M. Daniel Raoul. Très juste !

M. Marc Daunis. Ces difficultés doivent être résolues, car le développement de ces entreprises conditionne le redémarrage de la croissance économique et le retour des créations d’emplois.

Il est de notre devoir de consolider nos PME. Je me réjouis que ce point fasse consensus, de même que j’ai entendu avec plaisir les orateurs défendre la nécessité d’un Small Business Act à la française, qui devrait être, bien entendu, en cohérence avec l’échelon européen et qui permettrait de développer un environnement favorable aux PME innovantes.

Nous devinons quels pourraient être les piliers fondamentaux d’un tel Small Business Act : une fiscalité et une législation adaptées pour les PME et TPE, un accès facilité aux marchés publics, un accompagnement important à l’accès au marché européen et international ; enfin, un accès facilité et simplifié aux financements. On pourra, s’il le faut, corriger telle ou telle mesure, mais les éléments essentiels sont là.

D’ores et déjà, le Gouvernement a pris, dans le cadre du pacte de croissance, de compétitivité et d’emploi, des mesures qui vont dans le sens du redressement de notre économie et qui sont favorables à nos PME.

Pour ne citer que quelques mesures, je rappellerai à mon tour la création de la Banque publique d’investissement. J’ai certes entendu les critiques sur l’insuffisance des sommes engagées. Naturellement, ce n’est jamais assez, mais nous surmontons déjà ce premier défi !

La mise en place du crédit d’impôt compétitivité emploi aura pour conséquence l’injection de 20 milliards d’euros. Excusez-moi du peu, mais, dans la situation que connaît notre pays, cela représente un effort colossal.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. En 2014 seulement !

M. Francis Delattre. Et vous venez de leur reprendre 30 milliards d’euros !

M. Marc Daunis. Je reviendrai ultérieurement sur les implications de cette mesure et le risque que ces efforts réalisés en direction des entreprises suscitent des réticences dans le corps social, qui n’en comprendrait pas ou n’en mesurerait pas l’efficacité, la pertinence et la justice.

Enfin, 2,2 milliards d’euros d’investissements d’avenir seront réorientés vers les PME innovantes et le numérique, là encore élément stratégique pour l’avenir, et nous avancerons vers la création d’un brevet unique européen.

Comme l’a rappelé notre collègue Martial Bourquin, ce problème est majeur, quand on sait que les entreprises françaises déposent trois fois moins de brevets que leurs consœurs allemandes, que, en 2011, moins de 20 % des dépôts de brevets ont été réalisés par des PME, et qu’un dépôt, en Europe, coûte aujourd’hui près de dix-huit fois plus cher qu’aux États-Unis.

Bientôt, nous discuterons également du contrat de génération, qui vient d’être adopté par l’Assemblée nationale. Ce dispositif favorisera la solidarité au sein de nos entreprises et de notre société, mais surtout garantira la transmission des savoirs essentiels pour la compétitivité des entreprises. Notre collègue Martial Bourquin l’a rappelé fort justement tout à l’heure.

Nous devons aussi adapter nos PME au monde de demain ! Nous le savons : dans une économie financiarisée, dans un monde en mutation, où l’on sent qu’un système est en train d’agoniser sans qu’un autre ait encore pu prendre sa place, nos PME sont soumises à une concurrence internationale très agressive.

Plusieurs chantiers sont devant nous : la nécessité d’un cadre d’action clair, stable et pérenne ; une meilleure information et accompagnement – en cela, la banque publique constitue une première étape et dépasse très largement les dispositifs précédents auxquels vous faisiez allusion, comme OSEO ; une stabilité et une clarté juridique – actuellement, quelque 7 000 dispositifs de financement public et 20 % des articles du code général des impôts sont modifiés chaque année.

N’oublions jamais cela ! Certains d’entre vous ont soulevé ce problème tout à l’heure, mes chers collègues, mais nous ne devons jamais l’oublier dans nos travaux parlementaires. Il est facile de déplorer l’inflation normative alors que nous sommes très souvent à l’origine de ces dispositifs – et vous l’étiez prioritairement ces dernières années, chers collègues de l’opposition, puisque vous étiez aux affaires.

Mes chers collègues, j’espère que l’actuelle majorité sera beaucoup plus responsable en la matière que ne l’a été la précédente.

Le pacte de compétitivité prévoit de simplifier les démarches administratives. Il a été estimé par le Gouvernement qu’une réduction des charges administratives de 25 % permettrait une augmentation de près de 1,5 point du produit intérieur brut européen ! Là encore, les guichets uniques de la BPI sont un excellent premier pas.

M. Marc Daunis. Je conclurai mon propos en soulignant quatre points.

Premièrement – cela a été rappelé –, il convient d’améliorer les rapports entre les PME et les grands groupes, notamment dans le cadre des rapports de sous-traitance. Saluons à cet égard le travail de Martial Bourquin. Nous attendons beaucoup de la mission d’information qui lui a été confiée par le Gouvernement.

Deuxièmement, il faut améliorer la cohésion de nos entreprises au sein des territoires et développer les initiatives innovantes, plus précisément un écosystème d’innovations au plus près des territoires. Cela a été rappelé par notre collègue André Reichardt tout à l’heure, et je partage son point de vue sur la nécessité de soutenir ces écosystèmes autour des chaînes de l’innovation. L’exemple italien, de même que différents autres au niveau européen, sont éclairants à cet égard.

Troisièmement, au-delà du développement des initiatives solidaires, il faut restaurer un cadre de confiance. Pour cela, nous devons tous prendre nos responsabilités.

M. Marc Daunis. Les pouvoirs publics doivent faire confiance au dialogue social, ce que fait le Président de la République, et travailler ardemment, collectivement, pour faciliter le développement des PME.

M. Marc Daunis. Quatrièmement, et enfin, j’aborderai le problème de la relation entre les PME et les grands groupes. Dès lors que des entreprises bénéficient d’argent public pour leur développement, qu’il s’agisse du crédit d’impôt recherche ou du CICE, il est nécessaire que, à un moment donné, elles puissent rendre des comptes, y compris en assurant une traçabilité de l’argent public investi. Se posera alors le problème de la récupération des sommes investies par la puissance publique pour soutenir des entreprises qui ne respecteraient pas les engagements pris avec la Nation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, vous permettrez tout d’abord à la sénatrice des Français de l’étranger que je suis de faire part à ceux qui n’en auraient pas encore été informés d’une excellente nouvelle, à savoir la libération, après sept ans de détention au Mexique, de notre compatriote Florence Cassez. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est bien de le souligner !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je remercie mes collègues à la droite de cet hémicycle de ces applaudissements, qui montrent le soutien que le Sénat a apporté et apporte encore à cette jeune femme. Mes remerciements s’adressent aussi à la Cour suprême du Mexique.

Pour en revenir à notre débat sur la place des PME dans notre économie, nous avons déjà largement évoqué les facteurs qui handicapent leur développement en France. Je souhaiterais quant à moi insister sur l’enjeu de leur internationalisation, véritable levier de croissance, encore trop négligé par nos entreprises et notre administration, mais indispensable pourtant à l’essor et à la compétitivité de notre pays.

En 2012, la France comptait 95 000 PME exportatrices, et l’Allemagne 350 000 ! Un quart des PME allemandes réalise 20 à 30 % de leur chiffre d’affaires auprès de clients étrangers, quand seulement 8 % des PME françaises ont une activité, même minime, à l’export. Plus inquiétant encore, le nombre de PME exportatrices françaises a chuté de 20 % en dix ans, et la crise internationale ne suffit certainement pas à expliquer ce recul.

Face à ce défi, quelle a pour l’instant été la réponse du Gouvernement ? Le regroupement d’OSEO, du Fonds stratégique d’investissement, le FSI, et d’une filiale de la Caisse des dépôts et consignation en une pharaonique Banque publique d’investissement, officiellement en vigueur depuis le 1er janvier dernier. Celle-ci est censée offrir aux PME un guichet unique dans chaque région française, y compris en matière d’aide à l’export.

Toutefois, de quel guichet unique parle-t-on ? Apparemment, d’une simple centralisation des instruments de financement, alors même que l’accès au crédit n’est pas, loin de là, le principal obstacle au développement des PME à l’international.

Les principaux freins à l’export sont liés à nos traditions bureaucratiques pénalisantes, à une fiscalité dissuasive, à la complexité des procédures administratives et douanières, mais aussi, et surtout, à la difficulté de développer rapidement une connaissance du marché convoité. Risque d’impayés ou de contrefaçons, instabilité politique ou, tout simplement, compréhension des comportements de consommation, de l’état de la concurrence et du cadre juridique local sont autant de paramètres difficiles à évaluer depuis la France.

Ce manque d’accès à de telles informations stratégiques explique d’ailleurs largement la propension de nos PME exportatrices à ne se risquer que dans un seul pays étranger et à se concentrer sur les États européens au détriment des pays émergents, pourtant principaux réservoirs de croissance en cette période de crise. C’est donc moins de financements que d’accompagnement et de retour d’expérience et d’expertise qu’ont besoin nos PME.

La ministre du commerce extérieur a annoncé que la BPI « assurerait un rôle de conseil auprès des entreprises qui souhaitent exporter ». Outre que ce n’est pas le métier d’une banque, le projet de doter la BPI d’équipes de « développeurs à l’international » issus des effectifs d’Ubifrance ne me semble pas – pardonnez-moi – constituer un progrès significatif par rapport au dispositif de « l’équipe de France de l’export » lancé par Anne-Marie Idrac voilà cinq ans.

Mme Nathalie Goulet. Avec quel résultat !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Les modalités concrètes du rapprochement entre les différents opérateurs de l’appui à l’export me semblent encore bien floues, et je vous serais reconnaissante, madame la ministre, si vous pouviez nous apporter quelques clarifications à cet égard.

Oui, nous avons besoin de mettre en place des synergies. Toutefois, cela passe peut-être moins par la constitution d’une entité administrative tentaculaire que par la mise en cohérence et en réseau des multiples intervenants, comme le préconise d’ailleurs un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental, le CESE.

Surtout, ne faudrait-il pas mieux mobiliser l’expertise des entrepreneurs français déjà présents sur le marché local ? Le concept de diplomatie économique est un serpent de mer, vieux de plus de vingt ans. Pour donner du corps à ce slogan, la seule option consiste à véritablement mobiliser les réseaux et les acteurs économiques français sur le terrain. Laurent Fabius avait annoncé, en août dernier, la création de conseils économiques dans les ambassades. Où en sommes-nous ? Qui en fera partie ? Les conseillers du commerce extérieur, les élus de l’Assemblée des Français de l’étranger, tous les entrepreneurs français souhaitant y être associés ? Et comment évaluer les résultats, en particulier ceux de cette BPI ?

On oublie trop souvent que les PME créées par des Français à l’étranger contribuent aussi à la mise en valeur des produits et du savoir-faire de la France et constituent une ressource pour les entreprises françaises, en matière tant de compréhension du marché que d’entretien d’un réseau local.

Sur ces questions – les Allemands l’ont bien compris –, nous avons besoin de suivi, de continuité. La relation de confiance ne se décrète pas, elle se construit sur le long terme. Il s'agit de l’un des facteurs essentiels de la réussite de nos amis allemands.

Nos PME, souvent de statut juridique et fiscal local, sont trop largement ignorées par les autorités françaises, mais aussi pénalisées. Mes chers collègues, je vous en donnerai un seul exemple. Nous ne cessons d’appeler à l’implantation d’entreprises dans des pays comme l’Algérie – très bien ! –, mais alors, comment accepter que le fils d’une famille ayant créé une entreprise, l’ayant développée, l’ayant fait prospérer au service du pays d’accueil, se voie maintenant, alors qu’il était appelé à reprendre cette entreprise, refuser un contrat de travail et contraint à l’expatriation ?

En contrepartie de leur contribution à l’enrichissement du tissu industriel français à l’étranger, il pourrait être pertinent de collaborer avec les pays d’accueil afin de mettre en place une véritable sécurité juridique et de garantir à ces entrepreneurs le bénéfice d’une protection en cas de crise, par exemple via la création d’un fonds d’indemnisation français ou européen.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Après les printemps arabes, l’actuelle guerre au Mali donne une nouvelle actualité à cet enjeu.

Pour conclure, je voudrais souligner que le défi de l’internationalisation des PME est aussi celui de la réduction de notre chômage et celui du recrutement. À cet égard, je ne peux que me réjouir de la volonté du Gouvernement de renforcer et d’élargir le dispositif du volontariat en entreprise.

Toutefois, au-delà de ce système, il est essentiel de favoriser la coopération universitaire et les passerelles entreprises-écoles à l’international. Les potentialités sont immenses. Nous devons aussi penser à la question de la reprise des sociétés, qui constitue un gros problème pour nos PME en France. Là encore, nous pourrions solliciter des investisseurs étrangers.

Tout récemment, lors d’un déplacement au Mexique, j’ai pu constater le dynamisme d’un programme de coopération entre écoles d’ingénieurs françaises et mexicaines, et celui de partenariats entre entreprises françaises et programmes locaux de formation professionnelle.

Les facteurs concourant à la réussite de nos PME à l’international sont nombreux ; il est essentiel de n’en négliger aucun ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier Mme Garriaud-Maylam d’avoir pris le temps de se féliciter de la décision de la Cour suprême du Mexique et du retour prochain de notre compatriote Florence Cassez. Nous ne pouvons tous que nous en réjouir.

Je me réjouis que vous ayez pu inscrire à l’ordre du jour de votre assemblée ce débat sur un sujet aussi important que la place des PME dans l’économie française, même s’il s’est tenu à une heure tardive.

Ce n’est pas un sujet, nous en sommes tous convaincus, que l’on peut prendre à la légère. L’immense majorité du tissu productif de la France, vous l’avez d’ailleurs rappelé, est composé de PME : on en dénombre 2,7 millions, qui emploient 7,4 millions de personnes, soit plus de 60 % des effectifs salariés de notre pays.

C’est dire à quel point notre sort de grande nation de l’économie mondiale est tributaire de ces entreprises, dont la vitalité est si sensible aux aléas conjoncturels.

Je le sais, nos PME sont riches de la formidable énergie qui anime tant de dirigeants et de salariés, capables de donner à leur entreprise un souffle, une espérance, un horizon qui les conduit bien souvent à prospérer, innover et, pour un peu plus de 100 000 d’entre elles, à exporter.

Les 2,5 millions de micro-entreprises et les 130 000 entreprises de plus de dix salariés que compte notre pays font partie de notre patrimoine national. Elles représentent pour la France autant de chances, autant de sources d’espoir et d’émancipation pour ces hommes et ces femmes qui, au travers de l’entreprise, contribuent à développer les richesses de leur pays et se réalisent en tant qu’individus.

Chacun doit bien en mesurer toute la portée : la croissance des PME est aussi vitale pour notre économie que pour notre cohésion sociale.

Je le dirai sans détour, pour moi, la grande mobilisation nationale engagée par le Gouvernement en faveur des PME depuis mai dernier illustre la priorité absolue de 2013 en faveur de l’emploi.

En effet, depuis plusieurs années, chacun a pu constater que les PME françaises étaient handicapées dans leur développement, pour des raisons tenant à leur modèle de création et de croissance. Ces fragilités structurelles se sont encore aggravées depuis la crise de 2008-2009.

Parmi les principaux motifs d’inquiétude que vous avez d’ailleurs rappelés, je retiens une addition de faits qui sont autant d’éléments d’explication des difficultés de croissance de nos PME. Un très petit nombre d’entre elles seulement parvient à se transformer en entreprises de taille moyenne ou intermédiaire : on ne recense aujourd’hui que 4 600 entreprises de taille intermédiaire en France, ainsi que l’a rappelé M. Vaugrenard.

Premièrement, les conditions de naissance des PME sont souvent difficiles. C’est ainsi que 94 % des créations sont réalisées sans aucun salarié et que près de la moitié se constitue avec un capital inférieur à 8 000 euros.

Deuxièmement, les conditions de financement des PME sont presque toujours délicates. Leurs ressources proviennent encore à 92 % du financement bancaire, et le sous-accompagnement de leurs dirigeants est parfois à l’origine d’une mortalité prématurée : la moitié des entreprises disparaissent dans les cinq ans qui suivent leur création.

Troisièmement, nous constatons un sous-investissement relatif des PME françaises. Ce phénomène est à rapprocher également de leur trajectoire d’innovation : elles ne représentent que 21 % des dépenses intérieures de recherche et développement en entreprise, les DIRDE, contre 62 % pour les groupes de plus de 1 000 salariés.

Quatrièmement, l’accès des PME à la commande privée et publique reste limité. Elles n’obtiennent, par exemple, que 28 % du montant des marchés publics alors qu’elles représentent 44 % de la valeur ajoutée.

Cinquièmement, enfin, le nombre de PME parvenant à se projeter à l’international stagne depuis dix ans. La France peut s’appuyer sur environ 117 000 entreprises exportatrices, alors que l’Allemagne en compte près de trois fois plus.

J’ajoute que, lorsqu’une PME parvient à déjouer ces statistiques de croissance et à prendre son envol malgré cet ensemble de contraintes, il n’est pas rare qu’elle perde son indépendance. Chaque année, en moyenne, ce sont 14 % des entreprises de 100 à 249 salariés qui sont absorbées par un grand groupe. Pour les entreprises comprises entre 250 et 499 salariés, ce taux monte à 16,5 %.

L’ensemble de ces fragilités, que ce soit au moment de leur naissance ou dans leurs années de développement, sont d’autant plus pénalisantes pour les PME que, plus que toutes autres, ces entreprises subissent de plein fouet les effets de la crise : 93 % des PME restent aujourd’hui confrontées à des retards de paiement. Le baromètre KPMG-CGPME, publié le 14 janvier dernier, fait également état des craintes légitimes des dirigeants de PME. Un tiers d’entre eux redoute que la situation économique ait des impacts négatifs sur les conditions d’accès au crédit.

Face à ces constats, je puis vous dire que le Gouvernement n’a pas ménagé sa peine, tout au long de l’année dernière, afin de renverser la tendance et d’inscrire durablement les PME dans une trajectoire de croissance. Je vais y revenir en détail.

Auparavant, je veux simplement rappeler que, pour cette nouvelle année, le Président de la République a fixé un cap on ne peut plus clair : stimuler la compétitivité de nos entreprises et tout mettre en œuvre afin de gagner la bataille pour l’emploi.

Or, chacun l’aura compris, nous ne pourrons remporter cette bataille sans le redressement productif et commercial de celles qui représentent 99 % du tissu productif national, c’est-à-dire les PME. C’est ma conviction et c’est aussi celle qui préside au pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi annoncé par le Gouvernement le 6 novembre dernier.

Pourquoi revenir ce soir sur le pacte ? Pour rappeler une simple réalité : plus de la moitié des trente-cinq décisions qui y figurent concernent directement les PME. Je ne peux que m’en réjouir.

Qu’il s’agisse du pacte de compétitivité, de la loi de finances ou de l’ensemble des initiatives que nous avons prises en faveur des PME entre mai 2012 et janvier 2013, quelles directions principales avons-nous choisies ?

Je vois se dégager trois lignes de force permanentes dans notre action d’appui aux petites et moyennes entreprises : répondre à l’urgence et permettre aux PME de poursuivre leur développement malgré la crise ; simplifier et faciliter la vie des entreprises à chaque étape de leur développement ; stimuler l’esprit d’entreprise et de conquête économique chez les Français.

Notre première ambition a été et demeure, dans un environnement macro-économique comportant encore de fortes incertitudes, de répondre à l’urgence et de permettre aux PME de poursuivre leur développement malgré la crise.

Je l’ai rappelé tout à l’heure : de façon générale, la trésorerie des PME est sous tension. Cette situation résulte d’un redoutable effet de ciseau : première lame, les délais de paiement se tendent ; deuxième lame, les crédits de trésorerie sont en baisse de 3,5 % depuis un an.

Si cette situation devait perdurer, il y a tout lieu de croire qu’elle déboucherait sur un credit crunch. Il s'agit d’un scénario d’autant moins improbable que, chacun l’aura observé, les nouvelles règles prudentielles risquent de peser sur le crédit dans notre pays.

Sans attendre, le Gouvernement a instauré un dispositif d’aide aux PME et aux ETI pour leur permettre de renforcer leur trésorerie. Ce dispositif de garantie des crédits de trésorerie, via la banque publique d’investissement, la BPI, est d’ores et déjà en place. Il doit permettre de dégager 500 millions d’euros pour les PME.

Afin de soulager les entreprises en matière de trésorerie, nous avons également décidé d’un plan d’action sur les délais de paiement. Il a été présenté en conseil des ministres par mon collègue Pierre Moscovici en novembre dernier. L’orientation est très claire : nous proposerons que le non-respect des délais de paiement légaux puisse être sanctionné directement par l’administration, c’est-à-dire par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, sans que le fournisseur soit obligé poursuivre son donneur d’ordre en justice.

L’État se doit évidemment d’être exemplaire. C’est pourquoi un plan d’amélioration de ses propres délais de paiement sera mis en place au cours du quinquennat. Il s'agit d’une question importante, qui vise à éviter de pénaliser le développement des PME.

L’action sur les conditions de financement des entreprises ne saurait se limiter à une intervention sur le crédit interentreprises, aussi bénéfique soit-elle. Nous devons aussi orienter, de manière structurelle, l’offre de financement en endettement et en fonds propres vers les PME.

Il ne faut pas se voiler la face : le postulat selon lequel le financement des entreprises se maintient en France est vrai globalement, mais faux dans le détail.

Prenons l’exemple du financement bancaire : l’observatoire du financement des entreprises nous dit clairement que la hausse des encours de crédits aux TPE-PME indépendantes ralentit « nettement » depuis la mi-2011. Si l’on creuse un peu, la situation reste contrastée : les PME de l’industrie manufacturière souffrent d’un ralentissement depuis le début de l’année 2012.

J’entends aussi parfois que les PME françaises ont renforcé leurs fonds propres sur les dix dernières années. Ne sur-interprétons pas ce constat, car il résulte non pas d’un fort taux d’investissement, mais d’une progression du poids de la trésorerie des entreprises, qui ont adopté un comportement de précaution. Le fait que les PME aient renforcé leurs fonds propres n’induit pas qu’elles n’ont pas des difficultés à financer leurs investissements...

Si l’on observe les levées de capitaux pour les PME et les ETI en France sur le segment du capital-risque, le léger rebond observé au quatrième trimestre de 2012 ne doit pas faire oublier la contraction de 27 % entre 2010 et 2011. Les capitaux levés par le biais des fonds d’investissement de proximité, les FIP, et des fonds communs de placement dans l’innovation, les FCPI, ont diminué de 400 millions d’euros en 2011 par rapport à 2008. À cette date, les levées atteignaient un montant de 1,1 milliard d’euros. Or je rappelle que les FIP et les FCPI représentent près du tiers du capital-risque en France.

Au-delà de nos difficultés actuelles à financer notre économie, il nous faut réfléchir à de nouveaux instruments pour faire face aux besoins de demain.

La BPI constitue une première réponse, très importante, à ces défis. Il s’agissait du premier engagement du Président de la République. Vous venez d’en voter la création, mesdames, messieurs les sénateurs. Il revient maintenant à cette institution de faire ses preuves.

J’ai déjà évoqué le dispositif de 500 millions d’euros de crédits de trésorerie pour les TPE et PME. La BPI assurera également le préfinancement du crédit d’impôt recherche, le CIR, et surtout le préfinancement du crédit d’impôt compétitivité emploi, le CICE, qui sera, lui aussi, directement opérationnel pour les entreprises en 2013, contrairement à ce qu’a affirmé M. Delattre.

Cette année doit donc être celle du démarrage à plein régime de la BPI, porte-avions de la compétitivité. Toutefois, afin de financer nos entreprises, nous devons également mieux mobiliser l’épargne. Vous le savez, nous souffrons spécifiquement d’un problème non pas de volume de collecte – relativement, la France épargne plus que ses voisins –, mais d’orientation de l’épargne. Il s’agit de veiller à mieux diriger l’épargne des Français vers les entreprises et, singulièrement, vers les PME, dont certaines souffrent d’un manque évident de fonds propres.

Le rapport Duquesne a formulé des propositions sur l’épargne réglementée, dont la principale était que les fonds d’épargne prêtent à la BPI. D’ores et déjà, le Gouvernement a annoncé que 10 milliards d’euros de lignes de prêts seraient ouvertes à la BPI sur les fonds d’épargne.

Par ailleurs, se profile devant nous la réforme de la fiscalité de l’épargne financière. Karine Berger et Dominique Lefebvre doivent remettre prochainement leurs conclusions au ministre de l’économie et des finances. L’enjeu est double : mieux orienter l’épargne des Français vers le financement de long terme en actions et rééquilibrer les bilans bancaires afin d’éviter un resserrement du crédit dans les années à venir. Ce second objectif, pourtant majeur pour les PME de notre pays, est trop souvent oublié.

Enfin, s’agissant du financement des entreprises, je veux formuler quelques remarques sur l’accès des PME aux marchés financiers.

Vous le savez, du fait du resserrement du crédit bancaire et de l’impact des nouvelles normes prudentielles, nous devons aider nos PME à diversifier leurs sources de financement. C’est pour cette raison que le pacte de compétitivité a mis sur les rails le projet d’un nouveau segment de marché relatif aux PME et aux ETI et destiné à faciliter l’accès de ces entreprises aux marchés de capitaux, tant en actions qu’en obligations.

Vous l’aurez constaté, au mois de décembre dernier, NYSE Euronext, l’opérateur historique de la Bourse de Paris, a formulé de premières propositions pour une nouvelle filière dédiée aux PME. Les discussions se poursuivent, car le Gouvernement estime que ce projet ne va pas assez loin et ne répond pas suffisamment aux attentes des entreprises.

Deuxième ligne de force de notre action au service des PME depuis neuf mois : simplifier la vie de leurs dirigeants aux différentes étapes du développement de leur société.

Depuis mon arrivée au Gouvernement, j’ai pris pleinement conscience que, derrière les difficultés d’accès au financement, qui doivent être traitées, se cache un problème tout aussi pénalisant pour les entrepreneurs : l’environnement dans lequel ils évoluent n’a généralement pas été pensé pour les PME. Le plus souvent, les règles s’imposent à elles plus qu’elles n’ont été pensées pour elles, ou même avec leur concours.