M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais vous ne pouvez pas m’empêcher de penser qu’une telle réforme contient à terme la disparition des IUFM et des concours. L’État recrutera alors des enseignants vacataires et non plus par la voie du concours. Certes, le coût sera moins élevé, mais cet objectif d’économie à court terme et cette pure vision comptable constituent un renoncement à investir, ce qui sera encore plus coûteux à long terme. Cela montre que l’éducation nationale n’est plus une priorité dans notre pays.

C’est la raison pour laquelle, cette réforme, si mal préparée, fait l’unanimité contre elle. L’art d’enseigner ne s’improvise pas. C’est un métier exigeant et extrêmement éprouvant.

application de la nouvelle bonification indiciaire aux enseignants référents

M. le président. La parole est à Mme Gélita Hoarau, auteur de la question n° 1036, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Mme Gélita Hoarau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées reconnaît le droit à tout enfant porteur de handicap d’être inscrit dans l’école la plus proche de son domicile. Cette loi permet l’application d’une éducation adaptée aux besoins et aux attentes de l’enfant et crée le projet personnalisé de scolarisation, dont la meilleure mise en œuvre, tout au long du parcours de formation, est assurée par l’enseignant référent.

Cet enseignant est un pivot de la scolarisation des enfants porteurs de handicap. Il est l’interlocuteur privilégié des familles, de la maison départementale des personnes handicapées, des établissements scolaires et médico-sociaux et des autres partenaires.

Or, selon les chiffres de l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l’UNAPEI, en 2008, on dénombrait 1 391 enseignants référents pour 265 000 enfants et adolescents porteurs de handicap.

Parallèlement, la demande de scolarisation des enfants est aussi forte que justifiée. Ainsi, 30 % des demandes de la maison départementale des personnes handicapées de la Réunion concernent des enfants handicapés.

Ce manque de moyens humains pourrait être pallié, notamment par certains réajustements réglementaires. Créée par l’arrêté du 17 août 2006, la catégorie des enseignants référents ne peut prétendre bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire, dite NBI, fixée par le décret du 6 décembre 1991, c’est-à-dire antérieurement à sa création.

Monsieur le ministre, une mise à jour du texte de référence de la NBI en faveur des enseignants référents ne serait-elle pas envisageable ? Cette actualisation réglementaire permettrait d’éviter une désaffection de cette fonction de la part des enseignants spécialisés, partenaires incontournables d’une politique efficace de suivi des enfants porteurs de handicap.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Madame le sénateur Hoarau, vous attirez mon attention sur la situation des enseignants référents de la scolarité des élèves handicapés.

Vous avez rappelé à juste titre que ces personnels jouent un rôle très important auprès des familles d’enfants handicapés, des maisons départementales des personnes handicapées et des établissements. Ils sont en quelque sorte la cheville ouvrière de la politique volontariste de scolarisation des élèves handicapés menée par le Gouvernement depuis 2005.

Permettez-moi de rappeler que nous avons enregistré des progrès considérables dans ce domaine. Le nombre d’élèves handicapés scolarisés a augmenté de plus de 40% depuis 2005. Nous sommes sur le point d’atteindre notre objectif de 2 000 unités localisées pour l’inclusion scolaire, les anciennes unités pédagogiques d’intégration. Je rappelle aussi que plus de 13 000 enseignants spécialisés contribuent à la scolarisation des élèves handicapés.

Pour accompagner cette mobilisation, le ministère déploie des moyens importants. Dans le projet de budget de l’éducation nationale pour l’année 2011 qui va vous être soumis, les crédits à destination des élèves handicapés seront en augmentation de plus de 13 %. Dans le cadre de cet effort budgétaire sans précédent, les enseignants référents de la scolarité des élèves handicapés jouent un rôle capital, en favorisant la cohérence de la mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation et en assurant un contact permanent entre les élèves et leur famille, ainsi qu’entre les équipes enseignantes et les équipes soignantes.

Afin de tenir compte de l’importance de cette fonction, nous avons décidé d’accroître le nombre de ces personnels : de 1 214 durant l’année scolaire 2007-2008, ils sont passés à 1 478 à la rentrée 2010.

Comme vous l’avez indiqué, madame le sénateur, les fonctions de ces enseignants référents ne sont pas au nombre de celles qui donnent lieu à l’attribution d’une nouvelle bonification indiciaire. En effet, ces personnels n’étant pas titulaires d’une classe fixe, que ce soit une classe d’intégration scolaire ou une classe de perfectionnement, ils ne peuvent être éligibles aux mêmes indemnités que les professeurs ayant des élèves à temps complet.

C’est la raison pour laquelle nous avons voulu reconnaître la spécificité du travail et l’engagement de ces enseignants référents. À cette fin, nous avons créé une indemnité spécifique, instituée par le décret du 24 août 2010 applicable dès le 1er septembre dernier, qui s’élève à 929 euros par an.

Pour les enseignants référents du premier degré, titulaires d’un diplôme professionnel spécialisé pour la scolarisation des élèves en situation de handicap, cette indemnité est cumulable soit avec l’indemnité de fonctions particulières, d’un montant de 834 euros, soit avec une bonification indiciaire de 15 points prévue par le décret du 26 janvier 1983 pour les instituteurs.

Vous le voyez donc, madame le sénateur, nous reconnaissons l’engagement de ces personnels, car ils constituent un maillon indispensable dans la chaîne de scolarisation des élèves handicapés. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place cette mesure d’indemnité spécifique.

application des règles sur le bien-être animal

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 788, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

M. Gérard Bailly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le bien-être animal.

J’interviens en tant que président du groupe d’études de l’élevage du Sénat. Ayant participé au Sénat au groupe de travail « Animal et société » dans le cadre des projets de loi Grenelle I et II, j’ai pu mesurer l’attention portée au bien-être animal dans les élevages et les transports.

Il y a quelques mois, l’Union européenne envoyait une brochure à tous les éleveurs de l’Union, intitulée « PAC et bien-être des animaux : des normes élevées dans l’UE ». Ce critère de bien-être est entré dans la plupart des exploitations et on ne peut qu’y souscrire.

La brochure indique que « ces normes de bien-être peuvent conférer un avantage concurrentiel dans la mesure où les consommateurs européens sont prêts à payer davantage pour la viande, le lait ou les œufs produits dans des conditions respectueuses du bien-être, à condition qu’ils soient effectivement commercialisés comme des produits de première qualité. »

Hélas, dans la conjoncture actuelle, les éleveurs n’ont pas perçu dans les prix le moindre retour de leurs efforts. J’aimerais savoir ce que vous comptez faire pour valoriser les efforts réalisés dans ce domaine par la profession.

Par ailleurs, de nombreuses lois européennes en matière de bien-être sont déjà en vigueur afin que les animaux ne subissent pas de douleurs ni de souffrances, principalement au niveau de l’abattage. Conformément à la définition du protocole sur la protection et le bien-être des animaux annexé au traité CE en 1999, ces règles reflètent les cinq libertés largement reconnues comme définissant l’idéal du bien-être animal : être à l’abri de la faim et de la soif, ne pas souffrir de contrainte physique, avoir la liberté d’exprimer des comportements normaux, être à l’abri de la peur et de l’angoisse, ne pas être sujet à la douleur, aux blessures et aux maladies.

Sans parler des sommes importantes engagées dans le budget de l’État ni des préjudices subis par les éleveurs et les bergers, j’aimerais comprendre comment, face à ces textes, on peut tolérer que, du fait de la réintroduction des prédateurs – loups, ours, lynx –, des milliers d’agneaux soient blessés. Pas moins de 3133 ont été mutilés ou déchiquetés dans des conditions exécrables, sans parler d’autres animaux comme les bovins ou le jeune gibier qui sont aussi attaqués.

Est-ce que l’Europe et le gouvernement français vont accepter encore longtemps la réintroduction des prédateurs et ne pas intervenir pour en limiter les effectifs ? L’actualité montre tous les jours les dégâts qu’ils causent et le profond découragement des éleveurs qui en résulte, notamment dans les élevages ovins.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. Jean-Louis Borloo.

La France s’est engagée à protéger les grands prédateurs que sont l’ours, le loup et le lynx, tant à l’échelon international, dans le cadre de la convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe, qu’à l’échelon communautaire, en application de la directive du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

Dans le droit national, ces dispositions sont transcrites dans le code de l’environnement et par l’arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection.

Des dérogations au statut de protection peuvent être accordées, notamment pour prévenir des dommages importants à l’élevage – vous y avez fait référence, monsieur le sénateur –, à condition toutefois qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien de l’espèce dans un état de conservation favorable.

De ce fait, des mesures générales de limitation des effectifs ne peuvent être envisagées, bien que des opérations de destruction puissent être autorisées pour répondre ponctuellement aux problèmes qui se posent.

Le plan d’action national sur le loup 2008-2012 prévoit ainsi la mise en œuvre d’une gestion différenciée de cette espèce en fonction de critères liés notamment aux caractéristiques des systèmes d’élevage concernés. L’arrêté du 3 juin 2009 fixe les conditions et les limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup.

Concernant l’application des règles du bien-être animal aux animaux d’élevage exposés à la prédation, l’annexe de la directive européenne du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages précise que « les animaux non gardés dans des bâtiments sont, dans la mesure où cela est nécessaire et possible, protégés contre les intempéries, les prédateurs et les risques pour leur santé ».

À ce titre, il convient de souligner que, en conformité avec la réglementation européenne et nationale sur le bien-être animal, le Gouvernement finance depuis 2004, tant dans les Pyrénées que dans les Alpes, un ensemble de mesures pour assurer la défense des troupeaux contre la prédation. Le financement de ces mesures – gardiennage, chiens de protection, mise en place de clôtures et de parcs – destinées à garantir le bien-être et la sécurité des animaux d’élevage fait l’objet d’un cofinancement à l’échelon européen. Il représente de loin la partie la plus importante du budget consacré par l’État à la conservation des grands prédateurs.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. C’est maintenant au porte-parole du Gouvernement que je vais m’adresser, monsieur le ministre, afin que vous fassiez part à vos collègues des difficultés de compréhension des éleveurs.

D’un côté, on leur demande de faire des efforts considérables dans leurs exploitations en faveur du bien-être de leurs animaux. De l’autre, on laisse ces animaux se faire dévorer dans les alpages en autorisant un trop grand nombre de prédateurs, notamment des loups et des ours, voire en les réintroduisant comme c’est le cas avec le lynx. Les éleveurs ne le comprennent pas.

J’avais posé une question sur ce sujet voilà environ deux ans et on m’avait déjà répondu que le nombre de prédateurs serait limité. Il faut savoir que, en 2009, il y a eu dans l’arc alpin 992 attaques, contre 810 en 2008. Alors qu’on compte aujourd'hui 200 loups dans l’arc alpin et que ceux-ci s’étendent, le nombre d’attaques ne cesse de progresser. Mon département a ainsi subi sa première attaque de loup il y a près d’un an. L’élevage attaqué comptait 240 ovins : 40 brebis ou agneaux ont été tués. Aujourd'hui, l’éleveur a quitté la profession, après avoir vendu son troupeau.

Je rappelle que nous avons rédigé, en 2008, avec mon collègue François Fortassin, un rapport sur le devenir de l’élevage ovin. Nous sommes globalement passés de 11 millions de têtes d’ovins à 8 millions, soit une perte de 3 millions. Or la présence ovine est indispensable dans les alpages dans le cadre de notre politique environnementale. Si nous ne diminuons pas le nombre de prédateurs, nous savons aujourd'hui quels dégâts ils provoqueront dans les années à venir.

Je tiens donc une nouvelle fois à attirer l’attention du Gouvernement sur cette question : certes, il faut des loups, des ours, des lynx – nous sommes d’accord sur ce point –, mais leur nombre doit être limité. À cet égard, je rappelle que les loups ne sont plus une espèce protégée. Il conviendrait donc de limiter leur nombre.

J’ai reçu des articles parus dans la presse dans lesquels on évoque d’éventuelles fermetures de sentiers de randonnée. On a vu un loup aux portes de Gap, un autre a été tué à l’entrée de Grenoble. Cette prolifération va poser de réels problèmes, monsieur le ministre.

Le Gouvernement doit donc prendre conscience de la nécessité de limiter le nombre de prédateurs. Peut-être la France pourrait-elle, à l’instar de nos amis suisses, dénoncer la convention de Berne afin que cette question puisse être rediscutée ?

M. le président. Monsieur Bailly, je salue la passion qui vous anime. D’autres prédateurs, telles les buses, devraient également être régulés.

schéma directeur de la région île-de-france

M. le président. La parole est à M. Michel Houel, auteur de la question n° 1027, adressée à M. le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

M. Michel Houel. Vous le savez, monsieur le ministre, la région Île-de-France, du fait de son statut de région capitale, occupe une place à part dans le paysage régional français.

Ainsi, le SDRIF, le schéma directeur de la région Île-de-France, est le document de planification destiné à bâtir l’avenir de la région dans les vingt prochaines années. Il est donc le document de référence pour la mise en œuvre des projets dans les communes et les départements franciliens. Or, bien qu’il ait été adopté par le conseil régional le 25 septembre dernier, après trois années de travail, il n’est toujours pas en application.

Indépendamment de ce que nous pouvons en penser, monsieur le ministre, le SDRIF va-t-il pouvoir s’appliquer et à quelle échéance, sachant que de nombreuses communes attendent son entrée en vigueur pour lancer leurs projets ? Comment va-t-il pouvoir s’articuler avec le projet du Grand Paris qui prévoit, à court terme, une réforme de l’urbanisme afin de libérer l’offre foncière ?

Les maires franciliens attendent des réponses à ces questions primordiales, car elles conditionnent le lancement de nombreux travaux, lesquels, d’ailleurs, participeront à la relance de l’économie.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, le SDRIF est en effet un document essentiel, puisque tous les autres documents d’urbanisme doivent être compatibles avec lui. Le SDRIF actuel, qui date de 1994, est largement obsolète.

La région a lancé la révision du SDRIF en 2004. À la fin de l’année 2008, elle a adopté un nouveau projet. Le Gouvernement lui a fait part depuis d’un certain nombre d’observations. Il souhaitait que, s’agissant de la région capitale, ce schéma soit porteur de plus d’ambition. Ces réserves ont fait l’objet de nombreuses discussions entre l’État et la région et abouti à la conclusion d’un protocole le 13 juillet 2009 prévoyant, d’une part, la transmission au Conseil d’État d’un SDRIF complété dudit protocole, d’autre part, la mise en révision immédiate du projet porté par le conseil régional. Pour des motifs qui lui sont propres, l’exécutif régional n’a pas souhaité soumettre à son assemblée délibérante ce protocole, le rendant immédiatement caduc.

Il a donc fallu attendre la promulgation de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris pour arriver à un nouvel accord sur la transmission du SDRIF au Conseil d’État et sur sa mise en révision immédiate après son approbation afin que soient pris en compte les objectifs fixés par le législateur.

Le Conseil d’État a ainsi été saisi le 8 juin 2010 du projet de décret approuvant le SDRIF. De nombreuses réunions de travail associant le rapporteur du texte au Conseil d’État, les services de la région et ceux de l’État ont eu lieu. Au terme de cet examen, le Conseil d’État, réuni en assemblée générale, a examiné le texte le 28 octobre dernier.

À ce jour, le Gouvernement ne dispose pas encore de l’avis du Conseil d’État. Il est vrai que, d’après les premiers éléments dont nous disposons, cet avis serait plutôt négatif. Le Conseil d’État a jugé tout d’abord que la procédure d’élaboration du SDRIF avait fait l’objet de plusieurs irrégularités, ensuite que le projet comportait des mesures qui n’entraient pas dans le cadre des compétences confiées par la loi à la région, enfin qu’un certain nombre de textes, notamment les deux lois dites « Grenelle », ainsi que la loi relative au Grand Paris, n’avaient pas été correctement prises en compte dans le SDRIF.

Aujourd'hui, nous attendons l’avis formel du Conseil d’État. Lorsque le Gouvernement l’aura, il l’étudiera dans le détail avant de prendre quelque décision que ce soit. J’ai d’ores et déjà indiqué au président du conseil régional, M. Jean-Paul Huchon, que l’État était prêt à examiner avec lui les conséquences à tirer de cet avis concernant le SDRIF de 1994 et à étudier les solutions pouvant être mises en œuvre le plus rapidement possible afin de donner à la région Île-de-France le cadre nécessaire aux ambitions qui sont les siennes.

M. le président. La parole est à M. Michel Houel.

M. Michel Houel. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

La question que je viens de vous poser est d’actualité : j’ai appris en lisant la presse aujourd'hui que le Conseil d’État, comme vous venez de me l’indiquer, émettrait un avis plutôt négatif sur le SDRIF, qu’il jugerait incompatible avec le Grand Paris et avec le Grenelle de l’environnement.

Même si je comprends ces arguments, il n’en demeure pas moins que, en tant que maire, je suis lié dans ma commune au schéma directeur si je souhaite modifier le plan local d’urbanisme. À titre indicatif, si le SDRIF était applicable, ma commune pourrait immédiatement engager 3 millions d’euros de travaux. Au moins un tiers des 514 communes que compte mon département sont également dans cette situation : elles attendent le schéma directeur pour pouvoir transformer leur plan d’occupation des sols ou leur plan local d’urbanisme et les rendre compatibles avec le SDRIF. Nous faisons donc face, monsieur le ministre, à un problème d’actualité et à un problème économique importants.

Ne pourrait-on pas sortir une version simplifiée du schéma directeur, quitte à la mettre immédiatement en révision afin de prendre en compte la loi relative au Grand Paris et les lois Grenelle I et II ? Le SDRIF, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, date de 1994. Il est complètement caduc, car la situation a considérablement évolué depuis lors, et il nous bloque. Il faut donc absolument accélérer l’entrée en application d’un nouveau schéma directeur.

crédit d'impôt et financement des congés des agriculteurs

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, en remplacement de Mme Jacqueline Alquier, auteur de la question n° 1013, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

M. Yannick Botrel. Monsieur le ministre, de nos jours, les agriculteurs aussi ont droit à des vacances bien méritées. Ce qui paraissait impensable il y a quelques années est devenu réalité parce qu’ils peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt pour financer leur remplacement, lorsque celui-ci est indispensable, pendant leur absence de l’exploitation.

Ainsi, en 2009, 20 000 agriculteurs, principalement des éleveurs puisque, par nature, cette activité exige une présence journalière sur l’exploitation, ont pu prendre quelques jours de congé. Il ne s’agit pas là, monsieur le ministre, et c’est le moins que l’on puisse dire, d’une niche fiscale.

Il s'agit d’une mesure de justice sociale qui est extrêmement symbolique. Elle permet de rapprocher les conditions de vie des agriculteurs de celles des autres catégories de la population française. Surtout, grâce à elle, les familles des éleveurs peuvent élargir leur horizon. Les exploitants sont enfin en mesure de planifier des voyages, de partir chez des amis, de visiter en famille des lieux culturels, de vivre des moments de détente hors de leur lieu de travail.

Un médecin ou un pharmacien qui se fait remplacer trouve, dans les recettes supplémentaires suscitées par cet intérim, les moyens de rémunérer son remplaçant. Les agriculteurs, eux, doivent nourrir et soigner leurs bêtes tous les jours. S’il leur faut être là, cette présence n’entraîne aucune recette supplémentaire. Dès lors, est-il scandaleux que la solidarité nationale joue son rôle ?

Quels arguments d’ordre européen peuvent être invoqués alors que l’on voit mal comment cette mesure, dont le coût global ne dépasse pas 10 millions d’euros par an, pourrait affecter les échanges entre les États membres de l’Union européenne ou fausser la concurrence ?

En outre, alors que ce dispositif coûte, je le répète, 10 millions d’euros par an, soit quatre centièmes de ce que rapporte chaque année l’impôt sur la fortune – cette imposition que le Gouvernement veut supprimer, semble-t-il – croyez-vous vraiment que cette aide soit excessive et injustifiée pour nos agriculteurs ?

Monsieur le ministre, les agriculteurs ne comprennent pas que ce crédit d’impôt ne figure pas dans le projet de loi de finances pour 2011 et qu’il puisse être supprimé à l’avenir. C’est vraiment un très mauvais signal envoyé au monde agricole. Une telle décision paraît d’autant plus inconcevable que les agriculteurs, vous le savez bien, vivent une période très difficile.

C’est aussi mettre en péril les services de remplacement concernés. Cette mesure représente 5 000 heures de remplacement dans le seul département du Tarn et, à l'échelle nationale, 160 000 heures, soit 30 % de l’activité des services de remplacement. En termes d’emplois, elle concerne 800 équivalents temps plein dans le domaine agricole, ce qui, là encore, dans la période que nous traversons, est loin d’être négligeable.

Dans une précédente réponse écrite sur ce dispositif, M. Le Maire avait annoncé à mon collègue Yves Chastan qu’une mission d’évaluation de ce dispositif avait été confiée par ses soins au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux. Les conclusions de ce travail devaient être disponibles courant septembre.

Toutefois, Mme Alquier n’en a pas trouvé trace. Que prévoit ce rapport ? Que proposez-vous ? Nous pensons toujours que ce dispositif doit être au minimum conservé, et même renforcé pour que plus d’éleveurs puissent en profiter.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, je vous demanderai tout d’abord de bien vouloir excuser M. Bruno Le Maire, qui est malheureusement retenu ailleurs. Je m’efforcerai de le remplacer, comme vous le faites pour Mme Alquier, et aussi bien que vous ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur. C’est un duo de remplaçants !

M. Michel Mercier, ministre. Vous l’avez interrogé sur le crédit d’impôt remplacement pour congés.

Il est inutile de mêler cette question à celle d’autres impôts : je vais vous expliquer le plus clairement possible ce qu’il en est.

Premièrement, ce crédit a été institué par la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006. Le coût annuel de cette mesure pour l’État est évalué à 10 millions d’euros. Nous sommes tout à fait d'accord sur ce point.

Deuxièmement, nous sommes tous d'accord également, me semble-t-il, pour considérer que l’exercice de la profession agricole comporte des contraintes fortes de présence sur l’exploitation, plus particulièrement pour les productions animales, où le coût du remplacement de l’exploitant, s’il n’est pas compensé, est le plus souvent regardé comme dissuasif.

Il est vrai également – le Gouvernement en est bien d'accord – que les agriculteurs ont le droit, eux aussi, de prendre du repos.

Le crédit d’impôt remplacement permet d’offrir une prise en charge partielle des absences pour congés en complément des dispositifs qui existent par ailleurs. Reconduite annuellement depuis 2006, cette mesure a permis d’obtenir des résultats appréciables et elle est plébiscitée par les exploitants.

Toutefois, ce dispositif a pu susciter des interrogations de la part de certains parlementaires, s’agissant notamment d’un crédit d’impôt s’ajoutant à une fiscalité particulière.

C’est dans ce contexte que, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010, un amendement, adopté par le Sénat, a visé à proroger ce dispositif d’une année, c'est-à-dire jusqu’au 31 décembre 2010. Par ailleurs, le ministre a précisé que « cette année de prorogation sera[it] mise à profit pour analyser les enjeux du dispositif dont la reconduction est envisagée, conformément à l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques du 9 février 2009 pour les années 2009 à 2012 ».

C'est la raison pour laquelle une mission d’évaluation de ce dispositif a été confiée au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux. Sur la base de ces travaux, et comme Bruno Le Maire l’a déjà annoncé, le Gouvernement est favorable à la prorogation de cette mesure.

Monsieur le sénateur, n’ayez pas d’inquiétude : le Gouvernement, je le redis clairement, est favorable à la prorogation de ce dispositif.

Afin de respecter les règles européennes applicables en la matière, le bénéfice de ce crédit d’impôt remplacement sera désormais placé sous les dispositions du règlement de minimis. Sa reconduite constitue pour le Gouvernement une mesure de justice à l’égard de nos exploitants, qu’il est légitime d’aider à bénéficier de jours de congés.

Il avait été envisagé initialement de faire figurer cette disposition dans la loi de finances rectificative pour 2010. Toutefois, au regard des fortes attentes exprimées par les parlementaires et par les exploitants, le Gouvernement n’est pas hostile à ce que cette prolongation soit actée dès l’examen de la loi de finances pour 2011, c’est-à-dire quelques jours plus tôt.

Toutefois, que ce soit dans un texte ou dans l’autre, le Gouvernement fera en sorte que cette mesure de crédit d’impôt remplacement soit effectivement prorogée.