M. le président. La parole est à M. Marc Daunis.

M. Marc Daunis. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Hier encore, je participais à une table ronde avec le maire de La Gaude, le premier vice-président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et mon collègue sénateur UMP des Alpes-Maritimes, Louis Nègre. Nous avons envisagé les différentes solutions pour nous mobiliser les uns et les autres.

Il ne m’appartient pas de faire un procès d’intention au président de la métropole, en laissant entendre qu’il pourrait éventuellement chercher à « aspirer » cette entreprise dans la plaine du Var. De même, je ne me permettrai pas d’émettre des doutes sur les engagements de la société IBM. En revanche, nous serons particulièrement attentifs à ce dossier et notre mobilisation sera sans faille.

Par ailleurs, vous avez évoqué « en creux », madame la ministre, ce qui ressemble à une erreur stratégique de positionnement de la part de l’entreprise Texas Instruments, dont les salariés risquent aujourd’hui de faire les frais.

Vous avez également rappelé le rôle de la technopole de Sophia-Antipolis qui a considérablement transformé l’économie azuréenne. Cette technopole est un territoire d’innovation technologique, ce qui m’incite à présenter la proposition suivante : nous devons être capables, ensemble, de nous appuyer sur la richesse humaine de cette technopole, cet extraordinaire potentiel de talents, pour faire en sorte que l’innovation technologique soit complétée par l’innovation sociale et pour accompagner le développement de nouveaux emplois et de nouvelles activités, afin de créer de nouvelles richesses et de donner un avenir aux salariés de Texas Instruments qui risquent d’être licenciés très brutalement.

Je me permets d’ajouter deux informations complémentaires.

Il convient tout d’abord de souligner que certains emplois menacés ont pu bénéficier du crédit d’impôt recherche, ce qui pose une nouvelle fois la question du contrôle des aides publiques.

De même, il serait nécessaire d’engager une réflexion sur une meilleure articulation territoriale des plans de mutation et de reconversion des salariés, afin de mieux prendre en compte la richesse de l’intelligence territoriale et des compétences locales, plutôt que de mener des actions séparées, entreprise par entreprise, plan par plan, en méconnaissant la dynamique territoriale. Je me propose d’ailleurs de saisir M. le ministre du redressement productif de cette question dans les jours qui viennent.

situation alarmante des déserts médicaux dans le département de l’essonne

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, auteur de la question n° 216, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la santé constitue l’une des préoccupations majeures des Françaises et des Français, au même titre que l’emploi et le logement.

Nous avons assisté ces dix dernières années à un délitement de notre système de santé du fait de l’instauration de franchises médicales, de la casse du service public hospitalier, d’un reste à charge de plus en plus important pour les patients, ou encore des dépassements d’honoraires toujours plus nombreux.

Ces politiques ont eu pour conséquence d’aggraver les inégalités de santé, poussant une part croissante de Français à retarder des soins, voire à y renoncer pour des raisons financières. Cette tendance au renoncement aux soins est amplifiée par la difficulté à obtenir un rendez-vous chez un professionnel de la santé, en raison du nombre décroissant de praticiens exerçant une activité libérale et de leur répartition inégale sur le territoire, à l’origine de l’apparition de ce que l’on appelle des « déserts médicaux ». Les zones rurales ne sont pas les seules concernées, et les zones périurbaines ou encore certains quartiers plus populaires apparaissent comme des zones sous-dotées en professionnels.

L’Île-de-France n’est pas épargnée par cette tendance qui est confirmée dans un document intitulé État de santé et inégalités sociales et territoriales : éléments de diagnostic francilien, dans lequel l’agence régionale de santé, l’ARS, présente les forces et faiblesses de l’offre régionale, cette dernière étant caractérisée par de nombreux déséquilibres touchant autant les professionnels eux-mêmes que le territoire régional.

À cela s’ajoutent les difficultés liées au départ en retraite des professionnels de santé qui risque de ne pas être compensé par l’installation de jeunes professionnels, ceux-ci se désintéressant de plus en plus de la médecine générale libérale, pour de multiples raisons. La profession de médecin n’est pas la seule concernée, le même phénomène de tension étant constaté pour les métiers d’infirmier, de sage-femme ou encore de masseur-kinésithérapeute.

Le département de l’Essonne n’échappe pas, lui non plus, au phénomène de baisse démographique des professionnels de santé. Ainsi, parmi les vingt-neuf territoires franciliens qui devraient être reconnus déficitaires par l’ARS d’Île-de-France, quatre sont situés dans l’Essonne : Grigny, La Ferté-Alais, Méréville et Vigneux-sur-Seine. En outre, parmi les vingt et un territoires complémentaires retenus comme fragilisés, deux appartiennent à ce même département : Saint-Chéron et Morsang-sur-Orge.

Face à l’ampleur croissante des inégalités d’accès financières et territoriales aux soins primaires, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé a annoncé le lancement d’un pacte « territoire-santé », ce dont je me félicite.

Concrètement, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il adopter dans le cadre de ce pacte pour que chacune et chacun, sur notre territoire, puisse accéder à une offre de soins de qualité, une offre de soins de proximité et une offre de soins financièrement accessibles, notamment dans l’Essonne dont la population souffre également du manque de professionnels de santé ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l’étranger. Monsieur le sénateur Jean-Vincent Placé, la question des déserts médicaux concerne tous les territoires, et pas seulement certains territoires ruraux isolés, comme vous l’avez noté. Les premières difficultés apparaissent aussi en zone urbaine. Celles-ci vont s’accroître rapidement si nous ne nous mobilisons pas, car un grand nombre de médecins vont partir à la retraite dans les prochaines années.

En moyenne, en France, près de 27 % des médecins généralistes installés ont plus de soixante ans, et à peine plus de 10 % d’entre eux ont moins de quarante ans La relève n’est donc pas assurée. Comme vous le soulignez, le département de l’Essonne, comme beaucoup d’autres départements, est situé sous cette moyenne : 31 % des médecins généralistes qui y sont installés ont plus de soixante ans, et seulement 7,5 % d’entre eux ont moins de quarante ans.

Vous le savez, les causes de ce phénomène sont multiples : notre pays ne connaît pas un manque global de médecins, mais ceux-ci sont mal répartis. Les jeunes médecins cherchent d’autres conditions d’exercice, en équipe, avec d’autres professionnels de santé, et souhaitent atteindre un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.

Une mesure unique n’apportera pas de réponse satisfaisante. J’ajoute que, dans cette perspective, la coercition est une mauvaise solution et qu’elle ne fonctionnera pas. En revanche, c’est grâce à un ensemble de mesures coordonnées destinées à mobiliser l’ensemble des acteurs, professionnels, élus locaux et, bien sûr, services de l’État et de l’assurance maladie, que nous pourrons faire face à ces difficultés.

Ma collègue Marisol Touraine a présenté le pacte « territoire-santé », le 13 décembre dernier, dans la Vienne. Ce pacte comporte douze mesures fondées sur la mobilisation et l’incitation des professionnels de santé, pour répondre au problème des déserts médicaux.

La formation initiale doit être davantage ouverte pour inciter au choix de la médecine générale. La découverte au plus tôt de ce métier, notamment en parvenant à ce que 100 % des étudiants aient suivi un stage en médecine générale, permettra d’attirer plus d’internes vers cette spécialité majeure pour notre système de soins.

Le moment de l’installation est également stratégique. Il ne s’agit plus de multiplier les dispositifs d’aide, déjà très nombreux, il est maintenant temps de les faire connaître et de sécuriser les jeunes médecins, en les accompagnant dans leur installation.

Il faut aussi transformer en profondeur l’exercice des soins de proximité, avec la constitution d’équipes pluri-professionnelles, des transferts de compétences, le développement de la télémédecine. C’est grâce à une nouvelle organisation de ce type que nous pourrons attirer les jeunes.

Enfin, certains territoires isolés doivent faire l’objet d’un suivi tout particulier : les médecins salariés, les hôpitaux de proximité, les centres de santé doivent pouvoir venir en appui dans ces territoires isolés.

Ces solutions seront concertées au niveau national et régional, afin de les enrichir et les compléter éventuellement, pour permettre leur mise en œuvre rapide, dès 2013.

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

M. Jean-Vincent Placé. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse précise et ancrée dans le réel.

Vous avez rappelé que Mme la ministre des affaires sociales et de la santé a présenté un pacte « territoire-santé », par lequel le Gouvernement s’est engagé sur trois objectifs : changer la formation et faciliter l’installation des jeunes médecins, transformer les conditions d’exercice des professionnels de santé et investir dans les territoires isolés.

Vous l’aurez compris, je serai très vigilant sur le respect de ce troisième engagement. Il s’agit en effet de garantir l’accès aux soins urgents en moins de trente minutes d’ici à 2015, de permettre aux professionnels hospitaliers salariés d’apporter leur appui aux structures ambulatoires, qui peuvent représenter une bonne réponse aux difficultés rencontrées aujourd’hui par les territoires isolés, d’adapter les hôpitaux de proximité et de responsabiliser les centres hospitaliers de niveau régional à l’égard de leur territoire d’implantation et, enfin, de conforter les centres de santé.

Tous les membres de la représentation nationale sont également attachés à l’objectif de la santé pour tous affiché par le Gouvernement.

avenir des communes et compensation des handicaps

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 118, adressée à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

M. Jean Boyer. Madame le ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur l’avenir de nos communes, qui font face à l’inévitable dilution de leurs compétences, particulièrement dans le domaine des investissements.

Les réformes envisagées à ce sujet nous laissent tous perplexes. En effet, dans notre paysage institutionnel, la commune s’efface peu à peu devant les cadres juridiques multiples et variés, parfois complexes : communautés de communes, communautés d’agglomération, pays, départements, régions, sans oublier les divers syndicats à vocation multiple.

Personne ne demande de privilèges spécifiques ; c’est simplement une parité de traitement qui est souhaitée, afin de compenser les nombreux handicaps tels que l’altitude, le climat, l’enclavement, l’espace, la topographie. La France rurale ne peut pas se contenter d’être la spectatrice passive de son déclin régulier ; au contraire, elle doit être une actrice de son renouveau et de sa renaissance ! Elle attend d’être mieux comprise et donc mieux aidée.

Les différents gouvernements, qu’il s’agisse de celui d’hier ou de celui d’aujourd’hui, ne tiennent pas suffisamment compte de ce que j’appelle « l’espace à gérer ». Une commune de 150 habitants à 200 habitants pourrait être logée dans une copropriété, mais cette commune doit entretenir des dizaines de kilomètres de chemins, de fossés, de ponts…

Madame le ministre, trouvera-t-on encore dans quelques années des maires pour assurer le volontariat dans ces communes ? Un maire acceptera-t-il d’être seulement officier d’état civil, garde champêtre ou président d’association ?

Une petite commune ne peut pas s’attendre à rester une oasis de montagne ou de zone de revitalisation rurale, ZRR, par exemple. Je sais que la situation de la France est difficile, mais nous devons apporter un peu plus, ensemble, aux secteurs qui le méritent Le monde rural est une chaîne composée de maillons complémentaires ; son désenclavement et son égalité de traitement sont des éléments incontournables de son avenir.

Toutefois, il faut être réaliste. On compte 98 508 communes en Europe, dont 36 600 en France, soit 32 % du total des communes européennes. Dans cette situation, les communes françaises ne pourront pas, compte tenu de leurs dimensions, bénéficier de crédits européens, et donc de la parité de traitement.

Dans les réformes des collectivités territoriales à venir, n’oublions pas non plus que, sur les 36 000 communes de France, 11 688 sont classées en zone de revitalisation rurale. Elles représentent 4 442 962 habitants, pour une surface de 212 339 kilomètres carrés. Pour toutes ces raisons, les ZRR sont inquiètes, et elles doivent être soutenues et accompagnées dans leur développement.

Il est donc nécessaire de prendre en compte l’espace à gérer de ce pays. En effet, je le répète – et je tenais les mêmes propos au précédent gouvernement –, personne ne réclame la constitution d’« oasis rurales » ; nous demandons simplement l’attribution de moyens appropriés pour gérer ces espaces, où l’on compte parfois moins de dix habitants au kilomètre carré – et dans mon département, on n’en compte parfois que trois !

La conclusion de mon propos revêt donc un ton plus solennel. Je représente un département où l’altitude moyenne de l’habitat moyen est la plus élevée de France, où vingt-deux cantons sont classés en zone de revitalisation rurale, trois de ces cantons comptant moins de dix habitants au kilomètre carré et un moins de cinq habitants au kilomètre carré. Madame le ministre je vous demande avec insistance de transmettre à vos collègues le message de la France rurale !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur Jean Boyer, le Gouvernement a conscience de vos attentes et inquiétudes sur l’avenir de tous les territoires, en particulier des territoires de montagne. Pour répondre à ces enjeux majeurs, le Président de la République a souhaité la création d’un ministère de l’égalité des territoires, dont le mandat et l’ambition portent ces problématiques.

L’égalité des territoires se traduit par deux objectifs majeurs. Il s’agit, d’une part, de la réparation des territoires meurtris, ou affectés par des handicaps particuliers : les zones de montagne souffrent par exemple de difficultés particulières liées à leur enclavement, à leur géographie ou à leur tissu économique parfois peu diversifié. Il s’agit, d’autre part, de la mise en capacité de tous les territoires : nous devons les aider à trouver les moyens de leur développement, en valorisant leurs forces et leurs ressources.

Les zones de revitalisation rurale sont l’un des outils qui agissent pour le développement du tissu économique et de l’emploi des territoires ruraux. Toutefois, il apparaît nettement que ce zonage ne cible pas toujours les territoires où les difficultés socio-économiques sont les plus patentes, en raison de certains critères qui, à l’aune de l’évolution démographique des territoires ruraux, ne sont plus pertinents. Le taux d’agriculteurs, qui est l’une des composantes du zonage, n’est par exemple plus systématiquement révélateur d’un territoire défavorisé.

Le Gouvernement souhaite donc engager une réflexion pour faire évoluer ce zonage et rendre l’objectif de développement et de structuration économique des territoires plus opérant.

Par ailleurs, Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement a annoncé la semaine dernière, au Sénat, qu’un projet de loi pour l’égalité des territoires serait porté devant le Parlement en 2013. L’aboutissement de ce travail qui s’engage permettra de répondre aux objectifs de développement, d’équilibre et de solidarité des territoires, et fera une large place à l’accès aux services publics.

Cette ambition pour l’égalité des territoires ne pourra se traduire, dans tous ses aspects, que dans une démarche partagée entre l’État et toutes les collectivités. Les communes, échelon de proximité, ont donc toute leur place dans la réalisation de cet objectif. L’enjeu essentiel sera celui de la mise en cohérence des politiques publiques au service de l’aménagement du territoire, notamment grâce à la contractualisation : de l’accord de partenariat avec l’Union européenne aux contrats régionaux, ou de territoire.

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Madame la ministre, j’ai écouté votre réponse avec attention et j’y décèle une volonté de la part du Gouvernement dans ce domaine. « Là où il y a une volonté, il y a un chemin », dit-on. Mais parfois, vouloir ne suffit pas.

Vous avez évoqué, à la fin de votre propos, les contrats de projets. Cela me paraît fondamental. Les pôles d’excellence rurale, les PER, ont très bien fonctionné dans nos territoires dans la mesure où ils correspondaient à des projets d’initiative locale et non à un droit de guichet. Si le Gouvernement avait la possibilité de les relancer, ce serait une excellente chose, car leur action remonte de la base, des acteurs de la France rurale, qui savent distinguer ce qu’il est possible de faire de ce qui ne l’est pas.

développement du logement social à mayotte

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, auteur de la question n° 224, adressée à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.

M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la ministre, le logement est rare, cher, insuffisamment sécurisé et aménagé dans l’île de Mayotte. De plus, la grande majorité de la population mahoraise est éligible au logement social en raison de la faiblesse des revenus et d’un taux de chômage particulièrement élevé.

Longtemps caractérisée par la production d’un seul type de logement, la « case SIM » – du nom du principal constructeur de logement social, la Société immobilière de Mayotte –, la politique d’aide au logement à Mayotte s’est dotée en 2006 et en 2008 de deux nouveaux produits en accession sociale : le logement en accession très sociale pour les ménages les plus défavorisés, et le logement en accession sociale.

Sur les 237 logements mis en chantier, seuls 150 ont été achevés, sans pour autant être occupés. La promotion de ces habitations s’est très vite heurtée au problème de régularisation foncière que connaît le département. En effet, sans titre de propriété, les nouveaux accédants ne peuvent prétendre à l’emprunt bancaire.

Quant à l’offre locative sociale, le logement locatif social et le logement locatif très social n’ont connu, depuis leur création en 2008, qu’un succès très relatif. La seule allocation personnelle au logement applicable dans l’île depuis 2004 est l’allocation de logement familiale, mais elle n’est versée qu’à 173 familles et les montants sont nettement inférieurs à ceux qui s’appliquent dans les DOM.

Le président de la République de l’époque avait promis, lors de son déplacement à Mayotte en janvier 2010, de donner les moyens nécessaires pour accompagner le département dans la construction de 40 000 logements sociaux d’ici à 2017. Pourtant, dans un rapport interministériel visant à établir un diagnostic du logement locatif social à Mayotte, commandé par le Gouvernement et remis en janvier 2011, les auteurs s’étaient interrogés sur le réalisme de la programmation inscrite dans le projet d’aménagement et de développement durable de Mayotte, qui évaluait les besoins de l’île à 500 logements sociaux par an jusqu’en 2017 et à 600 logements à réhabiliter annuellement.

Je souhaiterais savoir, madame la ministre, quelles suites seront données aux vingt-cinq recommandations formulées par la mission et quelles actions le Gouvernement entend entreprendre pour développer le logement social à Mayotte.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur Thani Mohamed Soilihi, la problématique foncière constitue à Mayotte le préalable de toute l’action publique en matière de construction de logements. C’est la raison pour laquelle les cinq premières préconisations du rapport de janvier 2011 relatif au développement du logement social à Mayotte visent à faciliter la mobilisation foncière.

La proposition de créer un établissement public foncier d’État est en cours d’expertise. Ce projet devrait en effet aller de pair avec l’action du conseil général pour mener à son terme le processus de titrage des quelque 20 000 propriétés coutumières qui ont été répertoriées.

Six préconisations – nos 11 à 16 – visent à débloquer l’accession à la propriété, à renforcer l’amélioration de l’habitat et à instituer un accompagnement social des personnes concernées ; c’est une démarche complexe qui suppose de renforcer les synergies entre les services locaux de l’État, les services sociaux du département et les opérateurs publics de l’aménagement et de la construction, dont bien sûr la Société immobilière de Mayotte.

Dans ce cadre, les autorités locales auront à établir un plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées, et le département de Mayotte se verra confier à partir de 2013 la gestion d’un fonds de solidarité pour le logement.

Cinq autres préconisations – nos 6 à 10 –, toutes prises en compte, concernaient la mise à contribution de l’expertise de l’État au niveau de la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement, ou DEAL, dans le champ de l’ingénierie et des coûts de construction, au niveau de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, s’agissant de la connaissance et du renforcement de la concurrence, et au niveau des services centraux pour faciliter la mobilisation de certaines procédures d’aide.

Les préconisations nos 17 à 19 sont particulièrement importantes puisqu’elles concernent l’extension à Mayotte de l’allocation de logement social et la distribution du prêt à taux zéro plus, ou PTZ+. Ces deux mesures seront effectives en 2013.

Les quatre dernières préconisations – nos 21 à 25 – constituent des priorités de travail pour les ministères chargés du budget et de l’outre-mer ; elles visent à préparer l’extension à Mayotte des règles fiscales.

Enfin, l’instance collégiale suggérée par la vingtième recommandation existe et se réunit régulièrement sous la présidence du préfet pour superviser l’avancement des programmes de logements sociaux et pour coordonner l’action des différents acteurs.

Le logement est rare, cher, insuffisamment sécurisé et aménagé dans l’île. De plus, la grande majorité de la population mahoraise est éligible au logement social en raison de la faiblesse des revenus et d’un taux de chômage particulièrement élevé.

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la ministre, je vous remercie de ces réponses, qui sont rassurantes pour la population de Mayotte. Je me permets de rappeler que des promesses ont déjà été formulées dans le passé, mais je suis certain que ce gouvernement, auquel la population de Mayotte accorde énormément de confiance, va enfin concrétiser ses promesses.

La conjoncture, vous l’avez souligné, est à la fois compliquée et difficile : les logements manquent et, dans le même temps, les aides sont insuffisantes. La situation actuelle de la Société immobilière de Mayotte est assez paradoxale, puisqu’elle parvient à construire des logements mais que ceux-ci ne trouvent pas preneur, la population n’ayant pas les moyens de compléter l’aide au logement, dont le niveau est bien trop bas. Il me semble que l’une des premières mesures à prendre est le relèvement du montant de l’aide au logement, qui est le plus bas des départements.

J’ai pris acte des autres mesures ainsi que de la nécessité d’associer les collectivités locales, notamment le département de Mayotte, et je vous remercie de ces précisions. Je tiens à cet égard à souligner l’état des finances locales : les finances du département sont au plus bas, en raison non pas d’un problème de gestion, mais de dotations insuffisantes par rapport aux besoins des Mahorais.

Je compte sur le Gouvernement pour aller de l’avant pour permettre enfin aux Mahorais d’obtenir l’égalité républicaine.

avenir des voies navigables à grand gabarit en france

M. le président. La parole est à M. René Beaumont, auteur de la question n° 197, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. René Beaumont. Monsieur le ministre, les voies navigables à grand gabarit sont aujourd’hui l’outil le moins cher en fonctionnement et en investissement, le plus écologique – un moteur de 600 chevaux peut pousser un convoi de 4 000 tonnes –, le plus durable, car en grande partie inusable – l’eau ne s’use pas et seules les écluses sont à entretenir.

À l’heure de la maritimisation de l’économie mondiale, la voie d’eau est seule à être en phase avec cette évolution et la mieux placée pour la redistribution sur nos territoires du fret maritime, qui ne fait qu’augmenter.

La liaison Rhin-Rhône par la Franche-Comté, qui était programmée et totalement financée par la « rente du Rhône », a été définitivement anéantie par le gouvernement Jospin en 1997.

Dès lors, les élus rhône-alpins, bourguignons, lorrains et champenois se sont penchés sur un autre tracé par le plateau de Langres et la Moselle, laquelle se révèle aujourd’hui l’axe fluvial français transportant le tonnage de fret le plus élevé. Ainsi est née l’association Seine-Moselle-Saône, qui, réunissant toutes les régions fréquentées, a assuré avec l’État et les régions le financement des préétudes de ce tracé.

Aujourd’hui, les études ont confirmé très largement cette hypothèse et l’État lui-même a considéré ce tracé comme possible après la réalisation Seine-Nord-Escaut en cours.

La loi Grenelle 1 de juillet 2009 a confirmé ce tracé en y ajoutant, à la demande légitime de quelques élus alsaciens, la possibilité de desserte des ports rhénans français de Strasbourg et de Mulhouse. L’État a décidé, avec l’accord bien sûr de la Commission nationale du débat public, que le débat public sur cette nouvelle liaison aurait lieu dans le courant de l’année 2013.

Dans cette perspective, Voies navigables de France a récemment déposé un dossier de débat public qui ne me semble pas parfaitement conforme au Grenelle 1 de l’environnement, précisant : « Les études nécessaires à la réalisation d’une liaison fluviale à grand gabarit entre les bassins de la Saône et de la Moselle seront poursuivies et un débat public sera organisé d’ici 2012 – cette date a été reportée à 2013. Ce débat envisagera également l’intérêt d’une connexion fluviale entre la Saône et le Rhin, qui fera l’objet d’études complémentaires préalables ».

Ce document présente une seule liaison totale Saône-Moselle/Saône-Rhin et programme, à partir de Saint-Jean-de-Losne, en Côte-d’Or, au sud de la Bourgogne, un ouvrage à deux branches. L’une, verticale, vers la Moselle, correspond bien à l’engagement primordial. L’autre décrit une large courbe vers l’est pour rejoindre Mulhouse et le Rhin.

Une telle interprétation augmente bien sûr singulièrement le coût de l’investissement et risque d’en amoindrir très significativement la rentabilité, donc d’en détourner les investisseurs.

Un tracé strictement mosellan sur lequel on grefferait un barreau entre Port-sur-Saône et Mulhouse paraîtrait beaucoup plus réaliste. Il permettrait, entre autres, la desserte du seul pôle économique du centre-est français, à savoir le triangle Mulhouse-Bâle-Montbéliard.

Je tiens à faire remarquer que le sud de la Franche-Comté traversé par la liaison vers Mulhouse prévue par Voies navigables de France est une région à risques écologiques certains et, qui plus est, sans aucune activité économique lourde susceptible d’être cliente de la voie d’eau, ce secteur étant depuis toujours celui de la mécanique de précision et de l’horlogerie.

Ma question est double, monsieur le ministre.

Que pense faire l’actuel gouvernement du projet Seine-Nord Europe prévu en partenariat public-privé, sachant que le dialogue compétitif entre les deux entreprises retenues devrait se terminer prochainement ?

Cet équipement étant lancé, quel tracé retiendra-t-on pour la liaison Saône-Rhin, afin que, pendant l’achèvement de la liaison Seine-Nord Europe, les études définitives de travaux soient réalisées pour permettre le lancement de ce nouveau projet, indispensable à l’achèvement d’un réseau français à grand gabarit total ?

Avec les deux investissements précités, ce réseau pourrait être complété définitivement par une liaison Seine-Moselle, le tout devant permettre un développement économique tout à fait performant pour le Nord et le Nord-est français, encore aujourd’hui très lourdement pénalisés par l’abandon des activités minières et métallurgiques.