M. Patrice Gélard. C’est n’importe quoi !

Mme Éliane Assassi. Mais non, monsieur Gélard, ce n’est pas n’importe quoi !

Au-delà de ces aspects concrets, qui ne sont pas sans importance pour nos concitoyens, nous nous interrogeons sur les objectifs du Gouvernement.

En s’attaquant ainsi à la clause de compétence générale, que le rapport Balladur qualifie, à juste raison, d’élément consubstantiel aux collectivités territoriales, le Gouvernement entend revenir sur le principe de libre administration de ces dernières.

Visiblement, cette indépendance est insupportable pour un pouvoir politique qui se veut décentralisateur dès lors qu’il s’agit de transférer les dépenses et hypercentralisateur lorsque l'État veut imposer sa rigueur comptable aux collectivités territoriales qui parient sur la solidarité.

Le Gouvernement considère donc les collectivités territoriales comme des « guichets carte bleue », qui ne pourraient pas décider d’accroître leur politique de solidarité.

En somme, en attaquant ainsi la clause de compétence générale – du jamais vu ! –, il fait mine de considérer les collectivités territoriales comme de simples chambres territoriales d’enregistrement et de paiement.

Pour reprendre l’esprit du Comité Balladur dont vous vous inspirez partiellement, vous réduisez les collectivités territoriales, particulièrement les régions, à ce qu’elles étaient jadis : des établissements publics placés sous la tutelle de l’État !

Afin d’éviter une telle dérive, nous proposons aux représentants des territoires que vous êtes, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 299, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les collectivités territoriales disposent d'une clause de compétence générale.

La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. Cet amendement précise que les collectivités territoriales disposent d’une clause de compétence générale. Cette clause est nécessaire à l’accomplissement efficace par les collectivités de leurs missions.

Je sais que nous sommes divisés sur cette question, et je m’efforcerai d’être clair.

La volonté du Gouvernement de supprimer la clause de compétence générale des collectivités locales est une atteinte à la démocratie locale.

Avec le projet de loi gouvernemental, l’action des collectivités locales sera drastiquement limitée aux domaines que la loi leur attribuera et ne pourra en sortir qu’à de rares exceptions et sous un contrôle strict. Il s’agit d’une remise en cause du principe même de libre administration des collectivités locales.

Jusqu’à présent, la clause de compétence générale attribuée aux collectivités locales leur permet de faire vivre l’avancée démocratique que représente la décentralisation. Elle permet à chaque collectivité d’intervenir dans des domaines aussi variés que le sport, la culture ou le soutien aux associations, parmi bien d’autres. Ces interventions sont primordiales, car elles répondent à l’exigence de proximité et pallient, bien souvent, les manquements de l’État.

Outre son utilité, le maintien de la clause de compétence générale relève de la cohérence et de la bonne gestion des deniers publics. Est-il cohérent, en effet, que les départements, qui détiennent la compétence exclusive de l’aide sociale, ne puissent pas intervenir dans le développement économique de leur territoire ? Chaque élu local, de droite comme de gauche, connaît l’importance du lien étroit entre le volet social et le domaine économique dans l’action publique.

Enfin, comment l’État peut-il se permettre de donner des leçons sur le partage des compétences, alors qu’il ne respecte pas ses engagements concernant le transfert des compétences et des ressources associées ? Si l’État veut de la clarté, pourquoi ne pas remettre en cause les contrats État-région ?

La formidable diversité des situations des collectivités territoriales a été maintes fois soulignée, y compris par M. le rapporteur : certains territoires sont riches, d’autres disposent de peu de moyens. Les territoires les plus pauvres ont besoin que la solidarité s’exerce en leur faveur. Pour porter un projet, ces collectivités doivent pouvoir mobiliser l’ensemble des moyens, y compris ceux du département et de la région. Or le Gouvernement choisit précisément de mettre à mal cette solidarité entre les collectivités.

Aucune collectivité ne pourra plus exercer la clause de compétence générale. Le projet de loi prévoit que les communes continueront à l’exercer, mais, à y regarder de près, elles ne le pourront plus, parce que, dès lors qu’elles auront transféré leurs compétences à l’intercommunalité, l’autorité préfectorale sera en droit d’empêcher un conseil municipal ou un maire d’exercer une compétence qu’il aura déléguée. Nous observons déjà cette situation dans la pratique.

Manifestement, un certain nombre de collectivités vont connaître une situation de blocage dans la période qui arrive, à un moment particulièrement crucial pour elles.

Là encore, le Gouvernement démontre le peu de confiance qu’il accorde aux collectivités territoriales dans leur gestion.

M. le président. L’amendement n° 572 rectifié, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le conseil général et le conseil régional jouissent de la clause de compétence générale.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Cet amendement tend à rétablir la clause de compétence générale des départements et des régions. Mes chers collègues, nous avons tous été, nous sommes tous, ou nous serons tous gestionnaires de collectivités : lequel d’entre vous a connu un problème, ces dernières années, dans l’application de la clause de compétence générale ?

MM. Yves Daudigny et Gérard Miquel. Personne !

M. Philippe Adnot. L’un d’entre nous peut-il lever la main pour déclarer qu’il a rencontré un tel problème ?

L’article 35 du projet de loi va créer les conditions pour que n’importe qui, demain, remette en cause nos projets ou nos décisions. Nous dépendrons donc du bon vouloir d’un requérant, du jugement d’un tribunal administratif qui décidera si nous avions ou non le droit d’agir ! Pendant ce temps, les collectivités locales ne pourront pas poursuivre leur action.

Permettez-moi de vous livrer une anecdote : à Romilly-sur-Seine, une entreprise spécialisée dans la fabrication de vélos, qui joue un rôle extrêmement important dans ce secteur, a rencontré des difficultés. La région n’a pas souhaité l’aider ; l’État et le département sont donc intervenus. Si le projet de loi dont nous discutons était adopté, le département pourrait-il encore intervenir ? Bien sûr que non !

J’attire donc votre attention sur ce point, mes chers collègues. Nous devons faire preuve d’indépendance et décider, aujourd’hui, tous ensemble, que la clause de compétence générale, qui ne nous a jamais posé aucun problème, sera maintenue. Ce serait une grande preuve de responsabilité de notre part ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. M. Bruno Retailleau applaudit également.)

M. le président. L’amendement n° 300, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les régions disposent de la clause de compétence générale.

La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. Cet amendement décline la clause de compétence générale à l’échelon régional.

Pour chaque niveau de collectivité, une disposition législative du code général des collectivités territoriales énonce cette clause. Plus précisément, l’article L. 4221-1 de ce code dispose : « Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région ». De manière transversale, l’article L. 1111-2 de ce même code prévoit : « Les communes, les départements et les régions règlent par leurs délibérations les affaires de leur compétence ».

Aujourd’hui, la région peut intervenir, même en l’absence de dispositions législatives prévoyant cette intervention, ce qui lui permet de s’ajuster aux nécessités locales. La réécriture du texte par l’Assemblée nationale n’est pas satisfaisante. En effet, selon la nouvelle rédaction proposée, si les compétences attribuées par la loi aux collectivités territoriales le sont en principe à titre exclusif, la loi peut, à titre exceptionnel, prévoir des compétences partagées entre plusieurs niveaux de collectivités territoriales.

Nous pensons, dans un souci de clarification, que la clause de compétence générale doit rester le principe et la compétence exclusive, l’exception.

M. le président. L’amendement n° 302, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La région gère par ses délibérations les affaires de la région.

La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Cet amendement porte sur la clause de compétence générale des régions. Le projet de loi dont nous débattons devait répondre à de grandes ambitions, que je qualifierai de « balladuriennes » : il s’agissait de s’inspirer des expériences étrangères pour renforcer l’importance des régions.

La région, en France, était une naine. Or nous constatons que vous voulez la rapetisser : vous réduisez ses compétences dans son périmètre, puisque vous lui retirez la compétence économique, au profit de la métropole ; vous diminuez son potentiel fiscal, puisqu’elle ne pourra plus lever l’impôt ; vous affaiblissez également sa légitimité, puisque le conseil régional va fusionner avec les conseils généraux.

Je comprends mal votre démarche : j’ai entendu tout à l’heure M. le président du Sénat déclarer, dans son allocution de fin de session, qu’il souhaitait des lois à la fois « compréhensibles et cohérentes ». Cette déclaration a été saluée par des applaudissements très nourris dans les travées de cette assemblée, car nous l’approuvons tous. Pourtant, en l’occurrence, nous discutons d’un projet de loi incompréhensible et incohérent : il faudrait donc que le Gouvernement et sa majorité gagnent en cohérence et en lisibilité. Mais n’est-ce pas trop leur demander ?

M. le président. L’amendement n° 323 rectifié, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le Chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les départements disposent de la clause de compétence générale.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Il s’agit de s’assurer que les départements conserveront la clause de compétence générale. Cet amendement décline donc la clause générale de compétence au niveau départemental.

Pour chaque niveau de collectivité, une disposition législative du code général des collectivités territoriales énonce cette clause. De manière transversale, l’article L. 1111-2 de ce code prévoit : « Les communes, les départements et les régions règlent par leurs délibérations les affaires de leur compétence ». Plus précisément, l’article L. 3211-1 de ce même code dispose : « Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département. Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d’intérêt départemental dont il est saisi. »

C’est donc cette clause de compétence générale qui peut apporter la simplification si souvent invoquée de notre architecture territoriale.

Contrairement aux idées reçues, la clause de compétence générale permet de simplifier l’action locale. En effet, un conseiller général ne peut passer son temps à se demander quels sont les contours de ses compétences. Pour agir efficacement, il faut qu’il puisse se saisir de toute question qui concerne son département : la clause de compétence générale se transforme alors en un outil de rationalisation de l’intervention des collectivités territoriales.

Bien entendu, la clause de compétence générale est le corollaire du principe de libre administration des collectivités territoriales. Tel est bien l’esprit de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, première étape de la décentralisation, défendue par Gaston Defferre et adoptée à l’époque par le Parlement.

Je constate d’ailleurs que d’autres collègues sont intervenus pour développer une analyse identique à la nôtre, en particulier Philippe Adnot.

M. le président. L’amendement n° 324 rectifié, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le Chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le département gère par ses délibérations les affaires du département.

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. La clause de compétence générale est, à notre sens, déterminante pour l’avenir de l’autonomie de nos collectivités. C’est de son maintien que dépendra la possibilité de mener un véritable aménagement du territoire, de développer la diffusion culturelle, le sport, le tourisme ou l’économie sur l’ensemble de notre territoire, et non pas uniquement dans les zones très urbanisées ou les grandes métropoles.

Chaque élu partage individuellement cette analyse. Où est donc le problème ? Il n’existe pas ! Au contraire, des difficultés surgiraient si la clause générale de compétence était supprimée.

Face à la levée de boucliers de toutes les associations généralistes d’élus, maires, conseillers généraux ou régionaux, de droite comme de gauche, vous essayez de « bidouiller » – passez-moi l’expression –, voire de tricoter en quelque sorte un compromis : vous ne renoncez pas à la suppression de la clause générale de compétence, puisque vous l’aviez annoncée, mais vous acceptez que les départements et les régions continuent à l’appliquer. Or cette solution est encore pire, monsieur le ministre, car elle va aggraver l’insécurité de ces collectivités !

Soit vous laissez subsister la clause générale de compétence, comme tout le monde le demande, soit vous la supprimez, ce qui serait à nos yeux une erreur, mais au moins les choses seraient claires.

En revanche, si le texte est maintenu en l’état, nous augmenterons l’insécurité juridique !

Tout à l’heure, Michel Teston se référait aux lois de décentralisation de 1982. Permettez-moi d’évoquer à mon tour un point d’histoire, qui a été également rappelé par notre éminent collègue Edmond Hervé : la clause générale de compétence, c’est-à-dire le fait que les départements et les communes puissent s’administrer librement sur l’ensemble de leur territoire, est un principe général qui a été posé dans le programme de Nancy,…

M. Michel Mercier, ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire. Avant celui de Belleville !

M. Didier Guillaume. … qui reçut le soutien d’Odilon Barrot, Jules Grévy, Léon Gambetta, et de bien d’autres. Ce principe a été inscrit dans la loi, en 1871 pour les départements, en 1884 pour les communes.

Aujourd’hui, ce grand principe est remis en cause, ce que nous contestons, non pas que nous voulions conserver une règle qui date de plus d’un siècle, mais tout simplement parce que l’on ne peut pas toujours remettre en cause l’essentiel.

Pour un département rural, comme celui du Lot, par exemple, la perte de la clause générale de compétence signifie l’impossibilité d’apporter une aide à l’installation d’une petite entreprise, ne nous racontons pas d’histoire ! La grande région ne va pas s’occuper de l’installation d’une petite entreprise. Nous devons donc garder la clause générale de compétence. Autre exemple : comment mener une politique culturelle en zone rurale, si le département ou l’intercommunalité n’en ont pas la compétence ?

À moins que vous n’agissiez par pur dogmatisme, le bon sens – le bon sens paysan ne saurait mentir, dirait-on dans ma région ! – commande de conserver cette clause générale de compétence pour permettre un développement harmonieux des territoires.

M. le président. L’amendement n° 301, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La commune gère par ses délibérations les affaires de la commune.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Cet amendement s’inscrit dans la droite ligne du précédent, brillamment défendu par notre collègue Didier Guillaume.

L’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales dispose : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune ». Cette vocation générale est reconnue aux communes depuis la loi du 5 avril 1884.

Est-il nécessaire de rappeler, une fois de plus, que la clause de compétence générale est nécessaire pour préserver les actions essentielles de la commune ? Sans citer la liste exhaustive des compétences de cette dernière, je mentionnerai tout de même celles ayant trait à la petite enfance, notamment la gestion des garderies, des écoles maternelles et élémentaires, celles concernant l’urbanisme, la voirie communale, ainsi que la protection de l’ordre public, dans le cadre de l’exercice des pouvoirs de police du maire.

Les travaux de l’Assemblée nationale ont montré l’importance que les députés attachaient à l’échelon communal. Plus précisément, l’adoption d’amendements déposés par le député Jacques Pélissard, président de l’Association des maires de France, a permis de revenir à la rédaction qui avait été adoptée par les sénateurs, notamment sur deux points. Il s’agit, en premier lieu, de la création des communes nouvelles, même si j’ai dit hier combien ces créations pouvaient être dangereuses, et, en second lieu, de l’instauration d’une dotation globale de fonctionnement territorialisée à l’échelon de l’intercommunalité, qui ne pourra intervenir sans l’accord unanime des communes concernées.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter cet amendement qui participe bien d’une logique de préservation de l’action publique communale.

M. le président. L’amendement n° 303, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les conseils des établissements publics de coopération intercommunale gèrent par leurs délibérations l’ensemble des questions relevant des compétences qui leur ont été attribuées.

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Mme Patricia Schillinger. Nous proposons que les conseils des établissements publics de coopération intercommunale gèrent par leurs délibérations l’ensemble des questions relevant des compétences qui leur ont été attribuées.

La compétence d’attribution se justifie ici dans la mesure où les établissements publics de coopération intercommunale sont non pas des collectivités de plein exercice, mais des outils au service des collectivités territoriales.

Toutefois, nous ferons par la suite une exception concernant la métropole, sous l’impulsion de Pierre Mauroy. Cette exception s’explique dans la mesure où la métropole ne fait pas partie de l’existant. On peut donc, sans bouleverser les équilibres en place, aller plus loin en lui attribuant la clause de compétence générale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces amendements ayant tous trait à la clause de compétence générale, je rappellerai le cadre exact de la loi et les mesures prévues à l’article 35 du présent projet de loi. J’observe d’ailleurs que nous aurions plutôt dû débattre de cette question à l’occasion de l’examen de cet article.

Prenons le cas du département. L’article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales stipule : « Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département ».

L’article 35 du projet de loi tend simplement à apporter la précision suivante : « dans les domaines de compétences que la loi lui attribue ». Cela permet de clarifier la situation et d’éviter qu’une compétence unique concerne deux collectivités.

Par ailleurs, on ne peut prétendre, comme M. Philippe Adnot, que, en cas de création d’une compétence nouvelle, personne ne sera en mesure de s’en occuper. En effet, il est précisé, à l’alinéa 4 de l’article 35 du projet de loi, que le conseil général « peut en outre, par délibération spécialement motivée, se saisir de tout objet d’intérêt départemental pour lequel la loi n’a donné compétence à aucune autre personne publique ».

Les dispositions sont donc claires : si une compétence relève d’une personne publique précise, c’est cette dernière, et elle seule, qui l’exerce. En revanche, si une compétence n’est pas attribuée, la collectivité territoriale concernée, c’est-à-dire soit le conseil régional pour un objet d’intérêt régional, soit le conseil général pour un objet d’intérêt départemental, peut s’en saisir par le biais d’une délibération motivée. Par conséquent, aucun secteur ne se retrouvera dans une situation intermédiaire.

M. Jean-Jacques Mirassou. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Précisément, le système sera beaucoup plus simple ! Je le répète, dans le cas où la loi aura donné la compétence à une personne publique, cette dernière sera la seule à l’exercer. Si, par hasard, aucune attribution de cette compétence n’est prévue par la loi, l’une des deux collectivités aura la possibilité, par une délibération motivée, de s’en emparer. Ce dispositif évite donc tout vide et présente l’avantage de la souplesse.

Les amendements nos 166 rectifié, 299, 572 rectifié, 300, 302, 323 rectifié, 324 rectifié, 301 et 303 étant contraires à la position retenue par la commission, fondée sur le schéma que je viens de décrire, je ne peux qu’émettre un avis défavorable.

J’ajoute que nous avons prévu, à un article ultérieur du projet de loi, des dispositions concernant les financements croisés possibles, notamment au bénéfice des communes de moins de 3 500 habitants.

Nous pouvons donc jouer à nous faire peur, mes chers collègues, mais c’est bien un système beaucoup plus clair et plus efficace que la réforme proposée permettra, grâce au conseiller territorial, de mettre en place.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt tout ce qui vient d’être dit sur cette question de la clause de compétence générale. C’est, par définition, le type de débat académique qui peut nous retenir tous très longtemps, mais dont on voit aussi les limites.

Je commencerai par donner l’avis du Gouvernement sur le dernier amendement de la série, l’amendement n° 303, qui a pour objet de confier la clause de compétence générale aux établissements publics de coopération intercommunale. Selon mes souvenirs, – je parle ici sous le contrôle de M. Edmond Hervé – le principe de spécialité est l’un des fondements de l’établissement public.

Invoquer une clause de compétence générale pour une structure guidée par le principe de spécialité paraît donc quelque peu incongru sur le plan du droit. Aussi, sauf à construire une sorte de monstruosité juridique, il faut immédiatement renoncer à cette proposition.

Tout l’intérêt de la clause de compétence générale est qu’elle n’a jamais été définie clairement, je le dis bien volontiers !

D’ailleurs, on ne la trouve pas dans la loi du 10 août 1871 relative aux conseils généraux, dont l’article 37 énumère les compétences du conseil général.