Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Mme Odette Herviaux. À ce moment du débat, je souhaiterais simplement attirer l’attention sur la vigilance qui devrait être la nôtre.

Je suis tout à fait favorable à ce que l’on puisse mettre en place un groupe de travail qui déposerait un rapport allant au fond des choses, rapport qui serait, en l’occurrence, un rapport parlementaire.

Bien sûr, il serait normal de permettre aux jeunes de s’intégrer plus facilement dans les groupements et de devenir de nouveaux associés. Il serait normal de ne pas leur imposer un apport de terres supplémentaire, à condition, toutefois, de limiter les possibilités de dévoyer le procédé.

Je pense en effet à des cas particuliers de personnes préparant leur retraite ou souhaitant mettre un terme à leur exploitation. Vous connaissez les problèmes de voisinage : on veut bien céder sa terre, mais pas à n’importe qui. Il y a aussi les problèmes avec les SAFER locales... Si bien que, parfois, ces personnes reviennent sur leur décision, soit de location soit de vente, et restent des associés quasiment factices. Ainsi, certaines exploitations deviennent de plus en plus vastes alors que les jeunes éprouvent des difficultés toujours plus grandes pour entrer dans les groupements. Il faudrait donc faire un travail d’analyse très fin et dénoncer ces pratiques qui deviennent de plus en plus courantes.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. L’adoption de cet amendement défendu par notre collègue Jean-Pierre Sueur serait fondamentale pour l’observation du phénomène.

Nous rencontrons tous aujourd’hui des paysans qui nous disent : « Je ne pousse pas mon fils à faire ce métier ». On en connaît les raisons : la crise sans précédent que traverse l’agriculture, la baisse des revenus de 50 %, la complexité de la paperasse. Ainsi, je vois tous les jours des paysans motivés, qui n’incitent pas leurs enfants à poursuivre.

Jean-Pierre Sueur évoquait tout à l'heure une baisse de 20 % des installations : cela n’a rien d’étonnant dans un tel contexte de crise. Dans de petits départements comme le mien, être agriculteur ne suffit plus pour vivre. En effet, il faut y ajouter une activité accessoire : avoir un gîte, une table d’hôte, faire de la diversification, de l’agro-tourisme…

Par ailleurs, et je serai bref car cela a déjà été évoqué, on assiste actuellement non pas à une transmission des exploitations mais à une augmentation de leur surface. Comme le rapporteur, je voudrais rendre hommage aux Jeunes Agriculteurs qui font un énorme travail pour l’installation dans tous les départements.

Toutefois, il faut absolument qu’ils se sentent soutenus. Alors, un groupe de travail, pourquoi pas ? Que chaque année le Parlement puisse se saisir de cette question serait une bonne chose. Que ce soit par le biais d’un rapport ou d’une autre façon peu importe, ce qui compte c’est d’avoir le bilan de l’installation, qui est le poumon de notre agriculture.

Si l’on s’aperçoit qu’il y a de moins en moins de jeunes dans les formations agricoles et qu’il y a de moins en moins d’installations, alors il faudra sonner l’alarme et ne pas attendre pour agir que l’agriculture ne puisse plus se régénérer.

Il me semble que parler d’installation est essentiel et que, corollairement, avoir une vision claire des conditions dans lesquelles les installations se déroulent est indispensable.

M. le rapporteur a raison : le syndicalisme agricole, les chambres d’agriculture et les délégués dans les SAFER doivent agir. Mais on sait très bien que, quelle que soit la qualité de celles et ceux qui y participent, il se produit toujours un décalage avec ce que l’on souhaite.

Enfin, qu’on le veuille ou non, la jeunesse est l’avenir de notre pays, à plus forte raison pour l’agriculture. Si ces jeunes ne sont plus motivés pour embrasser ce beau métier, parce qu’il y a trop d’obstacles et parce que l’on ne peut plus en vivre, il faut redresser la barre. Il faut donc trouver un terrain d’entente sur ce sujet, et je pense que la Haute Assemblée en est capable.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.

M. Gérard Le Cam. Groupe de travail ou rapport, il faudra qu’il porte sur l’intégralité des formes d’installation au-delà de l’aspect sociétaire. Dans ce cas, je serai prêt à y adhérer, mais cela à deux conditions qui concernent le syndicat majoritaire. En effet, c’est lui qui verrouille l’installation des jeunes ne disposant pas des diplômes requis ; cela doit changer. C’est également lui qui promeut la politique d’agrandissement systématique dans les structures de décision.

Il faut donc mettre en place une nouvelle politique de répartition du foncier. Sinon, on parlera longtemps dans le vide. Si l’on veut vraiment certaines choses, il faut aussi le dire, c’est pourquoi je m’adresse au syndicat majoritaire, qui nous entendra certainement à travers ce débat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 409.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Madame la présidente, j’ai été interpellé par M. le ministre, il y a quarante-huit heures, au sujet des quatre AOC dont je parlais dans l’amendement que j’ai défendu pour faire inscrire dans la loi que les vins effervescents pouvaient être le fruit de la méthode ancestrale.

Mon amendement a été rejeté, mais M. le ministre m’a indiqué qu’il souhaitait mieux connaître la Clairette de Die. Je vais donc lui remettre un coffret de trois bouteilles de ce vin effervescent élaboré selon la « méthode ancestrale » ! (Exclamations amusées.) Vous constaterez, monsieur le ministre, que cela vaut peut-être la peine que cet amendement soit repris à l’Assemblée nationale.

Je n’ai pas pu faire de même pour l’ensemble de nos collègues, car j’ai été pris de court ! Mais je vous promets d’y penser, mes chers collègues… (Sourires.)

Organisation de la discussion

Articles additionnels après l’article 12 A
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Organisation de la discussion (interruption de la discussion)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. En accord avec les groupes politiques, je propose, pour faciliter le débat, de disjoindre l’examen des amendements nos 563 rectifié et 178 de celle des quarante amendements en discussion commune portant sur l’article 12.

Mme la présidente. Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Organisation de la discussion (début)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Discussion générale

3

Décisions du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 28 mai 2010, deux décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité (n° 2010-1 QPC et 2010-3 QPC).

Acte est donné de ces communications.

4

Organisation de la discussion (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Articles additionnels après l'article 12 A

Modernisation de l'agriculture et de la pêche

Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

(Texte de la commission)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 12 A.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Article 12 B (Nouveau)

Articles additionnels après l'article 12 A (suite)

M. le président. L'amendement n° 411, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 12 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur les installations agricoles et notamment sur les installations non aidées dans la perspective d'un aménagement du dispositif national d'aide à l'installation en agriculture.

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Je connais, bien sûr, le peu de goût de M. le rapporteur pour les rapports (Sourires.), mais le dépôt de cet amendement d’appel était pour nous le seul moyen – notre collègue Jean-Pierre Sueur s’en est déjà expliqué tout à l'heure – de susciter un débat sur les installations non aidées puisque les amendements que nous avions mis au point en accord avec les jeunes agriculteurs qui cherchent des solutions propres à faciliter l’installation n’ont pas résisté au couperet de l’article 40 de la Constitution.

Sans revenir sur ce que nous avons dit précédemment, en particulier sur la demi-surface minimum d’installation, je crois qu’il serait particulièrement intéressant de savoir si c’est la surface ou le projet qui assure la pérennité d’une exploitation.

Le renouvellement des générations est un enjeu crucial pour l’avenir des cultures et la vitalité de nos territoires. Malheureusement, les installations ne sont aujourd’hui plus suffisantes pour compenser les départs à la retraite et les cessations d’activité.

Dans nombre de régions et de départements, les deux tiers des installations agricoles sont encore des installations non aidées, qui ne bénéficient donc pas de la dotation aux jeunes agriculteurs. Cette situation ne nous paraît pas vraiment normale, car la plupart des candidats à l’installation devraient, selon nous, être accompagnés.

Nous aimerions, d’une part, comprendre pourquoi la majorité des candidats à l’installation est écartée du dispositif national et, d’autre part, surtout, savoir ce que deviennent leurs exploitations une fois qu’ils sont installés malgré tout. Il serait en effet instructif de savoir si telle installation ne méritait pas d’être aidée parce que l’exploitation était dès le départ vouée à l’échec économique ou bien si l’exploitation, en dépit de l’absence d’aide, perdure et a trouvé sa place.

Une telle analyse devrait conduire à un aménagement du dispositif d’aide à l’installation et des différents critères d’éligibilité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Nous avons déjà eu l’occasion d’aborder cette question ce matin, lors de l’examen de l’amendement présenté par M. Sueur. J’ai alors proposé la création au Sénat d’un groupe de travail sur ce sujet, qui pourrait également accueillir des représentants des jeunes agriculteurs.

Dans ces conditions, je prie Odette Herviaux, qui ne manque jamais de rappeler que je ne suis pas favorable aux rapports, de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Je prie également Mme Herviaux de bien vouloir retirer son amendement.

J’ajoute que le ministère de l’agriculture est particulièrement bien informé sur les installations non aidées. Sur les 10 000 installations de ce type qui sont comptabilisées chaque année, 20 % sont des transferts entre époux, ce qui explique qu’aucune aide ne soit accordée, 40 % sont le fait de personnes âgées de plus de quarante ans et, à ce titre, non éligibles aux aides à l’installation – nous avons évoqué cette question ce matin avec M. Muller –, enfin, un peu moins de la moitié des 40 % nouveaux installés restants n’ont pas la qualification professionnelle requise, et nous retrouvons là le débat sur l’acquisition des capacités professionnelles et diplômes nécessaires à l’installation.

M. le président. Madame Herviaux, l'amendement n° 411 est-il maintenu ?

Mme Odette Herviaux. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 411 est retiré.

L'amendement n° 629 rectifié, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après l'article 12 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le a) de l'article L. 312-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« a) De la valeur indicative des fermages dans la région naturelle considérée en fonction de la nature de la destination du sol, prairies permanentes et terres labourables ; ».

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Cet amendement porte sur l’épineuse question des prix des terres agricoles, lesquels peuvent constituer un obstacle à l’installation.

Un arrêté du ministre de l’agriculture en date du 20 novembre 2008, paru au Journal officiel le 5 février 2009, précise la valeur des terres décidée dans l’attente de la publication du répertoire de la valeur des terres agricoles. Cet arrêté définit la valeur vénale des deux catégories de référence : les terres labourables et les prairies naturelles. Il décline par département et par région naturelle les prix dominants, les minima et les maxima. Ce texte sert de référence dans le cadre du dispositif de révision des prix SAFER.

Il nous paraît plus juste de fixer la valeur vénale en considérant la valeur d’usage du sol, et donc son rendement économique. Ainsi estimons-nous que les éléments de fixation de la valeur vénale doivent être révisés afin d’intégrer comme indicateurs de base le nombre moyen d’années de carrière d’un agriculteur et la valeur du fermage selon les barèmes départementaux figurant dans les arrêtés préfectoraux.

Ma proposition est donc la suivante : la valeur d’une terre agricole serait estimée en multipliant le nombre moyen d’années de carrière d’un paysan par la valeur locative, le statut du fermage servant de barème. Ainsi, dans l’hypothèse où le nombre d’années de carrière d’un paysan serait de trente ans et le fermage, de 100 euros l’hectare par an, la valeur vénale de la terre s’établirait à 3 000 euros l’hectare.

Cette proposition me paraît doublement intéressante.

En premier lieu, elle permet de résoudre en partie le problème de l’installation. Le prix du foncier est si élevé pour un jeune qui s’installe qu’il peut limiter ses investissements dans le capital d’exploitation. Il semble donc judicieux d’encadrer le prix des terres agricoles et de prendre des critères objectifs, en l’occurrence la valeur économique des terres.

En second lieu, puisque mon amendement visant à reconnaître le statut d’exploitant sur la base du nombre d’heures travaillées a été rejeté ce matin et que la surface demeure donc le critère de référence, il convient, pour faciliter l’installation, de faire en sorte que les prix des terres agricoles ne dérivent pas.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. L’article L. 312-3 du code rural et de la pêche maritime prévoit la tenue dans chaque département d’un répertoire de la valeur des terres agricoles. Trois notions sont analysées : la valeur vénale, la valeur locative et la valeur de rendement. La valeur de rendement des terres agricoles est calculée par région naturelle, en fonction notamment du revenu d’exploitation.

Cet amendement vise à remplacer le revenu d’exploitation par la valeur des fermages. Or la valeur des fermages permet de calculer la valeur locative et n’a rien à voir avec le rendement.

Cet amendement risquant de semer la confusion, j’y suis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. J’y suis également défavorable. Nous ne souhaitons pas non plus faire de lien entre la valeur des terres et l’usage qui en est fait. Ce sont là deux choses distinctes.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Nous avons à plusieurs reprises déjà abordé le thème de la sacralisation des terres agricoles : à l’occasion du Grenelle, lors de l’examen du projet de loi de finances et des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ». Chaque fois, il nous a été dit que nous reviendrions sur ce sujet lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. N’est-ce donc pas enfin le bon moment pour discuter de la valeur des terres agricoles ?

Le problème de l’installation est évidemment lié à la valorisation des terres. Alors que de jeunes agriculteurs sont expropriés pour permettre à d’hypothétiques projets industriels de voir le jour, il me semble que nous devrions traiter maintenant cette question de la sacralisation des terres agricoles.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 629 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 614, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après l'article 12 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 330-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° À la première phrase, les mots : « dix-huit mois » sont remplacés par les mots : « trois ans » ;

2° À la deuxième phrase, les mots : « peuvent être » sont remplacés par le mot : « sont ».

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Cet amendement vise à l’amélioration de l’information sur les terres disponibles.

L’article L. 330-2 du code rural et de la pêche maritime prévoit l’obligation pour les exploitants, dix-huit mois au moins avant leur départ en retraite, de faire connaître à l’autorité administrative leur intention de cesser leur exploitation. Les exploitants doivent décrire dans la déclaration d’intention de cessation d’activité agricole, la DICAA, les caractéristiques de leur exploitation et indiquer si elle va devenir disponible. La DICAA peut notamment être utilisée pour porter l’exploitation à la connaissance d’éventuels candidats dans les répertoires départs-installations.

Toutes les organisations agricoles admettent qu’un projet d’installation est long à mettre en œuvre. Le délai de dix-huit mois actuellement retenu dans la loi est trop court, car le repérage du ou des repreneurs, les discussions et les arbitrages nécessaires – je pense notamment aux échanges avec les propriétaires –, le parcours d’installation – par exemple, les formations éventuelles – nécessitent beaucoup plus de temps.

Il est impératif de faire connaître au public cette disponibilité afin de se donner les moyens de toucher le plus grand nombre de candidats possible, surtout au vu des difficultés qu’il faut aujourd'hui surmonter pour s’installer.

M. le président. L'amendement n° 549 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Fortassin, Plancade, Tropeano, Alfonsi et Baylet, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou et Vall, est ainsi libellé :

Après l'article 12 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 330-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° À la première phrase, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « vingt-quatre ».

2° À la deuxième phrase, les mots : « peuvent être » sont remplacés par le mot : « sont ».

La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Le renouvellement des générations est un enjeu crucial pour l’avenir de l’agriculture et la vitalité de nos territoires.

N’oublions jamais qu’il s’agit là d’une des rares activités non délocalisables et qu’elle induit des emplois dans beaucoup d’autres secteurs : matériel agricole, transports, commerce et artisanat, industries agroalimentaires, distribution, services, etc.

L’agriculture est donc un prérequis pour des territoires vivants et dynamiques.

Or, nous le savons tous, les nouvelles installations ne sont pas suffisantes pour compenser les départs à la retraite et les cessations d’activité. Quel jeune peut avoir envie de travailler tous les jours de l’année pour percevoir à peine l’équivalent du RMI, surtout s’il doit s’acquitter d’une cotisation minimale pour bénéficier de l’assurance maladie ? Et je ne parle pas de la perspective d’une retraite qui n’atteint même pas le minimum vieillesse servi aux autres ! On pourrait d’ailleurs s’étonner qu’un projet de loi de modernisation de l’agriculture ne contienne aucune disposition sur ce sujet.

Cela étant, il faut savoir gré à la commission de l’économie d’avoir introduit ce titre II bis, dont le premier article, l’article 12 A, vise à encourager l’installation sous forme sociétaire et le second, l’article 12 B, a pour objet de formaliser une procédure d’enregistrement de tous les projets d’installation. Cette contribution de la commission constitue certes un progrès, mais il reste modeste. Il est nécessaire de faire émerger de nouvelles candidatures à l’installation et de favoriser la mise en relation entre cédants et repreneurs.

À cette fin, notre amendement prévoit de porter de dix-huit à vingt-quatre mois au moins le délai dont disposent, avant leur départ en retraite, les exploitants pour faire connaître à l’autorité administrative leur intention de cesser leur exploitation et indiquer si celle-ci deviendra disponible.

En effet, la recherche d’un repreneur et la mise en œuvre d’un projet d’installation nécessitent une période plus longue que celle qui est prévue.

Par ailleurs, afin de susciter de nouvelles candidatures, il est impératif que ces informations soient portées à la connaissance du public. Or l’article L. 330-2 du code rural et de la pêche maritime en fait non pas une obligation, mais une faculté, ce qui est regrettable.

M. le président. L'amendement n° 165 rectifié, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 12 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 330-2 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « peuvent être portées » sont remplacés par les mots : « sont portées ».

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Chaque exploitant agricole qui part en retraite doit en informer l’autorité administrative, lui transmettre les caractéristiques de son exploitation et lui indiquer si cette dernière sera ou non disponible. Le futur retraité peut alors décider de rendre ces informations publiques. Cependant, trop souvent, il ne le fait pas.

Notre amendement vise simplement à rendre systématique la diffusion et la publicité de ces informations.

Les fermetures d’exploitations se multiplient au point qu’aujourd’hui un exploitant agricole sur six envisage de mettre la clé sous la porte dans l’année à venir. Pourtant, pour chaque exploitation agricole qui ferme, ce sont non seulement des emplois, mais également des savoir-faire qui sont perdus. C’est une part essentielle de la vie de nos territoires qui risque de disparaître.

Nous l’avons souvent répété, il y a urgence à favoriser l’installation des jeunes agriculteurs, urgence à organiser les rencontres entre anciens et nouveaux, urgence à rétablir la chaîne de transmission entre les générations.

Or, de toute évidence, il est impossible qu’une exploitation soit reprise dans de bonnes conditions si personne ne sait suffisamment à l’avance qu’elle est disponible. Il n’y a pas de passage de relais sans communication et le repreneur ne peut pas anticiper.

Il est également primordial de favoriser l’installation et non l’agrandissement des exploitations existantes. Or, souvent, les voisins du cédant sont les premiers informés de la vente de l’exploitation, ce qui favorise l’agrandissement.

Mes chers collègues, nous pensons qu’il s’agit là d’une proposition de bon sens et que, en ces temps de rigueur budgétaire, elle offre surtout l’immense avantage de ne pas coûter un euro à la collectivité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Les exploitants agricoles doivent signaler à la Mutualité sociale agricole leur intention de partir à la retraite dix-huit mois avant leur cessation d’activité. Allonger ce délai de prévenance pour le porter à trois ans me paraît excessif.

Par ailleurs, il convient que l’intention de partir à la retraite ne soit communiquée qu’aux personnes ayant un projet d’installation et non à l’ensemble de la population.

J’ajoute que le téléphone fonctionne très bien à la campagne ! (Sourires.)

Mme Nathalie Goulet. Pas les téléphones portables !

Mme Odette Herviaux. À cet égard, il y a des zones mieux loties que d’autres !

M. Gérard César, rapporteur. Le bouche à oreille fonctionne encore mieux ! (Nouveaux sourires.)

Un délai de dix-huit mois est suffisant. Il me paraît donc inutile de le modifier.

Au total, il serait trop lourd et finalement inutile d’obliger les chambres d’agriculture à communiquer au public l’intégralité des cessations d’exploitation agricole.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission : il ne faut pas alourdir exagérément les procédures et un délai de dix-huit mois est suffisant.

J’ajoute que demander à un exploitant qui ignore tout de la liquidation de ses droits à la retraite d’annoncer au moins deux ans à l’avance sa cessation d’activité me paraît assez peu réaliste.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote sur l'amendement n° 614.

M. Jacques Muller. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vos réponses ne m’ont pas convaincu pour trois raisons.

Premièrement, il s’agit d’améliorer l’information. En la matière, j’estime que la transparence pourrait reposer sur d’autres bases que sur le bouche à oreille, monsieur le rapporteur ! L’information de l’ensemble des repreneurs potentiels me paraît être une bonne mesure.

Deuxièmement, toutes les organisations professionnelles agricoles admettent qu’un projet d’installation est très long à mettre en œuvre. Aller au-delà du délai de dix-huit mois reviendrait tout simplement à tenir compte de la réalité du terrain.

Troisièmement, il est très important de favoriser les installations. En l’espèce, accroître la transparence, c’est améliorer la possibilité de l’installation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 614.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 549 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote sur l'amendement n° 165 rectifié.

Mme Odette Herviaux. Certes, le problème que nous avons évoqué se pose de façon aiguë dans notre pays, mais je note que l’Union européenne dans son ensemble est touchée par la difficulté de renouveler les générations d’agriculteurs. C’est ainsi que seulement 7 % des agriculteurs européens ont moins de trente-cinq ans.

Nous devons donc tout faire pour favoriser la transmission des exploitations. Cela passe par l’amélioration de l’information comme par l’amélioration de l’accompagnement des installations.

Je rappelle que le Parlement européen a adopté en 2008 un rapport d’initiative qui va dans ce sens. Ce rapport soulignait que la politique agricole commune devrait, à l’avenir, avoir pour objectif de supprimer les obstacles auxquels se heurtent actuellement les jeunes pour accéder à l’activité agricole. Il prenait acte de la nécessité d’améliorer l’efficacité des politiques d’aide à l’installation. Il recommandait d’introduire plus de souplesse dans les procédures d’installation et de transmission des exploitations par tous les moyens possibles : installation progressive, prise en compte de la validation des acquis de l’expérience professionnelle antérieure du candidat quand celui-ci ne dispose pas du niveau de formation requis, dérogation à la condition d’âge quand le candidat présente un projet d’installation viable, notamment dans les zones agricoles défavorisées.

Tous les amendements qui viennent d’être présentés s’inscrivent dans la droite ligne de ces recommandations du Parlement européen.