avenir du fret ferroviaire à saint-pierre-des-corps

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 1295, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le secrétaire d'État, l’ouverture à la concurrence devait, selon vos prévisions, permettre le développement du transport de fret ferroviaire. Or, depuis 2000, c’est le déclin permanent pour ce secteur, qui est passé de 58 milliards de tonnes-kilomètre cette année-là à 22 milliards en 2011. La libéralisation, maître mot de votre politique, fait des ravages énormes.

Où sont donc les promesses du Grenelle de l’environnement, qui visait à réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports d’ici à 2020 et à porter à 25 % le volume des marchandises transportées en mode alternatif, fluvial et ferroviaire, d’ici à 2022 ?

C’est à l’inverse que nous assistons ! La part modale du fret ferroviaire est passée de 22 % en 2000 à 14 % en 2009.

Ici même, j’ai fait part de l’état de délabrement dans lequel se trouve le triage de Saint-Pierre-des-Corps, particulièrement depuis la fin du fret par wagon isolé. Des lignes ont fermé, comme celle qui reliait Sully-sur-Loire et Aubigny-sur-Nère, ce qui a mis sur les routes de la Sologne 3 000 camions citernes transportant du gaz.

Dès 2007, je portais dans cet hémicycle et auprès de la direction nationale de la SNCF les inquiétudes des petites et moyennes entreprises de la région dont je suis l’élue, qui participent pourtant au dynamisme économique.

Mme la ministre de l’écologie a affirmé récemment : « La relance du fret ferroviaire n’a plus besoin de discours. Il lui faut des actes pour réussir à convaincre les clients de préférer le rail à la route. » Je ne puis que souscrire à de telles paroles et vous propose, monsieur le secrétaire d'État, de passer aux actes.

Aussi, je vous demande de transmettre ma préoccupation à Mme la ministre de l’écologie : je souhaite que celle-ci intervienne auprès de la direction du fret de la SNCF afin que la gare de Saint-Pierre-des-Corps soit réintégrée dans le transport national « multi-lots multi-clients ». Fret SNCF possède les capacités nécessaires pour répondre à ce besoin. Une étude est indispensable pour que soit rapidement mise en place une réponse réellement adaptée aux besoins des entreprises. Des tarifs accessibles doivent être proposés aux PME.

Monsieur le secrétaire d'État, vous pouvez favoriser la fluidité du trafic en permettant au site de Saint-Pierre-des-Corps de prendre le relais de la gare du Bourget, aujourd'hui complètement engorgée. Il existe de réelles possibilités de trafic sur les flux Metz–Hendaye et Nantes–Lyon, via Saint-Pierre-des-Corps.

Le trafic vers l’Espagne pourrait, lui aussi, être nettement amélioré. Le fret ferroviaire représente à peine 4 % des échanges à la frontière d’Hendaye. On comprend mieux dans ces conditions l’engorgement de l’autoroute A10 ! C’est non pas la crise économique, mais bien un choix politique qui suscite l’inactivité ferroviaire, en favorisant le transfert du transport des marchandises du rail vers la route. Le site de Saint-Pierre-des-Corps pourrait contribuer à inverser cette tendance.

Ne faut-il pas, comme le déclarait ici même Valérie Létard au nom de M. Bussereau, que la SNCF s’engage « à mettre en place [...] des dispositifs d’accompagnement [...] pour le transport de marchandises au service des territoires, dont Saint-Pierre-des-Corps, qui est une plaque tournante importante » ?

Le port de Nantes–Saint-Nazaire a besoin de débouchés. L’association RACO – Rhône, Alpes, Centre, Océan – travaille à la modernisation de la transversale ferroviaire qui relie la façade atlantique à l’arc Alpin et à l’Europe centrale. En vous appuyant sur cet organisme, vous pouvez contribuer à relancer le trafic Ouest-Est.

Le port sec de Vierzon pourrait jouer un rôle prépondérant et Saint-Pierre-des-Corps prendre toute sa place dans ce projet, pour, enfin, concrétiser cette orientation du Grenelle.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Madame la sénatrice, en complément de l’Engagement national pour le fret ferroviaire, présenté par le Gouvernement le 16 septembre 2009, la SNCF met en œuvre depuis l’automne 2009 son nouveau schéma directeur pour le fret. Ce document vise à développer l’offre de transport ferroviaire de marchandises conformément aux objectifs de report modal du Grenelle de l’environnement, tout en respectant les impératifs économiques de la SNCF dans un marché du fret ouvert à la concurrence.

La priorité de la SNCF porte sur le développement des flux massifs industriels réalisés en trains complets, où le mode ferroviaire présente le plus fort avantage compétitif par rapport à la route.

Concernant l’activité « wagons isolés », la SNCF a refondu son offre pour proposer, depuis le 12 décembre 2010, une nouvelle formule baptisée « multi-lots multi-clients ». En contrepartie d’engagements sur les volumes de trafics de ses clients, nécessaires au rééquilibrage économique de l’activité, SNCF Geodis garantit à ces derniers une meilleure qualité de service.

Cette nouvelle offre implique des liaisons directes entre les grands centres économiques, à raison d’au moins trois allers-retours par semaine sur chaque ligne. Or un tel impératif semble difficile à respecter sur le site de Saint-Pierre-des-Corps, compte tenu de l’absence de grands chargeurs ferroviaires.

Toutefois, le schéma directeur de SNCF Geodis a tenu à conserver Saint-Pierre-des-Corps dans son catalogue d’offres ferroviaires pour les trafics de « wagons isolés » et peut ainsi proposer, sur demande, une organisation spécifique pour les intégrer à son système d’acheminement de « wagons isolés ».

Au-delà de la réduction de l’activité de triage, Saint-Pierre-des-Corps représente toujours un nœud ferroviaire essentiel, car il conserve des activités ferroviaires de relais pour les trains de fret et compte, sur son site, la présence de nombreux établissements de la SNCF comme le technicentre, le pôle traction, et l’unité opérationnelle fret, qui s’ajoutent aux structures importantes dédiées aux voyageurs.

Concernant le projet de port sec à Vierzon, si des chargeurs ou des acteurs du transport sont en mesure d’amener de l’activité générant des prestations de transport, il est bien sûr tout à fait logique de réexaminer la possibilité de créer une plate-forme multimodale sur ce site. Mais ce n’est pas dans l’autre sens que les choses doivent fonctionner.

L’État a rappelé sa détermination à développer le transport ferroviaire en poursuivant la mise en œuvre du programme d’actions défini dans le cadre de l’engagement national pour le fret ferroviaire.

La SNCF doit y prendre toute sa part et moderniser son organisation pour relever le défi de présenter une offre compétitive et de qualité à ses clients.

C’est la raison pour laquelle Thierry Mariani a souhaité réunir, le 30 mai dernier, l’ensemble des acteurs de la filière du fret ferroviaire pour faire le point sur la mise en œuvre des différentes actions et examiner concrètement les difficultés et identifier, de façon pragmatique, les progrès à réaliser.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. J’entends bien que la SNCF doit respecter des objectifs économiques d’équilibre. Mais en ayant seulement pour objectif les trains entiers, elle ne répond pas aux attentes de l’aménagement de notre territoire.

J’aurais trouvé intéressant que le Gouvernement s’attarde un peu plus sur l’Étude prospective 2020. Réalisée à la demande du comité central d’entreprise, CCE, de la SNCF et consacrée au fret ferroviaire, elle traite le sujet sur un mode nouveau et propose, outre de nouvelles mutualisations, la mixité de trains. Elle place au cœur des synergies à mettre en place des objectifs définis en fonction des services à rendre aux clients et ouvre la possibilité de maintenir des offres multiples pour répondre à des besoins diversifiés en termes, notamment, de massification. La mutualisation permettrait de mieux associer une logique de réseau et une logique d’axes.

Cette étude ouvre en particulier une piste très intéressante qui consisterait à passer d’un réseau composé de relations entre gares d’inter-triage à un réseau basé sur une grande boucle ferroviaire. Ce dernier serait organisé autour de liaisons circulaires dont la partie commune relierait Dijon, Lyon, Miramas, Toulouse, Bordeaux et Tours–Saint-Pierre-des-Corps, ce qui redonnerait une véritable dynamique au fret ferroviaire.

Je regrette que, pour le moment, cette étude du CCE de la SNCF n’ait pas été prise en compte dans les réflexions et aimerais bien qu’on s’en empare pour avancer et essayer de redynamiser. En effet, pour que le dispositif fonctionne, il faut agir dans les deux sens.

régime juridique du contrat de travail des saisonniers

M. le président. La parole est à Mme Annie David, auteur de la question n° 1279, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Mme Annie David. Ma question, qui s’adresse effectivement à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé, concerne les inégalités de traitement en matière de contrat de travail que subissent les saisonniers par rapport aux autres salariés.

Monsieur le secrétaire d’État, je suis persuadée que vous ferez part de cette question à votre collègue M. Xavier Bertrand.

La France est le premier pays visité au monde : 78 millions de touristes sont accueillis par des professionnels de talent, qu’ils soient employeurs ou salariés dans ce secteur d’activité florissant, puisqu’il a rapporté 145 milliards d’euros en 2010.

Pourtant, les salariés en contrats à durée déterminée saisonniers sont pénalisés par des règles qui les empêchent de bénéficier des mêmes droits que les autres personnes en contrats à durée déterminée, CDD, alors même qu’ils font preuve d’une importante mobilité et d’une grande capacité d’adaptation.

Déjà, en 2004, lors des débats concernant la loi relative au développement des territoires ruraux, j’étais intervenue pour dénoncer les injustices que subissent ces « prolétaires du tourisme », alors même que ces hommes et ces femmes contribuent au développement de la ruralité, au prix de conditions de vie hautement précaires !

J’avais d’ailleurs déposé de nombreux amendements. L’un d’entre eux, qui a été adopté, posait explicitement, au sein du code du travail, le principe d’égalité des travailleurs pluriactifs ou saisonniers en matière de droit du travail et de droit social par rapport aux autres catégories de travailleurs. Malheureusement, les députés ne l’ont pas jugé utile et l’ont supprimé lors de la navette.

Aujourd’hui, au-delà des déclarations de principe, c’est une véritable politique garantissant l’égalité de traitement que nous devons mettre en œuvre. En effet, sept ans après ces débats, de nombreuses inégalités subsistent : absence de définition légale du travail saisonnier, clause non systématique de reconduction des contrats de travail d’une saison à l’autre, CDD saisonniers n’ouvrant pas droit à la prime de 10 % de fin de contrat...

Enfin, le chômage des saisonniers était, récemment encore, moins indemnisé, puisque les allocations étaient minorées par un coefficient réducteur. Après que les intéressés eurent livré une âpre bataille, ils ont obtenu sa suppression à l’issue des dernières négociations de l’UNEDIC, et je ne peux que m’en féliciter.

Il s’agit là d’un premier pas vers la réduction de cette précarité sociale, mais nous devons aller plus loin encore pour obtenir un nouveau cadre définissant la saisonnalité et construire les bases d’une véritable sécurisation sociale et professionnelle du parcours des salariés saisonniers.

C’est dans cette perspective que le Médiateur de la République a, conformément à ses compétences, fait une proposition de réforme dont je ne vais pas vous donner les détails ici, mais qui reprend les points que je viens d’aborder. M. le ministre de l’emploi en a été destinataire, ainsi que Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, M. le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire et M. le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et des professions libérales. C’est dire si le Gouvernement auquel vous appartenez est bien informé de cette proposition de réforme !

Aussi, je vous demande quelles suites vous entendez donner à cette proposition qui permettrait, en renforçant les droits attachés au contrat de travail des saisonniers, d’apporter à ces derniers une amélioration considérable et légitime de leurs conditions de travail et, donc, de vie.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur les suites susceptibles d’être données au rapport du Médiateur de la République concernant le régime juridique du contrat de travail des saisonniers.

Dans ce rapport, sont préconisées des voies de réforme du contrat à durée déterminée saisonnier au travers des trois mesures suivantes : l’introduction d’une définition légale du caractère saisonnier du contrat, la reconduction de principe du contrat saisonnier emportant l’obligation pour l’employeur de motiver la non-reconduction et l’obligation pour l’employeur de verser une indemnité de fin de contrat compensatrice de précarité lorsque le contrat saisonnier n’est pas reconduit.

L’introduction dans la loi de la définition du caractère saisonnier de l’emploi objet du contrat ne paraît pas s’imposer. En effet, la jurisprudence constante, je dis bien « constante », de la Cour de cassation en donne une définition claire. Le contrat saisonnier s’applique à des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs. Cette définition n’appelle pas de difficulté particulière d’application.

En ce qui concerne la reconduction du contrat saisonnier ou l’obligation de verser l’indemnité compensatrice de précarité seulement en cas de non-reconduction du contrat saisonnier, il est, à ce stade, prématuré de se prononcer. Il convient, au préalable, de disposer des études économiques permettant d’analyser le bien-fondé de ces mesures et de connaître la position des partenaires sociaux.

S’agissant, enfin, de la situation des travailleurs saisonniers au regard de l’indemnisation du chômage, une règle spécifique instaurée en 2007 minorait le montant de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, ARE, versé aux travailleurs saisonniers. Ce montant d’allocation était affecté d’un coefficient réducteur basé sur le nombre de jours de travail au cours des douze mois antérieurs effectué par le salarié.

Comme vous, le Gouvernement se félicite du fait que, dans le cadre de la convention du 6 mai 2011 relative à l’indemnisation du chômage, les partenaires sociaux, soucieux d’améliorer la situation des travailleurs saisonniers, aient souhaité modifier les conditions d’indemnisation de ces demandeurs d’emploi au titre du régime d’assurance chômage.

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement est effectivement bien informé de cette proposition de réforme puisque vous en avez rappelé les principales mesures. Je ne peux pourtant pas me contenter des réponses que vous nous faites. Vous dites qu’il faudrait avoir l’avis des partenaires sociaux, notamment en ce qui concerne la reconduction d’une année sur l’autre du contrat saisonnier.

Vous connaissez, comme l’ensemble du Gouvernement, les positions des partenaires sociaux sur ce sujet puisque des forums de la saisonnalité sont régulièrement organisés. Si l’UNEDIC a revu son mode d’indemnisation des chômeurs à l’issue d’un CDD saisonnier, c’est bien parce que les partenaires sociaux ont fait valoir dans ce domaine leurs propositions ! Cette prime de 10 % en cas de non-reconduction du contrat doit évidemment être accordée.

Vous avez dit que la jurisprudence est claire du point de vue de la définition du contrat saisonnier. C’est vrai qu’à l’origine il a été conçu pour répondre aux besoins d’un surcroît saisonnier d’activité dans les métiers du tourisme et de l’agriculture.

Mais, aujourd’hui, par dérogation, ces contrats saisonniers tendent à se généraliser. Ils ont déjà été étendus à plusieurs reprises à des activités pratiquées, notamment, dans des musées, des stations-service et dans la grande distribution. Et là, on peut se dire qu’il n’y a pas lieu de s’interroger sur la reconduction d’une année sur l’autre puisque, si on fait les contrats saisonniers, c’est bien parce qu’on sait que, d’une année sur l’autre, la saison va recommencer !

Monsieur le secrétaire d’État, pour en terminer sur la reconduction, je pense que l’on pourrait accéder très rapidement à la demande des saisonniers : soit le contrat est reconduit, soit on verse au salarié une prime de 10 % de fin de contrat. En effet, ces salariés vivent dans une précarité permanente, ce qui est inacceptable.

Je vous encourage vivement, monsieur le secrétaire d’État, à bien relire les propositions faites par le Médiateur de la République, car elles sont tout à fait intéressantes.

amélioration de la situation sanitaire de la guyane

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1282, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.

M. Georges Patient. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette question, destinée à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé, me permet d’aborder l’état très inquiétant du secteur de la santé en Guyane. Elle tombe d’ailleurs à point nommé puisque s’est tenue le 11 juin dernier à Cayenne, à l’hôtel de la région, une conférence régionale relative au rattrapage des offres sanitaires et médico-sociales.

L’heure est grave. Le département détient, en effet, des indicateurs de santé qui sont parmi les plus mauvais de France. L’espérance de vie y est inférieure de quatre ans à celle de la métropole. Le taux de mortalité infantile y atteint 10,5 pour 1 000 naissances au lieu de 4 dans le reste de la France.

Des pathologies ont, dans ce département, des prévalences plus élevées – diabète, hypertension artérielle, VIH, tuberculose. Et des maladies y sont insuffisamment traitées, faute de formation adaptée, de personnel, d’équipements. Je pense tout particulièrement à la drépanocytose.

Le département se singularise également par une densité médicale très faible, la Guyane est la région la plus désertifiée de France, et par un tissu sanitaire insuffisant. Il y a trois ans, la Fédération hospitalière de France mettait en évidence l’énorme insuffisance d’équipements sanitaires en Guyane. Comparant la Guyane à la Corse, elle mettait en évidence le fait qu’à population équivalente un habitant de la Corse disposait de 2,5 fois plus de structures sanitaires pour se soigner qu’un habitant de Guyane.

Faire de la santé une priorité en outre-mer constituait l’un des objectifs du conseil interministériel de l’outre-mer présidé par le Président de la République le 6 novembre 2009, qui matérialisait ainsi le plan santé outre-mer, lancé en juillet 2009. Ce dernier avait pour objectif de prendre en compte les spécificités de l’outre-mer en matière de santé. Depuis, près de deux ans plus tard, c’est la perplexité, voire la désillusion, qui règne face aux lenteurs pour atteindre les objectifs fixés, notamment dans le financement des opérations de structures sanitaires et dans la pérennisation des équilibres financiers.

Ce constat est unanimement partagé. Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales du Sénat, qui est venue en visite aux Antilles-Guyane en avril dernier dans le cadre d’une mission sénatoriale sur la santé en outre-mer, regrettait, dans le rapport de cette mission, que la mise en œuvre du plan santé outre-mer soit « décevante ».

En présentant les orientations du projet régional de santé au mois d’avril 2011, le président de l’agence régionale de santé de Guyane a fait état du « retard majeur de la Guyane en matière d’offres de santé ainsi qu’au niveau du médico-social ». En effet, alors qu’il y a urgence au regard de la croissance exponentielle de la population, de l’ordre de 3,9 % par an, et des caractéristiques territoriales qui rendent plus difficiles un accès aux soins égal pour tous, ce retard s’accentue.

Monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin de garantir une égalité des soins de qualité et réduire les inégalités criantes en matière de santé en Guyane ?

M. Marc Daunis. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Nora Berra, qui m’a demandé de vous transmettre les éléments de réponse suivants.

Le plan santé outre-mer, présenté au mois de juillet 2009, met l’accent sur les spécificités, les particularités et les retards de notre dispositif sanitaire dans les régions ultramarines. Il a été complété par les mesures, essentiellement dans les domaines de la formation et de la santé publique, prises par le conseil interministériel de l’outremer réuni au mois de novembre 2009 que vous avez cité.

En quelques années, de 2002 à 2010, les régions ultramarines ont bénéficié de près de 120 millions d'euros de crédits reconductibles, au titre de politiques dites « de rattrapage », et de près de 220 millions d'euros de crédits exceptionnels. Au sein de cet ensemble, la Guyane a bénéficié respectivement de près de 29 millions d'euros et de plus de 83 millions d'euros.

Les efforts portent aujourd’hui sur la mise en place de mesures structurelles, qui sont en cours d’application et dont certaines sont déjà effectives. Je pense à la formation des médecins, avec l’augmentation régulière du numerus clausus de l’université des Antilles et de la Guyane, et la mise en place du premier cycle complet des études médicales dans cet établissement. Je pense aussi à la mise en place du plan Hôpital 2012, avec les attributions d’enveloppes très favorables aux DOM sur la base de la démographie et du vieillissement de la population. Je pense, enfin, au développement de la télémédecine, avec l’implication de la médecine ambulatoire dans le dispositif de télémédecine, développement d’un projet de télé-échographie obstétrical – le projet ARTIS –, renforcement des moyens de visioconférence, notamment dans le cadre des réunions de concertations pluridisciplinaires en oncologie.

J’en viens aux difficultés financières que vous avez mentionnées, monsieur le sénateur. Le ministère a accompagné le passage à la tarification à l’activité, la T2A, des établissements de santé guyanais. Une étude sur le coefficient géographique ainsi que sur les missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation spécifiques est en cours. L’agence régionale de santé a mis en place un comité de veille de la T2A, réunissant la Caisse générale de sécurité sociale et les établissements de santé ainsi qu’une cellule d’évaluation de la performance.

Enfin, monsieur le sénateur, très récemment, le 24 mai dernier, a été adopté le programme stratégique régional de santé, qui définit les six axes prioritaires pour la période 2011–2015 : inégalités de santé, veille et sécurité sanitaires, santé mentale et addiction, périnatalité et enfance, maladies chroniques, handicap et perte d’autonomie. Fruit d’un long travail de concertation, ce programme sera à même de poursuivre les efforts entrepris en matière de politique de santé en Guyane et de répondre aux difficultés que vous venez de soulever.

M. le président. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Monsieur le secrétaire d'État, pour toute réponse et avant de vous en remettre une copie, je vous lirai la motion qui a été adoptée à l’unanimité et signée le 11 juin 2011 par la totalité des élus de Guyane : sénateurs, députés, conseillers économiques, sociaux et environnementaux, présidents de collectivités, maires, présidents des assemblées délibérantes des établissements publics de santé.

« Les élus de Guyane réunis le 11 juin 2011 à l’initiative du président de la fédération hospitalière régionale de Guyane et du président de région ont pris connaissance des situations des trois établissements publics de santé et médico-sociaux. Ils appellent l’attention de M. le conseiller social de la présidence de la République et des ministres de la santé, de l’outre-mer et de la cohésion sociale sur les modalités de rattrapage des offres de santé et médico-sociales publiques pour disposer des autorisations indispensables suivantes :

« 1. L’Institut médico-éducatif départemental :

« Reconstruction du site de Cayenne [...]

« Construction du site de Saint-Laurent...

« 2. Le Centre hospitalier de l’Ouest guyanais :

Construction d’un nouvel hôpital de 165 lits et 39 places...

« 3. Le Centre hospitalier de Cayenne :

« Compléments contractuels annuels de financement des coûts d’exploitation de l’extension des locaux affectés [...]

« Complément financier en capital pour permettre la réhabilitation des locaux vacants estimée [à] 35 millions d’euros.

« Liée à ces trois projets, la démographie médicale et paramédicale reste un préalable majeur et doit être résolue.

« Tous les élus de Guyane soutiennent avec détermination les projets des établissements publics, mais aussi tous les projets du secteur libéral, afin de combler rapidement les carences inacceptables d’offres de soins et de prise en charge médico-sociale qui constituent une rupture grave du principe d’égal accès aux soins. » (L’orateur remet à M. le secrétaire d’État un exemplaire de cette motion.)