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Nomination de membres d’un organisme extraparlementaire

M. le président La commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a proposé des candidatures pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame M. Dominique Braye, membre titulaire, et M. Thierry Repentin, membre suppléant, de l’Agence nationale de l’habitat.

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Retrait d’une question orale

M. le président. J’informe le Sénat que la question orale n° 818 de M. Robert Navarro est retirée du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État
Article 1er

Action extérieure de l'État

Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

(Texte de la commission)

M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État.

Je rappelle que la discussion générale a été close.

La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le président, ne souhaitant pas prolonger déraisonnablement ce débat très intéressant, quoique l’envie ne m’en manque pas (Sourires.), je m’exprimerai brièvement.

M. le président de la commission des affaires étrangères, M. le président de la commission de la culture et MM. les rapporteurs ne me démentiront pas : les débats, tant en commission qu’en séance publique, ont été constructifs et enrichissants, même si les différents intervenants n’ont pas tu leurs critiques, ce qui est bien normal.

Je remercie les uns et les autres d’avoir cru à une certaine sincérité de ma part ; c’est vrai, comme vous, je souhaite que ce projet de loi, qui sera celui du Sénat, réussisse.

J’ai bien entendu les recommandations formulées par les différents orateurs, en particulier Yves Dauge. Je le répète : nous examinerons dans un délai de trois ans l’opportunité de rattacher organiquement le réseau des centres et instituts français à l’étranger à l’agence culturelle. Entre-temps, il nous appartient de changer les habitudes.

À en croire de nombreux articles de presse, j’aurais trop traîné ; en revanche, d’autres pensent que j’agis trop vite et qu’il vaudrait mieux attendre. En somme, personne n’est content ! Mais j’ai l’habitude !

En vérité, dans cette affaire, j’ai choisi d’écouter, et, après avoir quelque peu hésité, je ne le nie pas, j’en suis venu à conclure qu’il était difficile de basculer d’un coup près de 6 800 agents du ministère vers le réseau de l’agence culturelle. Cette opération aurait nécessité 50 millions d’euros, somme dont je ne dispose pas.

Précisément, certains m’ont reproché de ne pas avoir de budget. Or, je le rappelle, j’ai obtenu 40 millions d’euros pour moderniser en profondeur le réseau.

À cet égard, je voudrais faire pièce à certaines affirmations. Ainsi, les crédits de l’action culturelle extérieure connaîtront une baisse, entre 2006 et 2010, non pas de 20 %, comme certains l’ont prétendu, mais de moins de 1 %.

M. Richard Yung. Ce n’est pas possible !

M. Bernard Kouchner, ministre. Certes, les crédits de la coopération culturelle et du français ont baissé de 14 %, mais, grâce aux 40 millions d’euros que j’ai obtenus de haute lutte, ceux de CulturesFrance ont crû de 17 %. C’est de cette méprise que provient l’erreur de chiffrage. Au final, les crédits de l’action culturelle extérieure ont donc connu une baisse de seulement 1 %. S’il avait été réellement envisagé de les réduire de 20 %, croyez-le bien, j’aurais été le premier à le déplorer et je me serais battu pour qu’il n’en aille pas ainsi.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous réclamez 20 millions supplémentaires par année. Eh bien, cette exigence me paraît somme toute assez raisonnable et je vais m’efforcer de vous donner satisfaction, car j’ai à cœur que ce projet réussisse pleinement. Si je ne mésestime pas l’opposition traditionnelle, qu’ont rappelée certains d’entre vous, entre les ambassadeurs et les « cultureux », je ne pourrais que me féliciter d’un « éclaircissement » entre ces deux « grands corps ». Nous disposons de trois ans pour ce faire.

Plusieurs d’entre vous préféreraient que la future agence culturelle soit non pas un EPIC, mais un établissement public administratif, à leurs yeux plus « progressiste ». Mais qu’en est-il au juste dans le domaine culturel ? Le Grand Palais, l’Opéra de Paris, la Cité de la musique, le Théâtre de l’Odéon, le Théâtre national de Chaillot sont des EPIC. Pensez-vous pour autant que c’est la recherche du profit qui a déterminé le statut de ces établissements culturels ? Simplement, il est bien plus aisé de contrôler la comptabilité de ces établissements publics, qui reçoivent des subventions.

L’EPIC est un établissement public comme les autres, et je ne vois pas en quoi cela pourrait être dépréciatif. Ce qui vous choque, parce qu’il s’agit de culture, c’est l’adjonction des adjectifs « industriel » et « commercial ». Mais ne nous en tenons pas aux apparences : le Palais de Chaillot n’est pas réputé pour être une machine à faire de l’argent !

J’en viens maintenant aux instituts « concurrents » des nôtres, et, là encore, je souhaiterais corriger quelques erreurs.

L’Institut Goethe reçoit de l’État allemand une dotation d’environ 250 millions d’euros. Le British Council, quant à lui, dispose d’un budget de 627 millions d’euros, auquel l’État britannique contribue à hauteur d’environ 223 millions d’euros. La future agence culturelle française, si vous votez ce projet de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, disposera de 350 millions d’euros, dont 250 millions apportés par l’État. Ainsi, même si je suis le premier à dire que ce n’est pas suffisant, force est de constater que nous faisons plus que les autres puisque, je le rappelle, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger dispose d’un budget de 500 millions d’euros.

Voilà la réalité. Nous disposons de 850 millions d’euros : 500 millions d’euros pour l’AEFE, 250 millions d’euros pour l’action culturelle, dont 100 millions d’euros de recettes privées.

D’ores et déjà, 55 % des ressources des instituts culturels proviennent d’une source extérieure. On peut toujours souhaiter aller plus loin, mais ce sera difficile. Plus de la moitié des ressources des instituts culturels vient des leçons de français ou d’autres subventions.

Madame Cerisier-ben Guiga, nous avons fermé douze ouvert une quinzaine d’instituts et nous en avons ouvert une quinzaine.

M. Bernard Kouchner, ministre. Il est vrai que nous en avons fermé davantage en Europe, à Gênes et à Gand par exemple. Les créations ont eu lieu à Kaboul, à Achkhabad, à Sarajevo, à Bakou, à Abuja, à Saragosse, à Fez, à Podgorica. Au total, nous avons ouvert plus d’instituts que nous n’en avons fermés. Les fermetures ont été les plus nombreuses en Europe, c’est-à-dire là où les contacts culturels sont plus aisés. Nous avons privilégié les ouvertures dans les pays où nous voulions établir un centre de rayonnement de la France.

Vous ne pouvez donc pas nous faire tous les reproches. Il subsiste des manques, et nous en avons conscience, mais ils sont répartis.

Monsieur Hue, je puis vous affirmer ne pas avoir été émoustillé, pas même par M. Olivier Poivre d’Arvor. (Sourires.) J’ignore d’où vous vient cette idée !

M. Michel Billout. C’est le journaliste !

M. Bernard Kouchner, ministre. Il arrive que les journalistes me mettent en colère, mais ils ne m’émoustillent jamais ! (Nouveaux sourires.)

M. Robert Hue. C’est l’écrivain que je n’ai pas nommé qui était émoustillé !

M. Bernard Kouchner, ministre. Ah !

Vous avez par ailleurs dénoncé le coût des opérations de secours à l’étranger. Sachez, monsieur le sénateur, qu’il n’est pas question d’arrêter ces interventions.

M. Nicolas About. Cela ne nous empêche pas d’en connaître le coût !

M. Bernard Kouchner, ministre. La tradition de notre pays est très différente de celle de nos voisins. Je ne citerai personne, mais vous me comprenez…

Nous, nous allons chercher nos ressortissants partout, et cela coûte cher. Bien sûr, nous préférerions ne pas avoir à le faire et il conviendrait que nos concitoyens prennent certaines précautions. Le monde a changé et il existe aujourd'hui des zones vraiment dangereuses, où il est tout à fait déconseillé de se rendre, mais certains ne font pas toujours preuve d’une prudence suffisante.

La mise en place d’un secrétariat d’État à la francophonie et aux relations culturelles extérieures présenterait des avantages. C’est une idée intéressante, mais il ne m’appartient pas de former le Gouvernement…

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Cela viendra peut-être ! (Sourires.)

M. Bernard Kouchner, ministre. … ni de le déformer, sauf par mon influence personnelle ! (Sourires.) J’ajoute que le nombre des membres du Gouvernement est relativement stable.

En ce qui concerne le rattachement du réseau culturel à l’agence chargée de l’action culturelle à l’étranger, nous n’attendrons pas trois ans pour lancer les expérimentations. Si le présent projet de loi est adopté, quatre membres du Parlement siégeront au conseil d’administration de l’agence. Nous procéderons à des expérimentations dès que possible.

Monsieur Chevènement, je retiendrai, en défaveur de l’appellation « Victor Hugo », vos évocations à la fois précises, poétiques et fort érudites. Bravo !

Croyez bien que ne cherche pas l’effacement culturel de la France, tout au contraire. Si tel était le cas, je ne m’acharnerais pas à convaincre, comme je le fais depuis deux ans et demi, bientôt trois ans. Comment voulez-vous que l’on ne redoute pas l’idée que je puisse imposer un changement brutal de statut ? Si aucun ministre ne s’est engagé sur cette voie, ce n’est pas un hasard ! Il s’agit en effet d’une entreprise risquée. Si l’on ne veut pas courir de risques, mieux vaut s’abstenir, comme l’ont fait mes prédécesseurs.

Pour ma part, je crois avoir contribué, à ma mesure, à l’influence culturelle de la France, et en prenant des risques personnels.

S’engager dans une réforme de statut, c’est s’exposer à un risque politique. Rien ne m’y obligeait ! Je le dis pour toute mon équipe, et aussi pour Olivier Poivre d’Arvor. Si nous étions restés bien tranquilles, on ne nous aurait rien reproché. Nous aurions continué notre petit jeu : deux corps de l’État, deux cultures, deux traditions qui ont en effet bien des difficultés à cohabiter. Mais comme le souligne à juste titre M. Yves Dauge, il faut les faire cohabiter !

Nous avons tenu à ce que les ambassadeurs demeurent responsables de la politique extérieure de la France, y compris dans sa dimension culturelle. Il leur appartiendra, avec nous – je dis nous parce que ce débat nous intéresse tous – de faire des efforts, de comprendre que nous n’avions rien, aucune hostilité contre ce grand corps de l’État.

Monsieur Trillard, je vous remercie d’avoir évoqué « La Folle Journée ». Une édition de ce festival se déroulera à Tokyo. Non seulement nous y participerons, mais nous en serons les parrains. C’est un très bel exemple de ce qu’il est possible de faire.

Vous avez également cité les ambassadeurs culturels traditionnels que sont l’Université et le cinéma. Vous avez raison, mais encore faut-il être plusieurs ! Le ministère des affaires étrangères, dont ce n’est pas vraiment la vocation, fait ce qu’il peut dans ce domaine pour moderniser sa sensibilité.

Monsieur Pozzo di Borgo, je vous trouve bien exigeant. Nous avons déjà de grandes difficultés à mettre sur pied un institut culturel français et vous voudriez que l’on crée un institut européen ! Il s’agit certes d’une idée intéressante, mais quel travail ! N’oublions pas que nous avons des concurrents : les Italiens – qui ne sont pas mauvais –, les Espagnols, les Anglais, les Allemands. Cette compétition est profitable à la culture, mais elle est extrêmement rude en termes d’engagements.

En ce qui concerne l’implication du secteur privé, nous souhaitons que des représentants de l’industrie culturelle soient sollicités lorsqu’il s’agira de désigner les six personnalités qualifiées.

Vous avez également évoqué le défi technologique, mais je ne suis pas sûr qu’il appartienne au ministère des affaires étrangères et européennes de le relever, même si celui-ci doit bien entendu s’efforcer de ne pas rester à la traîne dans ce domaine.

Monsieur Gouteyron, soyez rassuré : Frédéric Mitterrand et moi-même présenterons le futur institut culturel ensemble, le 9 mars. Le ministère de la culture et de la communication est associé à ce projet depuis le début et il le restera. Désormais, nous choisirons les attachés culturels ensemble, du moins pour les postes importants.

Comme je le disais voilà un instant à M. de Rohan, j’ignore s’il faut garder un comité pour procéder à ce choix. En revanche, il est légitime que les deux ministères agissent de concert.

La société civile aura sa place dans les conseils d’orientation stratégiques et dans les conseils d’administration des agences.

Je vous remercie, madame Cerisier-ben Guiga, de penser que mon discours est très loin de la réalité ! J’espère que la réalité, grâce à vous, sera animée de la même flamme que le discours. Je vous promets qu’il en sera ainsi. Si tel n’était pas le cas, cette réforme n’aurait aucun intérêt. Notre objectif n’est ni de créer un appareil bureaucratique supplémentaire ni de compliquer la situation.

En tout état de cause, soyez tous persuadés que cette réforme est le seul moyen de proposer une carrière continue aux personnels et aux agents locaux. En effet, au sein de l’agence, ils se verront proposer des CDI alors que dans les réseaux, ils sont en CDD. Tous les trois ans, ils doivent charger d’affectation. Cela brise leur vie familiale, mais aussi leur carrière. Comment, dans ces conditions, développer dans la durée des activités culturelles performantes et attractives.

Madame Garriaud-Maylam, je ne peux souscrire à vos propos sur Victor Hugo. Les noms proposés pour le futur institut étaient d’inspiration fort différente. Si vous trouvez un nom moderne, je ne puis que vous inviter à nous le proposer. En tout cas, je ne peux pas considérer Victor Hugo comme un passéiste ou un ringard !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je n’ai pas dit cela !

M. Bernard Kouchner, ministre. Je considère qu’il est infiniment moderne ! Pour m’être replongé dans la lecture de son œuvre, politique en particulier, je puis vous assurer que la modernité de Victor Hugo ne peut être mise en question.

Je vous prie de vouloir excuser le caractère général de mon intervention, qui laisse peut-être certains arguments sans réponse. On accuse souvent les ministres de se précipiter pour faire une petite réforme. Lorsqu’un ministre réfléchit, ne le lui reprochez pas ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Titre Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX ÉTABLISSEMENTS PUBLICS CONTRIBUANT À L’ACTION EXTÉRIEURE DE LA FRANCE

Chapitre Ier

Dispositions générales

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État
Article 2 (début)

Article 1er

Les établissements publics contribuant à l’action extérieure de la France ont pour mission de promouvoir la présence et l’influence de la France à l’étranger et de participer à l’action extérieure de l’État, notamment par la mise en œuvre à l’étranger d’actions culturelles, de coopération et de partenariat et par la gestion de moyens nécessaires à cette action.

Ces établissements publics sont placés sous la tutelle de l’État. Ils sont créés par un décret en Conseil d’État qui précise leurs missions et leurs modalités d’organisation et de fonctionnement.

Une convention pluriannuelle conclue entre l’État, représenté par les ministres concernés, et chaque établissement public contribuant à l’action extérieure de la France, représenté par le président de son conseil d’administration, définit les objectifs et les moyens nécessaires à la mise en œuvre de ses missions. Cette convention est transmise par le Gouvernement aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Les commissions peuvent formuler un avis sur cette convention dans un délai de six semaines.

Au titre de leur mission, ces établissements publics peuvent contribuer aux travaux d’instituts indépendants de recherche, en leur assurant le concours d’agents publics placés auprès de ces établissements par l’État.

Pour l’accomplissement de leurs missions, ces établissements peuvent disposer de bureaux à l’étranger qui font partie des missions diplomatiques. Là où ils ne disposent pas de bureaux, ils font appel aux missions diplomatiques. Leur action à l’étranger s’exerce sous l’autorité des chefs de mission diplomatique.

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les présentes dispositions ne s'appliquent pas aux établissements publics régis par le code monétaire et financier.

La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Kouchner, ministre. Cet amendement tend à exclure les établissements publics ayant une activité de crédit du champ de la nouvelle catégorie d’établissements publics. Il vise en fait l’Agence française de développement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Joseph Kergueris, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Sous une apparence technique, cet amendement du Gouvernement pose une vraie question de principe : l’AFD a-t-elle ou non vocation à faire partie de la nouvelle catégorie d’établissements publics contribuant à l’action extérieure de la France ?

Si l’on considère les missions de l’AFD, la réponse est bien évidemment affirmative. L’aide au développement constitue, en effet, un volet essentiel de notre politique étrangère.

Si l’on retient le statut, force est de constater que l’AFD est un établissement public industriel et commercial à caractère bancaire et qu’elle relève à ce titre du code monétaire et financier.

Toutefois, le projet de loi fixe des règles générales relatives à la nouvelle catégorie d’établissements publics en renvoyant au décret les modalités de fonctionnement. Il faut donc s’interroger sur les raisons qui pourraient conduire, comme le souhaite le Gouvernement, à exclure l’AFD de cette nouvelle catégorie.

Est-ce en raison des dispositions prévoyant un contrôle renforcé du Parlement, qui pourra se prononcer par un avis sur le contrat d’objectifs et de moyens entre l’État et cet établissement ? Je ne le pense pas.

Est-ce alors dû à la composition du conseil d’administration de l’AFD, qui ne comprend actuellement qu’un seul sénateur titulaire, contre deux députés, et qui devrait comprendre, si l’AFD est intégrée à la nouvelle catégorie, deux députés et deux sénateurs ? Je le pense encore moins.

Il ne s’agit pas non plus d’un problème de tutelle ministérielle, car cette question ne relève pas des règles constitutives, ni d’un souci de ressources puisque celles-ci sont définies de manière suffisamment large pour faire référence, par exemple, à l’activité de prêt de l’AFD.

En réalité, tout laisse à penser qu’il s’agit, par cet amendement, de soustraire les bureaux de l’AFD à l’étranger à l’autorité de l’ambassadeur.

Comme nous le savons tous ici, l’AFD a eu tendance ces dernières années, avec le soutien de Bercy, à affirmer son autonomie à l’égard du Quai d’Orsay, à Paris, et des ambassadeurs, sur le terrain. Or, lorsqu’un organisme commence à affirmer son autonomie, c’est bien souvent parce que l’État doit y jouer un rôle de pilotage stratégique renforcé. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle vous avez souhaité, monsieur le ministre, mettre en place un conseil d’orientation stratégique.

De même, nous pensons que les ministères concernés doivent jouer tout leur rôle dans le pilotage stratégique de l’AFD à Paris.

La commission est convaincue que les représentations locales de l’Agence doivent être placées sous l’autorité de l’ambassadeur, qui, en tant que représentant de l’État et du Gouvernement au niveau local, doit jouer un rôle de chef de file. C’est du reste ce qui se passe aujourd’hui, comme l’a souligné le président Josselin de Rohan dans son propos liminaire, puisque les responsables des bureaux de l’AFD participent aux réunions des chefs de service présidées par l’ambassadeur.

Qui peut imaginer, en effet, une politique d’aide au développement séparée de la politique étrangère, qui ne prendrait pas en compte les priorités géographiques ou diplomatiques ?

Tous ceux qui travaillent à l’étranger font partie de l’« équipe France », quel que soit le type du maillot qu’ils portent.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron, pour explication de vote.

M. Adrien Gouteyron. J’avoue mon embarras à propos de cet amendement.

Siégeant au conseil d’administration de l’AFD, je connais un peu mieux que d’autres le fonctionnement de cette agence, et je constate la part croissante des prêts bancaires dans son activité, dans la mesure où les subventions ne sont pas toujours à la hauteur des espérances. Il faut donc que cette activité bancaire puisse se développer. Est-ce vraiment compatible avec la transformation de l’agence en établissement public contribuant à l’action extérieure de la France ? J’avoue que ma réponse à cette question rejoint plutôt la position du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Notre groupe soutient la position du rapporteur.

Je comprends certaines des hésitations d’Adrien Gouteyron, mais l’AFD doit être – et je dirai : enfin ! car elle a beaucoup de mal à sortir de la logique bancaire – un opérateur du développement plus qu’une banque

Ses activités bancaires, dont le produit permet de financer l’aide au développement, ne sont certes pas en cause. Il faut toutefois trouver un équilibre. Il n’est pas normal que, dans certains postes diplomatiques, le bureau de l’AFD ait aussi peu de relations avec l’ambassade, alors que cette agence met en œuvre la politique de développement de la France.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Kouchner, ministre. Je ressens la même gêne que M. Gouteyron.

Les opérations de prêts constituent en effet une part majeure des activités de l’AFD et, en la matière, il serait illogique, voire dommageable, que les ambassadeurs aient plus qu’un rôle d’influence.

Je me permets d’insister sur ce point : il ne me semble pas acceptable qu’une sorte de banque, même si elle se contente de délivrer des prêts, dépende directement d’un ambassadeur.

En revanche, ce dernier a un rôle important à jouer en matière de dons. Je déplore d’ailleurs leur raréfaction, et j’ai demandé à ce que leur nombre soit multiplié.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. En dépit de son activité de prêts, qui va croissante, l’AFD n’est pas une banque commerciale, mais une banque au service de l’action extérieure de l’État. D’ailleurs, les documents de cadrage pluriannuels et annuels sont déjà révisés par l’ambassadeur et le poste diplomatique.

J’ajoute que ces prêts, consentis à des conditions particulières, sont financés par le contribuable français. Il me paraît donc tout à fait normal que l’ambassadeur ait son mot à dire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Le groupe socialiste s’abstient.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État
Article 2 (interruption de la discussion)

Article 2

Les établissements publics contribuant à l’action extérieure de la France sont administrés par un conseil d’administration.

Le conseil d’administration comprend :

1° Deux députés et deux sénateurs désignés par les commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ;

2° Des représentants de l’État ;

3° Des personnalités qualifiées désignées par l’État ;

4° Des représentants élus du personnel.

Le conseil d’administration des établissements publics qui reçoivent le concours de collectivités territoriales et d’organismes partenaires pour accomplir leurs missions peut également comprendre des représentants de ces collectivités et organismes.

Les établissements publics contribuant à l’action extérieure de la France ne sont pas soumis aux dispositions du chapitre 1er du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, sur l'article.