compte rendu intégral

Présidence de M. Roger Romani

vice-président

Secrétaires :

Mme Sylvie Desmarescaux,

M. Alain Dufaut.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures quarante.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2010 est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

3

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour un rappel au règlement.

M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, nous sommes dans une démocratie et je voudrais revenir sur le scrutin public d’hier soir.

J’ai été profondément choqué d’entendre certains de nos collègues remettre en cause ce scrutin. D’aucuns voulaient même faire croire que le dépouillement n’avait pas eu lieu ! Je pense que notre démocratie mérite mieux que ce genre de pratique !

Par ailleurs, j’ai lu dans la presse de ce matin qu’un président de groupe mettait en cause la présidence de Mme Tasca. Il ne faut pas exagérer ! Si un sénateur centriste a voté contre le Gouvernement, Mme  Tasca n’y est strictement pour rien !

Le problème qui se pose doit être réglé au sein de la majorité. C’est à elle d’apprécier les erreurs qui ont pu être commises. Il ne s’agit certainement pas de mettre en cause la présidente de séance !

Je n’appartiens ni à la majorité, ni à l’opposition, mais je peux dire que, sur ce point, la présidence de séance a été tout à fait correcte.

Cette « erreur » de notre collègue centriste, qui a choisi le mauvais paquet de bulletins de vote, met en évidence l’un des problèmes du système de vote à l’intérieur du Sénat.

Quand je suis arrivé à la Haute Assemblée, j’ai eu l’énorme surprise de constater que, ici, contrairement à l’Assemblée nationale, il suffit qu’un sénateur membre d’un groupe soit présent pour venir déposer dans l’urne 20, 50, 100, voire 150 bulletins de vote, alors qu’aucune autre personne du groupe n’est dans l’hémicycle !

Cet incident devrait nous donner l’occasion de revoir les conditions de vote au Sénat. La moindre des choses serait que, comme à l’Assemblée nationale, chaque parlementaire présent ne puisse recevoir plus d’une procuration et qu’on n’autorise pas une seule personne à voter pour 100 autres !

M. le président. Monsieur le sénateur, je vous donne acte de votre rappel au règlement.

La parole est à M.  Guy Fischer, pour un rappel au règlement.

M. Guy Fischer. Je crois qu’il conviendra de dresser le bilan de la séance qui s’est déroulée hier.

Permettez-moi de revenir sur un thème que j’ai déjà évoqué à plusieurs reprises, celui de la multiplication des séances. À vouloir nous faire siéger du lundi au dimanche soir, les conditions deviennent de plus en plus difficiles ! On l’a bien vu hier, lorsqu’il arrive que des groupes de la majorité soient quasiment absents. Il suffit alors qu’un incident survienne, dans un contexte politique qui se tend, pour en arriver à ce que nous avons vécu !

Pour notre part, nous voudrions souligner toute la considération que nous portons à la présidence de Mme Tasca telle qu’elle l’a assumée. Il faudra que chacun tire les leçons d’une telle séance et se pose des questions sur le fonctionnement de notre assemblée lorsque l’on veut nous faire travailler vingt-quatre heures sur vingt-quatre et trois cent soixante-cinq jours sur trois cent soixante-cinq !

Je force un peu le trait, mais il n’en reste pas moins qu’il faut beaucoup d’abnégation pour faire notre travail de législateur dans de telles conditions !

Nous aurons d’ailleurs l’occasion de reparler de la manière dont notre assemblée fonctionne lors de la prochaine conférence des présidents.

M. le président. Monsieur Fischer, je vous donne acte de votre rappel au règlement.

4

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Suspension d'agrément d'une assistante maternelle et réparation du préjudice

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, auteur de la question n° 658, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.

M. Jean-Léonce Dupont. Madame la secrétaire d'État, je souhaite vous interroger sur l’éventuelle réparation par le département des préjudices subis par une assistante maternelle ayant fait l'objet d'une suspension ou d'un retrait d'agrément prononcé par le président du conseil général à la suite de l'ouverture d'une enquête pénale portant sur des suspicions d'actes répréhensibles, de son fait ou du fait d'une des personnes vivant au foyer, suspicions considérées postérieurement comme non fondées par la justice pénale.

La jurisprudence admet la responsabilité sans faute d'un département dans des cas de suspension, puis de retrait d'agrément d'une assistante maternelle, finalement réintégrée dans ses fonctions après un classement sans suite. Elle reconnaît ainsi le droit à cette dernière de réclamer des dommages et intérêts en se fondant sur le principe de rupture d'égalité devant les charges publiques.

Aussi, en adoptant le principe de précaution dans l'intérêt et la protection de l'enfant, le département s'expose-t-il systématiquement à des recours, par ailleurs de plus en plus nombreux, ce qui a un coût d'autant plus substantiel que les procédures pénales engagées sont souvent longues.

Je souhaiterais donc savoir si la procédure de suspension, dans des cas précis et définis préalablement, ne pourrait pas être liée à l'instruction pénale et aboutir à la mise en place d'une nouvelle mesure, appelée « retrait temporaire », qui s'éteindrait avec la clôture de l’instruction.

À défaut, dans des cas précis et définis préalablement, le principe d'un plafonnement des sommes réclamées au département en cas de recours en dommages et intérêts ne pourrait-il pas être envisagé ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Monsieur le sénateur, je vous prie d’abord d’excuser Mme Nadine Morano, que je vais tenter de remplacer au mieux.

Vous posez la question d’une éventuelle réparation par le département des dommages subis par une assistante maternelle ou un assistant maternel ayant fait l’objet d’une suspension ou d’un retrait de son agrément à la suite de l’ouverture d’une enquête pénale.

Je rappelle d’abord que l’agrément des assistants maternels est de la responsabilité départementale.

Ce cas de suspension d’agrément se présente notamment lorsque sont suspectés des actes répréhensibles commis par une assistante maternelle et que ces suspicions ont été considérées postérieurement comme non fondées par la justice pénale.

Il faut évidemment comprendre la mesure de suspension ou de retrait de l’agrément par le département, pendant l’enquête pénale, comme un principe de précaution visant d’abord la protection du ou des enfants accueillis habituellement par l’assistant maternel.

On sait que, dans ce cas, les procédures pénales sont parfois longues et que le département peut être exposé à des recours, d’autant que l’assistant maternel réintégré dans ses fonctions pourra réclamer des dommages et intérêts en se fondant sur le principe de rupture d’égalité devant les charges publiques. La jurisprudence va d’ailleurs dans ce sens.

Autrement dit, dès lors qu’une décision administrative lui a fait grief, un assistant maternel rétabli dans ses droits par le juge peut demander, comme tout justiciable se trouvant dans cette situation, réparation du préjudice causé par la décision, dans les conditions de droit commun.

Je dois également préciser qu’en cas de refus d’indemnisation par le département le bien-fondé de la demande sera alors apprécié par le juge de façon circonstanciée, en fonction des éléments fournis.

De ce fait, vous demandez, monsieur le sénateur, si une mesure de « retrait temporaire » pourrait être créée, mesure dont la durée d’application serait liée à celle de l’instruction pénale.

Cette mesure, qui nécessiterait un fondement législatif, ne nous paraît pas souhaitable, car les dispositions législatives actuelles sont relativement équilibrées, avec une suspension d’une durée de quatre mois jugée non excessive et protectrice de l’intérêt de l’enfant et de l’assistant maternel.

Par ailleurs, votre interrogation sur la mise en place d’un plafonnement des sommes réclamées au département se heurte à l’appréciation souveraine du juge. Dès lors, il ne paraît pas possible d’y donner suite, même dans des cas précis et définis préalablement, comme vous le suggérez.

Au-delà des aspects juridiques de la question, je veux également préciser que nous avons récemment terminé la rédaction d’un référentiel de l’agrément destiné aux services de protection maternelle et infantile, dont l’attention est notamment attirée sur la nécessité d’une bonne collaboration avec les services de police ou de gendarmerie ainsi qu’avec le parquet.

Il est souhaitable, et c’est là le point essentiel, que, dans ces cas de suspicion de mauvais traitements, les procédures d’enquête ou d’instruction soient accélérées dans le but de réduire les conséquences vis-à-vis des enfants concernés, des professionnels et, bien entendu, des départements.

Enfin, dans ce référentiel, les services de protection maternelle et infantile sont sensibilisés à la nécessité d’informer très rapidement – concrètement en moins de quinze jours –l’assistant maternel concerné de la décision prise à la suite de sa convocation en commission consultative paritaire départementale.

Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter sur cette question délicate.

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. J’entends, madame la secrétaire d'État, l’ensemble de vos arguments.

Je puis néanmoins vous dire, pour présider la commission technique départementale, que la durée de ces affaires dépasse le délai de quatre mois, de sorte que, pratiquement systématiquement, le département est dans l’obligation de prononcer un retrait et donc, si au terme de la procédure il apparaît que l’affaire est sans suite et qu’un recours est formé, d’entrer dans le dispositif d’indemnisation.

Je puis ainsi citer l’exemple d’une affaire qui dure depuis près de huit ans. Je n’ose imaginer qu’elle puisse se conclure par un non-lieu et que le département soit amené à réparer le préjudice ainsi causé !

Je maintiens donc que le problème existe et se pose très concrètement.

Financement du déploiement de la TNT sur la totalité du territoire de la Drôme

M. le président. La parole est à M. Jean Besson, auteur de la question n° 667, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique.

M. Jean Besson. Madame la secrétaire d'État, la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur impose une couverture numérique de 95 % de la population aux chaînes historiques gratuites.

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a pour sa part arrêté le 10 juillet 2007 les modalités de couverture pour les autres chaînes de la TNT.

Malgré ces dispositions qui se veulent rassurantes, les conditions de déploiement de la télévision numérique ne manquent pas d’inquiéter les élus et les habitants des territoires ruraux dans la perspective de l’échéance du 30 novembre 2011, date butoir du basculement au tout numérique.

Cette inquiétude se fonde dans mon département sur des études précises du syndicat départemental de télévision, qui réunit toutes les communes de la Drôme et qui estime que, malgré le « débridage » des émetteurs TNT du mont Ventoux, il restera soixante-seize réémetteurs à équiper pour une couverture complète du territoire.

Si cette situation n’évoluait pas, dans la Drôme ce sont plus de 20 000 habitants répartis dans 143 communes qui deviendraient les laissés-pour-compte non seulement de la TNT mais aussi de la télévision, à laquelle ils n’auraient plus accès.

Toujours dans ce cas de figure, un foyer habitant dans une zone d’ombre devrait débourser plus de 300 euros – montant calculé par le syndicat départemental de télévision – entre l’achat de la carte d’accès, de la parabole et du décodeur pour recevoir la TNT.

Quant aux collectivités territoriales drômoises, si elles finançaient elles-mêmes l’équipement en paraboles des 14 000 foyers drômois non desservis, elles devraient débourser plus de 12 millions d’euros sur dix ans.

Le vote, la semaine dernière au Sénat, de la proposition de loi relative à la lutte contre la fracture numérique peut laisser penser que ce « scénario catastrophe » n’aura pas forcément lieu. Le titre Ier de ce texte, intitulé « Faciliter la transition vers la télévision numérique », prévoit des aides aux particuliers et aux collectivités territoriales qui ne sont pas négligeables.

Pour autant, ce texte ne lève pas toutes les incertitudes, tant s’en faut. Il en crée même de nouvelles !

Dorénavant, il appartient au CSA de fixer un taux de « couverture minimale de la population de chaque département ». Ainsi, toute référence à un pourcentage précis et contraignant de couverture de la population, comme c’était le cas auparavant, a disparu !

Ce recul, je ne vous le cache pas, madame la secrétaire d'État, fait naître un certain scepticisme sur les intentions réelles du Gouvernement.

Le passage au numérique, en libérant un certain nombre de fréquences hertziennes, aurait dû se faire avec le souci de garantir l’accès pour tous à cette technologie. Or, force est de constater que l’objectif de 100 % n’est toujours pas d’actualité et que, dans ces conditions, le respect de l’intérêt général n’est pas pleinement garanti.

C’est pourquoi je souhaiterais savoir, madame la secrétaire d'État, quelles assurances vous pouvez nous apporter sur la généralisation de la TNT, en particulier dans la Drôme, et sur son équité.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Monsieur le sénateur, la télévision numérique terrestre, lancée en France voilà quatre ans, rencontre, comme vous le savez, un très vif succès auprès des Français puisque l’on compte désormais plus de deux foyers sur trois qui reçoivent la télévision numérique quel que soit le support, hertzien terrestre, ADSL, câble ou satellite.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que l’extension de la couverture de la TNT dans tous les départements, notamment dans la Drôme, est un objectif majeur du Gouvernement et du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

Plusieurs critères ont été retenus : un critère national de 95 % de couverture de la population inscrit dans la loi ; un critère départemental, défini par le CSA, de 91 % de couverture de la population dans la majeure partie des départements ; un critère de rentabilité économique afin de ne pas maintenir des petits émetteurs, trop coûteux à numériser.

Comme vous le soulignez avec raison, il est nécessaire que le dispositif d’accompagnement du Gouvernement soit juste et équitable.

Afin de mener à bien ce projet d’envergure, d’importants moyens budgétaires seront ainsi mobilisés par l’État, jusqu’à 333 millions d’euros.

Tout d’abord, il s’agit d’informer nos concitoyens au travers d’une grande campagne nationale d’information, lancée à la fin du mois de septembre dernier, d’un site internet et d’un centre d’appel.

Ensuite, il nous faut accompagner les publics sensibles, avec une assistance technique, et les publics défavorisés, avec une assistance financière, vers le numérique.

Cependant, les débats que nous avons eus avec les parlementaires à l’occasion de l’examen de la proposition de loi relative à la lutte contre la fracture numérique nous ont montré qu’il était nécessaire d’assurer en priorité l’équité territoriale dans tous les départements, y compris dans la Drôme.

C’est pourquoi, à la demande de Nathalie Kosciusko-Morizet, le Premier ministre, François Fillon, a décidé de renforcer le programme national d’accompagnement vers le tout numérique le 21 octobre dernier.

La première mesure est de donner de nouveaux pouvoirs au CSA pour qu’il augmente la puissance de certains émetteurs afin d’améliorer la couverture TNT « hertzienne ».

La seconde est de rendre éligibles tous les foyers au fonds d’aide spécifique aux zones d’ombre de la TNT hertzienne, et cela sans condition de ressources. Ce fonds sera utilisé pour aider financièrement les foyers devant passer à la TNT par satellite, notamment dans les zones où il n’est plus rentable de conserver des émetteurs hertziens.

La participation des chaînes sera sollicitée pour abonder ce fonds.

Enfin, pour donner plus de flexibilité en matière d’aménagement numérique du territoire, l’État s’engage à aider financièrement les collectivités qui souhaitent néanmoins maintenir, via un investissement en propre, des émetteurs secondaires pour des raisons spécifiques.

L’ensemble de ces engagements a été inscrit dans la proposition de loi relative à la lutte contre la fracture numérique, qui vient d’être définitivement adoptée en deuxième lecture au Sénat.

Toutes ces mesures permettront donc aux habitants de la Drôme de passer à la télévision tout numérique dans des conditions justes et équitables.

M. le président. La parole est à M. Jean Besson.

M. Jean Besson. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de ces précisions, qui me paraissent positives ; vous comprendrez toutefois que les collectivités territoriales veillent avec une attention particulière à la mise en place des mesures que vous annoncez.

Disparité des effectifs de forces de police en Seine-et-Marne

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, en remplacement de M. Michel Billout, auteur de la question n° 653, adressée à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

M. Guy Fischer. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la disparité des effectifs de forces de police nationale dans le département de Seine-et-Marne.

Qu’il me soit permis d’illustrer cette inégalité de traitement entre zones géographiques par quelques exemples frappants cités par le journal Le Parisien : Provins compte un policier pour 294 habitants ; Pontault-Combault un pour 640. De même, si les 69 policiers rattachés à Coulommiers ont affaire à une moyenne de 57 faits criminels constatés pour 1 000 habitants, leurs homologues de Mitry-Mory sont seulement 64, alors qu’ils sont aux prises avec un taux de 110 faits criminels pour 1 000 habitants.

De nombreux élus locaux se sont émus de cette situation et ont réclamé l’augmentation des moyens humains. Je n’ignore pas, évidemment, que certaines disparités puissent être justifiées au regard de circonstances et d’infrastructures exceptionnelles, telles que le parc d’attraction Disneyland à Chessy. Mais, pas plus qu’ailleurs, un écart de 1 à 5 n’est pas admissible en Seine-et-Marne, d’autant qu’il est porteur d’un ressenti et d’une atmosphère d’insécurité dont vous connaissez les effets néfastes.

Ainsi, fin septembre, quelques habitants se sont constitués en milice à Roissy-en-Brie, ce qui a défrayé la chronique. Cette ville dépend du commissariat de Pontault-Combault, le bien moins loti de Seine-et-Marne, selon Le Parisien. Dans ce même quotidien, l’un des instigateurs de la milice déclarait : « On ne fait pas ça pour jouer aux cow-boys, on en a juste ras-le-bol. Comme la police reconnaît qu’elle n’a pas les moyens d’intervenir rapidement, on se sent laissés-pour-compte ». Si cette initiative doit être fermement condamnée, elle n’en souligne pas moins le malaise ambiant dans des communes laissées en déshérence par les pouvoirs publics et frappées, comme c’est le cas dans l’ensemble de notre pays, par la hausse de la délinquance.

En fait, cette évolution insidieuse est due pour beaucoup à une politique de suppression massive des postes de fonctionnaires d’État dans la police nationale et les services publics de proximité. La loi de finances pour 2010 prévoit ainsi près de 34 000 suppressions de postes, dont 16 000 dans l’éducation nationale et 3 450 au ministère de l’intérieur, soit 2 000 policiers en moins, selon les organisations syndicales, et cette baisse importante des effectifs devrait se poursuivre dans les prochaines années. Pensez-vous remplacer tous ces fonctionnaires par des caméras de vidéosurveillance ?

À mon sens, la question de la sécurité ne peut se limiter aux seules missions de surveillance et de répression. La prévention reste la première mission en termes de tranquillité et de sécurité publiques.

Dès lors, madame la ministre, vous l’aurez compris, je souhaiterais connaître les raisons qui justifient la disparité des effectifs de forces de police en Seine-et Marne, et votre position sur cette volonté de transfert de la mission régalienne de sécurité de l’État vers les collectivités locales.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer. Monsieur le sénateur, le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, M. Brice Hortefeux m’a chargée de vous apporter la réponse suivante.

La répartition des policiers dans les circonscriptions de sécurité publique est déterminée sur la base de critères précis et objectifs – population, délinquance, etc. –, révisés annuellement.

Au 1er novembre de cette année, le département de Seine-et-Marne comptait 3 077 fonctionnaires, soit 164 de plus qu’en janvier 2004. À ce chiffre viennent s’ajouter 205 adjoints de sécurité. Le nombre de gradés et de gardiens de la paix est supérieur à l’effectif de référence pour ce type de département.

S’agissant de la circonscription de sécurité publique de Pontault-Combault, le nombre de gradés et de gardiens de la paix qui y sont affectés est également supérieur à l’effectif de référence fixé pour cette circonscription.

Il convient, par ailleurs, de rappeler qu’au-delà de leurs effectifs locaux les circonscriptions peuvent bénéficier du renfort d’unités départementales ou de forces mobiles.

Une augmentation strictement quantitative des forces de police est loin de constituer le seul moyen de renforcer la lutte contre la délinquance.

Cette lutte exige avant tout des moyens modernes, des méthodes adaptées aux nouvelles formes de criminalité et aux territoires, des modes d’action efficients et une mobilisation de tous les partenaires concernés. Elle doit s’accompagner d’une politique dynamique de prévention de la délinquance. Tel est le sens des réformes décidées par le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

Le ministre a ainsi fixé, le 2 septembre, aux directeurs départementaux de la sécurité publique et aux commandants de groupement de gendarmerie des objectifs précis de lutte contre la délinquance.

Il a notamment demandé une mobilisation renforcée dans la lutte contre les cambriolages et décidé, dès le 1er octobre, la création de cellules anti-cambriolages, composées de policiers et de gendarmes, pour renforcer la cohérence et l’efficacité des forces de sécurité intérieure.

La cellule anti-cambriolages dont est dotée la direction départementale de la sécurité publique de Seine-et-Marne a ainsi déjà permis l’élucidation de trois vols par effraction commis par le même individu sur la circonscription de sécurité publique de Meaux.

D’autres actions engagées par le ministre vont permettre de mieux lutter contre la délinquance, en particulier celle des bandes violentes. Les forces de police de Seine-et-Marne disposent par exemple, depuis le 1er octobre, de deux groupes spécialisés d’investigation sur les bandes, à Melun et à Meaux, qui permettent, en lien notamment avec le groupe d’intervention régional, le GIR, de renforcer la répression des agissements des bandes.

Enfin, à l’action de l’État doit s’ajouter une mobilisation de tous les acteurs de la sécurité, au premier rang desquels figurent les collectivités territoriales, par le biais en particulier du développement de la vidéo-protection. À cet égard, le Plan national de prévention de délinquance et d’aide aux victimes, adopté le 2 octobre, sera le gage d’une mobilisation renouvelée de l’État et des collectivités territoriales pour prévenir plus efficacement la délinquance.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Le chef de cabinet de M. Brice Hortefeux, saisi par Mme le maire de Roissy-en-Brie des difficultés que j’ai évoquées, lui répondait, le 15 septembre dernier, « qu’il prescrivait immédiatement auprès des services compétents un examen diligent de la situation » afin de « garantir partout et pour tous, le droit à la sécurité ». Or, trois mois plus tard, elle n’a rien vu de plus !

Il s’agit d’une question fondamentale pour la population, mais également pour les conditions de travail des fonctionnaires de police. En témoigne le très fort mouvement syndical qui s’est exprimé le 3 décembre dernier. En 2004, les syndicats policiers signaient un accord prévoyant des effectifs de gradés et de gardiens de la paix programmés à 108 000 en 2012. Cet engagement est totalement rompu, puisque, selon l’Union SGP Unité Police-Force ouvrière, « les effectifs seront réduits à 100 000 à l’horizon 2012 ». Et ce syndicat de rappeler que la police nationale est la profession la plus affectée par les suicides : sur les dix dernières années, une triste moyenne de 50 suicides par an est enregistrée dans les rangs de la police.

Votre seule réponse, qui consiste à tripler le nombre de caméras de vidéosurveillance, ne suffira pas à résoudre ce très sérieux problème !