M. Jacky Le Menn. Sur proposition de son rapporteur, l’Assemblée nationale a introduit en deuxième lecture une disposition que nous estimons pernicieuse : l’obligation, pour tout demande de sortie de courte durée, d’informer le préfet des antécédents psychiatriques des personnes ayant séjourné en unité pour malades difficiles ou ayant fait l’objet d’une déclaration d’irresponsabilité pénale par le directeur de l’établissement d’accueil.

Rappelons que le régime dérogatoire prévu pour de tels patients est déjà lourd. La transmission de leurs antécédents psychiatriques au représentant de l’État est prévue lorsque la prise en charge prend la forme de soins ambulatoires ou lorsque la levée de la mesure de soins est envisagée.

Or la disposition introduite par l’Assemblée nationale, outre qu’elle est stigmatisante et de nature à rendre difficile leur réinsertion au sein de la société, peut se révéler néfaste d’un point de vue sanitaire.

En effet, les sorties de courte durée participent d’un programme thérapeutique global. Elles permettent aux patients de maintenir un lien avec leurs proches et avec le monde extérieur, et sont souvent un premier pas sur le chemin, parfois long et sinueux, de la guérison.

À cet égard, le fait d’obliger le directeur d’établissement d’accueil à informer le préfet des antécédents psychiatriques des personnes considérées laisse craindre que le représentant de l’État ne s’oppose systématiquement à toute sortie de courte durée au motif qu’elles constitueraient une menace pour l’ordre public.

Le penchant sécuritaire du Gouvernement, que nous ne cessons de rappeler, n’est plus à démontrer. Depuis le discours prononcé par le Président de la République à Antony en 2008, on constate que les préfets, appliquant une forme de principe de précaution, préfèrent ne plus autoriser les sorties de courte durée des personnes victimes de troubles mentaux, quand bien même ces interdictions iraient à l’encontre des traitements thérapeutiques établis par les psychiatres.

Cet écueil n’a que trop tendance à s’étendre et c’est précisément pour le supprimer que nous avons déposé cet amendement.

M. Guy Fischer. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je rappelle qu’il s’agit ici de personnes ayant fait l’objet d’une hospitalisation d’office, judiciaire, ou ayant séjourné en unité pour malades difficiles. Certes, le préfet n’a aucune compétence médicale, mais il nous paraît important qu’il soit tenu informé lorsqu’une de ces personnes se voit appliquer l’une ou l’autre des mesures visées dans cet alinéa. C’est une simple question de vigilance ! Et je précise qu’il n’a jamais été question, ni dans nos propos ni dans nos pensées, de casier psychiatrique.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Il s’agit ici de patients particuliers, qui nécessitent des soins spécifiques et qui présentent une probabilité de rechute beaucoup plus élevée que d’autres malades. Des dispositions particulières doivent être prévues pour ces patients, notamment pour ceux qui sont irresponsables pénalement ou qui ont séjourné en unité pour malades difficiles.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 12.

Il en va de même concernant l’amendement n° 58. Nous considérons que le préfet doit être informé de la sortie de ces malades, fût-elle de courte durée.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. J’avoue avoir un peu de mal à comprendre pourquoi, dans de telles situations, le préfet devrait être informé des antécédents psychiatriques des patients.

Je voudrais en outre savoir quel est, à Paris, le préfet qui sera prévenu : s’agira-t-il du préfet de police ou du préfet de Paris ? La même question se pose pour Lyon et Marseille.

M. le président. Et pour Lille !

M. Jacky Le Menn. Très bonne question !

M. Guy Fischer. Très bien ! Je suppose que ce sera le préfet de police…

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Madame Hermange, aujourd'hui déjà, le préfet est prévenu de telles sorties.

Par ailleurs, à Paris, c’est bien entendu le préfet de police qui sera compétent. (Mme Annie David s’exclame.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je m’abstiens.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je m’abstiens.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Les deux amendements suivants font également l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 56, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 15

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le second certificat médical ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins en hospitalisation, l’autorité administrative compétente, procède à la mainlevée de l’hospitalisation en soins psychiatriques. »

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Cet amendement, qui prend en compte la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin 2011, vise l’hypothèse où deux certificats médicaux n’aboutiraient pas aux mêmes conclusions : il prévoit la mainlevée de l’hospitalisation sans consentement lorsque le deuxième certificat ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins psychiatriques en hospitalisation. Il s’agit donc d’une proposition plus « radicale » que celle que je vous proposerai dans un instant.

Cette nouvelle disposition serait de nature à respecter l’esprit de l’article 66 de la Constitution, qui dispose que « nul ne peut être arbitrairement détenu ».

M. Guy Fischer. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 57, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 15

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Si le second certificat médical ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins en hospitalisation, à défaut de la levée d’hospitalisation par l’autorité administrative compétente, il est procédé dans les vingt-quatre heures à un réexamen de la situation de la personne hospitalisée de nature à assurer que l’hospitalisation en soins psychiatriques est nécessaire. »

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Cet amendement s’inscrit dans le prolongement de la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin 2011 : si celui-ci a prévu l’intervention obligatoire du juge judiciaire tous les quinze jours pour que l’hospitalisation d’office puisse être maintenue, il a également censuré le dispositif de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique, que reprend le présent projet de loi.

En l’état, la décision d’hospitalisation d’office est prononcée par le préfet ou, à Paris, par le préfet de police, au vu d’un certificat médical circonstancié qui ne peut émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement accueillant le malade.

Dans les vingt-quatre heures suivant l’admission, un certificat médical établi cette fois par un psychiatre de l’établissement est transmis au représentant de l’État dans le département et à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques.

Dans l’hypothèse où le second certificat médical ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins en hospitalisation, le préfet peut néanmoins, de manière arbitraire, décider le maintien de la mesure de soins sans consentement.

Or, en vertu de la décision du Conseil constitutionnel, il est nécessaire, en cas de discordance entre les deux certificats médicaux précités, de prévoir un réexamen à bref délai de la situation de la personne hospitalisée, afin de s’assurer que la mesure d’hospitalisation est toujours nécessaire.

Aux termes de cette décision, le réexamen est « seul de nature à permettre le maintien de la mesure » et, « en l’absence d’une telle garantie, les dispositions contestées n’assurent pas que l’hospitalisation d’office est réservée aux cas dans lesquels elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à l’état du malade ainsi qu’à la sûreté des personnes ou la préservation de l’ordre public ».

Selon le Conseil constitutionnel, en l’absence d’un tel réexamen, la levée de la mesure d’hospitalisation doit être acquise, sous peine de méconnaître l’article 66 de la Constitution.

Ainsi, notre amendement reprend le raisonnement et le dispositif proposés par les Sages du Conseil constitutionnel, précisant que le réexamen de la situation de la personne doit se dérouler dans les vingt-quatre heures suivant l’édiction du second certificat médical.

Conciliant parfaitement les principes constitutionnels de protection de la santé du patient, de sauvegarde de sa liberté individuelle et de maintien de l’ordre public, une telle disposition serait conforme à la norme suprême et protégerait davantage les droits fondamentaux du patient.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur Les auteurs de ces deux amendements entendent tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel, laquelle impose la mainlevée de l’hospitalisation d’office lorsque deux avis médicaux successifs confirment que l’hospitalisation n’est pas justifiée.

Cependant, l’amendement n° 82, déposé par le Gouvernement après l’article 3, permet de tenir compte de manière satisfaisante de cette jurisprudence.

Telle est la raison pour laquelle la commission ne peut qu’émettre un avis défavorable sur les amendements nos 56 et 57.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Ces deux amendements visent à répondre à la demande du Conseil constitutionnel. Mais, comme vient de le dire M. le rapporteur, l’amendement du Gouvernement y répond de façon plus globale. En effet, l’approche de l’amendement n° 56 est trop restrictive par rapport à la demande du Conseil constitutionnel puisque cela ne concerne pas la transformation de l’hospitalisation complète en soins ambulatoires.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Les deux amendements suivants font également l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 13, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 17 à 22

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« II. – Dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné au troisième alinéa de l’article L. 3211-2-2, le psychiatre mentionné à l’article L. 3211-2-1 décide de la forme de prise en charge prévue à cet article et en informe le représentant de l’État dans le département. »

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Cet amendement vise, dans l’hypothèse de l’établissement d’un protocole de soins sans consentement, à ce que cette procédure soit réellement efficace et ne consiste pas en un internement pur et simple.

Une mesure d’ordre médical doit être prise par un médecin et non par le représentant de l’État, c'est-à-dire une autorité administrative, dont les décisions répondent à des motifs plus sécuritaires que sanitaires.

Cette disposition telle qu’elle est prévue est révélatrice de la véritable nature du projet de loi. Au fond, qu’est-ce qui est visé dans ce texte ? La protection, la prise en charge des malades ? Non, bien sûr ! Cet article résume ce projet de loi destiné à jouer sur les peurs de nos citoyens à l’égard d’une population en souffrance, de personnes auxquelles nous devons autre chose qu’une loi de circonstance ! Car ce texte vise d’abord à s’assurer de l’éloignement des malades de la sphère publique plutôt qu’à faire en sorte qu’ils reçoivent les soins que justifie leur état.

Sommes-nous trop naïfs, mes chers collègues, en pensant qu’une mesure de soins sans consentement serait mieux prise par un médecin que par un préfet ?

Serait-ce que l’on a définitivement entériné le fait que ce qui prime, c’est la « protection de la société contre l’atteinte à l’ordre public » et que, dès lors, le rôle du médecin est accessoire, réduit à un simple rôle d’auxiliaire de police, comme le prévoit le projet de loi ?

Par définition, pourtant, la mesure de soins sans consentement est une mesure de soins. À notre avis, c’est la décision du psychiatre, et non du préfet, qui doit primer en dernier ressort.

De notre point de vue, cependant, la réalité est encore plus sombre. Le Gouvernement a démontré, avec ce projet de loi, qu’il préférait que des mesures d’ordre médical ne soient plus prises par des médecins.

J’entends déjà les cris d’orfraie que vont pousser certains de nos collègues, mais il faut le dire : le Gouvernement ne croit plus en sa médecine psychiatrique !

M. Guy Fischer. En vingt ans, 40 000 lits ont été supprimés – probablement 50 000 à cette heure. Les malades et les familles sont laissés à eux-mêmes. Les médecins, les soignants sont de moins en moins nombreux, les moyens mis à leur disposition ne cessent de se réduire, alors qu’ils doivent travailler dans des structures toujours plus bondées et toujours plus inhumaines. Que dire de ces petites structures qui ferment les unes après les autres, notamment en application de la loi de financement de la sécurité sociale ?

Le Gouvernement est en train de démanteler la médecine psychiatrique de notre pays et, au lieu de tenter de mettre un terme à ce retour en arrière de trente ans, il dit aux médecins : « Vous êtes moins légitimes à juger de la forme de la prise en charge que le préfet. » On marche sur la tête !

Mes chers collègues, nous pouvons dès aujourd’hui adresser à nos médecins un signal positif en leur disant qu’ils sont à nos yeux les mieux placés pour décider des protocoles de soins, et donc que leur décision prime sur celle du préfet.

M. le président. L'amendement n° 59, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 17, seconde phrase

Remplacer les mots :

le cas échéant

par les mots :

prise sur la base des nécessités du traitement de la personne admise en soins psychiatriques sans son consentement

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Cet amendement vise à réparer une injustice contenue dans le projet de loi puisque celui-ci retient comme critère le passage devant la justice ou dans telle unité pour malades difficiles pour imposer à un malade, parce qu’il a connu un épisode critique, un régime juridique plus sévère.

En outre, l’esprit qui préside à l’ouverture du droit à l’oubli justifie la priorité donnée au soin sur le retour à un passé médical ou judiciaire. On sait bien que les rédacteurs du projet de loi n’ont pas écarté la tentation du casier psychiatrique, bien qu’ils s’en défendent.

On comprend donc que le « collectif des trente-neuf » ait invoqué les mânes de Pinel au cours de sa manifestation du 9 avril dernier, pour protester contre « le grand retour de l’enfermement des lieux de soins », selon les termes utilisés par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

M. Guy Fischer. Le retour de l’asile !

M. Jacky Le Menn. Nous considérons, quant à nous, qu’il ne faut pas augmenter au-delà du raisonnable la contrainte sur les malades, qui sont d’abord des gens qui souffrent.

Cet amendement vise à remettre le soin, avec un objectif de succès, et non un passé judiciaire ou médical, au cœur de la décision que le représentant de l’État prendra sur la forme de la prise en charge prévue par l’article L. 3211-2-1 du code de la santé publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’amendement n° 13 vise à écarter le préfet de la procédure d’admission en soins psychiatriques sans consentement.

Permettez-moi une observation. Un préfet est un professionnel respectable, qui doit obéir à des règles liées à sa mission. On n’est pas obligé de penser que ses décisions seront nécessairement dictées par l’autoritarisme ! (M. Guy Fischer proteste.) Le médecin, lui aussi, a des compétences professionnelles et doit suivre les règles de sa profession, mais il n’a pas toutes les vertus, en tout cas si j’en crois certains qui le taxent de « subjectivisme ». Dès lors, il convient, me semble-t-il, de trouver un véritable équilibre et de respecter chaque profession.

L’amendement n° 59 vise à contester que le préfet puisse décider de la forme de la prise en charge du patient – il ne s’agit pas de définir les soins –, et ce seulement en l’absence de proposition du psychiatre. La proposition du psychiatre n’est, en effet, pas nécessaire dans deux cas : d’une part, lorsqu’il considère que la mesure de soins ne se justifie plus et que la levée doit être prononcée et, d’autre part, lorsqu’il estime que les soins doivent se poursuivre sous la forme d’une hospitalisation complète.

La commission émet un avis défavorable sur les deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 13 et 59.

Comment peut-on imaginer qu’un psychiatre prenne la responsabilité d’une autorité administrative ? Cela ne relève pas de ses compétences ! Un psychiatre peut envoyer un certificat à un autre psychiatre. De surcroît, ce peut être le même psychiatre qui aura vu le patient à l’entrée et au terme des trois jours. Il ne faut pas que le psychiatre devienne une autorité administrative.

Les dispositions proposées sont contraires aux missions du préfet, qui est responsable du motif même de l’hospitalisation de la personne.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 13.

Mme Annie David. Les réponses apportées tant par M. le rapporteur que par Mme la secrétaire d’État laissent sous-entendre que, à nos yeux, les préfets seraient uniquement des policiers ou seulement des femmes et des hommes qui auraient en tête la « répression » ou je ne sais quoi d’autre…Je ne me rappelle plus quel terme vous avez employé, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. J’ai parlé d’autoritarisme !

Mme Annie David. Ce que nous affirmons à travers nos amendements, c’est que chacun doit avoir son rôle. Le préfet est le représentant de l’État dans le département, et il doit appliquer la politique qui est décidée en plus haut lieu. J’en veux pour preuve, dans le département de l’Isère, le limogeage en fanfare d’un certain préfet, limogeage qui était, à mon sens, tout à fait injustifié. Mais nous ne sommes pas là pour parler de ce qui s’est passé ces derniers temps à Grenoble…

Les préfets ont sans doute beaucoup de qualités et de nombreuses compétences, mais ils ne sont pas médecins et ils n’ont pas la capacité de décider quelle est la meilleure thérapie ou le meilleur protocole pour les patients.

Vous laissez cette hospitalisation d’office à l’initiative du préfet, alors que nous demandons, si elle est nécessaire – sans doute cela arrive-t-il, malheureusement –, qu’elle soit décidée par le psychiatre et non par le préfet.

Nous demandons que le psychiatre en informe évidemment le préfet, puisque c’est lui qui a la responsabilité de l’hospitalisation d’office, mais nous refusons que le préfet soit à l’origine de la prise de décision.

En tout état de cause, nous ne considérons certainement pas les préfets comme des autorités policières dans les départements. Nous avons, les uns et les autres, les unes et les autres, des rapports fréquents avec nos préfets, nous leur faisons part de nos observations et nous respectons les missions qu’ils doivent assumer.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour explication de vote.

Mme Anne-Marie Escoffier. Si j’interviens en cet instant, c’est de manière exceptionnelle puisque, vous l’aurez noté, je n’ai pas cosigné les amendements présentés par plusieurs de mes collègues du RDSE, et cela, essentiellement, pour avoir à un moment de ma carrière exercé moi-même les fonctions de préfet.

Je voudrais en effet m’insurger contre certaines affirmations proférées ici.

Je n’ai pas réagi tout à l’heure, mais je ne peux pas laisser dire qu’un préfet a autorité sur un malade.

Mme Anne-Marie Escoffier. De la même façon, le préfet n’a pas autorité sur le psychiatre, cela va de soi.

J’entends bien ce qui a été dit, mais il n’en reste pas moins que, lorsqu’un préfet prend une décision d’hospitalisation, qu’il s’agisse du préfet territorialement compétent ou du préfet de police, car cela fait partie des compétences prévues par la loi, il la prend sur avis médical. Il ne se substitue en aucun cas à l’autorité médicale. Comme il n’est pas médecin, vous l’avez très bien dit, il s’appuie sur l’avis des médecins compétents placés auprès de lui pour lui apporter conseil.

Je le dis avec force : un préfet s’appuie toujours sur l’avis du médecin qui est placé auprès de lui pour le conseiller dans sa prise de décision.

Cette mise au point me semblait importante à ce moment du débat. Je précise que je ne prendrai pas part au vote sur ces amendements, pas plus que je n’ai pris part aux précédents. (M. Jean Desessard s’exclame.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 23 

Supprimer les mots :

, les avis

Cet amendement n’a plus d’objet.

L'amendement n° 29, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 29, dernière phrase 

Supprimer cette phrase.

Cet amendement n’a plus d’objet.

L'amendement n° 30, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 30, seconde phrase

Supprimer les mots :

ou de l’avis médical

II. – Alinéa 31, première phrase

Supprimer les mots :

ou avis

III. – Alinéa 33, première phrase

Supprimer les mots :

ou de l’avis médical

Cet amendement n’a plus d’objet.

L'amendement n° 60, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 33

1° Première phrase

Remplacer les mots :

de trois mois 

par les mots :

maximale de quinze jours

2° Dernière phrase

Remplacer les mots :

de six mois

par les mots :

de quinze jours

La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. L’alinéa 33 du projet de loi tend à modifier l’article L. 3213-4 du code de la santé publique, censuré par la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin dernier.

À plusieurs reprises au cours de ce débat, nous avons mis en exergue les raisons de cette censure. Je n’y reviendrai pas, mais notre amendement s’inscrit pleinement dans la décision prise par les Sages du Conseil.

Ainsi, en coordination avec nos précédents amendements, nous demandons que l’hospitalisation d’office ne puisse être maintenue au-delà de quinze jours, au lieu de six mois actuellement. Ce délai est de nature à assurer le contrôle de la nécessité de la mesure d’hospitalisation d’office par le juge des libertés et de la détention, conformément aux dispositions de l’article 66 de la Constitution, en vertu duquel « nul ne peut être arbitrairement détenu ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Les auteurs de l’amendement demandent que, dans le cadre de la procédure d’admission sur décision du représentant de l’État, le maintien des soins soit subordonné à un renouvellement du certificat médical tous les quinze jours, et non, comme le prévoit le texte, au terme de trois mois, puis de six mois, s’appuyant, là encore, sur la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin dernier.

Or c’est non la périodicité des certificats médicaux qui a été contestée, mais l’absence d’intervention de l’autorité judiciaire dans un bref délai.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Pour cette raison, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 61, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 39, première phrase

Remplacer les mots :

d’une mesure de soins sous la forme d’une hospitalisation complète

par les mots :

de la mesure de soins

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. En cas de désaccord entre le préfet et le psychiatre sur la décision de mainlevée d’une hospitalisation complète, c’est le juge des libertés et de la détention qui arbitre.

Néanmoins, cette mesure, qui met fin à une situation très contestable, et d’ailleurs contestée, la décision du préfet l’emportant sur celle du psychiatre, apparaît trop restreinte dès lors qu’elle est limitée au seul cas de la mesure de soins sans consentement sous forme d’hospitalisation complète.

Ainsi, le dispositif actuel ne prévoit pas l’hypothèse selon laquelle le préfet refuserait d’ordonner la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement prenant la forme de soins ambulatoires, alors même que le psychiatre se serait prononcé en faveur de cette mainlevée.

Ne pas prévoir cette possibilité reviendrait à privilégier le volet sécuritaire de la réforme, et ce au détriment de la santé du patient.

Dans le cas d’une admission en soins psychiatriques sans consentement à la demande du représentant de l’État, dès lors qu’il y a désaccord entre le psychiatre et le préfet sur la mainlevée de toute mesure de soins sans consentement, y compris les soins ambulatoires, nous souhaitons que le juge des libertés et de la détention soit automatiquement saisi. En tant que gardien des libertés individuelles, il doit pouvoir intervenir de plein droit et veiller ainsi au respect des droits fondamentaux du malade.

Nous vous invitons donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement visant à étendre la saisine automatique du juge des libertés et de la détention.