M. Éric Besson, ministre. Contrairement à ce que vous avez suggéré, le Gouvernement n’a jamais dit que l’Allemagne avait relancé ses centrales nucléaires ! Cette rumeur a circulé, mais aucun membre du Gouvernement ne l’a reprise.

Mme Laurence Rossignol. Elle a rouvert des centrales au gaz !

M. Éric Besson, ministre. Non, il s’agit de centrales fonctionnant au charbon.

Enfin, vous avez prétendu que le Gouvernement avait cherché à faire peur en annonçant un black-out en Europe en cas de grand froid. Il n’en est rien ! Du fait de l’interconnexion des réseaux, nous avions simplement demandé dès septembre à EDF, à RTE et à tous les opérateurs d’être extrêmement vigilants dans une telle hypothèse.

Mme Laurence Rossignol. Vous êtes meilleur visionnaire en matière de météo que d’énergie !

M. Éric Besson, ministre. Je souscris à nombre des propos frappés au coin du bon sens qu’a tenus M. Fortassin.

En ce qui concerne l’éolien offshore, le Gouvernement a décidé de lancer un appel d’offres pour une puissance installée de deux fois 3 000 mégawatts.

De façon plus générale, notre objectif en matière d’énergies renouvelables n’est pas seulement d’accroître les capacités de production ; nous voulons parallèlement favoriser l’émergence de filières industrielles de qualité, au travers de plusieurs programmes que nous avons lancés grâce aux investissements d’avenir.

Notre politique est bien d’assurer une transition énergétique, mais il ne faut pas faire l’amalgame entre cette dernière et sortie du nucléaire ou réduction de sa part dans la production d’énergie. Nous concevons la transition énergétique comme une voie menant à la réduction de notre dépendance aux hydrocarbures grâce à une amélioration de l’efficacité énergétique, au développement des énergies renouvelables et au maintien d’un socle nucléaire toujours plus sûr et transparent.

Je tiens à le redire : l’action du Gouvernement aura permis un développement sans précédent des énergies renouvelables, en particulier par la création du fonds chaleur, le lancement d’appels d’offres pour la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et les investissements d’avenir.

Mme Laurence Rossignol. Pour quelles filières industrielles, monsieur le ministre ?

M. Éric Besson, ministre. Madame Rossignol, cessez de m’interrompre ! Il est dommage que vous ayez été moins prolixe à la tribune, tout à l’heure, car nous aurions aimé entendre vos propositions !

Mme Laurence Rossignol. J’ai parlé sept minutes ; cela fait plus d’une demi-heure que vous répondez aux orateurs et dix minutes que vous commentez mon intervention : elle ne devait donc pas être aussi vide que vous le dites !

M. Éric Besson, ministre. Mardi dernier, à l’occasion du colloque annuel du Syndicat des énergies renouvelables, j’ai présenté le bilan de l’action du Gouvernement.

Pour ce qui concerne le nucléaire, je tiens à saluer l’initiative du groupe UMP, dont la proposition de résolution a permis le présent débat.

Le choix du nucléaire fait par la France il y a près d’un demi-siècle a une contrepartie nécessaire : une exigence absolue en matière de sûreté et de transparence. À ce propos, les premières conclusions des évaluations complémentaires de sûreté demandées par le Premier ministre à l’Autorité de sûreté nucléaire ont été rendues publiques le 3 janvier dernier. Selon l’ASN, l’ensemble des installations nucléaires françaises soumises à l’audit présentent « un niveau de sûreté suffisant pour pouvoir continuer d’être exploitées ».

L’ASN a également demandé que la robustesse des installations soit renforcée afin de leur permettre, le cas échéant, de faire face à des situations extrêmes. En effet, le niveau de sûreté de nos installations doit continuer d’être augmenté, comme il l’a été en permanence depuis le lancement du programme nucléaire français. Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même veillerons à ce que les travaux demandés soient réalisés dans les délais prescrits.

Dans le même souci de transparence, le Premier ministre a demandé à la Cour des comptes de procéder à un audit des coûts du nucléaire. Le rapport que la Cour des comptes a rendu le 31 janvier dernier comporte trois conclusions principales.

En premier lieu, il n’existe pas de coûts cachés dans le nucléaire ; il faut donc en finir avec ce vieux mythe !

En deuxième lieu, s’il existe des incertitudes, elles ne peuvent affecter qu’à la marge le coût du nucléaire. Nous avons d’ailleurs lancé des audits complémentaires afin de les lever. La Cour des comptes estime que le coût total du nucléaire n’évoluerait que de 5 % environ si les charges futures de démantèlement ou de gestion des déchets venaient à doubler. Quant à l’incidence de l’augmentation des charges de maintenance, elle est évaluée à 10 % du coût moyen.

Enfin, la Cour des comptes conclut que l’électricité produite par le parc nucléaire, dont le coût total est compris entre 33 et 49 euros par mégawattheure, selon que l’on prend ou non en compte le fait que le parc nucléaire actuel est largement amorti, constitue, après l’hydroélectricité, la source d’électricité la plus compétitive. Il faut le dire et le répéter ! Celles et ceux qui espéraient que la Cour des comptes démontrerait l’inverse en sont pour leurs frais…

M. Ronan Dantec. C’est faux ! L’EPR n’est pas compétitif !

M. Éric Besson, ministre. Ainsi, les travaux de la Cour des comptes confirment que notre parc nucléaire constitue un atout économique pour les Français et pour nos entreprises. Il n’y a pas de mystère : c’est grâce au nucléaire que le coût de l’électricité est de 40 % inférieur à la moyenne européenne.

Nous considérons que nous n’avons pas le droit de sacrifier cet héritage de l’investissement des Français. Dans cet esprit, la meilleure stratégie pour notre pays est la prolongation de la durée de vie du parc nucléaire, sous réserve des avis de l’ASN.

Ce matin même, à l’occasion de son déplacement à Fessenheim, le Président de la République a présenté les conclusions du conseil de politique nucléaire qu’il a réuni hier. Il a demandé très clairement que soit engagé le processus permettant de préparer la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires au-delà de quarante ans, et ajouté qu’il n’était pas question de fermer de manière anticipée des réacteurs nucléaires que l’ASN considérerait comme aptes à fonctionner.

Nous devons aussi, à l’évidence, achever la construction du réacteur EPR de Flamanville. J’observe avec plaisir que les avis sont désormais unanimes sur ce sujet…

M. Ronan Dantec. Pas du tout !

M. Éric Besson, ministre. Excusez-moi, le parti socialiste est d’accord, mais pas vous ! (Sourires.)

Nous devons également poursuivre le projet d’EPR de Penly. Combiné au développement de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables, celui-ci nous permettra de disposer de marges de manœuvre pour préserver notre capacité à prendre toute décision relative à la sûreté du parc nucléaire.

Enfin, pour compléter la programmation pluriannuelle des investissements de production électrique, actuellement établie à un horizon de dix ans, le conseil de politique nucléaire, présidé par le Président de la République, a demandé au ministre chargé de l’énergie d’élaborer la prochaine planification à l’horizon de 2030. Retenir ce nouvel horizon permettra d’illustrer explicitement les choix possibles et leurs conséquences dans l’hypothèse où la durée de vie de certaines centrales serait prolongée au-delà de quarante ans.

J’ajoute que notre filière industrielle s’est renforcée et se renforcera encore. Le partenariat stratégique que tout le monde appelait de ses vœux entre les deux industriels majeurs que sont EDF et Areva a été conclu. Quant au comité stratégique de filière, il est pleinement opérationnel.

Pour conclure, il n’est pas question pour nous de sacrifier notre parc nucléaire en le fermant totalement ou partiellement pour des raisons qui ne seraient qu’idéologiques, alors que l’ASN considère que nos centrales sont en état de continuer à fonctionner. Nous n’accepterons pas que le fruit de l’investissement des Français soit détruit.

Le Gouvernement est donc favorable à l’adoption de la présente proposition de résolution, dont il approuve pour sa part aussi bien l’exposé des motifs que les termes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean Bizet. Très bien !

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...

Nous allons procéder au vote sur la proposition de résolution n° 202, relative à la filière industrielle nucléaire française.

Proposition de résolution

Le Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu les articles 1er à 6 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution,

Vu le chapitre VIII bis du Règlement du Sénat ;

Considérant l’excellence de la filière industrielle nucléaire française,

Considérant son poids économique et les emplois qui y sont directement ou indirectement attachés,

Considérant la force de cette filière à l’international,

Considérant que son outil industriel est un élément important d’une stratégie de réindustrialisation de notre pays et qu’il contribue à sa compétitivité,

- attire l’attention sur la nécessité de mener conjointement les réflexions sur l’équilibre du bouquet énergétique français et celles sur la pérennité de notre filière industrielle nucléaire ;

- souligne que toute modification sensible de ce bouquet devrait s’opérer selon des modalités préservant l’excellence de cette filière ainsi que ses importantes perspectives de développement à l’international ;

- plaide pour le maintien d’un outil industriel qui soit en capacité de répondre aux besoins des pays tiers en énergie nucléaire ;

- met en garde contre toute déstabilisation brutale de la filière au risque notamment de préjudicier à la sûreté nucléaire.

Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explications de vote.

Je mets aux voix la proposition de résolution.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 101 :

Nombre de votants 331
Nombre de suffrages exprimés 331
Majorité absolue des suffrages exprimés 166
Pour l’adoption 171
Contre 160

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l’UCR.)

M. Roland du Luart. Très bien !

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de résolution présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution, relative à  la filière industrielle nucléaire française
 

6

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 13 février 2012, à quinze heures et, éventuellement, le soir :

1. Proposition de résolution relative à l’application de certaines dispositions de la loi du 9 juillet 2010, concernant les violences faites aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution (n° 200, 2011-2012).

2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXème siècle (n° 327, 2011-2012).

Rapport de Mme Bariza Khiari, rapporteure pour le Sénat (n° 326, 2011-2012).

3. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant réforme des ports d’outre-mer relevant de l’État et diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports (n° 329, 2011-2012).

Rapport de Mme Odette Herviaux, rapporteure pour le Sénat (n° 328, 2011-2012).

4. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France (n° 317, 2011-2012).

Rapport de M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur pour le Sénat (n° 316, 2011-2012).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART