Mme la présidente. La parole est à M. François Rebsamen.

M. François Rebsamen. Madame la présidente, monsieur la ministre, mes chers collègues, que de symboles dans ce texte et dans les interventions des orateurs successifs, à moins d’un an de l’élection présidentielle !

Chers collègues de la majorité, vous dites vouloir inscrire dans la Constitution l’équilibre budgétaire, mais, dans la réalité, vous agissez en sens contraire ! (Mme Nicole Bricq opine.) Il est vrai que vous êtes contraints d’appliquer les décisions du Président de la République, qui guide en permanence votre action, tel un Grand timonier de la fiscalité décidant de tout…

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Grand ?

M. François Rebsamen. Mes chers collègues, vous avez raison, je retire le mot « grand » !

On annonce à l’article 1er l’allégement immédiat de l’ISF, ce qui entraîne la suppression de 1,8 milliard d’euros de recettes, mais devrait a priori satisfaire 300 000 contribuables, qui seront demain des électeurs. On divise par trois la taxation des plus fortunés ; on abroge le bouclier fiscal, mais pas immédiatement : la mesure sera étalée dans le temps. Les recettes seront bien évidemment insuffisantes pour combler le déficit de l’allégement immédiat de l’ISF. On crée quelques contributions, qui ne sont que provisoires et déjà désuètes ; je pense à la contribution des entreprises pétrolières, sur laquelle je reviendrai.

Vous vous livrez à une sorte de concours Lépine pour trouver les 300 millions à 400 millions d’euros qui manquent pour atteindre l’équilibre budgétaire dont vous ne cessez de nous parler. À ce concours, le rapporteur général reçoit le prix d’excellence, pour sa grande inventivité !

Nous assistons à un bricolage de mesures au rendement fiscal incertain pour combler les pertes de recettes découlant des décisions gouvernementales. Mais, lorsqu’on vérifie deux ou trois ans plus tard, on constate que le rapport financier de ces mesures est bien loin des prévisions annoncées.

J’évoquerai ces mesures décalées tant dans le temps que dans leur utilité ou dans leur symbolique, alors même que le déficit public pour 2010 a été légèrement revu à la hausse, à 7,1 % du PIB, quand le ministère de l’économie espérait voir le déficit pour 2011 tomber à 5,7 % du PIB.

Je commencerai par la petite contribution sur les entreprises pétrolières, prévue à l’article 7 du projet de loi de finances rectificative, qui a été annoncée en grande pompe – pardonnez le jeu de mots ! (Sourires.)

M. François Rebsamen. Tout aussi facile que de ne pas évoquer un pays qui est en grande difficulté, la Grèce, en présentant un texte dont le but est de permettre aux plus aisés de s’engraisser…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà la vérité, il faut dire les choses clairement !

M. François Rebsamen. Cette mesure n’est que l’ombre d’elle-même, un pis-aller de communication face à un manque de courage politique récurrent sur ce sujet épineux.

La situation n’a, semble-t-il, pas changé, puisque la facture pétrolière de la France a retrouvé en 2010 son niveau de 2008. Les années se suivent et se ressemblent, contrairement aux mesures fiscales du Gouvernement !

On a repris une disposition qui figurait dans les projets de loi de finances pour 2007 et pour 2009. Pourquoi ne pas proposer plutôt une mesure pérenne ? Vous préférez céder aux sirènes des lobbies et vous contenter d’un affichage provisoire, pour calmer quelques esprits et non pour agir réellement ?

Quand on sait que cette contribution rapportera moins que les gains engrangés par Total grâce au régime fiscal du bénéfice mondial consolidé, on peut se demander si c’est vraiment de la justice fiscale ! Est-ce cela trouver des recettes justes et pérennes ? Un commissaire européen avait préconisé de pérenniser cette contribution dans laquelle il voyait une source de revenu bienvenue pour les gouvernements. Mais ce n’est visiblement pas ce qui vous intéresse !

Cela dit, il n’est jamais trop tard pour bien faire ! La preuve, le Gouvernement revient sur le bouclier fiscal. Il est vrai que, de l’aveu même du rapporteur général, « il est devenu de plus en plus contesté et contestable ». Après l’avoir défendu comme vous l’avez défendu, cela revient tout de même à reconnaître une erreur, c’est le moins que l’on puisse dire, d’autant que la définition du revenu retenue ne rendait qu’imparfaitement compte de la capacité contributive des contribuables.

Nous n’avons eu de cesse de le répéter depuis quatre ans et le conseil des prélèvements obligatoires l’a également rappelé : plus on est riche en France, moins la pression fiscale est forte. En 2009, les 1 % de Français les plus riches ont été imposés, en moyenne, à 18,3 %. Et pour ceux qui le sont encore plus, ceux dont les revenus dépassent 4,2 millions d’euros, comme cette brave Mme Bettencourt, qui a déjà été citée, le taux descend à 15 % ! En revanche, pour les cadres moyens, il est de 30 %.

Il est vrai que vous ne pouviez plus, à 300 jours des élections, car c’est bien cela qui guide votre action, maintenir cet outil totalement injuste, symbole d’un électorat préservé et qu’il faut continuer à préserver. Il fallait communiquer !

Dans le rapport, il est écrit que « le bouclier fiscal a été créé dans un contexte économique profondément différent de celui d’aujourd’hui ». Je suis totalement d’accord avec le rapporteur général ; le contexte était tout à fait différent : le bouclier fiscal a été créé au lendemain d’une élection, l’annonce de sa suppression intervient, quant à elle, à la veille d’une autre… Il y a bien là une logique qui n’est ni économique ni sociale, mais bel et bien comptable, en nombre de voix ! C’est, en tout cas, ce que vous espérez.

Les recettes, quant à elles, sont aujourd'hui en difficulté. Les véritables effets de l’abrogation du bouclier fiscal ne se feront vraiment sentir qu’après 2012, malgré les engagements qui ont été pris. C’est ce qu’on appelle des « recettes pour l’État », mais on peut les appeler des « moins-values » ou des « avantages en moins » pour les Français les plus aisés. Cela a été dit, elles sont estimées à 300 millions d’euros en 2012, à 420 millions d’euros en 2013 et, enfin, à 720 millions d’euros à partir de 2014. Les chèques seront toujours d’actualité, mais ils seront de moins en moins importants...

Heureusement que la réforme de l’ISF redonne la part du lion aux lions car, si les ménages les plus aisés perdent à terme 700 millions d’euros d’un côté, ils regagnent près du double de l’autre ! N’ayez crainte, cette réforme est bien faite en faveur des plus aisés et contre la classe moyenne !

Il faut rappeler que, comme pour la réforme territoriale ou la réforme des retraites, en bout de chaîne, c’est toujours le contribuable des classes moyennes qui supporte le poids des réformes du Gouvernement. Pour nous, cela ne s’appelle pas de la responsabilité et de la justice fiscale. La prétendue lutte contre l’évasion fiscale symbolisée par l’article 18 ne change rien à l’esprit du texte.

Ce projet de loi de finances est un véritable fourre-tout financier de précampagne électorale. C’est un exercice périlleux par lequel le Gouvernement tente – il ne réussira pas – de sauver la face et de se racheter une virginité fiscale en 23 articles.

On ne peut cependant pas feindre d’ignorer – vous vous en félicitiez d’ailleurs – les objectifs purement électoralistes de ce texte…

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il ne faudrait donc pas s’adresser aux électeurs ?... Que faisons-nous tous à longueur d’année ?

M. François Rebsamen. … qui tente d’effacer quatre années d’incohérences économiques, de mesures toutes plus injustes et inefficaces économiquement et socialement les unes que les autres.

Quand M. le rapporteur général évoque dans son rapport « les graves défauts du “modèle” français », et qualifie l’ISF d’originalité coûteuse, il aurait plutôt dû dire, me semble-t-il, que le maintien du bouclier fiscal participait d’un entêtement, original certes, mais coûteux en temps de crise et de déficit record pour notre pays !

Mes chers collègues, nous voterons donc contre ce projet de loi de finances rectificative. Il me revient cette phrase de Montesquieu : « Le plus grand mal que fait un Gouvernement n’est pas de ruiner son peuple, il y en a un autre mille fois plus dangereux : c’est le mauvais exemple qu’il donne. » Le gouvernement actuel, en cinq ans, aura réussi la prouesse de parvenir aux deux ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Yvon Collin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, près de six mois après l’adoption de la loi de finances pour 2011, notre assemblée doit de nouveau se prononcer sur un texte budgétaire, qui n’est pas – c’est le moins que l’on puisse dire ! – le printemps fiscal que le Gouvernement nous avait annoncé.

Pourtant, ce dernier aurait bien besoin d’un texte séduisant pour se débarrasser de ce boulet, de cette gueuse qu’est le bouclier fiscal ! (Sourires.) Souvenez-vous qu’à l’époque, lorsque nous avions critiqué cette mesure, on nous prenait au mieux pour de doux rêveurs, au pire pour des esprits frappés d’obscurantisme ! On nous vantait les mérites de ce bouclier fiscal, qui devait être la nouveauté du siècle en matière de finances publiques. On s’est vite aperçu que, si le pommier était très fleuri, les fruits n’étaient pas au rendez-vous...

Le texte que nous examinons aujourd'hui devait être une occasion supplémentaire de tenter de redresser la barre des déficits, d’atténuer les effets pervers de la dette publique, qui ne cesse de grandir, et de proposer des mesures fiscales innovantes. Pour y parvenir, le Gouvernement a fait le pari, que j’estime très risqué, de réformer la fiscalité du patrimoine, alors qu’il eût été judicieux de mener une réforme globale. Au lieu de cela, on découpe une tranche de mortadelle… C’est peut-être très agréable en matière de charcuterie ; ça l’est beaucoup moins lorsqu’il s’agit de fiscalité ! (Sourires.)

La réforme de l’ISF et la taxation, au moins théorique, des contribuables les plus fortunés : voilà ce qui était annoncé. Or, à l’évidence, c’est le contraire qui va se passer !

Après moult débats à l’Assemblée nationale, ce texte est devenu une sorte d’auberge espagnole,…

M. François Baroin, ministre. Pas du tout !

M. François Fortassin. … un fourre-tout de mesures diverses, souvent sans rapport les unes avec les autres.

M. François Baroin, ministre. Mais non !

M. François Fortassin. Ces dispositions ne satisferont personne.

On en est arrivé aujourd'hui à une situation assez dramatique sur le plan financier. Ainsi, selon le présent collectif budgétaire, le déficit public de l’État devrait s’élever, en 2011, à près de 5,7 points de PIB. La vraie question est donc : comment réduire davantage ce déficit, comment revenir aux équilibres sans briser toute chance de reprise de la croissance dans notre pays ?

Je ne mets pas en doute votre bonne volonté.

M. François Fortassin. Je déplore toutefois un manque d’audace complet de votre projet de loi, dans la mesure où il n’y est jamais question de recettes.

Or, en situation de déficits, s’il faut, bien entendu, essayer de réduire quelques dépenses – c’est évident –, il faut surtout faire en sorte d’augmenter les recettes de façon importante. (Murmures d’approbation sur diverses travées.)

Monsieur le rapporteur général du budget, je sais bien que vous avez une sorte de phobie fiscale.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. J’ai pourtant hélas ! participé à la création de nombreuses taxes. (Sourires.)

M. François Fortassin. Je n’en doute pas ! Mais vous avez aussi créé un certain nombre de niches fiscales ! Vous semblez même apprécier davantage les niches que les taxes. (Nouveaux sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est vite dit !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça dépend surtout pour qui ! Il préfère les niches fiscales pour les riches et les taxes pour les pauvres !

M. François Fortassin. Mais je reconnais qu’il y a peut-être un peu de mauvais esprit dans mes propos…

Ce collectif illustre en fait la difficulté qu’éprouve le Gouvernement à réduire la dépense sous toutes ses formes : il n’apporte pas de solution à la hauteur des enjeux.

S’agissant du bouclier fiscal, c’est en 2011 qu’il devrait être supprimé. Au demeurant, on ne rattrapera pas les moins-values fiscales des années précédentes, loin s’en faut !

Quant à l’impôt sur la fortune, le toilettage auquel on a procédé va être sympathique à ceux qui l’ont payé et ne le paieront plus. C’est évident ! Pour les autres, en revanche, le toilettage est beaucoup moins sympathique. Nous nous attendions à des mesures fortes, nous nous retrouvons avec des demi-mesures…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Des demi-mesures peut-être, mais c’est tout de même fort de café !

M. François Fortassin. … destinées à colmater les brèches ouvertes depuis 2007 au travers de cadeaux fiscaux extrêmement importants, il faut bien le dire !

Je ne crois pas en effet qu’avant 2007 il y avait dans ce pays des gens qui se ruinaient pour payer l’impôt sur la fortune.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ils étaient heureux ! (Sourires.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’était pas la mer à boire !

M. François Fortassin. La Cour des comptes a mis l’accent sur deux causes essentielles du déficit budgétaire. Pour un tiers, ce dernier provient, effectivement, de la crise. Mais, pour les deux tiers restants, le déficit résulte d’un défaut de recettes de l’État qui a plombé le budget et appauvri notre pays. Et ce n’est pas un modeste sénateur venu de ses lointaines Pyrénées qui l’affirme ; c’est la Cour des comptes ! Je suis donc tenté de considérer que c’est peut-être vrai. Mais tout le monde n’en est pas nécessairement persuadé.

On aurait pu cependant s’inspirer d’un exemple : dans les deux pays qui connaissent les crises les plus graves, soit la Grèce et l’Irlande, les causes de ces crises sont, bien entendu, multiples. Toutefois, dans les deux cas, la crise résulte principalement d’un manque de recettes patent.

En Grèce, l’évasion fiscale représente 80 % de la fiscalité, tandis que l’Irlande était, jusqu’à voilà deux ou trois ans, considérée comme une sorte d’eldorado parce que les entreprises n’y payaient pratiquement pas d’impôts.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Elle était en excédent budgétaire à l’époque !

M. François Fortassin. Or, dans ces deux cas, l’État, quand il a dû faire face à ses responsabilités, n’avait pas de liquidités.

Vous auriez dû considérer que c’était l’exemple à ne pas suivre ! Au lieu de cela vous continuez dans un système de déficits, en considérant que la fiscalité est toujours trop forte. Il faut en ce cas avoir le courage de dire que l’on n’augmentera pas d’un seul centime d’euro les dépenses de l’État, sinon on se trouvera dans une situation de déficit qui risque, à un moment ou à un autre, de nous placer dans des situations très inconfortables. (M. Aymeri de Montesquiou applaudit.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est vrai !

M. François Fortassin. Actuellement, les agences de notation ont le sentiment que les Français ont encore un bas de laine important. C’est un avantage, mais cela ne durera pas si nous n’arrivons pas à résorber nos déficits et à équilibrer nos dépenses par rapport à nos recettes.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien dit !

M. François Fortassin. Et comme on n’arrive pas aujourd'hui, malgré des réductions de dépenses considérables, à combler totalement ces déficits, il ne reste qu’une obligation : augmenter les recettes.

Autrement dit, je considère que cette réforme est trop frileuse dans la mesure où elle n’affiche pas de manière forte la nécessité d’augmenter les recettes de l’État.

J’estime ensuite que l’absence de réforme globale affaiblit considérablement les efforts. Je pense en particulier à un certain nombre de dispositions aujourd'hui obsolètes, comme les bases cadastrales en matière de taxes d’habitation, qui doivent, à l’évidence, faire l’objet d’une véritable réforme. Nous devons entreprendre les révisions qui n’ont pas été faites depuis quarante ans.

J’aborderai un autre point, sur lequel la réforme est totalement muette : la péréquation, incontournable pour réduire le différentiel existant entre collectivités très pauvres et collectivités un peu mieux dotées que les autres. Je ne parle pas de collectivités « riches » : chacun sait que personne n’accepte, dans ce pays, d’être reconnu comme riche…

M. François Baroin, ministre. On déteste les riches !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument ! Pour vivre heureux, vivons cachés !

M. François Fortassin. Monsieur le ministre, j’ai vainement cherché dans cette réforme une colonne vertébrale solide qui pourrait m’amener à l’adopter. En conséquence, comme la majorité des membres du groupe du RDSE, je ne voterai pas ce projet de loi. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. François Marc. Aura-t-il convaincu le ministre ?

M. François Fortassin. Je l’espère !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François Baroin, ministre. Avant de commencer, je voudrais, monsieur le rapporteur général, vous remercier une fois de plus, non seulement de votre implication, que j’évoquais dans mon introduction, mais aussi de vos propos et de l’analyse que vous faites de cette réforme.

C’est l’occasion pour moi de rappeler à celles et à ceux qui s’interrogent sur le périmètre, la voilure et la dimension de cette dernière qu’il n’y a pas eu depuis vingt-cinq ans une réforme fiscale de cette envergure, touchant à autant de symboles et soumise à autant de contraintes que celles qui pèsent sur le présent projet de loi : contraintes calendaires, contraintes budgétaires, contraintes d’équilibre, contraintes de périmètre – les personnes assujetties à l’ISF seront celles qui financeront la réforme –, recherche de justice, mais aussi souci légitime de répondre au souhait du Président de la République de s’engager dans une évolution, naturelle et compétitive sur le plan économique, vers une moindre taxation sur le stock de patrimoine et une plus forte taxation sur la transmission de ce dernier.

J’en profite pour dire à M. de Montesquiou que j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt ses réflexions sur l’évolution de notre fiscalité et sa modernisation, à travers, notamment, la retenue à la source. À n’en pas douter, il y a dans ces idées matière à alimenter le débat démocratique vertueux que nous aurons, l’année prochaine, à l’occasion des élections présidentielles. Elles ne peuvent toutefois trouver leur place dès aujourd'hui, dans ce collectif budgétaire ou dans le projet de loi de finances pour l’année prochaine. Je souhaite toutefois assurer à M. de Montesquiou qu’il s’agit là d’une étape importante que le Parlement, je l’espère, franchira.

Monsieur le rapporteur général, j’ai entendu vos propositions et vos réflexions.

Monsieur le président de la commission des finances, j’ai également lu avec beaucoup d’intérêt vos travaux, y compris ceux de ce matin.

Je dis et je répète ici, en réponse à ce qui a été avancé lors de la discussion générale, que la question de la taxe sur les non-résidents était, de mon point de vue, pertinente. J’insiste sur ce point. Elle a suscité de nombreuses réactions. Ce qui compte au final, pour le ministre du budget que je suis, c’est que nous trouvions les moyens budgétaires et financiers de solidifier l’équilibre budgétaire de la réforme.

Monsieur le rapporteur général, j’étudierai avec beaucoup d’attention le fruit de vos réflexions qui me semble apporter une réponse fidèle à la recherche de l’équilibre que poursuit la réforme.

J’entends bien votre proposition sur le stock et le flux du patrimoine. J’y serai attentif, quitte à assouplir la position du Gouvernement sur ce point.

Vous avez également évoqué, comme beaucoup d’autres, la situation de la zone euro et les modalités de fonctionnement du mécanisme européen de stabilité financière.

Lors des réunions de l’Eurogroupe de dimanche et lundi derniers, auxquelles participait Christine Lagarde, les ministres des finances de la zone euro ont précisé les conditions dans lesquelles la Grèce devait se voir verser la cinquième tranche du programme d’aides, à savoir douze milliards d’euros. Un compromis a été trouvé en échange de l’engagement du nouveau ministre des finances grec de poursuivre l’effort de consolidation budgétaire. Ce n’est pas facile pour le Gouvernement ; ce ne l’est évidemment pas non plus pour la population.

Le gouvernement de M. Papandreou a proposé un projet de budget à moyen terme, soit sur la période 2011-2014, dont les détails sont actuellement en cours d’examen par la troïka.

La ligne est désormais franco-allemande. Elle porte évidemment sur le refus d’un incident de paiement, d’un défaut de crédit, sur la nécessité d’un lien très direct de toute politique publique de soutien européen au profit de la Grèce avec la Banque centrale européenne et sur le caractère de volontariat qui doit primer dans toute décision concernant les banques privées s’agissant de la réalité de leurs encours à l’égard de la Grèce.

S’agissant de l’Irlande, le programme d’aides s’élève, comme vous le savez, à 85 milliards d’euros, dont 45 milliards d’euros émanant de l’Union européenne. Hier, lors d’une conférence de presse, M. Juncker a rappelé, au titre de l’Eurogroupe, que la mise en œuvre du programme d’aides financières à l’Irlande, qui s’est traduit par le versement d’un peu plus de 22 milliards d’euros depuis le mois de janvier 2011, était pour le moment satisfaisante.

Vous avez mentionné le rôle que doivent avoir les États européens en difficultés vis-à-vis des partenaires privés : là encore, je vous renvoie à la déclaration commune de M. Sarkozy et de Mme Merkel. C’est d'ailleurs le même souci qui a guidé la décision des ministres des finances de ne pas faire du Fonds européen de stabilité financière un créancier prioritaire. C’est un point évidemment important.

Je voudrais être le plus précis possible dans mes réponses aux questions abordées lors de la discussion générale afin que nous puissions nous arrêter plus longuement sur les amendements qui le méritent et le justifient.

Parmi les autres sujets que vous avez abordés, vous avez évoqué le relèvement du plafond de garantie que nous avons, comme vous le savez, introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale.

Le principe en a été acté à la fin du mois de mars dernier par le Conseil européen ; les modalités précises et le calibrage de ce dispositif de soutien ont également fait l’objet de discussions au sein de l’Eurogroupe que j’évoquais tout à l'heure.

Il était nécessaire d’intervenir dès le présent collectif, et donc de procéder par voie d’amendement, pour respecter l’engagement qu’ont pris les chefs d’État de la zone euro de finaliser la réforme du Fonds européen de stabilité financière à la fin de l’année 2011. De ce point de vue, nous honorons les engagements de la France vis-à-vis de ses partenaires.

Monsieur le rapporteur général, nous aurons l’occasion d’aborder en détail les autres points que vous avez soulevés lors de l’examen des amendements.

Comme M. Zocchetto, vous avez rappelé que nous devons solder le contentieux lié à l’affaire dite des frégates de Taïwan. La décision de justice est intervenue le jeudi 9 juin 2011, soit la veille de l’examen de cette partie du collectif budgétaire à l’Assemblée nationale.

C'est le triste épilogue de plusieurs procédures sur lesquelles je ne reviendrai pas, qui remontent à 1991, une époque à laquelle une autre majorité était au pouvoir. Je l'ai dit, je l'ai réaffirmé, nous trouverons, dans le cadre du projet de finances rectificative qui sera examiné à la fin de l'année, les moyens permettant à la France d’honorer sa signature et cette dette sans que cette dépense contrainte accroisse le déficit et sans que l’équilibre général de nos finances en soit altéré.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

M. François Baroin, ministre. Madame Hermange, mon collègue Xavier Bertrand aura l’occasion, lors de l’examen de l'article 22 du présent texte, de vous exposer le mécanisme mis en place par le Gouvernement pour indemniser les dommages subis par les personnes ayant été traitées au Médiator. J’aurai la sagesse de ne pas me substituer à lui.

Dans le même élan, je remercierai Mme Dini, qui a notamment traité, dans son intervention, des questions de la formation professionnelle et de l’apprentissage, d'avoir souligné que la création d'un compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » allait dans la bonne direction dans la mesure où elle permettra d’établir une procédure budgétaire plus rigoureuse, mieux maîtrisée et plus transparente.

Madame Beaufils, nous sommes évidemment en désaccord sur bien des sujets. On peut le regretter, mais je respecte votre point de vue. Néanmoins, je me permets de vous signaler que les chiffres de la croissance sont au rendez-vous en 2011. Le Gouvernement avait tablé sur une croissance de 2 %, objectif largement atteint puisque, à ce jour, nous en sommes déjà à 1,6 %.

Par ailleurs, je vous rappelle que, la semaine dernière, le Fonds monétaire international a réévalué sa prévision de croissance pour la zone euro et notamment pour la France. Dans le cas de notre pays, il a estimé que celle-ci devrait atteindre 2,1 %.

Je vous rappelle également que, lors d’une réunion qui s’est tenue au fort de Brégançon à la fin du mois d'août dernier sous l'autorité du Président de la République, nous avions décidé, dans une démarche de sincérité, d’abaisser de 2,5 % à 2 % notre prévision de croissance. Finalement, les perspectives des organismes internationaux sont plus optimistes puisque, pour ne citer que cet exemple, l’OCDE a prévu voilà une quinzaine de jours que la France atteindrait un taux de croissance de 2,2 %.

Comme vous le voyez, les plans d'économie, les mesures de réduction des dépenses et de soutien à l'activité économique étaient un pari courageux, mais un pari responsable. Nous serons donc en avance dans notre plan de réduction des déficits publics et nous serons également au rendez-vous de la croissance créatrice d'emplois.

En la matière, nos chiffres divergent là encore des vôtres. L’économie française a créé plusieurs dizaines de milliers d'emplois au cours de ces derniers mois et nous avons prévu, dans ce projet de loi de finances rectificative, des mesures d'accompagnement en faveur des publics les plus fragiles. Je pense en particulier aux jeunes et aux chômeurs de longue durée.

Mme Keller a évoqué la question des contrats aidés dans l'éducation nationale. Elle propose de mettre à profit 200 millions d’euros non consommés du Fonds national des solidarités actives pour maintenir le dispositif des contrats d’accompagnement dans l’emploi et autres contrats aidés dans l’éducation nationale.

Le budget triennal du FNSA est précisément établi de manière à permettre une mobilisation progressive des moyens affectés au financement du RSA. Opérer un prélèvement sur le FNSA pour financer des dépenses nouvelles oblige tout simplement le Gouvernement à compenser celui-ci à due concurrence pour financer la montée en charge du RSA. L’intégralité de la contribution additionnelle au prélèvement social de 1,1 % destinée à financer le RSA est versée au FNSA. Quelle que soit l'évolution de l'activité économique, nous ne pouvons nous détourner des objectifs que nous avons assignés au RSA.

M. Marc a parlé de « cadeau fiscal ». La gauche nous ressert cet argument à toutes les sauces, sans même avoir lu le texte de cette réforme. J'aurais pu comprendre ces arguments et les effets de communication qui les ont accompagnés, tant à l'Assemblée nationale qu’ici, au Sénat, si le Gouvernement avait proposé de supprimer l'ISF. Ce n’est pas le cas. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)