M. Alain Vasselle, rapporteur. Cela vous arrange !

M. Guy Fischer. Pour une fois, je suis d’accord avec ce qu’il a dénoncé ; vous aussi d’ailleurs, monsieur le rapporteur. (M. le rapporteur s’exclame.)

« En 2005, on a posé un verrou. Le Gouvernement veut déjà le faire sauter ! Bien entendu, il nous promet que ce sera la “der des ders”, mais, dans trois ou quatre ans, on trouvera d’autres raisons pour repousser l’échéance... ».

Cette déclaration n’a pas manqué d’irriter Nicolas Sarkozy ! Il a obtenu que ni lui ni Jean-Luc Warsmann, député UMP tout aussi insatisfait de ce projet de loi organique, que d’aucuns ont prétendu frondeurs, ne siègent en commission mixte paritaire, alors que Jean-Luc Warsmann avait été nommé rapporteur de la commission saisie au fond pour ce texte et Yves Bur, rapporteur de la commission saisie pour avis. Du jamais vu !

Il faut dire que, comme le soulignait Yves Bur, « ce débat essentiel est pour nous l’occasion d’envoyer le signal que l’heure n’est plus aux solutions de facilité. Nous le devons aux générations futures et à l’ensemble de nos concitoyens, à qui nous devons prouver que la classe politique refuse la fuite en avant ». On ne saurait mieux dire ! Au final, comme le soulignait Isabelle Debré, ce « bricolage » n’est pas à la hauteur des enjeux.

Que proposez-vous ? De faire disparaître artificiellement la dette sociale, actuelle et à venir, en la transférant à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, laquelle devrait profiter du siphonage du Fonds de réserve pour les retraites et de l’affectation du produit de la contribution sociale généralisée dédié à l’origine à la branche famille. Cette dernière devrait, quant à elle, bénéficier des recettes des trois taxes créées initialement pour alimenter la Caisse d’amortissement de la dette sociale !

Bref, on assiste là à un petit jeu de bonneteau. Certes, les millions escomptés changent de destinataires, mais ils continuent à créer de l’incertitude. En effet, si, lors du passage de ce projet de loi organique devant le Sénat, nous avions dénoncé le caractère non pérenne des recettes issues des trois taxes assises sur les assurances et les mutuelles, nous ne pouvons que formuler les mêmes objections pour leur orientation en direction de la branche famille. Cette branche est à peine excédentaire que vous proposez de remplacer sa ressource régulière et pérenne par une ressource aléatoire ! De ce fait, la pérennité du financement de la branche famille est loin d’être acquise et, de manière globale, en déstabilisant cette branche, c’est bien toute la sécurité sociale que vous fragilisez.

D’ailleurs, à propos des recettes provenant du secteur des assurances, le ministre reconnaissait lui-même que, en raison du manque de stabilité et de dynamisme, de la « dynamique décroissante d’une partie des nouveaux prélèvements, il faudrait, dès l’an prochain, de nouvelles recettes, la suppression de niches fiscales ou sociales ou, à défaut, une hausse progressive de la CRDS », mesure que vous repoussez après 2012.

Cette déclaration appelle de notre part quelques observations.

Tout d’abord, les taxes que vous entendez créer, en particulier la taxe sur les « contrats responsables », vont être répercutées par les assurances et les mutuelles.

M. François Baroin, ministre. Pas obligatoirement !

M. Guy Fischer. C’est ce qu’Alain Vasselle a rapporté. Cela constituera une nouvelle réduction du pouvoir d’achat de nos concitoyens.

Nous sommes opposés à une hausse de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, car les plus riches, ceux qui bénéficient du bouclier fiscal, en sont exonérés. De plus, cette mesure constituerait un nouveau transfert de financement de la protection sociale des entreprises vers les foyers, qui assument déjà près de 44 % du financement de celle-ci ! Enfin, cette mesure contribuerait à accroître la fiscalisation de notre protection sociale, ce qui, à notre sens, non seulement n’est pas souhaitable, mais est injuste.

Enfin, ces taxes n’étant pas pérennes, nous ne saurions nous en satisfaire.

Il eut été préférable de repousser l’examen de ce projet de loi organique après la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Cela nous aurait permis de trouver un financement plus sûr pour la Caisse d’amortissement de la dette sociale et pour la branche famille.

Je rappelle qu’à l’occasion du projet de loi portant réforme des retraites notre collègue Alain Gournac était intervenu pour manifester sa satisfaction de voir le Gouvernement prendre enfin en compte les familles. Je le dis sans esprit polémique, mais toutefois avec quelque ironie, j’aurais aimé savoir s’il était aujourd’hui satisfait de cette mesure qui plongera immanquablement dans le rouge la branche famille et contribuera à créer et à accentuer la dette de demain !

En tout cas, telle est bien, à propos de cette mesure, la certitude du député Yves Bur, qui, n’étant pas en manque d’inspiration, précisa : « Il s’agit d’une mesure qui revient à dépouiller la sécurité sociale d’une recette dynamique pour la remplacer par une recette incertaine. »

En réalité, le pillage – le siphonage, devrais-je dire – du Fonds de réserve pour les retraites fait courir d’importants risques pour l’avenir. Quand tous les effets de la réforme des retraites, y compris les plus désastreux sur le plan social, se seront fait sentir et que la branche vieillesse sera encore en déficit, il ne sera plus possible de compter sur les ressources du Fonds pour combler les déficits. C’est la raison pour laquelle nous considérons que la branche vieillesse ne sera pas en équilibre.

Il faut dire que votre scénario intègre le versement d’un éventuel transfert des excédents des UNEDIC, ce qui exigerait le retour du taux de chômage à 4,5 %. Qui y croit à l’heure actuelle ? Peut-être seulement vous, monsieur le ministre, et le Gouvernement ! Ce retour est en effet quasi improbable compte tenu de la situation actuelle, à moins que, pour y parvenir, vous ne décidiez, une fois de plus, de durcir les conditions d’accès à l’indemnisation chômage. Mais cette décision serait lourde de conséquences pour les salariés privés d’emploi comme pour les départements, qui auraient alors la charge d’assumer l’accroissement des dépenses sociales, particulièrement celui de l’allocation de solidarité spécifique et du revenu de solidarité active.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est au prix d’un chantage, sous la forme de l’engagement de la responsabilité de son Gouvernement, que François Fillon a obtenu, à l’Assemblée nationale, une majorité pour adopter ce texte.

Malgré les propos virulents tenus par certains députés UMP, ce texte n’est guère différent de celui qui est sorti du Sénat. La seule nouveauté réside dans le récipiendaire de l’affectation des taxes non pérennes. Et si ce texte n’est pas résolument différent, c’est que, comme pour le projet de loi portant réforme des retraites, votre majorité s’est refusée à poser clairement la question des financements de notre protection sociale.

Vous vous êtes contentés jusqu’alors de quelques rustines, espérant ainsi tenir un an de plus, jusqu’après l’élection présidentielle, alors qu’il aurait fallu tout faire pour garantir dès aujourd’hui la pérennité de la sécurité sociale. Cela aurait notamment permis d’éviter de prévoir les transferts des déficits futurs vers la CADES.

Ce transfert est politiquement non seulement inconcevable pour qui veut garantir l’avenir de l’héritage du Conseil national de la Résistance, mais également peu conforme au principe de la loi organique de 2005.

On peut d’ailleurs se demander si un tel dispositif est conforme à la Constitution, puisqu’il prévoit un transfert régulier, pendant plusieurs années, d’une dette qui n’existe pas encore. Or la mission de la Caisse d’amortissement de la dette sociale n’est pas d’être un aspirateur à mauvaise gestion sociale !

Mes chers collègues, il est grand temps que vous sortiez du dogme du zéro prélèvement obligatoire supplémentaire ou plutôt, devrais-je dire, du zéro prélèvement obligatoire pour les riches et les entreprises,...

M. Alain Vasselle, rapporteur. Oh, arrêtez !

M. Guy Fischer. ... car la hausse de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, qui paraît inéluctable dans l’avenir, surtout si vous ne prenez pas les mesures qui s’imposent, frappera d’abord les ménages et particulièrement les plus modestes. Or, vous le savez, c’est Alain Vasselle qui me l’a appris, la contribution pour le remboursement de la dette sociale a l’avantage d’avoir une assiette réputée très large et à fort rendement.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Oui !

M. Guy Fischer. Ce projet de loi organique soulève l’opposition résolue des six présidents des caisses nationales – retraite, maladie, famille, recouvrement, Mutualité sociale agricole et régime social des indépendants –, au motif que l’article 1er fragilise les recettes de la sécurité sociale et prive, dès 2013, le régime général de près de 1 milliard d’euros de ressources que, nous en sommes certains, vous saurez trouver dans les poches de nos concitoyens !

Les membres du groupe CRC-SPG sont persuadés que d’autres mesures, plus justes et plus durables, sont possibles. C’est pourquoi nous voterons contre ce projet de loi organique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ressortons de cette commission mixte paritaire sur le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale aussi insatisfaits que nous y sommes entrés !

Pouvait-il en être autrement ? Non, tant la surdité de nos collègues de la majorité (M. le rapporteur s’exclame.) – surdité, du reste, toute élyséenne – ne pouvait trouver son Sonotron – sans publicité aucune pour cette prothèse auditive –, nonobstant quelques velléités de résistance. Celles-ci s’étaient exprimées dans les rangs de la majorité tant à l’Assemblée nationale, par les voix de Jean-Luc Warsmann, président de la commission de lois et rapporteur, et d’Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, tous deux promptement écartés de la délégation représentant les élus majoritaires de l’Assemblée nationale à la commission mixte paritaire, qu’au Sénat, par la voix de notre collègue Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales,...

M. Alain Vasselle, rapporteur. C’est une bonne référence !

M. Jacky Le Menn. ... dont les analyses sont souvent pertinentes,...

M. Alain Vasselle, rapporteur. Merci !

M. Jacky Le Menn. ... comme j’ai encore eu l’occasion de le dire ce matin. Voilà qui ne rend que plus spectaculaire et regrettable la conclusion que notre collègue en tire en s’alignant, en rase campagne, au moment du vote, sur ses collègues de la majorité. Comprenne qui pourra !

M. Alain Vasselle, rapporteur. De la part d’un paysan, ce n’est pas étonnant !

M. Jacky Le Menn. Tout à fait !

Pourtant, les six élus de gauche siégeant à cette commission mixte paritaire ont rappelé les raisons pour lesquelles ils étaient fermement opposés à l’allongement de la durée de vie de la CADES, allongement qui fait porter notre dette sociale sur les générations futures, c’est-à-dire sur nos enfants, alors que cette dette est due pour l’essentiel à la gestion inconséquente des responsables politiques de nos générations,…

M. Alain Vasselle, rapporteur. Et de la crise !

M. Jacky Le Menn. … et particulièrement de ceux qui nous gouvernent actuellement.

J’ajoute que les conséquences de la fameuse « crise », dont vous venez encore de faire état, monsieur le rapporteur, et qu’on ne peut tout de même pas imputer aux couches populaires et aux plus défavorisés, n’expliquent pas tout.

Malgré la suggestion émise par la commission des finances de l’Assemblée nationale en faveur d’une solution alternative permettant de trouver une source de financement de près de 5 milliards d’euros sans avoir recours à l’expédient facile adopté par le Gouvernement ; malgré la possibilité évoquée par de nombreux parlementaires d’augmenter la CRDS ou de revoir son assiette, comme nous l’avions suggéré, solution proposée à plusieurs reprises au sein de notre assemblée lors de l’examen des précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale – vous avez d’ailleurs évoqué cette idée voilà un instant, monsieur le rapporteur, alors que nous examinions en commission le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 – ; malgré l’amendement de suppression de l’article 1er de ce projet de loi organique, défendu de manière argumentée par notre collègue Bernard Cazeau, mais repoussé par nos collègues de la majorité siégeant en commission mixte paritaire ; malgré les multiples invocations en faveur d’autres solutions de financement pérennes – je renvoie pour mémoire à mes propres propositions exposées dans le cadre de la discussion générale de ce projet de loi organique, ainsi qu’à celles qui ont été développées par Bernard Cazeau ; malgré le choix controversé du Gouvernement, que nous avons de nouveau dénoncé en commission mixte paritaire, de priver la branche famille, historiquement excédentaire, mais qui s’enfonce progressivement elle aussi dans les déficits – ils atteignent 4,8 milliards d’euros en 2009, 2,7 milliards d’euros sont prévus pour cette année et 3,6 milliards d’euros pour l’année prochaine –, d’une partie de la CSG qui lui était attribuée pour financer la dette sociale ; malgré le refus massif de voir « siphonné » le Fonds de réserve pour les retraites ; enfin, malgré le rejet de cette mesure par les conseils d’administration des six caisses concernées, rien n’y fit, la messe était dite !

Notre amendement repoussé, le projet de loi organique fut adopté sans coup férir ; les coups et les coûts seront pour les générations à venir ! Passons vite à autre chose, car le prince qui nous gouverne est pressé ; il nous faut vite nous atteler – aujourd’hui même ! – à une autre commission mixte paritaire, celle qui est relative au projet de loi portant réforme des retraites, dont la chute, comme nous le redoutions, est identique.

Mes chers collègues, puisque l’on vous dit que la meilleure et seule voie possible est celle qui est tracée par le Président de la République et ses proches conseillers, quelquefois – si peu ! – par ses ministres, aucun doute n’est plus permis ! Continuez ainsi, sans vous poser de questions : continuez à ne pas écouter les voix discordantes qui émergent au sein même de votre majorité parlementaire, à ignorer l’opposition et à mépriser ceux qui manifestent en masse dans les rues contre le démantèlement des fondements de notre système social ! Puisque le roi a toujours raison et qu’il faut tenir jusqu’en 2012, aucun argument n’est recevable ! Un jour, peut-être, ce roi se trouvera seul et nu, mais c’est une autre histoire.

Pour revenir au sujet qui nous occupe aujourd’hui, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous confirme que nous maintenons les positions que nous avions exposées au moment où ce projet de loi organique était venu en discussion devant notre assemblée. Nous réaffirmons solennellement que le fait de reculer de quatre ans la durée de vie de la CADES, malgré les précautions prises par la commission sociale puis par notre assemblée, qui prévoient un dispositif en cas de « retour à meilleure fortune », est une mauvaise décision. Nous la rejetons.

Par conséquent, notre groupe votera contre l’adoption de ce projet de loi organique, qui n’a pas été modifié par la commission mixte paritaire réunie le 20 octobre dernier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Marsin.

M. Daniel Marsin. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il est temps pour notre assemblée de se prononcer définitivement sur l’avenir de la CADES et sur les modalités à venir de la gestion de la dette sociale.

Alors que notre protection sociale est de moins en moins financée et que les déficits ne cessent chaque année de s’accumuler, le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale prévoit de transférer à la Caisse d’amortissement de la dette sociale 130 milliards d’euros, de procéder à des prélèvements nouveaux et, surtout, de prolonger de quatre ans la durée de vie de la CADES.

Rappelons que la CADES a été créée en 1996 pour reprendre les dettes de la sécurité sociale, soit 21 milliards d’euros à l’époque. On l’alimenta en créant la contribution pour le remboursement de la dette sociale représentant 0,5 % des revenus salariaux, pensions de retraite, allocations familiales et revenus financiers. Comme trop souvent dans notre pays, cette structure annoncée comme provisoire ne l’est pas restée longtemps. Chargée d’amortir de nouvelles dettes, la CADES a vu son bail prolongé à plusieurs reprises, d’abord jusqu’en 2009, puis pour une durée indéterminée, mais sans que des ressources nouvelles lui soient affectées.

Ainsi, le Parlement avait voté en 2005 une loi assurant notamment des ressources nouvelles à la CADES en cas de transfert de toute nouvelle dette, la dissolution de la caisse étant fixée pour 2021. En 2006, après transfert d’une nouvelle dette de 27 milliards d’euros, une ressource supplémentaire a été créée, grâce à l’affectation à la CADES de la contribution sociale généralisée, représentant 0,2 % des revenus.

Et voilà qu’aujourd’hui il nous est demandé de modifier le régime de la CADES, afin qu’elle puisse absorber, notamment, les nouveaux déficits de la crise. Au total, ce sont près de 130 milliards d’euros de déficits cumulés qui doivent lui être transférés ! Pour ce faire, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire a choisi de reporter à 2025 la dissolution de cette structure, tout en lui attribuant un peu plus de 3 milliards d’euros de ressources nouvelles.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, notre groupe s’interroge sérieusement : était-il raisonnable de transférer le poids énorme de notre dette sociale aux générations futures ? Nous ne le pensons pas et nous ne sommes pas les seuls ! La situation est telle que – fait inhabituel – le rapporteur du texte et le rapporteur pour avis à l’Assemblée nationale n’ont pas participé aux travaux de la commission mixte paritaire. C’est dire le malaise !

Nous aurions pu approuver le principe du transfert du déficit à la CADES à deux conditions. Mais celles-ci n’ont pas été entièrement satisfaites par la commission mixte paritaire.

Premièrement, il aurait fallu que ce déficit soit financé par une recette pérenne et simple, par exemple la CRDS.

Deuxièmement, il aurait fallu prévoir que, à l’avenir, à partir de 2012, nous votions des projets de loi de financement de la sécurité sociale en équilibre, afin de ne pas créer de nouveaux déficits, ce qui ne sera malheureusement pas le cas.

Au demeurant, un autre point nous semble tout aussi indéfendable, à savoir le prolongement de quatre années de la durée de vie de la CADES. Bien entendu, cela ne paraît pas une longue période, cela ne représente pas une génération. Toutefois, ces années s’ajoutant aux précédentes, la durée de vie de la caisse aura en réalité été prolongée de 2009 à 2025, soit de seize ans au total. Surtout, nos dépenses de 2009, 2010 et 2011 seront payées de 2021 à 2025. Voilà qui est difficilement acceptable : chaque génération doit régler ses propres dépenses. Ceux qui commenceront à travailler en 2022 ont aujourd’hui entre 6 ans et 8 ans : quel avenir leur laisserons-nous ?

Je rappellerai à cet égard les propos du président de la commission des lois de l’Assemblée nationale : « On va emprunter pour faire payer une partie du prix des boîtes de médicaments consommés actuellement par nos concitoyens, une partie des soins médicaux et des prestations sociales, par les Français qui travailleront au-delà de 2022, c’est-à-dire faire des emprunts à long terme pour payer des déficits de fonctionnement.[…] Lancer des emprunts lorsque l’on sait que l’on n’a pas l’argent nécessaire pour les rembourser, cela s’appelle faire de la cavalerie ! »

Ces propos, marqués par le plus élémentaire bon sens, ont par la suite été confirmés par le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, qui déclarait à son tour : « Je considère qu’il est de notre responsabilité morale de cesser de nous décharger de nos responsabilités financières, quotidiennes, sur nos jeunes. » On ne saurait mieux dire !

Pour notre part, nous regrettons que notre assemblée, habituellement plus encline à la recherche de solutions financièrement équilibrées et socialement équitables, ait décidé de maintenir en l’état les dispositifs issus des travaux de l’Assemblée nationale. Dès lors, pour ne pas cautionner ce qui semble être le sort réservé aux générations futures de notre pays, la majorité du groupe du RDSE votera contre le projet de loi organique issu des travaux de la commission mixte paritaire.

Pour ma part, tout en comprenant et partageant les récriminations de mes collègues radicaux de gauche, mais conscient des contraintes de l’heure, notamment des conséquences de la crise, et surtout, monsieur le ministre, connaissant vos convictions et convaincu de votre volonté de modifier la donne, je vous encouragerai en m’abstenant. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de lUnion centriste et de lUMP.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? …

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, le Sénat se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale
Article 2

Article 1er

(Texte de l’Assemblée nationale)

L’article 4 bis de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa :

a) Les mots : « des recettes de » sont remplacés par les mots : « du produit d’impositions de toute nature ou de la réalisation d’actifs affecté à » ;

b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« L’assiette des impositions de toute nature affectées à la Caisse d’amortissement de la dette sociale porte sur l’ensemble des revenus perçus par les contribuables personnes physiques. » ;

2° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au premier alinéa, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 peut prévoir des transferts de dette conduisant à un accroissement de la durée d’amortissement de la dette sociale dans la limite de quatre années. L’annexe à ce projet de loi, mentionnée au 8° du III de l’article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale, justifie le respect de cette condition. À titre dérogatoire, les transferts de dette prévus par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 peuvent en outre être accompagnés de l’augmentation de recettes assises sur les revenus du patrimoine et les produits de placement.

« La loi de financement de la sécurité sociale assure chaque année le respect de la règle fixée aux deux premiers alinéas. » ;

3° Au second alinéa, les mots : « de l’alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « du présent article » ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si, au cours de deux exercices consécutifs, les conditions économiques permettent d’enregistrer un accroissement des impositions de toute nature affectées à la Caisse d’amortissement de la dette sociale supérieur à 10 % des prévisions initiales, la loi de financement de la sécurité sociale pour l’exercice suivant contribue à ramener la fin de la durée de cet organisme à l’horizon prévu avant la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. »