M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, sur l'article.

M. Vincent Capo-Canellas. Nous en arrivons, madame le ministre, avec cet article 4, au cœur du projet de loi que vous défendez, car il en constitue sans doute la mesure la plus symbolique.

L’augmentation du seuil minimal de logements sociaux pour le porter de manière quasi uniforme à 25 %, au-delà de l’intention louable de répondre à des besoins réels, soulève dans certains cas de vraies difficultés et peut avoir des effets inattendus.

Je ne m’oppose pas sur le principe aux 25 %. Je souhaite simplement en souligner les effets dans certaines situations. Mon propos s’inscrit dans le droit fil des interventions qu’ont faites hier soir plusieurs de nos collègues. Il n’a pas pour objet d’insister sur les difficultés que peuvent rencontrer les communes à produire du logement social, même si cela peut arriver ; il a pour but de vous inviter à considérer la réalité de territoires qui vivent des situations de déclassement, de perte d’identité ou de déclin industriel, se combinant parfois avec l’arrivée massive de populations en difficulté, lesquelles, ne trouvant à se loger autrement, rejoignent le parc privé.

Cette réalité est celle d’une bonne partie de la Seine-Saint-Denis, département dont je suis l’élu. S’y développe un habitat très social de fait, dans le parc privé, souvent dans des logements insalubres – nous avons tous en tête des événements tragiques –, mais aussi dans des pavillons du début du XXe siècle, quelquefois occupés par trois ou quatre familles.

Cette réalité d’un habitat très social de fait n’est pas, madame la ministre, prise en compte dans votre projet de loi. Elle est pourtant mesurable au fil des statistiques sociales des communes. Il est essentiel que la vision uniforme et quasi mécaniste que vous défendez soit complétée par un diagnostic social qui permette, selon la réalité des territoires, de moduler l’effort de production de logements. À ce titre, privilégier dans ces cas-là le PLS, par exemple, devrait être un objectif.

Je pense que nous partageons tous, dans cet hémicycle, un objectif : éviter de créer des ghettos. Prenons-y garde, ils se fabriquent, et à vitesse grand V. Les indicateurs sociaux devraient être au centre de votre dispositif.

De même, raisonner à l’échelle d’une agglomération, dès lors que celle-ci est assise sur un périmètre cohérent, devrait être un objectif partagé par tous. Il s’agit d’encadrer les disparités, qu’il faut évidemment borner dans une communauté d’agglomération, et tout le monde devrait partager cette idée de bon sens. Pourquoi ne pas envisager, par exemple, un taux de 25 % à l’échelle communautaire avec un minimum de 20 % pour chaque commune lorsque c’est adapté à la situation locale, en particulier quand les indicateurs sociaux font apparaître une paupérisation croissante ?

Pour être très clair, je précise ici que ma commune, Le Bourget, est au-dessus du seuil de 25 % et que la communauté d’agglomération de l’aéroport du Bourget, que je préside, est au-dessus des 37 %. Au sein de celle-ci, la commune de Dugny, que Philippe Dallier connaît bien, compte 70 % de logements sociaux. Cela montre bien qu’il faudrait une analyse plus fine et partenariale des situations locales. Bref, il conviendrait de commencer par s’appuyer sur les PLH existants.

Contrairement à ce qu’il en est dans d’autres territoires, chez nous, la mixité, cela consiste aussi et surtout à éviter que les classes moyennes et supérieures ne fuient. C’est le cas dans de nombreuses communes du département et il faut veiller à retrouver cet équilibre, qui est en péril. C’est la condition pour que les populations éligibles au logement social vivent bien et que l’équilibre social global soit préservé.

Cet équilibre et cette mixité sociale doivent être recherchés plus globalement à l’échelle de l’Île-de-France. En tant qu’élue francilienne, madame la ministre, vous le savez bien : un effort de rééquilibrage doit être fait. C’est d’ailleurs l’un des défis du Grand Paris, dossier dont vous avez également la charge.

Madame la ministre, l’urbanisme et le logement sont le fruit d’une vision d’ensemble. Il s’agit de construire des projets de territoires qui mêlent services, emplois, équipements. Il ne s’agit pas uniquement de se référer à un taux. Il faut faire émerger une vision d’avenir pour des territoires qui, trop souvent, souffrent de cette absence de vision.

En conclusion, je vous invite à considérer avec intérêt et sagesse les amendements qui ont pour objet de porter le raisonnement à l’échelle des agglomérations et ceux qui visent à prendre en compte des critères sociaux pour déterminer l’application du taux de 25 % de logements sociaux. Ce serait un moindre mal par rapport à la vision trop générale et un brin mécaniste de votre projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UCR.)

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, sur l'article.

M. Serge Dassault. Voilà longtemps, madame la ministre, que je formule des propositions relatives aux logements sociaux, en vue d’améliorer la situation du logement dans les communes et, surtout, de faciliter le travail des maires. Mais le gouvernement précédent ne les a jamais acceptés. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.) Peut être aurai-je plus de chance avec vous… (Sourires.) On ne sait jamais, car cela concerne tout le monde, tous les maires, et ce sont des propositions de bon sens – elles ne sont ni de gauche ni de droite –, tirées de l’expérience que j’ai acquise en tant que maire de Corbeil-Essonnes durant quinze ans.

Premièrement, aujourd’hui, toute garantie d’emprunt est interdite aux communes, sauf pour la construction de logements. Cela signifie que les communes doivent signer des contrats d'œuvre pour garantir les emprunts des bailleurs sur leur territoire. Ces garanties d'emprunt ne riment à rien, tant sur le plan financier que sur le plan des garanties, et les communes, faute de disposer des moyens financiers nécessaires, sont évidemment incapables de les assumer. C'est pour cette raison que je défendrai un amendement visant à supprimer cette obligation de garantie d'emprunt, laquelle peut placer n’importe quelle commune dans une situation très délicate si le bailleur social est incapable d’assurer le remboursement de ses emprunts. À la première demande, d'après les contrats qu'on nous oblige à faire voter par notre conseil municipal et à signer, il faut que la commune rembourse !

Par ailleurs, puisque les bailleurs ont toute latitude pour souscrire une garantie auprès d’une société d’assurance, il n'est pas nécessaire de contraindre les communes à assumer cette garantie.

Deuxièmement, il serait logique que les maires qui font construire des logements sociaux sur leur territoire puissent disposer de tous ces logements au profit de leurs administrés, et non pas seulement de 20 % d’entre eux, conséquence de cette obligation de garantie d'emprunt. Ces logements doivent être construits pour leurs administrés d'abord, et non pas pour d'autres ! Il est tout à fait anormal que ces logements ne soient pas mis à leur disposition. Il est extrêmement déplaisant pour un maire de construire de nouveaux logements et d’expliquer à ses administrés qu’ils n’auront pas le droit d’y habiter.

Cette limite de 20 % est tout à fait anormale et il faudrait admettre que les maires puissent disposer de la totalité de ces logements. Si certains d’entre eux ne sont pas utilisés, le maire a toute faculté de les mettre à la disposition du « 1 % logement » ou, éventuellement, du préfet.

Aussi, dans l'intérêt de tous les maires, je défendrai tout à l'heure un amendement visant à laisser à la disposition des maires l’ensemble des logements construits sur le territoire de leur commune.

Troisièmement, je voudrais rappeler qu’il ne suffit pas de construire des logements ; il faut aussi construire les installations nécessaires à la vie des habitants : des écoles, des crèches, des installations sportives. Rien n'est prévu pour cela ! On demande aux maires de construire des logements sociaux, mais les communes ne disposent pas des moyens pour mettre parallèlement en place ces équipements. Afin de permettre ou de faciliter l'accroissement de l’offre de logements dans les communes, il faudrait aussi trouver un moyen pour que les communes puissent financer la construction de ces écoles.

Je ne propose aucun amendement visant à engager des dépenses supplémentaires, mais c'est une idée de bon sens que je vous soumets ; on ne peut pas se contenter de construire des logements : il faut aussi prévoir les infrastructures nécessaires à la vie des habitants.

Quatrièmement, ce ne sont pas uniquement des « logements sociaux » qu’il faut construire. D’ailleurs, je n'aime pas cette appellation Qu'est-ce qu'un logement social ? C’est un logement dont le loyer est plus ou moins modéré, voire intermédiaire. Or toute une partie de la population, en particulier les jeunes cadres, ne trouve pas à se loger : d’une part, parce qu’ils n’ont pas accès aux logements sociaux, aux HLM, d’autre part, parce que les constructions de logements intermédiaires sont insuffisamment nombreuses.

Je souhaiterais donc que, dans les programmes de logements voulus par le Gouvernement, la réalisation de logements intermédiaires ne soit pas négligée, car elle est également importante.

Cinquièmement, pour l’application de la règle des 25 % de logements sociaux prévue par le présent projet de loi, mon collègue François Calvet et moi-même avons déposé un amendement visant à ce que ce seuil soit considéré à l’échelle non pas des communes, mais de la communauté d’agglomération. Je prendrai l’exemple de ma communauté : celle-ci comprend une commune comptant entre 35 % et 40 % de logements sociaux, alors que d'autres, petites communes qui ne disposent même pas des terrains nécessaires, n'en comptent que 18 %.

Madame la ministre, pour conclure, j’ajouterai que votre décision de bloquer les loyers ne sera pas du tout favorable à la construction de logements.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, sur l'article.

M. Jean-Marc Todeschini. J’approuve tout à fait cet engagement du programme présidentiel, mais je voudrais revenir sur une particularité du secteur où je suis élu – mais le Nord-Pas-de-Calais est sans doute également concerné –, à savoir les communes du bassin sidérurgique et minier lorrain, qui risquent d’être confrontées à une profonde injustice. Madame la ministre, je sais que vous avez été interpellée par certains élus de Moselle sur ce dossier.

Pour l’illustrer, je citerai le cas de la commune de Moyeuvre-Grande, mais il en est bien d’autres.

Depuis vingt ans, l’ensemble du patrimoine immobilier de l’entreprise sidérurgique, qui constitue l’essentiel de l’habitat, a été revendu à ses locataires, des travailleurs aux revenus modestes qui sont ainsi passés du statut de locataire à celui de propriétaire. De facto, ces logements comptabilisés comme sociaux – il s’agit des anciennes cités ouvrières – par les services fiscaux ont perdu ce statut, alors que leurs propriétaires continuent de faire partie des catégories sociales à faibles revenus. Résultat : la ville de Moyeuvre-Grande compte 82 % de propriétaires occupants et seulement 18 % de locataires. Elle subit déjà l’application de la loi SRU puisque l’État y comptabilise 254 logements sociaux manquants, ce qui a pour conséquence une taxation annuelle particulièrement injuste en la circonstance.

Cela fait plusieurs années que le maire, comme ses collègues des autres communes, s’emploie à réduire ce prétendu déficit de logements sociaux. Cependant, la Moselle ne possède qu’un contingent limité d’aides aux logements sociaux à distribuer.

Comment, dans ces conditions, réussir à se mettre en règle vis-à-vis de la loi, d’autant que le nouveau texte va aggraver cette situation ?

Je l’ai dit en préambule, j’approuve cette modification, mais je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous disiez si des consignes particulières seront données aux préfets pour que le décompte, dans ces cités ouvrières des bassins sidérurgiques et miniers, intègre les logements vendus et que l’obligation de passer de 20 % à 25 % de logements sociaux ne concerne pas ces communes. (M. Didier Guillaume applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, sur l'article.

M. Philippe Dallier. Ayant longuement exposé mon point de vue lors de la discussion générale, je voudrais à présent évoquer le contenu de loi de 2000.

Ses dispositions, quelle que soit par ailleurs la situation des communes visées, pèsent plus ou moins lourdement selon que la proportion de logements sociaux est au départ de 5 %, de 7 % ou de 15 %. Pour arriver au seuil de 20 %, ce n’est pas tout à fait pareil… Et le présent projet de loi va encore aggraver la situation : ce sera d’autant plus difficile pour ceux qui partent de très loin.

Un amendement pour établir ce distinguo aurait eu du sens, mais, n’imaginant pas un instant qu’il pût être adopté, je ne l’ai pas déposé.

Le seul distinguo qui figurait dans le texte de 2000 – il avait le mérite d’exister, mais, à mon avis, il n’était pas pertinent –, consistait à faire un sort particulier aux villes éligibles à la DSU. Il avait été prévu que celles d’entre elles qui n’auraient pas atteint le seuil de 20 % de logements sociaux – cela existe puisque ma commune est dans ce cas – seraient exonérées du prélèvement, et non de la pénalité sur constat de carence, à partir du moment où elles auraient dépassé le seuil de 15 %.

Je pensais que cette mesure avait été introduite dans la loi par voie d’amendement, mais, après vérification, il semble que ce soit le Gouvernement qui l’ait insérée dans le projet de loi initial. Je vous le rappelle, mes chers collègues, pour tenter de vous convaincre que l’idée d’établir un distinguo en fonction de la situation sociale des communes a du sens.

Le critère retenu à l’époque était l’éligibilité à la DSU. Était-ce une bonne idée ? Je réponds par la négative, bien que ma commune en bénéficie, et je vais m’en expliquer, même si nous avons déjà eu maintes fois ce débat ici.

D’après la loi, deux tiers des communes en agglomération sont éligibles à la DSU. Certaines villes qui n’étaient pas socialement en difficulté percevaient la DSU pour des montants par forcément importants, mais qui leur permettaient d’échapper à ce prélèvement.

Je redis ici que le seul vrai critère de la mixité sociale, c’est le revenu moyen par habitant. Nous en avons discuté lorsque nous avons évoqué la péréquation financière. La DSU était un mauvais critère, mais il a été accepté par le gouvernement de l’époque. C’est bien la preuve que cette question devrait être réexaminée attentivement.

Aujourd’hui, madame la ministre, vous souhaitez faire passer le seuil de 20 % à 25 %. C’est très rude ! Mon objectif était de construire 860 logements sociaux en vingt ans ; j’en ai réalisé 430 en douze ans : j’étais presque dans le cadre de l’objectif. Et puis voilà que, avec ce projet de loi, nous allons devoir construire 1 200 logements supplémentaires, non pas en vingt ans, mais d’ici à 2025, c’est-à-dire en douze ans ! Rendez-vous compte de ce que cela veut dire, avec les pénalités que vous vous apprêtez à voter !

S’agissant de l’augmentation du seuil de 20 % à 25 %, j’estime qu’il nous faut établir un distinguo ; mais celui-ci ne peut pas s’appuyer sur un critère comme la DSU. D’ailleurs, vous m’avez souvent entendu plaider ici pour une vraie réforme de la DSU. Madame la ministre, à vous qui êtes en charge de l’égalité des territoires, je rappellerai que les tentatives de Fadela Amara ont échoué parce que, pour des raisons de communication, elles ont été « torpillées » par certains, mais il faut effectivement concentrer la DSU sur les villes qui en ont le plus besoin, d’autant que, en l’état actuel, cela ne peut pas être le critère du distinguo à établir.

Je vous présenterai des amendements qui vous permettraient de garder votre objectif de 25 %. Mais de deux choses l’une : soit vous donnez aux communes, notamment à celles qui ont le plus long chemin à parcourir, plus de temps pour y parvenir, soit vous examinez la situation réelle des habitants de ces communes et, lorsque la richesse par habitant est manifestement très inférieure à la moyenne régionale de la strate, il faut établir un distinguo.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, sur l'article.

Mme Valérie Létard. Au moment d’aborder le titre II, qui constitue le deuxième temps fort de notre discussion, je tiens à intervenir pour deux raisons.

Tout d’abord, je souhaite rappeler une nouvelle fois mon attachement à l’article 55 de la loi SRU et redire que mes propositions, reprises par l’ensemble du groupe de l’UCR, s’appuient sur une réalité au sein des territoires que la majorité d’entre nous, sur l’ensemble de ces travées, connaissent bien et partagent. Ces propositions se veulent constructives, fondées sur la réalité du terrain et ont pour fil conducteur le maintien d’une cohérence entre l’action de l’État, celle des bailleurs sociaux et celle des collectivités locales.

Je le répète, les communes et intercommunalités sont les acteurs incontournables de la mise en œuvre des programmes de logement social. On ne peut pas bâtir des dispositifs pérennes sans chercher à les articuler avec leur stratégie en termes d’urbanisme, de développement économique et de peuplement. Tous mes amendements vont dans ce sens et je regrette la fin de non-recevoir qui leur a été opposée ce matin en commission.

Le logement est un sujet difficile et complexe : il exige une construction partagée, où l’État doit se comporter en partenaire. J’ose espérer que la suite de nos débats nous permettra des échanges plus ouverts. Faisons en sorte que la coproduction que nous réalisons déjà, par exemple, sur les PLH ou d’autres outils élaborés à l’échelle des territoires puisse se retrouver dans la gestion de ce patrimoine foncier et de la répartition des nouveaux quotas de logements sociaux qu’il faudra mettre en œuvre sur nos territoires.

J’indique également que je présenterai, ainsi que des collègues de gauche comme de droite, après l’article 4, un amendement auquel je suis particulièrement attachée et qui concerne l’avenir du logement minier dans la région Nord-Pas-de-Calais.

Il s’agit de donner au premier bailleur de notre région, la SOGINORPA, Société de gestion du patrimoine immobilier des houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais, qui possède plus de 62 500 logements, anciens logements des cités minières, parfois très dégradés, le statut de société anonyme d’HLM pour pouvoir accompagner cet énorme effort à mettre en œuvre dans le cadre de la production de logements sociaux et de mise à niveau de logements affectés aux plus fragiles d’entre nous.

Cet amendement, que j’avais déjà soumis à notre assemblée au mois de juillet dernier, doit permettre à la SOGINORPA de prétendre à des financements pour réhabiliter et développer son parc de logements ; nous sommes tous convaincus ici de la nécessité d’une telle mesure, car il y a vraiment urgence. Ces dispositions constituent également un moyen de préserver la qualité de ce patrimoine historique, désormais classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Avant que nous n’entamions la discussion plus technique sur l’article 55 de la loi SRU, je voulais attirer votre attention, madame la ministre, sur l’importance qu’il y a à corriger cette anomalie dans la mesure où les logements locatifs miniers sont déjà pris en compte dans le décompte de la loi SRU alors que leur bailleur n’est pas reconnu comme un bailleur social. Je ne doute pas que, grâce à la bonne volonté de l’ensemble de notre assemblée, ce hiatus ne soit rapidement supprimé.

M. le président. Je suis saisi de dix-sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Procaccia, Deroche, Mélot et Jouanno et M. Cambon, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 6

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les dispositions de la présente section s’appliquent à toutes les communes de France. »

La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Certains de mes collègues qui viennent de s’exprimer se sont déclarés attachés à la loi SRU. Ce n’est pas mon cas parce que 60 % des personnes qui vivent dans mon département et pourraient prétendre à un logement social n’obtiennent pas satisfaction en raison du nombre trop faible de terrains et de logements. Il me semble que, dans des départements ou des communes aussi denses que les nôtres, « bétonner » davantage n’est pas judicieux.

Mes collègues ont réclamé une analyse plus fine qui tienne compte du territoire, par exemple s’agissant des communes minières. Si la loi qui sera issue des travaux du Sénat et de l’Assemblée nationale prend en considération un certain nombre de particularités qui ont été signalées ici ou là, je pourrai revenir sur ma position.

Les communes que je représente sont parmi les plus denses de France : hormis trois ou quatre petits jardins publics où s’ébattent les enfants, il n’y a absolument aucun terrain vierge de constructions. Nous préemptons le moindre petit pavillon pour construire un petit immeuble, mais nous ne pouvons pas faire plus. Nous n’obtiendrons jamais 20 % de logements sociaux, encore moins 25 %. Pourquoi ne pas tenir compte de cette réalité ? D’ailleurs, le préfet l’a fait puisque nous n’avons pas dû payer le maximum des pénalités.

Madame la ministre, venez donc à Vincennes ; vous y serez la bienvenue et vous pourrez ainsi vous faire une idée exacte de la situation.

Mon amendement est un peu provocateur, mais, puisque vous dites que le logement est une priorité, pourquoi le serait-il uniquement dans quelques communes ? Finalement, 1 000 communes seulement sur 36 000 sont concernées. Or les besoins de logements sociaux existent partout, même dans une commune de 500 ou 1 000 habitants. Si le logement est une vraie priorité, appliquons donc partout en France la règle que vous voulez mettre en place !

Je vous propose par conséquent d’étendre la loi SRU à l’ensemble des communes de France. (Exclamations.)

Mes chers collègues, je comprends pourquoi vous dites non : vous êtes à l’aise pour approuver une disposition qui ne vous concerne pas ! C’est facile de jeter l’opprobre sur 1 000 communes de France quand vous faites partie des 35 000 autres qui ne sont pas concernées. (MM. Alain Milon et Joël Guerriau applaudissent.)

M. le président. L'amendement n° 72 rectifié, présenté par M. Guerriau et les membres du groupe de l'Union Centriste et Républicaine, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Les mots : « , et dans lesquelles » sont remplacés par les mots : « sur le territoire duquel » ;

La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. L'objet de cet amendement est de comptabiliser le seuil de 25 % de logements sociaux à l'échelle de l'agglomération ou de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

En effet, dans un certain nombre de territoires, les objectifs fixés par ce projet de loi seront totalement inapplicables commune par commune. Ce sera le cas, par exemple, pour de toutes petites communes fortement urbanisées. Ces communes souffrent d’un déficit cruel de foncier et de l’emballement consécutif du marché de l’immobilier, ce qui rend très difficile l’équilibrage financier de leurs opérations, et elles ne bénéficieront absolument pas du dispositif de mobilisation du foncier mis en place par le titre Ier de ce texte. En effet, ce sont principalement les grandes agglomérations qui se verront céder des terrains de l’État ou de ses établissements publics, des agglomérations qui pourraient ne pas être celles qui en ont en réalité le plus besoin.

Comptabiliser l’objectif des 25 % de logements sociaux à l’échelle de l’EPCI est le seul moyen de faire bénéficier de la mobilisation du foncier des communes dans l’incapacité de répondre aux exigences de la loi.

C’est aussi le seul moyen d’atteindre l’objectif ambitieux fixé par l’État tout en assouplissant les moyens de le remplir pour tenir compte des réalités locales.

M. le président. Les amendements nos 60 rectifié et 97 sont identiques.

L'amendement n° 60 rectifié est présenté par M. Dubois et les membres du groupe de l'Union Centriste et Républicaine.

L'amendement n° 97 est présenté par M. Reichardt.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Daniel Dubois, pour défendre l’amendement n° 60 rectifié.

M. Daniel Dubois. Le présent amendement s’inscrit dans une démarche globale incluant notamment les amendements relatifs à l’accession sociale à la propriété.

À titre personnel, je suis attaché à la loi SRU, et notamment à l’objectif de 20 %. Du reste, en tant que président d’une communauté de communes, je verse 10 000 euros de subvention par logement locatif qui se construit sur le territoire de mon EPCI, sans la moindre obligation de quota. Voilà qui est clair !

Cela étant, le projet de loi tend à modifier la règle existante en relevant le quota obligatoire de logements sociaux de 20 % à 25 %.

Il convient d’observer que, dans le système de décote, l’accession à la propriété a bien été prise en compte. Ainsi, l’objectif de mixité sociale est clairement reprécisé et fait l’objet d’une véritable volonté politique. Mais, lorsqu’il est question du seuil de 25 %, l’accession sociale à la propriété n’est plus prise en compte !

Ce sujet a tout à l'heure suscité des discussions, notamment pour ce qui concerne la vente de logements du parc HLM à leurs occupants. En effet, les organismes HLM peuvent proposer à un locataire qui, au total, perçoit des revenus moyens et dont le logement entre dans le quota de 20 %, de devenir propriétaire de son logement. Cette possibilité est offerte par la loi, et les organismes HLM ont même été expressément invités à y recourir. On leur a dit : « Si vous souhaitez dégager des fonds propres pour ouvrir de nouveaux chantiers, vendez donc certains de vos logements à leurs locataires ! »

Ainsi, certains logements sont acquis par leurs locataires, ce qui permet à l’organisme HLM de reconstituer des fonds propres et de lancer d’autres programmes HLM. Pourquoi donc ces logements ne sont-ils pas pris en compte dans le quota de 25 % ? Je ne comprends pas ! L’accès à la propriété constitue un acte majeur du parcours résidentiel, un acte qui s’inscrit du reste dans une logique mise en œuvre par la loi elle-même !

Permettez-moi d’insister sur cet enjeu du parcours résidentiel : il faut favoriser l’accession à la propriété. Il existe une véritable demande en la matière. Or on sait très bien que, dans la plupart des départements français, 70 % à 80 % des habitants ont droit à un logement social. Parmi ces personnes, certaines éprouvent le désir d’habiter un logement dont elles seront demain les propriétaires. Je ne vois pas pourquoi, alors qu’on s’apprête à relever le seuil à 25 %, on n’intègre pas cette approche.

J’en suis tout à fait conscient, une telle mesure peut induire des risques pour celles et ceux qui achèteront un logement. Mais il est possible d’élaborer un système propre à les protéger.

Quoi qu’il en soit, la prise en compte de l’accession à la propriété s’inscrit pleinement dans la volonté de construire 500 000 logements qu’a exprimée le Gouvernement. Il n’atteindra pas cet objectif s’il ne fait pas en sorte que l’accession à la propriété redémarre, et en particulier l’accession sociale.

On peut invoquer aussi l’argument de la mixité sociale.

La plupart des villes ont la volonté d’assurer une véritable mixité urbaine. Il est évident que les plus grands terrains vendus ne seront pas uniquement consacrés au logement locatif social : de fait, la plupart des maires sont conscients qu’ils auront tout intérêt à assurer également de la mixité sur ces terrains, notamment via l’accession sociale à la propriété.

Mes chers collègues, cet amendement qui a pour objet de maintenir le quota obligatoire de logements sociaux à 20 % doit être bien compris : il n’est nullement le signe d’un quelconque dogmatisme de notre part. Il traduit simplement notre volonté de faire en sorte que le parcours résidentiel et la mixité sociale soient pris en compte, ainsi que je l’ai dit lors de la discussion générale.

À cet égard, je ne comprends pas que les pénalités soient, à quelques exceptions près, gérées de manière centralisée, au niveau national. C’est tout de même un peu fort quand on sait que ce sont les collectivités locales qui assurent aujourd’hui la plus grande part du financement dans le domaine du logement locatif social.