Cette réforme implique une nouvelle gouvernance de la politique de la ville, au niveau tant national que local. Cette nouvelle gouvernance sera finalisée en 2009.

Au niveau national, le conseil interministériel des villes, que nous avons réactivé, deviendra une véritable unité de commandement. Il sera le lieu de décision et de suivi des résultats obtenus sur le terrain par les ministres. Il se réunira, quoi qu’il arrive, deux fois par an, sous l’autorité du Premier ministre.

Le conseil national des villes sera, quant à lui, renforcé dans sa fonction d’organe consultatif de la politique de la ville.

La délégation interministérielle à la ville assurera, sous la conduite du préfet Masurel, le secrétariat permanent du conseil interministériel des villes. Elle verra ses missions recentrées sur le pilotage et la coordination de la politique de la ville. Elle assurera la tutelle effective sur l’ANRU et sur l’agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’ACSÉ.

Je souhaite que les fonctions d’évaluation soient regroupées au sein de l’observatoire national des zones urbaines sensibles, auquel j’entends donner toute l’autorité nécessaire pour jouer un rôle de « poil à gratter » !

Au niveau local, conformément aux décisions du comité de modernisation des politiques publiques, le rôle des préfets de région sera renforcé. Ceux-ci seront les délégués territoriaux de l’ACSÉ, à compter du 1er janvier 2009. Les directions régionales de l’ACSÉ intégreront les directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale, à compter du 1er janvier 2010. Les modalités d’intégration des agents concernés seront discutées avec les partenaires sociaux.

Monsieur André, je tiens à vous dire que je reste attachée au binôme préfet-maire.

Et c’est bien sous l’autorité du préfet que ses 350 délégués incarneront le retour physique tant attendu de la République dans les quartiers.

Je souhaite professionnaliser ces fonctions en leur conférant un véritable statut. Je souhaite aussi que les modalités de recrutement soient plus largement ouvertes aux talents, qu’ils viennent des trois fonctions publiques ou des quartiers.

Ces délégués du préfet ne seront pas un niveau administratif supplémentaire. Leur rôle est de créer un lien entre l’État et tous les acteurs sur le territoire, notamment les habitants des quartiers.

Avant de conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d’évoquer le dispositif de deuxième chance, qui me tient particulièrement à cœur. N’oublions pas que de 130 000 à 150 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans qualification et que beaucoup d’entre eux sont issus des quartiers populaires. C’est intolérable ! Ces jeunes représentent les forces vives de la France et son avenir ! Arrêtons ce gâchis ! Pour autant, nous ne négligeons pas les dispositifs de première chance.

Je veux faire de l’année 2009 l’année de la promotion de la deuxième chance et de l’excellence. Pour cela, nous allons initier, en lien avec les missions locales, un système de suivi et d’accompagnement « sur mesure » en direction de chaque jeune en cours de décrochage.

Les crédits dédiés au réseau des écoles de la deuxième chance seront doublés et portés à 3 millions d’euros, afin de permettre la création d’une vingtaine de sites supplémentaires en 2009.

À côté de ces écoles, les activités de l’Établissement public d’insertion de la défense, l’ÉPIDe, seront davantage orientées vers les jeunes des quartiers prioritaires.

Grâce à un financement de 26 millions d’euros, l’objectif est d’atteindre 75 % de sorties positives vers l’emploi ou la formation professionnelle qualifiante.

Dans ce domaine, j’ai la volonté d’aller beaucoup plus loin pour pouvoir répondre à la demande.

Si elle avait été encore présente dans l’hémicycle, j’aurais dit à Mme Voynet que la question de la lutte contre la glandouille est, pour moi, extrêmement importante. Je ne puis plus tolérer que, dans mon pays, des jeunes restent dans les cages d’escalier parce que nous ne sommes plus capables de les aider à s’insérer socialement et professionnellement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il existe aujourd’hui une véritable attente et une véritable exigence de la part de nos concitoyens. Dans le même temps, nous constatons l’amorce d’une dynamique, comme l’atteste le dernier rapport de l’ONZUS. Les évolutions qui y sont présentées sont encourageantes, et ce dans tous les domaines. Mais il nous reste beaucoup à faire.

Nous vivons aujourd’hui un moment très difficile, mais la crise est aussi un rendez-vous salutaire pour les femmes et les hommes porteurs d’une vision et d’un dessein collectif pour la France. Permettez-moi de le dire, la crise nous offre ce rendez-vous. Elle nous offre une raison d’aller encore beaucoup plus loin dans nos actions en faveur des quartiers populaires et de mettre en place une véritable solidarité.

Enfin, je me réjouis des annonces fortes faites par le Président de la République, qui sont autant de points d’appui pour renforcer la dynamique Espoir Banlieues que j’ai mise en œuvre. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Ville et logement

Ville et logement
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 82

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Ville et logement », figurant à l’état B.

État B

(En euros)

Ville et logement

7 597 128 769

7 629 008 769

Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 118 502 278

1 118 502 278

Politique de la ville

739 492 570

764 492 570

Aide à l’accès au logement

4 945 372 500

4 945 372 500

Développement et amélioration de l’offre de logement

793 761 421

800 641 421

Dont titre 2

186 178 000

186 178 000

M. le président. L'amendement n° II-202, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

 

 

 

125 000 000

Politique de la ville

 

 

 

 

Aide à l'accès au logement

 

 

 

 

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

 

 

125 000 000

 

TOTAL

 

 

125 000 000

125 000 000

SOLDE

 

0

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement vise à éviter à l’ANAH de devoir emprunter pour honorer ses engagements au début de l’année 2009, et ce en profitant de la trésorerie disponible dans les fonds prévus pour l’aide au logement.

Il s’agit d’éviter de payer les charges liées à un emprunt de 125 millions d’euros, ainsi que vous semblez avoir l’intention de le programmer pour l’ANAH, madame la ministre. Vous le savez comme nous, compte tenu des perspectives et des contraintes légales qui risquent de retarder le transfert des fonds du « 1 % » à l’ANAH, certains propriétaires pourraient ne pas être aidés comme prévu au début de l’année 2009. Déjà, seuls les propriétaires occupants dont les revenus sont inférieurs à 50 % des plafonds sont réellement payés. Les autres ont pour consigne d’attendre des jours meilleurs !

Au lendemain de la suppression du pass-travaux par l’Union d’économie sociale pour le logement, on voit bien que vos décisions conduisent à une réaction en chaîne : la source étant tarie, les travaux d’amélioration de l’habitat ne seront plus financés. Cette situation est dramatique au regard de vos ambitions relatives au Grenelle de l’environnement et révélatrice, si cela était nécessaire, de la politique de gribouille à laquelle se livre parfois le Gouvernement.

À l’heure où la crise du bâtiment devient la préoccupation majeure, la réhabilitation du parc existant, locatif ou non, est un créneau qui, au contraire, devrait être soutenu. Mais, en fermant les robinets, vous placez à terme l’ANAH dans une situation budgétaire intenable.

Notre solution a le mérite de ménager une transition moins onéreuse pour le budget de l’État : une fois que les fonds du « 1 % » destinés à abonder l’ANAH auront été débloqués, alors, une régulation de trésorerie sera possible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Madame Le Texier, je suis parfaitement conscient du problème que vous soulevez, puisque je l’ai moi-même évoqué lors de la discussion générale.

En effet, entre la fin de l’année et le début de 2009, dans l’attente du vote de la loi par l’Assemblée nationale et de la parution des décrets d’application, il s’écoulera un certain temps pendant lequel l’ANAH, ayant consommé ses crédits budgétaires, ne disposera plus des fonds nécessaires à son action. Néanmoins, il ne me paraît pas très opportun de déshabiller Pierre pour habiller Paul en ponctionnant 125 millions d’euros sur le programme « Prévention de l’exclusion » pour doter l’ANAH.

Aussi, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Madame Le Texier, je ne comprends pas très bien votre argumentation dans la mesure où il s’agit d’une avance de trésorerie fort classique. Son plafond, initialement fixé à 120 millions d’euros, a été porté à 240 millions d’euros par un amendement du Gouvernement, lors de l’examen du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale. Aussi, l’ANAH ne rencontrera aucun problème de trésorerie.

Votre préoccupation est légitime, mais cet amendement n’a pas de raison d’être. Aussi, je vous demande de bien vouloir le retirer. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Le Texier, l'amendement n° II-202 est-il maintenu ?

Mme Raymonde Le Texier. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-202.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Ville et logement ».

(Ces crédits sont adoptés)

M. le président. J’appelle en discussion les articles 82 et 83 ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Ville et logement ».

Ville et logement

Article 35 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Articles additionnels après l'article 82

Article 82

La loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville est ainsi modifiée :

1° Le premier alinéa du I de l’article 12 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« À partir du 1er janvier 2009, le montant de l’exonération décroît de manière linéaire lorsque la rémunération horaire est supérieure au salaire minimum de croissance majoré de 40 % et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à 2,4 fois le salaire minimum de croissance du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009 inclus, à 2,2 fois le salaire minimum de croissance du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010 inclus, et à 2 fois le salaire minimum de croissance à partir du 1er janvier 2011. » ;

2° Au premier alinéa du II bis du même article 12, la date : « 1er janvier 2009 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2011 ».

3° Le V bis du même article 12 est abrogé ;

4° Au V quinquies du même article 12, les mots : « et aux deuxième et troisième alinéas du III » sont supprimés ;

5° La dernière phrase du septième alinéa de l’article 12-1 est supprimée ;

6° La dernière phrase du premier alinéa et le second alinéa du I de l’article 14 sont supprimés.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.

Mme Odette Terrade. Mon intervention sur cet article vaudra explication de vote sur les amendements de suppression déposés par la commission des finances et les commissions saisies pour avis, que nous ne voterons pas.

L’article 82 porte sur la question de l’entourage fiscal qui préside à la mise en œuvre de la politique de la ville.

Il s’agit, si l’on suit le Gouvernement, de procéder à la mise en déclin de la dépense fiscale liée à l’existence de zones franches urbaines.

Les dispositifs incitatifs, marqués par des exonérations fiscales et sociales, ont, de longue date, été présentés comme le moyen essentiel d’aider au développement économique des quartiers en difficulté, notamment dans les zones franches urbaines.

L’état de la dépense fiscale attachée à ces dispositifs est ainsi résumé par l’évaluation des voies et moyens.

Le régime de l’article 44 octies, relatif aux zones franches urbaines de première génération, concerne environ 16 000 entreprises qui bénéficient, en moyenne, d’environ 10 000 euros de remise d’impôt.

Le régime de l’article 44 octies A, relatif aux zones franches de seconde génération, porte, quant à lui, sur moins de 4 000 entreprises, et coûte environ 35 millions d’euros au budget général.

S’agissant des exonérations de cotisations sociales, visées expressément par cet article, elles s’élèvent, selon les éléments disponibles, à un peu moins de 340 millions d’euros.

Cette logique d’incitation fiscale et sociale est donc remise en cause. L’objectif du Gouvernement est, si l’on en croit le rapport, de dégager une économie budgétaire de 100 millions d’euros, économie sur la pertinence de laquelle nous nous interrogeons.

Nous n’avons jamais été des partisans acharnés, loin s’en faut, de la pratique des incitations fiscales et sociales pour aider au développement des petites et moyennes entreprises, ne serait-ce que parce qu’il y a belle lurette que les grands groupes ont su adapter la configuration de leur présence sur le territoire pour percevoir le bénéfice de ces dispositifs.

Il n’est pas essentiel qu’un artisan ou qu’une jeune entreprise de service, comptant de un à trois salariés soit dispensé de payer l’impôt sur le revenu, celui sur les sociétés ou quelques centaines d’euros au titre des cotisations sociales. De notre point de vue, il est bien plus important qu’il bénéficie d’un véritable accès au crédit bancaire, que ses projets soient véritablement soutenus par des engagements financiers précis des banques et des organismes de crédit en général.

S’agissant des exonérations sociales et fiscales, comment ne pas souligner que les enseignes de restauration rapide, qui sont autant de réseaux de petites et moyennes entreprises, bénéficient davantage de ces dispositifs que les artisans de nos quartiers ?

Si l’article 82 a pour objet d’économiser 100 millions d’euros pour une inavouable raison de régulation budgétaire de la même teneur que celles qui figurent dans les crédits de la mission, ce n’est pas un bon article.

S’il est l’illustration d’un changement de priorité, faisant de la facilitation de l’accès au crédit la priorité des priorités de l’action de l’État, ce peut être l’affirmation d’une évolution intéressante. Je crains cependant que ce ne soit pas le cas et que, par cet article, madame la ministre, vous n’ajoutiez encore le tribut de la politique de la ville à la réduction du déficit !

Les habitants des quartiers sensibles qui, eux, paient l’impôt sur le revenu, la TVA ou les impôts locaux, ont aussi des comptes bancaires. Il serait peut-être temps que l’argent qu’ils y déposent serve enfin à développer l’activité économique dans leur quartier.

En tout cas, cet article 82 montre que nous ne devons pas en rester au statu quo, comme nous y invitent les amendements de suppression. Mais, pour autant, nous ne devons pas sacrifier le devenir des quartiers sur l’autel de la régulation budgétaire.

Nous voterons contre les amendements de suppression, mais aussi, pour les motifs ci-dessus évoqués, contre l’article 82.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, sur l'article.

Mme Raymonde Le Texier. Le présent article a pour objet de « recentrer les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires » dans les ZFU par une profonde modification du dispositif qui avait été confirmé par la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances.

Le paragraphe III, quant à lui, vise à supprimer le mécanisme de la « sortie en sifflet » en trois ans ou en neuf ans.

Ces modifications ont essentiellement pour objet de générer, selon vos estimations, une économie de 100 millions d’euros, qui se répartiraient de la manière suivante : 70 millions d’euros au titre du plafonnement des exonérations et 30 millions d’euros au titre de la suppression de la sortie progressive.

Le coût des exonérations de charges sociales en ZFU serait ainsi ramené à 239 millions d’euros en 2009.

Si l’on ne peut qu’être favorable à la recherche d’économies par la suppression de dispositifs jugés inefficaces et coûteux, le choix que fait le Gouvernement de concentrer les allègements de charge sur les bas salaires est contre-productif.

Nous sommes convaincus que ces allégements de charges ont un effet négatif sur les salaires. En effet, pourquoi mieux rémunérer le travail si l’entreprise, de ce fait, vient à perdre le bénéfice de l’allégement ?

Nous sommes consternés de constater que la défiscalisation dans les ZUS est parfois détournée de son objet : certaines entreprises n’y installent que des boîtes aux lettres et en profitent pour bénéficier des avantages ; d’autres s’y installent, mais ne recrutent que des salariés n’habitant pas sur place ; enfin, certaines ne consentent à y créer que des emplois peu qualifiés.

Cela n’est pas sans conséquences pour les habitants de ces territoires. Selon le tout récent rapport de l’ONZUS, entre 2004 et 2007, on constate une précarisation accrue des emplois occupés par les habitants des ZUS ainsi qu’une extension du temps partiel, souvent subi.

Ainsi, si l’on se penche sur le cas des salariés masculins, on note que, dans les ZUS, la part des bas salaires a progressé de trois points, alors qu’elle est restée stable pour les autres salariés masculins des mêmes villes.

Certes, les ZFU n’ont pas permis de répondre aux attentes des habitants et n’ont pas joué pleinement le rôle de levier espéré pour les territoires ciblés. Malheureusement, votre proposition n’est pas non plus à la hauteur des enjeux. Elle n’apporte rien et risque de détruire le peu qui fonctionne.

Dans ces zones, les besoins sont toujours aussi criants, l’exclusion se développe, le chômage augmente, et vous n’abordez ces questions qu’en termes comptables.

De telles économies, qui sont finalement dérisoires face aux graves ponctions réalisées sur les crédits de la mission « Ville et logement », risquent d’avoir des conséquences encore plus graves pour nos territoires, en mettant en péril certaines entreprises, notamment les plus petites.

Plutôt que de modifier brutalement et sans concertation le système, pénalisant ainsi tant les entreprises que les salariés, il vaudrait mieux admettre qu’un dispositif fiscal ne peut pas à lui seul régler le problème de l’emploi dans les zones urbaines sensibles, les ZUS.

Ce sont les fondements même du dispositif global des zones franches urbaines qu’il conviendrait de revoir, en s’appuyant sur les véritables ressources de ces territoires, c'est-à-dire sur leur richesse humaine. Il est temps de replacer la personne au cœur des mesures prises en direction des ZFU.

Une partie des élus des zones urbaines – je parle surtout des zones franciliennes, parce que c’est la région que je connais le mieux, mais c’est sans doute également le cas ailleurs – demandent depuis longtemps l’application d’un dispositif fondé sur l’origine géographique du salarié. L’entreprise qui engagerait un salarié issu d’une zone urbaine sensible bénéficierait ainsi d’aides dès le premier emploi. En vous inspirant de cette proposition, vous feriez d’une pierre deux coups. D’une part, vous pourriez susciter des embauches. D’autre part, vous pourriez créer ce petit avantage comparatif qui fait tant défaut aux jeunes de banlieues aujourd'hui.

Passer des aides aux territoires aux aides à la personne et doter de capital public ceux qui n’ont pas de capital privé seraient des solutions fécondes pour répondre aux difficultés des personnes concernées.

Vous ne pouvez pas l’ignorer, la situation dans nos banlieues s’aggrave. Rien ne doit être négligé pour permettre l’accès à l’emploi du plus grand nombre. Or l’article 82 ne prend pas cet impératif en compte.

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les cinq premiers sont identiques.

L'amendement n° II-39 est présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° II-105 est présenté par MM. P. André et Repentin, au nom de la commission des affaires économiques.

L'amendement n° II-153 rectifié bis est présenté par MM. J.C. Gaudin, Gilles, Alduy, Dufaut et Juilhard, Mlle Joissains et MM. J.P. Fournier et Braye.

L'amendement n° II-179 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.

L'amendement n° II-201 est présenté par MM. Repentin et Guérini, Mme Ghali, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-39.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Monsieur le président, madame le ministre, madame la secrétaire d'État, il me revient d’« ouvrir le feu » sur l’article 82. (Sourires.)

Certes, le même avis semble largement partagé sur l’ensemble des travées de l’hémicycle, même si j’ai eu un peu de mal à suivre les argumentations de Mme Le Texier. Ma chère collègue, je n’ai pas bien compris si vous étiez pour ou contre les ZFU.

Mme Raymonde Le Texier. Je suis pour des ZFU qui marchent !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Vous critiquez les zones franches urbaines, tout en souhaitant supprimer l’article 82, qui vise lui-même à supprimer ce dispositif. J’avoue que j’ai un peu de mal à comprendre.

Mme Raymonde Le Texier. Ne faites pas semblant ! Vous avez très bien compris !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Quoi qu’il en soit, le principal, c’est tout de même que vous votiez les amendements identiques tendant à supprimer l’article 82.

J’ai déjà expliqué la position de la commission des finances dans la discussion générale.

Aujourd'hui, l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, l’ONZUS, reconnaît l’apport des ZFU. Voilà deux ans, nous en avons augmenté le nombre, ce qui a permis l’installation d’entreprises.

D’ailleurs, en 2006, lorsqu’une zone franche urbaine a été créée à Neuilly-sur-Marne, je n’ai pas entendu notre collègue Jacques Mahéas, le maire de la ville, venir s’en plaindre. Je serais donc très étonné qu’il ne reconnaisse pas les avantages du dispositif. Pour ma part, j’ai rencontré le président de l’association des industriels de cette ZFU et je peux attester que ses collègues et lui souhaitent vivement conserver le bénéfice de telles exonérations.

Je n’ai pas l’intention de me lancer dans une longue plaidoirie, mais je crois qu’il serait effectivement plus raisonnable de supprimer l’article 82, madame la ministre.

Le Président de la République vient d’annoncer des diminutions de charges à hauteur de 700 millions d’euros. Nous pouvons donc très bien trouver les 70 millions d’euros nécessaires pour conserver les exonérations sociales et fiscales des ZFU. En outre, face au problème des 30 millions d’euros de « sortie en sifflet », le Gouvernement avait déposé un amendement pour maintenir le dispositif. En clair, le compte y est.

C'est la raison pour laquelle nous pouvons tous, me semble-t-il, voter la suppression de l’article 82.

M. le président. La parole est à M. Pierre André, pour présenter l'amendement n° II-105.

M. Pierre André. Madame la secrétaire d’État, vous avez commencé votre intervention en soulignant que la politique de la ville avait besoin de lisibilité. Vous avez raison. Le Sénat, lui, a toujours affirmé que cette politique avait également besoin de continuité.

Je ne sais pas quelle est la « malédiction » qui frappe les zones franches urbaines, mais il y a un réel problème.

Lancée en 1995 par Jean-Claude Gaudin et Alain Juppé, la politique des ZFU constituait le troisième pilier de la politique économique. En effet, pour nous, la politique économique, c’est la rénovation urbaine, qui est aujourd'hui en train de réussir, car les acteurs en ont la volonté. À cela s’ajoute la cohésion sociale. C’est le sens de l’action que vous menez dans le cadre du plan Espoir Banlieues, madame la secrétaire d’État. Je tiens à vous féliciter pour ce qui se passe sur le terrain.

Mais, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, vous avez toutes les deux oublié l’un des volets les plus importants, celui du développement économique. Nous ne ferons rien dans nos quartiers en difficulté s’il n’y a pas de développement économique et si nous nous contentons de salaires de bas niveau.

Nous voulons rendre l’excellence dans les quartiers. C'est la raison pour laquelle je demande la suppression de l’article 82.

Si j’évoquais tout à l’heure une « malédiction », je me réjouis tout de même que nos collègues socialistes se soient convertis aux zones franches urbaines.

En effet, la première à avoir demandé la suppression des ZFU en 1997, c’est Mme Martine Aubry. (Sourires sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.) Mais il est vrai qu’elle a changé d’avis depuis son arrivée à la mairie de Lille, où il y a une zone franche urbaine.

Chargé par la commission des affaires économiques de rédiger un rapport d’information sur le bilan des zones franches urbaines, j’ai découvert, à ma grande stupéfaction, que lorsque Mme Aubry était au gouvernement, elle avait commandé un rapport à l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, pour démontrer que les ZFU n’avaient permis la création d’aucun emploi. À cette époque, l’ONZUS n’existait pas. Et le Commissaire européen en charge de ce dossier m’a fait part de sa surprise de voir des parlementaires s’intéresser à un système totalement rejeté par le gouvernement français !

Il a fallu attendre 2002 pour que le Président de la République, Jacques Chirac, conformément à ses engagements électoraux, décide de relancer les zones franches urbaines. À partir de 2003, nous avons lancé de nouvelles générations de ZFU avec Jean-Louis Borloo. Nous pouvons, me semble-t-il, nous en réjouir.

Aujourd'hui, il y a 125 000 emplois dans les zones franches urbaines, c'est-à-dire dans les quartiers en difficulté. Lors de l’élaboration des rapports sur la politique de la ville ou les ZFU que j’ai été amené à rédiger, je n’ai jamais entendu un maire nier que ce dispositif soit un facteur de développement économique dans sa commune.

Dans le cadre de la mission d’information sur les zones franches urbaines, j’ai rencontré Mme Aubry, qui m’a déclaré considérer les ZFU comme la réussite la plus sûre en matière de politique de la ville. Voilà ce qu’elle m’a dit.

Aujourd'hui, sur toutes les travées, nous nous accordons, me semble-t-il, pour estimer que les zones franches urbaines sont une chance pour nos quartiers. Alors ne la laissons pas passer !

Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, je ne vois pas l’intérêt de réaliser des économies de bouts de chandelle aujourd'hui si c’est pour devoir dépenser plus au titre de l’indemnisation des chômeurs demain.

Soyons raisonnables ! Compte tenu de ce qui vient d’être annoncé par le Président de la République, nous ne sommes plus à 60 millions d’euros près. (Mme Samia Ghali et M. Thierry Repentin applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour présenter l'amendement n° II-153 rectifié bis.

M. Dominique Braye. Je présente cet amendement tendant à la suppression de l’article 82 à la demande de plusieurs de nos collègues, tous élus de terrain dans des villes ayant des quartiers défavorisés et bénéficiant du dispositif ZFU depuis 1997, date de sa création. Je pense notamment à notre collègue Jean-Claude Gaudin, qui, en plus d’être vice-président du Sénat, conduit les destinées de la seule ville de France, à ma connaissance, à avoir deux zones franches urbaines.

Tous ces collègues ont un point commun. Ils partagent totalement la volonté du Gouvernement de réformer notre pays en profondeur, et rapidement, et de diminuer la dépense publique.

Pour autant, ces élus estiment également que, si des économies sont nécessaires, elles ne doivent pas être réalisées n’importe comment. Comme vient de le rappeler mon collègue et ami Pierre André, il ne faut pas choisir des économies qui entraîneraient des dépenses beaucoup plus importantes, sans compter les conséquences sociales et humaines dramatiques qui en résulteraient obligatoirement.

Quel est l’objet de l’article 82 ? Tout simplement de revenir sur le régime des exonérations dont bénéficient les petites entreprises installées dans les soixante-dix-neuf zones franches urbaines créées depuis 1997, et ce en reniant les promesses et les engagements de l’État vis-à-vis des jeunes entreprises concernées, qui sont les plus fragiles, car elles sont installées dans les quartiers les plus défavorisés de notre pays.

Je voudrais simplement rappeler quelques chiffres, en prenant deux villes en exemple.

D’une part, j’évoquerai le cas de Marseille, la ville de notre collègue Jean-Claude Gaudin, qui était – Pierre André l’a rappelé – ministre de l’aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration en 1996 et, à ce titre, à l’origine des zones franches urbaines.

D’autre part, et vous le comprendrez bien, madame la ministre, car cette ville vous est également chère, en tant que première vice-présidente du conseil général des Yvelines, je mentionnerai également Mantes-la-Jolie. Cette ville, au centre de la communauté d’agglomération que j’ai l’honneur et le plaisir de présider, a sur son territoire la plus grande ZUP de France.

Mes chers collègues, entre 1997 et 2007, le dispositif zones franches urbaines a permis de créer 2 797 entreprises et près de 13 000 emplois à Marseille. À Mantes-la-Jolie, en dix ans, cette politique a permis la création de 211 entreprises et de près de 1 200 emplois privés.

Dans des quartiers défavorisés où le taux de chômage est le double, voire le triple, de la moyenne départementale et où le chômage des jeunes atteint parfois 40 %, de tels chiffres sont tout à fait considérables. Mais là n’est peut-être pas le plus important.

Le plus important, c’est peut-être que le retour de l’activité à l’intérieur de ces quartiers a permis de rétablir une certaine normalité. Ainsi, un commerçant du Val-Fourré m’a confié revoir enfin dans son quartier ce qui avait disparu depuis dix ans : des hommes avec une cravate et un attaché-case !

Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, permettez-moi de vous poser quelques questions. Naturellement, ce n’est pas vous personnellement que j’interpelle : je connais votre fibre sociale à toutes les deux. Mais je sais aussi les contraintes qui s’imposent souvent aux ministres. À travers vous, c’est donc le Gouvernement que je souhaite placer en face de ses responsabilités.

Avez-vous pensé, en nous proposant la disparition des exonérations accordées aux entreprises installées dans les ZFU, au nombre d’entreprises que vous allez faire disparaître, et ce en revenant sur la parole donnée par l’État à ces jeunes chefs d’entreprise ? Est-ce ce message que vous voulez lancer à ces quartiers encore extrêmement fragiles, qui commencent aujourd'hui à être cruellement touchés par la crise économique actuelle ?

Avez-vous simplement pensé à la responsabilité qui serait la vôtre si vous allumiez l’étincelle qui enflammera une nouvelle fois ces quartiers ? Nous le sentons bien, en raison de la crise économique, la situation y est déjà très tendue.

D’ailleurs, votre proposition est-elle cohérente avec le discours du chef de l’État, qui affirme vouloir tout faire pour aider les PME et les PMI ?

Avez-vous oublié les efforts déployés en 1996 par le gouvernement de l’époque auprès des instances européennes pour faire accepter un dispositif aujourd'hui plébiscité par tous les élus qui l’ont mis en place, car il a changé la vie des quartiers ?

Avez-vous tout simplement évalué le coût d’une telle décision pour notre pays ? En voulant économiser 100 millions d’euros, vous allez provoquer des faillites d’entreprises en cascade, des drames humains et sociaux dont nos quartiers sensibles n’ont nullement besoin en ce moment. Comme l’a souligné Pierre André, le coût qui en résultera sera sans commune mesure avec la petite économie que vous souhaitez réaliser.

Au moment où le Président de la République vient d’annoncer son plan de relance de l’économie, est-il cohérent et utile de supprimer des mesures qui ont fait la preuve de leur efficacité et de prendre des décisions qui vont faire mourir nombre de jeunes entreprises ?

Et puis est-il de bon sens de supprimer un dispositif alors qu’une enquête est lancée par la délégation interministérielle à la ville sur l’évaluation des résultats des zones franches urbaines ? Certes, ce n’est pas la première fois qu’on prendra une décision sans connaître les conclusions des rapports réalisés sur le sujet…

Mes chers collègues, notre responsabilité, ce soir, est grande. Comme je le disais au début de mon propos, si nous devons aider le Gouvernement dans sa volonté de réformer notre pays et diminuer la dépense publique, nous ne devons pas suivre ses propositions quand il est aussi évident que la voie n’est pas la bonne.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'État, je crois qu’il est très important de supprimer cet article 82, et je vous fais totalement confiance pour que, d’ici à la commission mixte paritaire, dans le cadre du plan de relance annoncé par le Président de la République aujourd'hui même à Douai, vous trouviez la solution qui permette de respecter la parole de l'État et de soutenir les petites et moyennes entreprises les plus fragiles situées dans les zones franches urbaines des quartiers sensibles de notre pays. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour présenter l'amendement n° II-179.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Je serai bref, les intervenants précédents ayant excellemment démontré que l’article 82 était une erreur.

Lorsque les choses sont aussi claires, il me semble que c’est rendre un service au Gouvernement que de l’empêcher de se tromper ! (Sourires.)

J’insisterai simplement sur ce qui me semble le plus important.

Comme notre collègue Dominique Braye vient de le souligner, les zones franches urbaines sont des zones fragiles. Les chefs d’entreprise qui y investissent sont courageux. Ils ont pris des risques, parce que l'État leur a promis son soutien.

Par conséquent, nous n’avons pas le droit de nous défausser unilatéralement et, soudainement, de trahir leur confiance, ainsi que celle des populations déjà vulnérables, qui comptent sur l'État, aujourd'hui sans doute plus qu’hier.

C’est pourquoi, au nom de la commission des affaires sociales, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression, qui a été soutenu à l’unanimité par la commission. (M. le rapporteur spécial applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° II-201.

Mme Raymonde Le Texier. Je vais essayer d’être plus claire pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. Je suis bien sûr favorable aux ZFU, à leur maintien et à leur extension. Je voulais simplement insister tout à l'heure sur le fait qu’il serait intéressant de trouver le moyen d’inciter les entreprises concernées à faire un effort pour embaucher davantage de personnes habitant les quartiers où sont implantées ces ZFU.

S’agissant de l’amendement de suppression de l’article 82, je ne m’étendrai pas, les plaidoyers précédents ayant été brillants.

Vous nous proposez de supprimer sans délai de précaution, et ce dès le 1er janvier 2009, la sortie progressive des dispositifs sur trois et cinq ans et vous réduisez les exonérations des charges sociales patronales, allant même jusqu’à les annuler pour les rémunérations supérieures à 240 % du SMIC.

La Fédération nationale des associations d’entrepreneurs des ZFU s’inquiète aujourd'hui, à juste titre.

En effet, – cela a été dit, mais je le répète – de telles décisions auront des conséquences considérables sur les petites entreprises qui ont accepté de jouer le jeu. Leur plan prévisionnel de trésorerie se trouvant bouleversé, nombre d’entre elles seront confrontées à des difficultés sérieuses, alors même que la situation économique est déjà fortement dégradée et que tous les indicateurs socio-économiques sont au rouge.

Avant d’envisager toute mesure de modification, il serait pour le moins raisonnable d’attendre les résultats de l’enquête nationale en cours menée par la Délégation interministérielle à la ville, la DIV, sur l’évaluation des dispositifs ZFU.

Pour toutes ces raisons, il nous paraît impossible de voter une telle réforme, à la va-vite de surcroît.

Aussi, le groupe socialiste vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression.

M. le président. L'amendement n° II-247, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer les cinquième (3°), septième (5°) et dernier (6°) alinéas de cet article.

La parole est à Mme la ministre, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques de suppression.

Mme Christine Boutin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, rappelez-vous l’histoire de la chèvre de M. Seguin. J’aimerais que vous l’ayez en mémoire… (Sourires.)

Le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression. Néanmoins, conscient de l’impact, notamment sur les petites entreprises, d’une modification rapide des règles en vigueur, il propose l’amendement n° II-247 qui a pour objet de préserver l’esprit de la réforme en en limitant les effets sur les petites entreprises et en laissant tout le bénéfice à la sortie en sifflet sur plusieurs années. Ainsi, toutes les entreprises bénéficieraient d’une sortie du dispositif progressive sur trois ans complémentaires, et même neuf ans pour les plus petites entreprises, celles de moins de cinq salariés.

En conséquence, le Gouvernement demande le retrait des amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il sera reconnu que, toute la nuit, Mme la ministre aura lutté et que, à minuit passé, elle aura rendu les armes. (Nouveaux sourires.)

Pour ma part, je souhaite que le Sénat adopte l’amendement de la commission des finances visant à supprimer l’article 82, même si je reconnais l’effort du Gouvernement concernant la sortie en sifflet. À cet égard, il conviendra de trouver une solution lors de la commission mixte paritaire.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je veux saluer l’attitude du Gouvernement, qui doit faire face, ce soir, à un Sénat très solidaire sur pratiquement toutes les travées et dont toutes les commissions saisies au fond et pour avis ont émis un avis convergent.

On ne peut pas dire que l’actualité vous serve, madame la ministre, madame la secrétaire d'État ! Vous venez aujourd'hui nous proposer un amendement visant à aménager le dispositif prévu par l’article 82 et voté par nos collègues députés, mais c’est au soir d’une annonce très importante faite à Douai par le Président de la République, annonce qui vous obligera à revenir devant le Parlement dans quelques semaines avec un collectif budgétaire tirant toutes les conséquences des 700 millions d’euros prévus dans le secteur dont vous avez la charge.

Je ne voudrais pas que vous preniez en mauvaise part la position de la commission des finances à l’égard de votre amendement. Je serai sans doute membre de la commission mixte paritaire qui aura pour mission de rapprocher les positions de l’Assemblée nationale et du Sénat. D’ici là, vous, comme nous, aurons pu probablement tirer les conséquences des annonces d’aujourd’hui, ce qui nous permettra d’envisager la manière d’articuler le dispositif et de trouver la bonne position.

Vous le comprenez, ce soir, notre ambition est de vous aider dans votre politique. Nous maintenons notre amendement, identique à ceux des autres commissions saisies. S’ils sont votés, votre amendement n’aura plus d’objet, mais ne prenez pas ce vote du Sénat comme une mauvaise manière.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

Sans vouloir vous limiter dans votre expression, je vous demande, mes chers collègues, de faire preuve de concision, et je sens que tel est le souhait du président de la commission des finances, compte tenu de la journée qui attend le Sénat demain.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, je serai bref.

Je voudrais simplement noter que des instants comme celui que nous vivons actuellement grandissent notre institution, ces instants où l’expérience que nous partageons dans nos collectivités territoriales nous conduit à transcender nos divergences pour tenter de trouver une solution aussi pragmatique que possible à nos difficultés communes.

Pour ma part, je suis non pas élu d’une ZFU, mais conseiller général d’une ZRU.

Bien souvent les élus des territoires bénéficiant d’une fiscalité avantageuse au titre de leur spécificité sont jalousés. Pour ma part, je ne les envie pas et je voterai bien évidemment cet amendement pour les raisons suivantes.

Nous ne pouvons pas donner à nos concitoyens et aux élus en charge de la gestion des territoires de France l’idée que les ZFU, au titre du développement économique, seraient destinées à des emplois peu qualifiés à faible coût de rémunération.

Ne pas voter cet amendement reviendrait à inciter les entreprises à limiter le niveau des salaires versés sur ces territoires pour conserver un certain nombre d’avantages fiscaux qui disparaîtraient si le salaire moyen venait à augmenter.

Je me souviens avec émotion du travail positif accompli par la mission commune d’information sur les quartiers en difficulté, présidée par M. Alex Türk et dont M. Pierre André était le rapporteur. À cette occasion, nous avons visité nombre de ZFU et pu constater les efforts réalisés par les maires des différents territoires pour y attirer des entreprises offrant des emplois de toute nature.

À l’Assemblée nationale, nos collègues qui ont défendu ces amendements – François Pupponi, Jean-Yves Le Bouillonnec, Geneviève Fioraso – n’ont pas réussi à convaincre la majorité. Visiblement, ce soir, au Sénat, cette ambition est partagée.

Permettez-moi d’ajouter que Pierre André, sans le vouloir, a rendu hommage à Martine Aubry, qui a fait preuve d’ouverture d’esprit en reconnaissant qu’un combat du passé pouvait être derrière soi et qu’il fallait regarder vers l’avenir. C’est un signe supplémentaire d’une belle unanimité !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, vous avez fait allusion tout à l’heure au souhait de concision dans les propos que j’ai pu exprimer. Je ne voudrais pas être suspecté à la fois de retarder nos débats et d’exercer une pression sur ceux d’entre vous, mes chers collègues, qui souhaiteraient développer leurs arguments.

Permettez-moi simplement de rappeler que nous avons reporté l’examen de deux missions qui était prévu ce soir. La conférence des présidents a donc fixé une séance samedi après-midi à quatorze heures, à condition bien entendu que nous ne terminions pas trop tard dans la nuit de vendredi à samedi.

Or, d’après les meilleurs prévisionnistes du Sénat, si la séance ouvre demain à neuf heures trente, nous aurons une chance d’achever les débats inscrits à l’ordre du jour avant cinq heures dans la nuit de vendredi à samedi ! Mais, pour cela, il faut que la présente discussion se termine à zéro heure trente, sinon il faudra retarder la séance de demain, de quelques quarts d’heure supplémentaires.

M. le président. Monsieur le président, nul n’a ressenti vos propos comme une pression.

Je mets aux voix les amendements identiques nos II-39, II-105, II-153 rectifié bis, II-179 et II-201.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 54 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 339
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 339

Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)

En conséquence, l'article 82 est supprimé, et l'amendement n° II-247 n'a plus d'objet.

Article 82
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 83

Articles additionnels après l'article 82

M. le président. L'amendement n° II-40, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 82, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - le terme constant de la participation personnelle du ménage. »

II. - L'article L. 542-5 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - le terme constant de la participation personnelle du ménage. »

III. - Après le septième alinéa de l'article L. 831-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - le terme constant de la participation personnelle du ménage. »

IV. - Les dispositions des I à III s'appliquent à compter du 1er janvier 2010.  

V. - La perte de ressources résultant pour l'État des dispositions des I à IV est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Cet amendement est identique à celui que la commission des finances vous avait proposé l’année dernière.

Il vise à indexer, selon les mêmes règles que les autres composantes du calcul des aides personnelles au logement, la valeur du « reste à payer » pour les locataires.

L’année dernière, on nous avait opposé que cette dernière valeur servait de variable d’ajustement. On le constate cette année puisque ce terme constant, en passant de 31 euros à 33 euros, subit une augmentation de 10 % en deux ans, ce qui est beaucoup. Cela permet de « gratter » quelques millions d’euros.

Peut-être qu’à l’avenir nous pourrions tout de même indexer cette variable.

M. le président. Le sous-amendement n° II-104, présenté par MM. Repentin et P. André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Dans le IV de l'amendement n° II-40, remplacer le millésime :

2010

par le millésime :

2009

La parole est à M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis.

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. La commission des finances propose d'indexer la participation minimale des allocataires à la dépense de logement sur l'indice de référence des loyers.

Ce paramètre grimpe chaque année depuis 2007 en vertu de considérations totalement discrétionnaires et sans rapport avec les évolutions des grandes données économiques.

Bien évidemment, la commission des affaires économiques souscrit totalement au principe de l’amendement n° II–40, qui vise à instaurer une règle simple et lisible pour les allocataires.

Toutefois, monsieur le rapporteur spécial, nous avons considéré que, tout en étant très bonne, votre initiative pouvait devenir excellente en ne restant pas au milieu du gué.

Vous nous proposez d’appliquer cette règle à compter du 1er janvier 2010, ce qui laisse, très concrètement, toute latitude au Gouvernement de récupérer une soixantaine de millions d’euros sur le dos des allocataires du parc de logements publics.

Pour ces raisons, la commission des affaires économiques propose de parachever cette démarche en proposant un sous-amendement qu’elle a adopté à l’unanimité et qui vise à avancer au 1er janvier 2009 l'entrée en vigueur de cette mesure de bon sens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° II-104 ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission des finances souhaite connaître l’avis du Gouvernement. Je crains en effet que cette proposition n’ait un coût...

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. La loi DALO a indexé sur l’indice de référence des loyers, l’IRL, les barèmes des aides personnelles au logement.

C’est un net progrès pour les bénéficiaires de ces aides puisque, auparavant, les revalorisations dépendaient beaucoup plus des marges de manœuvre budgétaires dont nous disposions.

L’amendement a pour objet d’indexer sur l’IRL le terme constant de ce que l’on appelle la participation minimale. Cette participation minimale correspond à un ticket modérateur, à une sorte de minimum à charge, dont le montant représente soit 8,5 % de la dépense de logement, soit un montant forfaitaire fixé actuellement à 31 euros.

Plutôt que de voir ce terme constant passer de 31 euros à 33 euros, vous préféreriez qu’il soit directement indexé sur l’IRL.

Je ne suis pas favorable à cette disposition, car il est nécessaire de préserver une marge d’appréciation sur l’évolution de ce paramètre afin de pouvoir le faire évoluer en tenant compte de la situation des ménages concernés et de l’évolution globale des autres paramètres.

Cette année, la revalorisation, par exemple, des autres paramètres du barème est élevée, puisqu’elle se monte à 2,95 %, et son coût pour le budget de l’État est d’environ 245 millions d’euros.

Dans ces conditions, il n’est pas illogique d’augmenter le terme constant de la participation minimale de 2 euros.

Quant à la proposition de M. Repentin, elle consisterait à appliquer cette indexation dès 2009.

J’observe en outre que la mesure proposée par M. Dallier ne devant être applicable qu’à compter du 1er janvier 2010 et n’ayant donc pas d’effet sur le budget 2009, on peut s’interroger sur l’opportunité de l’insérer dans le projet de loi de finances pour 2009.

Par conséquent, je vous saurai gré, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir retirer cet amendement et ce sous-amendement. À défaut, je serai amenée à émettre un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-104.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-40.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 82.

L'amendement n° II-41, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 82, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le compte général de l'État, annexé au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, inscrit la provision au titre des litiges résultant de la mise en jeu de la responsabilité de l'État en application de la loi n°2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

La parole est à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Nous avons pris contact avec nos collègues députés, car nous craignions que l’article en question ne soit en contradiction avec l’une des dispositions que le Sénat avait fait adopter lors de l’examen du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion que nous avons examiné récemment.

Apparemment, ce ne sera pas le cas. Je retire donc cet amendement.

M. le président. L'amendement n° II-41 est retiré.

Articles additionnels après l'article 82
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Articles additionnels après l'article 83 (début)

Article 83

Le Gouvernement présente, en annexe générale au projet de loi de finances de l’année, un rapport récapitulant, pour l’exercice budgétaire en cours d’exécution et l’exercice suivant, la contribution de la participation des employeurs à l’effort de construction au financement du programme national de rénovation urbaine et de l’Agence nationale de l’habitat, en indiquant la répartition détaillée de ces crédits.

Cette annexe générale est déposée sur le bureau des assemblées parlementaires et distribuée au moins cinq jours francs avant l’examen, par l’Assemblée nationale, en première lecture, de l’article d’équilibre du projet de loi de finances de l’année.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.

Mme Odette Terrade. Cet article 83 porte sur la question du 1 % logement.

Voté par l’Assemblée nationale, le présent article fait doublon, sur la forme, avec celui introduit dans le cadre de la discussion du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, et qui portait exactement sur les mêmes questions.

Il s’agit, en effet, de permettre au Parlement d’être informé de la réalité des engagements financiers souscrits au titre du 1 % logement en direction du programme national de rénovation urbaine et des actions de l’Agence nationale de l’habitat.

Notons, toujours pour la forme, que nous pourrions plutôt voter en faveur de la suppression de l’article figurant dans le projet de loi de mobilisation pour le logement adopté par le Sénat, puisque nous sommes en présence d’une annexe au projet de loi de finances.

Je crois me souvenir que les documents relatifs à la loi de finances, qu’il s’agisse du projet de loi lui-même, des documents budgétaires retraçant les crédits des missions ou de l’ensemble des annexes font l’objet d’un vote de principe dans le cadre de la seule loi organique.

On pourrait d’ailleurs tout à fait concevoir, mais peut- être le verrons-nous mieux encore lors du collectif budgétaire de fin d’année, que le document en question soit mis à disposition avec l’ensemble des autres documents budgétaires.

.

J’en viens au fond. L’article 83 révèle qu’il y a une certaine inquiétude derrière le devenir du 1 % logement, dans un contexte où ce qui est, jusqu’ici, une forme de salaire socialisé de l’ensemble des salariés sera transformé en recettes pour le budget général de l’État.

L’inquiétude légitime de nombre d’élus de la majorité parlementaire, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, peut encore trouver un débouché.

Il suffit pour cela de ne pas adopter les termes de l’article 3 du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, qui organise les conditions de mise en œuvre de ce véritable hold-up sur les ressources du 1 % !

Si vous voulez y voir plus clair dans la manière dont les fonds du 1 % sont affectés, tant à la rénovation urbaine qu’au développement de l’offre locative privée à loyers maîtrisés, ou à la rénovation des logements anciens, une solution s’offre à vous, mes chers collègues : ne votez pas ce budget et ne votez pas les termes de l’article 3 du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

Si vous les adoptiez, le risque existe, effectivement, que le 1 % soit réellement détourné au profit de la seule régulation budgétaire !

Les fonds du 1 %, ce sont les éléments de rémunération des salariés qui sont socialisés. Jusqu’à aujourd’hui, pour l’essentiel, cet argent revenait aux salariés sous des formes fort diverses, allant du financement du logement locatif social à l’aide à la réalisation de travaux d’amélioration du logement, en passant par l’accessibilité au logement.

Nous pouvons discuter des priorités, de la répartition des fonds selon les usages, parfois des conditions de gouvernance –affreux vocable – des organismes collecteurs.

Des progrès sont à faire dans ce sens, et nous en sommes parfaitement convaincus.

Cependant, vous avez suivi une autre voie : celle de répondre aux insuffisances de la politique gouvernementale en matière de logement en rackettant purement et simplement les salariés.

M. le président. L'amendement n° II-42, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il a été retiré, monsieur le président.

M. le président. Non, vous avez retiré l’amendement n° II-41, qui visait à introduire un article additionnel après l’article 82.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il ne s’agissait pas du bon amendement, monsieur le président. C’est la preuve qu’il ne faut pas aller trop vite !

M. le président. Excusez-moi, mon cher collègue, personne ne vous a demandé de vous précipiter.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. L’amendement n° II-41 a un intérêt, et c’est l’amendement n° II-42 que je souhaite retirer.

M. le président. Je suis navré, monsieur le rapporteur spécial, l’amendement n° II-41 a été retiré et nous ne pouvons pas revenir sur ce vote.

L'amendement n° II-42 est retiré.

Je mets aux voix l'article 83.

(L'article 83 est adopté.)

Article 83
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Articles additionnels après l'article 83 (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 83

M. le président. L'amendement n° II-180, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l'article 83, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 351-8 du code de la construction et de l'habitation est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le montant remboursé est proportionnel au nombre d'allocataires bénéficiant de l'aide. »

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à indexer le montant du remboursement de la CNAF pour les frais de gestion de l’APL sur le nombre de dossiers traités, plutôt que sur le montant des prestations versées, comme c'est le cas actuellement.

Le niveau des frais engendrés par la gestion de l'APL est totalement étranger au montant des prestations et dépend, en revanche, du nombre de dossiers traités.

En conséquence, cet amendement me paraît de bon sens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

En effet, les coûts de gestion résultent davantage du nombre d’actes effectués pour chaque dossier que du nombre de bénéficiaires. Or il serait très complexe de déterminer les coûts réels de gestion en fonction du nombre d’actes réalisés, car les frais correspondant à un seul ménage peuvent être mutualisés entre plusieurs prestations.

La règle des 2 % du montant des prestations présente le mérite de la simplicité pour le Fonds national d’aide au logement comme pour les organismes payeurs.

On peut d’ailleurs souligner que la récente simplification des modalités de calcul des ressources des bénéficiaires, rendue possible par la télétransmission des données fiscales, va entraîner une diminution des coûts de gestion en dispensant les services d’instruire les déclarations de ressources.

Enfin, la détermination des modalités de remboursement des frais de gestion ne relève pas de la loi.

M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-180 est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Je comprends bien les arguments de Mme la ministre, du moins ceux qui lui ont été transmis, mais je pense très sincèrement qu’il doit être possible de connaître exactement le nombre de dossiers traités.

Mme Christine Boutin, ministre. C’est possible, mais cela a un coût !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Tiens donc ! Voilà qui me paraît vraiment bizarre ! C’est ce qu’on vous dit…

Moi, je ne cherche qu’à permettre au Gouvernement de réaliser des économies. Mais si vous estimez que le Gouvernement n’a pas à faire d’économies, je retire cet amendement !

M. le président. L'amendement n° II-180 est retiré.

L'amendement n° II-181, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l'article 83, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du III de l'article 85 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 est ainsi rédigé :

« L'octroi de la garantie de l'État prévue aux I et II est subordonné au respect des conditions d'éligibilité des locataires des logements concernés. Sous réserve du respect des autres conditions d'éligibilité, la garantie de l'État est accordée lorsque le montant du loyer est inférieur à 50 % des ressources du locataire. »

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne la garantie des risques locatifs, ou GRL, qui a été instaurée en 2007. Elle permet à tout propriétaire qui y souscrit, pour un montant équivalant à environ 2 % du loyer, d’être couvert contre tous les risques d'impayés, que ces risques concernent le loyer, les charges ou les taxes dues par le locataire, et même la remise en l’état du logement.

Vous imaginez bien, mes chers collègues, que ce mécanisme a été inventé pour inciter les propriétaires à ne plus avoir peur de remettre leur logement sur le marché, et surtout à ne plus redouter de le louer à des personnes qui rencontrent de difficultés particulières pour se loger : salariés à temps partiel ou en CDD, chômeurs, RMIstes, etc. En tant qu’élus, nous avons tous eu connaissance de tels cas.

Or, pour l’instant, rien ne garantit que ces personnes, qui sont pourtant le « cœur de cible » de la GRL, puissent effectivement bénéficier du dispositif, car le taux d’effort du locataire qui y donne droit n’est pas précisé dans la loi.

Ainsi, une personne qui gagne très modestement sa vie, par exemple 800 euros par mois, choisit de prendre un appartement dont le loyer est de 400 euros mensuels. Cette personne aura droit, en moyenne, à 200 euros d’APL. Elle paiera donc en réalité 200 euros de loyer et son taux d’effort sera de 25 %.

Or un taux d’effort maximum est fixé, mais rien n’est précisé quant au taux d’effort minimum. Si ce taux minimum était fixé à 33 % – et c’est ce taux dont les sociétés d’assurance demandent avec insistance l’application –, toutes les personnes qui bénéficient d’aides au logement, c’est-à-dire toutes les personnes pour qui la GRL a été créée, seraient de fait exclues du dispositif.

L’objet de notre amendement, pour être simple, n’en est pas moins crucial : il ne doit pas y avoir de taux d’effort minimum à respecter pour avoir droit à la GRL, c’est-à-dire concrètement qu’il ne doit pas être possible d’exclure les personnes les plus vulnérables de l’accès à la GRL.

J’ajouterai encore deux arguments.

Selon les estimations du « 1 % logement », 50 000 logements supplémentaires pourraient rapidement être remis sur le marché grâce à ce dispositif, soit 50 000 logements disponibles pour ceux qui ont des difficultés à se loger.

Enfin, la GRL est un facteur d’économies pour l’État, car elle repose sur une approche intelligente des problèmes financiers des locataires. Quand un locataire – un locataire de bonne foi, bien sûr – ne parvient pas, à un moment donné, à acquitter son loyer, c’est un auxiliaire social qu’on lui envoie, non une menace d’expulsion. Jusqu’à présent, dans 95 % des cas de litige que les propriétaires assurés par la GRL ont rencontrés, l’auxiliaire social a trouvé une solution à l’amiable permettant au locataire de faire face à ses obligations et au propriétaire d’être payé normalement. Ce sont autant de contentieux et de frais de justice qui sont ainsi évités.

Voilà pourquoi, mes chers collègues, je crois cet amendement très important et vous demande, au nom de la commission des affaires sociales, qui l’a adopté à l’unanimité, de le voter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission des finances souhaite entendre l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Vanlerenberghe, la question soulevée dans cet amendement est importante, et nous sommes très nombreux à partager l’intérêt que vous portez à la garantie du risque locatif. Lors de l’examen de la loi instituant le droit au logement opposable – j’étais alors députée –, j’ai d’ailleurs obtenu que soit adopté un amendement visant à en affirmer le caractère universel.

Nous avons tous la volonté absolue de faire en sorte que le dispositif de la GRL produise tous ses effets. Vous proposez, quant à vous, monsieur le rapporteur pour avis, de fixer le taux d’effort dans la loi, et c’est légitime. Cependant, par un hasard du calendrier, les négociations entre l’État et les partenaires sociaux doivent aboutir demain. Dans le cadre de ces négociations, les partenaires sociaux se sont engagés à trouver un accord sur la GRL avant la fin de l’année. Ils doivent rencontrer, demain, les représentants des sociétés d’assurance. Par conséquent, les partenaires sociaux, avec qui j’ai encore discuté tout à l'heure, pensent que ce serait adresser un mauvais signal aux assureurs si, aujourd’hui, la décision que vous préconisez était prise.

C’est la raison pour laquelle, en vertu même de ma détermination et de celle de tout le Gouvernement à voir cette question réglée, je souhaite que vous retiriez votre amendement ; sinon, j’émettrai un avis défavorable. Croyez bien que je n’ai en vue que la bonne fin des négociations qui doivent être conclues demain.

M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-181 est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Madame la ministre, je sais l’attention que vous portez à cet amendement et combien vous êtes sensible à cette question, ainsi que vous l’avez d'ailleurs fortement souligné.

Toutefois, je pense qu’il n’appartient pas aux sociétés d’assurance de définir le taux de cette garantie.

Mme Christine Boutin, ministre. Elles y participent quand même !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Oui, elles participent à la garantie, mais leur part est minime ; c’est aussi l’avantage.

Je rappelle que c’est la cotisation des propriétaires qui constitue l’essentiel de la garantie. Les assurances, puis l’État n’interviennent qu’en deuxième et troisième niveaux.

Il me semble donc que c’est à la représentation nationale de déterminer quels sont les publics qui doivent avoir accès à cette GRL. Or, comme je crois l’avoir bien montré, c’est pour les publics les plus sensibles qu’il faut la faire fonctionner.

C’est à nous de fixer, par cet amendement, les conditions d’accès à la GRL. Il restera ensuite, dans la négociation, à définir les modalités. Mais l’affirmation du principe selon lequel tout le monde doit pouvoir accéder à cette garantie relève du politique et non de la négociation.

Voilà pourquoi je maintiens cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. À ce stade, madame la ministre, pouvez-vous nous dire sous quel délai les négociations en cours doivent être achevées ?

Mme Christine Boutin, ministre. Je l’ai indiqué, un accord doit intervenir demain entre les partenaires sociaux et les sociétés d’assurance.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous pourrions alors prendre rendez-vous pour le collectif budgétaire, qui viendra en discussion dans deux semaines, et réexaminer l’amendement de M. Vanlerenberghe à ce moment-là.

Mme Christine Boutin, ministre. J’en suis tout à fait d’accord !

M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, que pensez-vous de cette nouvelle suggestion ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Je me méfie toujours des rendez-vous… (Sourires.) Toutefois, si le président de la commission des finances et Mme la ministre sont d’accord pour réexaminer ce point lors du collectif budgétaire,…

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. … je présenterai de nouveau mon amendement à cette occasion, et j’espère qu’il recueillera alors un avis favorable du Gouvernement.

Il est en effet de bon sens d’ouvrir la GRL à tout le monde et, sauf à vouloir préserver l’apparence d’une négociation, c’est au législateur qu’il appartient de fixer le plancher ou le plafond de cette garantie.

M. le président. L’amendement n°II-181 est retiré.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Ville et logement ».

Articles additionnels après l'article 83 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Discussion générale

10

Transmission d'un projet de loi

M. le président. J’ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation d’un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil relatif à la coopération dans le domaine de la défense et au statut de leurs forces.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 122, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

11

Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

M. le président. J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de virement de crédits n° 5 à l’intérieur de la Section IV – Cour de justice du budget général pour l’exercice 2008 (DNO).

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4141 et distribué.

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de virement de crédits n° 6 à l’intérieur de la Section IV – Cour de justice du budget général pour l’exercice 2008 (DO/DNO).

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4142 et distribué.

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de directive du Conseil (Euratom) établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4143 et distribué.

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1083/2006 sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, en ce qui concerne certaines dispositions relatives à la gestion financière.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4144 et distribué.

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1081/2006 relatif au Fonds social européen en vue d’ajouter de nouveaux types de coûts éligibles à une contribution du FSE.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4145 et distribué.

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Recommandation de la Commission au Conseil afin d’autoriser la Commission à engager des négociations en vue de la conclusion, entre la Communauté européenne et le Cap Vert, d’un accord visant à faciliter la délivrance de visas de court séjour.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4146 et distribué.

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Décision du Conseil mettant en œuvre la position commune 2004/161/PESC renouvelant les mesures restrictives à l’encontre du Zimbabwe.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4147 et distribué

J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Décision du Conseil relative au lancement de l’opération militaire de l’Union européenne en vue d’une contribution à la dissuasion, à la prévention et à la répression des actes de piraterie et de vols à main armée au large des côtes de la Somalie (Atalanta).

Ce texte sera imprimé sous le n° E-4148 et distribué.

12

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 5 décembre 2008, à neuf heures quarante-cinq, quinze heures et le soir :

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (n° 98, 2008 2009).

Rapport (n° 99, 2008 2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.

Examen des missions :

Action extérieure de l’État

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 1) ;

M. Yves Dauge, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 100, tome I) ;

M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Action extérieure de l’État : Moyens de l’action internationale – avis n° 102, tome I) ;

Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Action extérieure de l’État : action culturelle et scientifique extérieure – avis n° 102, tome II).

Administration générale et territoriale de l’État (+ articles 56 à 58)

Mme Michèle André, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 2) ;

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (avis n° 104, tome I).

Relations avec les collectivités territoriales (+ articles 67 à 72)

Compte spécial : avances aux collectivités territoriales

M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 24) ;

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (avis n° 104, tome IX).

Médias

Compte spécial : avances à l’audiovisuel (+ articles 86, 87 et 88)

M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 17) ;

MM. Michel Thiollière et David Assouline, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (Avances à l’audiovisuel – avis n° 100, tome VI) ;

M. Joseph Kerguéris, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Médias : audiovisuel extérieur – avis n° 102, tome VIII).

Culture (+ articles 59 octies et 59 nonies)

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 7) ;

MM. Philippe Nachbar et Serge Lagauche, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 100, tome III).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 5 décembre 2008, à zéro heure quarante.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD