M. Jean-Pierre Sueur. Évidemment !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On peut augmenter le montant de l’enveloppe, mais ce n’est pas de la péréquation !

M. Jean-Pierre Sueur. Il faut du courage !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je suis d’accord avec vous, la péréquation exige beaucoup de courage, car elle nous touche tous très rapidement !

Le principe de la péréquation fait l’unanimité, mais dans les faits, je l’ai constaté à de très nombreuses reprises, elle pose des problèmes. Par exemple, s’agissant de la DGF, dont l’enveloppe est constante, certains départements qui voient leur population augmenter considérablement se trouvent avec un taux de DGF par habitant inférieur de moitié à celui dont bénéficie le département voisin. Or, je pourrais vous citer l’exemple flagrant d’un département dans ce cas, qui s’est vu opposer un refus d’augmentation de sa DGF, parce qu’il aurait fallu réduire les dotations des autres départements dont la démographie stagne.

Tout est à l’avenant. Le sujet de la péréquation est, certes, un grand chantier, mais il ne peut être abordé que dans une loi de finances, et non en discutant autour de principes, ce qui ne sert strictement à rien.

M. Jean-Pierre Sueur. Il y a des lois de finances tous les deux ou trois mois !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Faites des propositions courageuses sur la péréquation, et nous verrons ensuite jusqu’où nous pouvons aller. Ne l’oublions pas, dans le domaine des collectivités locales, on est très vite le pauvre ! Il y a toujours plus riche que soi !

Les collectivités aisées sollicitent systématiquement le maintien de leurs avantages, en mettant en avant leur dynamisme ou l’existence d’une usine sur leur territoire.

Mon village, un pauvre petit village rural, dispose de ressources très faibles.

M. Yannick Bodin. Il n’est pas pauvre !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il est le 512e sur 514, dans le département de Seine-et-Marne, en matière de potentiel fiscal. On ne peut pas dire qu’il soit riche ! Mais ce qui compte avant la richesse, y compris intellectuelle, c’est le cœur de ses habitants…

La commune voisine a des trottoirs en or grâce à l’implantation d’une énorme usine de verrerie depuis le XVIIIsiècle.

C’est un avantage historique, et la commune n’y est pour rien du tout ; elle bénéficie juste d’une rente de situation…

M. Pierre-Yves Collombat. C’est le problème des héritiers !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous avons tout de même fait un peu de péréquation en leur supprimant une partie de la recette de la taxe professionnelle au profit du Fonds départemental.

Aujourd’hui, les sociétés ont été divisées par trois, et il n’y a même plus les dix salariés qui nous permettaient de bénéficier de la taxe professionnelle de cette commune voisine.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Est-ce là l’égalité ? Tout le monde s’accorde sur la nécessité de la péréquation, mais les discours s’arrêtent là.

Comme l’a dit M. le secrétaire d’État, il faudrait faire des propositions courageuses en matière de péréquation. Mais cela supposerait tout de même des changements profonds. Il faudrait accepter que certaines collectivités qui ont des moyens démesurés par rapport à leurs besoins…

M. Bruno Sido. Tout à fait !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. … aident les communes ne disposant d’aucune ressource. Faites des propositions !

M. Pierre-Yves Collombat. Nous ne sommes pas au Gouvernement !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. J’espère que le Gouvernement suggérera aussi des solutions. On verra, à ce moment-là, si vous tenez le même discours qu’aujourd’hui ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. J’apporterai juste quelques précisions, que MM. Miquel et Sueur m’ont demandées, en citant des exemples concrets dans des villes de banlieues réputées difficiles.

Aux termes de la loi de finances initiale pour 2010, Sarcelles a perçu 18 millions d’euros au titre de la DSU, soit une augmentation de 924 000 euros cette année. M. Pupponi a d’ailleurs manifesté sa satisfaction lorsque je lui ai téléphoné pour le lui annoncer.

La ville de Clichy-sous-Bois, que vous avez citée, est effectivement en grande difficulté. Elle a reçu 9,3 millions d’euros en 2010, soit une hausse de plus de 500 000 euros.

Dans la même catégorie, Stains dispose en 2010 de 7,1 millions d’euros au titre de la DSU, c’est-à-dire une augmentation de 600 000 euros. Par ailleurs, la DSR s’est accrue cette année de 6,3 %, en vertu de la loi de finances initiale pour 2010.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Ce débat dépasse un peu, me semble-t-il, le cadre qui devrait être le sien.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pour quelle raison ?

M. Didier Guillaume. On nous reproche d’intervenir pour allonger le débat et faire de l’obstruction.

M. Bruno Sido. Hors sujet !

M. Didier Guillaume. Pas du tout !

Cela arrive chaque fois qu’il y a un débat de fond, et c’est ce que vient de faire à l’instant M. le président Hyest. (M. le président de la commission s’exclame.)

Pourtant, selon les chiffres cités par M. le président du Sénat et par M. le ministre Henri de Raincourt, les groupes de gauche ont présenté pendant la session ordinaire 50 % des amendements. S’il est vrai que l’opposition représente un peu moins de 50 % des membres de cette assemblée, on ne peut pas parler d’obstruction de sa part, car elle n’a utilisé que 47 % du temps de parole, contre 53 % pour la majorité. (Protestations sur les travées de lUMP.)

On nous accuse de faire de l’obstruction et de présenter des amendements à tort et à travers, alors qu’on s’aperçoit que ce n’est pas le cas dans les faits.

Venons-en au fond : la péréquation dont nous parlons est une péréquation juste, équitable sur l’ensemble du territoire national.

Monsieur le secrétaire d’État, vos exemples sont sûrement vrais, mais je répondrai à M. le président Hyest, qui nous demande de faire des propositions, que nous ne sommes pas au Gouvernement, même si nous espérons y revenir un jour…

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Le plus tard possible !

M. Didier Guillaume. Nous suggérerons à ce moment-là des solutions !

Mais nous ne pouvons pas prendre ce débat par le petit bout de la lorgnette. La position que nous défendons lors de la discussion de ce texte, c’est une réforme globale de la péréquation, qui s’inscrit dans une réforme globale de la fiscalité.

Nous avons déjà formulé des propositions sur la fiscalité nationale, l’impôt sur le revenu et la CSG, en préconisant une fusion. Aujourd’hui, quand un Français sur deux ne paye pas d’impôt sur le revenu, pardonnez-moi de le dire, le lien à la nation n’est pas assez bon. Nous voulons aller plus loin.

J’en viens à présent aux collectivités locales.

Quand, dans un département, des communes sont extrêmement riches, parce qu’elles ont une centrale nucléaire ou une énorme usine sur leur territoire, alors que d’autres sont très pauvres, que se passe-t-il sur le plan des subventions ?

Nous faisons tous la même chose : nous corrigeons les subventions aux communes les plus riches – c’est le cas dans mon département, mais aussi dans le Doubs, le Lot, parmi beaucoup d’autres ! – sur la base du potentiel fiscal.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est faux !

M. Didier Guillaume. Ainsi, en pourcentage, les communes les plus riches ont très peu de subventions par rapport aux communes les plus pauvres !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce n’est pas vrai !

M. Didier Guillaume. Je peux vous donner les chiffres et, si vous le souhaitez, nous vous fournirons de nombreux exemples dans l’heure qui vient !

En période de crise économique, en quoi la péréquation consiste-t-elle ? Il s’agit non pas de prendre aux riches pour donner aux pauvres, mais de prendre aux pauvres pour donner à ceux qui sont encore plus pauvres ! Cela ne peut pas fonctionner ainsi ! Il faut que la fiscalité soit la plus juste possible.

Je reviens sur l’exemple des départements. Comme le constate mon collègue Bruno Sido à propos du transfert des dépenses sociales aux départements, l’écart entre ces dépenses et les versements de l’État s’élève à 4 milliards d’euros. Je n’instruis pas un procès d’intention ; je constate un fait !

M. Bruno Sido. Il faut donc soutenir ma proposition !

M. Didier Guillaume. Les départements dépensent ces sommes. Si les versements de l’État étaient plus importants, la péréquation serait plus facile à réaliser.

Comment peut-on faire de la péréquation dans des collectivités locales ayant déjà à peine les moyens d’exercer leurs compétences sociales ?

Par conséquent, au lieu de nous invectiver ou de nous faire des procès d’intention, nous devrions plutôt, me semble-t-il, essayer de trouver des solutions dans le cadre de ce texte. « Chat échaudé craint l’eau froide », dit l’adage…

Pour notre part, nous constatons que la péréquation est évoquée lors de l’examen de chaque projet de loi de finances, qu’elle est même mentionnée dans la Constitution, mais qu’elle ne s’applique pas, ou insuffisamment, dans les faits. Nous demandons simplement qu’il soit remédié à cette situation.

Dans ces conditions, l’inscription d’une telle précision dans le projet de loi ne serait pas la déclinaison « au rabais » d’une disposition constitutionnelle. Seulement, le principe de péréquation serait sans doute mieux respecté qu’il ne l’est actuellement – nous constatons qu’il ne l’est pas – s’il était mentionné dans un texte législatif portant sur l’organisation territoriale et la répartition financière entre les différentes catégories de collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Le groupe de l’Union centriste est évidemment favorable à la péréquation, mécanisme d’ailleurs d’autant plus nécessaire que les financements publics seront de plus en plus rares. À cet égard, je souscris totalement aux propos de M. le président de la commission des lois. Il est effectivement inacceptable qu’une commune possède des trottoirs en or, quand la ville voisine n’a pas de trottoirs du tout !

M. Hervé Maurey. C’est pourquoi nous avons besoin de péréquation.

Aussi, et contrairement à M. Miquel, je ne crois pas que l’absence de « grain à moudre » justifie de ne plus faire de péréquation. Au contraire, plus les ressources financières manquent, plus les dotations sont réduites et plus la péréquation est nécessaire.

Pour autant, je rejoins M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur. La question de la péréquation relève à l’évidence de la loi de finances. Nous aurons d’ailleurs tout le loisir d’en débattre à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2011. D’ailleurs, mes chers collègues, il faudra sans doute aller encore plus loin que ce que vous proposez et envisager un jour une véritable réforme de la fiscalité locale – notre pays en a vraiment besoin –, en ciblant notamment la DGF, les mécanismes de péréquation et l’ensemble des dotations.

Par conséquent, nous ne voterons pas ces différents amendements, ce qui ne signifie nullement, bien au contraire, que nous soyons opposés à la péréquation. Simplement, ce n’est pas le sujet du jour.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Exactement !

M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.

M. François Patriat. Monsieur le président de la commission des lois, je ne prends pas la parole pour faire de l’obstruction, d’autant que je ne suis pas intervenu si souvent pour qu’on puisse m’adresser un tel reproche. D’ailleurs, pour avoir siégé dans d’autres assemblées, je peux attester que l’obstruction émane parfois d’élus de tendances politiques autres que la mienne…

Pourquoi avons-nous choisi de nous exprimer sur la péréquation ? Nous voulons nous faire l’écho de l’inquiétude légitime des élus de nos territoires, qu’il s’agisse des communes, des intercommunalités, des départements ou des régions. Leurs interrogations demeurent sans réponse, et la réforme de la taxe professionnelle, avec ses recettes hypothétiques, dont nous ne connaissons ni le produit ni la répartition, a créé un désordre persistant !

Chers collègues de la majorité, lorsque vous avez voté le texte sur le sujet, vous nous avez certifié – vous vous en êtes même glorifiés ! – avoir obtenu l’assurance qu’il y aurait une clause de revoyure,…

M. Charles Revet. Ça va venir !

M. François Patriat. … une fois les chiffres mieux connus, les estimations effectuées et les informations disponibles.

Or la clause de revoyure, qui devait permettre de rassurer les élus locaux et les exécutifs, est aujourd'hui passée par pertes et profits !

M. François Patriat. Nous devions en avoir les prémices dans le projet de loi de finances pour le 2010 ; cela n’a pas été le cas !

Ne nous accusez donc pas de retarder le débat ! C’est parce que nous avons déjà été échaudés à plusieurs reprises que nous exigeons aujourd'hui l’inscription de tels principes dans le projet de loi ! Nous ne voulons pas d’un texte qui serait bâclé !

M. Didier Guillaume. C’est aussi simple que cela !

M. François Patriat. Monsieur le rapporteur, vous affirmez que ce ne sont pas des dispositions normatives. Or, moi, je vous parle de ce que les collectivités territoriales vivent actuellement ! Je vous l’ai indiqué hier pendant la discussion générale. M’avez-vous entendu ?

Selon les estimations, avec la réforme de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, les ressources de la région d’Île-de-France passeront demain de 600 millions d’euros à 1,2 milliard d’euros. Je ne demande évidemment pas que l’on retire cette somme à l’Île-de-France

En revanche, je constate que, pour la région Midi-Pyrénées – c’est à dessein que je ne cite pas la Bourgogne –, cela représente 120 millions d’euros de moins ! Quel sera alors le mécanisme de péréquation ? 25 % ? 50 % ? 75 % ? Nous n’en savons rien !

Monsieur le président de la commission des lois, notre proposition tend simplement à garantir que les collectivités territoriales retrouvent aujourd'hui au minimum le niveau de ressources dont elles disposaient auparavant,…

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Nous sommes d'accord ! C’est bien ce que nous faisons !

M. François Patriat. … c'est-à-dire avant qu’une réforme inique ne vienne mettre à bas toutes leurs ressources ! (Protestations sur les travées de lUMP.) Voilà ce que nous demandons. Nous voulons que ce principe soit inscrit noir sur blanc.

Or vous nous le refusez, arguant que, comme la péréquation figure dans la Constitution, toutes les collectivités territoriales en bénéficieront. Mais vous savez très bien que ce ne sera pas le cas ! La péréquation ne sera pas appliquée comme nous le réclamons. Des régions pauvres seront encore plus pauvres, tandis que d’autres régions auront un peu plus de ressources.

Cela créera de nouveaux déséquilibres dans les territoires et pénalisera la mise en œuvre d’engagements qui ont déjà été pris, mes chers collègues, dans le cadre des contrats de projets ou des programmes de modernisation des itinéraires routiers, les PDMI. L’État nous demande de financer des routes ou des autoroutes – je pense à la route Centre-Europe Atlantique, la RCEA, ou à la route nationale 77 – et de payer, par exemple, 15 millions, 18 millions ou 25 millions d’euros sur trois ans, alors que nous ne savons même pas quelles seront les ressources de nos collectivités territoriales dans deux ans !

Par conséquent, vous pouvez imaginer que nous réclamions un peu de transparence, de vérité et de justice !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Monsieur Patriat, nous partageons bien sûr votre sentiment. Lorsque vous évoquez la nécessité de garantir les ressources des collectivités locales, nous sommes tous d’accord.

En revanche, indiquer que les recettes doivent être garanties, c’est non pas de la péréquation, mais de la garantie de recettes ! En d’autres termes, vous garantissez les inégalités ! (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.) Ce n’est tout de même pas pareil.

Par conséquent, il faut, d’une part, garantir le niveau de recettes des collectivités territoriales et, d’autre part, faire de la péréquation ; ce sont deux choses différentes.

Mais ce n’est pas en précisant dans le présent projet de loi que nous sommes favorables à la péréquation que nous avancerons. Pour faire de la péréquation, nous avons besoin de définir des méthodes et de fixer des critères. Nous le ferons lors de l’examen du projet de loi de finances. Nous ne disons rien d’autre.

Tout à l'heure, j’ai dit « Eh bien oui ! » à plusieurs reprises, parce que nous sommes d’accord sur le fond avec vous quant à la nécessité de faire de la péréquation entre les départements les plus pauvres et les départements les plus riches. Seulement, je le répète, c’est dans le cadre de la loi de finances que nous en déterminerons les critères et les modalités et que nous verrons comment garantir les recettes des collectivités territoriales.

D’ailleurs, pour avoir l’habitude de telles situations, je plains d’avance le rapporteur qui sera chargé de présenter le tableau de péréquation avec les critères. Il sera confronté à la demande de nombreux parlementaires souhaitant voir leur collectivité figurer dans la catégorie des pauvres, et surtout pas dans celle des riches ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les différentes tentatives pour inscrire un certain nombre de principes dans le projet de loi sont louables,…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est du bla-bla !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … même si nous ne les partageons pas toutes, car, vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, cela ne relève pas forcément du texte que nous examinons aujourd'hui.

Chacun sait que le projet de loi de finances et le projet de loi de réforme des collectivités territoriales sont deux textes distincts !

En revanche, ce qui est totalement insupportable, c’est que nous débattions d’une réforme des collectivités locales alors que nous sommes dans le flou quant à l’avenir de leurs finances et qu’elles sont déjà étranglées, faute de moyens.

Comme nous l’avons souligné dès le départ, les différents éléments sont liés. Certes, vous cherchez à les dissocier, ce que nous comprenons bien, puisque vous avez supprimé la taxe professionnelle.

Les collectivités territoriales sont, dans leur ensemble, en difficulté. Les départements ne parviennent pas à faire face aux dépenses sociales que vous leur avez transférées sans compensation. En l’occurrence, le problème qui se pose est non pas celui de la péréquation, mais tout simplement celui de la disparition de la compensation qui existait voilà un certain nombre d’années.

Dès lors, les collectivités locales sont dans une situation de pénurie de ressources. Aux yeux de la population, elles apparaissent comme fautives dans leur gestion, au demeurant souvent meilleure que celle de l'État, et responsables de l’augmentation des impôts locaux. Mais elles sont contraintes en raison de l’incapacité du Gouvernement à lancer la réforme de la fiscalité locale, qu’il évoque pourtant à l’envi dans le débat sur le présent projet de loi de réforme des collectivités territoriales, tout en déclarant vouloir la faire plus tard – toujours plus tard ! –, au motif que tel n’est pas le sujet du moment.

Cependant, l’avenir des collectivités locales est lié non seulement aux découpages et redécoupages que le Gouvernement prépare, mais également aux moyens dont celles-ci disposent. Or les incertitudes sur ce point suscitent de vraies inquiétudes ! Cette question est évidemment étroitement liée à notre débat d’aujourd'hui.

Par conséquent, vous ne pouvez pas nous reprocher de nous préoccuper des ressources des collectivités locales, de l’égalité de ces ressources et des capacités des collectivités à assumer leurs charges. Vous savez très bien que cette réforme tend non seulement à aggraver leurs difficultés, mais aussi à les placer sous la contrainte totale de l’État.

De ce point de vue, le Gouvernement a une double responsabilité, qu’il refuse d’assumer dans le cadre de l’examen de ce texte !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 292.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 294.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 295.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote sur l'amendement n° 322 rectifié.

M. Yves Daudigny. Cet amendement concerne la situation des départements.

La répétition étant la meilleure arme des pédagogues, je veux à mon tour insister sur le caractère dramatique pour l’action publique de la situation financière dans laquelle les départements se trouvent aujourd'hui.

Ce n’est pas que les départements soient mal gérés. La situation que je décris concerne des départements aussi bien de droite, de gauche, que du centre ou d’ailleurs, et tant urbains que ruraux !

Les départements sont victimes aujourd'hui d’un véritable effet de ciseaux.

Ils ont des recettes soit qui stagnent, soit qui diminuent. En outre, ils ne bénéficient plus de l’apport conjoncturel des droits de mutation.

En face de cela, ils doivent assumer des dépenses qui sont, je le souligne, obligatoires, en matière sociale, en l’occurrence le revenu minimum d’insertion, le RMI, l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, et la prestation de compensation du handicap, la PCH, pour lesquelles la contribution de l’État diminue régulièrement d’année en année.

Outre ces trois allocations individuelles de solidarité, ils doivent également prendre en charge les personnels techniciens, ouvriers et de services, les TOS, des collèges et des lycées, avec des aspects financiers qui ne sont pas compensés.

Par ailleurs, s’agissant du transfert des routes nationales, ils ne reçoivent aucune compensation pour les investissements de sécurité qui doivent être engagés.

Contrairement à ce qui a été affirmé tout à l’heure, les départements ne sont pas aujourd'hui obsolètes. Ils n’ont plus qu’une lointaine parenté, de périmètre dirais-je, avec les départements issus de la Révolution française. Ce sont des territoires d’avenir, des territoires modernes ! Ils l’ont montré, et le démontrent quotidiennement par leur réactivité, leur capacité à prendre de nouvelles compétences, leur sens de l’innovation et, aussi, la place qu’ils prennent dans l’investissement local.

Aujourd’hui, dans de nombreux départements, les conseils généraux sont pratiquement les seuls opérateurs à passer des commandes dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Porter atteinte à l’autonomie financière et à la capacité financière du département, c’est vouloir réduire dramatiquement l’action publique territoriale. Parce que les départements sont reconnus et appréciés par les populations pour leur action quotidienne, il nous appartient ici de leur donner les moyens de conduire cette indispensable action publique.

Tel est bien, entre autres, le sens de cet amendement que nous soutenons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 322 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 296.

M. Jean-Pierre Sueur. Tout à l’heure, quelques signes de dénégation sont apparus lorsque j’évoquais la part de la péréquation dans la DGF.

Mes chers collègues, je vous renvoie au rapport d'information de nos collègues Jacques Mézard et Rémy Pointereau, publié le 23 février 2010, où l’on peut lire : « La part des dotations composant la DGF consacrées à la péréquation était de 9,5 % en 1998 ». Je pense que personne ne met en doute la grande pertinence de ce rapport !

S’agissant de cet amendement, permettez-moi de citer un extrait du rapport d’information, remarquable lui aussi, de notre collègue Pierre Jarlier, intitulé Pour une péréquation régionale plus juste et publié le 15 juillet 2009 : « les dotations de péréquation régionale s'élèvent [en 2009] à un peu plus de 170 millions d'euros, soit 3,15 % des 5,4 milliards d'euros de la DGF allouée aux régions et 0,2 % des crédits destinés globalement en 2009 aux collectivités locales. »

Aujourd’hui, la péréquation, s’agissant de l’ensemble des régions de ce pays, représente donc 0,2 % des dotations de l’État aux collectivités. Il me semble, mes chers collègues, que ces deux chiffres, dont les sources sont parfaitement vérifiables, suffisent à défendre la pertinence de nos amendements, et de celui-là en particulier.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 296.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 297.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 298, tendant à insérer un article additionnel avant le chapitre Ier.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que l’avis du Gouvernement est également défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 246 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 339
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 152
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 166 rectifié, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La compétence générale est un principe fondateur de la libre administration des collectivités locales, dans le respect des responsabilités accordées par la loi à chacune des collectivités et l'application de la règle de subsidiarité.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Chacun s’accorde à dire, à l’exception, bien évidemment, des parlementaires du groupe majoritaire et du Gouvernement, qu’il ne peut y avoir de libre administration sans un principe « miroir » de compétence générale.

Comment considérer qu’une collectivité territoriale est libre de s’administrer comme elle l’entend dès lors que la loi encadre précisément son champ de compétence et lui interdit d’intervenir dans des domaines particuliers au motif qu’ils n’entreraient pas dans ce champ ?

Je prendrai un exemple pour illustrer mon propos. Le Sénat a examiné récemment une proposition de loi tendant à faciliter l'accès aux stages des étudiants et élèves travailleurs sociaux, soulevant en particulier la question de la gratification pour les stagiaires. Certains ont alors découvert une réalité : les régions, qui sont compétentes en matière de formation continue, en vertu de l’acte II des lois de décentralisation, contribuent également, par le biais de bourses régionales et de dotations de fonctionnement accordées aux instituts, à la formation initiale des jeunes et des travailleurs privés d’emploi.

Il faut être cohérent : si le projet de loi que nous examinons était adopté, ces mêmes régions pourraient, avec la suppression de la clause de compétence générale, se voir interdire une telle participation, plongeant ainsi les élèves et les étudiants concernés dans une situation financière particulièrement difficile. Voilà donc une des conséquences prévisibles de l’adoption de ce projet de loi !