M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Des progrès sont accomplis !

Mme Marie-France Beaufils. Et M. le rapporteur général poursuit :

« La Cour des comptes, comme votre commission des finances, regrette que plusieurs de ces insuffisances n’aient pas été corrigées dans le projet de loi de finances pour 2009. Elle les estime à 4,6 milliards d’euros, dont 3 milliards d’euros au titre des montants restant à payer aux régimes de la sécurité sociale. On relève ainsi les crédits consacrés aux contributions internationales, la prime de Noël des bénéficiaires du RMI, l’allocation aux adultes handicapés et les opérations extérieures.

« Au final, la Cour des comptes relève que “ la détermination des crédits inscrits dans la loi de finances initiale se caractérise par des défaillances réitérées, sur des dotations dont les besoins sont pourtant bien connus, alors que les insuffisances de crédits qui en résultent sont significatives au regard du solde figurant dans la loi de finances. Ce constat est d’autant plus préoccupant que les montants concernés serviront de base à l’établissement d’un budget triennal ”. » Notre collègue est intervenu sur ce sujet tout à l’heure.

« On doit donc se demander pourquoi les remarques réitérées et convergentes des commissions des finances des deux assemblées et de la Cour des comptes ne conduisent pas le Gouvernement à améliorer de manière notable la qualité de sa prévision budgétaire, en apurant de manière définitive les sous-budgétisations : les annonces de correction du Gouvernement, successivement formulées en loi de finances initiale pour 2008 et pour 2009, apparaissent à l’examen des décrets d’avance et du présent projet de loi de finances rectificative, particulièrement incomplètes. »

Je ne peux que partager ces réflexions de notre rapporteur général !

On peut donc se demander, mes chers collègues, pourquoi les lois de finances continuent à être votées par la majorité sans sourciller depuis 2002, alors que leur contenu est aussi peu proche de la réalité.

On peut également s’interroger sur l’estimation des remboursements de TVA, particulièrement ceux qui concernent les collectivités territoriales, dans la mesure où cette estimation est facile à anticiper. La sous-estimation semble d’ailleurs faire sentir ses effets, puisque les délais de versement se sont allongés, selon les informations que j’ai recueillies auprès de nombreux collègues.

Il faudrait sans doute aussi s’interroger sur la consistance des prévisions économiques retenues pour cadrer les lois de finances, ou encore sur le contenu des mesures d’allègement fiscal régulièrement présentées en pareil cas. Ces mesures d’allégement fiscal prospèrent au détriment des recettes du budget, sans que l’on en mesure l’efficacité.

Si l’on écoute certains, la crise économique que nous traversons aurait pris tout le monde au dépourvu et revêtirait une forme particulièrement inattendue.

M. André Santini, secrétaire d'État. Ce qui n’est pas faux !

Mme Marie-France Beaufils. Pourtant, avant que les châteaux de cartes de Wall Street s’écroulent sous les effets de la crise des subprimes, la situation économique et sociale n’était pas si florissante que cela. Ne comptions-nous pas, depuis de trop longues années, plus de deux millions de travailleurs officiellement sans emploi ? Sans compter tous ceux qui ont été judicieusement retirés des statistiques ! Ne comptions-nous pas huit ou neuf millions de travailleurs sous-payés, au point que vous avez estimé nécessaire de leur accorder une « petite » prime pour l’emploi, afin de compenser la faiblesse de leur rémunération ?

N’étions-nous pas aussi en présence de milliers et de milliers de mal logés ? Un bon tiers de nos compatriotes n’étaient-ils pas dans l’incapacité de se soigner, faute de couverture santé complémentaire leur permettant de faire face aux multiples accroissements de la part de frais médicaux laissée à la charge des assurés ? N’y avait-il plus de plans sociaux, de plans de restructuration mettant en cause l’emploi et l’activité industrielle dans de nombreux bassins d’emploi, toujours plus sinistrés ?

Contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, la faiblesse de la croissance constatée en 2007 et le sensible ralentissement de l’activité en 2008 n’ont pas attendu que M. Madoff voie son escroquerie démasquée, ni que Freddie Mac et Fannie Mae soient rachetés par l’État américain pour éviter le dépôt de bilan.

En effet, malgré les annonces et les attentes du présent Gouvernement, la croissance n’est pas au rendez-vous, et ce depuis la fin de l’hiver 2007–2008.

Le fait que Dexia soit dans les plus grandes difficultés, que des centaines d’emplois soient sur la sellette dans de nombreuses d’entreprises, depuis PSA à Renault, en passant par Amora ou Sanofi-aventis, a beaucoup à voir avec les choix de gestion et les orientations politiques mises en œuvre de longue date et amplifiées depuis le printemps 2007.

Le déficit budgétaire dont fait état le présent collectif n’est donc pas fortuit : il est le résultat de choix budgétaires qui ont, pour l’essentiel, accentué les effets de la crise économique et sociale qui couvait bien avant la chute du Dow Jones, du Dax ou du CAC 40.

Ce collectif budgétaire résulte du désastre fiscal de la loi TEPA, des choix opérés dans la loi de finances initiale pour 2008 et de cette obsession permanente qui anime depuis 2002 la gestion des gouvernements de droite de notre pays.

Ces choix sont connus : austérité budgétaire sur les dépenses publiques dont on cherche à réduire sans arrêt le montant, à la demande expresse des milieux patronaux ; cadeaux fiscaux divers présentés au nom du soutien à l’économie ; exonérations de cotisations sociales ; sans oublier cette incapacité à prendre réellement en compte les aspirations du plus grand nombre, et notamment celles du monde du travail.

Ces choix d’une politique de réduction des recettes fiscales pèsent lourd, aujourd’hui, dans ce déficit budgétaire, et entravent les capacités de l’État à intervenir pour engager une relance efficace.

Aucune mesure de défense du pouvoir d’achat n’est contenue dans cette loi. Il n’y a rien sur les salaires, sauf à demander aux agents du secteur public de voir leur progression indiciaire gelée, et peu de chose sur les revenus sociaux, à l’exception d’une prime de Noël parcimonieuse pour les bénéficiaires du RSA. Les services publics verront leurs moyens réduits, particulièrement dans l’éducation, alors que ce sont les meilleurs outils de réduction des inégalités, comme nous le rappelle l’étude de l’INSEE France, portrait social.

Quant au relèvement des retraites, il attendra sans doute le terme de la négociation sur la pénibilité du travail qui aurait dû s’engager depuis la réforme de 2003.

S’agissant des collectivités territoriales, auxquelles le Président de la République demande une mobilisation sans précédent, c’est toujours avec moins de moyens qu’elles devront agir ; le présent texte confirme cette démarche.

Vous l’avez compris, nous ne voterons pas ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative pour 2008 s’inscrit dans un contexte tout à fait exceptionnel. Il s’agit, en effet, du deuxième collectif budgétaire de l’année. Le premier, intitulé « loi de finances rectificative pour le financement de l’économie », a en effet été promulgué le 16 octobre dernier, afin de prendre en urgence des mesures exceptionnelles de soutien au secteur financier, et par extension à nos entreprises. Ce second collectif précède en outre de quelques semaines seulement un troisième collectif annoncé en janvier prochain.

Trois collectifs en moins de quatre mois, c’est beaucoup, mais à situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle… La crise financière et économique mondiale nous impose une grande réactivité.

Ce projet de loi de finances rectificative comporte donc les traditionnelles et très diverses mesures d’ordre fiscal que nous rencontrons chaque année, aboutissement d’un travail de réflexion, mais aussi un certain nombre d’autres mesures introduites dans l’urgence afin de faire face à la crise que nous traversons.

Certes, il n’est jamais agréable de légiférer dans de telles conditions, mais, en ce domaine comme dans d’autres, vous le disiez, monsieur le secrétaire d’État, nécessité fait loi.

Ces mesures s’inscrivent donc naturellement dans le cadre du plan de relance pour l’économie annoncé à Douai par le Président de la République, le 4 décembre dernier. Alors que le collectif de janvier prochain sera destiné à financer les mesures budgétaires de ce plan de relance, le texte dont nous entamons l’examen aujourd’hui contient certaines des dispositions fiscales dudit plan.

Ainsi, le projet de loi initial, composé de 64 articles, a été considérablement étoffé à l’Assemblée nationale, avec l’adoption de 54 nouveaux articles, notamment issus d’amendements gouvernementaux ou de la commission des finances, visant à inscrire sans attendre ce volet fiscal du plan de relance dans le collectif.

Ces dispositions, destinées principalement à relancer les investissements, vont aussi avoir pour conséquence de creuser le déficit de 2009, qui s’annonçait déjà très élevé. Si cette idée ne réjouit bien évidemment personne, sur quelque travée que ce soit, il est cependant plus acceptable que le déficit se creuse en raison d’une politique d’investissement.

Je distingue en effet, comme M. le rapporteur général, le mauvais déficit, qui consiste à financer des dépenses de fonctionnement récurrentes, du déficit plus justifiable, pour ne pas dire bon, qui est axé sur le financement d’investissements générateurs de croissance, donc d’emplois.

M. le ministre du budget a annoncé hier que le déficit de la France atteindrait environ 80 milliards d’euros en 2009, soit près de 4 % du PIB. Il s’agit d’une forte augmentation par rapport au projet de loi de finances rectificative, qui porte, en 2008, le déficit budgétaire à 51,4 milliards d’euros, ce qui constitue déjà une dégradation de 9,7 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2008 et de 2 milliards d’euros par rapport à la loi de finances rectificative pour le financement de l’économie du 16 octobre 2008.

Malgré tout, nous notons avec satisfaction que, conformément aux engagements du Gouvernement, l’objectif de maîtrise des dépenses est maintenu, en dehors de l’augmentation exceptionnelle et contrainte, à hauteur de 4 milliards d’euros, liée aux charges d’intérêt de la dette, contre laquelle nous ne pouvons rien.

Au-delà des dispositions, dont mes collègues du groupe UMP et moi-même nous félicitons, visant à l’amélioration de la sécurité juridique des contribuables, à la lutte contre la fraude fiscale ou encore en faveur du développement durable, nous nous réjouissons tout particulièrement des dispositifs de soutien aux investissements.

Ainsi, la mesure d’exonération de taxe professionnelle sur les investissements réalisés jusqu’au 31 décembre 2009 est une excellente initiative, même si les élus locaux peuvent s’inquiéter que l’on touche une nouvelle fois à la taxe professionnelle. Mais nous savons bien que le débat sur la nécessaire réforme des collectivités locales et de leur financement est ouvert et qu’il devra déboucher en 2009, après une remise à plat d’un système aujourd'hui à bout de souffle. Que les entreprises puissent être exonérées de la taxe professionnelle pendant ce temps réduit nous semble une bonne mesure.

L’accélération du remboursement aux entreprises des créances qu’elles détiennent sur l’État est une autre mesure intéressante : elle nous semble primordiale dans le contexte actuel où nos entreprises ont parfois du mal à assurer leur trésorerie auprès du système bancaire.

D’autres mesures fiscales du plan de relance économique du Président de la République, incluses dans ce collectif, devraient avoir un impact positif.

Je pense, par exemple, à la fin de l’inscription automatique des privilèges, à la majoration d’un demi-point des coefficients d’amortissement dégressif ou au doublement du prêt à taux zéro pour l’achat d’un logement neuf acquis en 2009.

Le groupe UMP se félicite également de la garantie apportée par l’État à un portefeuille de titres de la banque franco-belge Dexia. Elle devrait permettre de finaliser la cession à l’acquéreur américain de la compagnie d’assurances FSA, qui avait été acquise par Dexia et qui constituait clairement une activité nouvelle, mais à risque majeur, dans un contexte où les marchés ont considérablement évolué depuis le début de la crise financière internationale.

D’autres mesures de ce collectif, qu’il serait fastidieux d’énumérer, sont très intéressantes. Je souhaite néanmoins revenir sur certains dispositifs du texte qui ont appelé l’attention de notre groupe.

Il s’agit, par exemple, de la nouvelle aide exceptionnelle à l’investissement locatif, destinée à remplacer temporairement le dispositif Borloo-Robien. L’Assemblée nationale a en effet adopté un dispositif de crédit d’impôt de 25 % du prix de revient des logements, avec un plafond de 300 000 euros, soit une réduction d’impôt maximale par opération d’achat de 75 000 euros, étalée sur neuf ans, à raison de 15 000 euros la première année et de 7 500 euros pour chacune des années suivantes.

L’Assemblée nationale a retenu ce dispositif, de préférence au renforcement du régime Borloo-Robien qui était en cours de discussion. S’il est indéniable que ce nouveau système présente un avantage en termes de lisibilité, par le choix du crédit d’impôt, il vise surtout à inciter les investisseurs aux revenus moyens, qui s’étaient progressivement détachés de l’immobilier locatif, à revenir sur ce secteur.

Cependant, on peut craindre un effet d’aubaine sur les promesses d’achat de 2008, qui serait lié à l’application de la réduction d’impôt aux acquisitions signées en 2009, alors que, selon la commission des finances, il serait préférable de viser uniquement les promesses de vente signées à compter du 1er janvier prochain.

La question du coût de cette mesure est également posée. Elle devrait logiquement être plus onéreuse par appartement que le dispositif Robien-Borloo, mais, compte tenu de l’ampleur de la crise, l’efficacité ne doit-elle pas être le seul impératif ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Bonne question !

M. Philippe Dallier. En effet – et ces chiffres sont très importants pour prendre la bonne décision – au cours des dernières années, sur 400 000 logements construits annuellement, entre 60 000 et 70 000 l’ont été dans le cadre des régimes fiscaux Borloo-Robien. Mais, en 2008, selon les estimations actuellement disponibles, seuls 20 000 à 30 000 logements pourraient être financés à ce titre. La chute est donc très importante ; celle de la dépense fiscale aussi.

Le débat actuel sur le choix de l’instrument fiscal le plus adapté pour soutenir et relancer le marché de l’immobilier locatif est donc un vrai débat. Il ne doit cependant pas nous conduire à adopter une mesure, certes transitoire, mais qui pourrait provoquer une certaine confusion entre ancien et nouveau dispositif, et dont le coût serait mal cerné.

Notre groupe souhaite donc que le Gouvernement puisse pleinement éclairer notre assemblée avant qu’elle ne se prononce.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !

M. Philippe Dallier. L’autre sujet concerne la déliaison partielle des taux des impôts locaux. L’Assemblée nationale a rétabli la liaison entre le taux de taxe professionnelle et les taux des taxes sur les ménages. Au Sénat, nous y sommes fermement opposés.

M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission aussi !

M. Philippe Dallier. La déliaison des taux est une revendication ancienne des élus locaux que nous sommes généralement et que nous représentons par ailleurs.

Le principe même de la liaison des taux est contestable puisqu’il repose sur une suspicion à l’égard des élus locaux, même si nous savons bien la raison pour laquelle celle-ci avait été instituée.

Aussi nous félicitons-nous que la commission des finances du Sénat souhaite revenir au mécanisme originel de la déliaison.

En revanche, le groupe UMP est plus réservé sur l’opportunité, envisagée par la commission, de supprimer l’article 6 du collectif, qui fixe le cadre budgétaire de gestion par l’État des quotas de CO2.

M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est un amendement d’appel ! Il faudra s’expliquer sur ce point.

M. Philippe Dallier. J’en suis certain, monsieur le rapporteur général !

Alors même que la présidence française vient d’obtenir un compromis historique en Europe pour l’adoption du paquet « énergie-climat » …

Mme Nicole Bricq. Historique ?

M. Jean-Louis Carrère. Le mot est un peu fort !

M. Philippe Dallier. Oui, on peut le dire ! Même les socialistes ont salué l’action du Président de la République ; je les ai bien entendus, à Strasbourg. C’est suffisamment rare pour le souligner !

M. Jean-Louis Carrère. Il nous arrive de saluer même quand ce n’est pas historique !

M. Philippe Dallier. Cela vous gêne, je le comprends bien ! (M. Jean-Louis Carrère s’exclame.) Tout le monde les a entendus : c’est un fait reconnu !

Alors même, disais-je, que la présidence française vient d’obtenir un compromis historique en Europe pour l’adoption du paquet « énergie-climat », il nous semble essentiel de préserver l’intégrité du dispositif proposé par le Gouvernement. Celui-ci évite, en effet, tout biais concurrentiel entre de nouvelles installations émettrices de C02 et celles qui sont déjà en place. Par ailleurs, il prépare le secteur électrique aux nouvelles règles qui seront en vigueur entre 2013 et 2020, tout en préservant la compétitivité de l’industrie française.

En conséquence, le groupe UMP se féliciterait de ce que M. le rapporteur général accepte, d’un œil bienveillant, de reconsidérer de manière favorable sa position sur ce point.

M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est bien demandé !

M. Philippe Dallier. Enfin, le maire que je suis souhaite évoquer la question du traitement par les communes des demandes et de la délivrance des cartes nationales d’identité et des passeports.

Dans une décision de 2005, le Conseil d’État avait en effet indiqué que seule la loi pouvait confier aux maires la mission de recueillir les demandes de titres et de les délivrer. Or, en 1999 et en 2001, le Gouvernement avait confié cette mission aux maires par décret. Cette erreur de droit a été depuis lors source de nombreux contentieux, ayant entraîné des communes dans de longues procédures.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Elles ont eu gain de cause et n’ont pas été condamnées !

M. Philippe Dallier. Les enjeux financiers pour l’État sont très importants.

À la suite de l’adoption à l'Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement, a été retenu le principe d’indemniser toutes les communes sur la base de 2 euros par titre émis ces quatre dernières années, sauf dans le cas où un contentieux est engagé et encore non tranché.

Cela permettra d’éviter que l’État n’indemnise deux fois une commune : la première par le biais du contentieux, la seconde via l’indemnisation.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Et pour l’avenir ?

M. Philippe Dallier. Effectivement, la question se pose, monsieur le rapporteur général !

Notre groupe se félicite de ce que l’accord que vous avez proposé permette à toutes les communes de France d’être indemnisées pour le passé pour tous les actes émis, sur une base forfaitaire. Cet accord pourrait permettre de régulariser la situation juridique actuelle en donnant une base légale à la délivrance des titres d’identité par les maires, tout en sortant des contentieux.

M. Philippe Marini, rapporteur général. À condition de ne pas sacrifier l’avenir !

M. Philippe Dallier. Vous avez parfaitement raison, monsieur le rapporteur général !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous allons batailler !

M. Philippe Dallier. Pour conclure, et à l’aune des observations que j’ai formulées au nom du groupe UMP, nous voterons ce collectif budgétaire, que nous estimons sincère, pragmatique et réactif. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le Président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Henrik Ibsen écrivait : « Les champions de la finance sont comme les perles d’un collier, quand l’une d’elles tombe, les autres suivent ». Hélas ! en l’occurrence, ce ne sont pas de perles qu’il s’agit ! Mais cette allégorie illustre le développement de la crise financière que nous vivons depuis quelques mois ; la plus grave, disent les économistes, depuis celle de 1929, ce qui justifie notre perception pessimiste de la situation dans laquelle nous évoluons.

La crise bancaire et financière, originaire des États-Unis, a rapidement atteint toutes les places boursières et contraint les États à une grande réactivité pour tenter d’enrayer cette crise qui contamine désormais l’économie réelle, d’abord les entreprises, puis les personnes, par le chômage partiel ou les licenciements économiques, induisant une perte de revenus et une grande inquiétude.

Ce contexte exceptionnel nous amène à examiner le deuxième collectif budgétaire de l’exercice, très tôt après celui du 16 octobre dernier pour le financement de l’économie, qui avait pour objet d’apporter la garantie de l’État au système bancaire.

Le projet de loi de finances rectificative qui nous est soumis aujourd’hui s’applique à l’économie réelle et met en œuvre les premières mesures fiscales, d’un montant de 10,5 milliards d’euros, soit près de la moitié du plan de relance de l’économie annoncé par le Président de la République le 4 décembre dernier. Il préfigure aussi le prochain collectif attendu en janvier prochain, dont le Conseil des ministres va délibérer ce vendredi.

Je reprendrai ici volontiers à mon compte une observation de M. le rapporteur général, partagée par la Cour des comptes, qui me semble très importante, concernant les sous-budgétisations de l’exercice 2008, lesquelles sont insuffisamment corrigées dans le projet de loi de finances pour 2009 et figurent dans le collectif. En tiendrez-vous compte, monsieur le secrétaire d’État ?

Si l’exercice est traditionnel, le contexte actuel exceptionnel fait de ce collectif budgétaire un instrument politique permettant de mettre en œuvre le plan de relance français.

Ce projet de loi de finances rectificative prévoit ainsi un déficit budgétaire de 51,4 milliards d’euros, soit 10 milliards d’euros de plus que la loi de finances initiale. Combien de temps supporterons-nous ces déficits publics ? Quand retrouverons-nous l’équilibre budgétaire à ce rythme ?

M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Quand cela ira mieux !

M. Aymeri de Montesquiou. Le déficit pour 2009 est évalué par le Gouvernement à 3,1 points du PIB avant le plan de relance, mais à 5 points par la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans une hypothèse extrême !

M. Aymeri de Montesquiou. De plus, le dépassement de la charge de la dette de 4 milliards d’euros, certes déjà pris en compte par le précédent collectif, s’ajoute aux 7 milliards d’euros de moins-values des recettes. Cela souligne combien subsistent d’incertitudes quant aux recettes ; il faut donc absolument « tenir » les dépenses.

Les prévisions de croissance sont partout revues à la baisse. Pour ce qui est de la France, la croissance était, par consensus, estimée à 1,9 % en janvier et à moins 0,6 % en décembre 2008. Pourquoi toujours tabler sur un taux de croissance positif, par essence optimiste ? Je renouvelle ma suggestion d’élaborer un budget basé sur une croissance zéro.

Le plan de relance voulu par le Président de la République est fondé sur l’investissement. Il déclarait le 4 décembre dernier : « La meilleure politique de relance possible, c’est celle qui soutient l’activité d’aujourd’hui et qui prépare la compétitivité de demain. […] La meilleure façon d’affronter la crise, c’est de la regarder comme l’exigence d’une formidable accélération de l’investissement » C’est en effet le moyen le plus vertueux pour relancer l’économie, car il ne relance pas les importations et donc favorise l’emploi.

Ce plan mobilise l’ensemble des instruments macroéconomiques, l’investissement public, en particulier celui des collectivités, comme la fiscalité des entreprises.

Le soutien de la consommation fait l’objet de débats. Parmi nos partenaires européens, seul le Royaume-Uni a pris la décision d’une baisse massive de la TVA. Une telle décision fait peser un risque majeur de détournement de l’effet de relance recherché vers l’importation des produits de consommation. Notre histoire économique nationale est trop ponctuée par cet effet pervers pour l’oublier. Plutôt que le levier de la consommation des ménages, c’est celui de l’épargne et de l’investissement qu’il convient d’actionner.

Il est donc positif que ce collectif budgétaire soutienne l’économie via l’aide aux entreprises, entre autres par des mesures de dégrèvement de la taxe professionnelle, à hauteur de la valeur locative des équipements et des biens immobiliers neufs acquis entre le 23 octobre 2008 et le 31 décembre 2009, ainsi que par l’exonération de la taxe professionnelle des investissements réalisés sur la même période.

Il faut de même souligner que ce collectif ne perd pas de vue l’impératif de développement durable et concerne ainsi les populations et les territoires fragilisés, comme les zones touchées par le redéploiement des armées. Les mesures prises sont « ciblées, rapides et temporaires » ; elles coûtent ponctuellement, mais n’engagent pas sur le long terme : elles n’hypothèquent pas l’avenir.

Comme l’indique notre rapporteur général, « une relance est deux fois plus efficace, pour la France, si elle est réalisée au niveau de l’ensemble de l’Union européenne que si elle est réalisée seulement en France ».

Si nos voisins européens ont voulu être aussi réactifs que nous, ils n’ont pas toujours fait exactement les mêmes choix, car chaque situation économique et budgétaire est spécifique. Le déficit public de l’Allemagne est nul et celui de l’Espagne est de 1,6 point de PIB. Ces pays disposent donc de marges de manœuvre, ce qui n’est le cas ni de la France ni du Royaume-Uni, dont les déficits sont de 3 et 4 points de PIB.

Les montants des plans de relance respectifs sont donc très divers : ils représentent ainsi 0,4 point de PIB pour l’Italie, 1,7 pour l’Espagne, 1,3 pour la France, qui se situe donc dans la moyenne.

Il faut le répéter, la coordination entre les États membres et l’Union européenne est un impératif pour définir des principes clairs et des mesures coordonnées à l’échelle de l’Union européenne. L’intervention des gouvernements a été globalement coordonnée et a permis de réagir dans l’urgence, notamment sous l’impulsion du Président Nicolas Sarkozy, comme chacun a pu le reconnaître.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait

M. Aymeri de Montesquiou. Cette unité des Européens face à la crise financière mondiale a démontré son efficacité par l’adoption du plan d’action par le Conseil et par la représentation de l’Union européenne au G20 à Washington, en novembre dernier, où les positions européennes de transparence et de responsabilité du fonctionnement du système financier mondial ont prévalu.

Le directeur général du Bureau international du travail, Juan Somavia, a, lui aussi, exprimé un point de vue convergent : « Nous subissons les spasmes d’un système financier qui a perdu le cap sur le plan éthique. Nous devons revenir à la fonction première et légitime de la finance, qui est de promouvoir l’économie réelle, de prêter aux entrepreneurs qui investissent, innovent, créent des emplois, produisent. Le temps est à l’audace, la pensée et l’action innovantes, pour répondre aux immenses défis qui sont devant nous. »

Le collectif qui nous est soumis ne constitue que l’amorce de cette feuille de route. Il faut souhaiter que le début de l’année 2009 nous permette de remettre l’économie sur les rails de la croissance et de l’emploi, après avoir « purgé » le système financier de ses inquiétantes faiblesses structurelles.

Le Président de la République a souhaité de grandes ambitions pour l’Europe qui effacent les égoïsmes nationaux ; ces ambitions peuvent aussi s’appliquer à la France pour supprimer les corporatismes en cette période de crise.

Je voterai le projet de loi de finances rectificative pour 2008. (Applaudissements sur diverses travées de lUMP et de lUnion centriste.)