M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ferai tout d’abord remarquer qu’il ne s’agit pas d’argent pour le Gouvernement ! Arrêtez de nous dire que nous cherchons de l’argent ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Ce qui est en jeu aujourd'hui, mes chers collègues, c’est l’équilibre de la protection sociale ! Ce qui est en jeu aujourd'hui, c’est le comblement du déficit que vous nous avez laissé ! (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Exactement !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce qui est en jeu aujourd'hui, c’est, d’une certaine façon, l’attractivité du métier d’artisan.

M. Philippe Bas. Vous plaisantez !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Car cet article 11 a bien pour objet de retrouver l’équilibre entre les recettes et les dépenses du RSI. (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)

J’ajouterai trois éléments.

Premièrement, la cotisation maladie, dans le cadre du RSI, est actuellement plafonnée à la part des revenus qui se situe en dessous de 181 860 euros, ce qui constitue un cas unique. Je rappelle que, dans le régime général, le plafonnement des cotisations maladie a été totalement supprimé en 1984. Il s’agit donc bien de la correction d’une anomalie.

Deuxièmement, en raison du caractère dégressif et des possibilités offertes pour réduire l’assiette des cotisations, notamment au titre des frais professionnels, les travailleurs indépendants sont aujourd'hui au cœur d’enjeux d’équité. L’article 11 est ainsi porteur de justice pour les travailleurs indépendants eux-mêmes. (Protestations sur les mêmes travées.)

M. Alain Gournac. Non ! Pas du tout !

M. Philippe Bas. La justice par la récession !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il se peut que cela vous déplaise, mais c’est la réalité d’aujourd'hui ! (Nouvelles protestations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. André Reichardt. C’est votre réalité !

M. Alain Gournac. C’est la réalité socialiste ! Ils vont vous remercier, les artisans !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Troisièmement, afin de limiter les actuels effets de seuil pour les travailleurs les plus modestes redevables de la cotisation minimale maladie-maternité, est instauré un abattement sur cette cotisation. Il prend la forme d’une exonération linéaire et dégressive, qui s’annule lorsque les revenus atteignent le niveau de l’assiette minimale de cotisations. L’abattement atteint au maximum 307 euros, soit près du tiers de la cotisation minimale, pour les travailleurs indépendants ne percevant aucun revenu.

Il s’agit donc bien d’un dispositif qui protège les travailleurs qui ont les plus faibles revenus.

Toutes ces raisons doivent conduire à ne pas adopter vos amendements.

M. Ronan Kerdraon. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

M. Dominique Watrin. Le groupe CRC votera contre ces amendements et pour l’article 11.

En effet, cet article tend à élargir l’assiette des cotisations du RSI et donc à en renforcer le financement. L’équilibre de ce régime est particulièrement précaire et dépend principalement de l’affectation d’une ressource d’origine fiscale, la C3S.

Les cotisations sociales acquittées par les non-salariés non agricoles sont, par ailleurs, inférieures aux cotisations sociales dues par les salariés affiliés au régime général.

Dès lors, si l’on veut éviter que, dans l’avenir, le RSI ne connaisse une situation de déficit, aggravant d’autant la dette sociale supportée par l’ensemble de nos concitoyens, il n’y a pas d’autre solution que le rehaussement des cotisations sociales. Cette mesure rapprochera le taux de cotisation applicable aux indépendants de celui des affiliés du régime général. Ce sera d’autant plus logique que, depuis des années, les prestations offertes par ce régime tendent, à quelques exceptions près, à s’aligner sur celles qu’offre le régime général.

Toutefois, je voudrais profiter de ce débat, monsieur le ministre, pour vous interroger sur le sort que le Gouvernement entend réserver, à l’avenir, au statut d’auto-entrepreneur.

Créé par la loi de modernisation de l’économie d’août 2008, ce statut permet à celles et ceux qui en relèvent de bénéficier de taux de cotisations largement inférieurs à ceux qui sont appliqués aux autres affiliés du RSI. Ne croyez-vous pas que, toujours dans un souci d’équité et de financement pérenne du régime social des indépendants, il serait légitime de revenir sur cette disposition ?

En outre, les organisations syndicales que nous avons rencontrées nous ont fait part d’usages abusifs de la loi à travers une pratique qui se généralise : des entreprises font le choix de licencier des salariés, ou de s’en séparer par le biais de ruptures conventionnelles, et recourent ensuite aux services de ces anciens salariés devenus entre-temps auto-entrepreneurs.

Cette opération est, bien entendu, très profitable pour les employeurs, qui réduisent ainsi leur masse salariale et, parfois aussi, évitent de cette manière d’atteindre des seuils générateurs d’obligations sociales. Quoi qu'il en soit, cela leur permet de ne pas remplir toutes leurs obligations en matière de financement de notre système de protection sociale.

Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre, qu’il soit nécessaire de revenir en profondeur sur ce régime, afin de mieux l’encadrer, dans l’intérêt de toutes et tous, y compris des auto-entrepreneurs ?

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. On est ici au cœur du problème, qui est d’essayer d’équilibrer les dépenses et les recettes.

Monsieur le ministre, la Cour des comptes vous avait demandé de vous en tenir à taux de progression de l’ONDAM de 2,5 %, taux qui a été respecté en 2010 et en 2011 ; peut-être le sera-t-il aussi en 2012. Or vous l’avez fixé à 2,7 %, ce qui signifie que vous augmentez encore les dépenses, au lieu de les diminuer.

Certes, cela fait plaisir aux hôpitaux, plaisir aux professionnels, mais, en attendant, il vous faut trouver des recettes supplémentaires.

La Cour des comptes avait également indiqué que, pour parvenir à un certain équilibre, il fallait faire en sorte que les recettes supplémentaires que vous prévoiriez soient sensiblement égales aux dépenses que l’on ferait en moins. Or, à lire ce PLFSS, il apparaît que vos recettes supplémentaires sont nettement supérieures aux dépenses évitées.

Je le répète, prendre 1,3 milliard d’euros sur les caisses des artisans et commerçants et des professions libérales revient à mettre ces professions en danger.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 131 et 224 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 22 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 345
Majorité absolue des suffrages exprimés 173
Pour l’adoption 170
Contre 175

Le Sénat n'a pas adopté.

Article 11 (début)
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Discussion générale

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Souhaits de bienvenue à M. Amado Boudou, vice-président de la République et président du Sénat d'Argentine

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il m’est particulièrement agréable de saluer en votre nom la présence dans notre tribune d’honneur de M. Amado Boudou, vice-président de la République et président du Sénat d’Argentine. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent. – M. le ministre se lève également.)

Sa présence parmi nous, après un entretien avec le président Bel, témoigne de la vitalité des relations entre nos deux assemblées.

Le 16 octobre dernier, une délégation du groupe d’amitié France-Pays du Cône Sud conduite par M. Jean-Marc Pastor et par M. Jean-Michel Baylet, président délégué pour l’Argentine, était reçue à Buenos Aires par le groupe d’amitié Argentine-France.

Lors de cette rencontre, il a été convenu de favoriser les échanges entre les chaînes parlementaires de nos deux Sénats.

Concrétisant cette initiative, le président Amado Boudou et le président Gilles Leclerc, au nom de Public Sénat, ont signé, il y a quelques instants, une convention à cette fin.

Nous formons le vœu que cette visite soit des plus fructueuses, qu’elle renforce l’amitié entre nos deux assemblées et, à travers elles, entre le peuple argentin et le peuple français. (Applaudissements.)

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Article 11 (interruption de la discussion)
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Troisième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2013

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
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Article 11

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Troisième partie
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Articles additionnels après l’article 11

Article 11 (suite)

M. le président. Dans la suite de l’examen de l’article 11, je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 113 rectifié, présenté par MM. Adnot, Bernard-Reymond, Darniche, Husson et Türk, est ainsi libellé :

1° Alinéas 3 à 5

Supprimer ces alinéas.

2° Alinéas 32 à 34

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Je veux d’abord dire au Gouvernement que j’apprécie la volonté qu’il manifeste d’équilibrer les comptes de l’État et de la sécurité sociale. Je pense que nous devons lui en être reconnaissants.

Toutefois, la méthode employée me pose problème, et j’observe que certaines mesures sont contradictoires. En témoignent les alinéas 32 à 34 de l’article 11, qui sont à l’opposé des souhaits exprimés par le Gouvernement lui-même dans la mesure où les dispositions en cause pénalisent les travailleurs indépendants, qui sont tous assujettis à l’IRPP et subissent aussi, de ce fait, une augmentation de la pression fiscale. C’est ce qui nous conduit à proposer la suppression de ces alinéas.

M. le président. L'amendement n° 132, présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Alain Milon.

M. Alain Milon. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également l’amendement n° 182.

Comme vous le savez, mes chers collègues, l’auto-entrepreneur bénéficie de démarches simplifiées pour créer son entreprise, d’avantages fiscaux et d’un régime tel que ses charges et impôts sont calculés uniquement sur le chiffre d’affaires constaté et non selon une base forfaitaire, à la différence des autres formes juridiques d’entreprise.

Ce régime permet de développer des projets sans prendre trop de risques : si l’auto-entreprise prend de l’essor, elle peut dépasser le plafond de chiffre d’affaires et s’intégrer alors plus facilement dans le régime de droit commun.

L’auto-entreprise doit être considérée non pas comme une concurrente de l’entreprise soumise au régime de droit commun, mais comme un tremplin vers elle. Elle est parfois le seul moyen pour certains de nos concitoyens qui ont perdu leur emploi d’en retrouver un grâce à leur savoir-faire.

Ainsi, ce statut peut constituer une solution pour certains chômeurs qui, au-delà de la cinquantaine, n’ont que peu de chances – surtout dans la période actuelle ! – de retrouver un emploi. Ce système leur procure un supplément de revenu ; ils y trouvent aussi le moyen de se sentir de nouveau utiles à la société.

En outre, le statut d’auto-entrepreneur permet à de nombreuses personnes, par exemple aux retraités ou aux étudiants, de bénéficier d’un revenu complémentaire en toute légalité. Ce dispositif permet en outre de lutter contre le travail au noir.

Or l’alinéa 5 de l’article 11 prévoit la suppression des avantages octroyés à l’auto-entrepreneur, ce qui ne peut qu’aboutir, dans la foulée, à la suppression de l’auto-entrepreneur.

Voilà pour l’amendement n° 132. J’en viens à l’amendement n° 182.

Dès lors que le présent PLFSS tend à supprimer l’abattement de 10 % pour frais professionnels applicable aux gérants majoritaires, il va créer une distorsion de traitement en fonction du statut juridique des chefs d’entreprise, et ce en défaveur des plus petites entreprises.

De plus, l’argument selon lequel les gérants majoritaires « déduisent déjà leurs frais professionnels du résultat de leur entreprise », ce qui « revient à déduire les frais deux fois », est incorrect puisque les bénéficiaires de l’abattement de 10 % ne sont pas admis à se faire rembourser ni, donc, à déduire des résultats de leur société les frais professionnels déjà couverts par cet abattement.

Il convient de rappeler ici que les frais professionnels, qu’ils soient appréciés « au réel » ou de façon forfaitaire, sont les frais supportés à titre personnel par le contribuable, inhérents à son emploi, indispensables à son activité professionnelle. Ils concernent notamment les dépenses de trajet entre le domicile et le lieu de travail, y compris les frais de parking et de péage, les intérêts d’emprunt du véhicule, les frais de nourriture dans le cas où la personne ne peut pas rentrer déjeuner à son domicile, les frais de double résidence, les frais de vêtements, c'est-à-dire toutes dépenses engagées non pas pour le compte de la société, mais, à titre personnel, pour pouvoir travailler.

À défaut d’obtenir la suppression de l’alinéa 5, nous demandons a minima de laisser aux gérants majoritaires de SARL la possibilité de déduire les frais de trajet engagés entre le domicile et le lieu de travail, ainsi que le coût des repas sur place.

M. le président. Les amendements nos 182 et 313 sont identiques.

L'amendement n° 182 est présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia et MM. de Raincourt et Savary.

L'amendement n° 313 est présenté par M. Barbier.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots : 

à l’exception des frais de trajet engagés pour se rendre sur leur lieu de travail ainsi que le coût des repas sur place

L’amendement n° 182 a été défendu.

La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 313.

M. Gilbert Barbier. Comme l’a indiqué notre collègue Alain Milon, l’article 11 tend à supprimer l’abattement de 10 % pour frais professionnels applicable aux gérants majoritaires. Or il s’agit souvent de très petites entreprises.

Je propose donc, moi aussi, d’exclure les frais de carburant engagés du domicile au lieu de travail, ainsi que les frais de repas pris sur place.

Il s’agit, selon moi, d’une mesure d’équité puisque, contrairement à ce qui a été indiqué, les bénéficiaires de l’abattement de 10 % ne sont pas admis à se faire rembourser ni à déduire des résultats de leur société les frais professionnels déjà couverts par cet abattement. Ils ne bénéficient donc pas d’un double abattement.

M. le président. L'amendement n° 272 rectifié, présenté par Mme Primas et M. G. Larcher, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

II. - En conséquence, alinéa 34

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Je ne reviens pas sur l’argumentation développée par mes précédents collègues, qui montre que les alinéas visés créent une injustice pour les gérants majoritaires.

J’ajouterai simplement que l’abattement de 10 % concerne également les retraités, ce qui ne manquera pas, là encore, de créer une injustice flagrante.

M. le président. L'amendement n° 322 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Pour les dirigeants de société relevant d’un régime non salarié non agricole, dès lors que le revenu d’activité est inférieur au plafond annuel de la sécurité sociale, les dividendes perçus par le dirigeant sont assujettis à cotisations sociales obligatoires pour la différence comprise entre le plafond annuel et le montant de la rémunération. Cette fraction est considérée comme un revenu d’activité non salarié pour le calcul des cotisations sociales, de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, pour l’imposition dans la catégorie des traitements et salaires et pour l’application du II de l’article 154 bis du code général des impôts. Elle est prise en compte dans le calcul des droits à la retraite et dans le calcul des prestations de prévoyance. Elle n’est pas considérée comme une rémunération pouvant venir en déduction du résultat soumis à l’impôt sur les sociétés. »

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. La loi de financement de la sécurité sociale de 2009 avait introduit pour les seules sociétés d’exercice libéral un dispositif d’assujettissement aux cotisations sociales des dividendes versés excédant 10 % des capitaux propres de l’entreprise.

Le PLFSS pour 2013 prévoit d’élargir ce dispositif à l’ensemble des travailleurs indépendants exerçant leur activité dans le cadre des sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés. Cette mesure aurait de graves conséquences, car elle contribuerait à fragiliser et à déstabiliser le régime des travailleurs non salariés. En effet, de nombreux dirigeants pourraient être tentés d’opter pour le statut de salarié, ce qui réduirait de fait la masse des cotisations encaissées par ce régime.

Certes, cette disposition vise à combattre certains abus, mais elle ne doit pas aboutir à ce que les dividendes perçus par les chefs d’entreprise qui acquittent normalement leurs cotisations sociales soient lourdement taxés.

Aussi, cet amendement tend à établir un traitement équitable pour les dirigeants de société relevant d’un régime non salarié en assujettissant les dividendes perçus à cotisations sociales obligatoires dès lors que le revenu d’activité est inférieur au montant annuel du plafond de la sécurité sociale pour la différence comprise entre le plafond annuel et le montant de la rémunération.

M. le président. L'amendement n° 271 rectifié, présenté par Mme Primas et M. G. Larcher, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 32

Supprimer les mots :

, sous réserve des dispositions suivantes :

II. – En conséquence, alinéas 33 et 34

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Cet amendement vise à supprimer des mesures fiscales et sociales extrêmement défavorables aux travailleurs indépendants.

À l’accroissement de l’impôt sur le revenu prévu par le projet de loi de finances pour 2013, qui touchera l’ensemble des entreprises individuelles, viennent s’ajouter, pour les travailleurs indépendants, plusieurs dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Il s’agit du déplafonnement des cotisations maladie, de la suppression de l’abattement de 10 % pour frais professionnels applicable aux gérants majoritaires et du paiement de cotisations sociales sur les dividendes versés. Au total, ces mesures représentent un alourdissement de 1,1 milliard d’euros des prélèvements à la charge des entreprises individuelles.

Dans le contexte économique incertain que nous connaissons, les conséquences de ces mesures seraient sévères pour les 2,6 millions de travailleurs indépendants, artisans, commerçants, entrepreneurs et professions libérales, sur lesquels repose le dynamisme de nos territoires. Et ce sont les plus modestes de ces entreprises qui auront le plus à en souffrir, alors qu’il conviendrait de les soutenir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 113 rectifié, présenté par M. Adnot, vise à supprimer certains alinéas de l’article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en particulier ceux qui touchent à la suppression de la déduction des frais professionnels pour les gérants majoritaires.

L’adoption de cet amendement conduirait à une dégradation de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale de plusieurs centaines de millions d’euros. Or, je l’ai dit, les dispositions dérogatoires dont bénéficie le régime social des indépendants ne sont justifiées ni du point de vue de l’équité ni du point de vue de la situation financière de ce régime.

Par conséquent, la commission des affaires sociales est défavorable à cet amendement.

L’amendement n° 132, présenté par les membres du groupe UMP, tend à supprimer l’alignement des cotisations des auto-entrepreneurs sur celles des travailleurs indépendants. Cet amendement n’est pas davantage justifié que le précédent et son adoption conduirait à une dégradation de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale de 130 millions d’euros.

En outre, il faut tenir compte du sentiment des artisans, qui dénoncent les distorsions de concurrence que le régime de l’auto-entrepreneur introduit sur le plan des cotisations sociales.

Du reste, les mesures proposées par le Gouvernement n’ont pas pour effet de faire perdre à ce régime toute son attractivité puisqu’il n’est pas prévu de modifier la règle « zéro chiffre d’affaires, zéro cotisations ».

Mme Muguette Dini. C’est encore heureux !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission des affaires sociales émet donc un avis défavorable.

L’amendement n° 182, présenté par M. Milon, et l’amendement n° 313, présenté par M. Barbier, tendent à maintenir hors de l’assiette des cotisations sociales les frais engagés par les artisans pour se rendre sur leur lieu de travail et pour prendre leur repas sur place.

Outre que cette mesure, si elle était adoptée, serait assez difficile à mettre en œuvre, ces frais sont déjà pris en compte au titre de l’impôt sur le revenu. Néanmoins, avant de se prononcer sur ces amendements, la commission des affaires sociales souhaite connaître la position du Gouvernement.

L’amendement n° 272 rectifié, présenté par Mme Primas, tend à réintroduire l’abattement de 10 % pour frais professionnels applicable aux gérants majoritaires. Son adoption conduirait à une dégradation de 575 millions d’euros du solde des comptes de la sécurité sociale.

Mme Sophie Primas. La suppression de cet abattement est injuste !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En outre, ces frais ouvrent déjà droit à une déduction de 10 % au titre de l’impôt sur le revenu. (Mme Sophie Primas proteste.)

La commission des affaires sociales émet donc un avis défavorable.

L’amendement n° 322 rectifié, présenté par M. Requier, vise à assujettir à cotisations sociales obligatoires les dividendes perçus pas les travailleurs indépendants dont le revenu d’activité est inférieur au plafond de la sécurité sociale.

Cet amendement prévoit que, « pour les dirigeants de société relevant d’un régime non salarié non agricole, dès lors que le revenu d’activité est inférieur au plafond annuel de la sécurité sociale, les dividendes perçus par le dirigeant sont assujettis à cotisations sociales obligatoires pour la différence comprise entre le plafond annuel et le montant de la rémunération ». Dit plus simplement, il s’agit de créer une présomption de revenu d’activité pour les dividendes perçus par un travailleur indépendant dont les revenus d’activité sont inférieurs au plafond de la sécurité sociale.

Après examen attentif du dispositif ainsi proposé, il apparaît que, malgré sa complexité, il ne serait pas impossible à mettre en œuvre. Toutefois, il instaurerait un régime plus sévère que celui qui est prévu par le Gouvernement. Aussi la commission des affaires sociales a-t-elle résolu d’attendre, pour prendre position, de connaître l’avis du Gouvernement.

S’agissant, enfin, de l’amendement n° 271 rectifié, présenté par Mme Primas, qui vise à supprimer les mesures transitoires prévues pour l’entrée en vigueur de l’article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la commission des affaires sociales souhaite également, avant de se déterminer, avoir connaissance de l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le président, permettez qu’avant d’indiquer au Sénat quels sont les avis du Gouvernement sur ces sept amendements, je réponde sur un plan général aux objections que plusieurs intervenants ont formulées.

Je rappelle d’abord que le conseil d’administration du régime social des indépendants a approuvé le projet de réforme que le Gouvernement soumet au Parlement. Loin de moi de prétendre que la légitimité des membres de ce conseil est supérieure à celle des élus ; mais leur légitimité n’est pas nulle non plus ! Ils sont tout de même issus des professions dont nous parlons. Il n’est donc pas anodin qu’ils aient approuvé les réformes qui figurent à l’article 11.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ce sont des gens responsables !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. À ceux qui nous reprochent de ne pas prévoir suffisamment d’économies, je fais observer que, si le taux de progression de l’ONDAM pour 2013 est fixé à 2,7 %, il s’établit à 2,5 % lorsqu’on le calcule par rapport à l’ONDAM voté par la majorité précédente dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012. C’est parce que les pouvoirs publics ont veillé à la maîtrise de la dépense en cours de gestion que le taux s’établit à 2,7 % par rapport aux dépenses exécutées.

Il me semble donc que les critiques de l’opposition mériteraient d’être atténuées. Si l’on compare ce qui est comparable, c’est-à-dire les ONDAM figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et dans le présent PLFSS, il ne semble pas que le gouvernement actuel fasse pis que ses prédécesseurs en matière de maîtrise de la dépense sociale.

C’est par souci de transparence et de loyauté à l’égard du Parlement que nous avons déterminé l’ONDAM pour 2013 par rapport aux dépenses exécutées en 2012, et non par rapport aux dépenses prévues par le précédent gouvernement. Il ne faudrait pas que cette loyauté et cette transparence, en valant au Gouvernement des critiques, donnent l’impression d’être sanctionnées ; car cela découragerait de persévérer dans un sens que je crois heureux.

Une autre critique se fonde sur les prétendus effets négatifs de l’article 11 sur la compétitivité. Cet argument mérite d’être relativisé, sauf à considérer que les commerçants et les artisans de notre pays sont, sinon tous, du moins majoritairement présents sur les marchés extérieurs. J’ignore si, dans le département de la Manche, monsieur Bas, l’ensemble des commerçants et des artisans ont affaire à une concurrence internationale, soit qu’ils décident de s’y mesurer, soit qu’ils la subissent, mais le fait est que, dans beaucoup de départements, ce phénomène ne me paraît pas patent…

Tirer argument de la défense de la compétitivité pour critiquer l’article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale me paraît donc quelque peu abusif.

À moins, bien entendu, que l’on désire privilégier certains cabinets d’avocats, notamment parisiens, dont cet article dégrade objectivement la compétitivité. Si c’est à ceux-là que vous pensiez, monsieur le sénateur, je ne peux qu’être d’accord avec vous ; mais convenez que, parmi les travailleurs indépendants, ceux-là sont tout de même très loin d’être majoritaires : l’arbre ne doit pas cacher la forêt !

Du point de vue de la justice, au nom de quoi ces travailleurs indépendants devraient-ils être exonérés de toute cotisation au-delà d’un revenu annuel de 180 000 euros, alors que les autres actifs, dans toutes les professions, cotisent sur la totalité de leurs revenus ? (Mme la présidente de la commission des affaires sociales acquiesce.)

Je comprends que le souci de notre compétitivité conduise certains parlementaires à défendre ces actifs-là ; mais vous m’accorderez que la justice y trouve mal son compte.

J’en arrive aux amendements eux-mêmes.

Beaucoup ont trait à la suppression de l’abattement de 10 % sur l’assiette sociale pour frais professionnels. En l’état actuel du droit, ces frais professionnels, calculés à hauteur de 10 % de façon forfaitaire, sont déjà déduits, sur le plan fiscal, du résultat de la société dont les gérants majoritaires tirent leurs revenus.

Autrement dit, l’avantage social ici visé se double d’une autre déduction de 10 %, consentie en matière fiscale.

Le Gouvernement propose au Parlement de supprimer la déduction de 10 % sur l’assiette sociale, considérant que c’est assez d’une seule : celle qui s’applique en matière fiscale, et que le Gouvernement, quoiqu’elle semble indue à certains, n’a pas jugé opportun de supprimer pour 2013.

En somme, les frais professionnels ouvrent déjà droit à une déduction ; les déduire une seconde fois au titre de l’assiette sociale nous a paru excessif.

Je précise que, si ces frais professionnels ne sont pas déduits du résultat de la société, le gérant a toujours la possibilité d’opter pour la déduction des frais réels en imputant ceux-ci sur son résultat, avant l’établissement de son assiette taxable.

Je crois donc qu’il n’y a pas d’injustice à prendre cette mesure de suppression. Tous ceux qui ont proposé, d’une manière ou d’une autre, de revenir sur cette disposition devraient s’aviser qu’il est finalement assez normal de n’accepter une déduction qu’une seule fois.

La question de l’alignement des cotisations des auto-entrepreneurs sur celles des artisans et des commerçants régulièrement inscrits au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers a déjà été largement débattue.

Dès lors que ces deux catégories se font concurrence et que, par ailleurs, les auto-entrepreneurs conservent un certain nombre d’avantages que le Gouvernement ne propose pas au Parlement de supprimer dans le PLFSS pour 2013, je considère qu’il est assez loyal que les uns et les autres soient soumis au même régime de cotisations sociales.

Sans doute cette mesure déplaira-t-elle aux auto-entrepreneurs. Mais je ne suis pas certain qu’elle causera une peine infinie aux entrepreneurs régulièrement inscrits, qui ont des obligations déclaratives, paient ces cotisations et n’ont pas toujours bien compris pourquoi certains qui exerçaient les mêmes professions qu’eux bénéficiaient d’un régime de cotisation plus favorable que le leur.

Chacun choisira ceux qu’il entend privilégier. Il nous semble que ne privilégier ni les uns ni les autres, mais privilégier simplement l’équité et la justice devrait suffire à clore ce débat. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)

S’agissant de l’amendement n° 322 rectifié, qui porte sur l’assujettissement des dividendes à cotisations sociales obligatoires, je crains qu’il ne soit exagérément sévère pour les dirigeants de société qui se versent peu de dividendes et très favorable à ceux qui s’en versent beaucoup. C’est du moins ainsi, monsieur Requier, que j’ai compris l’amendement.

Aujourd’hui, certains gérants majoritaires peuvent se rémunérer sous forme de dividendes, soit en une fois soit sous forme d’acomptes sur dividendes. Le Gouvernement estime qu’au-delà d’un montant supérieur à 10 % des fonds propres de la société, les dividendes versés constituent un revenu salarial classique et doivent être traités comme tel.

Au total, quels que soient le chiffre d’affaires et le montant des dividendes, dès lors que ceux-ci dépassent 10 % des fonds propres de la société, ils doivent être, comme des revenus salariaux, soumis aux cotisations salariales : l’équité et l’équilibre des finances publiques y trouveront leur compte.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 271 rectifié, qui tend à retarder l’entrée en vigueur de ces dispositions, le Gouvernement y est naturellement défavorable. Si le Parlement décide de voter ces dispositions, il faut qu’elles puissent prendre effet dès le 1er janvier 2013.

Le Gouvernement est donc défavorable aux sept amendements qui viennent d’être présentés.