avenir de l'industrie des télécoms en france et plus précisément d'alcatel-lucent

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, auteur de la question n° 678, adressée à M. le ministre chargé de l’industrie.

M. Bernard Vera. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur la politique industrielle de la France, et, plus largement, de l’Europe, en matière de télécommunications.

Jeudi 29 octobre, je me suis rendu sur le site de Villarceaux de l’entreprise Alcatel-Lucent, situé dans mon département de l’Essonne. À l’occasion de cette visite, j’ai discuté avec les représentants de la direction, et rencontré des salariés qui m’ont exprimé leurs inquiétudes à propos du quatrième plan de suppression d’emplois programmé par la direction du groupe depuis la fusion d’Alcatel et de Lucent en 2006.

En 2009, pour le dernier trimestre, 689 emplois sont menacés, dont 122 sur le site de Villarceaux, principalement dans les services du personnel et de la recherche et développement.

Ce quatrième plan de licenciements et la délocalisation du secteur de la recherche et développement sont les conséquences directes d’une politique draconienne de compression des coûts, que la direction justifie par la forte concurrence de pays offrant une protection sociale et des rémunérations faibles à leurs salariés, tels que les pays de l’Est, mais surtout les pays asiatiques comme la Chine et l’Inde.

Alcatel-Lucent opère dans le secteur stratégique des télécommunications, un secteur hautement sensible qu’il convient donc de protéger. Les salariés que j’ai rencontrés ont souligné, à juste titre, le danger que pourrait constituer le transfert dans des pays à bas coûts d’une industrie dont dépend la sécurité des réseaux français de télécommunications.

Monsieur le secrétaire d’État, la rentabilité financière ne peut tenir lieu de politique industrielle. Confronté à des évolutions technologiques de plus en plus rapides, le secteur des télécommunications doit relever de nouveaux défis, ce qui sera impossible sans que des choix stratégiques, clairs et offensifs, destinés à préparer l’avenir en faveur de la recherche et de l’innovation, soient formellement opérés.

La recherche est une des clés de la politique industrielle. Or, malgré l’importance du crédit d’impôt recherche dont bénéficie Alcatel-Lucent – le groupe recevrait 100 millions d’euros par an à ce titre ! –, les suppressions d’emplois et les délocalisations se poursuivent, au détriment d’une politique audacieuse de recherche et développement en France.

Ces crédits doivent faire l’objet de réelles contreparties en termes d’emploi, de recherche et développement et d’innovation. L’État a le devoir d’intervenir sur la stratégie du groupe, par exemple via le Fonds stratégique d’investissement, et doit s’assurer que les aides publiques ne se réduisent pas à des effets d’aubaine.

Un pays dont l’industrie numérique est développée attirera nécessairement d’autres industries. L’enjeu économique est donc de taille pour la France, mais aussi pour l’Europe.

Ma question sera double : quel rôle entend jouer le Gouvernement dans le soutien à l’industrie des télécommunications, et plus spécifiquement dans le cas d’Alcatel-Lucent ; quel sera son engagement en faveur de l’emploi et de la recherche et développement ?

Quelles propositions la France entend-elle porter au niveau européen afin de préserver un potentiel d’innovation et une politique industrielle offensive face à la concurrence des pays à bas coûts, ressentie comme déloyale ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur, le groupe Alcatel-Lucent connaît effectivement des difficultés depuis plusieurs années. Lors de leur rencontre avec M. le ministre chargé de l’industrie, en juillet dernier, les dirigeants de ce groupe ont pris l’engagement de ne pas fermer de sites dans notre pays. Mais cet engagement important, qui est aussi une bonne nouvelle pour les salariés du groupe, ne signifie pas que ce groupe s’interdira toute restructuration ; outre les problèmes qu’il rencontre, il est en effet confronté à la crise qui affecte l’ensemble des marchés.

Le Gouvernement a pris acte de cet engagement, qui concerne en particulier le secteur de la recherche et développement, mais également de la mise en place d’un plan social de qualité.

Vous avez évoqué, monsieur le sénateur, l’incidence du crédit d’impôt recherche, et je vous remercie du jugement positif que vous avez bien voulu émettre sur cette mesure. L’État consacrera globalement 5,8 milliards d’euros au crédit d’impôt recherche en 2009. En triplant le taux de ce crédit, le Gouvernement en a fait le dispositif fiscal le plus incitatif en Europe en matière de recherche et développement du secteur privé, ce qui a été interprété par les entreprises comme un geste fort. Ce dispositif n’est ainsi pas étranger à la décision d’Alcatel-Lucent de maintenir ses activités en France.

Le Gouvernement a par ailleurs fait le choix de renforcer les pôles de compétitivité. Au cours de l’été 2008, le Président de la République a réaffirmé l’engagement de l’État en prenant la décision d’y investir 1,5 milliard d’euros sur trois ans. Le secteur des technologies de l’information, au travers notamment de l’investissement public massif sur le site de Crolles, à hauteur de 115 millions d’euros en 2009, est au cœur de cette politique de promotion et de soutien de ces pôles.

L’ensemble de ces mesures crée en France un environnement favorable à la recherche et développement, auquel sont sensibles les entreprises qui veulent consacrer des moyens à ces activités.

Dans ce contexte, le Gouvernement veillera, bien sûr, à ce qu’Alcatel-Lucent respecte ses engagements et se mobilisera pour que cette entreprise préserve un maximum d’emplois dans notre pays. Nous serons très vigilants sur ce dossier, qui concerne le dernier grand équipementier de télécommunications présent dans notre pays.

Vous m’avez aussi interrogé, monsieur le sénateur, sur la politique industrielle française dans le domaine des télécommunications.

Le Gouvernement mène une politique active, dont témoignent l’instauration de la quatrième licence de téléphonie mobile 3G, le dividende numérique et les expérimentations innovantes en matière de services mobiles sans contact. De toutes ces initiatives, nous attendons une dynamisation de ce secteur, qui devrait faire de la France un pays pionnier.

Par ailleurs, la loi de modernisation de l’économie a établi un cadre destiné à faciliter le déploiement de la fibre optique, comprenant plusieurs mesures phares : le pré-équipement des bâtiments neufs à compter de 2010, la création d’un droit au très haut débit, ou encore la mutualisation des câblages établis dans les immeubles.

La loi de modernisation de l’économie comporte également une disposition très importante pour les collectivités territoriales : l’obligation pour les opérateurs de communiquer leurs informations sur les infrastructures et les réseaux établis sur leur territoire.

Par ailleurs, les états généraux de l’industrie, lancés par le Gouvernement le 15 octobre dernier, doivent contribuer à maintenir sur le sol français des pans entiers de ce secteur. À l’occasion de leur ouverture, Christian Estrosi a d’ailleurs fait plusieurs propositions concernant l’augmentation de la part des produits innovants dans nos productions industrielles, le renforcement de l’effort vers la recherche et développement, et la mutation vers le développement durable. Ces propositions seront discutées dans le cadre de ces états généraux, qui devraient s’achever en février 2010 à l’issue d’un travail national et régional participatif au travers d’un site internet dédié.

Les technologies de l’information et de la communication sont particulièrement concernées par ces débats qui doivent conduire à une nouvelle politique industrielle française ; les équipementiers en télécommunications devraient y trouver toute leur place.

Vous le constatez, le Gouvernement mène une politique cohérente et ambitieuse, qui permettra de développer le potentiel des entreprises françaises et profitera à l’ensemble de nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de ces explications que j’ai écoutées avec attention. J’ai bien entendu que le Gouvernement entendait faire respecter les engagements pris par Alcatel-Lucent. Pour ma part, je serai attentif à la traduction concrète de ces engagements.

Je ne sais pas si les salariés d’Alcatel-Lucent seront rassurés par vos propos. Je sais, en revanche, qu’ils expriment de fortes attentes en ce qui concerne la mise en œuvre, par les pouvoirs publics, de moyens permettant de soutenir l’emploi et la recherche et développement dans leur entreprise. L’ensemble des salariés du groupe manifestera d’ailleurs, dans toute l’Europe, le 10 novembre prochain et, en France, devant le siège de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, dont il convient de relativiser l’indépendance.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que plusieurs pays, notamment la Chine, lancent de vastes programmes d’investissement, de recherche et développement, il est préjudiciable que l’Europe et la France abandonnent progressivement le secteur des télécommunications, dont dépendent pourtant notre indépendance et notre sécurité nationale.

Je considère, avec les sénateurs du groupe CRC-SPG, que l’État doit intervenir fortement pour soutenir une véritable politique industrielle publique permettant d’intégrer le capital d’entreprises hautement stratégiques comme Alcatel-Lucent et de donner de nouveaux droits aux salariés afin qu’ils puissent intervenir dans les choix stratégiques de ces entreprises.

Pour ma part, je vais déposer de nouveau une proposition de résolution tendant à instituer une commission d’enquête, afin d’examiner les causes et les conséquences des différents plans sociaux chez Alcatel-Lucent, car je crains que, parmi les licenciements concernés, beaucoup ne s’apparentent à des licenciements boursiers.

(Mme Monique Papon remplace M. Guy Fischer au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon

vice-présidente

numérisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche, auteur de la question n° 650, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Serge Lagauche. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’ensemble des moyens de diffusion, qu’il s’agisse des salles de cinéma, de la télévision ou d’internet, entrent dans l’ère de la numérisation. Ce fait entraîne une très forte croissance du nombre d’œuvres et soulève donc la question de leur conservation et de leur accès par le public le plus large.

Plus d’un siècle après la naissance de la pellicule cinématographique et à l’heure du numérique, les cinémathèques du monde entier se trouvent aujourd’hui à un tournant crucial et inéluctable. Les défis en termes de formation, de diffusion et de conservation liés à cette nouvelle technologie s’annoncent considérables.

Par ailleurs, nous le savons, la lutte contre le piratage des œuvres cinématographiques et audiovisuelles ne pourra produire ses effets à l’égard des professionnels de la culture que si, parallèlement, l’offre légale de ces œuvres se développe dans de bonnes conditions, notamment en termes de qualité, de coût et d’accessibilité. C’est d’ailleurs dans cet esprit que le Sénat a adopté les deux lois dites « HADOPI 1 » et « HADOPI 2 ».

Grâce à son héritage culturel, à la qualité des nombreux professionnels agissant dans ces secteurs et à la vigueur de la politique publique conduite sans faille depuis des décennies, notre pays dispose d’un patrimoine très riche d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Il appartient aux pouvoirs publics de veiller à ce qu’il fasse l’objet d’un plan de numérisation à la hauteur des enjeux.

M. le ministre de la culture et de la communication connaît les inquiétudes de notre commission de la culture, de l’éducation et de la communication dans ces domaines. Nous avons évoqué la semaine dernière avec lui le dossier essentiel de la numérisation du livre et de l’imprimé. Je souhaite aujourd’hui attirer l’attention du Gouvernement sur l’importance, tout aussi cruciale, de la numérisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Je pense aux œuvres patrimoniales, mais aussi, bien entendu, à la production récente.

Dans ce domaine, un soutien public semble nécessaire, si l’on veut que le plan de numérisation se déroule sur une durée qui ne soit pas trop longue. Sur cinq ans, le coût global d’un tel plan est évalué à 35 millions d’euros.

Dans ces conditions, pouvez-vous m’assurer, monsieur le secrétaire d'État, que le Gouvernement consacrera les moyens adéquats au développement d’un partenariat entre l’État et les partenaires privés, afin de mobiliser les fonds nécessaires à un tel plan de numérisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles ?

Ce projet étant stratégique pour l’avenir de l’ensemble des filières culturelles concernées, pouvez-vous me préciser si le Gouvernement compte inscrire cet objectif au titre des investissements financés au moyen du grand emprunt qui sera prochainement lancé, et, dans l’affirmative, quel est le niveau de l’engagement financier envisagé ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. Frédéric Mitterrand, qui m’a demandé de répondre à sa place à votre question relative à la numérisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles.

À l’heure où les enjeux culturels, désormais reconnus comme stratégiques à l’échelon mondial, sont confrontés à la numérisation de la diffusion, la question que vous posez – les voies et moyens de la présence des œuvres françaises sur les réseaux de diffusion numérique, dans un double objectif économique et culturel – est fondamentale.

Cette ambition concerne non seulement la création contemporaine, mais aussi le patrimoine exceptionnel de la France en la matière.

Pour ce qui concerne le cinéma, le basculement vers le numérique du parc français des salles cinématographiques oblige à la numérisation de la production selon des normes de diffusion adaptées.

L’industrie audiovisuelle, quant à elle, doit répondre aux évolutions des marchés qui partout dans le monde doivent satisfaire à la demande croissante de programmes numérisés, notamment depuis le développement de la télévision numérique terrestre, ou TNT.

Enfin, sur les réseaux internet, les besoins d’images, qui s’accroissent sans cesse, requièrent une offre attractive et abondante pour assurer une présence culturelle forte sur ce média de masse.

Au moment où se manifestent les intérêts privés commerciaux d’entreprises multinationales pour la numérisation massive de l’ensemble des biens culturels, il est de la responsabilité des pouvoirs publics d’apporter sans tarder une réponse adaptée dans les domaines du cinéma et de l’audiovisuel, pour favoriser une offre légale riche et de qualité sur tous les réseaux.

Pour réussir à affirmer la présence de notre création sur les nouveaux réseaux, le ministre de la culture et de la communication, Frédéric Mitterrand, a donc proposé un vaste plan de numérisation dans le cadre du grand emprunt, afin d’accompagner les opérateurs privés dans ce chantier stratégique.

Ce plan doit être suffisamment attractif pour mobiliser massivement les détenteurs privés des catalogues – producteurs, éditeurs, distributeurs –, qui seront les moteurs de l’initiative et des choix de la numérisation. Ce partenariat aura la double vertu de permettre l’exploitation des films et des programmes aujourd’hui inexploités et d’apporter une offre commerciale rapide et efficace sur l’ensemble des supports de diffusion.

Monsieur Lagauche, afin de répondre à votre question, je vous précise que le projet du Gouvernement repose sur une prise en charge publique, évaluée à 35 millions d'euros par an pendant cinq ans, des deux tiers des dépenses liées à la numérisation des œuvres, un tiers de ces dépenses restant à la charge des détenteurs de droits, soit un plan total de 255 millions d'euros, dont 175 millions d'euros proviendront de financements publics.

Outre son enjeu culturel, ce plan aura un impact économique déterminant pour le secteur, en facilitant l’exportation des programmes numérisés – en particulier en haute définition pour la télévision –, en permettant l’accélération de la numérisation du parc des salles de cinéma, en soutenant la modernisation des industries techniques. C’est ainsi toute une filière professionnelle qui se trouvera directement placée au cœur du XXIe siècle.

transfert d'agents de l'assurance maladie vers les agences régionales de santé

Mme la présidente. La parole est à M. Jacky Le Menn, auteur de la question n° 670 rectifié, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

M. Jacky Le Menn. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de suppléer Mme la ministre de la santé et des sports à laquelle s’adresse ma question.

La loi « Hôpital, patients, santé et territoires », dite « loi HPST », qui a fait l’objet d’un long débat au Sénat, prévoit, dans son article 129, le transfert d’agents de l’assurance maladie lors de la mise en place des nouvelles agences régionales de santé, les ARS. Ce texte indique que ces agents conserveront le bénéfice des stipulations de leur contrat et le maintien, au sein des organismes recruteurs, du contenu des accords collectifs. Pourtant, le personnel concerné est inquiet pour son avenir.

En effet, les négociations en cours à l’Union des caisses nationales de sécurité sociale laissent entrevoir que les activités impliquées dans ces transferts ne sont pas clairement explicitées, que les profils de poste ne sont pas évoqués et que les localisations des emplois sont occultées.

Selon les syndicats, les nouveaux décrets concernant le transfert des praticiens-conseils aux ARS, en cours de négociation, contiendraient des dispositions dignes de la mobilité forcée en vigueur à France Télécom. Il en serait du reste de même s’agissant des décrets sur le statut des praticiens hospitaliers, qui seraient aussi en cours de négociation. Cela n’est pas rassurant.

Pour les agents de l’assurance maladie, les propositions qui leur sont faites tendent à limiter les dispositions des conventions collectives et non à les assurer. Le maintien des accords liés à la réduction du temps de travail ainsi que les avantages spécifiques aux comités d’entreprise ou aux comités des œuvres sociales ne semblent pas non plus acquis.

Dans le contexte actuel nécessitant une forte prise en compte du climat social qui se détériore beaucoup, plus particulièrement au sein des grandes entreprises où la question des transferts et des mutations est tragiquement d’actualité, une inquiétude apparaît quant à la façon dont sont mises en place les dispositions visant les agents de l’assurance maladie devant rejoindre les ARS.

La manière autoritaire des modes de transfert, les dérogations aux termes des conventions collectives, les pertes ou l’incertitude relatives aux avantages acquis, ainsi que la sous-information actuelle de ces personnels nous amènent à nous interroger, car ces faits ne sont pas de nature à apporter de la sérénité dans cette réorganisation. La voie de transferts autoritaires, source de conflits et de stress, doit, selon nous, être prohibée.

Compte tenu de ces observations, monsieur le secrétaire d'État, ma question est la suivante : le Gouvernement peut-il garantir au personnel en cause que tous les avantages obtenus par accord collectif national, régional ou local seront reconduits directement ou par équivalence, plus particulièrement ceux qui sont assurés aux comités d’entreprise et aux comités des œuvres sociales ? Va-t-on solliciter directement les personnes concernées par les activités transférées dès lors que ces activités auront été clairement déterminées ? Le Gouvernement a-t-il l’intention d’afficher un dispositif de bourse d’emploi, afin d’identifier les personnels qui sont prêts à rejoindre les ARS et de permettre aux autres de faire valoir l’expression de « contraintes impérieuses liées à la vie familiale », propositions évoquées au sein de l’Union des caisses nationales de sécurité sociale ?

En conclusion, monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement entend-il suivre les dispositions de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » et prendre les mesures nécessaires qui s’imposent, en donnant aux agents de l’assurance maladie impliqués dans ces transferts des garanties et une information complète, afin de promouvoir un dialogue apaisé au sein de l’Union des caisses nationales de sécurité sociale ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur les conditions dans lesquelles s’effectuera le transfert des personnels de l’assurance maladie vers les agences régionales de santé. Vous souhaitez donc savoir quelles garanties seront apportées aux personnels concernés. Roselyne Bachelot-Narquin aurait souhaité apaiser vos inquiétudes, mais elle en est ce matin empêchée. Je vais, par conséquent, tenter de le faire.

À juste raison, vous avez évoqué la loi HPST, votée par la représentation nationale et promulguée le 21 juillet 2009. Vous avez fait référence à l’article 129 de ce texte, qui apporte des garanties aux personnels en cause et aux termes duquel ces derniers « conservent à titre individuel le bénéfice des stipulations de leur contrat » de droit privé. Elle dispose également que « les accords collectifs nationaux agréés […] ainsi que leurs avenants sont applicables aux personnels régis par les conventions collectives nationales des organismes de sécurité sociale ».

Les inquiétudes dont vous vous êtes fait l’écho concernent les conditions du transfert. Je vous demande, monsieur le sénateur, de faire preuve d’un peu de patience. En effet, ces conditions vont être très prochainement définies par un protocole d’accord, actuellement en cours de négociation entre l’Union des caisses nationales de sécurité sociale et les organisations syndicales représentatives, point que vous avez vous-même rappelé.

Les propositions qui vont être mises sur la table des négociations apporteront des réponses concrètes aux questions que se posent les personnels de l’assurance maladie et traduiront les engagements que le Gouvernement a pris envers eux. Je rappelle ces engagements : il n’y aura pas de mobilité géographique contrainte et des mesures d’accompagnement de cette mobilité choisie ou acceptée seront prises ; les agences régionales de santé seront assimilées à des organismes de sécurité sociale, afin de faciliter les mobilités ; les éléments constitutifs du cadre social d’exercice de leur activité seront maintenus, qu’il s’agisse des accords sur les complémentaires santé ou prévoyance.

Quand ces acquis sociaux ne sont pas transférables à l’identique, comme le niveau des prestations sociales du comité d’entreprise, ou ne sont pas transférables immédiatement, par exemple, l’intéressement, des mesures compensatrices seront naturellement proposées.

J’espère que ces éléments sont de nature à apaiser vos inquiétudes, monsieur le sénateur, l’objectif du Gouvernement étant de faciliter la mobilité des personnels et de s’assurer que ces derniers ne seront pas perdants.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Merci, monsieur le secrétaire d'État, de vos efforts pour tenter de me rassurer. Cependant, votre réponse n’est pas de nature à me rasséréner complètement, pas plus, je le suppose, que les personnels concernés.

Les propositions faites aux agents de l’assurance maladie, je le rappelle, tendent à limiter les dispositions des conventions collectives et non à en garantir le maintien. Il en est notamment ainsi de celles de l’article 16 de la convention collective des agents des organismes de sécurité sociale qui prévoit le droit au retour et de celles des articles 14 et 28 de la convention collective spéciale des praticiens-conseils qui déterminent les modalités de transfert vers d’autres organismes de ces personnels, ainsi que les conditions de dédommagement en cas de changement d’affectation, dans l’intérêt du service, sur l’initiative de l’employeur. Je pourrais multiplier les exemples, mais ce serait beaucoup trop long.

Lors de la discussion de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires, que j’ai suivie de très près, j’avais bien raison d’exprimer des réserves quant aux conditions équitables – j’insiste sur cet adjectif – de mise en œuvre des réformes et des transferts de personnel.

Je forme donc toujours le vœu que le personnel, médical ou non, concerné par ces transferts, plus généralement par la réorganisation opérée par la loi « Hôpital, patients, santé et territoires, soit entendu, au cours d’un dialogue apaisé, ce qui, semble-t-il, n’est pas, loin de là, le cas actuellement, et je le regrette.