Mme la présidente. La parole est à M. Denis Detcheverry.

M. Denis Detcheverry. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, on aura beaucoup parlé de l’outre-mer en cette année 2009 : d’abord de manière alarmante, avec le cri de désespoir lancé par les Antilles, repris en Guyane et à la Réunion, mais aussi dans les COM, même si on les entend moins. Heureusement, le Président de la République n’a pas été sourd à cet appel et a eu l’ambition et le courage de lancer les états généraux de l’outre-mer – du jamais vu –, afin de remettre à plat la situation de l’outre-mer et de permettre aux ultramarins de s’exprimer et de proposer.

On pouvait juger inapproprié que l’État soit le décideur final des mesures à retenir à travers le conseil interministériel de l’outre-mer, sous prétexte qu’il est le payeur, tout comme un parent qui, payant les études de son enfant, serait en droit de lui imposer une orientation vers un futur métier, mais je dois dire que j’ai été assez satisfait du discours de Nicolas Sarkozy et des mesures annoncées à l’issue de ce premier CIOM, dont il est prévu qu’il s’inscrive dans une régularité.

Parallèlement, l’excellent rapport de mes collègues Serge Larcher et Éric Doligé sur la situation des DOM abonde dans le même sens, avec des propositions à la fois judicieuses et ambitieuses.

Pour en revenir aux mesures du conseil interministériel pour l’ensemble de l’outre-mer, je ne peux qu’approuver la volonté de moderniser l’outre-mer et de redéfinir ses relations avec la métropole.

De même, je ne peux qu’approuver les mesures visant à une meilleure insertion dans l’environnement régional, telles que l’accroissement de la capacité d’action et de la visibilité en matière de coopération régionale, la possibilité de changer de statut au regard de l’Union européenne, la mise en place d’un pôle outre-mer au sein de la représentation permanente française à Bruxelles.

Je ne peux également qu’approuver les mesures arrêtées en matière de gouvernance, tendant à ce que l’État soit plus réactif aux demandes locales et à ce que la fonction publique soit plus représentative de la population qu’elle administre. Ainsi, nous éviterons peut-être certaines inepties, à l’instar du feuilleton cauchemardesque du transport maritime de fret à Saint-Pierre-et-Miquelon, pour lequel des décisions ont été prises sans tenir compte de la réalité et des demandes locales.

Enfin, j’ai apprécié le fait que le Président de la République souligne dans son discours la nécessité de reconnaître les syndicats locaux majoritaires lors des élections professionnelles. Cela nous éviterait de répéter certaines erreurs, telle la suppression de l’indemnité temporaire de retraite, l’ITR, qui n’a donné lieu qu’à une concertation avec les syndicats nationaux, lesquels n’étaient pas à même d’apprécier l’incidence réelle de cette mesure.

D’ailleurs, je profite de cette occasion pour vous demander, madame la ministre, ce qu’il en est du rapport que j’avais demandé lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2009. Votre prédécesseur s’était engagé sur le dépôt, dans un délai d’un an, d’un rapport présentant les perspectives d’instauration ou d’extension d’un dispositif de retraite complémentaire pour les fonctionnaires servant outre-mer. Depuis lors, nous n’avons obtenu aucune information sur ce sujet, et je suis tenté de penser que rien n’a été fait. Pouvez-vous m’assurer que ce rapport verra bel et bien le jour, afin que l’on puisse envisager la mise en place d’un système de retraite complémentaire permettant aux fonctionnaires concernés de compenser le manque à gagner important que représente la disparition de l’ITR ?

J’en viens maintenant au projet de budget de l’outre-mer.

J’exprimerai un petit regret quant à l’aide aux entreprises pour le fret, c'est-à-dire les intrants et les extrants : celle-ci est limitée à l’Union européenne, alors qu’est affirmée par ailleurs la volonté de « faciliter l’insertion des départements d’outre-mer, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon dans leur environnement régional ». Lors de l’élaboration de la LODEOM, j’avais voulu déposer un amendement visant à étendre cette aide pour les produits à destination des pays voisins, mais on m’avait opposé l’article 40 de la Constitution. Je n’ai alors malheureusement pas réussi à convaincre que cette mesure n’entraînerait pas forcément une augmentation des dépenses de l’État, mais peut-être une baisse, les calculs n’ayant pas été faits, et que cette modification permettrait en outre d’atteindre l’objectif d’insertion des territoires dans leur environnement régional.

Cela étant, vous aurez compris que j’approuve la politique du Gouvernement, notamment en réponse à la crise du début d’année. Je voterai donc ce projet de budget pour 2010.

En fait, je ne suis pas là pour examiner au centime près les colonnes de chaque action. Aujourd’hui, ce qu’il nous faut, en tout cas dans un premier temps, ce n’est pas « plus d’argent », mais « mieux d’argent ». Il faut mieux cibler nos objectifs et nos possibilités de développement économique.

De même, nous avons besoin non pas de « plus d’État », mais de « mieux d’État ». Comme cela a été souligné par le Président de la République, ainsi que dans le rapport de la mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer et dans le projet de budget pour l’outre-mer, il existe bien souvent des problèmes de relations avec la métropole et notre environnement : nous sommes trop tournés vers la métropole ; nous ne sommes pas toujours maîtres de notre destin.

En effet, il arrive que des décisions nous soient imposées par Paris, et elles sont parfois totalement inadaptées. Malheureusement, on ne nous envoie pas toujours les hauts fonctionnaires les mieux à même d’aborder les problématiques de notre territoire. En la matière, notre dernière expérience, à Saint-Pierre-et-Miquelon, laissera des traces… Il faut mettre fin à la croyance selon laquelle, parce que Saint-Pierre-et-Miquelon est le plus petit territoire de France, la plus petite collectivité ultramarine, la situation à gérer serait simple. C’est une idée fausse, surtout du fait des relations entre le Canada, d’une part, et l’Europe, d’autre part. Eu égard à nos compétences bien spécifiques, il nous faut des personnes expérimentées dans ces domaines clés. De la même manière, il est plus judicieux d’envoyer en zone d’éducation prioritaire des enseignants expérimentés plutôt que des jeunes sortant d’un institut universitaire de formation des maîtres.

Mais j’arrête là cette comparaison, car l’on va encore me dire que les Saint-Pierrais et les Miquelonnais sont les enfants terribles de l’outre-mer, qu’ils sont ingérables, comme je l’entends parfois dire dans les ministères et les administrations. Je suis las d’entendre cela, car c’est faux : nous manquons simplement d’outils, de méthodes, de données fiables pour faire la part du vrai et celle du faux, pour fixer un cap et une stratégie. Malheureusement, trop souvent, quand je demande de l’aide à l’État, on me répond, en référence à notre statut particulier, régi par l’article 74 de la Constitution : « Débrouillez-vous, cela relève de votre compétence. »

Or nous avons les compétences, mais nous n’avons pas les moyens. La grande majorité des fonctionnaires sont sous les ordres de l’État et placés, aux termes de leur statut, « à disposition de la collectivité en tant que de besoin ». Il est inutile de préciser que quand l’harmonie ne règne pas entre le préfet et le président du conseil territorial, les choses n’avancent pas : chacun se renvoie la balle, on perd du temps, on stagne. À cela, il faut ajouter le millefeuille politique, avec des communes littéralement sous tutelle du conseil territorial, ne disposant pas de la latitude nécessaire pour mener à bien leurs propres projets.

À mon sens, tout cela est inconstitutionnel. C’est pourquoi il serait grand temps que nous puissions clarifier les compétences et les moyens alloués à chacun.

Le conseil interministériel de l’outre-mer a prévu pour Saint-Pierre-et-Miquelon une mission de réflexion sur le statut de la collectivité, avec en toile de fond le cadre européen et les relations entre l’État et celle-ci, précisant qu’un parlementaire pourrait en être chargé. Cela tombe à point nommé, car j’ai demandé qu’une mission parlementaire soit menée par le Sénat. Ce serait une mission restreinte, pour des raisons évidentes de coût et de flexibilité, mais je tiens à ce que cette mission soit sénatoriale, car qui mieux que notre Haute Assemblée, représentante des collectivités territoriales, pourrait faire une analyse pertinente et présenter des propositions justes dans ce domaine ?

Je me tourne maintenant vers mes collègues de l’outre-mer. Nous l’avons vu, les états généraux de l’outre-mer et la mission sénatoriale sur la situation des départements d’outre-mer ont mis en évidence de nombreux points communs entre tous nos territoires. Par conséquent, malgré nos différences, nous pouvons et nous devons nous regrouper, pour avoir plus de poids et de crédibilité auprès des instances nationales et européennes et pour mieux défendre nos territoires. Certains d’entre vous ont rencontré mes amis canadiens, qui ont su défendre les intérêts et développer l’économie des petites communautés francophones et acadiennes hors du Québec, perdues dans l’immensité canadienne tout comme nous sommes un peu perdus dans l’immensité des trois océans. Il ne tient qu’à nous de nous inspirer de ce modèle pour faire de même. Nous deviendrons alors de meilleurs interlocuteurs pour la nouvelle ministre de l’outre-mer, que je tiens à féliciter, une fois encore, de sa promotion. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs spéciaux, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat est particulièrement attentif, je le sais, à la situation de nos collectivités d’outre-mer. J’ai personnellement apprécié la qualité de l’échange que nous avons eu dans cet hémicycle, le 20 octobre dernier, durant plus de quatre heures, sur les suites du rapport de la mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer.

Depuis, le Président de la République a présidé le premier conseil interministériel de l’outre-mer, le 6 novembre dernier. Ce conseil s’est conclu par des mesures importantes pour l’outre-mer, dont un bon nombre est issu des recommandations figurant dans le rapport du Sénat.

Le conseil interministériel de l’outre-mer a donné la feuille de route du Gouvernement concernant les outre-mer. C’est l’aboutissement d’un processus riche et dense, celui des états généraux de l’outre-mer, qui a permis pour la première fois aux ultramarins de s’exprimer. L’État leur a enfin donné la parole, et cette parole a été entendue, comme en témoignent les 137 mesures qui ont été décidées par le conseil interministériel de l’outre-mer, présidé par le chef de l’État.

Il s’agit de mesures concrètes, détaillées, approfondies, qui marquent la volonté du Président de la République de rénover profondément la relation unissant la métropole et les collectivités d’outre-mer.

Je ne détaillerai pas devant vous l’ensemble de ces mesures. Je soulignerai cependant que près des deux tiers des 100 propositions de la mission sénatoriale trouvent leur traduction dans les 137 mesures du CIOM. Ces mesures concernent la lutte contre la cherté de la vie en outre-mer, avec un renforcement du droit de la concurrence et une dénonciation des monopoles de fait, le développement des filières agricoles, pour aller vers l’objectif de l’autosuffisance, le soutien au tourisme, le dialogue social, afin de prévenir le retour des excès que nous avons connus l’hiver dernier aux Antilles.

Sachez que je suis, comme vous, très attentive au suivi de ces mesures, sur les plans tant local que national. Lors de mon déplacement, en début de semaine, à la Réunion, j’ai d’ailleurs annoncé la mise en place, au sein de mon administration, d’un adjoint au délégué général à l’outre-mer spécialement chargé du suivi du conseil interministériel de l’outre-mer.

De plus, sans attendre, le Gouvernement a traduit en actes budgétaires les décisions prises lors de ce conseil interministériel. Le 13 novembre dernier, devant l’Assemblée nationale, le Gouvernement a prévu 123 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 53 millions de crédits de paiement en faveur de nos outre-mer. Ces abondements budgétaires ont été consentis en faveur du logement social, pour 20 millions d’euros, des équipements scolaires en Guyane et à Mayotte, pour 15 millions d’euros, du soutien de l’Agence française de développement aux collectivités locales et aux PME, pour 38 millions d’euros, enfin de la mise en place d’un fonds de garantie au profit des agriculteurs et des pêcheurs, pour 10 millions d’euros.

La volonté du Gouvernement est claire : nous entendons mettre en œuvre rapidement les décisions prises par le conseil interministériel de l’outre-mer. Certaines dispositions ont une incidence budgétaire – je viens de les évoquer –, d’autres une incidence fiscale, d’autres, enfin, nécessitent des révisions législatives.

En ce qui concerne les mesures nécessitant une intervention législative, comme je l’ai indiqué à M. Cointat lors de mon audition par la commission des lois, plutôt que de présenter un projet de loi spécifique à l’outre-mer, le Gouvernement envisage, dans la mesure du possible, d’insérer des dispositions ponctuelles dans des projets de loi « sectoriels ». Ce sera notamment le cas avec le projet de loi portant modernisation de l’agriculture, que prépare M. Bruno Le Maire, mais aussi avec le projet de loi dit « Grenelle 2 ». Nous verrons ensuite s’il est nécessaire ou non de prendre un texte particulier pour les dispositions qui resteraient, en quelque sorte, orphelines.

J’insisterai maintenant sur les principaux sujets qui me semblent correspondre aux préoccupations que vous avez exprimées, en commençant par répondre aux rapporteurs.

Mon ministère consacre un effort budgétaire très important au régime des exonérations de cotisations sociales patronales, régime indispensable pour le soutien à l’emploi dans nos départements d’outre-mer. Ce point a été souligné par M. Doligé, rapporteur spécial, mais aussi par M. Lise, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, et par M. Marsin.

Le projet de loi de finances pour 2010 comportait déjà une meilleure prise en compte des besoins liés aux exonérations de charges sociales. Ainsi, les crédits prévus à ce titre pour 2010 s’élèvent à 1,1 milliard d’euros, ce qui représente une augmentation significative de 92 millions d’euros par rapport aux crédits inscrits en 2009.

En outre, le projet de loi de finances rectificative pour 2009 prévoit une ouverture de crédits de près de 520 millions d’euros au titre du remboursement des organismes de sécurité sociale.

Ces deux efforts conjugués permettront d’éteindre la dette liée aux exonérations de charges à la fin de 2009 et de ne pas en engendrer de nouvelle au titre de 2010.

Je sais aussi que l’évolution du service militaire adapté est un de vos sujets de préoccupation. En février dernier, le Président de la République a annoncé le doublement de la capacité de formation en trois ans. Je tiens à apaiser les craintes exprimées par MM. Claude Lise, Éric Doligé et Daniel Marsin, ainsi que par Mme Anne-Marie Payet, quant au devenir du service militaire adapté : il n’y aura pas de SMA au rabais.

Pour accueillir les 6 000 volontaires au titre du SMA – ils étaient 2 900 en 2009 –, nous allons élargir les critères d’éligibilité afin d’ouvrir le dispositif, qui concernera désormais, outre les jeunes sans diplôme, les titulaires d’un CAP ou d’un BEP qui restent éloignés de l’emploi.

Nous allons également adapter la durée de formation à la situation économique locale et au niveau des volontaires. Pour les jeunes non diplômés et éloignés de l’emploi, nous conserverons, je le confirme, le « cœur de métier » du SMA, avec une formation de douze mois.

L’esprit du SMA demeurera, avec l’insertion pour objectif. La qualité de la formation sera maintenue. Enfin – et je m’y engage –, la durée et les modalités de la formation seront adaptées s’il est constaté, après quelques années d’expérimentation, une baisse notable du taux d’insertion, qui est aujourd’hui de 79 %.

Cette augmentation des capacités du SMA se fera sur trois ans. L’année 2010 n’est donc qu’une étape. Les crédits prévus pour 2010 servent à préparer la montée en puissance du SMA en construisant des infrastructures.

L’une de mes grandes priorités d’action pour 2010, c’est le logement social en outre-mer. Chaque fois que l’occasion m’en est donnée, je réaffirme avec force cette conviction. Je suis consciente que l’offre de logement social est largement insuffisante alors que les demandes sont en progression constante. Je sais aussi que la qualité de l’habitat existant est très dégradée, insalubre, voire indigne de notre République. Face à cela, il faut se mobiliser, il faut nous mobiliser.

Je considère que ce ne sont pas les moyens financiers qui manquent. Je suis, sur ce point, en désaccord avec le sénateur Claude Lise, qui estime que le compte n’y est pas. Pour la seule année 2009, le taux d’engagement des crédits qui ont été notifiés dans chacun des territoires est bien inférieur à ce que nous pourrions constater : en effet, il est aujourd’hui de 20 % pour la Réunion, de 55 % pour la Martinique, de 72 % pour la Guadeloupe et de 60 % pour la Guyane. Ce n’est pas une question de crédits ; le problème est ailleurs.

En outre, grâce au CIOM, en 2010, la ligne budgétaire unique sera abondée de 20 millions d’euros en autorisations d’engagement, pour être portée à près de 275 millions d’euros. De plus, grâce à la LODEOM, la dépense fiscale prévue au titre du logement social atteint 110 millions d’euros, somme qu’il faut évidemment ajouter à la LBU. La conjugaison de la LBU et des mesures de défiscalisation donne de bons résultats, comme j’ai eu l’occasion de le constater à la Réunion, où elle a permis, pour un programme de logements sociaux, d’abaisser considérablement les loyers.

Cela étant, je sais que l’articulation entre la ligne budgétaire unique et la défiscalisation du logement social suscite des inquiétudes. Je tiens à vous annoncer que j’ai obtenu, après un arbitrage du Premier ministre, une harmonisation entre les bases éligibles de ces deux dispositifs. L’objectif de l’État est bien entendu d’appuyer les opérateurs dans le montage des dossiers, et non de mettre des freins. Ce sera notamment l’enjeu de la déconcentration des décisions d’agrément pour toutes les opérations de logements sociaux d’un montant inférieur à 10 millions d’euros, qui devrait intervenir au tout début de l’année 2010.

Je profite de cette occasion pour répondre aux deux questions précises de M. Virapoullé sur les décrets d’application de la LODEOM en matière de logement.

En ce qui concerne les dispositions de la loi Scellier applicables à l’outre-mer, les plafonds de ressources vont être relevés. Ainsi, pour un couple avec deux enfants, le plafond de ressources passera de 42 000 euros à 49 600 euros.

Par ailleurs, je peux vous confirmer que les varangues seront bien prises en compte dans la défiscalisation pour une surface de 14 mètres carrés par logement, ce qui correspond à ce que vous souhaitiez.

En outre, le conseil interministériel de l’outre-mer a levé d’autres freins liés à la disponibilité foncière et à la prise en charge, notamment par les communes, de la surcharge foncière. Ce dernier point correspond, je le sais, à une des préoccupations de M. Marsin.

Je viens d’évoquer la défiscalisation du logement social. Dans ce domaine comme dans d’autres, vous attendez les décrets d’application de la loi pour le développement économique des outre-mer. M. Massion a insisté sur ce point. La LODEOM exige quelque quarante mesures d’application, qui seront regroupées dans une vingtaine de décrets. Pour mémoire, il a fallu attendre plus de dix mois pour que soient pris tous les décrets d’application relatifs à la loi Girardin.

Le décret portant sur la bagasse a déjà été publié. J’ai signé la semaine dernière celui concernant l’article 32 de la LODEOM, qui permet de rendre opérationnel le plan de redémarrage de l’activité, connu sous le nom de plan Corail. Dix autres décrets sont soumis pour consultation aux collectivités locales, sous le régime de l’urgence, dont ceux qui portent sur le logement social, sur les zones franches d’activité ou sur les exonérations de cotisations patronales.

Pour les décrets relatifs au logement, compte tenu des observations formulées par les collectivités territoriales, il nous a paru opportun de les amender. Cela retardera donc leur publication de quelques semaines, mais c’est pour la bonne cause. Grâce à cela, nous avons notamment obtenu aujourd’hui les mêmes bases pour la LBU et pour la défiscalisation en matière d’opérations de construction de logements, eu gain de cause sur l’aide à la rénovation hôtelière et pu intégrer, ce qui correspondait à une demande forte, les agences de voyage et la liste concernant les nouvelles technologies parmi les secteurs prioritaires des zones franches d’activité. Reste deux décrets, celui sur l’aide au fret et celui sur la continuité territoriale, qui devraient être pris avant la fin de l’année. Nous respecterons l’engagement que j’ai pris ici, devant la représentation nationale.

En ce qui concerne la création d’un groupement d’intérêt public, ou GIP, sur l’indivision afin de maîtriser le foncier, nous avons programmé, pour 2010, des crédits destinés à financer la conduite des études de préfiguration d’une telle structure, car nous avons besoin, pour la mettre en place, d’un minimum de concertation avec à la fois les acteurs locaux, c’est-à-dire les collectivités, et les notaires.

Mme Anne-Marie Payet, notamment, m’a interrogée sur la mise en œuvre du RSA dans les départements d’outre-mer.

Comme vous le savez, lors de la discussion de l’article 11 du projet de loi de finances, le Gouvernement a proposé à la représentation nationale de ne pas imputer le RSTA sur la PPE. En effet, il a toujours dit qu’il ne souhaitait pas affaiblir le RSTA et qu’il tiendrait parole. À ce sujet, je vous renvoie aux propos qu’Éric Woerth et moi-même avons tenus concernant la mise en place du RSTA. Nous n’avons pas instauré ce dispositif sous la pression, mais parce que nous savons que cela était nécessaire. Sur ce sujet, il convient à mon sens de se garder de toute manœuvre de récupération politique : le Gouvernement n’a jamais eu la volonté d’affaiblir le RSTA, bien au contraire ! Pour éviter toute ambiguïté, j’ajoute que le RSTA reste une prestation sociale. Bien évidemment, lorsque le RSA sera mis en place, il suivra les règles de droit commun, et se posera donc aussi, alors, la question de l’imputation sur la PPE.

Concernant la mise en œuvre du RSA et du RSTA, madame Payet, mon objectif, ainsi que celui de M. Hirsch, est de pouvoir procéder à une évaluation à la mi-2010, conformément aux conclusions du rapport du député René-Paul Victoria. Nous examinerons également, monsieur Lise, les modalités d’application du contrat unique d’insertion outre-mer.

Je répondrai maintenant aux questions précises posées par M. Cointat.

Je sais toute l’importance que vous accordez à la tenue de l’état civil à Mayotte, monsieur le sénateur. Je vous rappelle que des moyens supplémentaires ont été apportés à la commission de révision de l’état civil : deux magistrats ont été nommés, deux assistants de justice ont été recrutés, et les équipes de rapporteurs dans les communes ont été renforcées. Nous nous fixons comme objectif de traiter 1 400 dossiers par mois, ce qui permettra de résorber le stock des dossiers en attente d’instruction ou d’audience en moins d’une année.

Concernant la situation financière des communes de Polynésie française, sachez que j’accorde une grande importance à leur autonomie financière. C’est pourquoi, s’agissant des instruments financiers qui prendront la suite de la DGDE, la dotation globale de développement économique, je tiens à ce qu’une dotation d’investissement abonde les budgets des communes. En outre, je demanderai au nouveau gouvernement polynésien, comme je l’ai demandé à l’ancien, de prendre des engagements pour transférer vers les communes une véritable fiscalité communale.

Plusieurs sénateurs, notamment MM. Claude Lise et Serge Larcher, ont évoqué l’état des finances des collectivités locales outre-mer.

Je suis consciente de la conjonction actuelle de facteurs défavorables aux finances des communes d’outre-mer. Sur ce point, le récent rapport de la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer a apporté un éclairage utile sur la nature et l’étendue de ces difficultés.

Je tiens tout de même à rappeler que les difficultés de gestion de certaines communes ne datent pas de la crise, même si on constate une baisse sensible de leurs ressources, notamment au titre de l’octroi de mer. On le sait, un tiers des communes de la Guadeloupe sont placées sous le contrôle de la chambre régionale des comptes.

Je souhaite réaffirmer que l’annulation généralisée des dettes sociales proposée par les auteurs du rapport n’est pas forcément une très bonne idée. Elle pénaliserait les bons gestionnaires et enverrait un mauvais message aux élus, qui ne se sentiraient plus tenus par leurs obligations sociales.

Il est faux de dire que ces dettes sociales ne sont pas ou ne seront pas payées. C’est grâce aux protocoles de restructuration financière signés avec l’État que des dizaines de millions d’euros de dettes sociales ont pu être payés en Guadeloupe, par le biais du plan Cocarde, et en Guyane. En contrepartie, les créanciers publics ont fait l’effort d’annuler au cas par cas les majorations et pénalités de retard, qui s’élevaient souvent à plusieurs milliers d’euros.

Le Gouvernement considère que ce redressement contractualisé est la seule démarche vertueuse qui permettra un redressement budgétaire. Nous devons mener l’analyse au cas par cas, dans le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales.

Le Gouvernement a par ailleurs fait le choix, dans le cadre du conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre dernier, d’apporter une série de réponses aux difficultés financières croissantes des communes.

Je pense avant tout au plan quinquennal de recensement des bases fiscales, qui sera un moyen efficace pour augmenter de façon significative le produit de la fiscalité locale.

Il est également prévu d’augmenter le produit de la taxe sur les tabacs, qui alimentera un fonds d’aide à l’équipement communal, destiné lui-même à être réparti entre les communes du département au prorata de la population scolarisée.

Pour la Guyane et pour Mayotte, je confirme qu’une dotation d’équipement scolaire a été créée, et il est proposé de la doter de 15 millions d’euros dès 2010.

En outre, le conseil interministériel de l’outre-mer a décidé de renforcer l’appui technique aux communes en permettant à l’État de participer à la création d’agences régionales d’assistance technique. Il s’agit de renforcer les capacités de maîtrise d’ouvrage des communes en mettant à leur disposition des experts, des ingénieurs et des juristes qui aideront concrètement au montage de projets.

Le conseil interministériel de l’outre-mer a aussi confirmé à l’Agence française de développement sa mission d’accompagnement des communes en difficulté.

Enfin, je rappelle qu’un amendement voté à l’Assemblée nationale, sur proposition du député Serge Letchimy, tend à prévoir l’établissement d’un rapport sur l’état des finances des communes dans la perspective du projet de loi de finances pour 2011.

Comme vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État se préoccupe de la situation financière des collectivités en outre-mer.

M. Michel Bécot a appelé mon attention sur l’importance du secteur touristique pour le développement des outre-mer.

Pour le Gouvernement, dynamiser le secteur du tourisme outre-mer constitue une priorité, comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de mon déplacement aux Antilles en compagnie de M. Hervé Novelli, d’autant que ce secteur d’activité est prioritaire dans le cadre des zones franches globales d’activité créées par la LODEOM.

Nous avons pris un certain nombre de mesures pour la prochaine saison touristique. Un plan de communication spécifique de 1 million d’euros a été élaboré pour soutenir la destination des Antilles. Une mesure nouvelle est aussi en cours d’élaboration avec l’Agence nationale pour les chèques-vacances, visant à permettre à plus de 3 millions de bénéficiaires de ce dispositif de se rendre en outre-mer, en particulier aux Antilles.

Enfin, je rappelle que sont organisés, au travers du plan Corail, un moratoire sur les dettes sociales et des garanties de prêts de court terme, afin de tenir compte de la situation de ce secteur.

Monsieur Virapoullé, je vous ai déjà répondu concernant l’application du dispositif de la loi Scellier outre-mer et la prise en compte des varangues.

Vous avez également évoqué l’inscription de deux secteurs dans le dispositif des exonérations de charges sociales, celui des agences de voyage et celui des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Je tiens à vous rassurer en précisant que les secteurs qui étaient déjà éligibles au titre du droit commun de la loi Girardin en matière d’exonérations de charges le resteront.

Concernant les secteurs dits prioritaires, qui ont droit, à ce titre, à un régime bonifié d’exonérations de charges, les arbitrages rendus ce matin prévoient que les agences de voyage et les nouvelles technologies de l’information et de la communication en feront partie.