M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement prévoit que la demande de rectification des informations est de droit dès lors que la personne le demande, alors que le droit en vigueur, confirmé par la LOPPSI sur ce point, prévoit que cette demande n’est de droit qu’en cas de requalification judiciaire.

L’élargissement des rectifications reconnues de droit paraît excessif. Il est nécessaire de laisser au procureur de la République une marge d’appréciation, comme c’est le cas actuellement.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Il ne peut être fait droit à toutes les demandes de rectification, madame Escoffier, sans un examen préalable de leur bien-fondé. Sinon, un certain nombre d’abus risquent d’être commis.

C’est la raison pour laquelle, comme pour les fichiers de police, les demandes de rectification font l’objet d’un examen par le gestionnaire du traitement, souvent en liaison avec la CNIL d’ailleurs, et, s’agissant des fichiers d’antécédents, avec l’autorité judiciaire.

Le cadre proposé dans le projet de loi est satisfaisant. Aussi, l’avis est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 315 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 208, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 19

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il peut également agir en urgence lorsque l'absence de mise à jour des traitements automatisés d'informations nominatives mentionnées aux articles 230-6 et 230-7 est susceptible de faire subir un préjudice immédiat et sérieux au requérant.

La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Le projet de loi instaure un magistrat référent pour le contrôle de la mise en œuvre et la mise à jour des fichiers d’antécédents judiciaires.

Au cours du débat parlementaire, les pouvoirs de ce magistrat référent ont été un peu précisés. La commission des lois a même indiqué qu’il devrait statuer dans un délai d’un mois, afin de répondre aux requêtes des particuliers.

Un mois nous semble encore trop long dans certains cas. Nous souhaiterions donc que ce magistrat puisse aussi agir en urgence lorsque l’absence de mise à jour des traitements automatisés est susceptible de faire subir un préjudice immédiat et sérieux au requérant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement prévoit que le magistrat référent pourra agir en urgence lorsque l’absence de mise à jour de traitement automatisé est susceptible de faire subir un préjudice important au requérant, comme tel pourrait être le cas à la suite d’enquêtes administratives.

Une telle possibilité existe sans qu’il soit nécessaire de le préciser dans la loi. Le magistrat référent dispose notamment, pour l’exercice de ces fonctions, d’un accès direct aux traitements automatisés.

Je demande au Gouvernement de confirmer cette interprétation. Si tel est le cas, la commission demandera le retrait de cet amendement, qui n’aurait alors plus d’objet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Actuellement, le contrôle des informations nominatives contenues dans les traitements d’antécédents judiciaires est opéré par le procureur de la République. De ce point de vue, l’alinéa 18 de l’article 10 instaure une garantie supplémentaire, puisqu’un magistrat sera désormais spécialement désigné pour contrôler ces fichiers. Je précise que ce contrôle s’ajoute, sans s’y substituer, à celui qu’exerce déjà le procureur de la République territorialement compétent. Voilà le dispositif dans lequel nous nous situons.

Dans les deux cas, le magistrat saisi par un particulier disposera d’un délai d’un mois pour se prononcer. Ce laps de temps déjà très réduit et inférieur au délai administratif de droit commun qui est de deux mois est conçu pour les situations d’urgence. Le réduire davantage me paraît donc irréaliste. Monsieur le sénateur, sur cette question, c’est notre seul point de désaccord, même si je note la bonne intention qui préside à votre démarche.

La procédure de mise à jour des données repose sur l’examen du dossier papier de chaque affaire, ce qui prend nécessairement du temps. Dans ce contexte, aller plus loin ne semble pas opportun. Peut-être faudra-t-il l’envisager à l’avenir, mais, aujourd’hui, c’est impossible. Ne prévoyons pas des délais qui ne sont pas tenables, ce que le justiciable serait alors en droit de nous reprocher.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 208.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 316 rectifié, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Mézard, Mme Escoffier, MM. Baylet et Detcheverry, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Vall, Tropeano et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il peut également déléguer à un greffier du tribunal de la juridiction d'accéder directement à ces traitements.

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Cet amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 316 rectifié est retiré.

L'amendement n° 209, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 25, dernière phrase

Remplacer les mots :

le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d'accès

par les mots et deux alinéas ainsi rédigés :

les conditions dans lesquelles :

- les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article 203-7 peuvent exercer leur droit d'accès de manière indirecte, conformément aux dispositions de l'article 41 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;

- les personnes mentionnées au deuxième alinéa de l'article 203-7 peuvent exercer leur droit d'accès directement auprès du responsable du traitement, conformément aux dispositions de l'article 39 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, sous réserve de ne pas figurer également dans ledit traitement au titre du premier alinéa du même article.

La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Il s’agit de permettre aux victimes d’exercer leur droit d’accès et de rectification directement, sauf, cela va de soi, lorsqu’elles sont elles-mêmes mises en cause. Aujourd’hui, elles disposent d’un accès indirect par l’intermédiaire de la CNIL. Toutefois, il faut éviter de surcharger davantage encore cette instance. C'est la raison pour laquelle cet amendement prévoit une procédure simplifiée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir un accès direct des victimes aux données les concernant dans un fichier d’antécédents judiciaires, ce qui ne paraît pas conforme aux dispositions particulières prévues par l’article 41 de la loi du 6 janvier 1978 sur les fichiers intéressant la sécurité publique. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Il s’agit, là encore, d’un amendement qui part d’une bonne intention. Toutefois, une telle distinction compléterait inutilement le dispositif. En effet, une même personne peut être inscrite dans le STIC en qualité de victime et de mise en cause, par exemple – et c’est assez fréquent – en cas de violences réciproques.

En outre, une même personne demande souvent l’accès à plusieurs fichiers de police en même temps. Dans ce cas, il est précieux qu’elle dispose d’un interlocuteur unique, en l’occurrence la CNIL, qui se chargera d’obtenir les informations nécessaires auprès des gestionnaires des différents fichiers.

Enfin, l’accès indirect est en réalité une garantie pour la personne. Cela permet une instruction partenariale de la demande d’accès et de rectification, toute la procédure étant instruite de manière conjointe par le gestionnaire du fichier et la CNIL.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 209.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 126 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 210 est présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 30

Après le mot :

concernant

Rédiger ainsi la fin de la phrase :

tout crime ou délit portant atteinte aux personnes puni de plus de cinq ans d'emprisonnement ou portant atteinte aux biens et puni de plus de sept ans d'emprisonnement ;

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 126.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement vise à limiter le champ des infractions couvert par les fichiers.

Le projet de loi entend permettre que figurent dans les fichiers d’analyse sérielle des données concernant toute infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement, ce qui étend de manière éhontée le champ potentiel du recours à ces fichiers. Nous ne pouvons donc l’accepter.

Nous nous y opposons d’autant plus que, pour peu que l’on replace cette disposition dans son contexte, on constate que ce champ d’application est encore plus vaste que ce que son seul énoncé pourrait laisser croire.

Nous savons que le Gouvernement veut durcir toutes les sanctions pénales au point que l’on se demande quelle infraction ne sera plus passible de cinq ans d’emprisonnement à la fin de l’année 2010. Avec le jeu des circonstances aggravantes de plus en plus nombreuses, il n’y aura plus aucun délit qui ne sera pas concerné !

En d’autres termes, les fichiers d’analyse sérielle contiendront des informations sur tous les délinquants, quelle que soit la gravité réelle des infractions commises.

Saisie de la question, la CNIL a marqué son désaccord face à cette disposition qui contrevient aux droits fondamentaux. Cette haute autorité a en effet rappelé que le recours aux fichiers d’analyse sérielle devait être limité aux infractions les plus graves. Le Gouvernement a fait fi de cette réserve.

C’est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement, de redonner au recours aux fichiers d’analyse sérielle un champ d’application plus modeste.

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 210.

M. Alain Anziani. Je fais miennes les excellentes explications de ma collègue.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces amendements identiques tendent à revenir au droit en vigueur s’agissant du champ des infractions visées par les fichiers d’analyse sérielle, à savoir les crimes ou délits portant atteinte aux personnes passibles de plus de cinq ans d’emprisonnement ou portant atteinte aux biens et passibles de plus de sept ans d’emprisonnement.

Le nouvel article 230-13 du code de procédure pénale proposé dans le projet de loi prévoit de déterminer un seuil de peine unique dont le quantum serait fixé à cinq ans d’emprisonnement au moins. Il s’agit en effet d’étendre l’utilisation des fichiers de police judiciaire à la lutte contre des formes de délinquance sérielle plus fréquentes. Le seuil de sept ans pour les infractions aux biens ne permettait pas de viser en particulier les vols commis avec circonstance aggravante, passibles de cinq ans d’emprisonnement, qui constituent l’essentiel de la délinquance sérielle. L’abaissement du quantum requis pour les infractions aux biens répond ainsi à un objectif d’efficacité.

C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques nos 126 et 210.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Comme M. le rapporteur vient de le souligner, cette harmonisation permettra par exemple de prendre en compte les vols commis en réunion, ceux qui s’accompagnent d’actes de destruction ou de détérioration ou encore ceux qui sont perpétrés à l’encontre de personnes particulièrement vulnérables.

La disparité entre cinq ans et sept ans d’emprisonnement n’était plus très cohérente. Quelle que soit la nature de l’infraction – atteinte aux personnes ou aux biens –, le seuil de peine est un critère de gravité suffisant. Il n’y a donc pas lieu d’en retenir deux différents.

Le projet de loi va dans le sens de cette harmonisation. Faut-il le rappeler, cinq ans d’emprisonnement, c’est tout de même un seuil élevé ! Ne resteront concernés par les traitements d’analyse sérielle que les crimes et les délits les plus graves.

C’est pourquoi le Gouvernement émet également un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 126 et 210.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 127, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 33

Remplacer les mots :

, sans limitation d'âge

par les mots :

âgées de plus de 13 ans

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement, qui s’inscrit dans la même logique, vise à contenir l’élargissement sans fin du périmètre des fichiers de police, notamment son extension au détriment des mineurs, voire des enfants.

Les fichiers d’analyse sérielle dont le domaine d’application avait déjà connu une préoccupante extension avec la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, qui avait énormément élargi le spectre des données susceptibles d’être recueillies, vont, avec ce texte, pouvoir toucher tous les citoyens français, sans aucune exception. Tout le monde sera fiché, pratiquement de la naissance jusqu’au tombeau.

L’alinéa 33 de l’article 10 précise que les fichiers d’analyse sérielle « peuvent contenir des données sur les personnes, sans limitation d’âge ».

Si vous me le permettez, monsieur le secrétaire d'État, j’oserai dire que vous êtes vraiment incorrigible, voire récidiviste... Vous savez bien que les précédentes tentatives du Gouvernement de ficher les mineurs ont soulevé un tollé dans l’opinion publique, toutes tendances politiques confondues. Vous savez également que des autorités administratives indépendantes ont condamné ces projets et que ceux-ci se heurtent à des principes juridiques et moraux dans notre démocratie. Changer le nom des fichiers ne suffit pas à faire accepter des mesures qui choquent nos concitoyens.

Cet amendement vise à rétablir le minimum dans une démocratie. Nous pensons qu’il faut fixer un âge en dessous duquel on ne peut pas collecter et traiter des informations.

Nous connaissons bien entendu vos théories sur l’enfance déviante qu’il faut traiter et soigner dès les tout premiers mois de la vie ; je ne reviens pas sur le fameux rapport Benisti. Nous avons bien compris que, pour vous, le « jeune » lui aussi – parfois, surtout lui ! – est dangereux. Il n’aurait aucune faculté de s’amender, il ne peut pas changer, il doit donc être lui aussi fiché, perdant tout droit à l’oubli.

Or nous pensons qu’en aucun cas un mineur de moins de treize ans ne doit être l’objet de tels conservations et traitements d’informations. Je tiens à rappeler que la CNIL a révélé qu’avec ce projet de loi « les fichiers d’analyse sérielle prendront une ampleur nouvelle, qui en change la nature, car ils ne seront plus limités aux infractions les plus graves, porteront sur un nombre très important d’infractions et de personnes ». Elle s’est ainsi déclarée « extrêmement réservée sur la mise en œuvre d’une telle extension ».

Vous élargissez non seulement ce qui concerne les infractions – et de quelle manière ! –, mais aussi ce qui a trait aux personnes. Il faut mettre des garde-fous à votre boulimie sécuritaire et répressive. C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous demandons de voter en faveur de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La Haute Assemblée a rejeté l’amendement n° 119, dont l’objet est identique à celui-ci. Pour les mêmes raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 127.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, je tiens à faire remarquer que le Gouvernement ne se reconnaît pas du tout dans la caricature que vous venez de proposer sur sa façon d’appréhender l’enfance et les jeunes.

Je souhaite apporter un argument supplémentaire à la réponse que j’ai faite tout à l’heure à M. Mézard sur les fichiers et les jeunes. Il ne faut pas oublier que le mineur peut aussi être mentionné en qualité de victime. À mon sens, tout le monde devrait être convaincu de l’intérêt pour les services de police de garder la trace de séries de faits – vols, rackets, agressions, sans parler d’actes plus graves, qui peuvent d’ailleurs se passer dans les familles –, dont les enfants ou adolescents sont victimes afin d’en identifier, par des recoupements, les auteurs et de traduire ces derniers en justice.

Ce faisant, je ne suis absolument pas dans une démarche idéologique ou de stigmatisation. Au contraire, il s’agit, par des moyens pratiques, de protéger de manière très concrète la jeunesse et l’enfance.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame Assassi, le groupe UMP ne se reconnaît pas non plus dans les propos que vous avez tenus concernant l’enfance.

Un certain nombre de scientifiques et de pédopsychiatres – et non des moindres : Winnicott, Lebovici, Stern – ont souligné combien il était important de pouvoir entourer l’enfant et de lui assurer un certain nombre de mesures de protection. Pour m’être longuement penchée sur leurs travaux et avoir mis en pratique à Paris des politiques permettant de soutenir la parentalité, je peux témoigner qu’il ne s’agit nullement d’une politique idéologique : cela participe au contraire du devoir de protection que nous avons à l’égard de l’enfance.

Sur cette matière, il n’y a pas deux camps. Nous devons tous protéger l’enfance et porter sur elle un regard positif. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. François Trucy. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. J’ajouterai simplement quelques mots. Je veux bien tout écouter, mais certains propos me semblent franchement difficiles à entendre. Madame Hermange, monsieur le secrétaire d’État, si vous estimez que protéger les enfants c’est les ficher, alors nous n’avons vraiment pas les mêmes valeurs et, je vous l’assure, j’en suis très fière.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 127.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 128, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 36

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces dernières peuvent toutefois s'opposer à ce que les données les concernant soient conservées dans le fichier dès lors que l'auteur des faits a été définitivement condamné ;

Madame Assassi, acceptez-vous de défendre en même temps l’amendement no 129 ?

Mme Éliane Assassi. Oui, monsieur le président.

M. le président. J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 129, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, et qui est ainsi libellé :

Alinéa 37

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces dernières peuvent toutefois s'opposer à ce que les données les concernant soient conservées dans le fichier dès lors que l'auteur des faits a été définitivement condamné ;

Vous avez la parole pour défendre ces deux amendements, ma chère collègue.

Mme Éliane Assassi. La disposition que nous proposons a pour objet de renforcer les droits des témoins et des victimes dont des données à caractère personnel auraient été recueillies et pourraient faire l’objet d’un traitement par les fichiers d’analyse sérielle.

Aux termes du texte qui nous est soumis, les données utilisées par les fichiers d’analyse sérielle seront toutes confondues. Avec un tel projet de fichage généralisé, les auteurs d’infraction, les témoins et les victimes seront quasiment mis sur un pied d’égalité. On peut donc se demander si la population ne se divise pas en deux camps : d’un côté, les anciens délinquants et, de l’autre, les futurs délinquants.

Une telle conception est inadmissible.

Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement ajoute au malheur d’être victime celui d’être fiché sans limitation de durée. En outre, parce qu’elle prévoit le fichage des témoins, votre disposition risque même de dissuader les citoyens de se déclarer témoin d’une infraction par peur d’être fiché. Vous rendez-vous bien compte de ce que vous êtes en train de construire ?

Je le répète : nous sommes résolument opposés à ce que des données relatives aux victimes et aux témoins soient conservées et utilisées dans des fichiers d’analyse sérielle. Pour notre part, nous estimons qu’il est nécessaire de donner aux citoyens dont les données ont été recueillies alors même qu’ils n’ont fait l’objet d’aucune condamnation la possibilité d’obtenir l’effacement de ces données dès que l’auteur des faits à l’occasion desquels lesdites données ont été recueillies a été condamné.

La proposition que j’avance va d’ailleurs dans le sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Le Royaume-Uni a en effet été condamné pour avoir maintenu dans ses fichiers des informations relatives à des prévenus mis hors de cause. Dès lors, on peut imaginer que la juridiction européenne octroierait aux témoins et aux victimes le droit de demander la suppression des informations qui les concernent.

Je souhaite pour ma part éviter que la France ne soit condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme. C’est pourquoi je vous invite à voter en faveur de ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 128 et 129 ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’amendement no 128 prévoit que les témoins dont les données figurent dans un fichier d’analyse sérielle peuvent obtenir l’effacement de celles-ci lorsque l’auteur des faits a été définitivement condamné.

La législation en vigueur leur donne un tel droit mais permet au procureur de la République de prescrire le maintien de ces informations pour des raisons liées aux finalités du fichier. Il semble que l’équilibre auquel on est ainsi parvenu doive être conservé.

Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Elle est également défavorable à l’amendement no 129 qui prévoit le même dispositif pour les victimes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Madame Assassi, en l’occurrence, je ne sais pas qui est dans l’idéologie. Je vous donnerai simplement un exemple.

L’examen de la sérialité des faits nécessite que les données enregistrées puissent demeurer dans le traitement pour être réutilisées ultérieurement. Ainsi, il arrive qu’une personne entendue comme témoin dans différentes affaires criminelles à plusieurs mois ou années d’intervalle s’avère finalement être l’auteur des faits – mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez tous à l’esprit des situations de ce type, dont certaines ont défrayé la chronique. Les faits auxquels je fais référence ont réellement eu lieu, il ne s’agit pas d’une vue de l’esprit.

Même lorsqu’un auteur a été définitivement condamné, ou par exemple en cas de pluralité d’auteurs, il faut donc pouvoir conserver les données pour permettre des rapprochements avec d’autres affaires – c’est ce qui s’est produit pour les exemples que j’ai à l’esprit.

Madame Assassi, vous avez évoqué l’argument de la peur de témoigner. Les cas particuliers pour lesquels cette question se pose aujourd’hui peuvent être surmontés par le témoignage sous X. Si une telle question se pose, il existe des réponses. L’argument que je viens de vous donner – il n’est pas le seul – montre bien que nous sommes là non pas dans l’idéologie, mais dans une véritable prise en compte de situations concrètes qui peuvent être rencontrées.

En effet, pour des victimes ou pour des personnes injustement condamnées, la possibilité de conserver des données, y compris des données recueillies auprès de témoins, peut être utile.

Encore une fois, ce cas n’est qu’un exemple parmi d’autres. Garder la possibilité de conserver les informations collectées ne me paraît pas constituer une atteinte à la liberté.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 128.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 129.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Demande de réserve

Article 10
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure
Article 11

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. En vertu de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 10, c'est-à-dire les amendements nos 26 rectifié bis, 27 rectifié ter, 25 rectifié bis, 18 rectifié bis, 17 rectifié bis, 19 rectifié bis, 20 rectifié bis, 23 rectifié bis, 24 rectifié bis, 21 rectifié bis et 22 rectifié bis jusqu’à la fin du chapitre V bis, après les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 24 vicies du projet de loi.

M. le président. Conformément à l’article 44, alinéa 6, du règlement, je suis saisi, par le Gouvernement, d’une demande de réserve des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 10 jusqu’à la fin du chapitre V bis, après les amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 24 vicies.

Quel est l’avis de la commission sur la demande de réserve ?