M. Charles Pasqua. Très bien !

M. Jacques Gautier. Son engagement, son expérience, sa compétence et son sens du dialogue, associés à la sérénité constructive du président Emorine,…

M. Jacques Gautier. … ont permis de porter ce projet devant la Haute Assemblée, qui ne manque ni de talents ni de technicité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Parmi les améliorations apportées, je veux souligner, plus particulièrement, la réécriture de l’article 1er et l’affirmation d’un financement clair et viable, porté par l’État et par une gouvernance efficace.

Grâce au Sénat, les élus locaux, les collectivités territoriales ainsi que les populations concernées seront mieux associés au projet de réseau de transport. L’entrée de deux nouveaux maires au sein du conseil d’administration de l’établissement public de Paris-Saclay, rappelée par M. le rapporteur, en est l’illustration. Le texte retenu par la commission mixte paritaire conforte notre volonté.

M. Laurent Béteille. Très bien !

M. Jacques Gautier. Je veux citer, également, la consultation de l’Association des maires de l’Île-de-France, l’AMIF, sur le futur schéma d’ensemble du Grand Paris, et souhaite, à mon tour, rendre un hommage appuyé à son président, M. Claude Pernes, qui vient de nous quitter prématurément. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)

Grâce aux contrats de développement territorial et au périmètre d’intervention retenu pour la Société du Grand Paris, les opérations d’aménagement seront cohérentes. En cas de désaccord avec la commune, la SGP sera bien obligée de négocier : un projet non souhaité par les populations ne verra donc pas le jour.

S’agissant de la spéculation immobilière que ce projet pourrait éventuellement favoriser, la nouvelle taxe jouera un rôle largement modérateur. (Mme Nicole Bricq s’exclame.) L’ensemble du dispositif me paraît donc rationnel.

Nous avons tous souhaité insister sur la nécessité d’articuler le futur réseau avec les réseaux existants de métro, de bus, de train, de lignes à grande vitesse. Cette exigence a été prise en compte, et il faut s’en féliciter : une cohérence a ainsi été établie entre le présent et l’avenir.

La commission mixte paritaire a trouvé un accord de bon sens sur les projets Arc Express et Charles-de-Gaulle Express. Ce dernier projet pourra voir le jour, sans subvention de l’État, mais sous la forme d’une délégation de service public, ce qui permettra d’éviter d’alourdir la facture de l’État.

Le lancement du débat public conjoint sur la « double boucle » et sur Arc Express est une réponse pragmatique qui devrait rassurer tous les acteurs concernés. Nous aurons ainsi une vue d’ensemble cohérente.

Je ne parlerai pas des autres aspects du développement du cœur de la région-capitale, en matière de recherche, d’innovation, d’emploi, de logement, d’environnement ou de création architecturale. Le potentiel de ce projet ouvre des perspectives exceptionnelles, et ne demande qu’à être exploité. Ainsi, la création de l’établissement public de Paris-Saclay fera émerger un pôle technologique et scientifique de premier rang en matière de recherche, d’enseignement, de développement et d’innovation.

Oui, mes chers collègues, l’État a pris ses responsabilités et toute sa place dans ce projet ! Non, il n’a pas « bafoué la démocratie locale » ou la décentralisation ! On ne peut pas faire le procès de ce texte, alors même que l’État investit plus de 20 milliards d’euros dans les transports franciliens de demain et qu’il propose, au travers d’une contractualisation avec les collectivités, de favoriser leur développement.

Mais l’État n’oublie pas le quotidien : il va préparer très rapidement, en concertation avec la région et les collectivités territoriales, le prochain contrat de projets, auquel il participera financièrement. Nous pourrons ainsi apporter, tous ensemble, des réponses concrètes aux problèmes que rencontrent chaque jour les Franciliens, notamment dans le domaine des transports.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Très bien !

M. Jacques Gautier. Ce texte majeur est la première étape d’un projet d’ensemble qui doit permettre de conforter la place éminente de la région-capitale dans la compétition internationale, non pas pour la gloriole, mais pour améliorer son attractivité, son potentiel, ses emplois et la vie de nos concitoyens. Car c’est à eux que nous devons penser avant tout ! Cet objectif, que nous a fixé le Président de la République, est un enjeu national. C’est pourquoi le groupe UMP votera avec conviction ce texte d’avenir. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je me réjouis que la commission mixte paritaire soit parvenue à élaborer ce texte de compromis, qui ouvre la voie à une mise en œuvre rapide d’une loi très importante pour notre région et pour notre pays.

Ce projet de loi est aussi très important pour les Franciliens, pour lesquels la question des transports représente une préoccupation majeure.

Ce texte apporte la réponse adéquate aux problèmes actuels, une réponse à la hauteur des défis considérables que la région doit relever si elle veut rester dans le peloton de tête des villes-mondes en matière d’attractivité internationale.

Il s’agit d’un projet d’avenir, inspiré par le Président de la République, qui permet d’imaginer la région-capitale de demain, au service de la France. C’est une chance historique que nous ne pouvons pas et que nous ne devons pas laisser passer.

La construction du Grand Paris est emblématique de notre volonté de renforcer le pouvoir d’attraction de la France et de l’Île-de-France, en vue de favoriser la création des emplois de demain. C’est une opération majeure d’aménagement et de développement du territoire, que nous réaliserons au nom de la réussite et du rayonnement de la France, dans un difficile contexte de compétition internationale ; cette compétition, n’en doutons pas, laissera sur le bord du chemin les pays et les régions qui n’auront pas su prendre à temps les bonnes décisions.

Nous refusons d’accepter avec une douce résignation de voir cette région perdre des points chaque année face à la concurrence, parce que nous savons que, au bout du compte, c’est l’ensemble du pays qui en paiera, un jour, le prix.

Il fallait donc que notre pays se dote des outils nécessaires pour répondre à cette ambition. C’est aujourd’hui chose faite, et nous vous apportons, monsieur le secrétaire d’État, notre soutien plein et entier.

Je souhaite aborder un point qui, on le comprendra aisément, m’intéresse particulièrement : le développement de l’est parisien et le nécessaire rééquilibrage avec l’ouest de la région.

Les emplois sont toujours plus à l’Ouest, et les logements à l’Est ! Telle est, pour une bonne part, l’origine des problèmes de transport que nous connaissons. Des zones résidentielles importantes ont certes été créées, mais elles sont très peu et très mal desservies, par un réseau de transport vétuste et obsolète. Ainsi se pose le problème lancinant de la ligne A du RER, mais nous pourrions décliner la suite de l’alphabet…

De manière générale, chacun s’accorde à dénoncer l’obsolescence des transports en région parisienne. Avec plus d’un million de voyageurs transportés par jour, la ligne A du RER est aujourd’hui la plus saturée et la plus encombrée d’Europe. Cette situation est devenue insupportable pour des millions de personnes. Il était temps d’entendre l’exaspération de nos concitoyens !

Nous soutenons donc le projet d’un métro de grande capacité et à grande vitesse, qui permettra d’élargir considérablement le réseau, mais à condition que l’on ne sacrifie pas les urgences de court terme, c’est-à-dire l’entretien et l’amélioration du réseau existant.

Comme je l’ai déjà dit lors de la première lecture, il est capital de conjuguer les investissements prévus dans le projet de loi avec ceux qui permettront de rénover le plus rapidement possible le réseau existant et le matériel roulant. Il faut faire coexister le système moderne et très performant prévu par le projet du Gouvernement avec l’actuel réseau vieillissant de RER. Ce projet n’a de sens, selon nous, que s’il s’intègre parfaitement au réseau existant.

C’est pourquoi j’ai souhaité, avec nombre de mes collègues de l’Île-de-France, en particulier de l’est parisien, qu’il soit précisé dans le texte que le financement du nouveau réseau par l’État sera indépendant de sa contribution aux contrats de projets conclus avec la région d’Île-de-France, pour permettre la création, l’amélioration et la modernisation des réseaux existants de transport public. Ces mesures doivent permettre de renforcer en priorité la qualité du service rendu par les réseaux de transport public, en particulier dans le cœur de l’agglomération parisienne, en termes de sécurité, de fréquence et de ponctualité.

En outre, je note avec une grande satisfaction que le projet du Gouvernement comporte la desserte de l’aéroport d’Orly par le métro automatique. Nous devons nous en réjouir ! Rappelons qu’aucune ligne directe de transport en commun ne relie actuellement à la capitale cet aéroport situé à sept kilomètres de Paris, qui accueille vingt millions de passagers par an. Au mieux, c’est une anomalie ; au pire, un scandale !

La zone Orly-Rungis jouxte le plateau de Saclay, qui, avec ses très nombreux chercheurs et ses entreprises grandes et moyennes, est une pièce très importante du dispositif. L’ensemble Orly-Rungis-Saclay compte 90 000 emplois et constitue l’équivalent, à l’est de Paris, de ce que représente La Défense à l’ouest. Ce fait est trop rarement relevé pour que je ne le souligne pas ici !

L’un des mérites du Grand Paris et de ce nouveau réseau de transport sera donc de rééquilibrer l’est et l’ouest de la région en termes de création d’emplois et d’activités. Pour mener à bien ce projet ambitieux, la Société du Grand Paris disposera des moyens d’agir et pourra avoir recours à des procédures simplifiées, mais en passant des contrats de développement avec les collectivités, dans le cadre d’un partenariat gagnant-gagnant. Un tel projet ne peut en effet réussir qu’avec les maires et les élus locaux, et non pas contre eux.

Mme Nicole Bricq. Nous sommes bien d’accord !

M. Christian Cambon. Nous sommes convaincus, pour nombre d’entre nous, que le contrat de développement territorial est une innovation juridique majeure, qui permettra un dialogue équilibré entre les maires et l’État, dans lequel les maires auront le dernier mot s’agissant de l’urbanisation de leur territoire, ce qui est somme toute la moindre des choses ! Ils bénéficient en effet de la confiance de la population, et savent mieux que personne ce qui est supportable pour celle-ci et ce qui ne l’est pas. On ne peut donc pas parler de violation de la démocratie locale ou de recentralisation rampante.

Un autre point nous semble d’une importance majeure : le maillage territorial. Sur notre initiative, le projet de loi a confié à l’établissement public Société du Grand Paris la compétence de veiller au développement, autour des futures gares du métro automatique, d’un réseau de transport de surface s’appuyant essentiellement sur les lignes d’autobus pour mettre en place un maillage particulièrement fin de l’ensemble du territoire, sachant qu’il y aura désormais à la fois des radiales et des rocades. Il était en effet absurde de construire des gares sans prévoir un maillage de l’offre de transport de surface.

Nous avions donc une triple préoccupation : conjuguer le nouvel investissement avec ceux qui sont indispensables à l’amélioration du réseau actuel, assurer le développement de l’est parisien et veiller au maillage territorial autour des nouvelles gares. Nous constatons avec satisfaction que le présent projet de loi la prend en compte.

En conclusion, je voudrais à mon tour féliciter M. Jean-Pierre Fourcade de l’excellence et de l’ampleur du travail accompli. Ayant eu l’honneur de travailler sous son autorité pendant de longues années, je n’en attendais pas moins de lui. Je souhaite lui rendre un hommage appuyé. De la même manière, les apports de la commission spéciale, présidée avec une grande compétence par Jean-Paul Emorine, sont considérables. Ils ont permis d’améliorer très substantiellement le texte.

Enfin, le compromis permettant de prendre en compte à la fois le projet de l’État et le projet Arc Express de la région constitue un signal fort. Nous espérons tous, dans cette enceinte, que l’ensemble des acteurs concernés pourront se réunir autour d’un projet ambitieux de développement de la région d’Île-de-France.

Mes chers collègues, il est plus que temps de passer à l’action. Un trop grand nombre d’années se sont écoulées depuis la mise en place des lignes du RER, d’Eole, puis de Meteor. Nos concitoyens franciliens, fatigués par leurs conditions de transport, et au-delà le pays tout entier, ont besoin que notre région dispose d’un équipement à la hauteur de celui des autres grandes capitales du monde.

Monsieur le secrétaire d'État, nous soutenons votre projet avec espoir et conviction. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Monsieur le secrétaire d'État, au terme de nos travaux sur le projet de loi relatif au Grand Paris, force est de constater que votre vision du plateau de Saclay reste inchangée. Votre projet ne prend pas en compte les réalités locales, les besoins des populations, les propositions formulées par les élus. La plupart des amendements que nous avons déposés ont été rejetés.

De nombreuses inquiétudes persistent donc sur l’avenir du plateau de Saclay, alors que, depuis maintenant une quarantaine d’années, ce dernier fait l’objet de l’attention des pouvoirs publics, qui souhaitent en faire un cluster scientifique.

Plusieurs grandes écoles s’y sont implantées, rejointes par l’université Paris-Sud 11, des organismes nationaux de recherche et des entreprises appartenant à de grands groupes. Le projet pour le plateau de Saclay, érigé en technopole, ne traduit cependant pas l’ambition initiale de favoriser les synergies et les coopérations entre les diverses entités déjà installées.

Pourtant, des dispositifs de soutien aux différentes activités ont été superposés, notamment depuis les années 2000 : réseaux thématiques de recherche avancée, pôles de recherche et d’enseignement supérieur, opération d’intérêt national, plan Campus et, plus récemment, le grand emprunt.

Aujourd’hui, le Gouvernement propose d’ajouter à ces dispositifs un établissement public aux compétences très étendues, dépassant le cadre traditionnel de celles d’un aménageur. En effet, il aura pour mission de mettre en synergie les différents acteurs du plateau selon une vision économique, y compris en intervenant dans les choix d’orientation scientifique et de recherche.

Cet intérêt des pouvoirs publics pour le plateau de Saclay est compréhensible, eu égard au potentiel unique de celui-ci. Cependant, le projet du Gouvernement est-il de nature à répondre aux forts enjeux, non seulement scientifiques et économiques, mais également urbains, sociaux ou environnementaux, liés à l’aménagement du plateau ? Nombre d’élus, de chercheurs, d’enseignants, de salariés, d’associations et de citoyens pensent le contraire.

S’agissant tout d’abord des enjeux scientifiques, technologiques et économiques, la priorité consiste selon nous à repenser la coopération dans ces domaines en associant les différents acteurs concernés. Or le Gouvernement, s’appuyant sur le modèle de la Silicon Valley, qui nous semble aujourd’hui dépassé, de concentration d’établissements, propose que cette coopération soit pilotée par un établissement public, de façon technocratique. Le modèle et la méthode retenus s’avèrent à nos yeux inadaptés aussi bien au territoire concerné qu’à notre époque, caractérisée par des moyens de communication modernes et rapides.

L’objectif du Gouvernement n’est donc pas celui, affiché, de créer des synergies entre les différents acteurs du plateau. Il s’agit, en fait, de créer un pôle de formation des élites et de compétitivité économique, avec, en toile de fond, la déconstruction du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Ce mouvement est déjà amorcé, notamment avec le projet de déménagement des laboratoires de recherche de l’université Paris-Sud 11 sur le plateau, les étudiants des premiers cycles restant eux dans la vallée, où les locaux sont vétustes. Ces laboratoires de recherche rejoindront ainsi les grandes écoles, regroupées par ailleurs dans la structure ParisTech. Mais surtout, ils seront à disposition des grands groupes et des entreprises privées et, de fait, soumis aux orientations d’un établissement public, subordonnées à des projets à court terme et à visée purement économique. L’université se trouvera, quant à elle, cantonnée à un rôle subalterne de formation de masse, et le lien entre enseignement supérieur et recherche sera définitivement rompu.

Ce projet inquiète non seulement les enseignants-chercheurs de l’université Paris-Sud 11, qui y voient la fin de leur université, mais également les salariés des entreprises industrielles, déjà victimes de délocalisations dans le secteur de la recherche et du développement.

Par la suite, le plateau de Saclay, pôle de compétitivité, accueillera tout naturellement une gare du futur métro automatique. Mais ce choix correspond-il aux enjeux urbains, sociaux, environnementaux ou relatifs aux transports ? Là encore, la réponse ne peut être que négative. Tout indique que l’urbanisation du plateau sera « pensée » à partir de cette gare. Dans ces conditions, elle dépendra inévitablement d’intérêts marchands, au lieu d’être articulée autour d’un schéma territorial cohérent prenant en compte l’ensemble des besoins des populations habitant et travaillant sur le plateau.

Ces décisions s’imposeront aux élus et aux populations. Elles favoriseront la spéculation immobilière dans les zones aménagées autour de la nouvelle gare, cette spéculation étant d’ailleurs l’une des sources de financement que vous envisagez, monsieur le secrétaire d'État, pour la desserte du plateau de Saclay comme pour l’ensemble de votre projet.

Les conséquences de la création de ce métro automatique seront lourdes. Non seulement la spéculation foncière qu’engendrera sa réalisation rendra inaccessibles aux familles modestes les logements autour des gares, mais elle reportera de surcroît, voire neutralisera, les projets d’amélioration des réseaux de transport existants, alors qu’il manque 5 milliards d’euros pour moderniser les lignes B et C du RER, aujourd’hui saturées, et qu’il faudrait renforcer les dessertes locales du plateau.

Il est vrai, le plateau de Saclay dispose d’un fort potentiel dans les domaines de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation, qui ne peut cependant être valorisé si la recherche est soumise à des intérêts financiers privés. Les enjeux sont multiples et interdépendants. La coopération scientifique et économique ne peut être repensée sans prise en compte des questions d’urbanisation, des moyens de transports à disposition des habitants et des salariés et de la dimension environnementale propre à ce territoire. Une urbanisation non maîtrisée menacera la richesse agricole et le réseau hydrographique du plateau. L’adoption de quelques amendements relatifs à ces sujets par le Sénat, dont deux avaient été déposés par mon groupe, ne suffit pas à nous rassurer définitivement sur l’avenir environnemental du plateau.

Monsieur le secrétaire d'État, pour toutes ces raisons, nous ne pouvons approuver votre projet relatif au plateau de Saclay. Votre vision nous semble dépassée. Le mode de gouvernance proposé assure la prédominance de l’État, en dépossédant l’ensemble des partenaires locaux : élus, habitants, chercheurs, salariés, syndicats ou associations. Ce projet ignore les besoins actuels des populations qui vivent et travaillent sur ce territoire. Les membres du groupe CRC-SPG s’y opposent donc sans ambiguïté et voteront contre les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les déséquilibres sociaux et territoriaux constituent de réels freins à la croissance de la région d’Île-de-France. Le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire ne permet pas de penser qu’ils seront facilement résorbés.

Pourtant, depuis plusieurs années, les collectivités territoriales franciliennes sont porteuses de projets structurants pour leurs territoires en termes d’emploi, de logement et de transport. C’est le cas, en particulier, du département du Val-de-Marne, dont l’ensemble des élus, toutes tendances politiques confondues, soutiennent depuis 2006 le projet de création de la rocade de métro automatique Orbival, ayant vocation à s’insérer dans le projet Arc Express de la région d’Île-de-France.

La réalisation du projet Orbival est indispensable pour offrir des conditions de déplacement acceptables aux Val-de-Marnais, ainsi que pour mettre fin à la saturation de l’ensemble des lignes radiales de transport lourd de la région d’Île-de-France. Elle est également incontournable pour assurer des liaisons avec les autres banlieues, tant de petite que de grande couronne.

Un consensus politique très fort se dégage dans le Val-de-Marne autour du projet Orbival, puisque tous les élus et maires concernés en sont parties prenantes. Il a recueilli l’approbation de très nombreux acteurs économiques, associatifs et du monde universitaire et de la recherche. Il bénéficie également d’un très fort soutien populaire. La Ville de Paris, le conseil général de la Seine-Saint-Denis et plusieurs villes d’autres départements, tels que les Hauts-de-Seine, adhèrent aussi à ce projet qui, rappelons-le, fait partie intégrante du projet Arc Express porté par la région d’Île-de-France.

Grâce à l’inscription de crédits au contrat de projets État-région 2007-2013 pour la liaison Arc Express, ce projet de rocade a débouché sur l’adoption à l’unanimité par le conseil d’administration du STIF du dossier de saisine de la Commission nationale du débat public, la CNDP. Cette dernière a validé, lors de sa séance du 7 avril 2010, le dossier du débat réalisé par le STIF, qu’elle a considéré comme suffisamment complet pour que le débat public soit engagé.

Ces quelques rappels chronologiques montrent à quel point toutes les conditions étaient réunies pour l’organisation dans les meilleurs délais possibles du débat public sur les liaisons Arc Express et Orbival.

Dans ce contexte, l’adoption par la majorité sénatoriale d’un amendement déposé par M. Pozzo di Borgo lors de l’examen du projet de loi relatif au Grand Paris fut vécue par de nombreux élus du Val-de-Marne comme un mauvais coup asséné au projet Orbival. Intégré au projet Arc Express, Orbival devenait la victime collatérale d’une attaque frontale portée par la majorité sénatoriale à la région d’Île-de-France et à son projet Arc Express. Ce vote revenait à une annulation du débat public sur les projets Arc Express et Orbival et débouchait sur de longs mois de retard dans la perspective de la construction de la rocade de métro automatique en proche couronne. Or l’expérience prouve que les retards pris en matière d’infrastructures de transport sont difficilement rattrapables.

De plus, contrairement au réseau du Grand Paris, ces deux projets prévoient une liaison fine et rapide entre les villes de la banlieue parisienne, répondant ainsi à un besoin urgent et constituant un puissant outil de rééquilibrage entre l’est et l’ouest francilien. La distance entre deux stations pourra faire l’objet d’un débat intéressant.

Lors de la réunion de la commission mixte paritaire, nous avons proposé, au nom du groupe socialiste du Sénat, de supprimer la disposition intégrée dans le projet de loi du fait de l’adoption de l’amendement précité. Cela nous semblait indispensable afin de ne pas retarder le débat public sur les projets Arc Express et Orbival. Les Franciliens n’admettraient pas que de nouveaux retards puissent être pris du fait d’oppositions stériles et incompréhensibles à leurs yeux. Comment expliquer aux usagers qui, quotidiennement, sont confrontés à des difficultés de déplacement, que ce débat public soit reporté, alors que leurs besoins en matière de transports de banlieue à banlieue sont si grands et leurs attentes si fortes ?

Afin de réduire les difficultés qui auraient pu apparaître lors du débat public sur le réseau de transport du Grand Paris – on n’aurait pu s’empêcher de le comparer au projet Arc Express –, notre collègue député M. Albarello et M. Fourcade ont suggéré que les deux projets soient présentés au cours du même débat public.

Cette solution permettrait la poursuite de la procédure de débat public sur le projet Arc Express. L’expertise technique sur le réseau de transport en double boucle du Grand Paris est loin d’être achevée, alors que le débat public sur le projet Arc Express peut être lancé dès à présent. Vous liez les destins des deux projets en soumettant ces derniers à un débat public commun, alors même que vous reconnaissez l’existence d’une différence de nature entre eux. Il paraît dès lors indispensable que les deux projets soient présentés à égalité dans le cadre du débat public commun et que les points de rapprochement possibles entre le projet Arc Express et le réseau de transport du Grand Paris soient recherchés.

En effet, on ne voit pas pourquoi on présenterait les deux projets dans le cadre d’un même débat public sans avoir la volonté de les rapprocher.

Ainsi, le métro automatique en double boucle du Grand Paris pourra bénéficier des projets Orbival et Arc Express, ainsi que de l’ensemble du plan de mobilisation pour les transports en Île-de-France.

Les projets Orbival et Arc Express et le plan de mobilisation pour les transports en Île-de-France ont en effet été le fruit d’une longue concertation avec tous les acteurs concernés, comme vient de le rappeler M. Bernard Vera. C’est par cette méthode que sera respecté le travail des élus locaux, en lien direct avec les besoins des populations. Le syndicat mixte d’études Paris-Métropole, mis en place par M. Bertrand Delanoë et aujourd’hui présidé par notre collègue député Jean-Yves Le Bouillonnec, s’inscrit précisément dans cette logique de concertation et de partenariat entre les collectivités de la métropole francilienne. Recenser les besoins et mutualiser les investissements pour corriger les inégalités sociales et territoriales en matière de logement, de transport, d’emploi et d’environnement, voilà la méthode que nous souhaitons voir appliquer pour un projet aussi vaste et structurant que celui de l’émergence d’une métropole post-Kyoto !

Nous espérons qu’à l’issue de ce processus parlementaire, la priorité du Gouvernement sera la nécessaire correction des inégalités, encore prégnantes, entre l’est et l’ouest franciliens.

L’État crée, sur le plateau de Saclay, un pôle dédié à la recherche et à l’innovation. Le projet est louable, mais on assiste de nouveau à une concentration des moyens sur quelques sites privilégiés, ignorant toute forme de partenariat, notamment avec l’université Paris-Est.

Au final, ce texte ne permet pas de réduire suffisamment les inégalités entre l’Est et l’Ouest. C’est d’autant plus regrettable que cette question est précisément au centre des préoccupations du SDRIF, élaboré par la région d’Île-de-France. Le Gouvernement doit cesser d’en bloquer la mise en œuvre et transmettre le SDRIF au Conseil d’État.

À l’issue de nos travaux, nous ne pouvons qu’éprouver une profonde déception. Il était question de concevoir une ville-monde, une ville à vivre, une ville-prototype pour les générations futures, permettant de concilier les impératifs environnementaux avec les nécessités liées au travail et aux loisirs de ses habitants.

Or l’objet du texte issu des travaux de la CMP se résume pour l’essentiel à la construction d’un métro automatique souterrain en double boucle et à la création d’un établissement public sur le plateau de Saclay. Il s’agit d’un projet de loi autoritaire et recentralisateur, qui intervient dans un contexte de défiance, voire d’hostilité, de l’État à l’égard des collectivités territoriales, des communes, des départements et surtout de la région d’Île-de-France.

Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez annoncé, lors des débats qui se sont tenus dans cet hémicycle en avril dernier, vouloir commencer les travaux de la double boucle de métro automatique par le Sud-Est, en tenant ainsi compte du travail déjà effectué par le Val-de-Marne et en permettant, par là même, d’inclure le développement de Marne-la-Vallée dans la boucle reliant, par le Sud-Est, Orly à Roissy.

Je ne doute pas que les futurs responsables de la Société du Grand Paris visiteront, à compter du 1er juin prochain, au Mac Val, le musée d’art contemporain du Val-de-Marne, l’exposition, organisée par le département, intitulée « Orbival, un métro pour la banlieue », où vont s’exprimer sept équipes d’architectes en imaginant la station de métro en Val-de-Marne. Ils pourront ainsi s’imprégner davantage des réalités territoriales auxquelles les élus locaux sont confrontés.

La volonté de rapprochement des deux projets de transport dans le cadre d’un débat public commun est sûrement un des éléments de la prise en compte de l’expertise des élus sur le terrain et des besoins des populations.

J’ai pris bonne note de la volonté de notre rapporteur de mettre en place le plus rapidement possible le débat public, dans un esprit de coopération, ainsi que de votre engagement, monsieur le secrétaire d’État, concernant le calendrier. J’espère que vous continuerez dans cette voie, en particulier au travers de l’élaboration des contrats de développement territorial. Ainsi, les banlieues Est et Nord pourront donner une traduction concrète à leur volonté de réussir leur développement, pour le bien de leurs habitants et de l’Île-de-France. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)