M. le président. L'amendement n° 722, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux assurés dont l'activité professionnelle relève de la convention collective des prothésistes dentaires et des personnels des laboratoires de prothèse dentaire du 18 décembre 1978.

Cet amendement a déjà été défendu.

L'amendement n° 723, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux assurés dont l'activité professionnelle relève de la convention collective de la pâtisserie du 30 juin 1983.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Chers collègues, savez-vous que la farine est la première cause d’asthme professionnel en France ? (Sourires sur les travées de lUMP.) Il n’y a pas de quoi rire !

Les boulangers-pâtissiers sont les travailleurs les plus touchés : un professionnel asthmatique sur quatre pratique ce métier.

L’asthme du boulanger est reconnu comme maladie professionnelle ; en effet, cette pathologie respiratoire figure sur le tableau des maladies professionnelles. Les horaires de travail à rallonge des boulangers – ils font partie de « la France qui se lève tôt » – n’arrangent rien.

Nous regrettons que vous refusiez de prendre en compte les conséquences des maladies professionnelles et de la pénibilité sur la carrière de nos concitoyens, car ce refus est source de plusieurs injustices.

Première injustice : vous ne proposez rien de plus qu’un dispositif d’incapacité physique de travail. Il écarte les salariés qui ont été exposés à des produits cancérigènes et qui, de ce fait, ont une espérance de vie réduite, en dépit de l’absence de symptôme. Pourtant, il est démontré scientifiquement que l’exposition à des produits cancérigènes ou encore le travail de nuit sont des facteurs de risque de mortalité prématurée, ainsi que l’a admis l’un des rapports du Conseil d’orientation des retraites.

Le Gouvernement prétend qu’« il est impossible de vérifier, pour le passé, la réalité de ces expositions, faute de traçabilité ». Or, les salariés exposés à des produits cancérigènes bénéficient d’une surveillance médicale spéciale ou renforcée et les dossiers de médecine du travail doivent être conservés pendant cinquante ans.

Deuxième injustice : le dispositif n’est en fait ouvert qu’aux salariés atteints d’une maladie professionnelle ou ayant subi un accident du travail ayant entraîné un taux d’incapacité permanente partielle égal ou supérieur à 20 %.

Troisième injustice : le dispositif n’accordera de droit au départ anticipé que de manière individuelle ; il exclut la constitution a priori de listes de métiers ou de classifications professionnelles réputées pénibles. Cette disposition est particulièrement restrictive. Elle complète l’ensemble des travaux épidémiologiques conduits ces dernières années, notamment sur les expositions à l’amiante, qui permettent d’évaluer les expositions passées avec une bonne fiabilité.

Le Gouvernement affirme qu’une approche collective aurait été injuste, car elle aurait laissé de côté certains salariés qui n’exercent pas ces métiers mais qui sont objectivement usés par leur travail : c’est un mauvais argument. Plutôt que créer de petites injustices, le Gouvernement préfère en créer une énorme en excluant du dispositif un maximum de victimes du travail ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. L'amendement n° 724, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux assurés dont l'activité professionnelle relève de la convention collective des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les assurés dont l’activité professionnelle relève de la convention collective des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968 connaissent des conditions de travail particulièrement précaires.

Ces professions regroupent beaucoup de saisonniers qui éprouvent les plus grandes difficultés à être employés de manière stable tout au long de l’année. À ce titre, elles doivent retenir notre attention.

De surcroît, la situation n’est pas identique selon que les travailleurs sont des hommes ou des femmes – toujours la double peine ! Ces dernières ont un taux de chômage de 20 % hors-saison contre 8 % pour les hommes. Ceux qui ont le plus de mal à trouver un emploi hors-saison sont les plus de quarante-cinq ans, dont 35 % sont inactifs.

Je vous appelle donc, chers collègues, à ne pas repousser notre amendement concernant l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite pour les assurés dont l’activité professionnelle vient d’être évoquée.

M. le président. L'amendement n° 725, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux assurés dont l'activité professionnelle relève de la convention collective de la restauration rapide du 18 mars 1988.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Si les emplois dans la restauration rapide sont bien souvent pourvus par des étudiants, voire des lycéens, bref, par des jeunes, c’est bien parce qu’ils nécessitent une résistance physique et morale que seul le jeune âge peut conférer.

L’employé d’une chaîne de restauration rapide doit non seulement être d’une polyvalence remarquable, mais il doit aussi supporter l’exigence d’un rendement élevé, être suffisamment endurant pour satisfaire les nombreux clients présents aux heures de pointe. Souvent venus pour la rapidité du service, nombre d’entre eux sont pressants, pour ne pas dire méprisants.

Les horaires sont largement variables. Comme les équipes connaissent un turn over relativement important, les employés sont parfois avisés des changements d’horaires la veille au soir, ce qui n’est pas sans conséquence sur leur rythme physiologique et sur leur capacité à se reposer, alors même qu’ils occupent des emplois physiquement très éprouvants. Ce manque de prévisibilité rend par ailleurs leur vie de famille bien compliquée.

En outre, il faut bien savoir que ces salariés restent debout pendant des périodes prolongées et doivent souvent adopter des positions de travail inconfortables. Ils ont également à porter des charges parfois lourdes, des piles de plateaux par exemple. Ils utilisent leur force physique pour remplir des tâches souvent répétitives qui peuvent donner lieu à des blessures, voire à des troubles musculo-squelettiques. La pression est constante sur les genoux, les hanches, les bras, la nuque et le dos, qui est le plus fragile. Je rappelle qu’environ 20 % des employés du secteur hôtellerie, restauration et cafés souffrent de douleurs musculaires à la nuque et un tiers d’entre eux de maux de dos. Ces proportions sont comparables à celles que l’on rencontre dans l’industrie et les mines, selon l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail.

Enfin, doit-on rappeler que l’atmosphère de travail dans la restauration rapide se caractérise par l’odeur de friture, la chaleur, les nuisances sonores qui, nous le savons, participent de la réduction insidieuse de la capacité auditive. Les sols sont souvent glissants, entraînant chutes et blessures.

Si les jeunes sont surreprésentés dans la restauration rapide, ceux qui sont un peu moins jeunes travaillent dans les mêmes conditions et avec les mêmes risques, parce qu’ils n’ont pas le choix, qu’ils ne trouvent pas d’emploi ailleurs ! Il serait insupportable de leur imposer de devoir continuer à travailler deux années supplémentaires avant de voir s’ouvrir leurs droits à la retraite.

Personne ne peut rester insensible aux dangers et à la pénibilité de ces emplois. Je vous invite donc à adopter cet amendement afin que les assurés dont l’activité relevant de la convention collective de la restauration rapide du 18 mars 1988 ne soient pas concernés par l’application de l’article 6.

M. le président. L'amendement n° 730, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux assurés dont l'activité professionnelle relève de la convention collective des théâtres privés du 25 novembre 1977.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Si la notion de théâtre privé renvoie d’abord à un statut économique, celui de société commerciale ne percevant pas de subvention directe émanant de l’État, elle désigne aussi une réalité artistique issue d’une longue tradition théâtrale.

Le théâtre privé perpétue un modèle d’exploitation théâtrale indépendant qui a longtemps caractérisé la vie du théâtre français, avant même l’essor considérable qu’a connu le théâtre subventionné.

Animé par des professionnels passionnés, le théâtre privé présente en France une forte spécificité. La directrice du théâtre Saint-Georges, Marie-France Mignal, nous en expose les traits : « Nous perpétuons un modèle d’exploitation indépendant qui a longtemps caractérisé la vie du théâtre français ». Elle ajoute : « Nous ne nous contentons pas d’animer un lieu, nous sommes nos propres producteurs, nous choisissons et défendons nos spectacles, prenons des risques ».

Cet engagement, nous le retrouvons chez les salariés qui travaillent dans ces salles de spectacles. C’est pourquoi nous devons avant tout refuser d’accentuer les difficultés multiples que rencontrent les salariés et passionnées du théâtre privé dans leur travail.

Cette exception française fait des théâtres privés des lieux de création incontournables, qui demeurent plus que jamais un terrain de découverte, de promotion et de diffusion d’œuvres originales et de nouveaux talents. Il est donc essentiel de défendre ces lieux de création face à la menace que représente la réforme du Gouvernement.

Les salariés relevant de la convention collective des théâtres privés du 25 novembre 1977 se trouvent, tout comme les techniciens de la production cinématographique dont nous avons parlé précédemment, dans une situation précaire et fragile.

Certains observateurs n’ont d’ailleurs pas hésité à souligner le lien entre une certaine forme de précarité inhérente au théâtre privé et son apport essentiel au meilleur de la création dramatique. Ainsi, le critique Jean-Jacques Gautier écrivait-il en 1968 « Dullin, Baty et Jouvet n’ont jamais été subventionnés. On peut même dire que le meilleur de leur œuvre a été réalisé dans la gêne, l’inquiétude du lendemain, l’impécuniosité chronique... ».

Historiquement, nous le voyons, le théâtre privé se sera heurté à beaucoup de difficultés, ce qui nous ramène à la situation actuelle.

Ce n’est pas sans mal que les salariés du théâtre privé cotisent, et ce depuis bien des années. Ce problème ne va pas s’atténuer avec le temps, et surtout pas avec les dispositions qui nous sont proposées.

C’est la raison pour laquelle je vous demande, mes chers collègues, de réserver un accueil favorable à cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 774, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Le report à 67 ans de l’âge ouvrant droit à la retraite à taux plein, mesure emblématique du projet de loi, va toucher davantage les salariés ayant connu des carrières incomplètes.

Je pense bien entendu aux femmes, car ce sont surtout elles qui ont des carrières incomplètes. Le temps partiel a incontestablement un genre : le genre féminin.

Près d’une femme active sur trois travaille à temps partiel contre un homme sur vingt seulement. En France, sur les quelque 5 millions d’actifs à temps partiel, 83 % sont des femmes. Le temps partiel représente 31 % de leurs emplois, avec une durée moyenne de contrat de vingt-trois heures par semaine. Pour les hommes, ces proportions sont respectivement de 18 % et de 6 %. On mesure donc parfaitement les graves conséquences qu’entraînerait pour les femmes l’adoption du recul de 65 ans à 67 ans de l’âge de la retraite sans décote.

À l’heure actuelle, 30 % des femmes doivent attendre 65 ans avant de pouvoir prendre une retraite à taux plein contre 5 % des hommes. Les femmes partent d’ailleurs plus tard à la retraite, à 61,5 ans contre 59,5 ans pour les hommes. Seulement 41 % d’entre elles effectuent une carrière complète contre 86 % des hommes, ce qui entraîne une différence de vingt trimestres cotisés : 137 pour les femmes contre 157 pour les hommes.

En conséquence, le montant moyen des retraites des femmes, qui s’élève à 826 euros, est inférieur de 38 % au montant moyen des retraites des hommes.

En outre, les femmes exercent très souvent des emplois pénibles. Je pense aux caissières de supermarché – de plus en plus polyvalentes –, qui effectuent chaque jour des gestes répétitifs et soulèvent des charges importantes, selon des emplois du temps de plus en plus morcelés.

Je pense aussi à toutes ces femmes qui assurent les emplois difficiles d’aide à la personne et d’aide à domicile auprès des personnes âgées. Ce sont souvent des contrats avec peu d’heures et donc avec des revenus que l’on pourrait presque qualifier de misérables.

Nous pourrions ajouter à cette liste les personnels de santé, notamment les infirmières, dont les conditions de travail sont en train de se dégrader, et dont l’âge légal de départ à la retraite est passé de 55 ans à 60 ans. Cette mesure a été très controversée. Leur classement dans la catégorie A est désormais conditionné au départ à la retraite à 60 ans, alors que, jusqu’à présent, celui-ci s’effectuait à 55 ans.

M. Jacky Le Menn. C’est un véritable marchandage.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Guy Fischer. Le recul à 67 ans de l’âge pour partir sans décote, combiné au seuil de 62 ans, va amplifier la paupérisation des femmes retraitées, creusant ainsi un peu plus les inégalités entre les hommes et les femmes et entre les salariés eux-mêmes. C’est une véritable double peine.

M. le président. L'amendement n° 120, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

I. - À la fin du premier alinéa de l'article L. 351-1 du même code, les mots : « d'un âge déterminé » sont remplacés par les mots : « de l'âge de soixante ans ».

La parole est à Mme Claire-Lise Campion.

Mme Claire-Lise Campion. L’article 6 fait passer la retraite à taux plein sans décote à 67 ans en s’appuyant sur l’âge légal qui, en vertu de l’article 5, est reculé de 60 à 62 ans.

Nous le redisons ici, le maintien de l’âge légal de départ à 60 ans est une garantie pour ceux qui ont atteint leur durée de cotisation ; c’est une protection pour des salariés usés par le travail et qui souhaitent partir, c’est une liberté de choix pour tous les Français. Sa remise en cause est la plus grande des injustices.

À 60 ans, un ouvrier et un cadre ont une espérance de vie qui diffère de sept ans. À cet âge, 72 % des hommes et 60 % des femmes peuvent liquider leur retraite à taux plein. Les salariés ayant commencé à travailler jeunes arrivent souvent à l’âge de 60 ans avec des droits acquis supérieurs à ceux qui sont nécessaires : le dispositif « carrières longues », seule avancée de la loi de 2003, a été considérablement restreint depuis. Le maintien de l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans est, pour le groupe socialiste, une exigence. C’est pourquoi nous proposons, sur la base de droits garantis pour tous, dont fait partie le maintien à 60 ans de l’âge légal de départ à la retraite, d’aller vers une retraite choisie, adaptée aux besoins et souhaits de chacun.

La création d’un compte-temps pour les nouvelles générations permettra de décloisonner les trois temps de la vie : formation, travail et retraite. Grâce à ce compte-temps, chacun pourra choisir de prendre une année sabbatique, pour répondre à un engagement associatif, pour s’occuper d’un parent, pour reprendre des études ou pour réduire progressivement son temps de travail au lieu de subir le couperet de la retraite.

Cet amendement vise à maintenir l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans, âge qui constitue une garantie et une borne indispensable. C’est pourquoi nous vous invitons à l’adopter.

M. le président. L'amendement n° 575, présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 1

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

Le deuxième alinéa de l'article L. 351-1 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Le coefficient de minoration éventuellement applicable au salaire annuel de base devient dégressif entre soixante-cinq et soixante-sept ans. La dégressivité du coefficient de minoration ne pourra être inférieure à 30 % d'une année sur l'autre. »

La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. Cet amendement vise à organiser une sortie de la décote en « sifflet » entre 65 et 67 ans dans les régimes de salariés. Cette disposition s’inscrit dans l’esprit de la démarche que nous défendons : mieux vaut avoir des systèmes en sifflets plutôt que de créer de regrettables effets de seuil.

M. David Assouline. Je n’ai pas compris le sifflet !

M. Nicolas About. Eh bien, je vais vous l’expliquer.

Nous proposons que la décote devienne dégressive entre 65 et 67 ans. Ainsi, la décote appliquée au salaire de base d’un travailleur qui liquiderait ses droits à 66 ans serait inférieure à celle qui lui serait appliquée s’il les liquidait à 65 ans. Elle serait encore inférieure s’il les liquidait à 66 ans et demi. Ainsi, il devient intéressant de continuer à travailler, les pénalités diminuant avec l’effort consenti.

M. David Assouline. Ce sera donc efficace.

M. Nicolas About. Nous le croyons. Cela devrait vous conduire à voter notre amendement, mon cher collègue.

M. le président. L'amendement n° 838, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

mentionné à l'article L. 161-17-2

par les mots :

de soixante-cinq ans

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En combinant recul de l’âge légal et hausse de la durée de cotisations, le Gouvernement applique la double peine aux salariés : travailler plus pour gagner moins !

La poursuite du relèvement de la durée de cotisations de 40,5 annuités jusqu’à 41,5 annuités en 2020 fera encore baisser le niveau moyen des pensions, alors que celles-ci ont déjà diminué de 15 % et 20 % depuis les réformes de « Balladur- Fillon ».

Le Gouvernement s’assied donc allégrement sur son engagement de « ne pas baisser les pensions » pourtant formulé dans son document d’orientation du 14 mai. Ce relèvement de la durée de cotisations va amplifier l’application de la décote sur les pensions instaurée par la loi Fillon. Même dans l’hypothèse où ils travailleraient jusqu’à 65 ou 66 ans, les salariés ayant des durées insuffisantes de cotisations, comme les femmes aux carrières fractionnées, verront malgré tout leur pension baisser. En effet, le Gouvernement a décidé de relever de 65 à 67 ans l’âge à partir duquel la décote cessera de s’appliquer aux salariés n’ayant pas atteint une durée suffisante de cotisations.

Pour justifier la fin de la retraite à 60 ans et de celle sans décote à 65 ans, le Gouvernement prétend que l’on devrait travailler plus longtemps parce que l’on vit plus vieux. Pourtant, l’espérance de vie en bonne santé n’est que de 63 ans en France, et même de 59 ans pour les ouvriers !

Depuis un siècle, c’est pourtant le chemin exactement inverse que les conquêtes sociales avaient permis d’accomplir : à mesure que l’espérance de vie s’accroissait, l’âge de la retraite s’abaissait. Cela a été possible grâce à l’augmentation de la richesse produite par les travailleurs. Deux actifs de 2010 produisent autant de richesse que trois actifs de 1982, date à laquelle la gauche a instauré la retraite à 60 ans.

Dire, comme le Gouvernement, que le nombre d’actifs par retraité diminue ne suffit donc pas à expliquer le problème de financement des retraites. C’est la manière de partager les richesses produites qui est en cause. Depuis 1982, la part du travail dans la richesse nationale a reculé de 8 points, soit l’équivalent de 170 milliards d’euros actuels, qui sont passés des poches du travail à celles du capital. Autant de ressources qui manquent pour financer les retraites.

Cet amendement tend à conserver le dispositif législatif actuellement en vigueur, en précisant que 65 ans reste l’âge permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein.

M. le président. L'amendement n° 775, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Comme nous l’avons démontré en défendant notre précédent amendement, le dispositif que vous proposez à l’article 6 est un recul inacceptable pour les femmes.

Toutefois, la précarité ne touche pas que les femmes. Les jeunes, diplômés ou non, qui entrent sur le marché du travail y sont confrontés à des degrés variables : stage de plus de six mois, CDD à répétition, petits boulots. Il faut aujourd’hui près de dix ans pour qu’un jeune se stabilise dans un emploi. Ces dix années font que, arrivées à 60 ou 62 ans, ces personnes n’auront de toute façon pas le nombre de trimestres nécessaires à une retraite à taux plein.

Jusqu’à quand ces générations devront-elles travailler ? Et dans quel état de santé, sachant que l’espérance de vie en bonne santé, évaluée par Eurostat, est de 63 ans pour les hommes et 64 ans pour les femmes ?

Or plusieurs générations d’actifs entrés dans la vie professionnelle dans ces conditions arriveront à l’âge de la retraite au moment même où vos dispositions s’appliqueront. Si, actuellement déjà, un retraité sur six attend 65 ans pour prendre une retraite sans décote, dans vingt ans, ce choix sera non plus l’exception, mais la règle.

Dès lors, comment peut-on oser parler d’un système juste ? En fait, ce système est d’autant plus injuste que les salariés supporteront 85 % du financement de votre réforme.

M. le président. L'amendement n° 592 rectifié bis, présenté par MM. About, Arthuis, Vanlerenberghe et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4 

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

II. - Le deuxième alinéa de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« 1° les assurés nés à compter du 1er janvier 1962 qui atteignent l'âge de soixante-sept ans ;

« 1° bis les assurés nés avant le 1er janvier 1962 qui atteignent un âge fixé par décret. Cet âge augmente à raison de deux mois par génération dans la limite de soixante-sept ans ; »

La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. Mon argumentaire vaudra défense des amendements de coordination qui seront appelés dans la suite de notre discussion.

L’amendement no 592 rectifié bis vise à étaler plus largement dans le temps le relèvement de la borne d’extinction de la décote. Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi prévoit que cet âge augmentera de 65 à 67 ans en six ans, soit à raison de quatre mois par an entre 2017 et 2023.

Nous proposons, pour nous aligner sur le système allemand, de doubler ce laps temps, afin de permettre une entrée en vigueur plus progressive du relèvement de la seconde borne d’âge. Ainsi, l’âge d’extinction de la décote ne progresserait que de deux mois par an. Tout en conservant le principe du passage à 67 ans, la mesure entrerait alors en vigueur non plus en six ans, mais en douze ans, de 2017 à 2029.