M. Gérard Cornu. Balayez devant votre porte !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous disposez donc bel et bien de moyens pour répondre à la demande de logements locatifs.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Expliquez-vous sur ce point, mes chers collègues ! Vous ne voulez pas construire de logements sociaux et, afin de rémunérer l’investissement, vous désirez que soient pratiqués des loyers très élevés. (Exclamations sur les travées de lUMP.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ce n’est pas vrai ! Je vais vous expliquer comment cela se passe dans ma commune et quel est le montant des loyers !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J’en viens aux logements de très petite surface. À Paris, certaines chambres de bonne de moins de 9 mètres carrés sont louées 400 euros par mois. Quel rendement extraordinaire pour ces propriétaires qui investissent dans ces biens !

Savez-vous pourquoi, à nos yeux, il est inadmissible et amoral de se contenter de limiter le montant des loyers pratiqués pour la location de ces chambres ? Tout simplement parce qu’elles ne devraient même pas être sur le marché dans la mesure où elles ne répondent pas aux critères exigés pour une mise en location !

Et vous, que demandez-vous ? Que des chambres de bonne, actuellement louées 400 euros, le soient désormais à 250 euros ! Vous trouvez moral, vous, de proposer à ce tarif des bouges qui ne sont même pas louables compte tenu de leur peu de confort ?

Offrir à la location des deux pièces de 35 mètres carrés pour 1 000 euros par mois – et je ne parle pas du XVIe arrondissement de Paris – vous semble correspondre à un rendement normal du capital ? Mais avec une telle pratique, la spéculation augmente et la bulle spéculative grossit.

À Paris…

M. Gérard Cornu. Toujours Paris !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mon cher collègue, la remarque que je veux faire s’applique à de nombreuses grandes villes, et pas seulement à Paris !

On construirait encore plus de logements sociaux publics dans ces communes si leurs élus, comme certains de vos amis, ne s’opposaient pas farouchement à la construction de ce type de logements sur des terrains publics, par exemple ceux qu’a libérés la SNCF ou la RATP. Vos amis créent des associations bidon qui intentent procès sur procès, afin de faire juger qu’une telle construction dénaturerait le paysage. Telle est la réalité !

En fait, il faut expliquer quel est le rapport entre prix des loyers et revenus de la population. Ce qui est bon pour les uns est évidemment très mauvais pour les autres… (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme Sylvie Goy-Chavent. Idéologie !

(M. Jean-Patrick Courtois remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Patrick Courtois

vice-président

M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote.

Mme Virginie Klès. Certains propos m’ont quelque peu surprise.

Des collègues siégeant à la droite de cet hémicycle soutiennent qu’il faut faire preuve d’un certain suivi dans la réflexion relative à la construction. Mais encore faut-il que les aides du Gouvernement – aides fiscales ou subventions –, quels que soient leurs destinataires – particuliers investisseurs, collectivités, bailleurs sociaux –, cessent de changer chaque année, voire plusieurs fois par an. En effet, comment, dans ces conditions, afficher une réelle volonté de construire ? Tel est, en tout cas, notre désir, qui ne semble pas partagé par l’ensemble des membres de notre assemblée...

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Tout est blanc, tout est noir : nous sommes servis, avec Mme Borvo Cohen-Seat ! Ma chère collègue, vous vous adressez à l’opposition sénatoriale de manière caricaturale. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)

Permettez-moi de revenir un instant sur l’article 55 de la loi SRU.

Effectivement, un certain nombre de communes – très peu nombreuses, vous le savez –, de toutes tendances politiques, refusent de construire et ne s’en cachent pas. Il faut le dire dans cette enceinte.

M. Jean-Pierre Sueur. Elles ont tort, quelle que soit leur couleur politique !

M. Philippe Dallier. Sur la dernière période triennale, globalement, les villes soumises à l’article 55 de la loi précitée, majoritairement de même sensibilité politique que moi, ont largement satisfait à l’objectif qui leur était assigné.

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. C’est faux !

M. Philippe Dallier. J’en conviens, quelques-unes s’y refusent et sont condamnables pour cela.

De grâce, cessez de caricaturer et de vouloir faire croire qu’il y a d’un côté les bons, de l’autre les méchants ! Telle n’est pas la réalité.

J’en viens à la construction de logements sociaux. Certes, on peut débattre de tout, mais les chiffres qui ont été cités, à savoir 40 000 en 2002 et 120 000 à ce jour, sont incontestables. Je comprends bien qu’ils vous ennuient, parce qu’il est facile de critiquer le Gouvernement, l’opposition sénatoriale.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ces logements sont programmés et ne sont pas encore construits !

M. Philippe Dallier. Ma chère collègue, pourriez-vous au moins avoir la correction de comparer des données comparables ? Ces chiffres sont ceux des logements sociaux annuellement programmés. Bien évidemment, la construction aura lieu ultérieurement. Mais vous ne pouvez pas contester ce résultat.

Oui, monsieur Cornu, je vous le concède, l’augmentation des loyers pose un vrai problème. Il n’est pas normal que le marché pratique les prix que vous avez cités.

À Paris, les loyers atteignent des montants exorbitants, tout comme en Seine-Saint-Denis, où des trois pièces de 45 mètres carrés, dans un état lamentable, sont loués à des prix extravagants. J’ai déjà eu l’occasion de le dire dans cet hémicycle : cette situation est inacceptable.

Comment encadrer peu ou prou les loyers sans tuer l’offre ? Là se situe la véritable difficulté. C’est sur ce point que nous devrions travailler afin d’élaborer des dispositifs permettant à nos concitoyens les plus modestes de trouver une solution adaptée à leurs revenus.

Vous le constatez, nous pouvons souscrire à peu près aux objectifs fixés, mais la question est ensuite de savoir comment les atteindre.

Les solutions que vous préconisez par le biais du présent amendement comme du précédent visent le DALO et présentent des inconvénients. Elles risquent, notamment, de tarir l’offre de logements. In fine, les problèmes demeureraient ; ils seraient même peut-être plus nombreux qu’aujourd'hui.

Mme Sylvie Goy-Chavent. Enfin du bon sens !

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Les termes du débat sont différents de ceux qui nous ont occupés à l’amendement précédent.

Je comprends bien les arguments exposés par M. Dallier. En réalité, il s’agit de permettre à nos concitoyens qui le souhaitent d’habiter dans certaines zones dites « tendues » et de bénéficier d’une offre de logement satisfaisante. Or ce n’est plus le cas à l’heure actuelle.

Quoi qu’il en soit, dans certains secteurs, que la majorité y soit de gauche ou de droite – il ne faut pas se rejeter la responsabilité de ce qui s’est passé –, nos compatriotes ne peuvent pas se loger en raison du montant beaucoup trop élevé des loyers. C'est pourquoi la majorité du groupe RDSE votera contre l’amendement n° 9 rectifié. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste-EELV.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.

M. Daniel Dubois. Je rejoins la position de mes collègues siégeant à la droite de cet hémicycle.

La pire des méthodes pour obtenir une offre plus abondante de logements est de conduire en zigzag. En réalité, cela a été dit tout à l’heure, il faut mener une action continue, réfléchie. L’une des meilleures façons de réguler les loyers est de disposer d’une offre plus abondante sur les territoires tendus. Sur ce point, nous sommes à peu près d’accord.

Évidemment, les fonds privés sont absolument nécessaires, mais encore faut-il que les investisseurs ne bénéficient d’avantages fiscaux que lorsqu’ils ne feront que du logement conventionné.

Reconnaissons que, aujourd'hui, on construit plus de logements sociaux qu’hier. Néanmoins, un effort considérable doit être réalisé pour libérer du foncier et donner aux outils d’urbanisme plus d’efficacité.

Conduire en zigzag, comme vous le proposez, produira des effets secondaires catastrophiques sur l’offre de logements. C'est pourquoi mon groupe soutient le présent amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que l’avis du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 81 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Majorité absolue des suffrages exprimés 173
Pour l’adoption 169
Contre 175

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 49 est présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 206 est présenté par MM. Labbé et Dantec, Mmes Aïchi, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Desessard, Gattolin et Placé.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifiée :

1° À la seconde phrase du second alinéa de l’article 2, après les mots : « des deux premiers alinéas de l’article 6, », sont insérés les mots : «, de l’article 17 » ;

2° Le a de l’article 17 est ainsi rédigé :

« a) À l’exception du contrat de location passé par un organisme d’habitation à loyer modéré, le contrat de location ne peut prévoir un loyer supérieur au plafond de loyer fixé par un arrêté du représentant de l’État dans la région applicable à ce bien. Cet arrêté est pris après avis du comité régional de l’habitat mentionné à l’article L. 364-1 du code de la construction et de l’habitation.

« Un arrêté du représentant de l’État dans la région détermine chaque année par bassin d’habitat le plafond de loyer mentionné au premier alinéa dans des conditions définies annuellement par un arrêté du ministre chargé du logement.

« L’arrêté du représentant de l’État dans la région fixe, pour chaque bassin d’habitat, un plafond de loyer applicable à des catégories de logements qu’il définit. Il fixe également les taux de modulation maxima de ces plafonds de loyer en fonction :

« - des aides publiques perçues au titre de la construction, de l’acquisition ou de la rénovation de ce bien ;

« - de la performance énergétique du bâtiment ;

« - de l’ancienneté et de la salubrité de ce logement ;

« - de son éloignement d’équipements publics et commerciaux et des zones d’activité. » ;

3° Les b et c du même article sont abrogés.

La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l'amendement n° 49.

Mme Mireille Schurch. Ce sujet est important. Nous n’avons pas la même perception des réalités, monsieur Cornu, c’est certain.

Les politiques menées par le Gouvernement ont conduit à ravaler le logement au rang de simple marchandise, d’objet spéculatif, selon la formule de Nicole Borvo Cohen-Seat.

Nous en voyons aujourd'hui le résultat : une augmentation effrénée du niveau des loyers.

Alors que, dans les années quatre-vingt, le loyer représentait en moyenne 13 % du revenu des ménages, cette part atteint désormais près de 25 %, et même 50 % pour certaines populations, comme les étudiants, les travailleurs précaires ou les retraités. Voilà la réalité !

À cette évolution s’ajoute l’explosion du coût de l’énergie, qui alourdit encore la facture des ménages.

Au niveau national, les prix à la location ont doublé en treize ans. En Île-de-France, les loyers des appartements augmentent de 5 % par an. À Paris, le prix au mètre carré s’établit en moyenne à 20 euros, mais peut dépasser 30 ou 40 euros dans certains arrondissements. Se loger est devenu un parcours du combattant !

La crise du logement étant à son paroxysme, il nous semble urgent et nécessaire de prendre des mesures d’encadrement des loyers. Il s'agit d’une arme efficace pour lutter contre la spéculation dans le parc privé.

L'article 2 bis AA prévoit d’encadrer le loyer des logements vacants ou faisant l’objet d’une première location. Dans les zones tendues, un décret pourra encadrer l’évolution des loyers des contrats renouvelés, mais également le niveau des loyers des logements vacants ou faisant l’objet d’une première location. Dans ce dernier cas, le niveau de loyer ne pourra être inférieur à 80 % du loyer moyen constaté pour des logements de caractéristiques comparables par les observatoires de loyers.

Cependant, nous estimons que ce dispositif n’est pas suffisamment ambitieux ; en tout cas, il l’est moins que la proposition de loi présentée à l’Assemblée nationale le 1er décembre dernier par notre collègue député Pierre Gosnat, votée par l’ensemble de la gauche.

En effet, cette proposition de loi prévoyait que le préfet de région fixerait par arrêté un loyer plafond au mètre carré par bassin d’habitat, en tenant compte d’une série de critères et après consultation du comité régional de l’habitat. À nos yeux, ce dispositif présentait l’avantage majeur de ne pas se contenter d’accompagner une hausse des loyers inéluctable, mais de faire baisser les loyers dans les zones tendues et de les stabiliser sur le reste du territoire.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui nous paraît extrêmement utile en ces temps de crise.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l'amendement n° 206.

M. Joël Labbé. Comme nous l’avons fait hier soir pour des amendements du même type, nous retirons celui-ci.

M. le président. L'amendement n° 206 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 49 ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. La commission a inséré, sur mon initiative, l’article 2 bis AA, qui met en place un mécanisme d’encadrement de l’évolution des loyers. L’amendement n° 49 prévoit un dispositif alternatif, mais ce dernier me paraît moins souple que celui qu’a adopté la commission.

Je souhaite toutefois rassurer les auteurs de cet amendement, qui semblent penser que l’encadrement prévu par l’article 2 bis AA ne vise que la relocation. Il n’en est rien, puisque l’encadrement de l’évolution des loyers des logements faisant l’objet d’une première location est évoqué à l’alinéa 4.

En conséquence, je demande aux auteurs de cet amendement de le retirer ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Madame Schurch, l'amendement n° 49 est-il maintenu ?

Mme Mireille Schurch. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis AA.

(L'article 2 bis AA est adopté.)

Article 2 bis AA (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs
Article 2 bis A (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel après l'article 2 bis AA

M. le président. L'amendement n° 202, présenté par MM. Labbé et Dantec, Mmes Aïchi, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Desessard, Gattolin et Placé, est ainsi libellé :

Après l'article 2 bis AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa du I, les mots : « ou de vendre » sont supprimés ;

2° Le II est abrogé.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à supprimer le congé-vente. Ce dernier permet actuellement aux bailleurs privés de donner congé à leurs locataires six mois avant le renouvellement du bail. Le locataire est certes prioritaire pour acheter le bien, mais encore faut-il qu’il ait les moyens de le faire dans un laps de temps aussi court.

La réalité est plus complexe. Plusieurs dizaines de milliers de congés-vente sont délivrés chaque année, sans que leur nombre soit recensé, puisqu’il suffit d’un simple courrier recommandé du bailleur six mois avant la reconduction du bail.

Surtout, certains congés-vente sont délivrés abusivement, dans le seul but de relouer le bien au prix du marché à un nouveau locataire, le bailleur pouvant arguer, en s’appuyant sur la jurisprudence, qu’il n’a pas réussi à vendre son bien et n’a donc pas d’autre solution que de le remettre en location. La ficelle est énorme, mais elle n’en est pas moins utilisée.

Le congé-vente a longtemps été banni du droit locatif français, car il était considéré – à juste titre – comme une injustice à l’égard des locataires et une mesure spéculative. Il a été rétabli et généralisé dans les rapports locatifs par la loi du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière, dite loi Méhaignerie.

Cet amendement vise donc à le supprimer, dans la mesure où rien n’empêche un bailleur de ne pas reconduire un bail s’il souhaite vendre son bien. Il s'agit de mettre fin à une pratique qui aggrave la pénurie de logements et favorise la spéculation sur les baux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Fauconnier, rapporteur. Le présent amendement vise à supprimer purement et simplement le congé-vente en raison, selon ses auteurs, des abus auxquels celui-ci donne parfois lieu.

J’en demande le retrait ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Monsieur Labbé, l'amendement n° 202 est-il maintenu ?

M. Joël Labbé. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 202.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 2 bis AA
Dossier législatif : projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs
Article 2 bis B

Article 2 bis A

(Non modifié)

À la dernière phrase du dernier alinéa de l’article 13 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 relative aux sociétés d’attribution d’immeubles en jouissance à temps partagé, après le mot : « effectué », sont insérés les mots : « dans un délai maximal de quinze jours à compter de la réception de la demande ».

M. le président. L'amendement n° 96 rectifié, présenté par MM. Sueur, Bérit-Débat, Vaugrenard, Teston et Labbé, Mme Rossignol, MM. Antiste et Repentin, Mmes Bourzai et Nicoux, MM. S. Larcher, Kaltenbach, Germain et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La loi n°86-18 du 6 janvier 1986 relative aux sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé est ainsi modifiée :

1° À la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 13, après le mot : « effectué », sont insérés les mots : « dans un délai maximal de quinze jours à compter de la réception de la demande » ;

2° L’article 19-1 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase, les mots : « les parts ou actions que l’associé détient dans le capital social lui ont été transmises par succession depuis moins de deux ans, ou lorsque celui-ci » sont remplacés par les mots : « l’associé » ;

b) Cet article est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il est de droit lorsque les parts ou actions que l'associé détient dans le capital social lui ont été transmises par succession depuis moins de deux ans. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Ayant été contacté par des personnes se trouvant dans une situation inextricable parce qu’elles ont hérité de parts de propriété temporaire au sein d’immeubles en jouissance à temps partagé, je suis intervenu à de nombreuses reprises sur ce sujet dans cet hémicycle.

L’article 2 bis A, qui modifie l’article 13 de la loi du 6 janvier 1986 relative aux sociétés d’attribution d’immeubles en jouissance à temps partagé, constitue une avancée non négligeable, puisqu’il rend effective l’obligation pour les gérants de ces sociétés de répondre, dans un délai impératif de quinze jours, aux demandes d’associés souhaitant connaître les coordonnées des autres associés.

Pour autant, cette amélioration ne suffit pas à répondre à certaines situations ubuesques, en particulier les successions à l’issue desquelles les héritiers se trouvent non pas propriétaires, mais plutôt propriété d’un bien dont ils ne peuvent se débarrasser alors même que, parfois, ils ne peuvent pas en profiter.

Lors de l’examen de la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, j’ai eu l’occasion de rappeler que certaines personnes ont hérité de leurs parents un appartement pour une période de l’année où la station et la résidence sont fermées. Quel magnifique héritage ! Vous êtes propriétaire d’un immeuble une semaine par an ; pendant cette période, la station et l’immeuble sont fermés, mais vous devez tout de même payer les charges ! (Rires.)

Un pas dans le bon sens a été franchi avec la loi de 2009, puisqu’elle a prévu deux possibilités de sortie d’une société en jouissance à temps partagé : soit par un accord unanime des associés, soit par une décision de justice pour justes motifs.

Toutefois, ce pas dans le bon sens n’a qu’un effet relatif, car il est extrêmement difficile, voire impossible, d’obtenir une décision unanime des associés.

Lors de la première lecture de la loi de développement et de modernisation des services touristiques, le Sénat avait pourtant adopté, à l’unanimité de ses membres – j’y insiste, mes chers collègues –, et avec un avis favorable du Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, une troisième possibilité de sortie, dans le cas où les parts ou actions que l’associé détient dans le capital social lui ont été transmises par succession.

Le présent amendement reprend ce dispositif.

En outre, pour éviter les abus, cette sortie de droit ne pourrait s’effectuer que dans un délai de deux ans à compter de l’héritage. Nous étions tombés d'accord sur ce point lors de précédentes discussions. Pour ma part, je souhaiterais que nous allions plus loin, car, je le répète, certaines personnes se trouvent dans une situation inextricable dans la mesure où elles ont hérité du bien – si toutefois on peut parler de « bien » – voilà cinq, dix, quinze ou vingt ans.

L’adoption de cet amendement constituerait déjà un pas dans le bon sens. Or, comme vous le savez tous, mes chers collègues, un pas dans le bon sens n’empêche pas d’en faire d’autres ultérieurement...

M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?

Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Cet amendement reprend une proposition adoptée à deux reprises par le Sénat lors de l’examen de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.

Le délai de deux ans est raisonnable, puisqu’il permet de préserver à la fois les intérêts des héritiers et ceux des associés. La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Jean-Pierre Sueur a parfaitement expliqué le problème du timeshare. Nous en avons d'ailleurs longuement discuté à l’Assemblée nationale, dans un climat très consensuel.

Nous devons trouver de bonnes solutions. Chacun est bien conscient des difficultés : si l’on facilite le retrait d’un associé, on prend le risque de pénaliser les associés restants. L’équilibre est extrêmement difficile à trouver.

À l’Assemblée nationale, nous nous sommes mis d’accord pour constituer, à partir du début du mois de janvier, un groupe de travail rassemblant des parlementaires de tous les groupes. Je suis favorable à ce que des sénateurs participent à ce groupe de travail, afin que nous trouvions la bonne solution, le bon équilibre sur le plan juridique.

M. Sueur a raison : un pas a été fait, et l’adoption de cet amendement constituerait un pas supplémentaire. Cependant, peut-être pourrions-nous trouver une solution plus efficace, qui permettrait de régler le problème.

Sur le fond, je ne suis pas opposé à cet amendement, mais je ne peux pas être favorable à ce dispositif, car il ne règle pas le problème – M. Sueur l’admet – et pourrait être la cause de nouvelles difficultés.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Monsieur le secrétaire d’État, je vous prends au mot : le meilleur moyen d’être sûr que le Sénat sera associé au groupe de travail, c’est d’adopter cet amendement !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le secrétaire d'État, il est toujours passionnant de participer à un groupe de travail !

Toutefois, mes chers collègues, je me permets de faire observer que c’est la cinquième fois en quatre ou cinq ans que je défends ce même amendement et que celui-ci a été adopté à l’unanimité, voilà trois ans, ici même.

Il me semble donc que la réflexion a déjà eu le temps de progresser au Sénat et qu’il serait sage, comme l’ont excellemment dit Mme la rapporteure pour avis et M. le président de la commission, d’adopter aujourd'hui cette disposition, sauf à accepter ce qui serait un recul de la part de notre assemblée.

Un surcroît d’argumentation convaincra peut-être nos collègues députés de l’adopter et, dès lors, un groupe de travail ne sera plus utile...

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. À la suite des dernières interventions de MM. Raoul et Sueur, je vais m’en remettre à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

Je me tourne cependant vers M. Sueur pour lui dire, mais il le sait bien au fond, qu’il sera nécessaire de poursuivre le travail sur ce dispositif. Cet amendement va être adopté. Fort bien. Cependant, je préfère la position du président de la commission de l’économie, pour qui son adoption permettra la constitution d’un groupe de travail, à celle de M. Sueur, qui considère que celle-ci rendra inutile la constitution d’un tel groupe.

Vous savez parfaitement, monsieur Sueur, que, tel qu’il est actuellement conçu, le dispositif que vous proposez contribue, certes, à solutionner une partie du problème, mais l’aggrave par ailleurs puisque les associés qui restent verront en réalité leurs charges s’accroître. (M. Jean-Pierre Sueur proteste.)

Même si je m’en remets à la sagesse de cette assemblée, monsieur Sueur, je vous engage néanmoins, si cet amendement est adopté, à participer au groupe de travail pour trouver un véritable équilibre et éviter les effets pervers que vous connaissez bien.