M. Gilbert Barbier. Nos collègues des départements ruraux ont souligné la difficulté que rencontrent certains établissements publics de santé ne disposant pas d’un laboratoire public de biologie dans un périmètre rapproché, voire dans tout un département. Ils ont insisté sur la nécessité de sous-traiter les examens à un laboratoire privé et d’obtenir de celui-ci un contrat approprié sans obérer les finances de l’établissement.

Le non-recours à la pratique de la ristourne peut se concevoir. Une procédure d’appel d’offre pourrait être décidée, sur le modèle de ce qui se pratique pour la sous-traitance de certaines activités ou prestations de l’établissement public – restauration, lavage du linge, etc. – qui sont confiées à des entreprises privées.

En revanche, la limite départementale ne me paraît pas adaptée. Il faut tenir compte du réseau de laboratoires publics et prendre en compte la distance par rapport à l’établissement. C'est la raison pour laquelle je propose la distance de cinquante kilomètres ; elle me paraît raisonnable et me semble correspondre davantage aux difficultés que peut rencontrer un établissement public pour faire effectuer les examens dans un établissement public de biologie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacky Le Menn, rapporteur. L’amendement n° 2 rectifié sexies, que nous avons déjà examiné très longuement lors de l’élaboration du texte de la commission, porte sur les ristournes. Même s’il concerne un cas très précis, nous pensons que les problèmes financiers que rencontrent certains hôpitaux doivent plutôt trouver leur solution dans une intervention des agences régionales de santé ou dans une renégociation des tarifs. Le maintien même restreint des ristournes est contraire à la volonté de médicalisation de la biologie médicale.

C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement identique n° 8.

Même s’il encadre plus encore le cas de dérogation à l’interdiction des ristournes, l'amendement n° 39 rectifié pose le même problème de principe. Il ne peut y avoir de concurrence par les prix, par quelque mécanisme que ce soit. Seul le tarif réglementé est applicable.

La commission émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. J’entends parfaitement les préoccupations qui ont été exprimées quant au maintien de la capacité d’analyses médicales dans des territoires isolés. Vous ne voulez pas qu’aux déserts médicaux s’ajoutent des déserts d'analyses biologiques.

La question est de savoir si les ristournes sont la solution adaptée au problème.

M. Claude Dilain. Tout à fait !

Mme Marisol Touraine, ministre. Vous vous placez sur le terrain exclusif de la relation financière, alors qu’il s’agit bien plutôt de déterminer des coopérations entre les établissements de santé et des laboratoires. Il faut en effet établir des conventions de bonne qualité avec des laboratoires situés plus loin géographiquement, quand les laboratoires de proximité font défaut, ce qui arrive. En revanche, quand les laboratoires sont « petits » et, par conséquent, fragiles, il est nécessaire de prévoir des conventions renforçant leur rôle en lien avec les établissements de santé.

Les agences régionales de santé ont indiscutablement un rôle à jouer dans la structuration de l'offre de santé sur un territoire.

Cela étant, comment considérer que l'enjeu est exclusivement financier et que l’on puisse contester, de façon générale, la logique du dumping – car c'est bien de cela qu’il s’agit –, mais l'accepter pour certains territoires ? Je doute d’ailleurs que cela permette d’atteindre l’objectif que l’on se fixe, car, si l’on fait du dumping, viendra un moment où les petits laboratoires seront eux-mêmes mis en danger.

Je suis particulièrement sensible aux inquiétudes que vous exprimez. Je doute cependant que la réponse retenue soit appropriée. C'est la raison pour laquelle j’émets un avis plutôt défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Mme Catherine Génisson. Les revendications exprimées par les auteurs de ces amendements sont tout à fait légitimes, vous l'avez d'ailleurs souligné, madame la ministre, et votre réponse est tout à fait convaincante.

Il faudrait toutefois que cela figure noir sur blanc dans la loi : oui, il relève de la responsabilité des agences régionales de santé d'assurer l'égalité d'accès aux examens biologiques sur l'ensemble du territoire, en fonction des spécificités de chaque territoire.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. J’évoquerai un cas concret. Les groupements hospitaliers interdépartementaux existent ; il faut donc s'affranchir de la barrière départementale. Le groupement hospitalier Aube-Marne que je connais, étant un élu de la Marne, n'a pas encore la taille critique suffisante pour maintenir un laboratoire accrédité et est en train d’établir une convention avec le laboratoire du centre hospitalier de Troyes.

Cette situation entraîne indéniablement des frais de transports pour les analyses quotidiennes, mais également en période d'urgence. La difficulté n’est pas tant d'organiser un transport pour acheminer l'ensemble des analyses d'un groupement hospitalier vers le laboratoire qui est loin que d’intervenir en cas d'urgence ou lorsqu’il convient de réaliser dans la journée des examens à la demande du praticien. Cela engendre des frais supplémentaires. Or ces groupements hospitaliers sont soumis à la tarification à l’activité et ont besoin d'équilibrer leurs budgets, alors que ceux-ci sont déjà déficitaires.

Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, nous avons pu constater les difficultés auxquelles doivent faire face les hôpitaux. Il ne me paraît pas aberrant d’établir une convention qui contienne un chapitre financier, de façon que chaque groupement ou hôpital puisse s’y retrouver financièrement. Il y va de l'équilibre budgétaire, me semble-t-il.

Il s'agit d'une ristourne au sens non pas mercantile du terme, mais fonctionnel, afin que le groupement hospitalier local n’ait pas à assumer la prise en charge totale des frais. Ce serait sinon lui infliger une double peine : plus de laboratoire et une pénalisation financière.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. Je vous ai écouté avec attention, madame le ministre. Vous avez évoqué des conventions passées avec les petits laboratoires. Comporteront-elles des clauses financières ? Parler de « ristourne » est inapproprié. Cela étant, un laboratoire qui est situé à une certaine distance et vient effectuer une dizaine ou une vingtaine de prélèvements dans un établissement public est en droit de facturer pour chacun des actes la totalité de ce qui correspond à cet acte.

Dans ces conditions, si aucun accord financier n’est adossé à la convention qui sera conclue avec les laboratoires, l'établissement public en subira bien entendu les conséquences. En revanche, si ce volet financier existe, compte tenu du nombre d'actes qu’il effectue chaque jour dans cet établissement, le laboratoire pourra consentir non pas une ristourne, mais un abattement financier.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je partage tout à fait les propos de Gilbert Barbier.

Je précise simplement, madame la ministre, qu’il ne faut pas priver les établissements publics d'une ressource, eu égard à la répétition de l’acte. Les établissements publics, en particulier les hôpitaux, se trouvent dans une situation financière telle qu’il faut leur permettre de réaliser des économies.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Dilain, pour explication de vote.

M. Claude Dilain. Je suis sensible aux difficultés qui sont exposées, y compris dans l’exemple concret qui a été évoqué. Il n'en demeure pas moins que je trouve extrêmement dangereux de faire intervenir la notion non pas de ristourne, mais de moins-disant financier pour un acte médical. C’est un précédent qui pourrait avoir des conséquences extrêmement inquiétantes.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, hier matin, lors de la réunion de la commission, nous avons adopté l’amendement n° 52 déposé par le rapporteur à l'article 7 bis, dont l’objet peut satisfaire les préoccupations que vous exprimez.

En revanche, je partage les propos de notre collègue concernant les dangers de l'introduction de tarifs différenciés. L'article 5 prévoit justement un même tarif pour tous.

M. Jacky Le Menn, rapporteur. Oui !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Il ne faut pas introduire une concurrence par les prix. Aussi, il convient d’être vigilant à cet égard, en évitant de parler de rémunération et en tout cas dans la convention qui pourrait être mise en place.

L'amendement n° 52 apporte déjà une première réponse. Il va de soi que, lors de l’examen de ce texte par l'Assemblée nationale, Mme la ministre et les députés pourront faire évoluer le dispositif, en précisant encore le rôle des agences régionales de santé afin de prendre en compte la réalité des territoires dépourvus de laboratoires de biologie médicale.

J’ai tenu dès à présent à évoquer l’article 7 bis. Il ne faut pas introduire de concurrence par les prix, qui pourrait être préjudiciable au secteur de la biologie médicale.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos  2 rectifié sexies et 8.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 39 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels après l'article 5
Dossier législatif : proposition de loi portant réforme de la biologie médicale
Article additionnel après l'article 6 (début)

Article 6

Après l’article L. 6213–2 du même code, il est inséré un article L. 6213-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6213–2–1. – Dans les centres hospitaliers et universitaires et dans les établissements liés par convention en application de l’article L. 6142–5, des professionnels médecins ou pharmaciens, non qualifiés en biologie médicale et recrutés dans une discipline biologique ou mixte, sur proposition des sections médicales et pharmaceutiques du Conseil national des universités, exercent les fonctions de biologiste médical, après avis de la commission mentionnée à l’article L. 6213–12, lorsqu’ils justifient d’un exercice effectif d’une durée de trois ans dans des structures et laboratoires de biologie médicale. Ces professionnels exercent leurs fonctions dans le domaine de spécialisation correspondant à la sous-section médicale ou à la sous-section pharmaceutique du Conseil national des universités dont ils dépendent. »

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacky Le Menn, rapporteur. J’ai souhaité m’exprimer sur l’article afin de rappeler les raisons pour lesquelles, selon moi, il est non seulement équilibré, mais important.

Cet article est équilibré parce qu’il est le fruit d’une longue négociation entre les biologistes hospitaliers et la Fédération hospitalière de France, d’une part, les doyens de facultés et plusieurs professeurs de sur-spécialité de la biologie médicale, d’autre part.

Le Sénat s’est opposé à ce que l’on puisse recruter des scientifiques et des vétérinaires sur des postes de CHU. Cet article rend ces recrutements impossibles. Seuls pourront être recrutés sur ces postes sans avoir le DES de biologie médicale des médecins et des pharmaciens, dans le cadre d’une procédure contraignante et sans possibilité d’exercer autrement que dans leur spécialité d’origine.

Évidemment, pour les postes en CHU, priorité sera donnée aux titulaires du DES. À l’heure actuelle cependant, il semble qu’il n’y ait pas suffisamment de candidats issus de la filière de biologie médicale.

Écarter les scientifiques et les vétérinaires des postes en CHU n’est pas une solution si évidente qu’il y paraît. J’ai reçu un professeur au collège de France, Jean-Louis Mandel, qui est titulaire de la chaire de génétique humaine et médecin hospitalier. Il est venu plaider pour le recrutement de scientifiques et de vétérinaires au nom de l’intérêt de la recherche dans les CHU. Son analyse et son expérience ne sont pas à prendre à la légère et il faudra que le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de la santé se rapprochent pour trouver une solution.

Nous avons néanmoins écarté tous ceux qui ont une autre formation de base que la médecine ou la pharmacie, afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur la volonté de médicalisation de la profession et pour trouver une voie moyenne entre des positions divergentes mais également légitimes.

Cet article vise donc à trouver un équilibre, ce qui n’est jamais facile. Je pense de surcroît que cette disposition est très importante pour la formation des biologistes eux-mêmes. L’enseignement des sur-spécialités comme l’hématologie, la génétique ou la virologie, qui prennent de plus en plus de place dans l’évolution de cette discipline, doit pouvoir être confié à des spécialistes. Sinon, on risque d’appauvrir la formation, non seulement des biologistes, mais de tous les médecins.

Aussi, je souhaite que l’article 6 sorte de nos débats le moins altéré possible.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Au cours de la discussion générale, j’ai eu l’occasion de préciser que notre groupe s’était, dès 2010, réjouit que l’ordonnance du 13 janvier de la même année encadre plus strictement le recours par les établissements publics de santé à des non-titulaires du DES de biologie médicale pour diriger un service de biologie.

Encadrement plus strict et non interdiction, puisque, contrairement à ce qui a pu être dit, notamment lors de l’examen de l’article 52 de la proposition de loi due à l’initiative de Jean-Pierre Fourcade, les CHU pouvaient, malgré l’ordonnance de 2010, continuer à recruter des non-titulaires dès lors que ces derniers remplissaient les conditions posées par les dérogations existantes.

Cet article permet donc aux dirigeants des centres hospitaliers et universitaires de recruter et de nommer des professeurs des universités-praticiens hospitaliers et des maîtres de conférences des université-praticiens hospitaliers non titulaires du DES de biologie médicale à la tête d’un service hospitalier de biologie médicale.

Nous prenons acte de cet article, qui semble aujourd’hui faire l’objet d’un certain consensus, y compris auprès des organisations syndicales, et c’est donc un point important.

Pour autant, nous émettons un doute.

Notre groupe est, pour l’ensemble des professions, particulièrement sensible à la reconnaissance et au respect des diplômes et des qualifications. Le diplôme constitue en effet le premier passeport des jeunes professionnels pour accéder à un emploi et aux responsabilités. Il atteste de l’acquisition de connaissances spécifiques par le jeune professionnel. Or, recruter des non-titulaires, malgré les conditions posées par cet article, revient au final à faire comme si ces années passées à se former, comme si cet enseignement particulier, dédié à la biologie, n’étaient pas si indispensables que cela pour exercer.

Les jeunes peuvent alors légitimement s’interroger sur le bien-fondé de poursuivre une formation spécialisée si cette dernière ne leur garantit en rien d’être prioritairement recruté au sein des services qui leur sont normalement destinés par leur formation.

Cela étant, nous ne sommes pas partisans d’une fermeture totale, mais d’une ouverture encadrée.

Nous avons voulu, davantage encore que lui, garantir l’équilibre dont vient de parler M. le rapporteur à travers un amendement de précision qui concerne la qualité de l’avis donné par la commission. Nous espérons que cet amendement sera retenu par notre assemblée.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 6 est présenté par MM. Vanlerenberghe et Amoudry, Mmes Dini et Jouanno, MM. Marseille, Roche et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC.

L'amendement n° 14 est présenté par MM. Milon, Gilles et Savary, Mmes Deroche et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. de Raincourt, Mme Debré, MM. Dériot et Fontaine, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton et Mmes Procaccia et Bouchart.

L'amendement n° 40 rectifié est présenté par MM. Barbier, Alfonsi, Baylet, Bertrand, Chevènement, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour présenter l’amendement n° 6.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. L’objet de cet amendement est de supprimer l’article 6 du texte. Bien que M. le rapporteur juge sa rédaction équilibrée, il crée une dérogation nouvelle qui permet à des professionnels médecins ou pharmaciens non qualifiés en biologie médicale d’exercer en CHU les fonctions de biologiste médical. Cette dérogation ne se justifie pas à nos yeux.

En effet, l’ordonnance Ballereau n’a pas réservé l’exercice de la biologie médicale aux seuls détenteurs du diplôme d’études spécialisées de biologie médicale. Différentes voies dérogatoires sont déjà prévues.

C’est notamment le cas pour les médecins et les pharmaciens non titulaires du DES de biologie médicale, après obtention de la qualification en biologie médicale par les ordres respectifs.

De plus, à condition qu’ils n’exercent pas d’activité de biologie médicale, les personnels enseignants et hospitaliers des CHU n’ayant pas les diplômes requis peuvent continuer à réaliser des activités d’enseignement et de recherche fondamentale et appliquée, après nomination par le Conseil national des universités, le CNU, sans induire une rupture d’égalité de la prise en charge des patients.

Cette ordonnance ouvre également une troisième voie, dont je vous épargnerai les détails, pour l’exercice de la biologie médicale dans un domaine de spécialisation par des biologistes non-titulaires du DES.

Notre sentiment est donc qu’il n’y a pas de raisons objectives de créer une voie nouvelle pour l’exercice de la biologie médicale.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l'amendement n° 14.

M. Alain Milon. Tout d’abord, madame la présidente, je vous informe que nous demanderons un scrutin public sur ces trois amendements identiques.

L’ordonnance du 13 janvier 2010 sur la biologie médicale n’a pas réservé l’exercice de la biologie médicale aux seuls détenteurs du diplôme d’études spécialisées de biologie médicale.

Différentes voies dérogatoires sont donc d’ores et déjà prévues.

Cette ordonnance prévoit en effet une dérogation pour les médecins et pharmaciens non titulaires du DES de biologie médicale, après obtention de la qualification en biologie médicale par les ordres respectifs.

De plus, les personnels enseignants et hospitaliers – médecins, pharmaciens ou scientifiques – des centres hospitaliers et universitaires peuvent continuer à réaliser des activités d’enseignement et de recherche fondamentale et appliquée de haut niveau après nomination par le Conseil national des universités, sans induire une rupture d’égalité de la prise en charge des patients.

L’ordonnance ouvre également une troisième voie pour l’exercice de la biologie médicale dans un domaine de spécialisation par les biologistes non titulaires du DES de biologie médicale.

Il n’y a donc aucune raison de créer une voie nouvelle pour l’exercice de la biologie médicale.

Nous considérons que cet article, en créant une nouvelle dérogation, dévalorise la formation de biologiste médical et nous rappelons que le Sénat a rejeté à de nombreuses reprises des dispositions similaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 40 rectifié.

M. Gilbert Barbier. Le Sénat s’est en effet prononcé à plusieurs reprises sur ce texte et l’a rejeté.

J’ai l’impression que l’on se dirige de plus en plus vers l’abrogation de ce qui faisait le fondement de la pratique hospitalo-universitaire, à savoir le triptyque soins, enseignement, recherche. On se contente désormais d’exiger de certains d’entre eux l’enseignement et la recherche, les soins passant à la trappe.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacky Le Menn, rapporteur. Cet article est le fruit d’un compromis entre les biologistes hospitaliers et les doyens des facultés de médecine.

M. Gilbert Barbier. C’est le projet des doyens !

M. Jacky Le Menn, rapporteur. Je note que les chercheurs souhaiteraient que nous allions encore plus loin, en ouvrant des postes aux scientifiques et aux vétérinaires. Nous nous limitons aux médecins et aux pharmaciens.

Je suis personnellement convaincu que cette dérogation est nécessaire pour garantir la meilleure formation possible des internes, qui ont besoin d’avoir comme enseignants les meilleurs spécialistes.

Nous avons, en commission, précisé qu’en plus de la recherche et de l’enseignement, les personnes recrutées devront exercer des fonctions hospitalières.

Dès lors, je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis est également défavorable.

J’entends bien les arguments avancés par plusieurs des sénateurs qui sont intervenus, mais je tiens à préciser que la dérogation prévue à l’article 6 est strictement encadrée.

Il ne s’agit pas d’ouvrir les vannes ou de permettre que tout un chacun puisse, au sein des CHU, pratiquer des actes ou une activité de biologie médicale.

Il s’agit effectivement, en premier lieu, d’établir une différence entre la pratique de ville et celle qui se déroule au sein des CHU.

Monsieur Barbier, vous ne pouvez pas, d’un côté, dire que cet article a été soufflé par les doyens et, de l’autre, regretter que l’intégration entre l’enseignement, la recherche et les soins soit mise en cause. En effet, ce qui fait précisément la spécificité du CHU, et ce à quoi les doyens sont, eux aussi, particulièrement attachés, c’est le fait d’avancer conjointement sur ces trois terrains.

C’est précisément pour respecter cette spécificité du CHU, à savoir que le soin et la pratique sont adossés à l’enseignement et à la recherche, qu’une différence est inscrite dans le texte entre la formation des biologistes médicaux amenés à exercer en ville et celle des biologistes susceptibles d’exercer en milieu hospitalier.

Pour autant, la dérogation, loin d’être largement ouverte, reste strictement encadrée. Le professionnel doit tout d’abord avoir préalablement exercé trois ans au moins dans un laboratoire hospitalier, ce qui représente tout de même l’acquisition de compétences qu’il est difficile de nier. Puis une commission spécialisée intervient et donne un avis, ce qui signifie qu’il n’y a pas d’automaticité entre l’exercice au CHU et le fait de pouvoir disposer de la dérogation telle qu’elle a été prévue.

Par ailleurs, plusieurs éléments ne figurent pas dans le texte, alors même qu’ils étaient demandés par certains, qui voulaient que l’on aille plus loin dans la dérogation. Ainsi, le texte ne prévoit pas que la dérogation puisse être étendue aux personnels scientifiques qui ne sont ni médecins ni pharmaciens, ce qui aurait pu être envisagé, mais n’a pas été acté. Il arrive que ces personnels scientifiques soient très fortement impliqués dans le fonctionnement d’un CHU ; pourtant, le texte n’a pas retenu cette dérogation.

Je tiens enfin à préciser que les personnels hospitaliers concernés doivent évidemment concourir à l’ensemble des obligations de service public attachées à leur fonction. Il ne s’agit donc pas d’une dérogation accordée sans contrepartie. Ces personnels hospitaliers devront ainsi, au même titre que l’ensemble des autres biologistes, participer à l’organisation de la permanence de soins, c’est-à-dire aux astreintes de laboratoire. Je me permets d’insister sur ce point, car la question de la permanence des soins est clairement posée dans certains de nos territoires. Nous avons donc besoin que l’ensemble de ceux qui participent à ces missions soient également concernés par ces astreintes. C’est aussi un effet favorable de l’article 6 que de garantir cette permanence des soins.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Mme Catherine Génisson. Je souscris à l’argumentaire de M. le rapporteur, à savoir qu’il s’agit d’un texte d’équilibre.

J’entends également l’argumentation forte de Mme la ministre, qui indique que si ces personnels sont assujettis à l’ensemble des responsabilités qu’ils doivent assumer en milieu universitaire, notamment en termes de recherche, ils ont aussi l’obligation d’assurer la permanence des soins, ce qui est en effet fondamental.

En revanche, afin qu’aucun sentiment de concurrence déloyale ne s’installe entre les étudiants qui préparent le DES en quatre ans et les professionnels qui travaillent dans ces services hospitaliers, le plus souvent d’ailleurs dans des centres hospitalo-universitaires, je souhaiterais que soit affirmée la possibilité d’accueillir tous les étudiants qui préparent leur DES, ou qui ont l’intention de le préparer, au sein de ces services. Il me semble en effet qu’il s’agissait de l’une des principales inquiétudes des étudiants en biologie et des biologistes, qui se faisaient l’écho des craintes de leurs jeunes confrères. Ils voulaient avoir la certitude qu’ils conserveraient des places dans ces services au cours de leurs quatre années d’études de DES.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacky Le Menn, rapporteur. Madame la présidente, je sollicite une brève suspension de séance.

Mme la présidente. Mes chers collègues, à la demande de la commission nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à dix-neuf heures quarante-huit.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 6, 14 et 40 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 91 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Majorité absolue des suffrages exprimés 173
Pour l’adoption 186
Contre 158

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 6 est supprimé et les amendements nos 1 rectifié ter et 30 n’ont plus d’objet.

Toutefois, pour la clarté des débats, j’en rappelle les termes.

L'amendement n° 1 rectifié ter, présenté par MM. Raoul et Kerdraon, Mme Génisson, MM. Daudigny et Teulade, Mmes Emery-Dumas, Printz et Schillinger, MM. Cazeau, Jeannerot et Godefroy, Mme Alquier, M. Labazée, Mmes Demontès, Meunier, Campion et les membres du groupe socialiste et apparentés, était ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

et dans les établissements liés par convention en application de l’article L. 6142-5

par les mots :

, dans les établissements liés par convention en application de l’article L. 6142-5 et dans les centres de lutte contre le cancer

L'amendement n° 30, présenté par Mmes Cohen, David et Pasquet, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

avis

insérer le mot :

favorable

Article 6
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Article additionnel après l'article 6 (interruption de la discussion)

Article additionnel après l'article 6